la vente de livres papier en ligne, les livres numériques

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la vente de livres papier en ligne, les livres numériques
LA VENTE DE LIVRES PAPIER EN LIGNE,
LES LIVRES NUMÉRIQUES
SYNTHÈSE DES RÉSULTATS D’UNE ENQUÊTE AUPRÈS DES LIBRAIRES DU LIMOUSIN
Centre régional du livre en Limousin
« La librairie est en train de changer, mais je pense que la société
est en train de changer aussi. »
(Mme Joyeux, Librairie Plein ciel, Limoges)
13, boulevard Victor-Hugo, 87000 Limoges
Tél. 05 55 77 47 49, fax 05 55 10 92 31
[email protected]
www.crl-limousin.org
Août 2011
Comprendre la situation actuelle du marché du livre
et du numérique
En 2010, les ventes de livres numériques ont progressé de 8 %
par rapport aux ventes de l’année précédente1.
Même si le chiffre d’affaires total pour ce secteur du marché
reste faible (1,8 % ou 54 millions d’euros)2, sa croissance est
solide et ne peut pas être ignorée. Encore plus important,
selon l’Observatoire de l’économie du livre du Service du livre
et de la lecture (ministère de la Culture et de la Communication),
les ventes des livres papier par Internet représentent à peine
10% du marché3. Malgré le développement de ces deux secteurs,
il reste encore de l’incertitude quant à leur avenir, ainsi que
des fausses idées sur le numérique dues en partie à l’imprécision
de l’usage des termes qui désignent ce de quoi on parle.
Pour comprendre ces nouveaux supports de lecture et ces nouvelles
pratiques de consommation, quelques définitions s’imposent.
D’abord, quand on parle d’un livre électronique on fait référence
à un support qui est, bien sûr, électronique, mais qui est aussi
portable, capable de sauvegarder des données qui sont visualisées
sur un écran ; Il s’agit de l’objet qui affiche le contenu (iPad,
Kindle, ordinateur). Un livre numérique, au contraire, désigne
1
Nicolas Gary, «Exclusif: en France, l’ebook représente 1,8% du chiffre d’affaires»,
le contenu qui a été mis dans un format qui peut être lu grâce
à un support électronique. Par contre, bien qu’un livre numérique
puisse contenir des hypertextes, il n’en est pas un. Un hypertexte
est un «système de renvois permettant de passer directement
d’une partie d’un document à un autre, ou d’un document
à d’autres documents choisis comme pertinents par l’auteur.»4
Par la suite, un hyperlien est le texte ou l’objet sur lequel on clique
pour faire ce passage.
Enfin, il peut y avoir de la confusion au sujet de la vente des livres
en ligne. Le plus souvent, il s’agit de la vente des livres papier
via un site marchand tel qu’Amazon. Dans ce cas, bien que
la commande et le paiement s’effectuent en ligne, le livre reçu
par courrier ou récupéré en magasin est un livre papier.
Ceci dit, on vend et achète un livre numérique en ligne aussi
– la différence étant que dans ce cas, le livre téléchargé
(ou à disposition sur Internet) est dans un format à destination
d’être lu sur un écran.
Objectifs de l’enquête et de cette synthèse
Face au développement des sites de vente de livres papier en ligne
et face à l’essor de livres en format électronique attendu
en France, le Centre régional du livre en Limousin a trouvé
judicieux de mener une enquête sur le positionnement
actualitte.com, 30 juin 2011.
2
Ibidem.
3
4
Observatoire de l’économie du livre du Service du livre et de la lecture,
sur le Lexique du livre numérique, par L’Agence Rhône-Alpes pour le livre
Économie du livre : Le secteur du livre : Chiffres clés 2009-2010, mars 2011.
et la documentation (ARALD), publié en mai 2010.
Les informations et explications données dans ce paragraphe sont basées
des libraires de la région par rapport à ces évolutions.
Le CRL en Limousin a pour objectif d’observer les effets
qu’ont ces nouveaux outils sur les librairies du Limousin.
Par la suite, le CRL espère mieux accompagner les libraires
dans cette période d’évolution du marché du livre.
