Analyse de la politique fiscale liée à l`entrepreneuriat Assises de l
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Analyse de la politique fiscale liée à l`entrepreneuriat Assises de l
Analyse de la politique fiscale liée à l’entrepreneuriat Assises de l’entrepreneuriat – Groupe de travail « Asseoir un cadre fiscal stable adapté à l’entrepreneur » Nom : Pascale AUGER Fonction : Administrateur de sociétés, Ex Vice-Président Capgemini Représentant le mouvement ETHIC 1. Quelle est votre perception globale de la fiscalité liée à l’entrepreneuriat ? Citez les aspects qui vous paraissent les plus positifs et les plus négatifs. La compétitivité des petites et moyennes entreprises est mise en avant comme étant le levier de croissance et de création d’emplois des années à venir. Or, la France a deux fois moins de petites et moyennes entreprises qu’en Italie et quatre fois moins qu’en Allemagne. Il y a donc à faire face à un triple enjeu : Un effet volume : doubler le nombre de petites et moyennes entreprises en France pour se mettre au niveau de l’Allemagne ; Favoriser la croissance et la création de valeur des entreprises existantes (par croissance interne ou par acquisition) en limitant les effets de seuil ; Dynamiser le marché de M&A autour des petites et moyennes entreprises (acquisition/cession). A ce jour, la perception globale de la politique fiscale reste très mitigée voire négative avec le sentiment que changer la fiscalité en Europe est trop compliqué/politique et que le grand public ne se sent pas concerné. Les aspects les plus positifs : Crédit impôt recherche Une ouverture avec la mise en place des assises de l’entrepreneuriat Les aspects les plus négatifs : Une fiscalité instable qui éloigne les investisseurs étrangers et ne facilite pas le marché M&A en France sur les petites et moyennes entreprises ; Une fiscalité qui a été trop utilisée comme un outil conjoncturel pour favoriser des politiques sectorielles, relancer un marché, ….mais qui perd de vue les finalités essentielles ; Un manque de compétitivité par rapport aux pratiques européennes Un poids fiscal très lourd pour les PME comparé aux grandes entreprises Vis-à-vis des entrepreneurs : une fiscalité qui se durcit sur une catégorie alors que l’on souhaite la développer une approche perçue comme pénalisante et confiscatoire d’une catégorie donnée une fiscalité qui tend à pénaliser la prise de risque en supprimant la distinction entre les revenus du travail et les revenus du capital L’investissement dans une PME est plus taxé que les œuvres d’art, l’immobilier. Les dividendes, qui sont le fruit du succès si le risque pris paye, sont aujourd’hui aussi lourdement taxés. Un entrepreneur ne choisit pas nécessairement au moment d’entreprendre son pays en fonction d’une fiscalité, mais peut décider d’entreprendre à l’étranger s’il pense qu’il y sera mieux considéré et traité, ou bien , de quitter la France si cela limite la croissance de son entreprise ou qu’il perçoit que le produit espéré- mais pas garanti – de sa prise de risque sera confisqué par une fiscalité trop élevée. L’entrepreneur recherche par ailleurs de la stabilité pour faire ses projets et fuira tout environnement imprévisible. Extrait des Echos du 29/01/13 30% des personnes interrogées « auraient envie » de créer une entreprise ou de se mettre à leur compte. La moitié des cadres supérieurs sont prêts à le faire contre 28% des employés et 34% des ouvriers. 51% des 18-25 ans sont les plus enthousiastes contre 24% pour les 50 – 64 ans à l’idée de créer ou de reprendre une entreprise. (…) Le fait de gagner plus d’argent (qu’en étant salarié) arrive d’ailleurs en troisième position (après l’indépendance et l’épanouissement personnel) dans les motivations. (…) Mais les ambitions de ces potentiels entrepreneurs restent modestes : 30% ne veulent aucun salarié, 39% concèdent qu’il s’agit avant tout d’assurer leur emploi. Seuls 11% d’entre eux souhaitent développer fortement leurs entreprises en termes d’emplois et d’investissement. » 2. Selon vous, quels doivent être les finalités et les objectifs prioritaires de la fiscalité liée à l’entrepreneuriat ? La fiscalité doit intégrer l’évolution des modèles économiques des entreprises et favoriser la création de valeur : (1) en revisitant ses fondamentaux et les faits générateurs de l’impôt comme cela a été fait avec la mise en œuvre de la LOLF pour la comptabilité de l’Etat, (2) en développant une dimension prospective pour des mesures fiscales rentables durablement. Les finalités et les objectifs prioritaires doivent être de : 1. Développer l’envie d’entreprendre sans pénaliser la prise de risque et l’envie de grandir en favorisant la création d’emplois 2. Garantir un