katanga: la crise oubliée de la rdc

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KATANGA: LA CRISE OUBLIÉE DE LA RDC
Rapport Afrique N°103 – 9 janvier 2006
TABLE DES MATIÈRES
RÉSUMÉ ANALYTIQUE ET RECOMMANDATIONS.................................................... i.
INTRODUCTION .......................................................................................................... 1
I.
II. LA SÉCURITÉ ............................................................................................................... 2
A.
B.
C.
LES MAÏ-MAÏ DU NORD KATANGA .......................................................................................2
1.
La perte de contrôle ...................................................................................................2
2.
Des vélos pour acheter la paix ...................................................................................3
3.
La chasse de Gédéon..................................................................................................4
LA POLITIQUE IDENTITAIRE ..................................................................................................5
1.
Le conflit entre les “originaires” et les “non-originaires” .........................................5
2.
Les divisions entre le nord et le sud...........................................................................6
3.
Les troubles urbains et la lutte électorale...................................................................7
LE KATANGA À L’HEURE DE KINSHASA: LE POSITIONNEMENT POLITIQUE À LA VEILLE DES
ÉLECTIONS ............................................................................................................................9
1.
La politique des mines ...............................................................................................9
2.
L’incident de Kilwa .................................................................................................11
3.
La tentative de sécession d’avril 2005.....................................................................12
III. LE MAINTIEN DE LA PAIX ..................................................................................... 13
1.
2.
3.
L’intégration des groupes armés et la démobilisation des combattants...................13
Le déploiement de la MONUC et son mandat.........................................................15
La bonne gouvernance et l’abus de pouvoir ............................................................15
IV. CONCLUSION ............................................................................................................. 17
ANNEXES
A. CARTE DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO ........................................................19
B. CARTE DE LA PROVINCE DU KATANGA ...................................................................................20
C. GLOSSAIRE ...............................................................................................................................21
D. À PROPOS DE L’INTERNATIONAL CRISIS GROUP .....................................................................23
E. RAPPORTS ET BRIEFINGS DE CRISIS GROUP SUR L’AFRIQUE...................................................24
F. LE CONSEIL D’ADMINISTRATION DE CRISIS GROUP................................................................26
Rapport Afrique n° 103
le 9 janvier 2006
KATANGA: LA CRISE OUBLIÉE DE LA RDC
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
La province du Katanga est l’une des régions les plus
violentes de la République démocratique du Congo
(RDC) et, cependant, l’une des plus négligées. La plupart
de ses problèmes sont identiques à ceux qui touchent le
reste du pays. Cependant, elle a besoin d’une attention
immédiate car elle constitue le coeur politique aussi bien
que le poumon économique de la nation. C’est un moteur
potentiel de croissance, dont les mines, à une certaine
époque, rapportaient de 50 à 80 % du budget national. Si
l’on souhaite que les élections de l’année 2006 aient une
chance quelconque de se dérouler dans le calme et
de produire un gouvernement stable et légitime, il est
indispensable que les acteurs nationaux et internationaux
prêtent une attention particulière à cette province clé
dans les domaines suivants: l’intégration de l’armée,
l’élimination des chaînes de commandement parallèles,
ainsi que l’éradication de la corruption. Si les parties
prenantes attendent la mise en place d’un nouveau
gouvernement issu des élections pour s’atteler à ces
problèmes, tel que semble le suggérer la donne
internationale actuelle, elles risquent d’arriver trop tard.
La province natale du président Joseph Kabila et de
nombreux hommes politiques importants à Kinshasa
est secouée par trois conflits: sudistes contre nordistes,
“originaires” contre “non-originaires”, et milices Maï-Maï
contre armée nationale.
La compétition nord-sud s’est exacerbée depuis que
Laurent Kabila, nordiste et père du président actuel,
Joseph Kabila, a pris le pouvoir en mettant fin à la
dictature de Mobutu en 1997. Le sud est l’une des zones
minières les plus riches de tout le continent africain; ses
immenses réserves de cuivre et de cobalt ont amené
les hommes politiques du Katanga, essentiellement des
nordistes, à entretenir des réseaux individuels parmi les
effectifs des forces de sécurité locales afin de protéger
leurs intérêts en tenant sous la menace leurs adversaires.
Ayant le sentiment d’avoir été écartés dans le partage des
richesses de leur propre province, les sudistes nourrissent
une rancune affichée envers ces officiels du nord. Il faut
signaler que cette rivalité a donné lieu à de nombreux
épisodes violents. À titre d’exemple, en octobre 2004,
pendant qu’elle combattait une rébellion dans la ville
minière de Kilwa, l’armée a tué plus de 70 civils. Et,
en mai 2005, alléguant d’un complot de sécession à
Lubumbashi, l’État a arrêté et tenté d’intimider des
hommes politiques et des officiers du Sud Katanga. Des
acteurs de Kinshasa, soucieux de protéger leurs intérêts
miniers et d’étouffer dans l’oeuf toute opposition, semblent
être à la base des deux opérations.
La campagne électorale a rallumé le vieux conflit entre
les natifs du Katanga et les immigrés venus de la province
du Kasaï. En effet, sous la tutelle belge, de nombreux
Luba du Kasaï sont venus travailler dans les sociétés
minières et les administrations publiques, créant des
tensions; des politiciens ont manipulé ces tensions et,
en 1992-1993, ont organisé des milices en vue d’une
purification ethnique. Plus de 5,000 Luba ont été ainsi
tués. L’Union des nationalistes et des fédéralistes du
Congo (UNAFEC), un parti dirigé par certains des
instigateurs de la violence au début des années 1990,
utilise des bandes de jeunes pour intimider ses opposants,
souvent des Luba. Les chefs de la jeunesse de ce parti ont
exhorté leurs militants à soumettre leurs adversaires au
supplice du collier en leur passant un pneu enflammé
autour du cou.
La violence au nord Katanga est étroitement liée à des
acteurs politiques installés à Kinshasa. Pendant la guerre,
Laurent Kabila a créé dans la région des milices Maï-Maï
afin d’endiguer l’avancée des rebelles soutenus par le
Rwanda. Ces milices, qui recevaient des armes de
Kinshasa jusqu’en 2004, n’ont pas été intégrées dans
l’armée nationale, et se battent souvent entre elles ou contre
l’armée au sujet de taxes locales et de butins de braconnage.
Il est plus que temps que les acteurs concernés s’attellent
à ces problèmes. Il incombe au gouvernement de prendre
la responsabilité du maintien de la sécurité dans la
province. Ce dernier doit prendre des mesures concrètes
en vue d’intégrer les milices Maï-Maï dans l’armée
nationale, et d’arrêter les commandants coupables de
crimes de guerre. Après avoir épuisé toutes les voies
pacifiques, le gouvernement devrait déployer des brigades
de l’armée intégrée au Katanga afin de démanteler les
groupes armés récalcitrants. La Mission de l’Organisation
des Nations Unies au Congo (MONUC) doit être associé
à ces opérations. Elle a déjà prouvé son efficacité face à
Katanga: la crise oubliée de la RDC
Crisis Group Rapport Afrique N°103, le 9 janvier 2006
des milices similaires dans le district de l’Ituri, où elle a
démobilisé 14,000 combattants; et les milices du Katanga
ne sont pas aussi bien armées et organisées. Cependant,
l’augmentation des effectifs pour la province (un bataillon
de 800 hommes) autorisée fin 2005 par le Conseil de
sécurité est largement insuffisante. La brigade de 2,590
hommes demandée par le Secrétaire général est
indispensable.
Enfin au Katanga, comme ailleurs dans le pays, la
mauvaise gouvernance et l’impunité sont des parents
proches de la violence. Des responsables utilisent des
chaînes de commandement parallèles dans l’armée et
l’administration pour protéger leurs intérêts propres et
détourner les deniers publics. La justice est trop faible et
trop politisée pour en venir à bout. Les niveaux actuels de
corruption et d’abus de pouvoir sont en eux-mêmes des
sources d’instabilité qui menacent la transition et
pourraient compromettre les élections. De plus, des
politiciens mécontents risquent de tirer profit de la faiblesse
de l’État pour causer des troubles et contester les résultats
des élections. Les bailleurs de fonds doivent dès à présent
prendre une position plus ferme contre la corruption et
l’impunité. Leur aide financière (plus de la moitié du
budget national actuel) leur donne les moyens d’imposer
une supervision plus stricte de la gestion des fonds,
comme au Libéria. Les bailleurs de fonds doivent
également apporter un appui plus ferme aux institutions
congolaises chargées de la bonne gouvernance qui tentent
actuellement de juguler la corruption, tels que les tribunaux
et les commissions parlementaires.
RECOMMENDATIONS
Au Gouvernement de transition de la République
démocratique du Congo:
1.
2.
3.
Page ii
4.
Discuter ouvertement au parlement du rapport
de la Commission Lutundula sur les marchés,
notamment les contrats miniers conclus pendant la
guerre, et publier la liste de ceux impliqués;
5.
En vue de prévenir la corruption dans le secteur
minier, prendre les mesures suivantes:
(a)
bannir les contrats de complaisance telles
que les concessions ou exonérations fiscales
à l’exportation de minerais accordées à des
sociétés par des représentants de l’État
en échange de commissions ou d’autres
avantages;
(b)
donner à l’Office des douanes et accises
(OFIDA) des moyens lui permettant de tester
les minerais, de former et de rémunérer
suffisamment ses agents;
6.
Promulguer des lois sur le financement des
campagnes et des partis politiques afin de renforcer
les perspectives d'élections libres et justes en
mars 2006, et inclure dans la loi électorale des
dispositions interdisant et punissant sévèrement les
discours d’incitation à la haine, particulièrement
ethnique;
7.
Réaffirmer que la Commission nationale de
désarmement, de démobilisation et de réinsertion
(CONADER) est seule responsable de démobiliser
les groupes armés au Katanga, et empêcher d’autres
acteurs comme le Programme œcuménique de paix,
de transformation des conflits et de réconciliation
(PAREC) d’organiser des programmes parallèles.
Au Conseil de sécurité des Nations Unies, au
Secrétaire général et à la MONUC:
8.
Arrêter les commandants militaires Maï-Maï et
d’autres groupes armés du Katanga suspectés de
violations des droits de l’homme, en réservant
une attention spéciale aux présumés responsables
des événements survenus à Ankoro en 2002, à
Kilwa en octobre 2004, et des troubles en cours
dans la zone Mitwaba-Pweto-Manono-Dubie;
Comme demandé par le Secrétaire général des
Nations Unies, augmenter de 2,590 hommes les
troupes de la MONUC afin de déployer une brigade
complète au nord Katanga et la doter d’une mission
claire autorisant des opérations de ratissage et de
démilitarisation, comme celles qui ont été menées
dans l’Ituri;
9.
Déployer des unités de l’armée nationale intégrée
(FARDC) et de la MONUC dans le nord et le
centre du Katanga afin d’amener les milices à
intégrer l’armée ou à se démobiliser;
Donner des instructions à la MONUC afin qu’elle
s’acquitte de son mandat de surveillance de
l’embargo sur les armes, en particulier dans les
aéroports de Lubumbashi et de Kalemie;
10.
Appuyer la formation d’un groupe de bailleurs
de fonds qui se concentrerait sur la lutte contre
la corruption et les malversations, et qui lierait
l’assistance aux réformes politiques et
administratives, tel que proposé par le Secrétaire
général.
Se conformer à l’Accord global et inclusif pour
l’intégration totale des services de sécurité, de
l’administration et du système judiciaire au Katanga
afin que toutes les composantes du gouvernement
de transition soient représentées dans ces organes;
Katanga: la crise oubliée de la RDC
Crisis Group Rapport Afrique N°103, le 9 janvier 2006
À l’Union Européenne et ses États membres, les
États-Unis et d’autres bailleurs de fonds et
membres du Comité international
d’accompagnement de la transition (CIAT), la
Banque mondiale et le Fonds monétaire
international (FMI):
11.
Lier l’aide des bailleurs de fonds aux réformes
politiques et administratives, et mettre sur pied
un groupe de suivi composé des principaux pays
donateurs ainsi que de la Banque mondiale et du
FMI, lequel garderait un œil sur la corruption
et les malversations, en collaboration avec les
institutions congolaises chargées de la bonne
gouvernance. Au Katanga, ce groupe suivrait en
particulier:
(a)
la corruption à l’OFIDA, dans le secteur des
mines et les parastatales, notamment la
Société nationale des chemins de fer du
Congo (SNCC) et la Gécamines;
(b) la création d’un mécanisme de contrôle
efficace pour le test et l’exportation des
minerais;
(c)
la fin des structures de commandement
parallèles et l’intégration des services
administratifs, judiciaires et militaires;
Page iii
12.
Appuyer la réforme de l’OFIDA et son équipement,
entre autres avec des facilités de laboratoires
permettant de tester les minerais destinés à
l’exportation;
13.
Prendre les mesures appropriées afin de s’assurer
que les entreprises internationales opérant en
RDC respectent les lois nationales et les normes
internationales, et prévoir l’imposition de sanctions
contre les sociétés nationales défaillantes.
Aux sociétés et négociants internationaux du
secteur des mines et à l’Organisation
internationale du travail:
14.
Convenir d’un code de bonne conduite se
préoccupant des conditions de vie et de travail des
employés, et se conformant aux réglementations
congolaises ainsi qu’aux normes internationales;
15.
En collaboration avec les associations locales des
droits de l’homme, mettre sur pied un fonds
fiduciaire pour appuyer la rémunération équitable,
la réinstallation, les droits fonciers, les soins
médicaux et la formation des mineurs artisanaux.
Nairobi/Bruxelles, le 9 janvier 2006
Rapport Afrique N°103
9 janvier 2006
KATANGA: LA CRISE OUBLIÉE DE LA RDC
I.
INTRODUCTION1
La province du Katanga a un passé chargé en troubles
civils. À l’époque coloniale, ses mines de cuivre, de
cobalt et d’uranium constituaient les plus grandes sources
de revenus du pays. Administrée par un Comité spécial
du Katanga jusqu’en 1910, la province ne sera entièrement
intégrée à la colonie belge qu’en 1933. Lors de
l’indépendance en 1960, Patrice Lumumba est élu premier
ministre et entreprend la création d’un gouvernement
central fort, une démarche plutôt mal vue par les leaders
katangais. Quelques semaines après l’indépendance, la
Confédération nationale du Katanga (CONAKAT), le
parti de Moïse Tshombe appuyé par des intérêts belges et
américains, fait sécession engendrant un conflit entre
Lumumba et les puissances occidentales. Ce conflit
provoquera finalement la chute du premier ministre et à
son assassinat. L’armée nationale congolaise, conduite
par Joseph-Désiré Mobutu,2 et la mission de maintien de
la paix des Nations unies seront dans l’incapacités de
mater l’insurrection jusqu’en janvier 1963. Bien plus tard
en 1977 et 1978, l’ancienne police (les “Gendarmes
katangais”) de l’État de Tshombe, sous le commandement
de Jean Nguz Karl-I-Bond et du général Mbumb
Nathanael, attaqueront de nombreuses villes du sud
Katanga à partir de bases angolaises. Ce n’est que grâce à
l’aide de troupes étrangères que Mobutu viendra à bout
des deux rébellions.
