6es RencontRes scientifiques du GRoupe Gineco
Transcription
6es RencontRes scientifiques du GRoupe Gineco
d www.onko.fr R e v u e p l u r i d i s c i p l i n a i r e En pratique Doit-on donner un traitement systémique adjuvant pour les petites tumeurs Her2+ en 2012 ? Bilan des dernières études e n Lecture critique Le bévacizumab, Une nouvelle arme dans la prise en charge du cancer de l’ovaire Dr Florian Pasquet Dr David Coeffic O n c o l o g i e Mise au point Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon Un pronostic lié aux caractéristiques histologiques Dr Christos Chouaid 6 Rencontres scientifiques du Groupe GINECO es Coordonné par Bénédicte Votan (Directrice d’ARCAGY-GINECO) Éditorial : Dr Isabelle Ray-Coquard 66 • Repenser le cancer de l’ovaire après le Cancer Genome Atlas Project Dr Jérôme Alexandre •P rise en compte de la qualité de la vie après la prise en charge des patientes avec un cancer de l’ovaire Pr Florence Joly •L es temps forts de ces 6 Rencontres es Pr Eric Pujade- Lauraine •M yths and facts about patient expectations Propos rapportés par le Pr Jean-Emmanuel Kurtz, Dr Radoslav Chekerov •L a qualité des essais cliniques Dr Anne-Claire Hardy-Bessard • Le GINECO, un groupe dynamique en France comme à l’international Bénédicte Votan Volume 4 • n° 30 • Mai 2012 • 8 E Revue pluridisciplinaire en Oncologie Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier Coordination scientifique : Dr Thierry Bouillet Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu • Rédactrice : Laure Guiheneuf • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Chef de studio : Laurent Flin • Maquette et Illustration : Elodie Lecomte et Antoine Orry • Chef de publicité : Catherine Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne - 60205 Compiègne oncologie générale Responsable éditorial : Thierry Bouillet (Bobigny), Didier Ammar (Marseille),Céline Bourgier (Villejuif), Eric Dudoit (Marseille), Paul Escure (Bobigny), Karen Kraeuter (Bobigny), Frédéric Selle (Paris), Marc Spielmann (Villejuif), Laurent Zelek (Bobigny) sommaire n ActualitÉs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . nEn pratique oncologie gynécologique et mammaire Responsable éditorial : Pierre Collinet (Lille) Katty Ardaens (Seclin), Bénédicte Comet (Lille), Paul Cottu (Paris), Eric Lambaudie (Marseille), Anne Lesoin (Lille), Olivier Romano (Lille), Richard Villet (Paris) p. 113 Doit-on donner un traitement systémique adjuvant pour les petites tumeurs Her2+ en 2012 ? Bilan des dernières études. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 114 Dr David Coeffic (Neuilly sur Seine) n Dossier (détachable) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 119 6es Rencontres scientifiques du Groupe GINECO (mars 2012, Paris) Coordonné par Bénédicte Votan (Directrice d’ARCAGY-GINECO) oncologie digestive Responsables éditoriaux : Jean-Didier Grangé (Paris), Gaëtan Des Guetz (Bobigny) Sophie Dominguez (Lille), Philippe Merle (Lyon) Mai 2012 • Vol. 4 • N° 30 www.onko.fr Éditorial : un vrai succès !����������������������������������������������������������������������������������������������������������� p. 120 Dr Isabelle Ray-Coquard (Lyon) Pneumologie et oncologie Responsable éditorial : Emmanuel Martinod (Bobigny) Patrick Bagan (Argenteuil), Pierre-Yves Brillet (Bobigny), Laurent Brouchet (Toulouse), Jean Baptiste Chadeyras (Clermont-Ferrand), Kader Chouahnia (Bobigny), Bertrand De-Latour (Rennes), Hervé Dutau (Marseille), Pierre-Emmanuel Falcoz (Strasbourg), Sophie Jaillard (Lille), René Jancovici (Saint-Cloud), Jacques Jougon (Bordeaux), Christophe Lancelin (Brest), Christine Levy (Bobigny), Gilbert Massard (Strasbourg), Isabelle Monnet (Créteil), Jean-Marc Naccache (Bobigny), Dana Radu (Bobigny), Pierre Saintigny (Houston, USA), Agathe SeguinGivelet (Bobigny), Pascal-Alexandre Thomas (Marseille), Yurdagul Uzunhan (Bobigny) uro-oncologie Comité éditorial : Stéphane Culine (Créteil), Alexandre de la Taille (Créteil), Christophe Hennequin (Paris), Bernard Malevaud (Toulouse), Catherine Mazerolles (Toulouse) n Repenser le cancer de l’ovaire après le Cancer Genome Atlas Project : anomalies du génome et thérapies ciblées. . . . . . . p. 123 Dr Jérôme Alexandre (Paris) n Prise en compte de la qualité de la vie après la prise en charge des patientes avec un cancer de l’ovaire : une démarche qui devient incontournable. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 126 Dr Florence Joly (Caen) n Les temps forts de ces 6es rencontres. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 128 Pr Eric Pujade-Lauraine (Paris) n M yths and facts about patient expectations : une conférence de prestige. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 129 Pr Jean-Emmanuel Kurtz (Strasbourg), Dr Radoslav Chekerov (Berlin) n La qualité des essais cliniques : c’est notre image qui est en jeu !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 131 Dr Anne-Claire Hardy-Bessard (Saint-Brieuc) n Le GINECO, un groupe dynamique en France comme à l’international : des protocoles et des publications en nombre !. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 134 Bénédicte Votan (Paris) pharmacie hospitalière et oncologie Responsable éditorial : Vincent Launay-Vacher (Paris) Gaël Deplanque (Paris), François Lemare (Villejuif), Jean-Baptiste Rey (Reims) OnKo + est une publication ©Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : [email protected] Site : www.onko.fr RCS Paris B 394 829 543 N° de Commission paritaire : 0414 T 89810 ISSN : 2101-9495 Mensuel : 10 numéros par an Les articles de “OnKo +” sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. nLecture critique Le bévacizumab : une nouvelle arme dans la prise en charge du cancer de l’ovaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 135 Dr Florian Pasquet (Lyon) nMise au point Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon : un pronostic lié aux caractéristiques histologiques . . . . . . . . . . . . p. 136 Pr Christos Chouaid (Paris) n Kiosque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . OnKo+ est indexé dans la base Pascal. Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages). p. 118 p. 140 p. 141 actualités Dépistage EN BREF Le CNGE donne la priorité L’Afssaps devient l’ANSM ! C‘est officiel, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) existe depuis le 1er mai 2012. L’ANSM veut en priorité « garantir la sécurité des patients lors de l’utilisation des médicaments et des produits de santé et l’accès aux innovations thérapeutiques ». Site internet : www.ansm.sante.fr Observatoire sociétal des cancers La ligue contre le cancer publie le 1er rapport de « l’Observatoire sociétal des cancers ». Les malades ont enfin la parole. Ce travail « met en lumière les difficultés des malades qui vivent cette maladie, dans une réalité très éloignée des données théoriques » (paupérisaton, lourdeur des étapes administratives…). En ligne sur : www.ligue-cancer.net Les molécules Dbait pour booster la radiothérapie Booster la radiothérapie pour en augmenter l’efficacité, c’est le principe des molécules Dbait. Elles font croire aux cellules tumorales qu’elles sont plus endommagées qu’elles ne le sont. Un essai clinique de phase 1 a été lancé dernièrement à l’Institut Curie et les premiers résultats semblent prometteurs. Pour en savoir plus : curie.fr au dépistage du cancer du col ! L e CNGE (Collège national des généralistes enseignants) a rappelé le 10 mai dernier qu’en France, le cancer invasif du col utérin touche 3 000 patientes et est à l’origine de 1 000 décès par an. La pratique d’un frottis cervico-utérin est recommandé par la Haute autorité de santé (HAS) à la fréquence d’un tous les trois ans après 2 frottis normaux espacés d’un an, pour les femmes âgées de 25 à 65 ans. On note aujourd’hui que moins de 60 % des femmes ont des frottis réguliers, en particulier dans les milieux sociaux les plus défavorisés. En 2010, la HAS a recommandé le dépistage organisé du cancer du col en plaçant le médecin traitant au cœur du dispositif. Ainsi, la CNGE : « - demande que soit rapidement mis en place le dépistage organisé des lésions précancéreuses et du cancer du col de l’utérus tel que proposé par la HAS ; - demande que le résultat des frottis soit systématiquement adressé au médecin traitant, responsable de la coordination du dépistage, même s’il ne l’a pas réalisé lui-même ; - encourage les médecins traitants à s’impliquer davantage dans le dépistage, en étant particulièrement attentifs aux femmes socialement défavorisées ; - rapelle la nécessité de continuer à faire des frottis chez les femmes ayant été vaccinées contre certains virus HPV. » ß Pour en savoir plus : www.cnge.fr Donations « Révolution Cancer » : l’appel au don L a Fondation Gustave Roussy relance l’appel aux dons pour soutenir la médecine personnalisée dans le traitement du cancer. En 3 ans, 2010 à 2013, la fondation espère récolter près de 10 millions d’euros. Le projet s’articule autour de 5 objectifs majeurs : identifier les gènes de chaque tumeur, gagner du temps, mieux caractériser les tumeurs rares, modéliser l’approche des traitements personnalisés et mieux comprendre les résistances aux traitements. La Fondation compte sur la perspective des échéances fiscales les 31 mai et 15 juin, pour inciter les donateurs. ß Pour en savoir plus : www.revolution-cancer.fr Prévention Journée annuelle de prévention et de dépistage des cancers de la peau L onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 e 24 mai est l’occasion de rappeler l’importance de la prévention et de la détection précoce des cancers de la peau ainsi que les risques liés à l’exposition aux rayonnements UV artificiels ou naturels dans l’apparition des cancers. Depuis 30 ans, le nombre de cancers de la peau n’a cessé d’augmenter. L’incidence des mélanomes a, par exemple, plus que triplé entre 1980 et 2005. En cause, un changement de comportement qui consiste à s’exposer davantage au soleil et à avoir recours de plus en plus aux ultraviolets (UV) artificiels. En 2009, le CIRC (Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) a classé les UV arti- ficiels comme cancérigènes certains pour l’homme. Le nouveau Baromètre Cancer 2010 Inpes-INCa semble confirmer que les français connaissent les risques d’une exposition au soleil mais cette connaissance n’est pas suivie de gestes de prévention. Cette prévention est pourtant indispensable car les traitements des cancers cutanés sont d’autant plus efficaces que leur détection est récente. A cet effet, l’INCa a réalisé pour les professionnels de santé, des outils dont un module de formation visant à faciliter le repérage des lésions suspectes et à améliorer la détection précoce des cancers cutanés. ß Pour plus d’information : www.e-cancer.fr 113 en pratique général Doit-on donner un traitement systémique adjuvant pour les petites tumeurs Her2+ en 2012 ? Bilan des dernières études Dr David Coeffic * Introduction On a longtemps pensé que le sujet des petites tumeurs surexprimant Her2 était anecdotique, en raison de la rareté du nombre de cas, ou d’un supposé bon pronostic. Ce manque d’intérêt est illustré par le fait que les grands essais randomisés avec trastuzumab excluaient les tumeurs de moins de 1 cm (1, 2). Cette opinion semble maintenant dépassée. En moyenne, chacun de nos collègues oncologues ou chirurgiens, rapporte, tous les mois, la présentation de 1 à 2 cas en RCP de sénologie dans les grandes structures. De plus, nous disposons des recommandations actualisées du NCCN 2012 (3), ainsi que d’un récent consensus d’experts français publié en 2011 (4). Il est maintenant certain que les tumeurs Her2 infracentimétriques sont potentiellement graves, un risque de rechute approchant les 25 % dans les plus grandes séries rétrospectives. Ce risque est linéaire dans le temps. Il existe de nombreuses questions autour de ce sujet. Définition du problème, état de l’art, consensus Une petite tumeur Her2 est infracentimétrique, T1a (0 à 5 mm) ou T1b (6 à 10 mm), infiltrante, canalaire ou lobulaire (les lobulaires Her2+ existent), N0, et ce, quel que soit les autres facteurs histopronostiques ou biologiques. Le consensus de Saint Gallen en 2007 (5) classait ces petites * Clinique Hartmann, Neuilly sur Seine 114 La question de la prédictivité en est une. Doit-on ordonner un traitement anti-Her2, éventuellement associé à une chimiothérapie, dans les tumeurs T1ab ? Il est difficile de répondre avec un niveau de preuve suffisant, parce que l’étude randomisée qui poserait la question n’existe pas, et n’existera probablement pas. On est dans le domaine de “l’indécidabilité mathématique”, car la faiblesse de la ressource en patient, l’homogénéité de répartition géographique de la ressource, la faiblesse du nombre d’évènement dans le temps, l’arrivée de nouveaux anti Her2, et les controverses autour du régime de chimiothérapie à associer, rendent difficile la réalisation d’un essai randomisé. Il y a d’autres questions : Quel est le pronostic de la surexpression des RH dans cette population ? Quel régime de chimiothérapie associer ? Quel type de développement pour essayer de répondre aux questions posées par les tumeurs infracentimétriques ? tumeurs Her2 en risque intermédiaire mais ne préconisait aucun traitement systémique. Les “Guidelines” du NCCN actualisé en 2012 (3), abordent le sujet de façon précise : ils recommandent de ne réaliser une association trastuzumab + chimiothérapie que pour les T1b RH-. Pour les T1B RH +, l’indication est basée sur l’évaluation du bénéficerisque, compte tenu de l’absence d’étude randomisée. Pour les T1a, il n’y a aucune recommandation de traitement systémique. En 2011, on peut lire dans le bulletin du cancer un avis d’expert français (4) basé sur l’analyse exhaustive de la littérature sur le sujet, allant beaucoup plus loin que le NCCN, en recommandant de faire chimiothérapie + trastuzumab pour tous les stades T1b, et pour les T1a RH -. Dans les T1a RH +, les auteurs proposent de discuter un traitement systémique en cas de signe de prolifération (KI67, SBR III, emboles) ou d’âge inférieur à 35 ans. onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Doit-on donner un traitement systémique adjuvant pour les petites tumeurs Her2+ en 2012 ? Il reste donc beaucoup d’interrogations autour de la taille (quid des T1a) et à propos du statut RH. D 1.00 ≤ 1 cm Amp 0.75 Her2-neu : facteurs pronostics pour les tumeurs T1ab N0 ? Her2 est un facteur pronostique, même pour les petites tumeurs, mais seule la littérature peut donner l’aspect quantitatif de ce pronostic. Il convient de regarder les séries rétrospectives en privilégiant les cohortes de patientes non traitées, comportant des patientes Her2 positive et négative (Tab. 1). La série de Press (6) (Fig. 1), en 1997, portant sur 382 femmes non traitées, Her2+ contrôlé par FISH, est la première étude qui montre l’impact pronostic de la surexpression Her2, pour les tumeurs T1, et notamment pour les T1ab. Il y a une interaction entre taille et Her2. Pour les T1ab Her2+, le risque de récidive à 5 ans est de 20 %, et à 10 ans de plus de 30 %. > 1 cm Amp ≤ 1 cm Amp + > 1 cm Amp + 0.50 0.00 0 24 48 72 96 120 144 Figure 1 - Série de Press, survie sans récidive. La version 2009 de la cohorte du MD Anderson (7) (Fig. 2), comporte uniquement des patientes T1ab non traitées, 965 patientes en tout, dont 96 patientes Her2+, avec un suivi médian de 6,2 ans. Le risque de récidive à 60 mois est à 23 %. Les différences sont significatives (SSR : HR 2,68 (1,44-5) ; p = 0,002 ; SSR à distance : HR 5,30 (2,23-12,62) ; p = 0,0002). 703 patientes T1ab (8), montrant un risque de récidive de 26 % à 5 ans pour les tumeurs Her2+, contre 5 % pour les tumeurs Her2-. Plus récemment, le CAC de Montpellier publie une série de Depuis les taxanes et les thérapies ciblées, on a pris l’habitude Her2-neu : facteur prédictif d’efficacité du Trastuzumab pour les tumeurs T1ab N0 ? Tableau 1 - Récapitulatif des principales études rétrospectives tumeur T1 avec tumeur exprimant Her2 -neu. Type T1a-b exclusif Nombre T1a T1b Tumeurs Her2+ (%) Suivi (an) % de patientes traitées Press Multicentrique Non 382 ? ? Non Black Monocentrique Non 27 47 100 5,6 ? Joensuu Multicentrique Oui 49 264 12 9,5 Non Tovey Monocentrique Non 230 6.9 6,5 Non Chia Monocentrique Non 103 225 6.4 12,4 67 % Curigliano Monocentrique Cas témoin Oui 85 65 100 4,5 Oui Gonzalez-Angulo Monocentrique Oui 323 642 10 6,2 Non Peron Multicentrique Oui 52 153 100 ? 40 % Rouanet Multicentrique Oui 131 572 5,9 ? Non Auteurs onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 115 en pratique 1.0 1.0 0.8 Survie sans récidive à distance (proportion) Survie sans récidive (production) 0.8 0.6 0.4 0.6 0.4 0.2 0.2 Negative Positive Negative Positive 0 12 24 36 48 Temps depuis le diagnostic (mois) 60 0 12 24 36 48 60 Temps depuis le diagnostic (mois) Figure 2 - Série de Gonzales-Angulo, survie sans récidive, survie sans récidive à distance (7). de rappeler la différence entre facteur pronostique et prédictif. Le bénéfice du Trastuzumab estil conservé dans les petites tumeurs ? On pourrait clore le débat en extrapolant aux tumeurs T1ab les résultats des grandes études, mais une démarche méthodologiquement fondée nous en empêche. On peut émettre l’objection que compte-tenu de l’interaction taille/Her2, Her2 ne soit pas un argument réellement impactant pour les tumeurs infracentimétriques. Il n’existe aucune étude permettant de conclure. On doit se contenter d’une approche indirecte et/ou pragmatique. Les études Hera (2) et BCIRG 006 (1) comportent quelques T1 dans leur population. Dans Hera, sur 3401 patientes, il y a 93 T1abN0, et 510 T1cN0. Le Hazard Ratio (HR : 0,53 ; IC 95 % : 0,26-1,07) montre que la différence d’évènement en faveur de trastuzumab s’étend au T1c. Les T1ab sont trop faible en nombre dans cet essai pour permettre des statistiques, mais l’extrapolation 116 des T1c au T1ab est tentante. Dans BCIRG 006, l’analyse en sous-groupe, montre un maintien du bénéfice en survie, au bénéfice des deux bras comportant du Trastuzumab, pour les tumeurs de moins de 2 cm. Le bénéfice paraît même plus important, mais il faut se garder d’une interprétation en raison de la faiblesse des effectifs. Il existe une approche plus pragmatique, à travers les deux démarches suivantes. La cohorte multicentrique rétrospective AERIO/REMAGUS (9) comporte 96 tumeurs T1ab Her2-neu, dont 20 % de tumeurs T1a. Toutes les tumeurs SBR II ou III, ou RH -, soit 40 patientes, ont reçu trastuzumab ou trastuzumab + chimiothérapie. Les autres, qualifiées de “bon pronostic”, 56 patientes, n’ont pas reçu de traitement. Après un suivi de 80 mois, on observe les récidives seulement dans le groupe de “bon pronostic”, au nombre de 9 %. Les données issues du registre de Californie (10) ont permis d’identifier les tumeurs T1ab N0, de les diviser en 2 groupe, les Her2- et les Her2+. Sur la période 20002004 (9 409 cas), on observe une nette différence entre les 2 groupes, en survie. Sur la période 2005-2007 (10 779 cas), il y a en revanche superposition des courbes. On peut supposer qu’à partir de 2005, année de la généralisation des prescriptions de trastuzumab suite au publication des études adjuvantes, on mesure tout simplement l’impact pronostique de l’emploi de l’anti-Her2. Cette conclusion est peu contestable pour peu que le registre ait été exhaustif pour le recueil des données, ce qui est bien la vocation d’un registre. Quel est l’impact de la surexpression des récepteurs hormonaux sur le pronostic dans le contexte des petites tumeurs her2-neu ? Les données de l’étude de Chia (11) avait suggéré l’éventuel suppression du caractère pronostic défavorable d’Her2 dans les petites tumeurs surexprimant les onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Doit-on donner un traitement systémique adjuvant pour les petites tumeurs Her2+ en 2012 ? RH. En effet, les courbes de survie sans récidive des tumeurs T1 dans cette série sont quasiment superposables pour les tumeurs Her- RH+, Her- RH- et Her+ RH+. En revanche, la série de Montpellier (8) montre un pronostic plus défavorable pour le groupe Her2+ RH +, mais sur un petit effectif (N = 25). L’analyse rétrospective 2009 des tumeurs T1ab au MD Anderson (7), est intéressante car la série est assez homogène et non “polluée” par les traitements. En analyse multivariée, le statut des récepteurs hormonaux n’a pas d’impact sur la survie sans récidive métastatique (HR : 0,41 (0,23-0,72) ; p = 0,002). Il est difficile de répondre à l’heure actuelle de façon univoque à la question. Cependant, on a l’impression d’une diminution de l’impact pronostique de la surexpression des récepteurs hormonaux dans cette population de petites tumeurs Her2. L’étude cas-témoin de Curigliano (12) est assez instructive à ce propos. La série compare notamment une cohorte de 79 patientes Her2+ RH+ à une population témoin de 156 patientes Her2RH+. Les courbes de survie sont bien séparées, accréditant l’opinion développée dans la maladie métastatique par J. Basselga, selon laquelle les tumeurs Her2+ RH+ ne sont pas de vrais tumeurs RH+, mais plutôt des apparentées au groupe luminal B, donc moins sensibles à l’hormonothérapie. Doit-on traiter les tumeurs T1a de mauvais pronostic ? Le facteur taille est très arbitraire. La taille est d’abord une onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 variable continue, en partie subjective puisque qu’elle repose sur la mesure humaine. Les cut-off de 5 mm pour T1a et 10 mm pour T1b ont été fixées de façon arbitraire et ancienne. La série de Rakhit et GonzalesAngulo (7), reprend les données du MDAnderson. En analyse multivariée ajustée au statut Her2, RH, SBR, et à l’âge, il n’y a pas d’influence du facteur taille (T1a ou T1b) sur la survie sans récidive (HR : 1,59 (0,912,78) ; p = 0,103) et sur la survie sans récidive à distance (HR : 0,41 (0,23-0,72) p = 0,002). C’est la série la plus robuste en terme d’effectif, avec 323 patientes T1a dont 43 tumeurs Her2+ et 642 patientes T1b dont 55 tumeurs Her2+. Il faut cependant reconnaître certains biais : nous n’avons pas le détail dans la publication des caractéristiques histopronostiques des T1a, et comme le suggèrent les auteurs dans la partie discussion il y a peut-être un biais de sélection par “effet centre” vers des tumeurs T1a de pronostic particulièrement “péjoratif”. Actuellement, le consensus du NCNN (3) ne recommande pas de traiter les T1a. Cependant dans certains cas très rares de tumeur T1a, avec facteurs histopronostiques défavorables, pour peu qu’il s’agisse bien d’une tumeur infiltrante, il pourrait être licite de discuter un traitement à la lumière des données du MD Anderson. Quel schéma thérapeutique avec trastuzumab pour les tumeurs T1ab ? Aucune étude ne répond à cette question. Dans une logique de bénéficerisque, il serait licite de privilégier un schéma sans anthracyclines. Le schéma docétaxel-carboplatine-trastuzumab du BCIRG 006 (1) est difficilement recommandable, car cet essai n’incluait pas de tumeur inferieure à 1 cm. Dans l’étude européenne Hera (2), il y avait 60 tumeurs T1ab, mais nous n’avons pas le détail précis dans cette population des schémas thérapeutiques utilisés. Jones a repris son schéma docétaxel-endoxan associé à trastuzumab dans une étude de faisabilité sur 263 patientes en 2008 (13). Il y a seulement 23 % de baisse de FEV significative et 3,4 % des patientes ont arrêté prématurément leur traitement pour raison cardiologique, sans toutefois que soit rapportée une seule insuffisance cardiaque clinique. Conclusion Le caractère pronostic de Her2 dans les tumeurs T1ab N0 est clairement établi. Le risque de récidive est de 9 à 25 % à 5 ans et il est environ 2,5 fois plus élevé que dans la même tumeur version Her négatif. Le caractère prédictif en revanche n’est pas clairement établi. Cependant, plusieurs études pragmatiques suggèrent que le caractère Her2, même s’il rentre en interaction avec la taille, garde un caractère prédictif majeur en faveur de l’emploi du trastuzumab. Dans la “vraie vie”, l’utilisation du trastuzumab est actuellement généralisée pour les T1b sauf exception de tumeur de très bon pronostic, et l’étude rétrospective sur le registre californien (10), sur 10 ans, vient confirmer a posteriori le changement apporté à l’histoire naturelle de ces petites tumeurs. 117 en pratique A propos de l’impact de la surexpression des RH dans les tumeurs T1ab, on peut penser que la population RH+ Her2+ présente un pronostic plus défavorable que la population qui ne surexprime par Her2. De plus, en analyse multivariée, le caractère pronostic de Her2 est indépendant du statut RH dans la série des patientes non traitées du MD Anderson (7), qui reste, à cette date, la série la plus exhaustive. La question de la taille reste entière, et la littérature ne peut pas répondre sur la nécessité de traiter les T1a. Une analyse détaillée du type de tumeurs T1a dans l’étude de Gonzales-Angulo (7) permettrait d’avancer dans ce domaine. On peut considérer le consensus du NCCN (3) comme une base décisionnelle, en standard. Concernant les T1b RH+, un traitement par Trastuzumab peut être proposé (4). Pour les T1a, lorsqu’on constate d’autres critères de mauvais pronostic, on pourrait aussi discuter d’un traitement (4). Cette situan tion reste très rare. Mots-clés : Her2, Trastuzumab, Tumeur T1ab Bibliographie 1. Slamon D, Eiermann W, Robert N et al. Adjuvant trastuzumab in HER2positive breast cancer. N Engl J Med 2011 ; 365 : 1273-83. 