Conférence Territoriale du Grand Roissy

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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Conférence Territoriale du
Grand Roissy
Roissy-en-France, le 19 juin 2013
Sommaire
Accueil
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Introduction
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Première table ronde. Actions à l’échelle du Grand Roissy : bilan et perspectives
7
Deuxième table ronde. Emploi et formation : situation actuelle, réponses possibles
17
Troisième table ronde. Emploi et formation : comment anticiper ?
24
Conclusion
28
Clôture
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Accueil
Philippe COME
Je vous remercie pour votre présence à cette troisième conférence territoriale du
Grand Roissy, conférence importante qui nous permettra de faire le point sur ce qui a pu
se passer au cours de l’année 2012 et du début de l’année 2013, mais également sur les
projets et les actions. Notre emploi du temps est particulièrement chargé, et je remercie
l’ensemble des intervenants d’avoir accepté de jouer le jeu de la synthèse.
Je laisserai le soin à André Toulouse, maire de Roissy-en-France, à Jean-Pierre Blazy,
député de la 9e circonscription du Val d’Oise, et à Alain Amedro, Vice-président du Conseil
Régional d’Ile-de-France, de procéder à l’ouverture de cette conférence.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Introduction
André TOULOUSE
Maire de Roissy-en-France
Monsieur le Préfet de Région, Monsieur le Président de la Région Ile-de-France,
Monsieur le Député, Monsieur le Président de l’Association des Collectivités du Grand
Roissy, Mesdames et Messieurs les Maires, mes chers collègues, Monsieur le Directeur
Général de l’EPA, Mesdames et Messieurs, la municipalité de Roissy-en-France, que j’ai
l’honneur de représenter, est fière de vous accueillir pour cette troisième conférence
territoriale du Grand Roissy, souhaitée par Monsieur le Préfet de Région et soutenue par le
Président de la Région Ile-de-France. Nous pouvons également remercier Monsieur le
Directeur Général de l’EPA Plaine de France d’avoir organisé cette conférence, qui nous
permettra d’aborder la problématique des emplois et de la formation sur le pôle du Grand
Roissy. Cette conférence est une suite logique donnée aux précédents travaux liés à
l’économie et aux contrats de développement territorial. Nous nous devons de saluer et de
remercier le soutien de notre Préfet de Région dans la démarche entreprise par tous les
maires, unis dans l’association du Grand Roissy, présidée par Monsieur Patrick Renaud.
Aussi, permettez-moi de présenter à tous les participants mes meilleurs vœux pour la
réussite de cette troisième conférence du Grand Roissy.
Jean-Pierre BLAZY
Député de la 9e circonscription du Val d’Oise
Mesdames et Messieurs, ce rendez-vous annuel marque certainement l’affirmation
progressive de notre territoire, son unité, sa cohérence. Un territoire qui se structure bien
évidemment autour de l’aéroport de Roissy et de sa dynamique, mais qui a trop longtemps
souffert de sa fragmentation, alimentée par des gouvernances éclatées, des transports en
commun inadaptés, des nuisances aériennes contraignantes ou des retombées fiscales
inégalement réparties. Telles sont les contraintes auxquelles nous sommes confrontés.
Ce rendez-vous que constitue la Conférence du Grand Roissy ne saurait malgré tout
suffire à construire une politique pour ce territoire. La question de la gouvernance se pose
toujours : des propositions avaient été formulées pour organiser la gouvernance du Grand
Roissy. Elles ne sont pas encore parfaites et n’ont pas été transcrites dans la réalité : ce
travail doit aujourd'hui être poursuivi. L’Association des Collectivités du Grand Roissy
constitue une première réponse, mais il est nécessaire d’aller plus loin. Cette question de
la gouvernance doit prendre en compte de nombreux éléments, parmi lesquels le
renforcement de l’intercommunalité en Val d’Oise et en Seine-et-Marne. La carte de
l’intercommunalité est sur le point d’être achevée : notre territoire a besoin
d’intercommunalités de dimensions suffisantes pour pouvoir peser au sein de la région
métropole. Le Parlement est saisi d’un projet de loi sur la métropole de Paris et
l’intercommunalité. Le Sénat, nous le savons, n’a pas voté le texte du Gouvernement. Il
appartient désormais à l’Assemblée Nationale d’étudier les articles concernés pour trouver
le compromis qui permettra de maintenir un texte ambitieux.
Le second élément, s’agissant de la gouvernance du Grand Roissy, serait de mon
point de vue la mise en place d’une communauté aéroportuaire. J’ai souhaité préparer une
proposition de loi qui sera déposée à l’Assemblée Nationale en vue d’améliorer le dispositif
actuel, qui est resté virtuel, afin de le consolider et d’en améliorer le financement. Créer la
communauté aéroportuaire de Roissy permettrait enfin de réunir les acteurs publics et
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privés du territoire aéroportuaire, autour de compétences définies par la loi :
environnement, urbanisme, emploi, information, formation, etc. Nous devons avancer sur
ce chantier, qui constitue un élément de gouvernance majeur.
A la jonction des enjeux de la gouvernance et du développement économique, un sujet
s’impose désormais à nous, avec la restructuration de l’usine PSA, qui fait partie du Grand
Roissy avec les territoires d’Aulnay et de Gonesse, sans oublier également le territoire de
Villepinte. Les acteurs publics doivent renforcer leur collaboration pour réussir la
reconversion de ces territoires. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé, avec
Gérard Ségura, maire d’Aulnay, de créer une entente entre les villes d’Aulnay-sous-Bois et
de Gonesse, ayant pour objet cette question de la reconversion du site d’Aulnay-sousBois. Cet outil de gouvernance, qui est prévu par le Code Général des Collectivités
Territoriales, aura pour objet spécifique cette restructuration, en relation avec
l’aménagement du Triangle de Gonesse et avec l’ensemble des acteurs. Les conseils
municipaux de nos deux villes doivent délibérer dans le courant du mois.
Autre enjeu majeur : les transports. Il me semble que nous avons progressé de façon
incontestable sur cette problématique, avec le projet du nouveau Grand Paris. Il reste
toutefois un souci, qui a été évoqué récemment : nous devons faire en sorte que, lors du
prochain conseil de surveillance de la Société du Grand Paris, l’enquête publique pour la
ligne 17 soit concomitante avec la ligne numéro 16, c'est-à-dire en 2014 et non en 2015.
Sur cette question du transport, nous sommes unanimes au sein de l’Association des
collectivités du Grand Roissy pour considérer que la vision actuelle de la liaison CreilRoissy constitue un véritable sujet de mécontentement. La commission chargée de
formuler des préconisations sur la réalisation du schéma national des infrastructures de
transports devrait rendre sa copie la semaine prochaine : le Ministre des Transports a déjà
annoncé que le tracé choisi serait le plus pénalisant. Il s’agit d’un sujet sur lequel les élus
du territoire doivent se mobiliser.
Autre sujet de mobilisation : le plan d’exposition au bruit. De nombreuses villes, mais
également de nombreux villages, dans le Val d’Oise et en Seine-et-Marne, sont concernés
par cette problématique. Nous savons qu’un rapport a été remis au Ministre et aurait dû
être remis au Parlement, dans la perspective de l’évolution du dispositif de l’article L.147-5
du Code de l’Urbanisme. Il est clair que ce rapport reconnaît les difficultés qui sont
imposées par le PEB. Le terme « casse-tête » a ainsi été employé dans le rapport, tant
pour les services de l’État que pour les préfets et les élus. Il s’agit d’un sujet majeur, qui
concerne non pas une volonté d’étendre nos villes mais plutôt l’enjeu du renouvellement
urbain, afin d’éviter la spirale, déjà enclenchée, de la dégradation urbaine et sociale. Nous
continuerons à nous mobiliser, en particulier à l’Assemblée Nationale, pour faire évoluer le
dispositif. Il s’agit notamment d’un sujet important pour le Triangle de Gonesse, d’autant
que nous avons à finaliser le contrat de développement territorial.
Enfin, et tel est le sujet de notre conférence, la formation fera prochainement l’objet
d’un débat. Une démarche sera engagée par la Région et par l’État. Une cartographie
devrait être présentée à cette occasion. Il s’agit d’un sujet majeur, et les entreprises en ont
conscience, de même que les élus. Les populations souffrent de cette inadéquation entre
les offres d’emploi qui sont proposées sur la plateforme ou dans les pôles d’activités et leur
niveau de qualification. Ce sujet, sans être nouveau, doit nous mobiliser. Je me réjouis
donc que ce thème soit choisi aujourd'hui. J’espère que, au-delà de cette conférence, nous
serons en mesure d’enclencher sur ce sujet majeur des perspectives de travail, en
considérant que des marges de progrès existent, par exemple en rationnalisant les
structures existantes en matière d’emploi et de formation, de façon à les simplifier et à les
rendre plus efficaces, au service des populations et de la formation des jeunes et des
adultes. Tel est le souhait que je formule à l’occasion de l’ouverture de cette conférence.
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Alain AMEDRO
Vice-président du Conseil Régional d’Ile-de-France
Mesdames et Messieurs, je tiens tout d’abord à vous dire combien je suis heureux de
vous retrouver ici aujourd'hui, au nom de Jean-Paul Huchon. Ces conférences du Grand
Roissy constituent un moment important s’agissant des échanges qui ponctuent le travail
de fond qui s’élabore ici au fil des ans. Les assises du Grand Roissy, puis les conférences
territoriales qui leur ont succédé, nous permettent de nous rendre compte que le Grand
Roissy prend progressivement corps, grâce à l’implication de tous les acteurs du territoire,
qu’ils soient élus locaux, entrepreneurs, représentants d’associations ou habitants : qu’ils
en soient ici remerciés.
Ce territoire ne nous intéresse pas seulement comme pôle fonctionnel : il s’agit d’un
lieu de vie, qui fait partie intégrante de l’Ile-de-France, et c’est à ce titre que la région s’y
attache. Depuis un an, cette dynamique a progressé, avec le succès du Grand Roissy qui
profite en retour à toute l’Ile-de-France. L’emploi y est en pleine croissance :
150 000 personnes y travaillent aujourd'hui. Son développement économique est reconnu,
dans une période pourtant difficile. Le Salon du Bourget nous montre combien
l’aéronautique est l’un des secteurs florissants en France, en particulier dans notre région.
Le Président d’Aéroports de Paris, Augustin de Romanet, vous le dira mieux que moi. Le
Grand Roissy est aujourd'hui un moteur de développement en Ile-de-France. Son succès
est tel que les entreprises manquent de main d’œuvre, et l’extension de leurs activités a
des impacts considérables sur le territoire. Voilà un développement qui a toutes les
apparences d’un succès, qui doit être amplifié, mais qui demande également à être
particulièrement maîtrisé pour qu’il soit réellement profitable et bénéfique pour tous ses
habitants, notamment ceux qui peuvent en subir les nuisances ou qui ne bénéficient pas
encore de ses retombées. L’accessibilité est ainsi de deux ordres : les transports collectifs
d’une part, la formation et l’emploi d’autre part. Tel est le but de ce travail collectif que nous
menons. La formation professionnelle constitue à ce titre un enjeu stratégique majeur.
Nous savons que, dans trop de nos quartiers, des jeunes sont au chômage, alors même
que nous disposons d’un pôle majeur de développement. Le progrès dans ce domaine
passe par une plus grande adéquation entre la qualification des actifs et les offres
d’emplois du territoire : tel est le cœur de notre conférence.