cadre fiscal stable et Simplifier (la complexité de mise en œuvre des niches fiscales limite leur utilisation par certaines entreprises) : o simplifier les critères d’abattement/d’application des niches fiscales o limiter au maximum les effets incitatifs conjoncturels o développer la création de valeur et non pas l’optimisation fiscale 3. S’adapter à l’évolution de l’économie vers une économie d’usage o dont les entreprises internet sont les précurseurs mais qui est en train de se généraliser à tous les secteurs (ex : AUTOLIB, VELIB, EDF, location de jouets …) o qui permet le développement d’activités, non rentables dans un modèle classique, en activités rentables o en mettant en œuvre une taxation sur les flux avec une TVA adaptée 4. S’aligner au plus près des standards européens pour en faire un levier de compétitivité et d’attractivité (et non pas un levier incitatif pour les secteurs en difficulté), en prenant la combinaison des 3 impôts IS, Dividendes et Plus-Values qui fait l’environnement de l’entrepreneur. o o o o les taux d’imposition les plus élevés en dehors de la France sont en Allemagne (28% avec un taux forfaitaire sans barème ni durée de détention) et dans les Pays Scandinaves (30%) dumping sur la taxation des flux au Luxembourg ; Suisse ; Irlande l’Angleterre fait la différence entre fondateurs et non fondateurs avec des taux d’imposition de 10% pour les fondateurs pour 10millions de Livres sterling de plusvalues et de 5% pour les non fondateurs La France se situe à plus de 40% voire 100% par rapport à ces pays 5. Mesurer l’impact économique d’une mesure fiscale (avant/pendant) Le modèle d’une économie d’usage basé sur la taxation des flux est un facteur de déséquilibre beaucoup plus important que l’évolution du taux d’imposition de l’impôt sur les sociétés, notamment sur la capacité d’une entreprise à faire des investissements et sa valorisation. Il conduit à la délocalisation d’entreprises vers certains pays et peut s’accélérer si l’économie évolue dans tous les secteurs vers une économie d’usage (B2C). La fiscalité doit aujourd’hui intégrer une vision économique pour faciliter la création de valeur et non pas l’optimisation fiscale. Elle doit être douce, stable, avec des taux raisonnables alignés sur les pratiques européennes, pour ne pas être dissuasive (voire quelques taux allégés pour être incitative). Extrait du rapport DGFIP 2011 : « En 2011 pour les professionnels, les services de la DGFIP ont recouvré 168,1 milliards d’euros au titre de la TVA et 54,7 milliards d’euros au titre de l’impôt sur les sociétés. Nous comptons en 2011 près de 4,8 millions d’entreprises redevables de la TVA et 1,7 million d’entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés. L’impôt sur la TVA à la fois par son montant et son assiette (nombre d’entreprises redevables) est le plus important. » 3. Des avantages fiscaux existants vous paraissent-il excessifs, inefficaces ou contreproductifs ? Certains avantages fiscaux sur le principe sont intéressants (CIR, JEI, TEPA). Ils sont par contre nombreux, complexes à mettre en œuvre et nécessitent de faire appel à des experts fiscalistes/intermédiaires pour être certain de leur bonne application. Il est difficile de savoir avec certitude si on y a droit ou pas. Le nombre d’avantages fiscaux est beaucoup plus élevé en France qu’en Allemagne par exemple (153 taxes en France contre 55 taxes en Allemagne hors impôt sur les sociétés). Les dispositifs existants contribuent à développer une ingénierie fiscale d’experts et d’intermédiaires qui est plus tournée vers l’optimisation fiscale que la création de valeur pour l’économie. Exemples : cas du CIR dont l’application est plus orientée grands groupes que petites et moyennes er entreprises (le 1 bénéficiaire du CIR en France est la BNP) ; TEPA (avec le délai de 5 ans imposant ou non le remboursement de l’aide selon que le délai est inférieur ou supérieur à 5 ans. Si l’investissement est fait, il est curieux de le reprendre en fonction de cette notion de délai de 5 ans qui ne correspond pas à des cycles d’activité spécifiques) ; Cas de l’entrepreneuriat salarié : un axe important qu’il faut développer mais sa mise en œuvre est extrêmement complexe et devient vite une usine à gaz pour des entreprises en fort développement avec des rachats/restructurations (il ne faudrait pas exclure le cas des acquisitions / restructurations). Les aides fiscales doivent être beaucoup plus simples, plus claires et plus lisibles. La complexité actuelle incite certaines entreprises à ne pas utiliser ces aides par crainte d’un redressement ultérieur. Les avantages fiscaux sur la non-imposition des œuvres d’art à l’ISF, les régimes permanents des DOM, TOM, Corse (suppression des droits de succession) sont excessifs et non équitables. 