Contrat de progrès pour la filière livre
Actuellement, la Région, en partenariat avec la DRAC, est en train
d’élaborer un contrat de progrès pour la filière du livre
en Limousin. Dans un avenir proche, il y aura des possibilités
de soutien financier et de formation grâce à ce contrat et le CRL
souhaite pouvoir cibler les besoins et les attentes des libraires.
Présentation du fonctionnement de l’étude
D’avril à juin 2011, le CRL a contacté les responsables
de vingt-cinq librairies installées dans les trois départements
(neuf en Corrèze5, trois en Creuse6, treize en Haute-Vienne7),
5
Au plaisir des livres, Bulles de papier, Centre culturel Leclerc (Tulle),
Librairie chrétienne (Brive-la-Gaillarde), La petite marchande d’histoires,
de plusieurs types (généraliste, jeunesse, BD, chrétienne, etc.)
et a obtenu des réponses de la part de chacun.
Les questionnaires utilisés portaient sur la situation
informatique des librairies, la vente des livres papier en ligne
(pratiques, attitudes, utilisations), les formats électroniques
des livres (pratiques, attitudes, usages) et les besoins
des libraires.
Quelques remarques sur les réponses
Les libraires du Limousin constituent un groupe hétérogène
avec des différences d’âge, d’expérience et de structure
administrative. En conséquence, certains libraires
ne se sentaient pas en mesure de répondre à certaines
questions ; ceci a été particulièrement vrai pour ceux
qui venaient d’ouvrir ou reprendre leur boutique.
D’autres travaillent en équipe et ont répondu aux questions
à deux.Ainsi, même si vingt-cinq librairies ont fourni
des réponses, il peut y avoir certaines questions
a plus ou moins de vingt-cinq réponses selon la situation
des librairies (nouvellement installée, plus d’un libraire
ayant répondu, etc.).
Librairie Trarieux, Maison de la presse (Brive-la-Gaillarde), Préférences,Vivre d’art.
6
7
Aux belles images, La licorne, Mag’Presse (Guéret).
À propos, BD rêv’, Diffusion Vie, Librairie Mille bulles, Librairie Nivet,
Librairie occitane, Librairie Laucournet, Librairie Livre libre, Maison de la presse
(Centre Saint-Martial, Limoges), Page et plume, Pages d’écriture, Plein ciel,
Rêv’en pages.
.1
LA SITUATION INFORMATIQUE DES LIBRAIRIES
Plusieurs librairies ne sont pas informatisées
« Les besoins d’équipements les plus importants concernent l’informatisation
des magasins et le développement de sites Internet. »
(État des lieux de la librairie indépendante en Limousin, CRL en Limousin)
Le CRL a constaté lors d’un état des lieux de la librairie
indépendante en Limousin en 2009 qu’il y avait un besoin
de moderniser la situation informatique des librairies.
Deux ans plus tard, la situation reste largement inchangée.
Sur les vingt-cinq librairies visitées, 32 % n’utilisent toujours
pas de logiciel de gestion de stock. Ceci dit, une petite librairie
avec relativement peu de titres peut se tourner vers des tableurs
pour organiser et résumer les informations sur son stock.
Il existe des libraires pour qui le choix de ne pas se servir
de logiciel de gestion de stock découle de la revendication
de l’aspect humain de leur commerce et de l’importance
qu’ils accordent à la connaissance des livres qu’ils vendent.
Pourtant, chez d’autres, le coût ou le manque de formation
freine le développement.
Toutefois, parmi les dix-sept librairies équipées d’un logiciel
de gestion de stock, d’autres difficultés subsistent et peuvent
désavantager certains. Ceux qui ont un logiciel spécifique
à la librairie ont un accès direct à des sites comme Dilicom,
ce qui, parmi d’autres avantages, facilite les commandes.
Mais ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter ces logiciels
2.
ne bénéficient pas de cet avantage. Le manque de moyens
financiers empêche certaines librairies de s’équiper d’un logiciel
plus moderne ou de passer à une nouvelle version du logiciel
qu’ils possèdent déjà.