La mise en place de Hubstart Paris Région, qui associe l’Agence Régionale de
Développement, Aéroports de Paris, les départements de Seine-et-Marne, de Seine-SaintDenis et du Val d’Oise, l’ensemble des opérateurs économiques, les associations et les
établissements publics du Grand Roissy, constitue également une très bonne nouvelle.
Ses statuts seront adoptés demain en séance du Conseil Régional : cette association
contribuera de façon majeure à développer l’activité et l’emploi sur le territoire.
De même, Roissy 2.0, lancé en novembre 2012, joue un rôle important pour faciliter les
contacts entre les chefs d’entreprises, et contribue ainsi à créer un esprit propre au
territoire.
Depuis un an, nous avons également progressé dans les projets d’aménagement. La
Commission Territoriale du Grand Roissy a été créée au sein de l’EPA Plaine de France.
Des commissions se sont réunies au sein de l’Association du Grand Roissy, dont j’ai pu
mesurer à la fois le programme de travail et l’intensité des idées, dans l’ensemble des
domaines. Trois projets de contrat de développement territorial sont en route sur le
territoire du Grand Roissy. Bien sûr, la réalisation du nouveau Grand Paris devrait faciliter
les déplacements dans un lieu qui souffre de difficultés en matière de desserte, ce qui a
été confirmé par le Premier Ministre le 6 mars dernier. Il s’agit de deux pôles importants :
d’abord le plan de mobilisation, avec 7 milliards d’euros sur l’existant – et nous savons
combien le RER B notamment a besoin d’intensifier sa rénovation – et le Grand Paris
Express, qui doit mieux relier nos territoires. Enfin, j’évoquerai la révision du schéma
directeur de la région Ile-de-France, que j’ai l’honneur de conduire et qui a fait du Grand
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Roissy l’un des principaux territoires d’intérêt métropolitain, et qui touche aujourd'hui à son
terme. Le schéma directeur Ile-de-France 2030 sera définitivement adopté à l’automne
2013 et contribuera également à maîtriser, à organiser et à dynamiser le développement
du Grand Roissy. Car maîtriser son développement tout en le valorisant, tel est bien
l’enjeu. Cela conduit à s’assurer de la complémentarité de l’ensemble des projets qui
naissent sur ce territoire, afin que l’ensemble des initiatives qui sont lancées depuis
quelques années dans le Grand Roissy répondent à trois exigences, qui constituent les
trois piliers du schéma directeur :
-
l’augmentation de l’attractivité du territoire,
l’augmentation de l’offre en logements,
la préservation de l’espace agricole et naturel.
Tel est le principal souci de la région, car un développement anarchique ne permettrait
pas d’accueillir les habitants dans un environnement préservé et valorisé. Un territoire qui
ne bénéficierait pas d’une offre de logements suffisante et adéquate, ni de transports
collectifs de qualité, ne serait pas viable à long terme. La cohérence de l’aménagement
constitue donc un enjeu majeur pour le développement économique. Maîtriser son
développement suppose également l’existence de structures et de modes de gouvernance
adéquats, comme Jean-Pierre Blazy l’a rappelé. Quelle que soit la solution choisie, on ne
peut imaginer un Grand Roissy coupé en deux. On ne peut donc imaginer que le Grand
Roissy, qui fait partie intégrante du Grand Paris, en soit tenu à l’écart. À cet égard, le
concept de pôle doit probablement être dépassé. Plusieurs idées sont aujourd'hui
évoquées, et la Région est prête à y travailler avec l’État, les communes et les conseils
généraux, dont je salue les représentants présents aujourd'hui. Nous devons trouver un
accord rapide sur un calendrier qui permettra d’aboutir à une gouvernance plus solide.
Le Grand Roissy progresse bien. Tous les acteurs du territoire agissent et travaillent
ensemble. C’est ce chemin que nous devons poursuivre. Cette conférence nous en donne
une fois de plus l’occasion.
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Première table ronde. Actions à l’échelle
du Grand Roissy : bilan et perspectives
I) Présentation
Damien ROBERT
Directeur général de l’Établissement Public d’Aménagement Plaine de France
J’introduirai cette première table ronde par quelques mots qui permettront d’aborder les
avancées du Grand Roissy. En effet, la situation progresse de manière très significative
sur un grand nombre de sujets. Les acteurs du territoire, qu’il s’agisse des élus ou des
institutions, ont en effet décidé de penser plus collectivement sur un certain nombre de
thématiques. Sans vouloir – ni pouvoir – être exhaustif, j’ai choisi de mettre en avant un
certain nombre de démarches sur lesquelles il me semble important de revenir pour lancer
le débat sur ces différentes questions.
La première démarche à avoir été initiée est une démarche d’élaboration d’un schéma
des transports en commun. Le territoire du Grand Roissy est aujourd'hui un territoire qui se
structure en termes de transports, notamment avec l’arrivée d’un certain nombre de
transports lourds, qu’il s’agisse du Grand Paris Express ou du Barreau de Gonesse. Audelà de ce schéma, nous avons fait en sorte de déterminer quelles étaient les liaisons les
plus structurantes, qui lient les grands pôles entre eux, de façon à favoriser le
développement et à assurer une desserte plus fine du territoire. Ce schéma, naturellement
piloté par le STIF, conjointement avec les élus du territoire, a été validé en janvier 2013.
Deuxième élément sur lequel nous avons travaillé : le schéma viaire. Chacun sait que
la question de la desserte viaire est particulièrement importante, étant donné la fonction
majeure de l’autoroute A1 en termes de desserte du Grand Roissy et d’aménagement de
ce territoire. Nous avons également choisi, sur ce sujet, de mener un travail de clarification
de la fonction entre les différentes voies du réseau, de façon à trouver des solutions qui
permettraient d’alléger l’A1, qui présente aujourd'hui quelques risques de saturation.
L’objectif, en définitive, est de réfléchir plus globalement, à l’échelle du Grand Roissy et du
Pôle métropolitain du Bourget, à la hiérarchisation des fonctions des différentes voies,
qu’elles soient nationales, départementales ou communales. Une démarche est en cours
avec la mise en place d’ateliers de travail, avec pour objectif de valider un schéma d’ici la
fin de l’année 2013.
Troisième sujet : nous avons mis en place un groupe de travail dans le but d’élaborer
un schéma agricole, dont l’objectif est d’apporter de la visibilité sur la préservation des
terres agricoles à long terme sur le vaste territoire du Grand Roissy. Il s’agit de préserver
ces terres agricoles à la fois en tant qu’espace naturel, mais également du point de vue de
leur fonctionnalité, de façon à protéger cet atout majeur pour le territoire. Ce schéma a
bien progressé : après avoir été discuté en comité de pilotage, il sera présenté en annexe
du Schéma de Cohérence Territorial. Je rappelle par ailleurs que la Seine-et-Marne est
entrée dans la même démarche : nous envisageons de travailler à la cohérence de ces
deux démarches de façon à établir une communauté de vision sur le territoire du Grand
Roissy.
Quatrième sujet : les CDT du Grand Roissy. Je rappelle que trois contrats de
développement territorial ont été validés sur le territoire du Grand Roissy. Ces documents
d’orientation nécessitent une certaine mise en cohérence, notamment vis-à-vis de la
réalisation du schéma directeur évoqué par Monsieur Amedro. Nous avons, sur ce sujet
également, pris l’initiative, à la demande d’un certain nombre de collectivités, de travailler à
la cohérence des différents projets qui sont institués dans les trois contrats de
développement territorial.
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
La dernière de ces démarches, déjà initiée voilà plus de 18 mois, concerne l’étude
« pétales », dont l’objectif est d’organiser, de formaliser l’organisation du territoire en
termes économiques. Nous avons fait en sorte de progresser dans cette voie, en nous
donnant pour objectif, avant la fin de l’année 2013, de proposer une charte
d’aménagement sur le Grand Roissy, charte qui serait la déclinaison de cette étude sur les
différents territoires et les différents espaces économiques.
II) Échanges
Philippe COME
Pour participer à cette table ronde, j’invite six personnes à me rejoindre, en
l’occurrence Jean-Luc Nevache, Préfet du Val-d’Oise, Bernard Corneille, Délégué du
Président du Conseil Général de Seine-et-Marne au Pôle du Grand Roissy, Alain Amedro,
Vice-président du Conseil Régional d’Ile-de-France, Patrick Renaud, Président de
l’Association des Collectivités du Grand Roissy, Bernard Cathelain, Directeur général
adjoint d’Aéroports de Paris et Frédéric Vernhes, Président de la Chambre de Commerce
et d’Industrie du Val-d’Oise, représentant le Grand Roissy Économique.
Messieurs, je vous remercie d’avoir accepté de participer à cette table ronde. Je
propose de débuter nos échanges avec Patrick Renaud, en lui donnant l’occasion de
présenter les travaux et les démarches de l’ACGR.
Patrick RENAUD
La carte qui est projetée représente l’Association des Collectivités du Grand Roissy. Il
reste toutefois à la préciser, dans la mesure où un certain nombre de communautés ont
récemment fusionné, tandis que d’autres communes, situées à la marge de la
circonférence de notre association, devraient prochainement nous rejoindre. Nous devrions
également accueillir Villeparisis, qui se situe au milieu de notre dispositif. Il nous reste
aujourd'hui une commune à convaincre, commune qui est aujourd'hui résistante à cette
association, ce qui est particulièrement gênant pour Clichy-Montfermeil qui souhaite nous
rejoindre : il s’agit en l’occurrence de la commune de Livry-Gargan. Nous devrons nous
rassembler pour convaincre cette municipalité de nous rejoindre. De leur côté, les trois
conseils généraux nous ont rejoints, ce qui constitue une très bonne nouvelle. Ils pourront
ainsi travailler avec nous, y compris dans le Bureau au sein duquel ils seront bien
représentés. De fait, nous pourrons travailler avec l’ensemble des organisations qui
concourent à ce Grand Roissy.
Ce territoire regroupe plus de 600 000 habitants avec, en son centre, un aéroport. Pour
une communauté, il s’agit d’une situation atypique, qui impose des réflexions nouvelles. Le
territoire s’étend sur trois départements, ce qui a causé un certain nombre de difficultés au
départ. Il reste aujourd'hui à trouver des solutions en commun pour exister dans le futur, y
compris en termes de gouvernance. L’objectif de l’Association est de porter collectivement
une voix unique, ce qui n’exclut pas pour autant un travail en commun au préalable. Cette
grande mobilisation qui a permis d’obtenir le Grand Paris Express, qui devait initialement
s’arrêter au Bourget, ce qui aurait été préjudiciable pour le secteur de Roissy, a montré la
grande détermination qui était la nôtre, nos députés en tête. Il était nécessaire de
récupérer ce segment de métro, dont l’enjeu en termes de développement est essentiel.
Notre ambition est forte. Nous avons déjà trouvé un accord pour établir un SCOT
(Schéma de Cohérence Territorial) en commun, ce qui n’est pas forcément simple au
regard de notre étendue sur trois départements et soixante communes. Cette ambition est
forte, certes, mais relève d’une véritable nécessité pour nos projets de développement
futur, tant en termes de transports que de logements ou de formation. Nous avons décidé
de travailler ensemble : pour ce faire, un certain nombre de commissions ont été mises en
place, que Didier Vaillant vous présentera d’ailleurs. À noter que, dès l’année prochaine,
nous sommes prêts à changer cette association en syndicat mixte, de façon à lancer un
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SCOT commun. Par ailleurs, nous devrons probablement réfléchir à une entente plus
grande sur l’ensemble de ce secteur, de façon à bien marquer notre détermination à
travailler ensemble sur les années qui viennent.