4. Voyez-vous des distinctions faites entre les différents acteurs de l’entrepreneuriat (entrepreneurs, salariés, investisseurs privés, fonds de capital-risque…) ? Si oui, trouvez-vous qu’elles sont justifiées et/ou vertueuses ? La distinction entre acteurs est un peu vaine et surtout recouvre des frontières floues, notamment lors de plusieurs tours de table. Seuls 11% des acteurs dans les entreprises qui ont levé plus de 10 millions d’euros sur les 8 dernières années dans le secteur internet par exemple, sont classifiés comme fondateur selon les critères retenus actuellement. Il est exact qu’il faut encourager le long-terme et aider ces acteurs à investir durablement, c’est-àdire dans l’intérêt social de l’entreprise et de toutes ses parties prenantes pour favoriser sa croissance. Par contre, « Durablement » s’applique à l’entreprise et un collectif d’acteurs. Il n’est pas souhaitable de le traduire par une notion de durée fixe appliquée individuellement à chaque investisseur, cette notion de durée fixe étant par ailleurs extrêmement variable selon les secteurs et le stade de développement de l’entreprise (start up, métiers de services de proximité, …). Par nature, le capital risque est considéré comme un acteur centré sur le court-terme et la performance de l’entreprise. Néanmoins imposer des durées peut aller complètement à l’encontre de l’échelle de temps propre au marché et à l’entreprise. Une proposition serait d’assimiler toute cession dans l’année à des revenus, et au-delà de proposer un taux forfaitaire, et ceci quelle que soit la catégorie d’acteurs. Les distinctions entre les différents acteurs de l’entrepreneuriat ne sont pas justifiées. 5. Que pensez-vous du régime existant de taxation des cessions (plus-values/moins-values)? La taxation des plus-values dans la réforme actuelle se situe entre 40% et 60% ce qui aura un impact très fort sur le financement par la personne physique de petites entreprises. Pour mémoire, la taxation était auparavant de 34,5% hors régime dérogatoire avec un taux forfaitaire de 19% pour l’IR et 15,5% pour les contributions sociales ; La loi de Finances votée rétroactivement a fait évoluer le taux forfaitaire de 19% à 24% conduisant à une taxation de 39,5% (contributions sociales incluses) dès 2012 ; Avec un TMI de 45% sur une plus-value, le taux d’imposition global est de 58,21%. Ce point est d’autant plus préoccupant que les petites entreprises qui démarrent ont besoin de fonds propres ou d’apport de personnes physiques comme les Business Angels. Elles n’ont pas encore accès à des acteurs de capital risque compte tenu de leur petite taille. Il est donc important de ne pas détourner les investisseurs/personnes physiques de l’investissement des petites entreprises. Les critères tels que la durée de détention et les profils d’acteurs n’ont pas de sens/réalité économique. Ils sont par ailleurs très différents selon les secteurs économiques et leur définition est d’une grande complexité pour tenir compte de la diversité des cas de figure. Leur mise en œuvre pousse plutôt les acteurs à des stratégies d’optimisation fiscale plutôt qu’à un plus grand désir d’entreprendre. A titre d’illustration une fiscalité favorisant une durée de détention longue avec une exonération à partir de 30 ans ne pourrait qu’accentuer les problèmes de succession actuels au sein des entreprises et maintenir à leur tête des dirigeants fondateurs trop âgés. Le critère de durée de détention n’est pas un critère pertinent d’abattement. La mise en œuvre de statuts dérogatoires (ex : JEI) est sur le principe intéressante mais les critères associés pour cet exemple ne recouvrent pas toutes les formes de l’innovation actuelle et génèrent une différence trop importante entre ceux qui investissent dans une JEI (et sont totalement exonérés) et ceux qui investissent dans les autres entreprises (et sont taxés à 60%). Un taux moyen entre 20-25% (pour certaines catégories si l’on souhaite conserver un effet d’incitation) et 30-35% serait plus juste. A titre de comparaison : Le modèle mutualiste qui est un modèle très résilient en période de crise et par nature socialement responsable, repose sur une répartition qui est la suivante : 1/3 pour les actionnaires, 1/3 pour les sociétaires, 1/3 pour les réserves ; Le modèle anglo-saxon est un modèle simple dont il pourrait être utile de s’inspirer. La taxation des plus-values est assimilée à un revenu si la durée est inférieure à 1 an et forfaitaire au-delà avec un taux global de 23% quel que soit la durée de détention (incluant le taux fédéral/état/taxes sociales). Il faut aller vers une simplification de la fiscalité sur les PME, supprimer