Un fort usage d’Internet
Un « outil d’information. »
(Mme Tingaud, Aux belles images, Guéret)
Malgré le nombre de librairies qui n’ont pas de logiciel de gestion
de stock, vingt-trois des vingt-cinq librairies visitées (soit 92%)
ont au moins un ordinateur équipé d’une connexion Internet
dans leur magasin. Devenu un outil indispensable pour la plupart
des libraires, Ils ont très largement intégré l’usage du web
dans leur travail au quotidien. Plus précisément, ils s’en servent
pour leurs recherches bibliographiques, pour passer commande
chez leurs fournisseurs et pour la communication
sur leur boutique via des sites web, blogs, e-mails, etc.
L’importance d’Internet pour un libraire est telle que ne pas
en être équipé peut desservir une librairie. C’est le cas
d’un des magasins visités. Se sentant désavantagé par rapport
à ses confrères, le propriétaire a essayé sans succès de trouver
le financement nécessaire pour moderniser sa boutique
(nouvel ordinateur, installation d’une connexion Internet)
et se mettre à la vente en ligne. Bien que l’absence de connexion
ne soit pas l’unique raison de la fermeture de sa librairie
(août 2011), il le cite comme un handicap.
Usage d’Internet par les libraires
Recherche bibliographique
16
Commandes de fournisseurs
14
Blog / Site web
9
Vente de livres
stable (voir graphique ci-dessous). Les raisons de la baisse
de fréquentation des librairies en Limousin sont sans doute
variées (la crise, la migration des commerces vers les banlieues
des villes), mais beaucoup de libraires s’accordent à dire
qu’ils n’ont pas de moyen de savoir si cette baisse est due
à la vente de livres papier en ligne.
6
Achat de livres
Fréquentation de la librairie
depuis douze mois
5
Communication
4
Consultation de catalogues
2
En baisse
Recherche de nouveautés
2
En augmentation
Suivi des colis
1
Stable
Ne sait pas
12 %
12 %
12 %
64 %
Moins de clients en librairie
« Je vais où sont les clients. »
(M. Deguingand, Librairie Livre libre, Limoges)
La présence des librairies limousines sur Internet
Les libraires interrogés reconnaissent que le marché du livre est
difficile en ce moment. 64% des librairies ont connu des baisses
de fréquentation depuis au moins un an tandis que seulement
12% ont connu une augmentation et 12% ont une fréquentation
« On est conscient qu’au début ça va démarrer tout doucement,
mais on est conscient aussi qu’on doit être présent sur la toile. »
(M. Dève, Bulles de papier, Brive-la-Gaillarde)
.3
En ce qui concerne la vente de livres papier en ligne, les librairies
limousines sont encore peu présentes. Parmi celles qui ont
participé à notre enquête, neuf librairies ont un site web,
mais seulement six d’entre eux sont des sites marchands.
Pourtant, 44% des libraires ont déjà eu un client qui leur a parlé
de ses expériences de l’achat de livres en ligne. Les Limousins
se tournent régulièrement vers Internet pour rechercher
des informations sur des livres, pour en acheter, pour trouver
les dates de sortie, etc. Un libraire à Guéret a expliqué que
les clients commencent par faire leurs démarches sur Internet
mais reviennent en magasin après qu’ils ont rencontré
une difficulté lors de leur achat (produit abîmé, délais ou frais
de livraison qui ne correspondaient pas à leurs attentes, etc.).
Les autres répondants ont été nombreux à confirmer
cette observation.
Les libraires aussi participent à cette évolution : 68 % ont acheté
un livre en ligne à un moment ou un autre. Parmi eux,
treize libraires l’ont fait pour une raison professionnelle
(pour un client), tandis que seulement six ont acheté un livre
en ligne pour une raison personnelle, souvent expliquant
que ce n’était que pour des textes difficiles à trouver en librairie.
Les libraires reconnaissent que le marché du livre est en train
d’évoluer et qu’il faut évoluer aussi. Pour ce faire,
certains ont choisi de se mettre à l’utilisation des nouvelles
technologies de communication telles que les réseaux
sociaux. Selon les libraires interrogés, le moyen le plus
populaire d’avoir une présence en ligne est le site web dédié
4.