L’élan séparatiste s’estompe au début des années 1990,
lorsque Mobutu attise les tensions entre les immigrés
Luba et les natifs du Katanga afin d’affaiblir son opposant
le plus farouche, Etienne Tshisekedi, un Luba du Kasaï
oriental. Mais déjà à cette époque, la parastatale
1
Pour les rapports les plus récents sur la RDC, voir Crisis
Group Briefing Afrique n° 34, A Congo Action Plan, 19
octobre 2005; Crisis Group Briefing Afrique n° 25, The
Congo: Solving the FDLR Problem Once and for All, 12 mai
2005; et Crisis Group Briefing Afrique n° 91, The Congo’s
Transition is Failing: Crisis in the Kivus, 30 mars 2005.
2
Mobutu est chef d'état-major jusqu'en 1965, lorsqu’il se
proclame premier ministre à la faveur d’un coup d’État. En
1972, il change son nom en Mobutu Sese Seko Kuku
Ngbendu Wa Za Banga.
Gécamines (Générale des carrières et des mines), qui loge
et couvre les besoins sociaux de 33,000 travailleurs,
s’effondre suite à une mauvaise gestion. Le chômage et la
misère qui s’ensuivent constituent un terrain fertile pour
le recrutement de jeunes sans autres perspectives
économiques. Les alliés de Mobutu dans la province
blâment la population urbaine des Luba d’avoir volé leurs
emplois. C’est ainsi qu’en 1992-1993, des purges ethniques
ont mené au massacre de 5,000 personnes et au
déplacement forcé de quelques 1,350,000 individus.
En 1997, la prise du pouvoir par Laurent-Desiré Kabila,
un Luba du Nord Katanga et père du président actuel,
occasionne de nouvelles tensions dans la politique agitée
de la province. Les hommes politiques du nord de la
province descendent dans la capitale provinciale et
prennent les commandes des forces de sécurité et de
l’administration, suscitant une rancoeur parmi les sudistes
se sentant écartés du pouvoir et des richesses de leur
région. Au lieu de promouvoir la réconciliation, l’État
sévit avec des mesures de sécurité draconiennes. À deux
reprises en 2005, les hommes autour du président Joseph
Kabila ont évoqué la menace de sécession en vue
d’arrêter et d’intimider des hommes politiques du sud. Si
la guerre civile qui a ravagé la pays a pu mettre en
veilleuse les tensions intercommunautaires katangaises, les
élections présidentielles, législatives et provinciales
prévues en Avril ou Mai 2006 les ont ravivées. L’Union
des nationalistes et des fédéralistes du Congo (UNAFEC)
a recruté de bandes de jeunes chargés d’intimider les
opposants, lors de démonstrations de force qui ne sont
pas sans évoquer les violences ethniques antérieures. Le
président Kabila, qui utiliser l’UNAFEC pour mener sa
campagne électorale au Katanga, endossant implicitement
les actes d’intimidation et le discours incendiaire de ce
parti.
La guerre de 1998 a également militarisé le nord de la
province. Laurent Kabila créa à l’époque des milices
locales de Maï-Maï pour endiguer l’avancée des forces
soutenues par le Rwanda. Tandis que la menace ennemie
s’est estompée, les milices se sont enracinées, constituant
aujourd’hui l’un des plus graves du pays.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
II.
LA SÉCURITÉ
A.
LES MAÏ-MAÏ DU NORD KATANGA
Les Maï-Maï constituent la plus grande menace contre la
sécurité du Katanga, et ils sont la principale cause du
déplacement de 310,000 habitants dans la province. Il
existe pas moins de dix-neuf chefs de guerre dans les
territoires du nord et du centre, lesquels commandent des
bandes (estimées par l’ONU compter entre 5,000 et
8,000 hommes) qui maltraitent la population locale3.
Cette violence est étroitement liée à des membres du
gouvernement de transition. Des responsables comme le
général John Numbi, commandant de l’armée de l’air, et
Aimé Ngoy Mukena, l’ancien gouverneur du Katanga
ayant contribué à la création et l’approvisionnement de
ces milices, semblent aujourd’hui incapables ou peu
désireux de démanteler ces dernières. De leur côté, les
commandants Maï-Maï sont peu désireux d’intégrer
l’armée nationale abandonnant ainsi le contrôle des
ressources locales.
Ces Maï-Maï sont un phénomène relativement récent
dans le Katanga.4 Tandis que, comme ailleurs dans l’est
de la RDC, ils constituent une force de défense locale
recrutée et organisée selon l’appartenance tribale, leur
émergence au Katanga n’a pas été aussi spontanée que
dans les Kivus. Pour Laurent Kabila, le Nord Katanga
était stratégiquement significatif à l’ouverture des
hostilités en 1998, car il voulait empêcher l’armée
rwandaise d’atteindre la base militaire congolaise de
Kamina ainsi que, la capitale provinciale, Lubumbashi, ce
qui aurait isolé le président de sa région natale et
d’importantes ressources minières. En réaction, il a mis
sur pied des groupes armés, notamment les Forces
d’autodéfense populaire (FAP), les Cœurs d’acier (Moyo
wa Chuma) et les Maï-Maï. Des membres de haut rang
de son gouvernement, notamment Mwenze Kongolo,
Ngoy Mukena, John Numbi et Kyungu wa Kumwanza,
y ont pris part en 1999.5 Les FAP, les plus notoires,
Page 2
étaient souvent dirigées par des commandants proches
de Laurent-Désiré Kabila. Kinshasa a distribué des armes
légères et des munitions dans le Nord Katanga, sans
former, ni intégrer les nouvelles milices dans l’armée
nationale de l’époque, les Forces armées congolaises
(FAC).
Suite à la mort de son père début 2001, Joseph Kabila
décide de dissoudre les FAP et ordonne leur intégration
dans la police. Néanmoins, ses ordres sont largement
ignorés, en particulier dans les campagnes. En effet, des
autorités comme le gouverneur Aimé Ngoy Mukena et le
commandant régional, le général John Numbi, arment
d’autres groupes, en particulier au nord, dans la territorire
Malemba Nkulu.
Après que le Dialogue inter-Congolais ait commencé en
2001, la communauté internationale traite les groupes MaïMaï des régions du Kivu comme des acteurs indépendants
dans la transition. Les accords de paix signés en 2002 à
Sun City et à Prétoria leur octroient des postes au
parlement, dans l’administration provinciale et l’armée.6
Les Maï-Maï du Katanga, cependant, ne bénéficient pas
du même traitement. Les politiciens du nord recourent à
7
des relations familiales et des envois d’armes pour
maintenir le contrôle sur les différents chefs militaires,
entretenant ainsi une milice privée, laquelle pourrait
s’avérer utile en cas d’échec de la transition. L’absence
d’une chaine de commandement pour les Maï-Maï du
Katanga et leur manque de représentation politique dans
les institutions de transition compliquent les négociations.
1.
La perte de contrôle
À la fin de l’année 2002, les Maï-Maï sont déjà devenus
une menace réelle pour la population locale et un casse-tête
pour les responsables locaux qui les ont armés et semblent
maintenant incapables de les contrôler. Les quelques dixneuf différents groupes, variant d’une centaine de
combattants à plusieurs milliers, se battent tant entre eux
que contre l’armée nationale pour les concessions minières,
le contrôle des taxes et les opportunités de braconnage dans
le parc national d'Upemba.
3
Entretien de Crisis Group avec un officiel de la MONUC,
novembre 2005.
4
Le phénomène Maï-Maï remonte au moins à l’époque où
Pierre Mulele et Gaston Soumialot, avec l’appui du jeune
Laurent Kabila, ont pris la tête des premières rébellions MaïMaï contre le gouvernement, après l’assassinat de Patrice
Lumumba en 1961.
5
Communication de Crisis Group avec un responsable de la
MONUC, juin 2005. Mwenze Kongolo était ministre de la
Justice sous Laurent Kabila; Ngoy Mukena est un ancien
gouverneur du Katanga; John Numbi commandait la milice
JUFERI avant qu’il ne devienne commandant militaire de la
province, puis commandant de l’armée de l’air; Kyungu wa
Kumwanza était gouverneur du Katanga sous Mobutu, et il
est actuellement parlementaire.
6
Les postes qui sont réservés aux Maï-Maï sont notamment
treize sièges au parlement, le ministère de l’environnement , la
direction de la province du Katanga, et le commandement de
la neuvième région militaire à Kisangani. Le gouvernement de
Joseph Kabila a coopté la plupart de ces officiels.
7
Ngoy Mukena est l’oncle du commandant Maï-Maï Makabe;
John Numbi est le cousin de ce dernier, et le commandant
Chinja Chinja est son beau-frère.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
En novembre 2002, les Maï-Maï, sous le commandement
de Mukalay Jean “Deux-Mètres”, se brouillent avec des
troupes de l’armée nationale à Ankoro, la ville natale de
Laurent Kabila.8 Les deux camps se déchaînent s’attaquant
à la population locale. Selon des organisations des
droits de l’homme, plus de 100 civils sont tués, et 75,000
déplacés.9 Bien que ne constituant qu’un seul incident
parmi tant d’autres dans la province, cet la violence de
l’accrochage force les autorités nationales à prêter plus
d’attention à la région.
Les autorités provinciales et nationales envoient de
nombreuses délégations pour négocier avec les Maï-Maï
en 2002 et 2003, mais il s’avère difficile de désarmer ces
derniers. Les commandants sont réticents à l’intégration
dans l’armée nationale, laquelle pourrait les deployer en
dehors de leur région natale. En outre, avec un niveau de
formation et d’entraînement souvent faible, ils risquent
d’être marginalisés.
Le 15 septembre 2004, le nouveau gouverneur, Kisula
Ngoy, organise à Kamina une table ronde avec les MaïMaï et les chefs traditionnels du nord. Cependant,
craignant d’être arrêtés, les leaders Maï-Maï les plus
importants refusent d’y participer10, envoyant seulement
des représentants, voire une simple lettre. Comme on
devait s’y attendre, les résolutions de la table ronde sont
restées lettre morte. Par la suite, les relations avec le
gouverneur se sont rapidement détériorées, lorsqu’il
a rejeté les exigences quant aux grades dans l’armée, des
postes dans la fonction publique et des subventions
d’enseignement en faveur des combattants démobilisés.
Par ailleurs, les autorités n’ont pas exercé tellement de
pression militaire. Il est de notoriété publique que le
général Numbi, le commandant de l’armée de l’air, a
supervisé de grosses livraisons d’armes à l’aéroport de
Lubumbashi jusqu’en mai 2004, 11 et il aurait bien pu en
donner une partie aux Maï-Maï.12 Ceux-ci, ne voyant
aucun avantage à la démobilisation, et en l’absence d’une
Page 3
force les contraignant à le faire, ont continué à maltraiter
la population.
2.
Saisissant l’occasion, le pasteur Ngoy Mulunda, qui, à
une certaine époque, était proche de Laurent Kabila,
indiqua qu’il désarmerait et démobiliserait les groupes
en leur offrant des vélos en échange de leurs fusils.
Cependant, son organisation, le Programme oecuménique
de paix, transformation des conflits et réconciliation
(PAREC),13 a plutôt exacerbé les tensions entre les
milices. En février 2005, Mulunda avait déjà distribué 1,
300 vélos dans le district du Haut-Lomami, et il affirmait
avoir reçu 2,000 armes;14 mais très peu de ces dernières
ont été vues ou remises aux autorités.
Mulunda a commencé les négociations avec les
commandants Maï-Maï Chinja Chinja et Bakanda
Bakoka et, apparemment autorisé à parler au nom du
gouvernement, leur a promis des grades au sein de l’armée.
Le 8 février 2005, il a organisé une cérémonie publique à
Lubumbashi avec les deux commandants. À cette
occasion, il a affirmé avoir récupéré 540 mitrailleuses, 156
grenades et 20 flèches empoisonnées, contre 800 vélos.
Tandis qu’il a récolté des succès dans les villes d’Ankoro
et Bukama,15 Mulunda a été chassé de Kongolo et
dénoncé par les Maï-Maï de Luena et Kamina, qui se
sont plaints de ne pas avoir reçu leurs vélos. Les 14 et 15
mars, des Maï-Maï mécontents qui n’avaient pas reçu de
vélos mirent à sac le village de Katala du centre de la
province, tuant près de 30 personnes et en déplaçant
2,000 autres.16
Le 8 avril 2005, après une forte pression internationale, en
particulier de la MONUC, Chinja Chinja a été arrêté
à Kinshasa pour violation des droits de l’homme. Par la
suite, l’activité des milices a largement cessé dans son
territoire natal de Kitenge. Néanmoins, son arrestation a
13
8
Selon des sources locales, l’armée avait commencé à
arrêter les Hutus rwandais, ce qui a suscité des tensions avec
les Maï-Maï, leurs alliés d’hier. Le vase déborde lorsqu’un
soldat abat un Maï-Maï.
9
Mark Dummett, “Congo government troops kill 100
civilians”, Reuters, 21 novembre 2002. Une enquête de la
MONUC des mois plus tard confirme au moins 70 victimes et
précise qu’il pourrait y en avoir eu beaucoup plus.
10
Entretien de Crisis Group avec un officiel de la MONUC,
juin 2005.
11
Rapport du groupe d’experts de l’ONU sur l’embargo
contre les armes, document S/2004/551, 15 juillet 2004, p. 20.
12
Entretien téléphonique de Crisis Group avec des groupes
des droits de l’homme, septembre 2005. Il a été signalé que
les armées et les munitions ont disparu du camp de police
Mutombo, à Lubumbashi.
Des vélos pour acheter la paix
Le pasteur Mulunda dit qu’il est le conseiller spirituel du
président Kabila. Auparavant, il occupait une position élevée
dans l’Église méthodiste en Tanzanie et au Kenya et était
proche de Laurent Kabila pendant de nombreuses années. Il a
par le passé utilisé son influence pour réconcilier Joseph Kabila
avec d’anciens opposants comme Moïse Katumbi, et, plus
récemment, il a aidé à résoudre un conflit entre deux sociétés
minières, la CHEMAF et Anvil Mining, à Lubumbashi. L’ONG
est affiliée à la Nouvelle Église apostolique qu’il a fondée, et
ses actions seraient étroitement liées avec des efforts de
conversion au nom de l’église.
14
Associated Press, 18 février 2005 et 5 mai 2005.
15
Entretien de Crisis Group avec une ONG internationale,
Lubumbashi, juin 2005.
16
David Lewis, “Women attacked and mutilated in Congo
attack”, Reuters, le 7 avril 2005; entretiens de Crisis Group
avec des officiels humanitaires à Lubumbashi, juin 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
également compliqué la démobilisation, les autres chefs
des milices refusant de discuter avec les autorités sous
prétexte que les négociations renfermaient un piège. Tandis
que le nouveau commandant régional, le général Widi
Divioka, a commencé les pourparlers avec le général
Maï-Maï Gédéon Kyungu en octobre 2005, la plupart
des autres commandants évoluent encore en tant que
chefs de guerre autonomes.
Entre-temps, les actions de Mulunda ont compliqué les
affaires pour la Commission nationale de démobilisation
et de réinsertion (CONADER), laquelle est responsable
de la démobilisation de tous les groupes armés congolais.17
La commission a trouvé sur le terrain un autre programme
parallèle lorsqu’elle a débuté son activité au Katanga en
début 2005. Malgré l’ouverture d’un site de démobilisation
à Kamina le 15 août, aucun Maï-Maï n’avait été démobilisé
à la fin de l’année 2005. Un groupe de 300 combattants
patiente au centre de Kamina depuis trois mois, recevant
peu de nourriture et de soins de santé. On indique qu’un
autre groupe de 400 attend d’entrer dans le processus à
Manono.18 La CONADER était supposée ouvrir des sites
à Kalemie en juillet 2005 et à Lubumbashi en 2006, mais
des problèmes de logistique ont entraîné des retards.19
17
Les FARDC, l’armée nationale congolaise, sont
responsables du désarmement de tels groupes.