Didier VAILLANT
Patrick Renaud vient de l’indiquer, nous avons l’ambition d’établir un SCOT sur le
territoire du Grand Roissy. Encore faut-il s’en donner les moyens : nous avons ainsi décidé
de créer cinq commissions, pilotées par un élu référent de l’ACGR :
-
La Commission Environnement, présidée par Jean-Pierre Blazy, député-maire de
Gonesse,
La Commission Mobilité-Transport, présidée par Corinne Dupont, maire de MitryMory,
La Commission Économie-Emploi-Agriculture, présidée par Philippe Gente, maireadjoint d’Aulnay-sous-Bois,
La Commission Logement, présidée par moi-même,
La Commission Formation, présidée par Jean-Noël Moisset, vice-président de la
Communauté d’Agglomération Roissy Porte de France.
Nous avons donc une ambition et une méthode. En effet, nous ne sommes pas tous au
même niveau en termes d’intercommunalité. De fait, il convient à la fois de progresser
rapidement et de laisser à chaque collectivité le temps nécessaire pour avancer au rythme
qui leur convient. Dans un deuxième temps, nous nous employons à rechercher des
convergences : nous avons tous constaté que, depuis la création de l’Association, le fait de
se rencontrer et d’échanger régulièrement permet une progression plus rapide de nos
projets. L’objectif est de faire en sorte que, dans le courant du prochain mandat, nous
puissions nous doter d’un SCOT, ce qui nous conduit à nous doter progressivement d’un
certain nombre d’outils au sein de l’Association du Grand Roissy, comme un schéma des
espaces économiques ou des réflexions sur la complémentarité du territoire en termes de
logement. L’ambition est avant tout d’aboutir à une plus grande cohérence sur ce vaste
territoire qui est le nôtre.
Philippe COME
Vous avez évoqué à plusieurs reprises l’intégration de la Seine-et-Marne. Je propose
de passer la parole à Monsieur Corneille pour nous expliquer ce qui a motivé la décision
du Conseil Général d’adhérer à l’association.
Bernard CORNEILLE
Au cours de sa présentation, Damien Robert a évoqué l’étude des pétales, initiée par
l’État. La conclusion de cette étude conduisait à la nécessité d’appréhender l’aéroport à
360 degrés, démontrant ainsi que la Seine-et-Marne n’était pas un département à part, et
qu’elle était pleinement intéressée par la plateforme aéroportuaire. Il était nécessaire de
l’affirmer avec force. Depuis plusieurs années, voire depuis la naissance de l’aéroport, les
seine-et-marnais avaient en effet le sentiment de ne pas être pleinement intéressés par
l’aéroport. Certes, des intérêts départementaux existaient, mais on considérait à tort que
l’aéroport ne concernait que le Val-d’Oise et la Seine-Saint-Denis. Or, la moitié de
l’aéroport, sa plateforme, se trouve bel et bien en Seine-et-Marne.
Dès 2010, avant même l’étude pétales, le Conseil Général a mis en œuvre un travail
de réflexion associant les acteurs et les élus, travail qui aboutit à l’élaboration d’un
document d’orientation stratégique qui pointait l’intention de la Seine-et-Marne de
s’intéresser pleinement à l’aéroport. L’ambition était donc de faire en sorte que la Seine-etMarne soit fortement associée à l’aéroport : 15 000 seine-et-marnais travaillent en effet sur
la plateforme, ce qui est loin d’être négligeable. Toutes les dispositions qui ont été prises
récemment montrent l’attachement du Conseil Général et de son Président à l’aéroport.
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
L’élaboration de ce document stratégique n’a pas été uniquement le fait des services
ou des élus : il est le fruit d’un travail intense qui a mobilisé les différents acteurs de la
plateforme et les élus du territoire. Ce document pointe toutes les difficultés et liste les
engagements du Conseil Général. L’une de ces difficultés, qui rejoint l’idée des
360 degrés, est la suivante : en Seine-et-Marne, cette circonférence n’est pas terminée. Si
nous voulons que l’aéroport soit étroitement lié à notre département, il est nécessaire de
donner à ceux qui y travaillent le moyen de s’y rendre. L’économie doit pouvoir disposer
d’infrastructures routières qui permettent de rejoindre l’aéroport. Or, depuis longtemps, il
est particulièrement difficile de contourner l’aéroport par l’Est. De fait, nous considérons
qu’il est indispensable d’achever promptement le contournement à l’Est par la Francilienne.
En l’absence d’une telle infrastructure routière, nous éprouverons les pires difficultés à
associer la Seine-et-Marne avec l’aéroport.
Philippe COME
Vous évoquez ici un projet majeur, sur lequel vous avez longuement travaillé : pouvezvous nous en dire davantage sur les projets et les perspectives de développement dans le
nord-ouest seine-et-marnais ?
Bernard CORNEILLE
Nous travaillons tant en Seine-et-Marne qu’avec nos voisins. Nous avons adhéré à
l’EPA Plaine de France : 17 communes vont intégrer cet EPA. Le Grand Projet 3 est issu
d’une volonté de la région d’aider le département et les territoires qui jouxtent l’aéroport à
se développer. Plus de 10 millions d’euros ont été attribués à ce dispositif par la région.
Philippe COME
Monsieur le Préfet, quelles sont vos réactions à ce que vous venez d’entendre, et plus
particulièrement vis-à-vis des actions qui sont menées autour du Grand Roissy ?
Jean-Luc NEVACHE
Je suis très frappé par la forte progression d’un certain nombre de sujets majeurs. Je
ne suis pas certain que nous mesurions exactement la performance que représente la
finalisation d’un SCOT en même temps que le SDRIF, car ces deux outils devraient
probablement aboutir dans la même période, alors même qu’ils se doivent d’être cohérents
l’un vis-à-vis de l’autre. Cela signifie donc que tout le monde travaille ensemble, tant les
élus du territoire avec un niveau régional que l’État, en soutien de la cohérence de ce
dispositif.
De la même façon, l’intercommunalité progresse dans le Val d’Oise. Elle sera achevée
à la fin de cette année. Elle n’est pas conçue dans une logique de fermeture, mais dans
une logique d’ouverture et d’avancée. Chacun souhaite se structurer pour avancer brique
par brique pour aller vers le Grand Roissy. Les CDT concernés par ce territoire sont ceux
qui, de fait, sont en train de se conclure et seront prochainement dans une situation qui
permettra aux enquêtes publiques de se faire à l’automne.
Tout ceci ne signifie pas pour autant que tous les problèmes sont réglés.
Monsieur Blazy rappelait précédemment qu’il restait des sujets majeurs en termes de mise
en cohérence des objectifs des CDT, notamment sur le logement, avec les textes sur les
problèmes environnementaux. Le rapport Leconte a été rendu au Gouvernement, qui
l’examine actuellement. Des propositions seront formulées dans des délais relativement
contraints. La posture de l’État, autour du Préfet de Région, consiste à aider les élus à
constituer le Grand Roissy, avec des perspectives de développement qui profitent le plus
possible aux territoires qui sont les territoires sièges de cette infrastructure. D’ici quelques
semaines, nous proposerons un document sur les enjeux stratégiques de l’Est du Vald’Oise. Ce document sera mis à la disposition de tous pour que la réflexion progresse. Il
montrera notamment que, en termes de formation, il n’existe pas seulement un problème
d’adéquation des formations aux besoins de la plateforme et des entreprises qui s’y
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trouvent, mais également un problème en termes de capacités de formation. Nous
« exportons » beaucoup de nos jeunes qui vont ainsi se former en dehors de nos territoires
car nous ne disposons pas de capacités suffisantes pour les accueillir.
Philippe COME
Cela signifie-t-il que les actions qui ont été évoquées autour du Grand Roissy vont
dans le sens des priorités de l’État ?
Jean-Luc NEVACHE
Il me semble que les annonces du Premier Ministre le 6 mars au sujet du Grand Paris
montrent très clairement la détermination de l’État à soutenir l’ensemble des élus de ce
territoire, dans le but de développer ce formidable moteur économique, dont tout le monde
souhaite qu’il progresse plus fortement encore.
Philippe COME
Permettez-moi de poser la même question à la Région.
Alain AMEDRO
La Région a constaté que ce territoire a bénéficié d’un approfondissement du travail en
commun, qui n’existait pas il y a encore quelques années. À chaque fois que les élus
créent de telles associations, ils contribuent à la progression de leur territoire, notamment
en termes de cohérence et de complémentarité des projets, plutôt qu’en termes de
concurrence. En effet, la concurrence n’est bonne ni pour les territoires, ni pour le
développement économique, ni en termes de préservation des terres agricoles. Plus le
dialogue s’affermit, plus le Conseil Régional s’en félicite.
Philippe COME
Comment percevez-vous l’articulation entre le projet du SDRIF, mené par la Région, et
l’ensemble des actions que nous avons évoquées ?
Alain AMEDRO
La Région apporte un regard large, à 360 degrés, notamment en examinant ce qui se
fait chez ses voisines, dans le grand Bassin parisien, l’objectif étant de faire le jeu de la
complémentarité. Par ailleurs, nous avons fixé l’objectif de ne pas opposer développement
économique, préservation de l’environnement et développement des transports. Le rapport
qui a été remis à l’État montre que, à défaut d’actions fortes, la plateforme sera soumise à
des risques majeurs d’ici cinq à dix ans, en raison d’un développement anarchique qui
pourrait aboutir à une saturation qui porterait préjudice non seulement aux terres agricoles,
mais également au développement économique du territoire. Les travaux réalisés ont
permis d’aboutir à cette prise de conscience conjointe entre la Région et l’Association. Il
existe une question que nous nous devons de résoudre, en l’occurrence celle de
l’organisation du développement économique, de façon à rénover et à intensifier les zones
d’activités qui existent aujourd'hui. L’enjeu de la complémentarité sur l’existant est
important, avec deux tiers de recyclage et un tiers d’avancée sur les terres agricoles de
façon à mieux organiser le territoire. Il est nécessaire de progresser à la fois sur la
formation et sur les transports : notre capacité à relier les quartiers qui sont aujourd'hui
enclavés aux zones d’emplois nous permettra de valoriser l’existant, sans considérer que
les terres agricoles sont sans limites. En Ile-de-France, en effet, le défi est très important
dans ce domaine : 91 % de notre alimentation vient de l’extérieur, contre 9 % qui est issue
de la région. Nous faisons donc face à un défi alimentaire, qui est à mettre en relation avec
le défi environnemental, le défi des transports et le défi économique. Si nous échouons
dans l’organisation de notre territoire, nous échouerons dans chacun de ces défis, ce qui
doit nous conduire à agir en termes de complémentarité entre les espaces.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
11
Conférence Territoriale du Grand Roissy
Philippe COME
Nous comprenons qu’il s’agit d’une démarche collective. Pour autant, les priorités ne
sont pas les mêmes entre les départements, notamment entre les départements urbains,
pour deux d’entre eux, et plus périurbain voire rural pour le troisième. Comment est-il
possible de définir des priorités ? Quelles thématiques doivent être abordées ensemble ?