à la librairie (neuf existent déjà et trois autres librairies ont
des sites en cours de réalisation) ; Facebook n’est pas loin
derrière avec sept boutiques (soit 28 %) ayant un compte
sur le réseau social.
Présence de la librairie sur Internet
Blog pour la librairie
Oui
Non
Facebook pour la librairie
Oui
Non
Twitter pour la librairie
Oui
Non
Site web pour la librairie
Oui
Non
1001libraires.com
Oui
Non
4
21
7
18
1
24
9
16
1
24
Par contre, les conceptions qu’ont les libraires de ces outils
informent sur l’état actuel et le progrès à faire dans le domaine
de la communication électronique. Les réseaux sociaux sont
d’abord envisagés par ces professionnels comme des vitrines
pour les magasins. Cette conception est logique pour un site
web, qui a souvent la vocation d’informer les internautes,
mais ce n’est pas l’objectif d’un réseau social qui est plutôt
un lieu d’échanges et de communication entre plusieurs
participants.
La volonté d’être présents dans les lieux virtuels ou réels
que les clients fréquentent (réseaux sociaux, blogs, sites Internet)
existe chez les libraires du Limousin, mais ils manquent
souvent de formation et d’expérience pour profiter
au maximum de ces technologies de communication.
Par ailleurs, ils ont encore des réticences par rapport
au temps qu’il faut y consacrer et par rapport
à la déshumanisation de la librairie.
Le portail 1001libraires.com offre peut-être une solution
à ces problèmes en proposant aux libraires indépendants
d’adhérer et de bénéficier d’un certain nombre de services.
Cependant, l’idée fondatrice est de permettre à des clients
potentiels de chercher les livres qu’ils souhaitent acheter
sur le portail. Ils choisissent aussi une région ou ville de France
et voient les librairies adhérentes qui ont le livre en stock
géolocalisées. Le client peut par la suite réserver le livre
et se rendre dans la librairie deux heures plus tard
pour le récupérer.
Le site a dû repousser sa date d’ouverture, mais est actuellement
fonctionnel. Pourtant, une seule librairie en Limousin a choisi
d’y participer et ce libraire avoue être déçu par les services
actuels. Parmi les libraires qui ne font pas partie
de 1001libraires.com, six envisagent d’y adhérer.
Les autres ont cité une multitude de raisons pour lesquelles
ils ne considèrent pas cette possibilité. D’abord, certains
n’ont pas les caractéristiques demandés par 1001libraires.com:
ils sont trop petits (il faut un certain nombre de titres pour
y adhérer) ou n’ont pas informatisé leur stock. D’autres vendent
à un trop grand pourcentage de produits autres que le livre
(presse, papeterie). Ensuite, quelques librairies n’étaient pas
au courant de l’existence du portail. Enfin, certains libraires
ne voyaient pas l’intérêt pour eux d’y participer.
Un attachement fort à la librairie traditionnelle
« Sur les bases de données on ne trouve que ce qu’on cherche ; mon boulot
est de vendre des choses à des gens qui ne les cherchent pas. »
(M. Nivet, Librairie Nivet, Limoges)
La résistance face aux changements dans le marché du livre reflète
le fait que les libraires restent très attachés à la librairie
traditionnelle. Ils s’inquiètent de la concurrence inégale
qui existe entre leurs petites boutiques en région
et les grosses structures de vente de livres en ligne.
Les moyens financiers et logistiques permettent aux compagnies
telles qu’Amazon d’offrir les frais de livraison et de livrer
les commandes plus vite. Les mêmes services ne sont pas
viables chez les librairies indépendantes du Limousin,
favorisant les achats de livres auprès des sites de vente
en ligne nationaux ou internationaux.
Grâce aux explications données par les libraires au sujet
de leurs inquiétudes et leurs positionnements face à l’évolution
du marché, on distingue leurs conceptions du rôle
du libraire : un libraire (1) offre un service de proximité
et un lieu de vie et de contact humain importants
à un quartier, une ville ou un département, (2) accompagne
les lecteurs dans la découverte des livres et (3) protège
et promeut la culture et la liberté de pensée en refusant
.5
qu’un algorithme puisse bien choisir un livre pour un client.