18
Entretien de Crisis Group avec la CONADER et des
officiels de l’État, novembre 2005.
19
Un centre d’orientation mobile a été ouvert à Kalemie en
août 2005. On donne aux anciens combattants le choix de
retourner dans la vie civile ou de continuer dans la nouvelle armée
intégrée. À la sortie du camp, les combattants démobilisés
reçoivent 110 USD en liquides (50 USD pour le transport, 10
USD pour les rations, et 50 USD comme subvention). La
CONADER fait également le suivi des combattants démobilisés,
lesquels reçoivent une indemnité mensuelle de 25 USD
pendant une année, ainsi qu’une formation professionnelle. Le
centre est financé par le Programme multi-pays de démobilisation
et de réinsertion (PMDR), une action menée conjointement par
diverses agences, sous les auspices de la Banque mondiale, et
qui appuie la démobilisation et la réinsertion des anciens
combattants dans sept pays de la région des Grands-Lacs. En
RDC, le programme a bénéficié de 200 millions USD et existe
depuis novembre 2004; mais sa mise en œuvre a été plutôt
lente. Le transport est souvent difficile à trouver, irrégulier ou
carrément introuvable; en outre, il coûte substantiellement plus
que les 50 USD versés. Ainsi, les anciens combattants passent
souvent des jours, voire des semaines, sans abri ni nourriture
(à moins que des ONG n’interviennent), dans des centres
d’orientation supposés les accueillir pour une seule journée.
Au Katanga, seul un des trois centres fixes est opérationnel; et
seules deux agences ont été approuvées pour assurer la
formation professionnelle des anciens combattants. La
CONADER a également rencontré des difficultés dans le
paiement de l’indemnité mensuelle; une fois qu’ils retournent
à la campagne, les anciens combattants sont difficiles à
localiser, et les infrastructures de paiement souvent n’existent
pas. Des 1,200 combattants démobilisés jusqu’en 2005, seuls 827
Page 4
Alors que les problèmes de transport et de logistique
handicapent la démobilisation dans le pays, les obstacles
politiques sont également considérables. Les Maï-Maï du
Katanga se plaignent que même si Laurent Kabila et ses
associés leur ont réservé un traitement préférentiel pendant
la guerre, il leur a été refusé des postes au sein de l'armée.
Le gouverneur Ngoy, supposé avoir été nommé par les
Maï-Maï, doit réellement sa position aux pressions du
Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie
(PPRD) de Joseph Kabila. À la mi-novembre 2004, la
sixième région militaire a offert aux groupes Maï-Maï
l’occasion d’envoyer des combattants à la base militaire
de Kitona afin de se joindre à la deuxième brigade
intégrée de la nouvelle armée congolaise (FARDC).
Les commandants ont accepté d’en envoyer 115, tout en
refusant eux-mêmes de quitter la brousse, et depuis peu de
choses ont changé sur le terrain.
3.
La chasse de Gédéon
Pendant la période pré-électorale, l’armée a commencé des
opérations à l’est de la RDC contre les milices qui
échappent toujours au contrôle du gouvernement. Après
s’être attaquée contre le Mouvement révolutionnaire
congolais (MRC) dans l’Ituri et les Maï-Maï dans les
Kivus, elle s’en prit aux Maï-Maï du nord Katanga en
novembre 2005. La première cible fut le commandant
Gédéon, basé aux alentours de la ville de Dubié. À ce
stade, les Maï-Maï n’étaient plus utiles à leurs anciens
patrons, tandis que leurs abus rendaient certains leaders
des Luba du Katanga (“Lubakat”) de Kinshasa, dont
Joseph Kabila, impopulaires auprès de la population
locale..
Des sources locales ont critiqué l’armée pour s’être
déployée à Dubié alors que Gédéon est signalé 75 km de
là, dans la localité de Kato. Le comportement des troupes
a été également mis en cause. Un montant de 245,000
USD promis par l’état-major pour les soldes ne s’étant
pas encore matérialisé début décembre, les soldats
commencaient à harceler les habitants. Les opérations ont
causé le déplacement de 49,000 personnes, s’ajoutant aux
70, 000 déplacés internes se trouvant dans cette zone,
mais un commandant local affichait une indifférence
totale envers le problème estimant que ‘l’on ne pouvait
faire d’omelette sans casser des œufs’.20 Quant à la
MONUC, occupée à préparer le référendum
ont reçu l’indemnité mensuelle. Entretiens de Crisis Group avec
des officiels de la CONADER en RDC, novembre 2005.
20
Entretien de Crisis Group avec un commandant local des
FARDC, novembre 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
constitutionnel,21 elle manquait tant de moyens logistiques
que de troupes pour intervenir.
B.
LA POLITIQUE IDENTITAIRE
Dans la politique katangaise, l’identité est le moyen
essentiel utilisé pour s’assurer du soutien des électeurs, et
l’ethnicité sera une corde sensible pendant la campagne
électorale. Il existe deux sources de divisions.
1.
Le conflit entre les “originaires” et les “nonoriginaires”
L’immigration majeure au Katanga a commencé avec
l’établissement de l’industrie minière en 1906. La Belgique
a importé de la main-d’oeuvre d’autres régions, en partie
suite au manque de travailleurs locaux qualifiés, mais
également dans l’espoir que les immigrés constitueraient
une force plus docile. Des immigrants sont venus d’aussi
loin que le Rwanda jusqu’à Kolwezi, Kambove, Likasi,
Lubumbashi, Kipushi et Shinkolobwe.22 Cependant, la
majorité provenait du groupe ethnique Luba du Kasaï, en
particulier du sud-est pauvre et négligé de cette province.
À l’indépendance, les Luba avaient en main une bonne
partie de l’administration et des affaires de la province
Katangaise, suscitant le mécontentement et l’antagonisme
des autres communautés.23 Moïse Tshombe et son
mouvement, la Confédération nationale du Katanga
(CONAKAT), usèrent de ce mécontentement pour exiger
plus de pouvoir pour les locaux dans l’administration. En
outre, les tensions entre Tshombe et les Luba s’aggravèrent
lors de l’indépendance, lorsque la communauté kasaïenne
choisi le camp de Patrice Lumumba contre le sud
sécessionniste. Le ministre de l’intérieur du Katanga,
Godefroid Munongo, orchestra les premières opérations
de purification ethnique contre les Luba, et l’ONU évacua
de la province la majeure partie de la communauté.24
21
Les 18 et 19 décembre 2005, les électeurs congolais ont
approuvé à plus de 80 pour cent une nouvelle constitution. La
MONUC y a affecté une bonne partie de ses ressources, en
particulier des troupes et des moyens de transport aérien, pour
aider avec l’inscription des électeurs sur les listes électorales et
le référendum lui-même.
22
Kabuya Lumuna Sando, Nord-Katanga 1960-1964, de la
sécession à la guerre civile, le meurtre des chefs (Paris, 1992),
p. 12.
23
Les Luba constituent aujourd’hui 20 pour cent de la
population totale du Katanga, et 40 pour cent de celle de
Lubumbashi.
24
Georges Nzongola-Ntalaja, “States, Borders and Nations”.
Document présenté à la conférence annuelle, Centre of
African Studies, University of Edinburgh, 19-20 mai 2004.
Les forces onusiennes faisaient partie de l’Opération des
Nations unies au Congo (ONUC).
Page 5
La manipulation de l’ethnicité se poursuivit même après
que Mobutu eut écrasé la sécession. Face à la faiblesse
de l’État et du soutien populaire, l’identité devint l’un
des cris de ralliement de son régime, lequel utilisa dans
les années 1980 les clivages ethniques pour diviser
l’opposition et augmenta le nombre de Kasaïens dans
l’administration publique du Katanga, ainsi que dans
l’armée et la police. L’essentiel de l’appareil répressif de
l’État et les mines étant sous le contrôle de ces “étrangers”,
les natifs du Katanga formèrent la Fondation katangaise,
tandis que les communautés en provenance des autres
provinces mirent sur pied leur propre Association culturelle
de “non-originaires” afin de défendre leurs intérêts.
Les divisions ethniques et régionales constituèrent la toile
de fond de la violence des années 1990. L’autorité de
Mobutu commençant à s’effriter et ses ressources
financières à se tarir avec la perte des alliances de la
guerre froide, il se vit obligé de faire des concessions
envers le mouvement démocratique. L’opposition politique
et les leaders de la société civile participèrent à la
Conférence nationale souveraine (CNS) en 1991-1992,
laquelle devait guider la transition. Le principal adversaire
de Mobutu était Etienne Tshisekedi, le leader kasaïen de
l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).
Afin de diviser l’opposition, Mobutu attira le Katangais
Jean Nguz Karl-I-Bond hors de la coalition de Tshisekedi,
le nomma premier ministre en 1991 et désigna son associé,
Gabriel Kyungu wa Kumwanza, gouverneur du Katanga.
Ensemble, le premier ministre et le gouverneur entreprirent
alors de recruter les jeunes Katangais sans emploi dans
leur nouveau parti politique, l’Union des fédéralistes et
des républicains indépendants (UFERI), et sa milice de
jeunes, la JUFERI.
À la fin des années 1980, l’économie du Katanga tomba
en dépression après l’effondrement de la Gécamines, qui
créa des milliers de chômeurs. Une telle situation constitua
un terrain fertile pour le recrutement de la JUFERI.
Lorsque la CNS élit Tshisekedi premier ministre en 1992,
l’UFERI adopta une politique explicite de purification
ethnique contre les Luba dans les principales villes
minières du Katanga, Kolwezi en particulier. Le
gouverneur Kyungu prit la tête de la campagne, accusant
les Luba d’être la cause des problèmes économiques de la
province, et les soupconnant de vouloir usurper le pouvoir
au Katanga après avoir fait la même chose à Kinshasa.
Selon l’ONU, les milices de la JUFERI tuèrent plus de
5,000 personnes et en déplacèrent 1,350,000 de plus en
1992 et 1993.25 Les forces de sécurité provinciales
détinrent 75,000 personnes dans des conditions
25
Rapport sur la situation des droits de l’homme au Zaïre
présenté par Roberto Garreton, rapporteur spécial de l’ONU,
décembre 1994, document ONU n° E/CN.4/1995/67,
principalement les sections 107 et 108.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
inhumaines jusqu’à ce que des organisations humanitaires
les évacuèrent vers le Kasaï, où la plupart d’entre elles
n'avaient jamais mis les pieds.
Ces dernières années, les tensions se sont estompées et de
nombreux Kasaïens sont revenus à Lubumbashi et à
Likasi, mais pas à Kolwezi où la plupart des tueries eurent
lieu. Néanmoins, l’on ne manque pas de noter qu’il y a
très peu de débat public au sujet de la violence. De
nombreux Katangais “natifs” croient que même si les
attaques contre les Kasaïens furent terribles, elles leur
permirent de reprendre contrôle de l’économie provinciale.
Les Kasaïens, en particulier ceux qui ont connu la
purification ethnique, abordent la campagne électorale
avec prudence, mais la nouvelle génération prend mal
l’exclusion politique de sa communauté dans la province,
et beaucoup de jeunes kasaïens ont adhéré à l’UDPS. Les
tensions entre les Katangais de souche et les Kasaïens se
sont maintenant cristallisées au sein d’une rivalité de plus
en plus violente entre les partis de l’UDPS et de
l’UNAFEC.
2.
Les divisions entre le nord et le sud
Dans l’imaginaire politique katangais, la province est
divisée en deux: le Nord (les districts du Tanganyika et
du Haut-Lomami) et le Sud (districts de Kolwezi, du
Haut-Katanga et de Lualaba).26 Il existe des différences
ethniques entre les deux régions: le Nord est à
prédominance Lubakat et Hemba, tandis que le Sud
est peuplé essentiellement des tribus Lunda, Bemba
et Songwe. Les régions sont également distinctes
économiquement. L’économie du nord est presque
entièrement agricole; et cette région est parfois appelée
par dérision “le Katanga inutile” par les sudistes. Par
contre, les mines de cuivre et de cobalt donnent au sud
plus de sources de revenus.27 Les sudistes acceptent mal
la prédominance des nordistes aussi bien dans l’arène
provinciale que nationale, et ils sont persuadés que leurs
richesses minières leur donnent droit à une plus grande
représentativité à Lubumbashi et à Kinshasa.
Ces différences politiques font leur apparaissent en 1960,
lorsque les membres nordistes de l’assemblée provinciale
choisissent le camp du premier chef de gouvernement du
Congo, le nationaliste Patrice Lumumba, contre les
sécessionnistes sudistes. Après que Tshombe ait lancé son
mouvement d’indépendance, les hommes politiques
nordistes créent une milice, la “Jeunesse des Baluba
du Katanga” (JEBAKAT).28 Lorsque le Katanga fait
26
Kabuya Lumuna, op.cit., p. 23.
Les exceptions notables sont une cimenterie à Kabimba et
des mines de cassitérite autour de la ville de Manono.
28
Eric Kennes et Munkana N’ge, Essai bibliographique sur
Laurent-Désiré Kabila (Paris, 2003), p. 54.
27
Page 6
sécession, le nord constitue une République populaire de
Lualaba, indépendante, à laquelle les troupes de Tshombe
mettent fin en mars 1961, en s’emparant de Manono, sa
capitale.29
Tandis que les tensions nord-sud s’estompent sous
Mobutu, elles refont surface avec Laurent Kabila. Le père
de celui-ci vient du nord, et sa mère du sud; mais luimême et son fils Joseph favorisent les nordistes dans leurs
gouvernements respectifs. En effet, des six gouverneurs
passés du Katanga, un seul, Katumba Mwanke, est
sudiste, tandis que les cinq autres sont des Lubakat.30
Et seuls sept sur 45 directeurs des appareils de
l’administration, de la justice et de la sécurité du
gouvernement provincial viennent du sud.
Lorsque Laurent Kabila prend le pouvoir en 1997, une
large partie de ses troupes sont des Katangais du sud, ceux
qu’on appelle les “Tigres katangais”, des descendants des
forces de Tshombe ayant fui la province après l’échec de
la sécession.31 Environ 2,000 d’entre eux prennent part à
l’insurrection contre Mobutu. Cependant, dès le départ,
des conflits surgissent entre eux et Laurent Kabila. En
1997, pendant que ses rebelles approchent de Kinshasa,
Kabila arrête Jean Delphin Muland, un commandant
katangais de haut niveau, ainsi que vingt autres officiers à
Lubumbashi, pour ‘indiscipline’. Craignant de perdre
le pouvoir au profit de ce groupe, le Président écarte les
Tigres lorsqu’il forme son gouvernement. Certains de ces
commandants prennent mal le fait qu’après s'être battus
pour le régime de Kinshasa pendant sept ans, ils ont
maintenant moins de pouvoir que les politiciens.
Tandis que ces troupes constituent une grande partie de la
garde présidentielle, Joseph Kabila redoute un coup d’État
et marginalise davantage les officiers du sud du Katanga.
Par exemple, les Katangais du sud sont en partie tenus
pour responsables de l’assassinat de Laurent Kabila en
2001: Eddy Kapend, un ancien Tigre katangais, est
toujours en prison, accusé d’être le cerveau du complot.