les critères tels que la durée de détention, profils d’acteurs et alléger les statuts dérogatoires en définissant en contrepartie un taux moyen n’allant pas au-delà de 30 – 35 % et des taux allégés (entre 10 et 20% - pas forcément 0%) pour les quelques statuts dérogatoires qui seraient maintenus. Il n’y a pas de point particulier concernant le traitement de l’acquéreur. Les droits d’enregistrement lors de l’acquisition sont des droits fixes relativement faibles. Si la question consiste à les faire évoluer en fonction du montant de l’acquisition selon un %, ce point pourrait être envisagé à condition que cela reste léger et avec en contrepartie une taxation allégée sur les opérations de cession. Les dispositifs d’aide aux jeunes entreprises par contre au travers d’OSEO, ... sont plutôt très satisfaisants. Concernant la durée de détention et le taux d’abattement associé La durée de détention n’est pas un indicateur pertinent d’abattement pour des entreprises en développement et ignore le cycle de vie des métiers/activités concernés (qui peuvent être des cycles courts ou longs selon les secteurs d’activité). La compétitivité des entreprises actuelles passera d’abord par le développement des métiers de service, ce qui veut dire des cycles courts et une industrie de main d’œuvre (les enjeux ne sont donc pas sur la durée mais la compétitivité de l’entreprise sur la dimension sociale – talents, flexibilité, ….-). Dans des secteurs en pleine croissance, la stratégie de croissance est souvent par acquisition pour créer rapidement un effet de taille sur le marché. La rapidité des cessions est donc plutôt un signe de vitalité du marché. Ce n’est pas le cas en France où le marché M&A des petites entreprises est plutôt atone. Concernant le profil des acteurs La mise en place de critères d’abattement par catégorie de profil peut avoir un effet négatif lors d’opérations de levée de fonds par exemple (refus d’un fondateur lors d’un 2eme tour de table e pour des raisons personnelles liées à la modification de son statut au 2 tour et une augmentation du % de son imposition en cas de sortie). Idem pour des profils d’entreprise par secteur : une société financière doit-elle être matraquée parce qu’elle est financière ? Si elle crée de la richesse taxable et des emplois, quel est le problème ? Cf : article 6 du PLF qui exclut les financières. Concernant le statut JEI : Le statut Jeune Entreprise innovante est intéressant car il répond à des objectifs d’innovation et de compétitivité mais ignore ce qui va être une partie importante de l’innovation à venir (innovation par les usages et les services ou innovation purement incrémentale – exemple BOSCH fabrication de perceuses ou des environnements internet qui évoluent chaque semaine). Les critères définis actuellement correspondent à une vision très scientifique de l’innovation. Des entreprises comme Facebook, Daily motion n’auraient jamais été des JEI selon ces critères. Pourtant elles ont profondément transformé les modes d’échange personnels et commerciaux (les entreprises de B2C les utilisent comme des outils de promotion marketing). Concernant le régime des retraités Le régime des retraités avec un abattement de 1/3 à compter de la 5eme année de détention pour les dirigeants de PME qui font valoir leurs droits pendant 2 ans après la cession et une exonération de l’IR au bout de 8 ans, doit permettre de faciliter la transmission et/ou la cession du côté du cédant. C’est un point positif dans la mesure où il permet à une génération de dirigeants créateurs de passer la main en douceur puisqu’ils ont la possibilité de le faire sur 2 ans. Concernant la transmission familiale Il n’y a pas eu d’évolution sur la transmission familiale dans le cadre de la nouvelle loi fiscale. Les mesures mises en place visent à faciliter la transmission familiale du côté du cédant. L’exonération de l’impôt sur le revenu pour le cédant à condition que les titres soient conservés par l’acquéreur pendant 5 ans est compréhensible et permet de faciliter la transmission du côté du cédant. Le prix de cession correspond à la valeur réelle et pose la question du financement par la jeune génération qui est en général déjà dans l’entreprise en tant que salarié Une étude sur les dirigeants du SBF 120 démontre que la mise en place d’un dirigeant issu de l’interne augmente les chances de croissance et de développement de l’entreprise. Aujourd’hui 80% des dirigeants nommés sont issus de l’interne. Les entrepreneurs lors de transmission familiale font preuve d’exigence et vont chercher l’enfant, le membre de la famille ou l’externe qui leur semble le plus apte à reprendre l’entreprise. La transmission familiale, avec cette exigence dans la sélection du profil du successeur s’il est de la famille est un engagement de développement durable (i.e favorisant la pérennité de l’entreprise). Faut-il favoriser le développement familial trans-générationnel et comment ? faut-il avantager les familles qui travaillent ensemble ? ou bien développer auprès de la jeune génération d’autres moyens d’accéder au capital. Concernant BSPCE Un régime utile pour les start-ups qui favorise l’actionnariat salarié. Par contre il est dommage d’exclure les entreprises résultant de fusion / restructuration. 