Le côté humain (échanges, conseils, services) est
immanquablement mentionné comme une raison
de préserver les librairies brick and mortar8.
Avis des libraires sur le livre numérique
« Pas d’avis »
« C’est complémentaire au papier »
1
« Ça peut être un outil formidable si bien utilisé »
1
« C’est pour les jeunes »
1
« Ça encourage les non-lecteurs à lire »
2
« C’est pour des usages spécifiques »
2
« J’aime le livre en tant qu’objet »
8
« Cela ne m’attire pas »
8
« C’est trop cher »
1
« Cela ne me concerne pas »
1
« Cela peut favoriser la petite édition électronique »
1
« Le numérique n’est que pour des usagers spécifiques »
8
Un terme anglo-saxon qui désigne les librairies faites de briques et de mortier,
autrement dit, une librairie qui a une boutique physique et non pas virtuelle.
6.
5
3
«Cela signifie la possible disparition des librairies, éditeurs ou genres»
4
« C’est le format d’avenir de certains types de livres »
4
« Le passage au numérique et inévitable »
5
« On est dans une phase de transition »
5
« C’est un autre support ou une autre clientèle »
5
« Le papier a encore sa place »
5
LES LIVRES NUMÉRIQUES EN LIMOUSIN
Un attachement fort au papier
Un nouveau support de lecture
« Je me prépare à résister. Le livre papier existera toujours.
Il suffit de bien faire son boulot. »
(M.Trarieux, Librairie Trarieux,Tulle)
« C’est assez loin de la réalité pour nous. »
(M. Delias, À Propos, Saint-Junien)
Le concept d’un livre numérique est encore flou dans l’esprit
de beaucoup de libraires. 48 % des libraires interrogés
reconnaissent ne pas connaître la différence entre un livre
numérique et un livre numérisé, tandis que seulement
32 % pouvaient expliquer les deux termes. Si on considère
que seulement 44 % des libraires interrogés ont déjà essayé
de lire un livre en version électronique (ordinateur, liseuse
dédiée, etc.), cette confusion n’est pas surprenante.
D’autant plus que les libraires questionnés ne voient
généralement pas de raison immédiate de s’y intéresser.
Seuls trois libraires avouent envisager de vendre des livres
en format électronique. L’absence de demande de la part
des clients et la facilité d’acheter un livre numérique en ligne
de chez soi expliquent en grande partie le faible intérêt
pour ce type de livres chez les libraires. Selon les participants
à cette étude, il y a aussi une offre de titres en version
numérique insuffisante pour être un produit viable
dans leurs magasins.
Il est intéressant de noter un certain décalage entre les avis
des libraires au sujet des formats numériques
et leurs expériences dans le même domaine,
car parmi les libraires qui ont participé à cette étude,
comme dit auparavant, seulement 44 % ont déjà essayé
la lecture sur un support électronique. Les quinze libraires
n’ayant pas essayé citent leur manque d’attirance pour
ce mode de lecture. Leurs réactions font ressortir un refus
assez généralisé des formats électroniques et une affirmation
de la préférence pour le papier.
Pour les libraires, le papier est associé à la sensualité.
Les commerçants évoquent d’abord le plaisir et le confort
de lecture comme avantages du papier. D’un autre côté,
ils admettent que l’électronique permet aux utilisateurs
d’apporter plusieurs textes dans un seul objet compact
et léger et peut présenter des outils qui aident des chercheurs
à mieux analyser le texte.Ainsi pour les libraires, le côté plaisir
prime quand on lit un livre papier alors que le côté pratique
prime pour sa version numérique.
Les avis personnels et professionnels sont moins uniformes ;
néanmoins, on y observe certaines tendances. La tendance
la plus nette est celle de la préférence personnelle
.7
pour le papier avec 32% des répondants expliquant que le livre
numérique ne les attire pas et 32 % disant tout simplement
aimer le livre en tant qu’objet, ce qui fait 64 % des libraires
qui préfèrent lire sur papier. En outre, ils défendent le format
papier dans leurs opinions professionnelles, mais il y a aussi
le sentiment que la progression des formats numériques est
inévitable. Certes, 20 % des répondants pensent que le papier
a encore sa place, mais autant de libraires pensent que le livre
numérique va ou est déjà en train de s’imposer.