2. Untch M, Gelber RD, Jackisch C et al. Estimating the magnitude of trastuzumab effects within patient subgroups in the HERA trial. Ann Oncol 2008 ; 19 : 1090-6. 3. NCNN Clinical Guidelines in Oncology (NCCN Guidelines)®, Breast Cancer – v.1.2012. 4. Penault-Llorca F, Coeffic D, Delozier T et al. Node negative breast cancer. Beyond international consensus: a pragmatic approach. Bull Cancer 2011 ; 98 : 807-25. 5. Goldhirsch A, Wood WC, Gelber RD et al. Progress and promise: highlights of the international expert consensus on the primary therapy of early breast cancer 2007. Ann Oncol 2007 ; 18 : 1133-44. 6. Press MF, Bernstein L, Thomas P et al. HER-2/neu gene amplification characterized by fluorescence in situ hybridization: poor prognosis in nodenegative breast carcinomas. J Clin Oncol 1997 ; 15 : 2894-904. 7. Gonzalez-Angulo AM, Litton JK, Broglio KR et al. High risk of recurrence for patients with breast cancer who have human epidermal growth factor receptor 2-positive, node-negative tumors 1 cm or smaller. J Clin Oncol 2009 ; 27 : 5700-6. 8. Rouanet P, Daures JP, Roger P et al. HER2 Expression is the major risk factor for recurrence in pT1a-b,N0 breast cancer: A french regional population-based study of 671 patients. SABCS 2011. Abstract P2-12-16. 9. Rodrigues MJ, Wassermann J, Albiges-Sauvin L et al. Treatment of nodenegative infra-centimetric HER2+ invasive breast carcinomas: A joint AERIO/REMAGUS study. ASCO 2009. Abstract 517. 10. Chew HK, Brown M. Cause-specific and all-cause mortality of HER2positive, node-negative, T1a and T1b breast cancers. ASCO 2010. Abstract 583. 11. Chia S, Norris B, Speers C et al. Human epidermal growth factor receptor 2 overexpression as a prognostic factor in a large tissue microarray series of node-negative breast cancers. J Clin Oncol 2008 ; 26 : 5697-704. 12. Curigliano G, Viale G, Bagnardi V et al. Clinical relevance of HER2 overexpression/amplification in patients with small tumor size and node-negative breast cancer. J Clin Oncol 2009 ; 27 : 5693-9. 13. Jones SE. Phase II trial of adjuvant docetaxel/cyclophosphamide plus trastuzumab (Her TC) in HER2+ early stage breast cancer patients. SABCS 2008. Abstract 2111. KIOSQUE Cancer et maternité L’impensable rencontre Coordonné par Anne-Françoise Lof Editions érès 264 pages Prix : 28 € Des témoignages de jeunes mères, à la suite desquels, Anne-Françoise Lof a réuni des professionnels de différentes formations, universitaires et/ou praticiens: gynécologue-obstétricien, sage-femme, oncologue, pédiatre, psychiatre, psychologue clinicien. Son objectif est ici de copenser l’impensable simultanéité cancer et maternité, afin de proposer des pistes pour une prise en charge plus ajustée de ces femmes et de leurs familles. 118 Cancer du sein Un médecin à l’épreuve de l’annonce Laurent Puyuelo Editions érès 200 pages Prix : 13 €€ Laurent Puyuelo est médecin, chirurgien spécialisé depuis presque vingt ans en chirurgie cancérologique mammaire et gynécologique. Un jour, l’histoire d’une de ses patientes l’a obligé à se retourner sur sa vie de médecin annonceur. Rien ne l’avait préparé à annoncer tous ces cancers à tous ces patients. Il pense qu’immanquablement, un jour ou l’autre, il va être confronté à un effet miroir : demain ce sera lui le malade. onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 d www.onko.fr Revue pluridisciplinaire en Oncologie • mai 2012 • volume 4 • n°30 • cahier central DOSSIER SPÉCIAL 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 29 mars 2012, Paris Coordonné par Bénédicte Votan (Directrice d’ARCAGY-GINECO) l Éditorial Dr Isabelle Ray-Coquard l Repenser le cancer de l’ovaire après le Cancer Genome Atlas Project : anomalies du génome et thérapies ciblées Dr Jérôme Alexandre l Prise en compte de la qualité de la vie après la prise en charge des patientes avec un cancer de l’ovaire : une démarche qui devient incontournable Dr Florence Joly l Les temps forts de ces 6es Rencontres 6 Pr Eric Pujade-Lauraine l Myths and facts about patient expectations : une conférence de prestige Pr Jean-Emmanuel Kurtz Dr Radoslav Chekerov l La qualité des essais cliniques : c’est notre image qui est en jeu ! Dr Anne-Claire Hardy-Bessard l Le GINECO, un groupe dynamique en France comme à l’international : des protocoles et des publications en nombre ! Bénédicte Votan GINECO ARCAGY nfoCancer Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO éditorial Dr Isabelle Ray-Coquard* Un vrai succès ! « Des sujets enrichissants, des discussions passionnantes...tournés vers les patientes » L es 6es Rencontres Scientifiques du GINECO ont été, une fois encore, un vrai succès avec cette année, plus de 150 personnes présentes. Des sujets enrichissants, des discussions passionnantes, bref une bonne ambiance et un esprit de groupe évident, caractéristique du GINECO ! Les sujets étaient cette année très tournés vers les patientes avec la présentation de notre homologue allemand, le Dr Radoslav Checkerov (travaillant à Berlin avec le Pr Jalid Sehouli) qui nous a présenté ce qu’attendaient les patientes traitées en Allemagne quand elles sont traitées pour un cancer de l’ovaire. Vous trouverez dans ce dossier spécial le compte rendu de cette présentation, rapporté par Jean-Emmanuel Kurtz. Florence Joly nous a également parlé de la prise en compte de la qualité de vie dans la prise en charge des patientes avec un cancer de l’ovaire. Un temps fort de cette rencontre fut l’atelier sur la chirurgie et les traitements des cancers de l’endomètre. Cet atelier a été l’occasion de nombreux échanges très enrichissants entre oncologues et chirurgiens autour de cas spécifiques. La matinée a été enrichie par une présentation passionnante de Jérôme Alexandre sur la façon de repenser le cancer de l’ovaire après le Genome Atlas Project. Enfin, comme pour les années précédentes, la 2e partie de la journée fut l’occasion de faire le point sur les études terminées, en cours et à venir, ainsi que sur les publications. Nous avons tous été impressionnés par la densité du nombre d’études en cours et par les courbes de recrutement qui témoignent du dynamisme des investigateurs et de votre intérêt pour les études proposées. Au niveau international, notre position au niveau du recrutement est toujours excellente, ce qui nous donne une force de discussion et de proposition, et peut-être encore plus cette année où Eric PujadeLauraine va être Président du GCIG. En termes de publication, l’année 2011 est particulièrement riche avec notamment un New England ! Bénédicte Votan vous fait le compte rendu de cette 2e partie de journée. Enfin, il a beaucoup été question de qualité au cours de cette journée et pour le GINECO, c’est une réelle prise de conscience et une volonté d’être toujours au top, c’est ce qu’a essayé de vous montrer Anne-Claire Hardy-Bessard dans sa présentation, et dans un article du dossier. Et maintenant, à vous de juger, bonne lecture ! Et encore merci de votre présence, dynamisme, enthoun siasme aussi motivant pour le groupe ! Mots-clés : Cancer de l’ovaire, Qualité de vie, Anomalie génétique, BRCA, méthode PRO, Groupe GINECO, Essais cliniques, Qualité Présidente du groupe GINECO, Centre Léon Bérard, Lyon 120 onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 1 Repenser le cancer de l’ovaire après le Cancer Genome Atlas Research Network Anomalies du génome et thérapies ciblées Introduction Depuis quelques années, le développement des techniques de séquençage et d’analyse génomique a permis d’envisager l’identification presque exhaustive des modifications génétiques associées au cancer. Le Cancer Genome Atlas Network, un réseau de chercheurs principalement américains, a ainsi étudié une vingtaine de localisations tumorales (www.cancergenome.nih.gov). Ce sont les résultats de leurs travaux sur le cancer de l’ovaire publiés dans la revue Nature en 2011 qui sont l’objet du présent article (1). D’emblée, il faut noter la quantité faramineuse de données obtenues (plus de cent pages d’annexes !). La problématique essentielle est d’identifier celles qui contribueront à une amélioration des résultats thérapeutiques dans un avenir pas trop lointain. physiopathologie, d’affecter le pronostic et surtout de constituer d’éventuelles cibles thérapeutiques. Dr Jérôme Alexandre* Objectifs de l’étude Le premier objectif était de faire une recherche exhaustive des anomalies génétiques et épigénétiques associées aux carcinomes ovariens séreux de haut grade qui représentent 70 % des stades avancés. Dans un 2e temps, il s’agissait d’identifier parmi toutes les anomalies moléculaires celles susceptibles d’influencer la * Département d’oncologie médicale, université Paris Descartes, Groupe Hospitalier Cochin-Hôtel Dieu, Paris onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Méthodologie 489 tumeurs congelées ont été étudiées. Il s’agissait de carcinomes séreux de haut grade non antérieurement prétraités. A partir de ces prélèvements ont été réalisées des recherches de l’expression des ARN messagers (transcriptome), des micro-ARN (mirome), de la méthylation des promoteurs (méthylome) et enfin des anomalies du nombre de copies des gènes (délétion ou amplification). 316 tumeurs ont fait l’objet d’un séquençage étendu pour identifier des mutations. Seuls les résultats les plus significatifs sont présentés ici. Principales altérations génétiques dans les carcinomes séreux de haut grade 18 500 gènes, représentant 80 % de la totalité du génome, ont été séquencés. En moyenne, chaque tumeur était porteuse de 61 mutations, le plus souvent très différentes d’un cas à l’autre, la plupart étant présentes chez moins de 1 % des patientes. La difficulté était alors d’identifier, parmi toutes ces anomalies, celles qui pourraient être réellement oncogéniques. Sept gènes étaient le siège de mutations avec une fréquence significativement supérieure au taux de mutation aléatoire. De ces sept gènes, tous considérés comme suppresseurs de tumeur, les trois les plus souvent atteints ont déjà largement été identifiés : p53, BRCA1 et BRCA2 (Tab. 1). Ces données n’ont donc pas permis d’identifier de nouvelle cible thérapeutique potentielle. L’inactivation de p53 et BRCA1-2 est responsable d’une instabilité génomique rendant compte de la grande fréquence des amplifications et délétions. Les plus fréquentes et celles représentant de potentielles cibles thérapeutiques sont listées dans le tableau 1. 123 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO A côté de ces altérations du patrimoine génétique existent également des anomalies épigénétiques. Il s’agit en particulier de la méthylation anormale du promoteur de certains gènes dont l’expression va alors s’en trouver inhibée. 