Alain AMEDRO
Quand on évoque la notion de développement durable, on ne s’intéresse pas
uniquement à la question de l’environnement, mais également au développement
économique et à la lutte contre les inégalités territoriales, notamment en termes de
logements. Tous ces sujets sont complémentaires. Les gens qui vivent sur ce territoire ont
le droit à une même qualité de vie. Des efforts restent nécessairement à mener,
notamment en termes d’accès à l’emploi.
Philippe COME
Pourquoi ce sourire, Monsieur Renaud ?
Patrick RENAUD
S’agissant du STIF, cette évolution est récente, ce qui explique que les premiers effets
ne soient apparus que tardivement. Sur la deuxième couronne, pour obtenir des transports
supplémentaires, le STIF demande aux communautés de payer, puis aux entreprises de
payer une seconde fois, ce qui posait un véritable problème en termes d’équité sur la
région. La région est une unité essentielle, mais il n’est pas admissible de faire payer deux
fois dans certains secteurs. Il me semble que le STIF a compris qu’il ne devait pas
poursuivre cette démarche, car les entreprises ne l’admettent pas et les communautés ne
sont pas en mesure de payer.
En ce qui concerne le logement, il convient de rappeler que le Nord est moins urbanisé
que le Sud. Or, dans le cadre du SCOT, l’intention a toujours été de progresser de concert,
ce qui peut paraître curieux au regard des fortes différences en termes d’enjeux : le Sud
fait face à un enjeu majeur de rénovation urbaine, tandis que le Nord se situe dans un
contexte de développement urbain qui conduit à utiliser des surfaces agricoles, d’autant
que les personnes qui viennent habiter dans ces nouveaux logements souhaitent disposer
d’un certain nombre d’équipements, comme il en existe à Paris ou en première couronne.
Nous n’avons plus, aujourd'hui, les moyens d’accompagner cette évolution, ce qui
constitue un problème majeur.
Dans le SCOT que nous terminons et dans celui que nous élaborons sur le Grand
Roissy, l’agriculture est considérée comme faisant partie prenante de l’activité économique
et non comme étant réduite à un accompagnement de l’environnement. Nous allons ainsi
pérenniser, pour les 30 ans à venir, le monde agricole sur le Nord.
Philippe COME
Où en est-on, en termes de coordination, en ce qui concerne la marque collective
« Roissy » ?
Alain AMEDRO
Nous votons demain à la Région une association « Hubstart Paris-Région » qui
permettra de parler d’une seule voix autour du marketing territorial et autour de la capacité
d’accueillir un certain nombre d’entreprises. Nous avons une marge de progression
importante en termes de dialogue autour de cette question.
La question du logement et des équipements est effectivement essentielle, notamment
en termes de culture, de services publics et d’école. La Région apporte une aide très
concrète à ce territoire ouest-seine-et-marnais, mais également sur l’ensemble de la Plaine
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
de France, car la question du logement doit nécessairement s’accompagner de la question
des équipements, afin de ne pas renouveler les erreurs qui ont été commises dans les
années 1970 et 1980.
Philippe COME
Frédéric Vernhes, je vous propose d’évoquer les thèmes qui sont jugés prioritaires par
les entreprises qui sont établies au niveau du Grand Roissy.
Frédéric VERNHES
Les thèmes prioritaires, pour les entreprises, sont connus depuis longtemps. Il s’agit
des transports, de la formation ou encore de l’offre foncière. Le temps, aujourd'hui, n’est
plus tant à la définition des objectifs qu’aux actions qui permettront de répondre aux
demandes. Le Préfet de Région, en février 2012, avait demandé aux chefs d’entreprise
d’établir une stratégie collective : cette demande avait initié la mise en place du Grand
Roissy Économique, à l’exemple de ce que les élus avaient organisé au niveau du
territoire. Il nous semblait que la réponse minimum consistait justement à fédérer ce
territoire. L’Association est promoteur de cette démarche d’instauration d’un travail
d’interface qui soit utile tant aux entreprises qu’à la collectivité. Le point de vue des chefs
d’entreprises doit être pris en considération. Des difficultés existent parfois dans le
dialogue entre les entreprises et les élus, dans la mesure où le temps ne passe pas de la
même manière dans une entreprise et dans l’aménagement public. Or, il est nécessaire de
définir des actions immédiates qui soient en mesure de s’enclencher dans ce cadre.
Philippe COME
Parmi les actions concrètes, que pouvez-vous nous dire au sujet du réseau PLATO,
qui est en cours de mise en place autour du Grand Roissy Économique ?
Frédéric VERNHES
Ce type d’action vient des Pays-Bas et consiste à fédérer sur un territoire les grandes
entreprises et les PME, les chambres de commerce et les collectivités. Il s’agit d’une
organisation qui conduit à réunir des chefs d’entreprises du territoire, à travers la mise en
place d’une association entre grands groupes et PME, sur la base du volontariat, avec un
engagement financier de la part des entreprises, mais également des collectivités et
naturellement de la CCI. Tout ceci permet de créer une dynamique au sein de groupes
qu’animent, autour d’experts, des chefs d’entreprise.
Philippe COME
Quelles sont, de votre point de vue, les priorités en termes de gouvernance ?
Patrick RENAUD
À présent que nous avons compris la nécessité d’être unis, je considère que nous
sommes aujourd'hui dans une meilleure situation pour monter ces grands projets de
gouvernance. L’importance des élus locaux dans cette gouvernance est majeure, ce qui
nous impose de poursuivre ce travail en commun. Il convient toutefois de trouver les
financements nécessaires à nos projets, sans quoi nos réunions ne serviront à rien.
Philippe COME
Le fonctionnement et l’accessibilité de l’aéroport sont deux thématiques qui sont
intimement liées. De fait, la gouvernance de ce vaste territoire ne pourra pas se faire en
l’absence d’Aéroports de Paris, opérateur et aménageur de la plateforme de Paris-Charlesde-Gaulle. Quel est votre point de vue sur ce sujet, Bernard Cathelain ?
Roissy-en-France, 19 juin 2013
13
Conférence Territoriale du Grand Roissy
Bernard CATHELAIN
Avant de parler de gouvernance, il me semble nécessaire d’évoquer les raisons qui la
rendent nécessaire, dans le contexte que nous connaissons. Nous sommes en effet dans
la période du Salon du Bourget, qui permet d’exposer les atouts de l’aérien pour ce
secteur. Aujourd'hui, le monde entier est notre invité, pour reprendre le slogan d’Aéroports
de Paris, au travers du Salon du Bourget. L’activité économique générée par nos
aéroports, qu’il s’agisse de CDG ou du Bourget, s’élève à 22 milliards d’euros en termes
de valeur ajoutée, soit l’équivalent du PIB d’un petit état européen tel que la Lettonie, ce
qui représente des montants considérables.
Par ailleurs, l’activité économique générée par l’activité aéroportuaire va au-delà de ce
qui lui sert strictement de support. Nous attirons en effet des activités pour lesquelles le
transport aérien est un facteur extrêmement important : il en est ainsi des sièges de
grandes entreprises, des activités de filières, pour lesquelles le transport aérien est
fondamental, ou des activités de diversification – on peut penser ainsi aux activités
médicales ou hospitalières. Il s’agit donc d’un atout considérable, pour lequel nous
sommes en concurrence avec d’autres grandes places aéroportuaires, même si nous
disposons d’avantages importants. En effet, l’aéroport CDG n’est pas saturé, ce qui
constitue un atout majeur par rapport à nos concurrents. De plus, il existe des équipements
collectifs de qualité autour de l’aéroport, avec notamment une forte capacité hôtelière.
Enfin, nous disposons de réserves foncières importantes.
Pour remporter cette compétition, un certain nombre de sujets doivent être abordés. Il
en est ainsi de la problématique des transports, qui doit permettre de tisser le lien entre
l’aéroport et son territoire, qu’il s’agisse de Paris ou de l’ensemble du territoire autour de
Roissy. Sur ce sujet, notre retard est considérable, ce qui explique qu’Aéroports de Paris
soutienne le projet de métro du Grand Paris ou le Barreau de Gonesse. Nous travaillons
par ailleurs sur le projet de CDG Express, projet complémentaire et indispensable en
termes de compétitivité vis-à-vis de nos concurrents. Enfin, nous partageons ce qui a été
dit précédemment s’agissant des transports routiers, notamment en ce qui concerne
l’impératif de bouclage de la Francilienne : notre aéroport est aujourd'hui en situation de
fragilité, dans la mesure où ses accès se font tous par le Sud et par l’autoroute A1, ce qui
implique des risques de saturation considérables. C’est la raison pour laquelle notre
Président-Directeur-Général a décidé de financer une partie de la Francilienne, entre la
Nationale 2 et l’accès Est, de façon à rééquilibrer ce système. Cette portion devrait ouvrir à
l’automne 2014.
La deuxième condition du succès tient à une réglementation équilibrée, qui nous
permette à la fois de nous développer et d’assurer la tranquillité des riverains et le respect
de l’environnement. Il convient de trouver le bon équilibre, qui permette le développement
du transport aérien et la qualité de vie sur le territoire. Le dernier sujet concerne l’équilibre
de notre développement sur l’ensemble des secteurs, dans une logique de coopération et
de synergie entre les différents acteurs du territoire.
Philippe COME
Comment percevez-vous aujourd'hui le renforcement du lien entre la plateforme et le
bassin de vie nord-est métropolitain ? Quelles pourraient être vos initiatives dans ce
domaine ?
Bernard CATHELAIN
Nous avons la conviction qu’il n’est pas envisageable de nous développer seuls : il est
nécessaire de nous inscrire dans le cadre du territoire, pour faire en sorte que le
développement de l’aéroport bénéficie au territoire, et réciproquement. De fait, nous
sommes au cœur de l’ensemble des réflexions, notamment autour des contrats de
développement territorial. Nous participons aux différentes études lancées sur le territoire
et nous suivons de près les projets spécifiques, tels que le Triangle de Gonesse. Nous
participons aux conseils de pôles et nous sommes prêts à travailler étroitement avec
Roissy-en-France, 19 juin 2013
14
Conférence Territoriale du Grand Roissy
l’Association des Collectivités du Grand Roissy. Nous sommes donc prêts à prendre toute
la place qu’on voudra nous donner dans la gouvernance. Nous estimons qu’il est important
de travailler également sur les outils de promotion du territoire.
Philippe COME
Monsieur le Préfet, quel est le point de vue de l’État en termes de dialogue et de
partage des orientations stratégiques avec les collectivités ?
Jean-Luc NEVACHE
L’État est en soutien des collectivités dans leur action. Nous sommes tous en ligne
pour que les réflexions se transforment rapidement en actions et pour que les entreprises
et les habitants en voient concrètement les effets sur le développement territorial.
Philippe COME
Mesdames, Messieurs, à présent, je souhaiterais vous donner la parole.
Bernard LOUP, Président de Val-d’Oise Environnement (depuis la salle)
Le Collectif pour le Triangle de Gonesse a parlé du tracé retenu comme étant le plus
pénalisant pour la liaison Picardie - Roissy. Nous partageons totalement ce point de vue.
Nous pensons que le tracé choisi n’est pas le bon.
Nous sommes également d’accord avec le représentant de la Seine-et-Marne sur la
nécessité du prolongement de la Francilienne par le contournement Est de Roissy. Nous
sommes aussi d’accord sur le tracé de Garges-lès-Gonesse pour ce qui est du BHNS
entre le RER D et RER B. En revanche, nous contestons le tracé choisi puisqu’il utilise un
chemin agricole.