« J’ai l’impression que tout le monde est incertain en ce moment. »
(M. Nivet, Librairie Nivet, Limoges)
Comment assister au mieux les libraires
face à la situation actuelle de la librairie
en Limousin ?
Les libraires du Limousin ont envie de faire face à la mutation
du marché du livre, mais ne sont pas toujours prêts à le faire.
Cependant, des solutions simples existent pour soutenir
ce secteur d’activité si vital à la culture de la région.
Une inquiétude diffuse chez les libraires
« Je suis inquiet sans être inquiet. »
(M. Félip, BD rêve, Limoges)
Par rapport à la vente de livres en ligne, 36 % des libraires
8.
6.
questionnés se déclarent incertains de l’avenir
et 20 % se sentent menacés (pour les chiffres de toutes
les réponses, voir graphique page 9). Certains professionnels
qui se préparent à évoluer avec le marché ou qui se disent
tout simplement incertains de l’avenir avouent que dans
le futur, ce canal de vente pourrait nuire à leurs commerces.
D’autres ne sont confiants que dans la survie de leur domaine
ou de leur boutique, considérant que les bouleversements
réduisent la clientèle d’autres librairies et non pas la leur.
Les libraires ont les mêmes perceptions par rapport aux livres
numériques. 32 % d’entre eux sont incertains de l’avenir
en ce qui concerne les livres électroniques
tandis que 12 % se sentent menacés. Encore une fois,
plusieurs libraires choisissent de s’en inquiéter plus tard,
estimant que le futur immédiat reste plutôt stable pour eux.
Comme pour la vente de livres en ligne, d’autres prédisent
que les formats électroniques se développeront dans
des domaines qui ne les concernent pas (livres scientifiques
ou livres scolaires, par exemple). Dans les cas de la vente
de livres en ligne et des formats numériques, le fait de dire
que les difficultés viendront plus tard prévalent
chez les libraires approchant de l’âge de la retraite.
Ils reconnaissent que leur métier subit des changements,
mais considèrent que les évolutions aboutiront quand
ils ne seront plus en activité.
Avis des libraires sur la vente de livres
papier en ligne et le livre numérique
Incertains de l’avenir
Vente en ligne
Livre numérique
8
Se préparent à évoluer
Vente en ligne
Livre numérique
8
Indifférents
Vente en ligne
Livre numérique
Menacés
Vente en ligne
Livre numérique
9
d’aujourd’hui. Mais cela a un coût parfois trop élevé
pour un libraire seul.
Formation aux technologies et leur utilité
pour les libraires
9
6
6
« […] il y a toute une génération qui a connu des supports électroniques. »
(M. Pradié, Maison de la presse, Centre Saint-Martial, Limoges)
5
3
Soutien à la modernisation des librairies
« C’est quelque chose qui est là, qui va prendre de l’essor. »
(Mme Dubarry, Page et plume, Limoges)
Les libraires savent que pour conquérir de nouveaux clients
dans un marché en transformation et pour pouvoir soutenir
la compétition avec des librairies qui ont plus de moyens
financiers et logistiques que la plupart d’entre eux
en Limousin, il faut moderniser leur magasin. Pour certains,
cela correspond à l’achat d’un logiciel de gestion de stock
ou d’une version plus performante d’un logiciel déjà existant.
Pour d’autres il faut commencer par l’achat d’un ordinateur
ou d’une connexion Internet. L’objectif commun à toute forme
de modernisation est le besoin d’être en phase avec
les pratiques d’achat et de communication de la clientèle
L’acquisition des technologies plus modernes ne suffit pas à assurer
la pérennité des librairies indépendantes en Limousin.
Du simple fait de la différence de générations, peu de répondants
ont le niveau d’expérience technologique des jeunes clients
d’aujourd’hui et de demain. Il faut que les libraires sachent
non seulement comment faire fonctionner les technologies,
mais aussi qu’ils connaissent ce qui est à leur disposition
ainsi que l’utilité de chaque outil. Ceci permettra à chacun
de pouvoir choisir l’option la plus adaptée à sa situation
et par la suite de pouvoir en tirer le maximum d’avantages.