6. Que pensez-vous du régime de droit commun des dividendes ? Comment le positionnez-vous par rapport au régime des plus-values/moins-values de cession ? Il n’y a pas de raison de faire une différence entre les revenus du capital selon les différents supports, c’est-à-dire plus ou moins-values ou revenus sous forme de dividendes. Ils doivent être taxés de la même manière. Les dividendes et les plus-values correspondent à des logiques de distribution du bénéfice différentes : le dividende est une distribution annuelle du bénéfice et est taxé sur une base annuelle ; les plus-values sont des dividendes qui n’ont pas été distribués (mise en réserve des bénéfices) et sont taxées en une seule fois lors de la cession. Ce sont des décisions de gestion prises au niveau de la direction de l’entreprise et qui doivent être validées par le Conseil d’administration ou de surveillance s’il existe. La fiscalité n’a pas à s’immiscer dans la gestion. 7. Que pensez-vous du régime de droit commun sur les mutations à titre gratuit et des régimes dérogatoires existants? Il y a actuellement une cristallisation dans la mesure où les nouvelles mesures figent la fiscalité sur la détention du patrimoine (pas d’abattement si une durée minimum n’est pas remplie) et la fiscalité sur la transmission (limitation des schémas de donation, pas de facilité sur la transmission familiale du côté de l’acquéreur, durée minimum). Les mutations à titre gratuit sont nécessaires sans devenir un moyen détourné de s’exonérer de la plus-value en procédant en deux temps à des cessions externes. Les schémas de donation (parents – enfants) ont été détournés dans certains cas pour permettre ensuite aux enfants de faire des opérations de cessions en étant exonérés de la plus-value, l’entreprise ayant été donnée à son prix de cession réel (« La donation purge la plus-value »). La modification des schémas de donation en août 2012 en réduisant les montants et les durées de 150k€ tous les 10 ans à 100k€ tous les 15 ans représente des montants très faibles au regard de la transmission d’un patrimoine professionnel. Concernant le régime dérogatoire existant : le Pacte Dutreil est assez largement utilisé sous réserve de remplir 4 conditions (durée de détention, nature de l’entreprise, ….). Il y a un débat pour ceux qui sont en dessous des 6 ans et qui sont exclus du régime dérogatoire. Une suggestion d’évolution serait de généraliser en régime de droit commun le Pacte Dutreil favorisant ainsi la croissance interne des entreprises sur plusieurs générations sans charges fiscales excessives au moment de la mutation. 8. Que pensez-vous du régime de droit commun de l’ISF et des régimes dérogatoires existant pour les entrepreneurs et les investisseurs privés ? Le régime proposé ISF PME est particulièrement intéressant puisqu’il vient en diminution de l’impôt et peut aller jusqu’à 50% de l’impôt. Pourquoi le limiter aux acteurs de l’ISF et ne pas le proposer dans le cadre de l’impôt sur le revenu, quitte à revoir le % de diminution de l’impôt ? L’objectif de cette mesure est de donner aux gens le goût d’investir. La population des entrepreneurs et l’envie d’entreprendre ne correspondent pas uniquement et forcément à la catégorie d’acteurs qui est concernée par l’ISF, même si cette dernière est celle qui disposerait par hypothèse, des plus grandes capacités d’investissement. Par ailleurs, la mesure actuelle sur l’ISF est très favorable voire accentue encore les inégalités entre ceux qui investissent et ne sont pas à l’ISF et ceux qui y sont. Il est également important d’aligner l’exonération d’ISF pour tous les fondateurs (en ayant une définition large de la notion de fondateur). Extrait des Echos du 29/01/13 Les entrepreneurs dans l’âme se retrouvent aux deux extrémités de l’échelle des salaires : 40% sont dans la frange des foyers dont le revenu est inférieur à 9000 euros par an, 37% dans la tranche supérieure à 60.000 euros par an. 9. Que pensez-vous de la relation avec l’administration fiscale et les procédures déclaratives ? Des experts de très bon niveau mais la relation avec l’administration fiscale est de moins en moins compréhensive. Les acteurs hésitent