J’estime qu’il est temps de prendre en considération la préservation des espaces
agricoles et que des actes concrets soient enfin mis en œuvre dans ce sens. Je rappelle
que le grand projet du golf va détruire 80 à 90 hectares de terres agricoles sur la commune
de Roissy.
Patrick RENAUD
L’ensemble de notre ville et de notre Conseil Municipal estime que la ville de Roissy a
donné la totalité de son territoire au développement. Il nous a semblé que pour la zone en
question, on pourrait espérer y installer un terrain de golf ; ce qui peut être extrêmement
difficile pour les agriculteurs. Ce projet permettrait à la population de respirer puisqu’on sait
qu’il y aura du béton partout. Ce n’est pas de notre faute si Roissy a été choisi et nous
subissons cela. Nous essayons de faire au mieux pour notre population. Pour le reste,
nous l’avons laissé le Carré Vert en activité agricole ; il fait partie du Triangle de Gonesse
pour lequel nous avons donné un accord de principe. Pour la route qui pose problème,
nous allons essayer de la déplacer ailleurs. Nous allons travailler avec les élus afin de
trouver une solution. Notre démarche, qui est compliquée, est de trouver pour l’agriculture
des débouchés dans les 30 ans qui viennent. Nous avons tenu à rassurer les agriculteurs.
Nous essayons, nous aussi, de respirer dans notre ville. Par contre, je tiens à préciser que
ce sont les élus qui décident et non pas les associations d’environnement. Nous allons
réfléchir à tout cela et mettre notamment en place des commissions. Nous essayons
d’abord d’avancer entre nous. Nous n’avons pas encore de périmètre complètement défini.
Il faut donc nous laisser un peu de temps.
Christophe MACHARD, Président de l’Association Roissy Entreprises (depuis la
salle)
Concernant le contournement Est de Roissy par la Francilienne, je voudrais d’abord
signaler que le Préfet de Région avait promis des travaux qui devaient débuter en
septembre 2012 et qui n’ont toujours pas eu lieu. Je commence donc à en avoir assez des
promesses faites par l’Etat sur ce sujet. Deuxième point, je trouve qu’on oublie vraiment de
Roissy-en-France, 19 juin 2013
15
Conférence Territoriale du Grand Roissy
concerter les entreprises. En effet, je suis surpris, quand on parle du bus à haut niveau de
services, qu’on oublie de concerter l’association des entreprises de Gonesse. D’ailleurs,
plusieurs propositions ont été faites dans le cadre de l’appel de projets lancé et aucune n’a
été retenue. Cela montre vraiment comment les entreprises sont considérées sur le
secteur.
Philippe COME
Merci de votre remarque qui va clore cette première table-ronde. Nous allons ouvrir la
seconde dans quelques instants. Je vous remercie de votre participation.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Deuxième table ronde. Emploi et
formation : situation actuelle, réponses
possibles
I) Présentation : les enjeux à l’échelle du Grand Roissy, les actions
du GIP Emploi et l’offre de formation sur le Grand Roissy
Alexandre NOIX
Directeur du GIP Emploi Roissy CDG
Bénédicte GARNIER
Directrice opérationnelle de Défi Métiers
Bernard BARBIER
Directeur adjoint de Défi Métiers
Philippe COME
Cette thématique est vaste, ce qui explique que nous ayons choisi de l’aborder non
pas dans son ensemble, mais sous l’angle de l’accès à l’emploi par la formation, dans la
perspective de l’ajustement entre l’offre et la demande, l’objectif étant en définitive
d’améliorer l’accès à l’emploi pour la population qui réside dans le Grand Roissy.
Alexandre NOIX
J’évoquerai rapidement la réforme du GIP. Celui-ci avait déjà été rénové en 2009, mais
les résultats concrets pour les riverains du Grand Roissy en matière d’accès aux emplois
de la zone aéroportuaire n’étaient pas suffisants. La réforme mise en œuvre a consisté à
faire passer le GIP de 87 membres, dont 5 financeurs, à 5 membres, tous financeurs. Un
Comité d’Orientation Stratégique Emploi Formation (COSEF) a été constitué afin de
proposer à l’ensemble des acteurs qui s’impliquent sur ce sujet de travailler en mode
projet.
Sans attendre cette réforme, il a été demandé au GIP de développer des actions
concrètes :
-
Aide aux salariés précaires du Grand Roissy,
Formation à l’anglais aéroportuaire,
Alternance,
Contrats de génération.
Toutes ces actions sont soutenues par l’État et par le Conseil Régional.
En ce qui concerne les enjeux de l’emploi et de la formation professionnelle, il convient
de rappeler que celle-ci est l’un des principaux leviers du développement de l’emploi sur le
territoire. Pour concevoir et adapter cette offre de formation professionnelle, il est important
de bien comprendre les spécificités de l’emploi sur ce territoire, de bien connaître les
caractéristiques de la population active du bassin d’emplois ainsi que le potentiel de
développement de l’emploi et l’existant en termes d’offre de formation. Ce travail doit être
mené dans un cadre de concertation adéquat entre les financeurs de la formation, les
acteurs de terrain et les représentants des administrés.
Que dire des spécificités de l’emploi sur le territoire du Grand Roissy ? Une forte
spécialisation en raison de l’activité aéroportuaire, en particulier sur la plateforme, avec
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
des contraintes fortes – horaires décalés, difficultés de transport, exigences de sécurité ;
une population active jeune, peu qualifiée, mais mobile ; une offre de formation importante
mais insuffisamment connue par les acteurs de terrain.
L’offre de formation est adaptée à la population des demandeurs : 75 % des formations
visent des certifications de niveau 5, qui correspondent à un niveau CAP. Elle est conçue
pour être accessible aux populations et pour répondre aux spécificités du Grand Roissy en
termes de compétences requises par les entreprises. Il apparaît ainsi que 62 % des
bénéficiaires d’une formation qualifiante ont trouvé un emploi dans les six mois qui ont
suivi leur formation.
La Région invite ses partenaires à la rejoindre au sein du COSEF pour travailler sur
cette problématique de meilleure connaissance de l’offre de formation par le territoire, mais
également sur son adaptation, ce qui impose une concertation plus efficace et plus
territoriale.
Bénédicte GARNIER
Par formation professionnelle, il faut comprendre toute action qui conduit soit à
l’acquisition, soit à l’amélioration ou au développement de qualifications. Il s’agit donc de
l’ensemble des actions de formation qui se concrétisent soit par la voie de la formation
initiale, soit par la voie de la formation continue.
Sur votre territoire, la Région finance 98 % du nombre de places de la formation
conventionnée, ce qui représente un investissement de 13,5 millions d’euros. Les autres
financeurs sont Pôle Emploi, l’État et les Conseils Généraux. L’ensemble de ces
financements publics permet d’ouvrir plus de 3 600 places, dont 1 600 pour les formations
liées aux activités aéroportuaires. 75 % des places donnent accès à une certification de
niveau 5, ce qui est cohérent avec la structure des catégories socio-professionnelles du
territoire, dans la mesure où plus de la moitié des actifs sont des ouvriers et des employés.
De même, plus de la moitié des actifs ont un diplôme inférieur au Bac. Plus de 40 % des
formations relèvent du domaine du transport et de la logistique. À travers ces éléments, il
apparaît que l’appareil de formation continue est à la fois en lien avec le niveau de
qualification des populations et adapté aux spécialités de l’activité économique locale.
S’agissant de la formation initiale, le nombre d’établissements implantés sur votre
territoire représente 5 % du total régional, pour 5,3 % de la population active, ce qui montre
une certaine cohérence de l’offre de formation initiale. L’appareil de formation permet aux
personnes d’évoluer dans leur niveau de qualification. Tout ceci donne donc à penser que
votre offre de formation professionnelle est en capacité de répondre à vos besoins.
Bernard BARBIER
Un outil cartographique a été développé avec la Région Ile-de-France et l’État, qui
permet une meilleure connaissance de l’offre de formation. Il apparaît que l’offre de
formation se concentre plutôt sur le Sud du territoire. Elle semble correspondre aux
besoins exprimés. Le problème tient donc moins à la quantité des structures de formation
qu’aux moyens qui permettraient d’augmenter le nombre de places dans ces formations,
sans oublier la connaissance de l’offre de formation. Tels sont les progrès qui peuvent être
réalisés. Cet outil peut permettre une meilleure identification des formations et un meilleur
partage de l’information avec les prescripteurs.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
II) Échanges
Philippe COME
J’invite à me rejoindre Gérard Ségura, Vice-président du Conseil Général de SeineSaint-Denis chargé du développement économique, Michel Montaldo, Vice-président du
Conseil Général du Val-d’Oise chargé du Grand Paris, Laurent Vilboeuf, Directeur régional
des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi,
Jacques Chéritel, Délégué académique à l’emploi formation professionnelle initiale et
continue au Rectorat de Créteil, François Acquaviva, membre du bureau MEDEF de l’Est
Parisien et administrateur du MEDEF de Seine-Saint-Denis, Gérard Pétasse, Secrétaire
général de l’Union fédérale « Aériens » de la CFDT, Suzanne Bella Srodogora, Directrice
générale adjointe du Conseil Régional d’Ile-de-France, et Jean-Noël Moisset, Viceprésident de la CA Roissy Porte de France, élu référent de l’Association des Collectivités
du Grand Roissy pour les questions de formation.
Je propose de débuter par un point rapide sur les évolutions survenues en termes de
formation.
Suzanne BELLA SRODOGORA
Le Conseil Régional finance, de l’amont à l’aval, tout ce qui se passe sur ce territoire,
tant la recherche et développement via les pôles de compétitivité que le développement
économique via les plateformes, ainsi que l’emploi et la formation. Le GIP Emploi a connu
des périodes bien moins productives que celle qui a été initiée depuis deux ans par son
actuel président et par l’État. Il s’agit aujourd'hui d’un outil de coordination, de rencontre
des acteurs et de production d’une offre de formation. Les huit CFA présents sur le
territoire représentent 85 millions d’euros d’investissements en termes de construction et
13,5 millions d’euros par an pour la formation professionnelle. Le GIP a un apport majeur
en termes d’adéquation de la demande sur le territoire.
Philippe COME
Jean-Noël Moisset, quelles sont les difficultés que vous avez pu soulever au regard de
l’offre d’emplois sur le Grand Roissy ?
Jean-Noël MOISSET
Nous sommes sur un territoire paradoxal, dans la mesure où, chaque année
10 000 postes, entre les créations et le turn-over, sont offerts, auxquels peuvent prétendre
la population alors que, dans le même temps, les taux de chômage de certains quartiers
sont parmi les plus importants de l’Ile-de-France, avec des niveaux de 30 à 40 %. Les
raisons sont multiples : nous avons déjà évoqué la mauvaise desserte en termes de
transports collectifs, ce qui contraint les personnes qui travaillent sur ce territoire à être
motorisées. Par ailleurs, nous sommes sur un territoire contrasté, avec une partie urbaine
très dense, une partie péri-urbaine et une zone rurale avec des villes et des villages qui
sont relativement éloignés de tout moyen de transport collectif.