168 gènes sont concernés par ce phénomène dans le cancer de l’ovaire de haut grade. Une suppression de l’expression de BRCA1 par méthylation de son promoteur a été retrouvée dans 11,5 % des cas. Si ces anomalies paraissent très nombreuses et hautement variables d’une tumeur à l’autre, il est possible de les regrouper par grandes voies de signalisation permettant d’envisager plus facilement le développement de thérapeutiques ciblées. Perte de contrôle du cycle cellulaire La perte de p53, retrouvée dans près de 100 % des carcinomes ovariens de haut grade, est responsable d’une activation du facteur de transcription FOXM1. Celui-ci contrôle l’expression d’un grand nombre de protéines favorisant la progression du cycle cellulaire (Fig. 1). Ainsi, l’expression de protéine Polo-like kinase 1 est un facteur de mauvais pronostique au cours du cancer de l’ovaire (2). Des inhibiteurs spécifiques sont en cours de développement. Une perte de contrôle du cycle cellulaire assuré normalement par la protéine Rb a été retrouvée dans 67 % des cas. L’anomalie moléculaire en cause la plus fréquente est l’amplification du gène de la cycline E (20 %) mais d’autres anomalies ont été retrouvées (Fig. 1). La surexpression de la cycline E, considérée comme un 124 Tableau 1 - Principales altérations moléculaires détectées dans les carcinomes ovariens de haut grade (1). Types d’anomalies Gènes les plus fréquemment altérés (fréquence) Rôle de la protéine Mutations P53 (96 %) BRCA1 (11,5 % dont 8,5 % germinale) BRCA2 (9 % dont 6 % germinale) CSMD3 (6 %) NF1 (4 %) Gardien du génome Recombinaison homologue CDK12 (3 %) RB1 (2 %) Amplification PTEN (7 %) NF1 (8 %) RB1 (8 %) Méthylation promoteur BRCA 1 (11,5 %) Adhésion intercellulaire Inhibiteur de Ras, survie et prolifération Régulation de l’épissage Contrôle du cycle cellulaire Contrôle du cycle cellulaire Prolifération Prolifération, survie Immortalité Cycline E (20 %) MAPkinase (27 %) Ki-RAS (11 %) Télomérase (9 %) AKT 1 (3 %) IGF-R (3 %) HER2 (3 %) HER3 (4,5 %) VEGFA (3,5 %) Délétion Recombinaison homologue Prolifération, survie Angiogenèse Perte d’expression/activité Gain d’expression/activité P53 Mutation (96 %) Cycline E1 Amplification FOXM1 Surexpression Cycline D1 Cycline D2 (20 %) Surexpression (15 %) Amplification (4 %) (87 %) Polo-like_ kinase 1 Cycline B1 Aurora kinase B RB1 Mutation/délétion (10 %) Progression du cycle cellulaire Figure 1 - Mécanismes moléculaires de la perte de contrôle du cycle cellulaire décrite dans le cancer de l’ovaire de haut grade (d’après 1). facteur de mauvais pronostic, se rencontre principalement dans les tumeurs sans perte de BRCA1 ou 2. Altération de la voie PI3 kinase-AKT-mTOR Cette voie contrôle de nombreux processus cellulaires dont onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO l’inhibition de l’apoptose, la prolifération, l’invasion, le métabolisme anaérobie… Elle serait dérégulée dans 45 % des carcinomes de haut grade. De nombreux inhibiteurs sont en cours de développement (de mTOR et/ou de la PI3K, d’AKT) mais il est possible que leur activité soit dépendante du type d’anomalies moléculaires qui apparaissent très variables : délétion de PTEN (7 % des cas), amplification du gène PIK3CA (18 %) ou d’AKT2 (6 %). Autres anomalies 14% Perte de PTEN Mutation germinale BRCA1 16% 10% Mutation germinale BRCA2 12% Amplification EMSY (inhibiteur BRCA2) 12% 6% 6% 22% Mutation somatique BRCA1 Mutation somatique BRCA2 Méthylation promoteur BRCA1 Déficience de la recombinaison homologue Dans près de 50 % des carcinomes de haut grade, il existerait une altération de la réparation des coupures double brin sur l’ADN par le processus de recombinaison homologue. Dans 2/3 des cas, cette déficience de la recombinaison homologue est en rapport avec une altération germinale ou somatique des gènes BRCA1 ou 2 (Fig. 2). Ces tumeurs seraient particulièrement sensibles à l’action des inhibiteurs de PARP (PARPi). Cependant, des données récentes suggèrent que les mutations de BRCA2 altèrent plus profondément la recombinaison homologue que les anomalies sur BRCA1 et seraient ainsi associées à une plus grande Figure 2 - Anomalies moléculaires responsables d’une déficience de la recombinaison homologue dans le cancer de l’ovaire de haut grade (d’après 1). chimiosensibilité et peut-être à une plus grande efficacité des PARPi (3). Toutes les mutations pourraient également ne pas avoir les mêmes conséquences fonctionnelles. Ainsi, celles portant sur le domaine RING du gène BRCA1 seraient associées à une résistance aux platines et aux PARPi (4). Conclusion La plupart des anomalies moléculaires identifiées dans les carcinomes ovariens de haut grade ont comme conséquence une modification du niveau d’expression protéique et sont donc potentiellement détectables par immunohistochimie. En dehors de la perte de p53 et de la surexpression de FOXM1, aucune anomalie moléculaire n’est présente dans plus de 20 % des cas, ce qui représente une difficulté certaine pour le développement de nouvelles thérapeutiques ciblées. La possibilité de cibler une voie de signalisation qui serait fréquemment altérée par des mécanismes moléculaires variés reste à démontrer. Ainsi, des données récentes suggèrent que toutes les tumeurs BRCAness n’ont pas la même sensibilité aux PARPi en fonction du siège des mutations causales. n Bibliographie 1. The cancer genome atlas research network. Integrated genomic analyses of ovarian carcinoma. Nature 2011 ; 474 : 609-15. 2. Takai N, Hamanaka R, Jun Yoshimatsu J, Miyakawa I. Polo-like kinases (Plks) and cancer. Oncogene 2005 ; 24 : 287-91. 3. Yang D, Khan S, Sun Y et al. Association of BRCA1 and BRCA2 mutations onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 with survival, chemotherapy sensitivity, and gene mutator phenotype in patients with ovarian cancer. JAMA 2011 ; 306 : 1557-65. 4. Drost R, Bouwman P, Rottenberg S et al. BRCA1 RING function is essential for tumor suppression but dispensable for therapy resistance. Cancer Cell 2011 ; 20 : 797-809. 125 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 2 Prise en compte de la qualité de la vie des patientes avec un cancer de l’ovaire Une démarche qui devient incontournable Quels sont les problèmes rencontrés par les patientes avec une récidive d’un cancer de l’ovaire ? Pr Florence Joly* Introduction Une maladie qui récidive Malgré l’amélioration des techniques chirurgicales et les nouvelles approches médicales, le cancer de l’ovaire reste le plus souvent une maladie incurable. Diagnostiquées dans la plupart des cas à un stade avancé, plus de 75 % des patientes vont récidiver dans les 18 mois. En cas de récidive, les traitements proposés ne permettront pas de guérison. La chimiothérapie proposée en cas de récidive a pour but d’améliorer la survie sans progression et/ou la survie globale si la maladie est platine sensible. En cas de maladie platine résistante, l’objectif est palliatif (augmenter le délai avant récidive et agir sur les symptômes afin d’améliorer la qualité de la vie des patientes) (1). * Département d’oncologie médicale, CHU Côte de Nacre, Centre François Baclesse, Caen 126 Il s’agit d’un groupe très hétérogène de patientes qui vont présenter des symptômes de nature et d’intensité différentes. Ces patientes n’auront pas toutes les mêmes attentes en fonction du stade d’évolution de la maladie, de leur projet de vie, de leur âge et des effets secondaires des traitements. En situation de récidive, il existe en fait très peu de données publiées sur le réel bénéfice de la chimiothérapie sur les symptômes et la qualité de la vie de ces femmes. Les principaux symptômes rapportés sont le plus souvent : la fatigue liée à la maladie et aux traitements, des douleurs abdominales associées à des troubles digestifs divers et des troubles du sommeil plus ou moins associés à un état anxiodépressif (2). L’altération de la qualité de la vie des patientes est très liée aux symptômes (3). L’attente des patientes par rapport au bénéfice de ces traitements est ambivalente. En effet, dans une étude publiée par Donovan et al., plus de 75 % des patientes interrogées lors de leur traitement de première ligne souhaitaient un traitement en cas de rechute même pour un bénéfice attendu faible. Cependant, elles préféraient une prise en charge palliative seule en cas d’espérance de survie inférieure à 5 mois (4). Les principaux paramètres influençant leur décision étaient leur qualité de vie et leur bien-être spirituel et psychologique. Pourquoi et comment mesurer la qualité de la vie des patientes avec un cancer de l’ovaire ? Les symptômes à la rechute et pendant le traitement de même que l’impact sur la qualité de vie sont des paramètres qui doivent être maintenant systématiquement évalués pour juger de l’efficacité d’un traitement administré dans cette indication (5, 6). La prise en compte du bénéfice apporté par les traitements sur les symptômes et la qualité de la vie des patientes peut également être intégrée dans des études de coût/ efficacité, notamment pour l’évaluation de l’intérêt des thérapies ciblées (7). Les outils classiquement utilisés pour mesurer la qualité de la vie reposent sur l’utilisation d’autoquestionnaires, validés, remplis par les patientes. Cette approche, dénommée “PRO” patient-reported outcomes en anglais, comprend onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO une mesure de l’état de santé des patientes rapportées par ellesmêmes, incluant les symptômes et la qualité de la vie. Il existe deux grands auto-questionnaires de qualité de vie validés en cancérologie dans de nombreuses langues, le Core questionnaire de l’EORTC (QLQ-C 30) et le FACT-G ; ils explorent les principales dimensions de la qualité de la vie (aspects physiques, émotionnels, sociaux, la qualité de la vie en général et les principaux symptômes généraux). Des modules spécifiques peuvent être ensuite utilisés en complément en fonction de la pathologie étudiée ou de la situation clinique. Par exemple, il existe des modules spécifiques pour le cancer de l’ovaire (OV28 de l’EORTC, Fact-Ov) ou des modules développés pour un symptôme (par exemple le Fact F pour la fatigue ou le Fact NTX pour la neuropathie induite par la chimiothérapie) (2, 5, 8) (Fig. 1). Comment intégrer l’évaluation de la qualité de la vie dans les essais cliniques dans le cancer de l’ovaire ? Les outils actuellement utilisés pour mesurer la qualité de la vie dans le cancer de l’ovaire sont malheureusement peu discriminants, s’intéressant surtout aux dimensions non spécifiques de la qualité de la vie et ils sont peu sensibles aux spécificités rencontrées par les patientes avec un cancer de l’ovaire (9). Les données de qualité de vie issues des quelques essais cliniques en gynécologie qui ont pris en compte cette dimension n’ont pas apporté d’éléments contributifs dans l’interprétation des résultats et ces résultats de qualité de vie n’ont eu aucun impact sur onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Tableau 1 - Recommandations publiées par le GCIG, d’après l’article de Carey et al. (5). Design de l’étude - Discuter les objectifs de PRO* dans les protocoles dès la phase précoce de leur élaboration - Définir systématiquement une hypothèse PRO* si inclusion d’une étude de qualité de vie dans une étude clinique - Si inclusion d’une mesure de PRO* dans une étude, discuter en amont en quoi les résultats des PRO* pourront influencer sur les résultats définitifs Choix et fréquence de la mesure - Choisir un questionnaire qui permettra le mieux de répondre à la question précise posée dans l’étude - Il n’existe pas de questionnaire Gold standard optimal pour le cancer de l’ovaire. Des études sont en cours pour obtenir des questionnaires avec des propriétés psychométriques mieux adaptées - L’utilisation de multiples questionnaires avec des recoupements doit être faite avec précaution en tenant compte de l’objectif de l’étude - Le choix des temps d’administration doit être guidé par l’hypothèse de recherche et doit correspondre à une réalité clinique Analyse - Les données manquantes doivent être évitées en utilisant le questionnaire le plus approprié à la question de l’étude et en choisissant bien les temps d’administration de ces questionnaires - Le monitoring des données manquantes doit être aussi rigoureux que les autres données manquantes dans les essais cliniques Publication - La publication des résultats des données de PRO* doit faire l’objet d’un article spécifique détaillé dans la même revue que l’article principal PRO* : Patient Reported Outcomes (mesure de qualité de vie et symptômes) la pratique clinique. Pourquoi ce constat ? Jusqu’à présent, la mesure de la qualité de la vie a été incluse dans les essais cliniques en gynécologie sans aucune hypothèse sous-jacente et souvent les scores de qualité de vie étaient comparés sous forme de moyennes de 2 groupes de patientes sans tenir compte de la variation individuelle pour chaque patiente ; ainsi les résultats étaient souvent non discriminants entre deux groupes de patientes avec des traitements différents. Ainsi, afin d’intégrer utilement les PRO dans l’évaluation des traitements, des recommandations ont été publiées par le GCIG (Gynecologic Cancer Intergroup). Ces recommandations insistent sur la nécessité de discuter dès la conception des études de l’intégration de PRO en définissant une hypothèse de qualité de vie a priori comme il est défini des hypothèses en termes de taux de survie ou de taux de réponse (Tab. 1). Plusieurs études ciblées sur la qualité de la vie des patientes sont en cours auxquelles participe le groupe GINECO. Expression III est une enquête internationale qui tente de cerner les attentes et les désirs des patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire des trompes ou du péritoine, en particulier au sujet de la gestion des traitements afin d’en améliorer leur prise en charge. Elle évalue également les attentes concernant la communication patiente/médecin. Plus de 127 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 1 000 questionnaires ont déjà été recueillis au niveau international. L’étude Symptom/benefit est une étude du GCIG qui va débuter en France. Cette étude en deux étapes a pour but de valider un questionnaire PRO plus adapté