Célestin Kifwa, le Sud Katangais et chef de la garde
présidentielle, est suspendu en 2004 après une tentative de
29
Ibid, p. 79.
Kyungu wa Kumwanza, Gaëtan Kakudji, Thadée Ngoie
Mulume, Aimé Ngoie Mukena et Kisula Ngoie.
31
De nombreuses générations de sudistes servent dans l’armée
angolaise après que les Gendarmes katangais de Tshombe
aient pris le chemin de l’exil en 1964 et en 1965, et elles
seront rejointes par des jeunes mécontents de Mobutu. Elles
sont utilisées par les Portugais pour combattre l’indépendance
de l’Angola, mais elles choisissent bientôt le camp du MPLA
contre l’UNITA et le FNLA appuyés par Mobutu. Elles sont
formées par l’armée angolaise et reçoivent plus tard un appui
rudimentaire leur permettant de lancer leurs attaques au Zaïre
en 1977 et 1978.
30
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
coup d’État avortée à Kinshasa.32 L’incident de Kilwa en
octobre 2004 et une tentative de sécession alléguée au
Katanga en avril 2005, tous deux décrits plus bas,
fournissent autant de prétextes pour l’arrestation d’autres
Sudistes.
La plupart des Sudistes jugent que les prochaines
élections sont une occasion unique d’avoir une plus
grande représentativité politique. Pendant un programme
télévisé de la RTNC/Katanga en mai 2004, un groupe
d’hommes politiques du Sud a dénoncé la nomination
du gouverneur Ngoy car il est Lubakat.33 Lorsque Joseph
Kabila visite Lubumbashi à la suite du complot de
sécession allégué d’avril 2005, des hommes politiques du
Sud lui soumettent des griefs similaires.
Tandis que ces tensions ne sont que peu répandues
parmi la population en général, elles font néanmoins
partie de la rhétorique des politiciens katangais, qui
l’utilise pour semer la peur et se rallier des soutiens.
Les autorités à Kinshasa et à Lubumbashi
instrumentalisent aussi en partie la question NordSud à l’orée des élections.34
3.
Les troubles urbains et la lutte électorale
Les divers conflits prévalant dans la province annoncent
une saison électorale tendue. Tandis que tous les grands
partis congolais sont représentés au Katanga, seuls
quelques-uns jouissent d’un soutien significatif. Les
protagonistes dans les élections présidentielles seront
l’UNAFEC, qui appuiera probablement Kabila, ainsi que
l’UDPS et le PPRD. Les deux autres anciens belligérants,
le Mouvement pour la libération du Congo (MLC) et le
Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), sont
35
relativement faibles au Katanga. Des partis provinciaux
32
La plupart des observateurs ont conclu que la tentative, menée
par le major Eric Lenge, un commandant de la garde
présidentielle, et de nombreuses douzaines de soldats, était juste
un montage ou visait seulement à faire peur au président. On a
plus tard donné à Kifwa un poste différent.
33
Le programme a été télévisé le 24 mai 2004. “Sécession du
Katanga, premier mai 2005”, Action Contre l’Impunité pour les
Droits Humains, p. 7.
34
Entretiens de Crisis Group avec des diplomates et des
autorités congolaises, Kinshasa, juin et juillet 2005.
35
Le MLC est le parti d’anciens hommes politiques de l’UFERI
qui se sont rangés du côté de l’ancien premier ministre Nguz
Karl I Bond contre Kyungu, lorsque le parti s’est scindé en
deux en 1996. En conséquence, et même si le MLC cherche à
attirer les électeurs Luba modérés de Kamina, il compte
essentiellement sur les supporters de Lualaba, le district natal
de son leader actuel, Jacques Mudib Nguz. Le responsable du
RCD au Katanga est Banza Mukalay. Ce parti est considéré
comme étant pour les Banyamulenge du haut plateau du nord.
Sa réputation a été ternie par des crimes commis pendant la
Page 7
plus petits tels que la Confédération nationale congolaise
(CONACO)36 et l’Union nationale des démocrates
fédéralistes (UNADEF) pourraient recueillir des voix
lors des élections législatives et locales, mais ils risquent
d’être submergés par les ressources des grands partis.
Toutefois, il reste possible que de petits partis du sud
forment une coalition contre Kabila, avec l’appui de
groupes de la société civile tels que Solidarité katangaise.
La seule divergence de taille entre les trois principaux
partis au Katanga porte sur la Constitution: l’UDPS et
l’UNAFEC sont pour un système politique fédéraliste,
tandis que le PPRD appuie le modèle d’un État unitaire
contenu dans la Constitution qui a été approuvée en
37
décembre 2005 par référendum. Comme ailleurs dans le
pays, la campagne sera basée sur l’ethnicité et la remise
en question de la moralité des adversaires. Il est probable
que ce type de discours, spécialement entre des partis
ayant une forte assise ethnique comme l’UNAFEC et
l’UDPS, donne lieu à des épisodes violents.
L’on se rappellera que l’UNAFEC fut créée en 2001,
pendant les négociations de Sun City; elle est dirigée
dans la province par Gabriel Kyungu wa Kumwanza, un
populiste, et au niveau national par Honorius Kisimba
Ngoy, le ministre de la Justice plus modéré. Certains
membres de premier plan de l’UNAFEC étaient également
membres de l’UFERI pendant les purges ethniques du
début des années 1990. Le parti jouit d’un soutien
majoritaire parmi les groupes ethniques Balubakat et
Bahemba, lesquels constituent 30 pour cent de la
population katangaise. Sa formation pour la jeunesse, la
JUNAFEC, utilisée pour rallier des soutiens, assurer la
sécurité pendant les démonstrations et intimider les
adversaires, est constituée de neuf groupes, qui, selon leurs
chefs, totalisent environ 4,500 membres dans la province.38
N’ayant pas été reconduit dans ces fonctions de gouverneur
en Mai 2004, Kyungu annonça qu’il se présenterait aux
guerre et sa tendance pro-rwandaise. À Lubumbashi, ses militants
sont essentiellement des activistes qui n’ont aucune autre option,
ou des opportunistes qui ont adhéré au parti en 2003 en vue de
s’assurer d’une position dans le parlement de transition.
36
La CONACO est dirigée par André Tshombe, et elle est
similaire aussi bien dans ses politiques que dans son discours au
parti de son père, Moïse Tshombe. L’UNADEF est dirigé par
Christian Mwando et a une certaine assise électorale dans le sud
de la province.
37
Ce fait a été constaté en décembre 2004, lorsqu’une délégation
de sénateurs est venue à Lubumbashi mener des consultations sur
l’élaboration d’un projet de nouvelle constitution.
38
Ces groupes sont notamment la Brigade des Martyrs, les
Zoulous, les GSS, les Enfants perdus, la Brigade Rouge, les
Invisibles, les Amazones et les Scorpions. Entretien de Crisis
Group avec Jean Umba, président de la JUNAFEC, Lubumbashi,
juin 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
présidentielles contre Joseph Kabila. Pendant de nombreux
mois, les militants de l’UNAFEC accusèrent régulièrement
Kabila et les membres du PPRD à Kinshasa d’avoir trahi
les intérêts katangais. Cependant, en septembre 2004,
Kyungu annonça qu’il dirigerait la campagne de Kabila au
Katanga.39 Le parti fera toutefois campagne séparément et
contre le PPRD dans les élections législatives et locales.
Cette approche disjointe irrite considérablement de
nombreux membres du PPRD, qui désapprouvent le style
et le discours incendiaire de Kyungu. En septembre 2005,
les militants des deux partis se sont affrontés lors de
funérailles à Lubumbashi.40
Néanmoins, le risque de violence est plus grand entre
l’UNAFEC et deux autres groupes: l’UDPS, représentant
les intérêts de la plupart des Kasaïens dans la province,
ainsi que Solidarité katangaise, qui bien que formellement
une ONG et non un parti politique, se positionne comme
un acteur politique de taille ralliant les intérêts du sud.
Bien qu’il n’y ait pas eu de sondages faisant autorité dans
le Katanga, la rivalité serrée de l’UDPS et du PPRD à
Kinshasa (dans la plupart des sondages nationaux,
Tshisekedi devance Kabila)41 s’est transposée dans la
province natale du président. L’UDPS dispose lui aussi
d’un groupe de “combattants” chargé d’organiser les
démonstrations et de protéger les leaders. Au cours des
années 2004 et 2005, les groupes de la JUNAFEC ont
souvent interrompu les meetings de l’UDPS et ont
affrontés les membres de cette dernière. Lors d’un incident
de juin 2005 à Lubumbashi, un membre des services
de sécurité congolais, qui a attaqué les bureaux de l’UDPS
appartenait également à la JUNAFEC, ce qui tend à
confirmer la complicité de certaines autorités locales
dans ces accrochages.42 Accusant le gouvernement de
mauvaise gestion de la transition et de truquage du
processus électoral, Tshisekedi insiste qu’il ne prendra
pas part aux élections de mars. Mais qu’il participe ou
non, la rivalité UDPS-UNAFEC sera à coup sûr une
source de tension dans la province.
La seconde cible de l’UNAFEC est Solidarité katangaise,
une ONG s’occupant principalement d’éducation civique
et de développement, et qui ces derniers temps a acquis une
grande visibilité. Elle est dirigée par le bâtonnier du barreau
39
Entretiens de Crisis Group avec la société civile à Lubumbashi,
juin 2005.
40
“Bagarre autour des funérailles d’un proche du PPRD et
celui de l’UNAFEC”, Radio Okapi, le 13 septembre 2005.
41
Selon un sondage effectué par Facilitas Consulting dans
diverses provinces du pays en août 2005, Tshisekedi gagnerait
26 pour cent des voix dans les élections présidentielles, suivi de
Joseph Kabila avec 17 pour cent, tandis que 30 pour cent des
électeurs étaient indécis. Dans les élections législatives, l’UDPS
gagnerait 32 pour cent, suivi du PPRD avec 20 pour cent.
42
Crisis Group fut témoin de cet événement le 25 juin 2005.
Page 8
de Lubumbashi, Jean-Claude Muyambo,43 et revendique
des milliers de membres.44 Tandis qu’elle est plus active
dans le sud (Muyambo dirige également Sempya,
l’association culturelle des groupes ethniques Babemba,
Balamba et Balala), elle a entrepris en 2005 des projets
de développement et des programmes d’enseignement
dans des régions du centre et du nord. Certaines autorités
katangaises redoutent que Muyambo utilisera son
organisation pour rallier des soutiens lors des élections, et
ont tenté de l’intimider à plusieurs reprises.45 En juin
2005, le cabinet du gouverneur a suspendu le statut
d’ONG de Solidarité katangaise, accusant Muyambo
d’engagement politique. Et le 17 août 2005, des jeunes de
la JUNAFEC appartenant au groupe Zoulous tentèrent de
mettre le feu au bureau de Solidarité à Lubumbashi, avant
que la police ne les disperse. Plus s’accroît l’appui dont
bénéficie Muyambo, plus il devient menaçant pour
l’UNAFEC et Kabila. Son importance a été rehaussée
quand il a accueilli Olivier Kamitatu, président de
l'assemblée nationale et un acteur important des élections,
lors d’une visite d'octobre 2005.46
Les déclarations de l’UNAFEC sont devenues de plus en
plus hostiles à son égard ces derniers mois. En octobre
2005, lors de l’inauguration d’un nouveau bureau à
Lubumbashi, un leader de la jeunesse du parti, Juvénal
Kitungwa, dénonça à la télévision locale ceux qui
voulaient diviser les Katangais. 47 Il se moqua des”
albinos”, une référence tacite à Muyambo, qui est moitié
Néerlandais, et affirma que c’étaient des “serpents”. Il
ajouta que son groupe, les Brigades des Martyrs, avait
l’obligation de les attraper et de les brûler avec un pneu
enflammé autour du cou. Son collègue, Umba Lungange,
dénonça à son tour Muyambo comme étant une chauvesouris, moitié oiseau, moitié souris, et se demanda
comment un être pareil pouvait donner un conseil à qui que
ce soit. Il précisa aux téléspectateurs que s’ils voyaient
passer une “chauve-souris”, il fallait l’attraper, la brûler et
la manger. Il conclut en disant que la province ne pouvait
être dirigée que par ceux qu’il appelait des “fils du
43
Muyambo est le co-fondateur du Centre pour les droits de
l’homme, à Lubumbashi. Il a été également conseiller juridique
au ministère des Mines, sous Laurent Kabila.
44
Entretien de Crisis Group avec Me Jean-Claude Muyambo,
Lubumbashi, juin 2005.
45
Entretiens de Crisis Group avec une ONG locale,
Lubumbashi, juin 2005.
46
Kamitatu est un membre important du MLC, mais en
novembre 2005, il courrait des rumeurs qu’il était en train de se
préparer pour quitter le parti et former une alliance avec de
nombreuses autres personnalités, notamment Muyambo.
47
Juvénal Kitungwa est le président provincial de la JUNAFEC,
tandis que Umba Lungange est le président provincial intérimaire
de l’UNAFEC.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
Katanga”.48 On notera que même si Solidarité katangaise
n’a pas annoncé son intention de soutenir des candidats
lors des élections, l’UNAFEC se sent manifestement
menacée par la popularité de ce mouvement.
La mollesse de la réaction des autorités envers un tel
discours de haine fait planer le doute quant à leur
éventuelle complicités. Il est vrai qu’après l’indignation
de la MONUC et de diplomates basés à Lubumbashi,
le gouverneur provincial dénonça ce discours, tandis
que le ministre de la Justice Ngoy, lequel est également
président de l’UNAFEC, demanda qu’une enquête
soit menée. Mais il parlait en qualité de président de
parti, et ne demanda pas au procureur de la République de
se saisir du cas.49 Même si Kitungwa et Lungange sont
temporairement interdits d’antenne, ils restent membres
de la JUNAFEC et accusent la MONUC d’avoir gonflé
l’affaire. L’institution nationale chargée de la régulation
des médias ferma la chaîne de télévision (RTIV) qui
avait fait passer l’intervention pendant quinze jours,
une période jugée insuffisante par de nombreux diplomates
et les ONG locales. À titre de comparaison, presque à la
même période, l’organe en question interdit pendant trois
mois deux journaux de Kinshasa pour avoir publié une
information affirmant que le président Kabila avait fait un
don en espèces à des écoles tanzaniennes.50
Les déclarations des responsables de la JUNAFEC
rappellent étrangement le discours que tenait l’UFERI
pendant la purification ethnique du début des années
1990. Mais il n’y a pas de quoi s’en étonner outre
mesure: certains anciens leaders de ce mouvement sont
aujourd’hui à la tête de l’UNAFEC, notamment Kyungu
wa Kumwanza et le général John Numbi. S’il est peu
probable que l’UNAFEC puisse s’adonner à une violence
similaire, il y a lieu de suivre de près ses actions et son
discours afin de prévenir l’escalade.
C.
LE KATANGA À L’HEURE DE KINSHASA:
LE POSITIONNEMENT POLITIQUE À LA
VEILLE DES ÉLECTIONS
1.
La politique des mines
Le Katanga est potentiellement la province la plus riche
de la RDC: elle renferme 34% des réserves mondiales du
cobalt, et 10% de celles du cuivre. Sous le régime de
Mobutu, la Gécamines contrôlait les mines et employait
48
Intervention télédiffusée par la radio-télévision Inter Viens
et Vois le 8 octobre 2005.