La deuxième difficulté tient à une certaine inadéquation entre les profils des habitants
et les besoins de recrutement des entreprises. Les personnes à former méconnaissent les
métiers du territoire, voire rejettent certains de ces métiers en raison de leurs contraintes,
ignorant ainsi les avantages qu’ils pourraient tirer de l’occupation de ces emplois,
notamment en termes d’ascenseur social. Les entreprises sont en effet à la recherche de
collaborateurs qualifiés pour des métiers tournés vers l’international (hôtellerierestauration, services, sièges sociaux), ce qui implique la maîtrise de la langue, même sur
des métiers peu qualifiés, ainsi que des exigences de haute qualité en termes de service et
d’accueil.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
19
Conférence Territoriale du Grand Roissy
La population jeune méconnaît grandement les règles de fonctionnement du monde de
l’entreprise, en termes de comportement, de ponctualité et de respect de la hiérarchie, ce
qui explique le rejet que manifestent les entreprises à leur égard.
Par ailleurs, il existe deux académies sur le territoire : les académies de Versailles et
de Créteil. Or, les difficultés sont importantes pour passer d’un territoire à l’autre, ce qui
prive une partie de notre population de l’intégralité de l’offre de formation qui est proposée.
Par ailleurs, il existe un grand nombre d’acteurs de l’emploi et de la formation sur le
territoire, ce qui conduit parfois à un manque de dialogue entre ces différents acteurs.
Nous comptons donc beaucoup sur la modification du GIP Emploi pour coordonner ces
différentes actions.
Enfin, l’offre de formation est concentrée sur la partie urbaine et péri-urbaine. Les
habitants des zones excentrées font face à d’importantes difficultés dès lors qu’ils doivent
se rendre sur les lieux de la formation ou de l’emploi dans les délais impartis : certains
habitants sont si éloignés de l’emploi qu’ils ne parviennent pas à se maintenir dans les
emplois qui leur sont proposés, ce qui joue en définitive sur l’image que les entreprises
peuvent avoir des personnes qui vivent sur le territoire.
Philippe COME
La correction de cette image n’incombe-t-elle pas à la responsabilité des entreprises ?
Jean-Noël MOISSET
Elle leur incombe tout autant qu’à nous-mêmes : il nous appartient de soutenir plus
fortement les personnes qui sont très éloignées de l’emploi, en commençant leur formation
par une remise à niveau en termes de savoir-être et de respect des règles de
fonctionnement des entreprises.
Philippe COME
Quelles sont les difficultés que les entreprises rencontrent en termes de main
d’œuvre ?
François ACQUAVIVA
L’essentiel a déjà été dit s’agissant de l’inadéquation entre l’offre et les besoins des
entreprises. Les principales difficultés sont classiques, avec d’une part des offres nonfournies, parfois même depuis longtemps, et d’autre part des difficultés en termes de
représentation, qui peuvent exister vis-à-vis des clients et des étrangers. La pratique de la
langue et la maîtrise d’un bon comportement sont essentielles pour nombre de ces
métiers.
Sur la plateforme, la situation est un peu plus complexe que sur le reste du territoire,
en raison d’une imbrication très forte entre les départements et entre les populations, ce
qui est parfois difficile à maîtriser, d’autant que coexistent essentiellement de très grandes
entreprises, auxquelles s’ajoutent des tissus de moyennes entreprises, tandis que les TPE
sont peu présentes sur le territoire du Grand Roissy.
Enfin, je considère qu’on ne joue pas assez le rôle des complémentarités
aéroportuaires avec Le Bourget et Orly.
Philippe COME
Qu’en est-il du taux de chômage ?
François ACQUAVIVA
Pour la Seine-Saint-Denis, le pourcentage est plus important que pour les autres
départements au sein de la plateforme et de l’Ile-de-France, ce qui s’explique par la
composition plus jeune de la population. Un travail en profondeur doit être mené tant par
Roissy-en-France, 19 juin 2013
20
Conférence Territoriale du Grand Roissy
les entreprises que par les pouvoirs publics, notamment vis-à-vis de la population des
quartiers voisins de l’aéroport.
Philippe COME
Laurent Vilbœuf, partagez-vous ce point de vue ?
Laurent VILBOEUF
En effet, pour l’essentiel. Sur la question de l’adéquation, le constat présenté
précédemment est particulièrement intéressant : il s’agit d’une population active jeune, qui
fait face à des conditions d’emploi tendues en raison d’un besoin de recrutement important
qui s’explique par la nature même des emplois présents sur ce territoire, car les emplois
courts impliquent beaucoup de recrutements, de façon à être remplacés régulièrement.
Nous devons donc être prudents dans nos constats. L’offre d’emplois est relativement en
adéquation avec la population, qui est assez peu qualifiée. L’ajustement se fait difficilement
en raison de l’exigence de l’offre d’emplois d’une part et des difficultés liées à la mobilité
d’autre part.
L’État est d’ores et déjà dans l’action, via un certain nombre d’opérations qui sont nées
sur le secteur. Les problématiques de ressources humaines que rencontre le territoire sont
très lourdes, et les outils qui permettent d’accompagner les populations sont nombreux : il
convient donc de nous mettre en capacité de les employer de concert. Le GIP Emploi
Roissy est en capacité, à partir des constats que nous avons établis, d’apporter des
réponses adaptées.
Philippe COME
Comment optimiser les politiques de l’emploi ? Il est en effet parfois difficile de
comprendre la place de chacun des acteurs.
Laurent VILBOEUF
Nous faisons systématiquement en sorte, notamment sur le territoire du Grand Roissy,
d’avoir une approche qui soit totalement concertée, en réunissant le service public de
l’emploi, Pôle Emploi, les unités territoriales de la DIRECCTE et bien d’autres partenaires
tels que le Conseil Régional, les Conseils Généraux et l’ensemble des collectivités.
Monsieur le Préfet de Région a ainsi signé en janvier 2013 le prolongement d’une
convention qui identifie le Grand Roissy comme un territoire prioritaire pour les actions que
nous devons mener. Les différentes problématiques sont donc abordées de concert, car
nous considérons que la réponse à y apporter n’est pas le fait d’une institution unique.
Philippe COME
Messieurs Ségura et Montaldo, comment analysez-vous cette problématique ?
Gérard SEGURA
Nous pouvons partager le constat qui a été évoqué par les précédents orateurs
s’agissant de l’écart qui existe entre les salariés possibles et leur non-employabilité par
manque de formation ou par distance de formation. Il convient de ne pas s’arrêter aux
différentes frontières administratives présentes sur le territoire, notamment en ce qui
concerne les deux rectorats qui interviennent sur la formation initiale, et en partie sur la
formation continue. Considérez que, à partir du moment où, dès le plus jeune âge, au
collège puis au lycée, le rapport entre entreprise et Éducation Nationale n’est pas modifié
en profondeur, nous serons condamnés au constat immuable selon lequel la façon dont on
considère l’emploi quand on arrive à l’âge de l’employabilité est déjà déterminée. Pour
rattraper le temps perdu, il importe de mettre en œuvre un certain nombre de mesures,
mais le bon comportement qui est demandé vis-à-vis de l’emploi devrait être acquis bien
plus tôt au cours de l’éducation.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
21
Conférence Territoriale du Grand Roissy
A l’heure actuelle, 75 % des formations concernent le niveau 5. Si l’offre de formation
demeure à ce niveau, nous resterons confrontés aux mêmes problèmes : nos territoires
sont-ils définitivement condamnés à ne pouvoir former, accueillir et faire face à des
problématiques qui concernent à 75 % des salariés de niveau 5 ? L’étude de l’EPA montre
bien que, en nous projetant dans les cinq à dix prochaines années, le développement de
l’emploi se fera non seulement de façon numérique, mais également que la nécessaire
qualification doit aller au-delà du constat actuel. En particulier, nous ne pouvons dissocier
cette question des problématiques de développement économique, et notamment de
réindustrialisation. Si nous ne prenons pas le parti de porter l’industrie dans nos
départements, sur ce territoire, à un niveau bien plus élevé qu’il ne l’est aujourd'hui, nous
serons contraints de proposer des formations pour des emplois de troisième ou de
quatrième ordres, sans être en mesure de porter une ambition plus importante alors même
que de nombreuses entreprises, grands groupes et PME, recherchent des emplois de plus
en plus qualifiés. Nous sommes à la confluence de deux aéroports, de trois autoroutes,
d’une future gare du Grand Paris : nous nous devons d’avoir l’ambition de tirer des
industries à haute valeur technologique pour une implantation sur nos territoires, car elles
appellent la richesse et les créations d’emplois, tout en demandant un niveau de
qualification beaucoup plus élevé que celui auquel on voudrait nous maintenir.
Michel MONTALDO
Mon collègue a pratiquement tout dit. Ce diagnostic, largement partagé par plusieurs
orateurs aujourd'hui, est pourtant connu depuis de nombreuses années. Nous avons tous
notre part de responsabilité dans le fait qu’aujourd'hui, le département du Val-d’Oise doit
gérer la bagatelle de 35 000 allocataires du RSA, dont plus de 8 000 sur le seul territoire
de la Plaine de France. Certains déplorent l’attitude des jeunes face au monde de
l’entreprise : en 1995, déjà, il existait à Garges-lès-Gonesse des associations qui
travaillaient sur ce thème. Nous avons mis en place, au Conseil Général, des bourses
d’entrée dans la vie active, qui conduit à allouer aux jeunes, entre 18 et 25 ans, une
certaine somme qui leur permet d’accéder à l’emploi, qu’il s’agisse d’obtenir leur permis de
conduire ou d’achever leurs études. La pauvreté des objectifs de ces jeunes est
dramatique, comme s’ils avaient été tirés vers le bas. Pour beaucoup, ils n’ont pas la
capacité de réaliser des études importantes. De plus, ils n’ont pas de visibilité vis-à-vis des
métiers d’avenir. Ils ont le sentiment qu’ils resteront à un salaire très bas, qu’ils n’ont
aucune capacité d’évoluer dans le métier, et ce manque de projet individuel les plonge
dans une grande résignation. Certaines entreprises, notamment dans l’aéronautique, sont
contraintes de créer leurs propres centres de formation en interne pour obtenir les
ressources dont elles ont besoin. L’Éducation Nationale se doit d’intéresser les jeunes aux
métiers d’avenir. Tous les acteurs de ce domaine doivent parvenir à travailler en réseau
plutôt qu’en silo : il n’y a pas suffisamment d’interactions entre les différents procédés, ce
qui explique probablement en partie nos échecs répétés, échecs qui créent de véritables
générations sacrifiées.
Philippe COME
Jacques Cheritel, quel est le rôle de l’Académie dans le domaine de la formation ?
Jacques CHERITEL
L’école peut beaucoup, mais ne peut pas tout. Depuis le début de nos travaux, nous
avons beaucoup parlé d’accessibilité, mais encore assez peu d’attractivité. Or, la formation
professionnelle n’a pas aujourd'hui la place qu’elle devrait avoir dans nos stratégies. Nous
ne considérons pas suffisamment la formation professionnelle. Nous avons donc tous à
travailler à cette meilleure attractivité de la formation professionnelle : il est possible de
réussir sa vie sans nécessairement passer par une grande école.
Si l’école de la République se doit de former des citoyens, elle doit également former
des agents économiques qui pourront vivre dignement de leur travail. Ce second rôle n’a
pas été suffisamment pris en compte. Depuis plusieurs années, un certain nombre
Roissy-en-France, 19 juin 2013
22
Conférence Territoriale du Grand Roissy
d’initiatives ont permis à l’école et à l’entreprise de se parler et de travailler ensemble. Il est
nécessaire de poursuivre en ce sens.