à solliciter en amont l’administration fiscale sur l’analyse et la compréhension des conditions de mise en œuvre des dispositifs, bien que les textes puissent être sujets à interprétation. Les rescrits sont d’ailleurs moins utilisés que dans d’autres pays. En 2011 le rapport d’activité de la DGFIP fait état d’une augmentation du nombre de consultations avec 21 950 demandes de rescrits et questions de législation et 11 projets d’instruction fiscale portant sur divers domaines comme celui du crédit d’impôt recherche soumis à la consultation publique. Pendant la période ouverte à la consultation publique, les particuliers et les entreprises concernés peuvent faire des observations qui seront ensuite, selon leur degré de pertinence, prises en considération dans l’instruction définitive. On constate également un durcissement et une limitation du dialogue oral et contradictoire en phase de précontentieux et contentieux avec une véritable difficulté à faire entendre certains arguments de redressement. Les avocats fiscalistes sont de plus en plus associés à la phase de précontentieux. Les récents changements d’organisation des services fiscaux ont conduit à un changement de nombreux interlocuteurs et les entreprises sont déroutées. Les relations avec l’administration fiscale pourrait être améliorée notamment avec : un rôle de pédagogie des deux côtés : l’administration a des pouvoirs et doit respecter des garanties, l’entrepreneur a des droits. L’administration fiscale fait parfois pression pour ne pas utiliser certaines voies de recours ; la mise en place d’un interlocuteur unique par secteur ou par zone dans la durée (un interlocuteur unique pour l’IS, TVA, droit social ….) la mise à disposition de conseil en fiscalité auprès des entrepreneurs à un coût raisonnable (plateformes de service territoriale offrant des prestations de conseil en fiscalité et d’expertise comptable qui pourraient être mutualisées entre entrepreneurs d’une même région, l’expert-comptable restant le premier interlocuteur de l’entrepreneur) le développement de procédures d’agrément sur le modèle de celle qui existe pour le CIR (procédure préalable permettant de vérifier que vous êtes éligible au CIR) avec des délais de réponse réduits en déclinant le modèle de la DGE (Direction des Grandes Entreprises) et ses bonnes pratiques existant au sein de la DGE (un vrai dialogue, ….) La simplification de la fiscalité simplifierait de facto les relations avec l’administration fiscale au moins dans les procédures déclaratives. Enfin la mise en place d’une nouvelle gouvernance dont les assises de l’entrepreneuriat seraient la première étape pourrait être aussi étudiée, favorisant l’instauration d’un dialogue plus régulier, et qui s’inscrirait dans un cadre pluriannuel. 10. Seriez-vous favorable à la création d’un PEA dédié aux PME, et/ou aux ETI et/ou aux entreprises non cotées ? La mise en place d’un PEA dédié aux PME, et/ou aux ET et/ou aux entreprises non cotées serait une mesure de plus dans les niches fiscales existantes. Il serait préférable de développer l’envie d’entreprendre au travers de mesures sur l’IR qui sont plus immédiates et lisibles pour les populations qui ont envie d’entreprendre. 11. De manière générale, quelles mesures proposeriez-vous pour améliorer la situation ? Engagement de fiscalité durablement stable, tenant compte des remarques de taux et d’assiette exprimées ci-dessus : Cf tableau récapitulatif page suivante Au-delà des mesures évoquées ci-dessus, il semble important de favoriser le développement des entreprises et leur croissance. Extrait des Echos du 29/01/13 : Les effectifs des entreprises françaises ne croissent que de 7% contre 32% en Italie et 22% en Allemagne. Les entreprises dépassant 10 salariés au bout de cinq ans d’activité ne représentent que 1,3% des entreprises créées (chiffre OCDE 2011). Les leviers fiscaux notamment sur les droits de mutation sont des outils qui permettent de favoriser le développement des entreprises par une croissance externe. Il faut aussi aider au développement par une croissance interne en allégeant les charges sociales et limitant les effets de seuil (1 CE à partir de 50 salariés, 1 délégué à partir de 10 personnes, …) Les 12 MESURES PROPOSEES : 1. Définir un taux moyen forfaitaire n’allant pas au-delà de 30 – 35 % et des taux allégés (entre 10 et 20% - pas forcément 0%) pour les quelques statuts dérogatoires qui seraient maintenus 2. Assimiler les transactions inférieures à 1 an à de l’impôt sur le revenu 3. Ne pas faire de distinction entre les catégories d’acteurs, une personne physique pouvant évoluer d’une catégorie à une autre dans l’intérêt social de l’entreprise et son développement 4. Supprimer la notion de