49
Entretien téléphonique de Crisis Group avec des diplomates,
Kinshasa et Lubumbashi, 12 novembre 2005.
50
Ibid.
Page 9
plus de 33,000 personnes,51 mais depuis 1993, son
infrastructure s’est presque complètement effondrée, et
la production du cuivre et du cobalt ne constitue plus
qu’une infime partie du volume antérieur.52 Même si
certaines grandes sociétés internationales reviennent
progressivement, l’exploitation minière reste en grande
partie artisanale.53
L’effondrement de la Gécamines a forcé l’entreprise à
conclure des partenariats avec de petits entrepreneurs,
parfois douteux, ce qui a ouvert le secteur minier aux
rackets. Après l’arrivée au pouvoir de Laurent Kabila en
1997, les relations politiques à Kinshasa déterminèrent
dans une grande mesure l’accès aux contrats miniers.
Ayant au départ autorisé l’exploitation artisanale, le
Président donna au gouvernement du Zimbabwe l’accès
à la Gécamines par le canal d’intermédiaires, en échange
d’un soutien militaire dans la guerre contre le Rwanda et
les rebelles du RCD. Le Zimbabwe, représenté par Billy
Rautenbach (nommé directeur de la Gécamines in 1999),
ne put tirer profit de la société paraétatique presque
moribonde, et le gouvernement de Kabila commença à
s’engager dans des joint-ventures avec de petites sociétés
étrangères.
Les trois rapports de la Commission de l’ONU sur
l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC
décrivent comment des responsables proches de la
présidence de la République ont aidé des sociétés
étrangères à avoir accès à des concessions de la
Gécamines, contre rémunération.54 Tandis qu’aux termes
51
George J. Coakley, “The Mineral Industry of Congo
(Kinshasa)”, U.S. Geological Survey, 2002.
52
La Gécamines a été forcée de se séparer de deux tiers de son
personnel, réduisant ses effectifs à 10,000 employés. La Banque
mondiale a contribué 40 millions USD à un régime de retraite
anticipée, un montant qui s’est avéré insuffisant car on n’avait
pas pris en considération le rôle que la société jouait dans les
services sociaux et dans les domaines de santé et d’enseignement.
53
Pour une analyse plus approfondie de l’exploitation minière
artisanale au Katanga, voir “Rush and Ruin – The Devestating
Mineral Trade in Southern Katanga, DRC”, Global Witness,
septembre 2004, et “La paix sous tension: dangereux et illicite
commerce de la cassitérite dans l’est de la RDC”, Global
Witness, juin 2005. Les grandes sociétés d’exploitation minière
industrielle qui restent sont Forrest Malta, appartenant à un
ressortissant belge né au Congo; Anvil Mining, une société
australienne cotée sur la bourse de Toronto; et deux entreprises
états-uniennes, OM Group, Inc. et American Mineral Fields.
D’autres sociétés qui ont acquis des concessions et des droits
d’exploitation n’ont pas encore commencé les opérations.
54
Victor Mpoyo (ministre à la présidence), Mwenze Kongolo
(ministre de la Sécurité nationale) et Katumba Mwanke
(ministre à la présidence après Mpoyo) ont été suspendus par
Joseph Kabila de leurs postes dans le gouvernement après
avoir été cités par la Commission d’experts de l’ONU. Kongolo
et Mpoyo ont quitté le service public pour fonder le parti
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
de la loi congolaise, toutes les opérations minières
étrangères doivent se faire sous forme de joint-ventures,
des officiels donnent souvent des concessions au rabais
moyennant une commission. L’ONU et les groupes des
droits de l’homme ont également accusé les sociétés
étrangères de ne pas respecter les clauses contractuelles
de partage du profit.55 Des ONG locales accusent des
investisseurs de connivence avec les autorités en payant
de généreuses commissions ou en leur donnant une part
de participation afin qu’ils puissent enfreindre impunément
les réglementations minières et environnementales.56
En 2002, le gouvernement de Kinshasa a publié le
nouveau code minier élaboré avec l’assistance de la
Banque mondiale, et qui visait à attirer des investisseurs
étrangers grâce à des taxes réduites. Il rationalisait
également le processus d’acquisition des concessions par
l’usage d’un contrat type et la définition de directives en
matière d’environnement, de main-d’œuvre et des
finances. La Banque mondiale espérait que la Gécamines
serait progressivement privatisée, une approche qui avait
dicté les taxes attrayantes. Cependant, la plupart des
opérations minières sont encore de petites joint-ventures
avec des investisseurs étrangers modestes, disposant
de moyens limités. La corruption et l’incertitude de
l’environnement sécuritaire ont empêché les gros
investissements. Pourtant la situation a commencé à
changer, et les experts miniers prévoient un regain d’intérêt
après les élections.57
Tandis que le code minier dicte les conditions régissant les
nouveaux venus, les anciens contrats restent valides.
Certaines clauses contiennent des exonérations fiscales ou
autorisent l’exportation de minerais non traités, ce qui a été
interdit par un décret présidentiel depuis 2003. En outre,
les mineurs artisanaux et les agents des douanes se font
facilement berner car ils n’ont pas les moyens de
Page 10
déterminer la teneur des minerais. Cela représente une
perte significative pour le Katanga. Ses deux raffineries
sont aujourd’hui presque au point mort, car la plupart des
minerais sont exportés à l’état brut pour être traité à
l’étranger.58
L’application laxiste des réglementations minières a permis
à certains membres du gouvernement de transition de
continuer à s’impliquer dans la gestion de ressources
publiques. Katumba Mwanke, un de ceux qui ont été
critiqués par la Commission d’experts de l’ONU et
aujourd’hui ambassadeur itinérant, aurait utilisé sa position
dans le gouvernement afin d’obtenir des exonérations
fiscales substantielles pour le compte d’une société
minière au Conseil d’administration e laquelle il
appartenait jusqu’à très récemment.59 De même, le viceprésident Yerodia Ndombasi serait intervenu, par le
canal de son conseiller juridique, lorsqu’une société dont
il était actionnaire fut accusée d’avoir pollué l’eau potable
de Lubumbashi en 2004.60 Tandis qu’un registre a été
mis en place à Kinshasa en 2004 pour éviter l’ingérence
d’individus dans l’acquisition de mines, les hommes
d’affaires internationaux signalent que toutes les affaires
importantes se négocient toujours avec des responsables
politiques de haut niveau.61
La fraude douanière est très répandue. Des minerais tels
que le cuivre et l’hétérogénite sont exportés à travers la
Zambie sans inspection et sans paiement de droits de
douane, avec la complicité des agents des douanes. Les
organisations locales ont accusé le gouverneur Ngoy
d’être responsable de cette fraude au poste frontière de
Kasumbalesa. Lorsque le cabinet-conseils Crown Agents a
examiné en 2004 les opérations de l’Office des douanes
et accises (OFIDA), il a conclu que de gros volumes de
marchandises passent la douane sans qu’ils ne soient
58
politique M-17, tandis que Mwanke a été rappelé pour être
ambassadeur itinérant. “Final report of the Panel of Experts on
the Illegal Exploitation of Natural Resources and Other Forms
of Wealth of the Democratic Republic of the Congo”, 17
octobre 2002, UN S/2002/1146, pp. 7-8.
55
Par exemple, on raconte que l’usine de la société Scories de
Terril de Lubumbashi (STL) n’a pas partagé avec la Gécamines
des bénéfices provenant d’opérations de traitement, ibid, p. 10.
56
Communication électronique de Crisis Group, ONG des
droits de l’homme, octobre 2005.
57
Le nouvel investissement le plus notable est l’achat en 2005
de la concession minière de Tenke Fungurume par la société
états-unienne Phelps Dodge, pour 1,6 milliards USD. Tenke
renferme une des plus hautes qualités de cuivre dans le monde,
et il devrait produire autour de 800 000 tonnes de minerai par an
d’ici 2015, le double de ce que produisait la Gécamines quand
elle était au zénith, dans les années 1970. David Lewis,
“Congo’s Gecamines nears Phelps Deal – CEO”, Reuters, 29
août 2005.
Entretien de Crisis Group avec un homme d’affaires
international, Kinshasa, novembre 2005. Un exemple donné est
la poursuite du paiement de 4% de la taxe d’exportation,
contrairement aux 2% contenus dans le code minier.
59
Entretiens de Crisis Group avec des autorités locales et des
diplomates, Kinshasa et Lubumbashi, juin-juillet 2005, et
archives de Crisis Group. Mwanke a quitté le directoire de Anvil
Mining Limited peu après l’incident de Kilwa (voir ci-après). Il
s’occuperait également de la gestion des fonds personnels du
président Kabila. Sur la Commission d’experts de l’ONU au
sujet de Mwanke, voir la note 54 ci-dessus.
60
Entretiens de Crisis Group avec des ONG locales et des
officiels de l’ONU, Lubumbashi et Kinshasa, juin 2005.
L’entreprise en question était la Société Minière du Katanga
(SOMIKA). Voir également “Dossier SOMIKA: Les Lushois
derrière Kisula Ngoy contre Yerodia Ndombasi”, Katanga
News, le 6 novembre 2004, à l’adresse http://www.katanga
news.com/societe09.htm.
61
Entretien de Crisis Group avec des officiels internationaux
des mines, Kinshasa, novembre 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
déclarés, ce qui constitue la plus grande source de perte
de recettes douanières du le pays.62 À titre d’exemple,
une comparaison entre les statistiques officielles entre la
RDC et la Chine pour le cobalt et le cuivre entre avril et
mai 2004 montrent que dix fois moins de minerais quitte
le Congo en direction de la Chine, que la Chine n’importe
de minerais en provenance du Congo.63 Avec le retour au
Katanga des grandes sociétés minières et l’accroissement
des enjeux financiers, le potentiel de corruption et de
l’implication possible de sociétés internationales dans une
violence en rapport avec l’exploitation minière va
augmenter.
2.
L’incident de Kilwa
L’incident de Kilwa met à jour les liens étroits entre la
politique, les intérêts commerciaux et la violence. Le 14
octobre 2004, à l’aube, cette ville se trouvant sur les bords
du lac Mweru fut attaquée et occupée par des combattants
sous le commandement d’Alain Kazadi Mukalayi. Selon
les enquêtes de la MONUC et des organisations locales
des droits de l’homme, Kazadi n’avait que 10 à 30
complices et une poignée d'armes à feu. Il tint un meeting
public et déclara qu’il était le leader du Mouvement
révolutionnaire pour la libération du Katanga (MRLK),
qui avait la bénédiction du président Kabila et du
commandant local des FARDC, le colonel Ademar Ilunga.
Il distribua alors de l’argent à la population locale, recruta
des soldats et saccagea les bureaux de l’administration
locale.64
Deux jours plus tard, à la grande surprise de Kazadi, le
colonel Ademar Ilunga attaqua les insurgés à partir de sa
base de Pweto, une ville avoisinante. Bien qu’il n’y ait pas
eu de résistance, les troupes des FARDC rassemblèrent les
civils, les accusèrent de collaboration et en tuèrent un bon
nombre. Une enquête de la MONUC et des groupes de
Page 11
droits de l’homme locaux estimèrent qu’il y avait eu plus
d'une centaine de victimes.65
A voir comment l’attaque a été menée, il y a lieu de
suspecter une manipulation par des responsables locaux
et nationaux. Peu auparavant, Anvil Mining, une société
australienne cotée sur la bourse de Toronto, avait rompu
les négociations avec la brigade d’Ademar au sujet de la
sécurité de son entrepôt. Ces pourparlers se seraient
tenus sur les ordres du général John Numbi, qui
apparemment y portait un grand intérêt.66 En outre, le
mois précédent, de nombreuses troupes des FARDC
stationnées dans cette zone avaient été transférées à
Kolwezi, apparemment sur les ordres du général. Actuel
chef de l’armée de l’air, Numbi était auparavant
commandant de la région militaire du Katanga, et il
s’immisce souvent dans les affaires militaires de la
province. Le jour avant l’arrivée de Kazadi, Ademar avait
évacué de la ville de ses armes lourdes et quelques-uns de
ses enfants, alors que l’administrateur local avait mis à
l’abri ses effets personnels.67 Selon un témoin, lorsque
Ademar vit Kazadi à l’hôpital le 16 octobre, ce dernier
s’écria: “Tu m’as trahi!”.68 Il est mort en détention
quelques jours plus tard, des suites de ses blessures.
Tandis qu’il est difficile de déterminer les motifs réels de
l’attaque de Kilwa et de la reprise de la ville, il est
probable que les combats aient été utilisés par les
politiciens de Lubumbashi et Kinshasa. Il se pourrait que
toute l’affaire était destinée à rappeler la force de Numbi
dans la province et qu’elle visait ses rivaux, notamment
Katumba Mwanke, un conseiller proche du président
Kabila qui était jusqu’à récemment membre du Conseil
d’Anvil Mining, et d’autres politiciens du Sud comme
Katebe Katoto, qui avait des intérêts dans la société.69
65
62
“Rush and Ruin”, op. cit., p. 12.
Les données fiables sont rares, mais on estime que des
millions de dollars de recettes relatives au cuivre et au cobalt
sont perdus chaque mois. Des ONG locales telles que la Ligue
contre la corruption et la fraude (LICOF) et la Ligue
congolaise pour la sauvegarde des droits des consommateurs
(LISCO) ont signalé de nombreux cas ces deux dernières
années. Leurs révélations donnent l’occasion aux populistes de
manipuler la frustration populaire. Les différences décrites cihaut dans les statistiques du commerce avec la Chine donnent la
mesure de la dimension colossale de l’évasion fiscale. “Rapport
préliminaire sur l’exploitation illégale des ressources naturelles
en RD Congo – le pillage s’intensifie”, ASADHO/Katanga,
juillet 2004; “Rush and Ruin”, op. cit., p. 13.
64
Entretiens de Crisis Group avec les ONG locales et des
officiels de l’ONU, Lubumbashi, juin 2005. Pour plus
d’information sur le soulèvement de Kilwa, voir “Rapport sur
les violations des droits de l’homme commises à Kilwa au
mois d’octobre 2004”, ASADHO/Katanga, janvier 2005.
63
“Sixteenth Report of the Secretary-General on the United
Nations Mission in the Democratic Republic of the Congo”,
Conseil de sécurité des Nations unies S/2004/1034, décembre
2004, p. 4; “Rapport sur les violations des droits de l’homme”,
op. cit., pp. 13-15.
66
Entretien de Crisis Group avec des diplomates à Lubumbashi
et Kinshasa, juin/juillet 2005. Numbi aurait demandé 150 USD
par soldat par mois et aurait essuyé le refus d'Anvil.
67
“Rapport sur les violations des droits de l’homme”, op. cit. p.
10; interview de Crisis Group, officiels de l’ONU, Lubumbashi
et Kinshasa, juin/juillet 2005.
68
Entretien de Crisis Group avec des diplomates, Lubumbashi
et Kinshasa, juin/juillet 2005. Il semble que Kazadi était
persuadé qu’il avait été trahi, de même qu’il avait cru qu’il avait
le soutien de Kabila. Il se rendit plus tard au bureau de
Médecins sans frontières leur demander d’utiliser leur radio HF,
croyant que la transmission serait reprise par Radio France
internationale.