D'autre part, il convient de rappeler qu’il est nécessaire de se placer dans une
perspective de formation tout au long de la vie afin de permettre à chacun de s'adapter aux
évolutions. C’est la raison pour laquelle l’Éducation Nationale se doit d’être présente sur
toutes les voies de formation. A titre d'illustration, le nombre d'emploi occupés dans une
carrière a vu sa moyenne doubler en une génération.
Enfin, rappelons que l’Éducation Nationale n'agit pas seule : la carte des formations
initiales est définie avec la région et les diplômes avec les partenaires sociaux.
Philippe COME
Quels sont les ponts qui existent entre les académies ?
Jacques CHERITEL
Nous coordonnons bien évidemment notre action mais, si les contacts entre les trois
académies franciliennes sont permanents, il nous faut signaler que la gouvernance et la
lisibilité en matière de formation professionnelle compliquent notre tâche. En effet, à la
complexité des circuits de financement qui amplifie la complication du découpage
territorial, il faut ajouter le problème des certifications pléthoriques. A ce propos, peu de
diplômes de l'Education Nationale ont été choisis pour certifier les qualifications du Grand
Roissy.
Malgré tout, fidèles à notre mission, nous sommes disposés à continuer nos efforts
pour aider ce territoire à se développer dans les champs de compétences qui sont les
nôtres.
Philippe COME
Gérard Pétasse, quelles sont les attentes des salariés du secteur de Roissy sur l’offre
de formation ?
Gérard PETASSE
Le paradoxe est que l’emploi se développe alors que les jeunes s’interrogent de plus
en plus fortement sur la manière dont ils pourront y accéder. Cette interrogation était déjà
largement présente lors de l’installation du premier GIP Emploi : elle n’a pas évolué. Les
syndicats s’emploient à orienter et à être acteurs, en déclinant les accords nationaux au
niveau des branches professionnelles, ce qui n’est pas sans poser de difficultés sur les
territoires car, avant même d’avoir eu le temps de nous approprier ces accords, nous
sommes confrontés à un certain nombre d’évolutions, comme la réforme des Organismes
paritaires collecteurs agréés (OPCA), qui sont réorientés vers une approche régionale. Il
serait par ailleurs utile que l’Éducation Nationale soit invitée à nos travaux.
Il y a quelques années, le GIP avait proposé la mise en place d’une Gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC territoriale, avec un objectif
prospectif qui permettrait de réduire les temps de réponse à une demande de formation.
Cette proposition nous semble essentielle, de même que l’instauration de structures de
dialogue social territorial, qui permettraient d’instaurer des échanges réguliers et de passer
enfin de la logique de guichet à la logique de projet.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Troisième table ronde. Emploi et
formation : comment anticiper ?
I) Présentation : Étude Nouveaux Emplois
Jean-Louis HUSSON
Directeur d’EcoDev Conseil
Philippe COME
Nous passons à présent à la partie relative à l’anticipation. Gouverner, c’est avant
toute chose prévoir. Les perspectives sont aujourd'hui de 130 000 nouveaux emplois liés
aux nouveaux projets, ce qui suppose une grande responsabilité collective. Quelles seront
les attentes des entreprises de demain pour le Grand Roissy ? Comment y préparer les
habitants du territoire pour qu’ils puissent en profiter au maximum ?
Jean-Louis HUSSON
Je vous présenterai en quelques mots les grands enseignements de l’étude que l’EPA
Plaine de France a commandée l’année précédente, étude qui apporte un certain nombre
d’éléments de prospective, ainsi que des repères. L’objectif de cette étude était d’évaluer
le nombre et le profil des emplois qui seront potentiellement générés par 25 projets
majeurs du Grand Roissy. Ces projets concernent tant le développement de l’aéroport en
lui-même que le Triangle de Gonesse ou la densification de Paris-Nord II. Nous avons
donc été conduits à mener un exercice de compréhension de ce que sont ces projets et de
ce qu’ils seront en mesure d’apporter pour le territoire.
Sans entrer dans le détail de chacun de ces projets, je rappellerai les principaux ordres
de grandeur. 130 000 emplois pourraient être créés sur 20 ans à la suite de la réalisation
de ces projets. Au cours de la première phase, que nous connaissons déjà aujourd'hui,
près de 20 000 emplois nouveaux devraient être générés. La deuxième phase, entre 2017
et 2025, sera une phase de montée en régime, qui permettrait de faire émerger
70 000 emplois supplémentaires. Au-delà de cet horizon, on évalue la création d’emplois à
30 000.
Les principales filières concernées sont les suivantes :
-
-
La dimension tertiaire devrait se renforcer à l’échelle du Grand Roissy en raison du
développement de parcs d’affaires importants et de l’immobilier de bureaux.
Le transport aérien devrait se développer et se diversifier.
Les métiers du transport et de la logistique, déjà très présents aujourd'hui, le
resteront certainement au travers de ces projets.
L’hôtellerie et la restauration seront amenées à se développer fortement, dans la
mesure où la plupart des grands projets contiennent des restaurants et des lieux
d’accueil associés aux commerces, aux loisirs et aux expositions. Ces deux
secteurs proposent des métiers parfois difficiles.
L’activité productive devrait être faiblement représentée : aucun de ces projets ne
comporte une dimension qui soit réellement industrielle.
En ce qui concerne les métiers qui seront concernés par ces projets, on s’aperçoit qu’il
n’existe pas réellement de révolution dans leur composition. Pour autant, ces métiers qui
apparaitront dans les prochaines années présentent dès à présent des difficultés de
recrutement, difficultés qui seront donc nécessairement amenées à s’amplifier. Il s’agit de
métiers relativement classiques, qui évolueront relativement peu, et qui sont d’ores et déjà
en tension en dépit du fait qu’ils soient accessibles sans nécessiter une qualification très
élevée. En parallèle, un certain nombre de métiers seront amenés à se transformer. Il en
Roissy-en-France, 19 juin 2013
24
Conférence Territoriale du Grand Roissy
est ainsi des métiers du commerce de gros, qui connaissent une évolution en douceur en
raison de l’évolution des process et des modes de relations. Les métiers du catering aérien
sont également concernés par des changements, avec le développement de la soustraitance et de l’offre de services. N’oublions pas que certains métiers que l’on retrouve
dans ces grands projets sont déjà fragilisés : il en est ainsi, s’agissant du transport aérien,
des agents d’escale, mais également des personnels de caisse. Dans le domaine de la
logistique, le rôle du manutentionnaire sera quant à lui particulièrement affecté par la
robotisation des grands entrepôts.
En résumé, nous avons fait en sorte de classer les emplois en fonction de leurs
niveaux de qualification. La majorité d’entre eux est accessible sans qu’il soit nécessaire
de disposer d’une qualification très élevée. Pour autant, les entreprises accroissent leur
niveau de requis. Il est important d’observer le changement d’échelle qui devrait survenir
entre 2017 et 2020, tant en termes de demande que de l’aptitude à y répondre.
Les enjeux sont donc les suivants : le potentiel d’emplois est considérable en dépit des
inconnues, avec une diversification des activités économiques. Les compétences-clés qui
seront requises de plus en plus souvent pour occuper un emploi sur le territoire sont au
nombre de trois :
-
Anglais à usage professionnel,
Aptitudes relationnelles,
Maîtrise de logiciels spécialisés.
Une stratégie de « traitement de masse » est nécessaire aujourd'hui pour développer
ces compétences sur le territoire. En effet, le niveau de qualification des actifs du territoire
se révèle particulièrement inquiétant : 40 % d’entre eux ont un niveau de diplôme
extrêmement faible, voire même aucun diplôme. Il convient donc de progresser sur cet
enjeu des non-qualifiés, mais également sur l’évolution de ceux qui disposent déjà d’un
bagage, dans le contexte d’un territoire qui soit réellement apprenant et ouvert sur
l’extérieur.
II) Échanges
Philippe COME
Nous avons parmi nous Sophie Virapin, Directeur Environnement et Développement
Durable chez Air France. Comment imaginez-vous les besoins des entreprises dans les
prochaines années ?
Sophie VIRAPIN
Air France se situe aujourd'hui dans une situation complexe, ce qui explique que notre
niveau d’embauches soit très contraint. Pour autant, l’embauche reprendra d’ici quelques
années. Nous avons besoin d’emplois très qualifiés, notamment au regard du virage que
prennent les nouvelles technologies. Nous n’avons plus besoin d’emplois très peu qualifiés
au sein de notre entreprise. Pour autant, nous générerons toujours de l’emploi peu qualifié
auprès de nos sous-traitants. L’embauche, notamment dans le domaine de la
maintenance, se fera sur des emplois qualifiés.
Le transport aérien continue toutefois à générer de nombreux emplois indirects. Nous
employons des alternants et des stagiaires qui permettent de développer leur qualification.
Nous travaillons aujourd'hui sur la sortie de ces alternants de façon à leur permettre de
trouver un emploi adapté en fonction des projets qui arrivent sur le territoire et des
entreprises qui y sont déjà implantées et qui embauchent.
Philippe COME
Quelles sont, selon vous, les formations qui seront indispensables demain au regard
de l’évolution des technologies ?
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Sophie VIRAPIN
Nous aurons toujours besoin de métiers autour du service. Vous avez mis en avant la
nécessité de l’anglais : il s’agit d’une évidence. Nous constatons l’inadéquation entre les
ressources disponibles autour de la plateforme et les besoins de formation, ce qui explique
que nous ayons choisi de mettre en place des associations qui travaillent dans ces
domaines. Il convient de poursuivre ce travail.
Philippe COME
Je me tourne vers nos invités pour leur demander quelle est leur vision de l’évolution
des besoins sur le territoire.
Un intervenant
Contrairement à ce qui a pu se dire précédemment, le niveau de qualification
progresse. Des hôtels haut-de-gamme s’installent, ce qui conduit à une augmentation
générale de la qualification des personnes qui y sont employées : dans de tels
établissements, le personnel de service doit parler plusieurs langues. Nous devons en
prendre conscience, tant les élus que l’Éducation Nationale et les structures de formation
et d’emploi. L’enseignement de l’anglais devrait démarrer beaucoup plus tôt qu’aujourd'hui.
Nous l’avons fait sur notre territoire, en créant une école au sein de laquelle l’anglais est
enseigné dès la maternelle.
Philippe COME
M. Chéritel, vous souhaitez réagir ?
Jacques CHERITEL
La France est dotée de trois objectifs en matière de qualification de la population
active : 20 % de la population active doit au moins atteindre le niveau 5 (CAP), 30 % doit
atteindre au moins un niveau bac professionnel et 50 % de la population doit atteindre le
niveau supérieur (BTS, Bac+2, Bac+3, etc.). L’avenir laisse donc augurer un
accroissement très sensible du niveau de qualification, ce qui sera plus ou moins vérifié en
fonction des territoires et des filières professionnelles. Le marché de l’emploi est de plus en
plus exigeant, notamment en termes de comportement et d’adaptation aux évolutions
professionnelles : sous peine d’exclusion définitive du marché du travail, il est nécessaire
d’acquérir un niveau minimum de compétences et de savoirs – que l’Éducation Nationale
définit en tant que « socle des connaissances et des compétences ». Il s’agit d’une
problématique majeure, notamment sur ce territoire, où demeurent un certain nombre
d’îlots au sein desquels ces niveaux de compétences ne sont pas acquis, ce qui pose un
problème de prérequis en termes d’insertion dans les formations qualifiantes. Des
dispositifs doivent être trouvés d’urgence pour permettre à ces populations d’atteindre au
moins ce niveau minimum, sous peine d’être durablement exclues du marché du travail.