pour le cancer de l’ovaire (le MOST) et d’évaluer si la chimiothérapie palliative délivrée en cas de récidive platine résistante permet d’améliorer les symptômes et la qualité de la vie des patientes. Conclusions La prise en compte des symptômes et de la qualité de la vie des patientes (“PRO”) est devenue une priorité dans l’évaluation de l’efficacité des traitements dans le cancer de l’ovaire récidivant. L’objectif de qualité de vie attendu doit être clairement défini dans les essais cliniques et une méthodologie adaptée doit être utilisée. Perspectives Au-delà de la situation de récidive où les traitements sont palliatifs, une réflexion sur la prise en compte des PRO en cas de traitement d’entretien de longue durée avec des bénéfices attendus modestes, situation nouvelle dans le cancer de l’ovaire en première ligne (avec le bévacizumab), doit être également initiée. Il est QoL Tools Santé générale et bien-être Mesures spécifiques par maladie Mesures spécifiques par symptôme Mesures spécifiques par traitement SF 36 FACT-G QLQ-C30 FACT-O FOSI FACIT-D, FACIT-F FACT-FAtigue, FACT-An FACT-N, FACT-TH, FACT-AD QLQ-OV28, SAQ FAXT-GOG NTX FACT-Taxane D’après Arriba et al Gynecol Oncol 2010 Figure 1 - Exemple d’outils de mesure des PRO (patients-reported outcomes), d’après Arriba et al. (2). également urgent de mieux identifier les séquelles des patientes après le traitement initial afin de mieux les accompagner dans leur parcours de l’après cancer ou du suivi post-thérapeutique. n Les temps forts de ces 6es rencontres Pr Eric Pujade-Lauraine, Président fondateur du groupe GINECO • Un 1er temps fort a été la présence, comme chaque année, de notre invité international : cette année le Dr Chekerov de Berlin qui nous a présenté leurs études réalisées en Allemagne sur les attentes des patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire. • Un 2e temps fort a été bien sûr la présentation de tous les essais du Groupe, montrant une fois encore que le GINECO se situe parfaitement dans le Plan Cancer 2, tout d’abord en augmentant les inclusions des patientes dans les essais (et les excellentes courbes de recrutement le prouvent), mais aussi en développant la coopération internationale dans les essais cliniques (les nombreux essais internationaux l’attestent), et enfin dans la participation à des programmes de recherche chez la personne âgée ou dans les tumeurs rares (là encore le GINECO est plus que présent). Bibliographie 1. Friedlander M, Butow P, Stockler M et al. Symptom control in patients with recurrent ovarian cancer : measuring the benefit of palliative chemotherapy in women with platinum refractory/resistant ovarian cancer. Int J Gynecol Cancer 2009 ;19 : S44-8. 2. Arriba LN, Fader AN, Frasure HE, Von Gruenigen VE. A review of issues surrounding quality of life among women with ovarian cancer. Gynecol Oncol 2010 ; 119 : 390-6. 3. Lowe T, Ferrell B, Leong L. Quality-of-life issues in the management of epithelial ovarian cancer. Curr Treat Options Oncol 2007 ; 8 : 402-16. 4. Donovan KA, Greene PG, Shuster JL et al. Treatment preferences in recurrent ovarian cancer. Gynecol Oncol 2002 ; 86 : 200-11. 5. Carey MS, Gotay C. Patient-reported outcomes : clinical trials in ovarian cancer. Int J Gynecol Cancer 2011 ; 21 : 782-7. 128 6. Trimble EL, Birrer MJ, Hoskins WJ et al. Current academic clinical trials in ovarian cancer : Gynecologic Cancer Intergroup and US National Cancer Institute Clinical Trials Planning Meeting, May 2009. Int J Gynecol Cancer 2010 ; 20 : 1290-8. 7. Sfakianos GP, Havrilesky LJ. A review of cost-effectiveness studies in ovarian cancer. Cancer Control 2011 ; 18 : 59-64. 8. Luckett T, King M, Butow P et al. Assessing health-related quality of life in gynecologic oncology : a systematic review of questionnaires and their ability to detect clinically important differences and change. Int J Gynecol Cancer 2010 ; 20 : 664-84. 9. Greimel ER, Bjelic-radisic V, Pfisterer J et al. Toxicity and quality of life outcomes in ovarian cancer patients participating in randomized controlled trials. Support Care Cancer 2011 ; 19 : 1421-7. onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 3 Myths and facts about patient expectations Une conférence de prestige C Propos rapportés par le Pr JeanEmmanuel Kurtz* Dr Radoslav Chekerov** Introduction L’intervention d’un expert international est chaque année un des moments forts des Rencontres du GINECO. Pour cette édition, le Dr Radoslav Chekerov, de Berlin, a abordé les attentes et préoccupations des patientes en oncologie gynécologique. En compilant différentes études et enquêtes sur le sujet, il a mis évidence le fait qu’aujourd’hui les patientes sont de plus en plus informées et sont en demande de renseignements concernant leur maladie. Le médecin reste, pour elles, la principale source d’information, cependant Internet occupe également une place importante. Par ailleurs, informées, elles sont capables de donner leurs avis concernant notamment le choix de leur traitement. * Département d’hématologie et d’oncologie. Hôpitaux Universitaires, Strasbourg ** Département de gynécologie, Charité University Medecine, Berlin onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 haque année, les journées scientifiques du groupe GINECO sont marquées par l’intervention d’un expert de renommée internationale, apportant un éclairage sur un sujet important. Après la conférence donnée par Robert Burger en 2011, la parole a été donnée à nos collègues allemands de l’hôpital de la Charité de la faculté de médecine de Berlin, en la personne du Dr Radoslav Chekerov, qui travaille au sein du département de gynécologie de cette prestigieuse institution, sous la direction du Pr J. Sehouli. Intitulée Myths and Facts about Patients expectations (Mythes et Réalités à propos des attentes des patient(es), son intervention a permis d’aborder le sujet trop souvent éludé de la relation médecin-malade en cancérologie gynécologique. Dans un registre différent des études médicamenteuses, la recherche dans ce domaine est d’une importance grandissante, débouchant sur d’une part une amélioration de la qualité des échanges médecin-patiente par la meilleure compréhension des attentes des patientes, et d’autre part sur une meilleure adhésion aux programmes de recherche clinique. “passif/non informé” vers celui, plus moderne d’un patient “informé ou compétent” et “actif”. Evolution certes louable, qui se heurte à la question suivante : « par quels moyens nos patientes sont-elles informées à propos de la maladie et du traitement ? » On retrouve dans cette analyse, la part grandissante de l’information numérique (Internet) avec les limites de la quantité d’informations (19 milliards de réponses à une requête “Ovarian Cancer” sur un célèbre moteur de recherche), ainsi que du contrôle de leur qualité. Du patient “passif” vers un patient “actif” Les trois préoccupations majeures évoquées par les patientes étaient : « Mon traitement est-il adapté à mon cas ? » ; « combien de patientes On observe ainsi une évolution, du paradigme ancien d’un patient Les attentes des patientes atteintes de cancer du sein Dans une étude conduite par le NOGGO sous la direction du Pr J. Sehouli, 617 patientes atteintes d’un cancer du sein ont décrit leurs attentes par rapport à la relation avec leur médecin et leur traitement. Qu’il s’agisse d’une situation adjuvante ou d’une maladie avancée, plus d’une femme sur deux citait Internet en deuxième position après l’oncologue comme la meilleure source de renseignements. 129 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO Spain – end 11/2013 France – end 11/2013 Austria – end 02/2012 Romania – end 01/2012 Poland – end 01/2012 Countries similaires mon médecin traitet-il ? » et « puis-je participer à un essai clinique ? » D’autres préoccupations, comme la proposition de médications alternatives, d’une plus grande disponibilité des médecins et de leur coordination étaient relevées. United Kingdom – end 12/2011 Italy – end 10/2011 Bulgaria – end 10/2011 Ces attentes se retrouvent-elles dans le cancer de l’ovaire ? Dans l’enquête Expression-II menée par l’équipe de J. Sehouli, les patientes confortaient l’importance de leur médecin référent comme la meilleure source d’information, suivie par Internet pour celles qui en disposaient. En cas d’interrogation sur la pertinence du traitement reçu, le médecin traitant et l’avis d’un deuxième expert étaient mentionnés aux deux premières positions, suivis par Internet. Les attentes exprimées par les patientes concernaient l’efficacité des traitements, le temps donné pour les explications, et les craintes vis-à-vis de l’alopécie. A la suite de cette enquête, une étude européenne (Expression-III) est actuellement en cours, à laquelle la France participera jusqu’à la fin 2013 (Fig. 1). Autres études Importance de la mesure du CA 125 pour les patientes Le Dr Chekerov a également présenté les résultats d’une étude du NOGGO et de l’AGO concernant les préoccupations des patientes 130 Belgium – end 12/2011 Germany – end 06/2011 year month Expression-II : les attentes des patientes atteintes de cancer de l’ovaire 12 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 2009 2010 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 2011 1 2 3 4 2012 North-Eastern German Society of Gynecologic Oncology Figure 1 - Expression-III Ovaire. Enquête européenne chez les patientes ayant un cancer de l’ovaire, des trompes ou du péritoine, sur leurs attentes et leurs désirs vis-à-vis de la prise en charge clinique et de la relation médecin-patient, réalisée par le groupe d’étude et de travail sur le cancer de l’ovaire NOGGO (www.expression3.net). atteintes d’un cancer de l’ovaire, soulignant l’importance donnée par les patientes à la mesure du CA 125, sujet de controverses s’il en est. De plus, dans une enquête menée au sein de l’hôpital de la Charité auprès de 70 patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire, 93 % souhaitaient le dosage du CA 125, alors que la moitié des patientes connaissaient les résultats de l’étude de G. Rustin ! Préoccupations des patientes concernant leur vie sexuelle Toujours dans l’étude NOGGO/ AGO, les patientes exprimaient des préoccupations vis-à-vis de leur vie sexuelle et de leur libido, encore trop peu abordées lors de notre pratique. Choix des patientes concernant le traitement et les essais cliniques Enfin, la question de l’avis des patientes concernant le choix de leur traitement et la place des essais cliniques a été abordée, au travers de l’étude HECTOR et d’une étude du NOGGO sur la chimiothérapie orale versus IV. Les patientes exprimaient une préférence pour la voie intraveineuse ainsi que pour des traitements associés à moins d’effets secondaires. L’intérêt des malades pour les essais cliniques était associé à l’espoir d’une meilleure efficacité et d’une meilleure tolérance, l’intérêt “scientifique” d’une étude étant relégué dans les profondeurs du classement ! Conclusion Au travers de cette conférence très intéressante, les participants ont ainsi pu apprécier l’expertise de nos collègues berlinois dans cet aspect de la recherche clinique sur le cancer de l’ovaire. Le groupe GINECO ne s’y est pas trompé, en participant activement à l’enquête Expression-III, et en donnant la parole aux patientes lors de ces journées scientifiques, une expérience qu’il faudra renouveler ! n onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 4 La qualité des essais cliniques C’est notre image qui est en jeu ! Dr AnneClaire HardyBessard* Introduction La qualité dans les essais cliniques est un thème majeur pour le groupe GINECO. Un état des lieux était nécessaire afin d’identifier les problèmes avant de pouvoir les résoudre. Les points faibles sur lesquels il s’agit de travailler sont le respect des critères d’inclusion, les procédures inhabituelles, les bilans radiologiques, et plus largement la mise en place des essais. En bref, rien d’insurmontable, et un processus incontournable… et déjà en marche. Identifier les problèmes Cette année, nous avons choisi d’échanger sur le thème de la qualité dans les essais cliniques qui est, plus que jamais, un thème majeur pour le groupe GINECO. Le taux de déviations dans les études, qu’elles soient majeures ou mineures, est élevé et il semble très important si l’on veut s’améliorer de commencer par faire un état des lieux. En effet, si l’on en croit le fameux cercle de Deming, avant de parler d’amélioration des pratiques, il est essentiel de commencer par identifier les problèmes et *Clinique armoricaine de Saint-Brieuc, Past-présidente du groupe