69
Katebe Katoto louait des machines à Anvil Mining. Voir
plus loin une description plus détaillée de l’importance de
Katebe au Katanga.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
L’incident fut une occasion pour les autorités de régler
certains comptes et d’extorquer de l’argent au passage; les
semaines suivantes, une douzaine de personnes
(essentiellement des Katangais du sud) étaient arrêtées,
accusées d'être associées avec Kazadi, même si une telle
association ne fut jamais établie. Et la MONUC de
conclure: “tout porte à croire que ce groupe n’était point
une bande incontrôlable au sein du mouvement séparatiste
global, mais une proie facile pour des manipulateurs qui
voulaient créer une situation d’instabilité à Kilwa, et jouer
en fait un double jeu.”70
Anvil Mining nie tout rôle dans cette affaire.71 Tandis que
cette société a permis à l’armée d’utiliser ses véhicules et
ses avions, elle affirme l’avoir fait sous la menace des
armes, mais l’enquête de l’ONU conclut que la déclaration
de l’entreprise contient des contradictions.72 La Banque
mondiale a appuyé Anvil Mining en lui donnant en 2005
une assurance de 10 millions USD par le biais de
l’Agence multilatérale de garantie des investissements
(AMGI),73 mais elle a été accusée par des ONG de ne pas
avoir fait une enquête exhaustive sur le rôle de cette
société dans le massacre,74 et elle a demandé à un
ombudsman d’examiner l’affaire de plus près. La
MONUC a refusé de publier les conclusions de son
investigation jusqu’à récemment, se bornant à un
communiqué de presse.75 Quel que soit le fin fond de
l’histoire, les événements de Kilwa montrent que les
intérêts commerciaux mal gérés peuvent contribuer à la
déstabilisation du processus de paix; offrant aux donateurs
bilatéraux et multilatéraux une raison supplémentaire
d’appuyer la réforme dans le pays.
70
«Report on the conclusions of the special investigation into
allegations of summary executions and other violations of
human rights committed by the FARDC in Kilwa on October
15, 2004”, MONUC, Kinshasa, disponible à l’adresse suivante:
http://abc.net.au/4corners/content/2005/MONUC_report_oct05.
pdf.
71
Au sujet de la déclaration d’Anvil Mining, voir
www.anvil.com.au/documents/2005August23AnvilConfirms
That AllegationsAre Unfounded.pdf].
72
“Report on the conclusions of the special investigation”, op.
cit., p. 9. Selon le rapport de l’ONU, Anvil a écrit à ses
actionnaires en décembre 2004 que la réaction de l’armée et
du gouvernement aussi bien au niveau provincial que national
a été rapide et a contribué largement à la reprise rapide des
opérations.
73
Eliah Giffenbaum et Shannon Lawrence, “The World Bank
in the Democratic Republic of the Congo”, Environmental
Defense, disponible à l’adresse suivante: www.ed.org, p. 3.
74
“World Bank support for extractives: complicity in human
rights violations?” Bretton Woods Update, septembre/octobre
2005, p. 1.
75
Le rapport est maintenant disponible sur demande écrite
adressée au représentant spécial du secrétaire général,
l’ambassadeur William Swing.
Page 12
3.
La tentative de sécession d’avril 200576
En avril 2005, la police et l'armée procèdent à des
arrestations à grande échelle à Lubumbashi. André
Tshombe, le fils de Moïse Tshombe, celui qui tenta
l’indépendance du Katanga dans les années 60, est
arrêté avec plusieurs hommes d'affaires, un professeur
d'université et 30 officiers des FARDC. Au grand
étonnement de beaucoup de gens de la région, le
gouvernement annonce le 9 mai qu'il a déjoué une
nouvelle tentative de sécession.77 Il affirme que Tshombe
avait monté une rébellion, et accuse ceux qu’il a arrêté
d’avoir acheté des milliers de machettes. En même
temps, Jean-Claude Muyambo de Solidarité katangaise
est menacé par les autorités locales, et il lui est intimé
l’ordre de ne pas sortir de la ville. Le président Kabila
et le général Numbi viennent peu après personnellement
de Kinshasa s’enquérir de la situation.
Aucune preuve n'a jamais été fournie; mais le complot
allégué a permis aux autorités d’arrêter ou d’intimider
beaucoup de sudistes considérés comme des rivaux
dans les élections de 2006. Tshombe avait des liens
avec les Tigres katangais, dont 14,000 environ seraient
encore en Angola. Selon les ONG et les journalistes
locaux, en 2004, il est à maintes reprises entré en contact
avec les Tigres pour le compte de Kabila afin de les
encourager à revenir au pays.78 Il est également
président de la CONACO, un parti politique dominant à
Lubumbashi, et il espère recevoir l'appui des partis
belges pour sa campagne de 2006 au Katanga.79 Parmi
les personnes qui ont été arrêtées figurent dix colonels
des FARDC, principalement des ex-Tigres du sud, en
poste au Katanga mais aussi dans d’autres régions
éloignées comme l’Équateur.80 Certains d’entre eux
s’étaient brouillés peu auparavant avec Numbi.81
76
Un rapport détaillé se trouve dans “Sécession du Katanga,
premier mai 2005”, Action Contre l’Impunité pour les Droits
Humains, mai 2005.
77
“Trente personnes ont été arrêtées dans cette tentative de
sécession alléguée”, IRIN News, 9 mai 2005.
78
Entretiens avec Crisis Group, Lubumbashi, juin 2005. Voir
aussi “Sécesssion du Katanga”, op. cit., p. 9.
79
Dans un entretien accordé à un journal local, Le Fédéral,
Tshombe a dit qu’il avait été reçu par le président du Sénat
belge, ibid., p. 9.
80
Les commandants katangais suivants ont été arrêtés en
Equateur: colonel Kabinda Yav, colonel Yav a Yav, major
Kadimbili, major Kamboyi et capitaine Nkemba.
81
Cela a été le cas avec le capitaine Itala, commandant du
bataillon d’artillerie lourde des GSSP de Lubumbashi, ainsi que
le major Jajija, commandant de la police militaire de
Lubumbashi. Entretiens de Crisis Group avec des responsables
de l’ONU, Kinshasa, juin/juillet 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
Page 13
D'autres adversaires en vue de Numbi et de Kabila ont
été intimidés sans être arrêtés; on peut citer le cas de
Muyambo qui, en sa qualité de chef de Solidarité
katangaise et de Sempya, pourrait avoir dans les
élections une plus grande influence que Tshombe. Il a
été interpellé par le procureur local, et il lui a été
intimé l’ordre de ne pas sortir de la ville. Il a affirmé que
Numbi l'a personnellement menacé, et les soldats des
FARDC ont encerclé sa résidence.82 Un autre riche
politicien local sudiste, Katebe Katoto, a reporté son
retour au Katanga pour lancer la campagne de son
parti, l'Union des libéraux pour la démocratie (ULD),83
affirmant avoir reçu des menaces de mort de la part de
Numbi. Quant à Vincent de Paul Lunda Bululu,84 l’un
des premiers ministres de Mobutu et actuellement chef du
Ralliement des socialistes fédéralistes (RSF), il affirme
avoir aussi reçu des menaces de la part de Numbi.85
D’autres qui avaient publiquement appelé à la sécession, à
la télévision et dans la presse locales, comme les Notables
katangais dirigés par Mbenga Sandongo,86 n’ont pas été
affectés par la répression.
III. LE MAINTIEN DE LA PAIX
La gestion de cet incident révèle la persistance d’une
structure de commandement parallèle au Katanga. Le
général Numbi s’est rendu dans la province pour diriger
les enquêtes et présider le conseil de sécurité provincial
en lieu et place du gouverneur.87 Selon des sources
militaires locales, il a donné des ordres directs aux services
de sécurité de Lubumbashi de retrouver et d’arrêter les
suspects, passant outre le pouvoir du commandant militaire
régional et des autorités civiles locales.
1.
82
Entretien de Crisis Group avec Jean-Claude Muyambo,
Lubumbashi, juin 2005.
83
Katebe Katoto est un riche homme d’affaires Bemba du Sud
du Katanga qui a fait fortune dans le commerce intérieur. Il est
devenu un proche partenaire de l’ancien président Chiluba de
Zambie, et il est accusé par l’actuel président Mwanawasa de
trafic d’armes et de complot contre sa personne. Après que les
enquêtes aient révélé que lui et son frère, Moïse Katumbi, étaient
aussi impliqués dans une affaire de détournement de fonds, les
autorités zambiennes ont gelé leurs avoirs. Katoto était viceprésident du RCD-Goma au début de la transition, mais il a
entretemps fondé son propre parti, l’ULD.
84
Lunda Bululu, un Katangais du sud, a été premier ministre
du Zaïre sous Mobutu, 1990-1991, et ministre des Affaires
étrangères en 1994-1995. Il a ensuite adhéré successivement
aux partis RCD-Goma et MLC avant de lancer son propre
parti en 2004.
85
Entretien de Crisis Group avec un politicien local,
Lubumbashi, juin 2005.
86
Me Mbenga apparaît fréquemment à la télévision locale
pour défendre sa demande de sécession. Il a en outre écrit à
l’ONU. Voir www.katanga-freedom.com.
87
Entretiens de Crisis Group, Lubumbashi et Kinshasa,
juin/juillet 2005.
Le Katanga n'ayant pas connu de grands combats depuis
2001; la communauté internationale a parfois perdu de
vue cette province. La MONUC n’a ouvert son bureau de
Lubumbashi qu’en janvier 2003, et sa présence y est
beaucoup plus réduite qu’à Bukavu, Goma ou Bunia.
Jusqu’à récemment, il y avait seulement près de 150
soldats de l'ONU dans cette province, assignés à la
protection des installations de l'ONU à Kalemie, sur le
lac Tanganyika. Ils n’ont ni le mandat ni les ressources
nécessaires pour répondre aux besoins de sécurité du
Katanga, et les responsables de la MONUC se rendent
rarement dans les zones éloignées du nord et du centre.
Tout en saluant la résolution 1635 (du 28 octobre 2005)
du Conseil de sécurité, qui a augmenté l’effectif de la
MONUC pour permettre le déploiement d’un bataillon
de 800 soldats, Béninois pour la plupart, le mandat de
cette force n’est pas encore clair.
L’intégration des groupes armés et la
démobilisation des combattants
Comme dans le reste du Congo, les groupes armés du
Katanga sont loin de l'intégration dans une structure
de commandement commune et cohérente. Au début de
la transition en 2003, il y avait trois grands groupes
armés: les Forces armées congolaises (FAC) fidèles à
Joseph Kabila; l'Armée nationale congolaise (ANC),
la branche militaire du RCD-Goma d'Azarias Ruberwa;
et divers groupes de Maï-Maï qui, tout en prêtant
serment d’allégeance à Kabila, manquent d’unité de
commandement et se battent souvent entre eux. Selon
une évaluation récente, il y possède environ 20,000 exFAC et ex-ANC et probablement entre 5,000 et 8,000
Maï-Maï au Katanga.88 En outre, au moins 1,000 hommes
du Groupe spécial de sécurité présidentielle (GSSP), la
force de protection de Kabila, sont déployés à Lubumbashi
et Kolwezi, toujours sous son commandement direct. Ces
derniers mois, les soldats de la GSSP sont devenus de
plus en plus agressifs. Aux barrages routiers, ils harcèlent
les populations civiles, les diplomates et le personnel de
la MONUC. Fin octobre 2005, ils ont battu un employé
local de la MONUC et le mois suivant, ils ont arrêté un
diplomate belge et son épouse les menaçant de leurs
armes.
88
Entretiens de Crisis Group avec des commandants des
FARDC à Lubumbashi et Kinshasa, juin et août 2005. Le
recensement effectué par l’armée concernait seulement les
combattants ex-FAC et ex-ANC. Les données sur les Maï-Maï
proviennent d’un entretien de Crisis Group avec la MONUC,
voir note 3 plus haut. Le recensement a révélé que les chiffres
sur les troupes des FARDC du Katanga avaient été gonflés de
38 pour cent.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
L'intégration des forces armées s’est lentement poursuivie
dans le Katanga, bien que la grande partie des factions
Maï-Maï n’en fasse pas partie. Comme dans la plupart
des provinces, deux processus d’intégration parallèles
sont en cours: l’un, au niveau national, dans le cadre
de l’Accord global inclusif qui a donné jour à la transition,
et l’autre, au niveau provincial, à la discrétion des
commandants régionaux. Aucune force nationalement
intégrée n'a été encore déployée dans le Katanga;
mais les commandants provinciaux ont fusionné diverses
forces locales. Des soldats ex-ANC (l'aile militaire du
RCD), basés dans les villes du nord-est de Kalemie,
de Nyunzu, de Kabalo et de Manono, ont été
progressivement intégrés dans le sixième commandement
militaire régional basé à Lubumbashi. La mutinerie
des forces ex-ANC dissidentes à Bukavu en mai 2004
a accéléré la dissolution de l'ancien commandement
de l'ANC, du fait que plusieurs anciens commandants
très en vue avaient fui le Katanga vers le Sud-Kivu,
notamment l’ancien commandant de brigade, le
commandant de police de Kalemie et des membres des
services de sécurité.89 Le commandant de la force navale
ex-FAC, le général Madoa Madoa, a par la suite été
envoyé à Kalemie pour y prendre le commandement des
forces de la garnison.90 Le processus d’intégration locale
a été inégal, quoique quelques Maï-Maï et ex-FAP aient
été incorporés dans les huit brigades locales.
Des officiers de tous les groupes armés congolais
signataires de l'Accord de Prétoria ont été nommés à des
postes de commandement régional à Lubumbashi en août
2003. Un commandant ex-MLC, le général Alengbia
Nzambe, a été placé à la tête de la sixième région militaire,
avec un ex-FAC comme adjoint. Les commandants
militaires locaux se sont plaints, cependant, que l'ancien
commandement régional était souvent tenu à l'écart du
processus de prise de décisions, et que les commandants
proches de Kabila continuaient à donner des ordres à
travers leurs réseaux militaires personnels. Ces structures
de commandement parallèles et le manque de transparence
dans l’hiérarchie minent l'unification des groupes armés.
Les commandants se soupçonnent mutuellement et
rechignent à abandonner le contrôle de leurs hommes.
89
Entretien de Crisis Group avec une ONG internationale,
Lubumbashi, juin 2005. Beaucoup de ces responsables étaient
des Banyamulenge. Le commandant de brigade, le colonel
Fraterne Kibunga, a été arrêté par le colonel Munyamulenge
Patrick Masunzu en juin 2004 avec trois autres officiers
Banyamulenge et remis premièrement au général John Numbi
en juillet 2005, ensuite au tribunal militaire de Lubumbashi.
Voir “Le RCD réclame la libération des officiers ex-ANC
transférés à Lubumbashi”, 20 juillet 2005, http://www.radiookapi.
net/article.php?id=2548.
90
Madoa Madoa, également appelé Lokole, est un excommandant Maï-Maï du Sud-Kivu et un proche de Laurent
Kabila.
Page 14
Cette situation persiste sous le nouveau commandant
MLC de la région militaire, le général Widi Mbulu
Divioka.
Néanmoins, la situation générale de la sécurité s'est
améliorée au Katanga. Des zones comme Kitenge, par
exemple, sont maintenant accessibles aux organismes
humanitaires, et le nombre de personnes déplacées a
diminué. Dans d'autres zones, comme le triangle Mitwaba,
Manono et Pweto, où l'armée a lancé une offensive contre
le commandant Gédéon en novembre 2005, la violence
s’est accentuée depuis le commencement de la transition,
alors que des tensions dans les zones urbaines telles que
Lubumbashi et Kolwezi ont été aggravées par la fièvre
électorale.