Besoin de démythification des formats numériques
« Je ne peux pas avoir d’avis puisque je ne connais pas. »
(M.Veyssière, Maison de la presse, Brive-la-Gaillarde)
Les nouveaux formats numériques de livres restent encore mal
connus chez les libraires. En réponse à au moins une question,
16 % ont déclaré ne pas pouvoir répondre ou ne pas avoir
.9
d’avis sur le sujet des livres électroniques
parce qu’ils ne connaissaient pas assez, voire pas du tout,
les technologies. D’autres professionnels parlaient du manque
de confort de lecture d’un livre électronique sans en avoir lu.
Pour pouvoir bien se positionner dans le marché du livre,
pour pouvoir bien conseiller les lecteurs et ainsi assurer
la pérennité de la librairie en Limousin, les livres numériques
et les nouveaux services que les librairies peuvent offrir
doivent être mieux connus par les libraires – et peut-être
aussi par le grand public.
Il faut que les libraires aient un moyen
de mesurer les effets des ventes en ligne
« Il faut faire des distances en Limousin pour trouver des livres,
d’où l’intérêt de trouver des choses sur Internet. »
(Mlle Urroz, Libraria occitana [IEO Lemosin], Limoges)
La connaissance de la clientèle constitue un autre aspect important
pour le choix d’outils et la stratégie de communication
qu’un libraire y associe. À plusieurs reprises, des libraires
ont expliqué qu’il était difficile de mesurer l’impact
que la vente des livres en ligne ou des formats numériques
avait sur leur commerce. Des études au niveau national aident
à comprendre le marché du livre en général, mais des études
spécifiques à la région pourraient être d’une aide précieuse
pour les libraires qui doivent faire face à l’évolution
de leur métier. En conséquence, le CRL et l’Association
10.
des libraires indépendants du Limousin (ALIL) envisagent
de réaliser un sondage complémentaire auprès des clients
des librairies pour savoir où et comment les Limousins
achètent leurs livres.
CONCLUSION
« Le livre papier a encore de beaux jours devant lui. »
(Cyril Malagnat, Rêv’en pages, Limoges)
Qu’ils soient prêts à accueillir le numérique et à vendre
des livres papier en ligne, ou qu’ils soient des défenseurs
du livre papier vendu en librairie, les libraires du Limousin
ont besoin d’être accompagnés pendant cette période
de transition que connaît actuellement le secteur du livre.
Les informations disséminées au sujet des ventes de livres
papier en ligne, des livres numériques, ainsi que des occasions
de travailler avec d’autres professionnels du livre
ou de se former aident les libraires à se positionner
par rapport à la réalité du marché et des pratiques
de leur clientèle. Mais cette enquête indique que des formations,
des aides financières qui rendraient possible l’amélioration
des outils technologiques et une plus grande diffusion
d’information seraient d’une aide précieuse aux professionnels
de la librairie. À travers les livres qu’ils vendent, les libraires
nous permettent d’être à l’écoute de notre société
et de nous-mêmes.Avec les changements qui s’opèrent
dans le monde du livre, il est plus important que jamais
d’être à l’écoute des libraires et de répondre à leurs besoins.
.11
Le Centre régional du livre en Limousin remercie sincèrement les libraires
qui ont offert de leur temps afin de participer à cette étude.
Réalisation: Pamela Kline.
Maquette: François Prothée.
Le Centre régional du livre en Limousin est principalement financé par le ministère de la Culture et de la Communication —
Direction régionale des affaires culturelles du Limousin — et par la Région Limousin.
Il reçoit le soutien de la Direction régionale des Services pénitentiaires, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative,
du ministère de l’Éducation nationale et des conseils généraux de la Corrèze, de la Creuse et de la Haute-Vienne.
Le Centre régional du livre en Limousin est membre de la FILL (Fédération interrégionale du livre et de la lecture).
Direction régionale
des affaires culturelles
Limousin