Philippe COME
Vous n’êtes pas le premier, au sein de cette conférence, à évoquer la problématique
des prérequis.
Jacques CHERITEL
L’Éducation Nationale ne peut pas considérer qu’elle a réussi sa mission, dans la
mesure où le socle des connaissances n’est pas acquis sur tous les territoires. Pour
autant, il existe un mouvement dont le but est de faire en sorte que l’Éducation Nationale
offre la possibilité à l’ensemble d’une classe d’âge d’atteindre ce niveau minimum de
compétences, de façon à pouvoir s’adapter ultérieurement à ces métiers.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Un dernier point pour indiquer que nos diplômes sont créés dans le cadre de
commissions professionnelles consultatives, en présence des partenaires sociaux,
commissions qui prennent toujours en compte une composante prospective.
Philippe COME
Je souhaite donner la parole au représentant de Monsieur Montes, afin d’évoquer le
forum qu’il a récemment organisé.
Marc GENTILHOMME, DGS de la Communauté d’agglomération Terres de France
(depuis la salle), au nom de Mathieu Montes, adjoint au Maire de Tremblay-en-France
J’ai écouté avec intérêt les précédents orateurs, qui font état de la progression du
dialogue et de la gouvernance. Je tiens néanmoins à souligner que n’apparaît pas
toujours, dans les dispositifs qui ont été évoqués, le relais qui est fait avec le terrain, en
l’occurrence avec les collectivités et les municipalités qui, au quotidien, accueillent et
réorientent les demandeurs d’emplois.
Avec la communauté d’agglomération Roissy Porte de France, une opération d’emplois
a été organisée sur Aéroville : 330 postes étaient identifiés, et nous avons reçu 9 000
candidats, soit un rapport de 1 à 30. Il existe donc un problème dramatique en termes de
quantité d’offres d’emplois, problème qui est tant national qu’européen et qui s’explique
avant tout par les difficultés du développement économique. Mais il s’agit également d’un
problème de formation et d’adéquation. Il est nécessaire de réorienter ces personnes vers
des possibilités de compréhension des parcours et des formations. Comment pouvonsnous travailler de concert sur des stages et des opérations de qualification précises, sur
des sas de réorientation des jeunes et des moins jeunes, de façon à les prendre en charge
et à éviter qu’ils ne soient exclus définitivement du monde du travail ?
Philippe COME
Ces chiffres sont très significatifs en termes d’attente des populations demandeuses
d’emploi. Quelle est la place des collectivités locales dans ce contexte ? Je me tourne vers
un représentant des Conseils Généraux.
Michel MONTALDO
Au sein du Conseil Général du Val-d’Oise, nous travaillons sur plusieurs axes. La
création de l’emploi se fait par l’intermédiaire des entreprises, ce qui explique que nous
ayons choisi de les aider dans leur installation, notamment en attirant des entreprises
étrangères sur le territoire. Un second axe, souvent occulté dans les débats, concerne le
problème des femmes de 38 ans, qui sont souvent assez qualifiées, qui n’ont pas le permis
de conduire ou qui n’ont pas les moyens d’acheter une voiture, et qui font face à un
problème majeur vis-à-vis des horaires décalés qu’on rencontre sur la plateforme, en
l’occurrence celui du mode d’accueil de leurs enfants. Nous travaillons aujourd'hui sur le
mode de garde des enfants des femmes qui sont prêtes à travailler.
Laurent VILBOEUF
Il me semble qu’il est nécessaire de progresser sur le sujet de l’attractivité des emplois.
Comment travailler sur l’image des emplois présents sur la plateforme ? Il s’agit à mon
sens d’une piste de travail majeure pour attirer ces jeunes sur ces emplois.
Sur la question des métiers de demain, les OPCA ont un rôle majeur à jouer : ils
connaissent les entreprises et peuvent travailler à la mobilisation de financements pour des
formations qui seront en mesure de répondre aux besoins suscités par les évolutions à
venir. En matière de réactivité, il est important de s’appuyer sur les OPCA et sur les
partenaires sociaux, de même qu’il est nécessaire de s’inscrire désormais dans une
logique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriales.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Conclusion
Emmanuel MAUREL
Vice-président du Conseil Régional d’Ile-de-France, en charge de la formation
professionnelle, de l’apprentissage, de l’alternance et de l’emploi, Président du GIP Emploi
Roissy CDG
Je partage le point de vue selon lequel il est nécessaire de ne pas oublier la question
de l’attractivité des emplois, qui implique en parallèle celle de l’attractivité de la
rémunération.
Je salue les orateurs qui se sont succédé aujourd'hui. Je vous transmets les
chaleureuses salutations du Président Huchon, dont vous savez combien il considère que
Roissy constitue un territoire prioritaire, un territoire stratégique s’il en est pour la Région
Ile-de-France. L’emploi et la formation sont également des politiques prioritaires, tant pour
la Région que pour le Gouvernement : vous connaissez les chantiers mis en œuvre dans
ce domaine, qu’il s’agisse des emplois d’avenir ou des contrats de générations. La
Conférence sociale qui se tient à partir de lundi aura pour principal objet d’évoquer ces
sujets.
Je retiens de ces échanges que le diagnostic est partagé, tant sur les atouts de notre
territoire que sur ses handicaps. Il convient désormais de passer à une phase de
préconisations et de coordination, qui implique un certain nombre de décisions politiques.
Le Grand Roissy compte une pléiade d’acteurs, chacun d’eux étant persuadé du bienfondé de son action, ce qui conduit à un fonctionnement en silo en lieu et place d’un
fonctionnement en réseau. Nous avons besoin d’un pilotage politique fort, qui nécessitera
un choc de simplification institutionnel qui ne pourra que bénéficier aux principaux
intéressés, en l’occurrence les habitants du territoire.
La Région est partie prenante de ces sujets : elle s’est attaquée à la fois à la formation
des demandeurs d’emplois (11 % du budget total est consacré à la formation des
chômeurs du territoire de Roissy, qui représentent 6 % de la population francilienne), avec
des programmes spécifiques. Nous intervenons également dans la formation des salariés :
sur la plateforme aéroportuaire, nous avons ainsi un partenariat très fructueux avec Pôle
Emploi et le Fongecif pour soutenir la reconversion des salariés, et notamment des
salariés précaires. Nous nous engageons également en faveur de l’apprentissage et de
l’alternance, dont le développement doit être poursuivi. Nous avons des programmes
spécifiques avec nos partenaires, notamment avec l’État, pour prévenir le décrochage
scolaire sur la zone de Val de France, en réunissant l’ensemble des acteurs concernés.
Enfin, la Région s’engage fortement sur les emplois d’avenir, programme en lequel nous
croyons fortement en dépit de sa lente mise en route. Nous avons choisi de dynamiser ce
programme en votant un complément de rémunération de 20 % pour aider les associations
et les entreprises d’économie sociale et solidaire à recourir à un emploi d’avenir,
complément auquel s’ajoute, de la part de la région, un engagement financier concret pour
financer le parcours de formation. L’engagement régional pour Roissy est donc majeur.
Pour favoriser la coordination, il convient de prendre en compte un certain nombre de
difficultés, au premier rang desquelles le problème de l’information, notamment en termes
d’analyse des besoins de formation. C’est la raison pour laquelle a été lancée une
cartographie de l’emploi et de la formation sur Roissy. Par ailleurs, nous devons faire
preuve d’une plus grande précision sur l’information à destination des prescripteurs et des
bénéficiaires. Nous y travaillons avec l’État. S’agissant de l’orientation, dont les services
pourraient être transférés à la Région, nous travaillons à la mise en place d’une Cité des
Métiers du Grand Roissy, un lieu unique qui réunirait les informations sur les métiers, les
formations et les reconversions, avec la possibilité de rencontrer un professionnel de
l’Éducation Nationale ou de Pôle Emploi.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Une proposition a été lancée pour créer un pacte du développement sur le territoire de
Roissy : cet outil stratégique, qui manque grandement aujourd'hui, permettrait d’assurer
une meilleure coordination.
Le GIP Emploi Roissy, dont j’ai pris la présidence après plusieurs années de
fonctionnement erratique, est aujourd'hui repris en main. Ses statuts sont en cours de
modification. Nous avons fait en sorte que les financeurs soient les décideurs, ce qui
n’empêche pas que l’ensemble des acteurs de l’emploi et de la formation du territoire du
Grand Roissy soient invités, en particulier les partenaires sociaux dont le rôle est décisif.
Nous avons créé un comité stratégique qui permet de discuter des orientations pour la
plateforme. Malheureusement, le GIP Emploi et ses actions ne sont pas encore
suffisamment connus. Nous avons ainsi mis en place un dispositif à destination des jeunes
des zones limitrophes pour favoriser l’apprentissage de l’anglais. Un outil a été lancé à
destination des salariés précaires qui souhaitent se reconvertir ou gagner en qualification.
Nous avons créé un poste de développeur dont l’objectif est de convaincre les entreprises
de faire appel à l’apprentissage. Enfin, avec Pôle Emploi, nous avons décidé d’ouvrir le
projet d’une antenne VAE (Validation des Acquis d’Expérience) sur Roissy : le Conseil
Régional a créé à cette occasion un chéquier unique VAE Pôle Emploi-Région, afin de
simplifier les démarches des demandeurs.
Roissy-en-France, 19 juin 2013
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Conférence Territoriale du Grand Roissy
Clôture
Jean DAUBIGNY
Préfet de la Région d’Île-de-France, Préfet de Paris
Je constate que nous partageons tous l’ambition d’agir, et d’agir de concert. Il convient,
de rappeler que nous n’agissons pas dans un cadre qui serait strictement franco-français :
Roissy, sa plateforme, ses entreprises et ses activités n’existent qu’en raison de la
dimension internationale de sa principale activité. Cette considération doit dicter notre
conduite, nos résolutions et la suite de notre travail : nous sommes dans la « villemonde », ce qui présente un certain nombre d’atouts mais également un certain nombre
d’aspects déplaisants. Mais à chaque fois que nous agissons ou que nous avons à penser
pour agir, nous devons nous rappeler cet impératif absolu, ce qui m’oblige à prononcer le
mot de concurrence. Lorsqu’un investisseur considère tout l’intérêt que présentent notre
plateforme, nos entreprises, la richesse de notre formation, il se félicite de tous ces
avantages, tout en demandant une simplification et une coordination plus importantes
entre les différents acteurs de la plateforme. Notre responsabilité est grande à l’égard de la
population, et notamment des jeunes qui aspirent à trouver un emploi. J’interpelle tous les
acteurs de l’emploi pour les inviter à utiliser au mieux le dispositif des emplois d’avenir.
Je terminerai en saluant ces échanges privilégiés qui ont permis de constater tout le
dynamisme dont vous êtes porteurs et que nous devons conforter. La gouvernance est
nécessaire, car la stratégie le commande. Chacun doit accepter de faire preuve de
modestie et d’entraide, d’autant que l’argent public sera amené à se raréfier dans les
prochaines années. Nous devons faire en sorte que les diagnostics que nous avons
partagés aujourd'hui ne le soient plus dans dix ou quinze ans.
Je vous donne volontiers rendez-vous pour la quatrième Conférence du Grand Roissy,
l’an prochain, en espérant que celle-ci ne soit plus celle du constat, mais de l’action.
Document rédigé par la société Ubiqus – Tél : 01.44.14.15.16 – http://www.ubiqus.fr – [email protected]
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