Comme noté plus haut, la CONADER, la commission
nationale chargée de la démobilisation et de la réinsertion
des combattants dans la vie civile, a lentement commencé
son travail. Après l’ouverture de son centre d'orientation
de Kamina en août 2005, des soldats entrant s’y sont
souvent retrouves bloqués, sans nourriture ni soins de
santé.91 Le manque de centres d'orientation au centre
et au nord, où opèrent la plupart des Maï-Maï, impose
à de nombreux miliciens de longues marches avant
d’accéder au processus d'intégration. Tandis que la
CONADER s’est heurtée à des difficultés d’ordre
technique, beaucoup de chefs Maï-Maï sont peu disposés
à entrer dans le processus d'intégration par peur d’être
arrêtés, alors que d'autres se sentent soutenus grâce à
leurs liens avec des responsables comme le général
Numbi et le gouverneur Ngoy. Les initiatives de
démobilisation parallèles du pasteur Mulunda ont ajouté
davantage de confusion au processus.
La démobilisation des Maï-Maï nécessite tant le bâton que
la carotte. Les conditions de transport et de vie dans les
centres de regroupement et d'intégration doivent être
améliorées afin de prendre soin de miliciens qui ont
patienter des mois afin d’entrer dans le processus. Les
autorités doivent mener des enquêtes approfondies sur
des commandants comme Gédéon qui ont été accusés de
violations des droits de l'homme, et les arrêter si ces
allégations sont prouvées. 92 Les autres officiers devraient
être appelés à occuper des postes dans l'armée nationale,
tel qu’appliqué aux commandants des Maï-Maï dans les
Kivus.
Les FARDC devraient envoyer des brigades intégrées
contre les Maï-Maï récalcitrants, comme cela fut le cas
dans le district de l’Ituri, où, en dépit de problèmes
91
Voir note 19 plus haut.
Le groupe de Gédéon est actif à Mitwaba et a été accusé par
beaucoup d’habitants d’avoir commis des atrocités, dont le
cannibalisme.
92
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
logistiques et d’irrégularité de paiement des salaires, les
première et quatrième brigades intégrées ont avec l’aide
de la MONUC repoussé les milices hors de plusieurs
villes et limiter leur champ d’action. Cependant, aucune
brigade intégrée n'a encore été déployée au Katanga.
Comme décrit ci-dessous, la coopération de la MONUC
est essentielle, non seulement pour l'appui tactique, mais
également afin d’éviter que les FARDC ne maltraitent la
population. Les Maï-Maï du Katanga sont mal organisés et
se rendraient probablement très vite face à un programme
de démobilisation et d’intégration suffisamment médiatisé.
La CONADER est maintenant fonctionnelle, et elle
devrait être la seule dans la province à être chargée de
la démobilisation et de la réinsertion. Des initiatives
du type “vélos contre fusils” 93 du pasteur Mulunda doivent
être découragée parce qu'elles ajoutent à la confusion des
combattants et donnent lieu à des violences.
2.
Le déploiement de la MONUC et son
mandat
Bien que le niveau de violence au Katanga atteigne celui
qu’ont connu le Kivu et l’Ituri pendant la même période, la
MONUC a déployé au Katanga moins de 1,000 sur les
17,000 hommes que comptent ses troupes.94 Le Comité
international pour l’accompagnement de la transition
(CIAT), l’organe basé à Kinshasa qui coordonne les
actions des principaux intervenants étrangers en RDC,
soulève rarement des problèmes concernant le Katanga.
Le troisième rapport spécial du secrétaire général de
l’ONU sur la RDC (du 16 août 2004) a recommandé la
création d'une brigade forte de 3,500 hommes pour le
Katanga et le Kasaï, avec quartier général à Kamina, et
déployant des bataillons à Kalemie, Lubumbashi et
Mbuji-Mayi, plus un bataillon de réserve à Kamina. La
résolution 1565 (du 1er octobre 2004) du Conseil de
sécurité, cependant, n'a pas suffisamment augmenté les
effectifs pour permettre la création de cette brigade. Le
secrétaire général a réitéré son appel en faveur de cet
accroissement de troupes dans un rapport spécial sur les
élections présenté en mars 2005, en demandant que le
plafond des effectifs soit porté à 19,290, y compris une
brigade forte de 2,590 hommes pour le Katanga et le
Kasaï. Étant donné la réticence de certains membres du
Conseil de sécurité, particulièrement les États-Unis, à
accroître le budget de la mission, cette proposition ne fut
93
Mulunda a visité Kongolo et Malemba Nkulu en juin et
juillet 2005.
94
A la fin de 2005, la MONUC comptait environ 150 agents
de maintien de la paix à Kalemie avec le mandant de protéger
les installations de l’ONU. Une partie des 800 soldats
supplémentaires était arrivée à Lubumbashi et Kamina sans
aucune mission particulière.
Page 15
pas suivie d’effet.95 Lorsque le mandat de la MONUC a
été renouvelé pour un an en novembre 2005, le Conseil
n’a autorisé que 300 unités supplémentaires, ce qui est
très inférieur aux besoins.
Selon le Département des opérations de maintien de la
paix de l'ONU, la disponibilité de ces troupes permettra le
déploiement d'un bataillon d’environ 800 Casques bleus
au Katanga, avec des bases à Kamina, Lubumbashi et
Kalemie.96 Ce déploiement se heurte maintenant à des
contraintes administratives et logistiques qui occasionnent
des retards. En outre, sa mission exacte dans la province
devrait être plus claire, de sorte qu’il puisse y conduire
des opérations comme celles qui sont menées dans l’Ituri,
notamment des patrouilles agressives, des opérations de
ratissage, et l'établissement de zones démilitarisées. À la
fin décembre 2005, une police de 125 agents d’origine
indienne est arrivée pour faire des patrouilles. Ce nombre
est cependant trop petit pour qu’ils puissent opérer audelà de Lubumbashi et de ses environs.
Le déploiement de la MONUC a frappé de consternation
les responsables militaires locaux, qui veulent éviter
l'ingérence dans leurs activités, en particulier à l'aéroport
de Lubumbashi. Le 28 octobre 2005, un membre du
personnel local de la MONUC, qui aidait les nouvelles
troupes qui y sont déployées, a été battu par des soldats du
GSSP. Les autorités locales se plaignent que radio Okapi,
la radio de la MONUC, porte atteinte à la réputation du
président Kabila, et le GSSP a intimidé son personnel.97
3.
La bonne gouvernance et l’abus de pouvoir
Un État faible permettant à des individus de se servir
de leurs fonctions officielles à des fins de pouvoir ou
d’enrichissement personnel est en partie la racine du
disfonctionnement politique du Katanga, comme de
toute la RDC. Les exonérations d'impôt, l'attribution
frauduleuse des concessions minières et les structures
de commandement administratif et militaire parallèles
en sont des exemples.
La mauvaise gestion contribue directement à la violence.
Le salaire maigre et irrégulier des soldats, par exemple, a
fait de l'armée nationale, les FARDC, une menace
considérable contre la sécurité des populations civiles
95
Entretiens de Crisis Group avec des diplomates, New
York, juin 2005.
96
Entretien de Crisis Group avec un responsable de l’ONU,
Kinshasa, novembre 2005. Tandis que seuls 300 soldats
supplémentaires ont été autorisés, les effectifs actuels de la
MONUC sont de plusieurs milliers inférieurs au plafond du
moment, ce qui devrait lui permettre d’y ajouter environ 800
hommes supplémentaires.
97
Entretien de Crisis Group avec un responsable de l’ONU,
Kinshasa, novembre 2005.
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
congolaises. Les experts étrangers estiment que sur les 8
millions USD alloués chaque mois aux salaires et rations,
près de 3,5 millions à 5,8 millions USD disparaissent.
Une grande partie de cette somme détournée passe par
le paiement de “soldats fantômes”, mais même les soldats
réellement présents ne sont pas toujours payés et ne
reçoivent que rarement leurs rations.98 La combinaison
de soldats mal payés et des anciennes chaînes de
commandement parallèles constitue une situation
dangereuse à la veille des élections, qui se voient déjà en
train d’être compromises par les machinations des élites
politiques de Lubumbashi et de Kinshasa, et dont les
résultats pourraient être contestés dans la violence.
Les institutions congolaises créées pour assurer la bonne
gouvernance ont été stérilisées et sont en grande partie
négligées par la communauté internationale. Les réformes
judiciaires tardent par manque de ressources, mais aussi
de volonté politique. La plupart des juges des juridictions
supérieures de Kinshasa (y compris ceux de la cour
suprême et du conseil supérieur de la magistrature) ont été
nommés par Joseph Kabila avant que la transition ne
commence. Des lois régissant le Haut Conseil et le statut
des juges ont été bloquées pendant plus d'une année, et les
juges sont ainsi toujours sous le contrôle du ministère de
la justice. La conséquence de cette politisation de la
magistrature est que toute action judiciaire impliquant de
hauts fonctionnaires et des commandants militaires reste
difficile. Aucune enquête sérieuse n’a encore été menée
en RDC sur l'incident de Kilwa, ni aucune arrestation
ordonnée suite à la tentative de sécession alléguée. Tandis
que les cadres de la JUNAFEC ont été suspendus de leur
parti après leurs récentes déclarations incendiaires, ils n’ont
pas été formellement inculpés de discours d’incitation à la
haine.
La faiblesse des tribunaux a miné les initiatives louables
entreprises par le Parlement et la Cour des comptes. Par
exemple, suite à une enquête menée par une commission
parlementaire conduite par Grégoire Bakandeja, six
ministres et plusieurs fonctionnaires d’entreprises étatiques
ont été suspendus pour corruption en janvier 2005, et
leurs dossiers transmis au ministère public, mais aucun
acte d’accusation n’a été établi jusqu’à présent.99
Page 16
des ressources du secteur minier. Une commission
parlementaire dirigée par Christophe Lutundula et
soutenue par la Banque mondiale a produit un
rapport sur des contrats conclus pendant la guerre,
particulièrement pertinent pour la situation du Katanga. Il
examine si les contrats sont légaux et s’ils profitent au
développement national. Le mandat de cette commission
devrait être prolongé, même s’il ne couvre que des
contrats signés jusqu’en juin 2003, et il semblerait
que certaines entreprises passent outre les
recommandations de ce rapport en signant de nouvelles
conventions. En outre, ce rapport, qui a été soumis au
Parlement en juillet 2005, n'a pas encore été rendu
public. Certains politiciens ont essayé de l’étouffer, et
Lutundula a reçu des menaces de mort.100 Sans aucune
pression extérieure, il n'est même pas certain que ce
rapport sera discuté.
En attendant, la pression extérieure s’estompe. Le
secrétaire général de l'ONU a insisté pour que le Conseil
de sécurité fasse de la bonne gouvernance une condition
préalable aux élections, et il a proposé que les donateurs
créent un “groupe d'amis de la bonne gouvernance”, qui
se réunirait régulièrement à Kinshasa pour examiner les
allégations de corruption et coordonner les actions de
pression sur le gouvernement.101 Lors d'une réunion avec
les chefs des missions diplomatiques et avec ses viceprésidents fin octobre 2005, le président Kabila a rejeté
la proposition du groupe de donateurs. Beaucoup de
membres du CIAT considèrent que la corruption est un
mal nécessaire dont il ne faudra s’occuper qu’après
l’élection du nouveau gouvernement.102 Sur
recommandation des ambassades accréditées à Kinshasa,
le Conseil de sécurité a par la suite édulcoré le
renouvellement du mandat de la MONUC, abandonnant
le groupe de donateurs et limitant la capacité de la mission
à promouvoir la bonne gouvernance.
De même, l'impunité a permis à des fonctionnaires de
continuer à se servir de leur poste afin de s’approprier
Il faut que les donateurs revoient leur politique d’
“appropriation congolaise” et subordonnent l’aide à de
plus grandes réformes. Ils n’ont pas beaucoup fait pour
s’assurer que leur contribution totalisant plus de 50 pour
cent du budget de l’Etat ne soit ni gaspillée, ni détournée,
contrairement au Libéria, par exemple, où l'aide doit être
conditionnée à l'acceptation d'un programme comportant
une stricte surveillance des recettes.103 Parlant de priorités,
un diplomate en poste à Kinshasa a indiqué que la
98
100
Entretien de Crisis Group avec des diplomates, Kinshasa,
novembre 2005. L’armée a continué de payer les 352 000 soldats
de l’estimation de 2004, même si son propre recensement portait
les effectifs réels à 244 000, et un recensement de l’Afrique du
Sud, qui n’est pas encore achevé, estime les effectifs militaires
entre 150 000 et 160 000.
99
Entretien de Crisis Group avec le vice-président Azarias
Ruberwa, Kinshasa, juin 2005.
Entretien de Crisis Group avec un diplomate, Kinshasa,
novembre 2005.
101
“Rapport spécial du Secrétaire général sur les élections”,
S/2005/320, 26 mai 2005.
102
Entretiens de Crisis Group avec des diplomates à New
York, Bruxelles, Paris et Kinshasa.
103
The Governance Economic Management Assistance
Program (GEMAP).
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
corruption est un problème qui a existé au Congo pendant
des décennies, et qui ne sera pas réglé en quelques mois.
Selon lui, il faut d’abord terminer les élections, avoir un
gouvernement plus légitime et ensuite parler de la bonne
gouvernance et de l’impunité.104
Ce raisonnement est biaisé. Les niveaux actuels de
corruption et d'abus de pouvoir constituent en eux-mêmes
des sources d'instabilité qui menacent la transition et
pourraient compromettre les élections. En l’absence
d’institutions légales capables d’appliquer la loi électorale,
l'intimidation et la corruption mineront les résultats, et si
la question de détournement n'est pas réglée au préalable,
l'État congolais ne pourra probablement jamais mettre
au point un budget viable, sans parler de sa bonne
exécution. Les donateurs ne sont pas impuissants: ils
peuvent, par exemple, faire pression sur leurs propres
entreprises nationales opérant en RDC afin qu’elles
respectent les lois congolaises et les normes internationales,
et qu’elles appliquent un minimum de transparence et de
responsabilité.105
En outre, s'il y avait une réelle volonté politique, la
communauté internationale serait maintenant en meilleure
position d’évoquer la question de bonne gouvernance: les
signataires des accords de paix ont convenu que le CIAT
serait une institution officielle de la transition ayant mandat
de conseiller le gouvernement. Après les élections, cette
opportunité sera compromise car les donateurs, ayant
exprimé leur volonté de réduire le budget ainsi que les
effectifs de la MONUC, seront en position de faiblesse.106
104
Entretien de Crisis Group avec un diplomate, Kinshasa,
octobre 2005.
105
En Belgique, par exemple, l’intervention et la protection du
bureau de Ducroire, l’agence nationale qui assure les entreprises
contre les risques politiques et commerciaux dans les pays en
développement, devraient être subordonnées à leur respect de la
bonne gouvernance au Congo.
106
Entretien de Crisis Group avec des diplomates, Kinshasa,
octobre et novembre 2005.