durée comme critère d’abattement au-delà de un an, trop complexe à élaborer selon les secteurs et le cycle de vie des produits 5. Simplifier les statuts dérogatoires et supprimer les impôts avec des mesures de rendement décroissantes 6. Faire évoluer le statut de JEI en intégrant l’innovation par les usages et l’innovation incrémentale 7. Etudier comment favoriser la transmission trans-générationnelle 8. Imposer de manière identique les revenus du capital issus des différents supports (plus ou moins-values ou revenus sous forme de dividendes, le choix du support étant lié à un choix de gestion concernant la répartition des bénéfices, la fiscalité n’a pas à s’immiscer dans des choix de gestion) 9. Généraliser l’utilisation du Pacte Dutreil déjà largement connu des entrepreneurs et en faire un régime de référence 10. Transformer la mesure ISF PME actuelle en l’appliquant dans le cadre de l’impôt sur le revenu pour permettre à tous les entrepreneurs quitte à revoir le % de diminution de l’impôt 11. La création d’un PEA n’est pas utile au regard des dispositions proposées sur l’IR 12. Faire évoluer les relations avec l’administration fiscale : . un rôle de pédagogie des deux côtés : l’administration a des pouvoirs et doit respecter des garanties, l’entrepreneur a des droits, la mise en place d’un interlocuteur unique par secteur ou par zone dans la durée (un interlocuteur unique pour l’IS, TVA, droit social ….) la mise à disposition de conseil en fiscalité auprès des entrepreneurs à un coût raisonnable (plateformes de service territoriale offrant des prestations de conseil en fiscalité et d’expertise comptable qui pourraient être mutualisées entre entrepreneurs d’une même région par exemple) le développement de procédures d’agrément sur le modèle de celle qui existe pour le CIR (procédure préalable permettant de vérifier que vous êtes éligible au CIR) avec des délais de réponse réduits en déclinant le modèle de la DGE (Direction des Grandes Entreprises) et ses bonnes pratiques existant au sein de la DGE (un vrai dialogue, ….) ANNEXE - Présentation succincte des différents régimes Les conditions permettant de bénéficier du maintien du taux de 19% sur les plus-values réalisées par certains entrepreneurs : Sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (cela signifie en pratique une activité opérationnelle ou une activité de holding animatrice et exclut les sociétés ayant une activité financière, immobilière ou de gestion de patrimoine mobilier) depuis au moins 10 ans (ou depuis leur création si elle est plus récente) Titres détenus, directement ou indirectement, de manière continue depuis au moins 5 ans Représentant au moins 10% des droits de vote et des droits financiers pendant au moins 2 ans au cours des 10 dernières années Représentant au moins 2% des droits de vote et des droits financiers au jour de la cession Cédant ayant exercé une activité dirigeante ou salariée rémunérée au sein de « la société dont les titres sont cédés » de manière continue pendant les cinq années ayant précédé la cession et ayant procuré plus de 50% des revenus professionnels Régime applicable sur option A noter : les abattements décrits ci-avants ne s’appliquent pas en cas d’option pour le régime « entrepreneurs » Entrée en vigueur : dès 2012 Prorogation du dispositif pour les dirigeants partant à la retraite jusqu’au 31 décembre 2017 : Régime d’abattement de la plus-value d’1/3 au-delà de 5 ans de détention Exonération d’IR au-delà de 8 ans de détention PME dont le capital est détenu à 75% par des personnes physiques Faire valoir ses droits à la retraite dans les deux ans qui précèdent ou suivent la cession Prélèvements sociaux au taux de 15,5% sans abattement Statut jeunes entreprises innovantes (JEI) Leur statut prévu à l'article 44 sexies-0 A du CGI est accordé aux PME créées depuis moins de huit ans et dont le capital est détenu : de manière continue à hauteur de 50 % au moins notamment par des personnes physiques, de manière directe ou indirecte ou par des sociétés répondant à la définition des PME) détenues elles-mêmes à 50 % au moins par des personnes physiques. Elles doivent engager au cours de chaque exercice des dépenses de recherche et de développement représentant au moins 15 % de leurs charges fiscalement déductibles. Le statut de jeune entreprise innovante ouvre droit à des avantages fiscaux temporaires, notamment : une exonération d'impôt sur les bénéfices, une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, une exonération de contribution économique territoriale, une exonération de charges sociales patronales sur le personnel participant à la recherche, une exonération des plus-values de cession de parts ou d'actions (sous réserve de