GINECO. onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 rechercher les causes. Le GINECO a donc réalisé une analyse pour chaque étude de la qualité des données, des déviations, des violations. Les études internationales permettent de nous situer par rapport aux autres pays. Les études “GINECO” permettent une analyse plus fine des motifs de déviations, et de réfléchir sur les causes liées à des procédures inhabituelles de l’étude, à des mises en place insuffisantes, au nombre d’inclusions par centre, à certains centres peut-être. Notre objectif principal est de proposer des pistes d’aide aux bonnes pratiques cliniques. qualité des données des essais Internationaux GINECO Le GINECO, bon élève mais… Sur le plan international, nous avons participé à une étude d’enregistrement. Les données comparatives sur les déviations de BPC (bonnes pratiques cliniques), de doses et de stratification par randomisation sont relativement identiques entre les différents groupes, le GINECO étant plutôt “bon élève”. … des écarts dans les procédures inhabituelles Ca se gâte très sérieusement quand on fait un focus sur des procédures inhabituelles, en l’occurrence la prise de tension artérielle avec des recommandations protocolaires très précises. On voit même sur la figure 1 que le taux de ND (not done) est dramatiquement élevé. Le management des effets secondaires et des bilans radiologiques était plutôt bien fait, mais dans une étude qui avait peu de bilans radiologiques. Dans une autre étude internationale, la France a un taux de violations dites “majeures” de 58,7 % par inclusion, ce qui la place au quatrième rang aux côtés de la Grèce. Sur ces 71 violations (Tab. 1), 19 % concernent un critère d’inclusion ou d’exclusion, et 34 % concernent un scanner non fait dans les temps ! On notera au passage, 3 patientes chez qui l’examen initial est non fait, probablement non tracé, en fait, ce qui revient exactement au même. qualité des données des essais nationaux “promotion GINECO” qualité du monitoring Les études nationales “promotion GINECO” sont également très intéressantes car elles font souvent participer plus de centres, les CRF sont souvent moins compliqués et les procédures moins strictes. De plus, nous avons souvent le sentiment que nombre de queries viennent d’une qualité inégale de monitoring réalisés par des ARC qui se succèdent sur une même étude à un rythme parfois vertigineux. Ce n’est pas le cas dans les études “GINECO” dont le monitoring est réalisé par des ARCs ARCAGY, plus souvent stables et connaissant bien les études. 131 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO Des violations sur les examens de laboratoires et les bilans radiologiques La figure 2 montre que globalement, nous pêchons majoritairement sur les examens de laboratoires et les bilans radiologiques, avec un taux de violations qui va de 36 à 67 %. C’est un sujet qui touche à l’organisation et doit pouvoir s’améliorer assez facilement. Un “effet centre” et un “effet nombre d’inclusions” ? Le deuxième type de violation concerne les procédures liées au protocole, mais les violations concernant les critères d’inclusion représentent 6 à 19 % ce qui est bien sûr très élevé. Une question importante doit être posée : y a-t-il un “effet centre” ou un “effet nombre d’inclusions” ? La réponse n’est pas univoque car pas la même pour tous les essais. Il semble cependant que les centres qui incluent un plus grand nombre de patientes ont moins de déviations par patiente, témoignant probablement d’une courbe d’apprentissage. Les centres qui n’incluent qu’une seule patiente ont le plus souvent au moins une violation majeure, et surtout dans les essais internationaux qui sont plus compliqués. Améliorer les essais Forts de ces analyses, nous avons donc réfléchi aux moyens d’améliorer la qualité dans nos essais. Bien sûr, chacun doit faire sa propre analyse, connaître ses points forts et points faibles et choisir ses axes de travail. Il y a cependant des domaines communs dans les différentes étapes d’un essai sur lesquels nous avons tous les mêmes difficultés. L’inclusion d’une patiente Tout d’abord l’inclusion d’une 132 Figure 1 - Déviations liées à la tension artérielle par patientes, par groupe. Etude internationale. Tableau 1 - Détails des 71 violations majeures en France. Etude internationale. Violations de protocole Details (n = 121) TOTAL 71 (58,7 %) Critères Inclusion/exclusion 14 (11,6 %) Maladie réfractaire 3 ATCD thrombose 1 Plus de deux lignes antérieures 2 Participation récente dans un essai 1 Hypertension non contrôlée 1 Paramètres de coagulation inadéquats 1 ATCD d’obstruction digestive 5 57 (47 %) Déviations de procédure Scanner non réalisés à temps durant l’étude 14 Administration du traitement malgré problèmes de toxicité 12 Scanner non fait dans les 28 j avant randomisation 10 Dose administrée incorrecte 10 Examen clinique non fait à la baseline 3 Poursuite du traitement après progression 3 Examen non réalisé avant l’administration du traitement 2 Autres 3 patiente. L’idéal est que la patiente soit screenée avant la consultation, ce qui permet aux ARC de vérifier les critères d’inclusion. Sinon, un simple mail aux ARC pendant la consultation pour les avertir du screening leur permettra a posteriori, mais avant onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 7% 1% 4% 1% 27% 24% 1% 1% 2% 23 % 6% 2% 19 % 3% 48 % 67 % 36 % 19 % 9% Critères d’inclusion et d’exclusion Produits à l’étude/ posologie Traitements concomittants Procédures liées au protocole Toxicité, Tolérance au produit Autre Examens de laboratoire/ imagerie Visites délais Figure 2 - Nombre de déviation par type dans 3 études “GINECO”. l’inclusion, de vérifer que tous les critères sont respectés. Les pratiques inhabituelles Concernant les “pratiques inhabituelles” et là je me tourne vers le promoteur, je pense qu’il faut vraiment y travailler dès la création du protocole. Quel en est l’intérêt ? Qu’est-ce qu’on en attend ? Sont-elles réellement justifiées ? Si c’est le cas, il sera facile de l’expliquer lors de la mise en place, et si elles sont justifiées, elles seront d’autant mieux mémorisées par l’équipe. La mise en place est un moment très important de rencontre entre l’équipe de recherche et l’investigateur principal et c’est le temps de “dépistage” de ces pratiques inhabituelles. Une proposition est d’établir une fiche navette qui reprend les principales procédures de l’étude, disponible pour tous les intervenants et qui va mettre en relief tout ce qui est inhabituel. Oui c’est du temps, mais quel temps gagné par la suite si l’on n’a plus besoin de replonger à chaque fois dans le protocole ! onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les bilans radiologiques En ce qui concerne les bilans radiologiques, beaucoup d’essais demandent maintenant des bilans à date fixe, il suffit donc de planifier et même de prendre les rendezvous de 6 mois en 6 mois, et ce dès la randomisation. Si vous ajoutez des ordonnances types biologiques dans le dossier et un tableau d’adaptation des doses (juste une photocopie du protocole) vous touchez à la perfection ! La mise en place Enfin, j’insiste encore sur l’importance de la mise en place. N’oubliez pas notamment de regarder les critères de progression et de vérifier que vous y adhérez. Si l’étude prévoit par exemple que la progression doit être radiologique et pas seulement une augmentation du CA125, cela veut dire que vous vous engagez à ne pas sortir la patiente de l’étude pour progression sur une simple ascension du CA125. Il est encore temps lors de la mise en place de changer d’avis. Certains centres établissent une check-list d’inclusion avec là encore un focus sur les examens ou procédures inhabituels. Conclusion Cette démarche qualité est déjà en marche dans nos établissements, elle devient incontournable pour la recherche clinique. En effet, l’évolution actuelle démontre que l’attractivité des centres investigateurs ne repose plus seulement sur le nombre d’inclusion, mais aussi sur le nombre de ces fameuses queries et violations majeures. Il en va de même pour l’attractivité de notre groupe pour des partenariats avec l’industrie pharmaceutique, pour la solidité des données que nous produisons. C’est notre image qui est en jeu. Je finirai bien en vous disant VIVE LE GINECO, mais j’entends déjà vos rires moqueurs ! A bientôt pour des audits… n 133 Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO 5 Le GINECO : un groupe dynamique en France comme à l’international Des protocoles et des publications en nombre ! Les études cliniques Bénédicte Votan* Introduction Les 6es Rencontres Scientifiques du GINECO sont l’occasion de faire le point sur les études du groupe terminées, en cours et à venir et sur les publications dont elles ont fait l’objet. Cette année leur nombre est impressionnant autant d’un point de vue essais cliniques que d’un point de vue publications, avec en point d’orgue une publication dans le New England Journal of Medecine avec l’étude ICON7. L a matinée scientifique a été suivie par une après-midi consacrée aux essais et projets du GINECO : • point sur les essais dont le recrutement est terminé ; • état d’avancement des essais en cours de recrutement ; • présentation des nouveaux projets : 9 nouveaux protocoles dans le cancer de l’ovaire ont été présentés cette année. Ces essais doivent tous démarrer au cours de l’année 2012. *Directrice d’ARCAGY-GINECO 134 Si l’année 2011 a été marquée par les résultats intermédiaires de la survie globale d’ICON7 présentés à l’ASCO, l’année 2012 devrait être encore plus riche avec les présentations à l’ASCO de : • l’étude internationale AURELIA, chimiothérapie ± bevacizumab dans les cancers de l’ovaire en rechute précoce (360 patientes recrutées en moins de 18 mois dont 121 en France, 14 pays, 8 groupes coopérateurs, GINECO groupe leader et un partenariat innovant et efficace entre groupes coopérateurs et industrie pharmaceutique) ; • l’étude internationale TARCEVA, Tarceva® (erlotinib) en maintenance de 1re ligne des cancers de l’ovaire (830 patientes recrutées en 18 mois, 328 en France) ; • l’étude nationale REV, Revlimid® (lenalidomide) en monothérapie dans les rechutes sensibles des cancers de l’ovaire) ; • l’étude nationale FAG3 dans les cancers de l’ovaire de la femme âgée (carboplatine en monothérapie) avec ses 3 approches originales : clinique, psychogériatrique et épigénétique. Les publications Enfin, si l’activité au niveau des essais cliniques du groupe GINECO est dense, elle l’est tout autant au niveau des publications avec, en 2011, 8 publications dans des journaux internationaux référencés et pas des moindres avec même un New England Journal of Medecine grâce à l’étude ICON7 ! Parmi les autres publications, on peut citer également l’étude française CARTAXHY dans le cancer de l’ovaire en rechute précoce, et 6 sous-études de l’étude CALYPSO ! On n’oublie pas non plus en 2011 les communications dans les congrès internationaux avec : • 3 communications orales : résultats intermédiaires de survie globale de l’étude ICON7 à l’ASCO, résultats intermédiaires de safety de l’étude OCTAVIA (paclitaxel hebdomadaire – carboplatine bevacizumab) à l’ESMO et l’analyse en sous-groupes de l’étude TAMRAD à l’ESMO également ; • 2 posters : survie globale de CALYPSO à l’ASCO et résultats de l’étude DOGMES (Caelyx® (doxorubicine liposomale) dans le cancer du sein métastatique de la femme âgée) à l’ASCO également. Conclusion On ne peut donc que constater le dynamisme du groupe aussi bien en France qu’à l’international et on ne peut que s’en réjouir ! Vous retrouverez toute l’activité du groupe GINECO (essais clos, en cours, publications) sur le site du groupe : www.arcagy.org. n onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 © Yekaterina Choupova - Fotolia Lecture critique gynécologie Nous avons lu pour vous… Points forts à retenir Gynécologie Le bévacizumab : une nouvelle arme dans la prise en charge du cancer de l’ovaire Dr Florian Pasquet, service de médecine interne-oncologie, HIA, Lyon 4 Perren TJ, Swart AM, Pfisterer J et al. A phase 3 trial of bevacizumab in ovarian cancer. N Engl J Med 2011 ; 365 : 2484-96. 