respecter les conditions suivantes : (i) les titres cédés doivent avoir été souscrits à compter du 1er janvier 2004 ; (ii) ils doivent avoir été conservés, depuis leur libération, pendant une période d'au moins trois ans au cours de laquelle la société a effectivement bénéficié du statut de JEI ; (iii) le cédant, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne doivent pas avoir détenu ensemble (directement ou indirectement) plus de 25 % des droits dans les bénéfices et des droits de vote depuis la souscription des titres cédés. L'exonération ne s'étend pas aux prélèvements sociaux. Bons de souscription de parts de créateur d'entreprise Certaines sociétés par actions passibles de l'impôt sur les sociétés en France sont autorisées à créer des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE) destinés à leurs salariés ou à leurs dirigeants soumis au régime fiscal des salariés. L'émission de ces bons est réservée aux sociétés non cotées et aux sociétés cotées sur un marché d'instruments financiers réglementé ou organisé d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen et dont la capitalisation boursière est inférieure à 150 millions d'euros. Si ce seuil est dépassé, les sociétés peuvent continuer à attribuer des bons pendant les trois ans suivant ce dépassement sous réserve de remplir l'ensemble des autres conditions précitées. Le dispositif des BSPCE est réservé aux sociétés immatriculées au registre du commerce depuis moins de quinze ans (ou moins de sept ans pour les bons attribués entre le 1er janvier 1998 et le 1er septembre 1998) qui n'ont pas été créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration ou d'une extension d'activités préexistantes. Le capital de la société émettrice des bons doit être détenu directement pour 25 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales elles-mêmes directement détenues pour 75 % au moins de leur capital par des personnes physiques. Le gain net réalisé par le bénéficiaire des bons lors de la cession des titres souscrits en exercice de ces bons est imposé à l'impôt sur le revenu comme plus-value de cession de valeurs mobilières au taux de 19 % ou de 30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société depuis moins de trois ans à la date de la cession (à ces taux s'ajoutent les prélèvements sociaux de 15,5%). Alors que les plus-values de cession de valeurs mobilières sont, à compter de 2013, imposées au barème progressif, le gain net réalisé par le bénéficiaire des bons lors de la cession des titres souscrits en exercice de ces bons reste imposé à l'impôt sur le revenu au taux de 19 % ou de 30 %. Régime d’exonération des cessions au sein de groupes familiaux (participations excédant 25 %) Lorsque les membres d'une même famille détiennent une participation importante dans une société soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent et ayant son siège dans un Etat membre de l'Union européenne, en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein, les cessions de titres au sein du groupe familial sont exonérées lorsque les conditions suivantes sont réunies : le cédant, son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants, ainsi que leurs frères et soeurs, doivent avoir détenu ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices sociaux à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession ; la cession de ces droits doit être consentie, pendant la durée de la société, au profit de l'un des membres du groupe familial défini ci-dessus (peu importe le pourcentage de titres cédés) l'acquéreur ne doit pas revendre tout ou partie des droits à un tiers dans un délai de cinq ans. Les plus-values exonérées sont soumises aux prélèvements sociaux. L'exonération est applicable lorsque la cession est effectuée au profit du conjoint d'un ascendant ou d'un descendant soumis à une imposition commune si toutes les autres conditions sont remplies. Elle ne l'est pas en revanche lorsque la cession est consentie au conjoint d'un frère ou d'une soeur ou à une société « de famille ». Si, dans les cinq ans de la cession, les titres sont revendus à un tiers, ne serait-ce qu'en partie, la plus-value initialement exonérée devient imposable en totalité au nom du premier cédant au titre de l'année de revente. L'exonération n'est en revanche remise en cause ni en cas de transmission à titre gratuit des titres dans le délai de cinq ans, ni en cas de cession dans le même délai à un autre membre du groupe familial du premier cédant. En cas de revente, la plus-value éventuellement réalisée est traitée dans tous les cas distinctement de la première, quelle que soit la date de la revente. Elle peut, le cas échéant, bénéficier de l'exonération conditionnelle.