4 Burger RA, Brady MF, Bookman MA et al. Incorporation of bevacizumab in the primary treatment of ovarian cancer. N Engl J Med 2011 ; 365 : 2473-83. Plusieurs études de phase II ont suggéré l’intérêt du bévacizumab dans le traitement du cancer de l’ovaire. Le numéro de décembre dernier du New England Journal of Medicine “enfonce le clou” en présentant 2 études de phase III (ICON 7 et GOG-218) confirmant l’intérêt de cette molécule en première ligne en association à la chimiothérapie par carboplatine et paclitaxel en situation adjuvante. L’essai ICON 7 L’essai ICON 7 a inclus 1 527 patientes présentant un cancer de l’ovaire localisé à haut risque (stade FIGO I et IIA avec cellules claires ou de grade 3) ou localement avancé (stade IIB à IV). Les patientes étaient randomisées pour recevoir après chirurgie soit le bras standard seul avec 6 cures de carboplatine AUC 5 ou 6 + paclitaxel 175 mg/m2 toutes les 3 semaines soit avec le bévacizumab à la dose de 7,5 mg/kg toutes les 3 semaines en association à la chimiothérapie puis seul pendant 12 cycles ou jusqu’à progression. La survie sans progression moyenne à 36 mois de suivi était de 20,3 mois dans le bras standard contre 21,8 dans le bras bévacizumab (hazard ratio 0,81 ; IC95 % 0,7 - 0,94 ; p = 0,004). Ce bénéfice était maximal à 1 an, soit après arrêt du bévacizumab, et diminuait ensuite. La mise à jour des données montre une survie sans progression à 42 mois de 22,4 mois dans le bras standard contre 24,1 dans le bras avec bévacizumab (p = 0,04). Chez les patientes à haut risque de progression, le bénéfice était encore plus marqué avec une survie sans progression de 14,5 mois contre 18,1 mois et une survie globale médiane de 28,8 mois contre 36,6 mois respectivement sans et onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 avec bévacizumab. L’utilisation du bévacizumab était associée à plus d’effets secondaires (18 % contre 2 %) notamment plus d’hypertension de grade 2 ou plus. L’essai GOG-128 L’essai GOG-128 a inclus 1 873 patientes présentant un cancer épithélial de l’ovaire incomplètement résécable de stade III et IV ayant bénéficié d’une chirurgie de debulking. Ces patientes ont été randomisées en double aveugle entre 3 bras, chacun comportant 6 cycles de carboplatine AUC 6 + paclitaxel 175 mg/m2 toutes les 3 semaines. Le bras standard comportait en plus l’administration d’un placebo toutes les 3 semaines du cycle 2 au cycle 22. Le bras bévacizumab en concomitant associait l’administration de bévacizumab (15 mg/kg) du cycle 2 au cycle 6 puis un placebo des cycles 7 au cycle 22, et le bras d’entretien du bévacizumab du cycle 2 au cycle 22. La survie sans progression médiane était de 10,3 mois dans le bras standard, 11,2 mois dans le bras bévacizumab en concomitant et 14,1 mois dans le bras bevacizumab en entretien. Le hazard ratio pour la progression ou le décès par rapport au bras standard était de 0,908 (IC95 % : 0,795-1,040 ; p = 0,16) avec le bévacizumab en concomitant et de 0,717 (IC95 % : 0,625-0,824 ; p < 0,001) avec le bévacizumab en entretien. En revanche, il n’y avait pas de différence en termes de survie globale entre les 3 groupes. Le taux d’hypertension artérielle nécessitant un traitement médical et de perforation gastrique était plus élevé dans les groupes bévacizumab. Conclusion Ces études confirment donc l’intérêt du bévacizumab en première ligne en situation adjuvante dans le cancer de l’ovaire, en particulier pour les formes à haut risque de récidive et localement avancées et dans le cadre d’une utilisation prolongée en concomitant d’une chimiothérapie par carboplatine + paclitaxel puis en entretien. Ainsi, les autorités européennes ont donné leur feu vert en début d’année pour l’utilisation du bévacizumab en première intention dans les cancers épithéliaux de l’ovaire avancé après chirurgie et en association avec une chimiothérapie standard. Les conditions d’utilisation de l’AMM qui suivra sont celles de l’essai GOG-128. n 135 mise au point Thorax Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon Un pronostic lié aux caractéristiques histologiques n Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon sont des entités rares (de 0,1 à moins de 2 % de l’ensemble de cancers broncho-pulmonaires). Les formes de bas grade, à faible degré d’évolutivité, peuvent survenir chez des sujets jeunes. Le diagnostic repose sur l’anatomopathologie et l’immunohistochimie. Le bilan d’extension doit être complet, en particulier dans les formes atypiques. Le traitement repose sur la chirurgie. Le traitement endoscopique de ces lésions est une alternative dans certaines formes localisées, endobronchique, avec une histologie de carcinoïde typique. Le pronostic est lié aux caractéristiques histologiques et à l’existence ou non de métastases. Abstract Carcinoïds and glandular tumours of the lung are rare forms of lung cancers (0.1 to 2 %). The forms of low rank, with low degree of malignity can arise in young subjects. The diagnosis is based on the pathology and immuno histochimy analysis. Diagnosis assessment must be extensive, particularly in atypical forms. Treatment is based on surgery. Endoscopic treatment is an alternative in typical carcinoïd, localized, endo-bronchial forms. Prognostic depends of histological characteristics and the existence or no of metastases. Introduction Les tumeurs carcinoïdes ont été primitivement décrites dans le tractus digestif comme des tumeurs neuro-endocrines malignes sur la base de leur capacité à produire des peptides neuro*Service de pneumologie, hôpital Saint-Antoine, APHP Paris 136 hormonaux identiques à ceux sécrétés de façon naturelle par les cellules neuronales (1). Les tumeurs carcinoides du poumon font partie des tumeurs neuro-endocrines pulmonaires qui regroupent 4 sous-types d’évolution clinique distincte : • les tumeurs carcinoïdes typiques de bas de grade de malignité, • les carcinoïdes atypiques de grade intermédiaire, • les carcinomes neuro-endocrines à grandes cellules de haut grade de malignité, • les carcinomes à petites cellules. Les carcinoïdes typiques et atypiques représentent 0,25 à 2 % des cancers broncho-pulmonaires. Bien que considérées comme des tumeurs de bas grade, elles demeurent au sein des tumeurs malignes en raison de l’incidence de métastases (2, 3). L’âge au diagnostic varie de la petite enfance à la 9e décade, avec une moyenne aux alentours de 50 Pr Christos Chouaid* ans. Il n’y a pas de sex ratio. Il s’agit des plus fréquentes néoplasies primaires pulmonaires de l’enfant et de l’adolescent. Les carcinoïdes atypiques sont réputés pour survenir chez des patients plus âgés. Le tabagisme n’est pas facteur de risque pour les carcinoïdes typiques. Sur le plan histopathologique, ces tumeurs ont une différenciation neuro-endocrine, avec une architecture endocrinoïde, en palissade ou trabéculaire, il existe parfois des images classiques en “rosette”. La classification est essentiellement basée sur l’activité mitotique et l’importance de la nécrose tumorale (4). Clinique Symptomatologie Le carcinoïde typique est une tumeur d’au moins 5 mm de diamètre avec un index mitotique inonko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon férieur à 2 mitoses pour 10 champs sans aucune plage de nécrose. Ces tumeurs typiques se développent essentiellement dans l’arbre bronchique proximal. Elles sont asymptomatiques dans 30 à 40 % des cas, parfois responsables de toux chroniques, d’hémoptysies et d’obstructions bronchiques. Un tabagisme est retrouvé dans la moitié des cas. Localisation Ce sont des tumeurs qui se développent préférentiellement au niveau des bronches souches et lobaires, rarement au niveau de la trachée ; 16 à 40 % selon les séries se développent en périphérie du parenchyme pulmonaire et sont éventuellement multiples. Au moment du diagnostic, environ 10 à 15 % des carcinoïdes typiques et 40 à 50 % des carcinoïdes atypiques présentent une métastase ganglionnaire, tandis que 5 à 10 % des carcinoïdes typiques et 20 % des atypiques présentent une métastase distante. Origine Les carcinoïdes peuvent présenter une mutation et une délétion du gène NEM1 (Neuro Endocrinopathie Multiple de Type 1). Ce gène situé au locus chromosomique 11p13 code pour une protéine menin. Son inactivation est caractéristique de la maladie familiale héréditaire NEM1 dans laquelle on observe des tumeurs parathyroïdes multiples, des tumeurs neuro-endocrines du pancréas, du duodénum et de la glande pituitaire ainsi que des carcinoïdes pulmonaires. En dehors de ces formes de maladie familiale où l’on note l’inactivation constitutive du gène NEM1 avec perte d’allèle et mutation au locus 11q13, on observe des mutations identiques du gène NEM1 onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 dans les carcinoïdes sporadiques et préférentiellement les carcinoïdes atypiques. Ceux-ci présentent une haute activité proliférative et une perte de l’expression du gène Rb suggérant un comportement clinique plus agressif. Les carcinoïdes peuvent être multiples dans le contexte d’hyperplasie neuro-endocrine idiopathique diffuse (DIPNECH) reconnue actuellement comme une lésion préinvasive des carcinoïdes (3, 5, 6). Endoscopie et biopsies Diagnostic Histologie Le bilan ne permet pas de faire la différence entre tumeur carcinoïde typique et atypique. Radiologie Sur le plan radiologique, le tableau est suivi d’opacités nodulaires centrales ou périphériques bien limitées et calcifiées dans 30 % des cas. En cas de lésion endobronchique proximale, une atélectasie lobaire ou segmentaire est possible. Rarement les tumeurs carcinoïdes peuvent se présenter comme des masses parenchymateuses proximales avec une croissance endobronchique limitée. TEP scan et scintigraphie Ce sont des tumeurs qui fixent peu au TEP scan. La scintigraphie à l’indium 111-pentétréotite (octréos scan) utilise un analogue de la somatostatine, le pentétréotide marqué à l’indium 111. Ce marqueur radiopharmaceutique se fixe avec une forte affinité aux récepteurs de la somatostatine qui sont surexprimés dans les tumeurs carcinoïdes. Les faux positifs de cette scintigraphie sont les lésions infectieuses et inflammatoires, les faux négatifs sont liés à l’absence d’expression du récepteur de la somatostatine (1, 2). A l’endoscopie, il existe un aspect assez typique de tumeurs hypervascularisées. Le risque hémorragique des biopsies est faible. Bilan d’extension Le bilan d’extension doit être complet : dans 55 % des cas, ces tumeurs sont diagnostiquées au stade I, dans 20 % des cas au stade II, dans 15 % des cas au stade III et dans 10 % des cas au stade IV (1, 7). Aspect histologique Histologiquement, les carcinoïdes typiques offrent une architecture organoïde associant des aspects insulaires, trabéculaires et des pseudo-rosettes. Les cellules tumorales sont relativement monomorphes, de forme polygonale, cubique ou fusiforme et à cytoplasme éosinophile ou pale. Les noyaux sont ronds ou discrètement ovalaires avec une chromatine peu dense, mottée et un nucléole de petite taille unique. La taille du nucléole et le pléiomorphisme sont plus marqués dans les carcinoïdes atypiques que dans les carcinoïdes typiques mais ne représentent pas un critère différentiel. Ils n’ont pas d’influence sur la survie des patients. Critères distinctifs En accord avec la classification de l’OMS récente, les seuls critères distinctifs permettant la stratification des patients selon la prédiction de survie sont : • un index mitotique inférieur à 2 mitoses pour 2 mm2 (10 HPF) pour les formes typiques ; • un index mitotique de 2 à 10 mitoses dans les formes atypiques et/ ou une nécrose de coagulation focale, exclusivement l’un de l’autre 137 mise au point ou en association (1, 4, 8). Le pléiomorphisme cellulaire n’est pas considéré comme un critère discriminant pour le diagnostic différentiel. La présence de rosettes dans les carcinoïdes atypiques est liée à un meilleur pronostic. À l’inverse, une taille supérieure à 3,5 cm, le genre féminin, et un index mitotique situé entre 6 et 10 mitoses pour 2 mm2 sont corrélés à une plus courte survie (4, 8). Immuno-histochimie Environ 80 % des carcinoïdes expriment les cytokératines, comme toutes les tumeurs épithéliales pulmonaires, toujours les cytokératines 8, 18 et 19 et les marqueurs neuro-endocrines, en particulier la CD56/NCAM une molécule sociée à un curage pédiculaire (1). Endoscopie interventionnelle et prothèse endobronchique L’endoscopie interventionnelle permet d’obtenir de larges fragments tumoraux, ce qui facilite le diagnostic histologique (12, 13). Elle permet un traitement symptomatique avec la levée d’une éventuelle obstruction ou le contrôle d’une hémoptysie. Il peut s’y associer la pose d’une prothèse endo-bronchique. Elle peut être utilisée à visée curative pour les carcinoïdes typiques, de localisation endoluminale pure. Ils doivent être entièrement ac- Le traitement repose essentiellement sur la chirurgie. d’adhésion transmembranaire appartenant à la super famille des immunoglobulines. À ce jour, NCAM reste le marqueur le plus utile dans tout le spectre des tumeurs neuro-endocrines pour sa résistance à l’artefact d’écrasement (9). Il est indispensable au diagnostic différentiel entre carcinoïdes et adénocarcinomes papillaires ainsi qu’avec les hémangiomes sclérosants. TTF1 (Thyroid Transcription Factor 1) n’est jamais exprimé (10, 11). Traitement Chirurgie Le traitement repose essentiellement sur la chirurgie. Il s’agit d’une résection pulmonaire conservatrice avec au minimum une segmentectomie as138 cessibles par l’outil endoscopique qui doit pouvoir en faire le tour. Leur pied d’implantation doit être limité (moins de 1,5 cm2) et leur taille inférieure à 5 cm3. Il ne doit pas y avoir d’adénopathies médiastinales ni de franchissement du mur bronchique visibles sur le scanner. Dans les différentes séries publiées, cela concerne entre 25 et 33 % des patients (12-14). Les étapes du traitement associent une coagulation de la lésion (laser ou thermocoagulation), une résection mécanique avec le bec du bronchoscope et un traitement du pied d’implantation par laser, cryothérapie ou l’électrocoagulation (12). Les résultats sont excellents, les récidives sont rares (15) Chimiothérapie et bithérapie La prise en charge de ces tumeurs doit associer le contrôle d’un éven- tuel syndrome carcinoïdien par les analogues de la somatostatine en bloquant le récepteur (sendostatine R) et une chimiothérapie. Classiquement il s’agit d’une chimiothérapie à base de platine. La bithérapie la plus souvent utilisée est cisplatine-étoposide avec des résultats extrêmement décevants. Pronostic Le pronostic est lié au caractère typique ou atypique sur le plan histologique. La survie à 5 ans est de l’ordre de 95 % pour les carcinoides typiques versus 65 % pour les carcinoïdes atypiques. Le stade et la taille de la tumeur sont par ailleurs des facteurs pronostiques (16). Les autres tumeurs rares (17) Les carcinomes de type glande salivaire comprennent les carcinomes adénoïdes kystiques, les carcinomes mucoépidermoïdes et les carcinomes myoépithéliaux. (Tab. 1). Les carcinomes adénoïdes kystiques Les carcinomes adénoïdes kystiques se voient chez les adultes d’âge moyen sans sexe ratio particulier. Il s’agit en général de tumeurs localisées. Ce sont des lésions centrales touchant plutôt les vaisseaux bronchiques proximaux, de manière exceptionnelle les bronches périphériques. L’importance des lésions peut être sous-estimée au scanner classique, une reconstruction en images 3D ou multiplans est souhaitable. La fixation au TEP scan est variable, dépendant du degré de différenciation, dans les tumeurs de haut grade ou de grade intermédiaire, la fixation au TEP scan montre un SUV supérieur à 6. onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 Les tumeurs carcinoïdes et les tumeurs glandulaires du poumon Tableau 1 - Caractéristiques cliniques, radiologiques et évolutives des carcinomes de type glande salivaire. Tumeur Aspects cliniques Aspects radiologiques Traitement chirurgical Carcinome adénoïde kystique Toux, dyspnée Masse proximale ou Résection extensive périphérique TEP : hyperfixation Carcinome muco Prédominance épidermoïde masculine Enfants, sujets jeunes Pneumonie chronique, toux, dyspnée Masse proximale bien délimitée des lobes supérieurs TEP : hyperfixation Résection extensive Carcinome myoépithélial TEP : hyperfixation Résection extensive Prédominance masculine Âge moyen : 50-60 ans Les carcinomes mucoépidermoïdes Les carcinomes mucoépidermoïdes sont des tumeurs survenant habituellement au niveau des glandes salivaires et qui atteignent plus rarement l’arbre trachéobronchique et le parenchyme pulmonaire. Ces tumeurs représentent moins de 0,1 % de l’ensemble des tumeurs bronchopulmonaires. ❚❚Histologie et immunohistochimie Sur le plan histologique, elles sont constituées de cellules épithéliales épidermoïdes associées à ces cellules mucineuses caliciformes et de cellules intermédiaires. L’index mitotique, le degré d’atypie cellulaire et l’importance de remaniement nécrotiques permet de distinguer des carcinomes mucoépidermoïdes de bas et de haut grades. Les cellules tumorales n’expriment pas les cytokeratines 7 et 20 mais peuvent être marquées par les anticorps anticytokeratinases 5 et 6. Ces carcinomes surviennent essentiellement chez l’adulte jeune onko + • Mai 2012 • vol. 4 • numéro 30 entre 20 et 30 ans, découverts très souvent à l’occasion d’un tableau d’obstruction bronchique et/ou d’hémoptysies. Les carcinomes mucoépidermoïdes de haut grade sont métastatiques d’emblée dans un nombre de cas non négligeable. ❚❚Diagnostic L’aspect radiologique est celui d’une masse homogène lobulée, volumineuse, bien délimitée et parfois kystique ou calcifiée. La lésion est unique dans plus de la moitié des cas et le plus souvent proximale. Il n’existe qu’exceptionnellement des envahissements ganglionnaires. Le TEP scan montre en général une fixation significative. L’endoscopie peut retrouver un aspect en iceberg avec une masse polypoïde exophytique, recouverte de muqueuse bronchique, parfois ulcérée. Autre Pronostic Radiothérapie adjuvante Survie 5 ans : 40 % Radiothérapie adjuvante Chimiothérapie adjuvante ? Survie 5 ans : 80 % (bas grade) Survie 5ans : 30 % (haut grade) Meilleur chez les enfants du faible nombre de cas rapportés dans la littérature, il est difficile de juger de l’efficacité des autres modalités thérapeutiques (chimiothérapie néo-adjuvante, chimiothérapie adjuvante, radiothérapie). ❚❚Pronostic Le pronostic dépend essentiellement du grade histo-pathologique, du statut ganglionnaire et du caractère carcinologique du geste chirurgical. La survie à 5 ans est supérieure à 80 % dans les formes de bas grade, inférieure à 50 % dans les formes de haut grade. n Mots-clés : ❚❚Traitement Le traitement est la résection chirurgicale carcinologique associée à un curage ganglionnaire médiastinal dans les formes opérables. Compte tenu Carcinoïdes, Tumeurs glandulaires du poumon, Diagnostic, Cancers Keywords: Carcinoïds, Glandular tumours of the lung, Diagnosis, Cancers 139 mise au point Bibliographie 1. Kulke MH, Mayer RJ. Carcinoid tumors. N Engl J Med 1999 ; 340 : 858-68. 2. Hage R, Brutel de la Rivière A, Seldenrijk CA, van den Bosch JM. Update in pulmonary carcinoid tumors: a review article. Ann Surg Oncol 2003 ; 10 : 697-704. 3. Travis WD, Rush W, Flieder DB et al. Survival analysis of 200 pulmonary neuroendocrine tumors with clarification of criteria for atypical carcinoid and its separation from typical carcinoid. Am J Surg Pathol 1998 ; 22 : 93444. 4. Skuladottir H, Hirsch FR, Hansen HH, Olsen JH. Pulmonary neuroendocrine tumors: incidence and prognosis of histological subtypes. A population-based study in Denmark. Lung Cancer 2002 ; 37 : 127-35. 5. Sturm N, Rossi G, Lantuejoul S et al. 34βE12 expression along the whole spectrum of neuroendocrine proliferations of the lung, from neuroendocrine cell hyperplasia to small cell carcinoma. Histopathology 2003 ; 42 : 156-66. 6. Debelenko L, Brambilla E, Agarwal SK et al. Identification of MEN1 gene mutations in sporadic carcinoid tumors of the lung. Hum Mol Genet 1997 ; 13 : 2285-90. 7. Luckraz H, Amer K, Thomas L et al. Bronchoscopic treatment of intraluminal typical carcinoid. A pilot study. J Thorac Cardiovasc Surg 1998 ; 116 : 402-6. 8. Harpole DH Jr, Feldman JM, Buchanan S et al. Bronchial carcinoid tumors : a retrospective analysis of 126 patients. Ann Thorac Surg 1992 ; 54 : 50-5. 9. Lantuejoul S, Moro D, Michalides RJ et al. NCAM and NCAM-PSA expression in neuroendocrine lung tumors. Am J Surg Pathol 1998 ; 2 : 1267-76. 10. Folpe AL, Gown AM, Lamps LW et al. Thyroid transcription factor-1 : immunohistochemical evaluation in pulmonary neuroendocrine tumors. Mod Pathol 1999 ; 12 : 5-8. 11. Du EZ, Goldstraw P, Zacharias J et al. TTF-1 expression is specific for lung primary in typical and atypical carcinoids: TTF-1-positive carcinoids are predominantly in peripheral location. Hum Pathol 2004 ; 35 : 825-31. 12. Sutedja TG, Schreurs AJ, Vanderschueren RG et al. Bronchoscopic therapy in patients with intraluminal typical bronchial carcinoid. Chest 1995 ; 107 : 556-8. 13. Cavaliere S, Foccoli P, Toninelli C. Curative Bronchoscopic laser therapy for surgically resectable tracheobronchial tumors: personal experience. J Bronchol 2002 ; 9 : 90-5. 14. Bertoletti L, Elleuch R, Kaczmarek D. Bronchoscopic cryotherapy treatment of isolated endoluminal typical carcinoid tumor. Chest 2006 ; 130 : 1405-11. 15. Luckraz H, Amer K, Thomas L et al. Long-term outcome of bronchoscopically resected endobronchial typical carcinoid tumors. J Thorac Cardiovascular Surg 2006 ; 132 : 113-5. 16. Beasley MB, Thunnissen FB, Brambilla E et al. Pulmonary atypical carcinoid : predictors of survival in 106 cases. Human Pathol 2000 ; 31 : 1255-65. 17. Uro-Coste E. 2009 update in salivary gland tumoral pathology. Ann Pathol 2009 ; 29 : 274-85. et les revues du Groupe Expression sur le web d les derniers numéros feuilletables en ligne, d les archives des revues (articles en pdf, revues en version numérique), d les numéros spéciaux dédiés aux congrès *L’abonnement à l’une des revues du Groupe français et internationaux, et les suppléments, Expression vous permet de bénéficier d’un accès d les actualités, régulièrement mises à jour, illimité et gratuit à l’intégralité des sites du Groupe d les agendas des congrès, en France et Expression : www.cardinale.fr - www.neurologies.fr dans le monde, www.ophtalmologies.org - www.onko.fr d les liens utiles, www.geriatries.org - www.rhumatos.fr d les petites annonces, consultation et www.diabeteetobesite.org multidiffusion des annonces + A venir, sur les sites des revues et sur offres-sante.fr, d les newsletters mensuelles, l’application iPhone onko+ d et bien d’autres rubriques… d Fil d’actualités d Annonces d’emploi d Revues en consultation Abonnez-vous à l’une des revues et accédez aux archives de tous les magazines et feuilletez les numéros en ligne OFFRE SPECIALE ABONNEMENT 10 N° de onKo+ Et l’accès illimité à www.onko.fr casque PHILIPS 80 e un Casque noir/blanc PHILIPS SHL5003 d Arceau à ressorts d’acier d Système acoustique : ouvert d Type d’aimant : néodyme d Bobine acoustique : CCAW d Réponse en fréquence : 10-28 000 Kz d Impédance : 32 ohms d Puissance d’entrée max : 50 mW • Sensibilité : 106 dB d Diamètre de l’enceinte : 40 mm d Type : dynamique d Longueur du câble : 1,2 m 55 e Un abonnement découverte de 6 mois au magazine de votre choix 20 e Et, en cadeau, une clé USB 4 Go si vous répondez sous 10 jours 75 e au lieu de 155 e 80 e de réduction ! A nous retourner accompagné de votre règlement à : Expressions Santé • 2, rue de la Roquette - Passage du Cheval-Blanc • Cour de Mai • 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 • Fax : 01 49 29 29 19 • E-mail : [email protected] Bulletin d’abonnement Oui, Votre abonnement à je désire bénéficier de l’offre exceptionnelle qui m’est réservée : 10 numéros de onKo+ + un Casque noir/blanc PHILIPS SHL5003 + l’abonnement découverte pour 75 e seulement* Je choisis 6 mois d’abonnement au magazine suivant : m Capital (6 n ) m L’Expansion (6 n ) m cardiologie Cardinale (5 no) m Diabète & Obésité (5 no) o m Pratiques en ophtalmologie (5 n ) m Repères en Gériatrie (5 no) o o m Planchemag (5 n ) m Neurologies (5 no) m Rhumatos (5 no) o Mes Coordonnées : q Dr q Pr q Mme q M. q Mlle Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .................................................................................. .................................................................................. Code Postal : Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Téléphone : Fax : E-mail : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . q Abonnement à l’étranger sans cadeau (10 n°) DOM TOM & Union européenne ��������������������������������������������������������������������������� 73 e TTC étranger Hors Union européenne������������������������������������������������������������������������� 83 e TTC q Je réponds sous 10 jours et je recois 1 Clé USB 4 Go en cadeau supplémentaire. Je choisis de régler : q Par chèque à l’ordre d’Expressions Santé q Par carte bancaire : no : Expire : Cryptogramme : *(bloc de 3 chiffres au dos de votre carte) Signature d * Valable uniquement en France dans la limité des stocks disponibles L’abonnement à la revue Neurologies vous permet de bénéficier d’un accès illimité et gratuit à l’intégralité des sites d’Expressions Santé : onko.fr neurologies.fr ophtalmologies.org diabeteetobesite.org cardinale.fr geriatries.org rhumatos.fr Feuilletez l’ensemble de nos revues en ligne et complétez votre collection avec nos anciens numéros