Page 17
IV. CONCLUSION
Le Katanga risque d’être une des régions les plus violentes
de la RDC pendant la saison électorale. Le président
Kabila va y rencontrer des adversaires de taille provenant
de partis comme l’UDPS ou d’organisations telle que
Solidarité katangaise; d’autre part, la démobilisation des
Maï-Maï dans le nord et le centre de la province n’a
pas fait de progrès tangible. Le déploiement d’unités
intégrées de l’armée dans les zones urbaines et le nord,
avec l’appui des troupes et de la police de la MONUC,
pourrait renforcer la sécurité pendant les élections et
faciliter la démobilisation, même si les niveaux de troupes
sont trop bas pour faire face à toutes les menaces.
Cependant, comme ailleurs dans le pays, les problèmes
du Katanga ont été causés par la faiblesse et la corruption
des institutions de l’État. La communauté internationale
s’est concentrée sur la gestion des crises à l’est du pays,
au cas par cas. Le fait qu’elle ait moins insisté sur la
responsabilité politique et l’État de droit a permis aux
élites au pouvoir de manipuler l’appareil de l’État, y
compris l’armée, avec des résultats comme l’incident de
Kilwa, la manipulation d’une prétendue tentative de
sécession, ainsi que l’intimidation de l’UNAFEC.
On ne peut résoudre le problème posé par cet abus de
pouvoir qu’en renforçant l’indépendance et la capacité
des institutions démocratiques tels que les tribunaux, le
parlement et la presse. Les donateurs devraient mettre en
place des mécanismes pour lier leur soutien significatif à
la bonne gouvernance, en particulier dans le secteur
minier. Les entreprises internationales devraient mettre en
oeuvre, peut-être avec l’assistance du Bureau international
du travail (BIT), un code de bonne conduite en ce qui
concerne les conditions de vie et de travail des mineurs, et
collaborer avec la société civile congolaise afin de mettre
sur pied un fonds fiduciaire chargé de couvrir les besoins
de paiement équitable, de réinstallation, de droits fonciers,
de soins médicaux et de formation des mineurs artisanaux.
Les innovations constatées ailleurs tels que le processus
de Kimberly pour le diamant, le GEMAP au Libéria ainsi
que les initiatives d’affectation des recettes du pipeline
Tchad-Cameroun devraient offrir une fraîche inspiration
sur la gestion des vastes ressources naturelles de la RDC;
mais paradoxalement, il y a peu de débats examinant ces
possibilités.
Deux mois avant les élections, le Congo est bien loin des
buts fixés par les signataires de l’Accord global et inclusif
en 2002. L’intégration de l’armée traîne: fin 2005, seul
18,000 hommes, sur les quelques 160,000 que compterait
le pays étaient engagés dans le processus. Une bonne partie
de l’administration locale, des services de sécurité et de la
justice n’ont même pas encore commencé le processus
d’intégration, et de nombreux officiels en place avant
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
la transition restent au pouvoir. Plus important encore,
la corruption généralisée et l’abus exagéré du pouvoir
amènent à se demander si les élections peuvent produire
un gouvernement stable et légitime.
À maints égards, le Katanga symbolise tous les problèmes
qui se posent à l’échelle nationale. Il est vital de
s’atteler maintenant à ces derniers dans cette province,
dont les recettes minières constituaient jadis 50 à 80 %
Page 18
du budget national. La communauté internationale et les
autorités congolaises doivent adopter une vision plus
éclairée du processus de paix dans cette province clé afin
de prévenir la reprise des combats après les élections, et
permettre un véritable développement doublé d’une réelle
responsabilité démocratique.
Nairobi/Bruxelles, le 9 janvier 2006
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
Page 19
APPENDIX A
CARTE DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
CENTRAL AFRICAN REPUBLIC
Gemena
or i
Ekoli
KASAI
Bandundu L u kenie
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Kinshasa
Ilebo
Bulungu
Kenge
San
Bena
Mweka
KASAI
BANDUNDU
Kananga
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Kabinda
N
I
A
Kamina
U
Dilolo
mb
eze
Likasi
Lubumbashi
Solwezi
Kipushi
Sakania
Map No. 4007 Rev. 8
January 2004
UNITED NATIONS
Lake
Bangweulu
I
Ndola
ZAMBIA
Lake Malawi
The boundaries and names shown and the designations used
on this map do not imply official endorsement or acceptance
by the United Nations.
Za
Kasenga
M
MALAW
Luena
Kolwezi
T
Katanga
Plateau
Saurimo
CONGO
Lake
Mweru
I
a
ANGOLA
DEMOCRATIC
REPUBLIC OF THE
Mbeya
Lulu
Luanda
Lobito
M
Kapanga
Rukwa
Sumbawanga
ika
KATANGA
TANZANIA
Kabamba
Lu
vua
Moliro
Pweto
any
go
Kahemba
Mpala
Moba
Manono
ng
an
Mwene-Ditu
Tabora
UNITED
REPUBLIC
OF
Ta
s
ai
Kw
N'zeto
Kigoma
kuga Kalemie
Lu
Lualaba
Tshikapa
ATLANTIC
OCEAN
BURUNDI
Makobola
Kongolo
Lubao
Bujumbura
Uvira
Kasongo
Mamba
Lusambo
OCCIDENTAL
Kikwit
Butare
KIVU
MANIEMA
Kampala Jinja
Lake
Victoria
Lake
HA
Pointe-Noire
K INS
BAS-CONGO
Cabinda
Mbanza(ANGOLA) Boma Matadi Ngungu
SA
Kilembwe
Kibombo
ORIENTAL
u
kur
ilu
Kw
Brazzaville
Lodja
Kole
ai
SUD-
Lake
Kyoga
RWANDA
Kigali
Lake
Kivu
Bukavu
Kindu
Lake
Edward
Goma
U Punia
a
Lac
Mai-Ndombe
KIVU
T
Kutu
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Peneluta
Lubutu
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l in
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Inongo
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me
Ubundu
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mi
ma
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uap
N
Tsh
Lo
Kasese
S
NORDLu
Mbandaka
Liranga
Butembo
U
M
Boende
Lake
Albert
Beni
Kisangani
Yangambi
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EQUATEUR
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PROVINCE
ORIENTALE
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Bolomba
300 km
100
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Lisala Bumba
il
0
200
Ouesso
Lu
100
Imese
Impfondo
National capital
District capital
City, town
Major airport
Libreville
International boundary
District boundary
Main road
Secondary road
Railroad
Buta
Aketi
ala
ong
Faradje
U ele
Businga
A
CONGO
Bondo
Gbadolite
Libenge
SUDAN
Juba
B
Zongo
DEMOCRATIC
Yaoundé
REPUBLIC OF THE
0
Bangassou
Ubang
i
Bangui
Department of Peacekeeping Operations
Cartographic Section
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique N° 103, le 9 janvier 2006
APPENDIX B
CARTE DE LA PROVINCE DU KATANGA
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Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
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ANNEXE C
GLOSSAIRE
Accord global et inclusif
Accord de paix signé entre les belligérants congolais à Prétoria, en décembre 2002
AMGI
Agence multilatérale de garantie des investissements, une branche de la Banque mondiale qui
couvre le risque politique
ANC
Armée nationale congolaise, l’ancienne armée des rebelles du RCD appuyés par le Rwanda
BIT
Bureau international du travail
CIAT
Comité international pour l’accompagnement de la transition, un groupe des principaux acteurs
internationaux en RDC, une institution formelle du gouvernement de transition basé à Kinshasa
CNS
Conférence nationale souveraine, convoquée en 1991-1992 par Mobutu pour préparer la transition vers
la démocratie
CONACO
Confédération nationale du Congo , un parti politique d’aujourd’hui dirigé par André Tshombe
CONADER
Commission nationale de démobilisation et de réinsertion, une institution gouvernementale
responsable de la démobilisation
CONAKAT
Confédération nationale du Katanga, le parti politique sécessionniste de Moïse Tshombe dans
les années 1960
EUSEC
Commission consultative de l’Union européenne sur la sécurité, une équipe technique de l’UE qui
donne des conseils en matière de réforme de l’armée
FAC
Forces armées congolaises, l’ancienne armée de Laurent Kabila, et plus tard de son fils, Joseph
Kabila
FAP
Forces armées populaires, les milices locales des Maï-Maï dans le nord Katanga
FARDC
Forces armées de la République démocratique du Congo, armée intégrée composée des anciens
belligérants qui participent maintenant au gouvernement de transition
Gécamines
Générale des carrières et des mines, une société minière publique du Katanga
GEMAP
“Governance and Economic Management Assistance Program”, une initiative de coopération
internationale et de contrôle financier au Libéria
Gendarmes katangais
Les forces armées de l’État sécessionniste de Moïse Tshombe
GSSP
Groupe spécial de sécurité présidentielle, la garde présidentielle de Joseph Kabila
JEBAKAT
Jeunesse Balubakat, une milice de jeunes de l’État sécessionniste du nord du Katanga, 1960-1961
JUFERI
Jeunesse de l’UFERI, une milice responsable de purification ethnique dans les années 1990
JUNAFEC
Jeunesse de l’UNAFEC, un grand parti politique du Katanga
LICOF
Ligue contre la corruption et la fraude
LISCO
Ligue congolaise pour la sauvegarde des droits des consommateurs
Luba
Communauté ethnique de la province du Kasaï, dont de nombreux membres ont émigré vers les
zones urbaines du Katanga
Lubakat
Communauté ethnique du Nord Katanga, à laquelle appartiennent Laurent et Joseph Kabila
Maï-Maï
Force de défense locale, d’environ 5,000 à 8,000 au Nord Katanga, qui recrute souvent suivant
l’appartenance tribale et fait preuve de croyances religieuses traditionnelles
MLC
Mouvement pour la libération du Congo, ancien mouvement rebelle dirigé par Jean-Pierre
Bemba
MONUC
Mission de l’Organisation des Nations Unies au Congo, établie pour la première fois en 1999, et
maintenant forte de 17,000 Casques bleus
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
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MRC
Mouvement révolutionnaire congolais, une milice du district de l’Ituri
MRLK
Mouvement révolutionnaire pour la libération du Katanga, un petit groupe rebelle qui a occupé
Kilwa en octobre 2004
OFIDA
Office des douanes et accises
PAREC
Programme oecuménique de paix, de transformation des conflits et de réconciliation, un groupe
ecclésiastique qui a mis en place son propre programme de démobilisation au Katanga
PMDR
Programme multi-pays de démobilisation et de réinsertion
PPRD
Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie, le parti politique de Joseph Kabila
Radio Okapi
Station radio de l’ONU en RDC
RCD
Rassemblement congolais pour la démocratie, ancien mouvement rebelle dirigé par Azarias
Ruberwa
RSF
Rassemblement des socialistes fédéralistes, parti politique katangais dirigé par Lunda Bululu
RTIV
Radio Télévision Inter Viens et Vois, station de télévision locale de Lubumbashi
RTNC
Radio-télévision nationale congolaise, une institution publique
SNCC
Société nationale des chemins de fer du Congo
Solidarité katangaise ONG dirigée par des sudistes, engagée dans l’éducation civique au Katanga, qui pourrait
rallier l’opposition à Kabila lors des élections
SOMIKA
Société minière du Katanga, société privée qui exploite la cassitérite et l’hétérogénite
Tigres katangais Les descendants des Gendarmes katangais, qui se sont battus pour la sécession du Katanga en 1960 puis
s’enfuirent en Angola
UDPS
Union pour la démocratie et le progrès social, un grand parti d’opposition dirigé par Étienne
Tshisekedi
UFERI
Union des fédéralistes et des républicains indépendants, parti politique responsable de purification
ethnique au Katanga dans les années 1990
ULD
Union des libéraux pour la démocratie, un parti politique du Katanga dirigé par Katebe Katoto
UNADEF
Union nationale des démocrates fédéralistes, un parti politique du Katanga dirigé par Christian
Mwando
UNAFEC
Union des nationalistes et des fédéralistes du Congo, un parti politique du Katanga dirigé par
Honorius Kisimba Ngoy
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
Page 23
ANNEXE D
A PROPOS DE L'INTERNATIONAL CRISIS GROUP
International Crisis Group (Crisis Group) est une organisation
non-gouvernementale indépendante à but non lucratif employant
plus de 110 personnes réparties sur cinq continents. Ceux-ci
conçoivent des analyses de terrain et un plaidoyer de haut
niveau dans un but de prévention et de résolution des conflits.
L'approche de Crisis Group est fondée sur des recherches
effectuées sur le terrain par des équipes d'analystes postés dans
divers pays à risque ou à proximité. A partir des informations
recueillies et des évaluations de la situation sur place, Crisis
Group rédige régulièrement des rapports analytiques rigoureux
contenant chacun une série de recommandations pratiques
destinées aux décideurs internationaux. Crisis Group publie
également "CrisisWatch", un bulletin mensuel de 12 pages
offrant une mise à jour régulière et succincte des situations de
conflits les plus importantes, ou de conflits potentiels, partout
dans le monde.
Les rapports et briefings de Crisis Group sont largement diffusés
par courrier électronique et versions imprimées à de nombreux
responsables au sein des ministères des Affaires Etrangères
et organisations internationales, et rendus simultanément
accessibles au public via le site internet de l'organisation:
www.crisisgroup.org. Crisis Group travaille étroitement avec les
gouvernements et ceux qui les influencent, notamment les
médias, afin de les sensibiliser à ses analyses et recommandations
politiques.
Le Conseil d'Administration de Crisis Group - qui compte
d'éminentes personnalités du monde politique, diplomatique,
des affaires et des médias - s'engage directement à promouvoir
les rapports et recommandations auprès des décideurs politiques
du monde entier. Crisis Group est présidé par Lord Patten of
Barnes, ancien Commissaire européen aux Relations extérieures.
Gareth Evans, ancien Ministre australien des Affaires étrangères,
en est le Président Directeur Général depuis janvier 2000.
Crisis Group a son siège à Bruxelles et des bureaux de liaison à
Washington DC, New York, Londres et Moscou. De plus,
l'organisation dispose actuellement de quinze bureaux de terrain
(à Amman, Belgrade, Bishkek, Dakar, Douchambé, Islamabad,
Jakarta, Kaboul, Nairobi, Pretoria, Pristina, Quito, Séoul, Skopje
et Tbilissi), depuis lesquels les analystes de Crisis Group
couvrent plus de cinquante pays et territoires touchés par des
crises et répartis sur quatre continents. En Afrique, il s'agit de
l'Angola, le Burundi, la Côte d'Ivoire, l'Érythrée, l'Éthiopie, la
Guinée, le Libéria, l'Ouganda, la République Démocratique du
Congo, le Rwanda, le Sahel, le Sierra Leone, la Somalie, le
Soudan et le Zimbabwe; en Asie, de l'Afghanistan, la Birmanie/
Myanmar, le Cachemire, la Corée du Nord, l'Indonésie, le
Kazakhstan, la Kirghizie, le Népal, l'Ouzbékistan, le Pakistan,
le Tadjikistan et le Turkménistan; en Europe, de l'Albanie,
l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie,
le Kosovo, la Macédoine, la Moldavie, le Monténégro et la
Serbie; au Proche et Moyen-Orient, toute la région s'étendant
de l'Afrique du Nord à l'Iran; et enfin, en Amérique Latine, de
la Colombie, la région andine et Haïti.
Crisis Group est financé par des gouvernements, des fondations
caritatives, des sociétés et des donateurs privés. Les agences et
départements gouvernementaux qui financent actuellement Crisis
Group sont: l'Agence australienne pour le développement
international, l'Agence canadienne de développement international,
l'Agence des États-Unis pour le développement international,
l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie, l'Agence néozélandaise pour le développement international, le Centre
canadien de recherches pour le développement international, le
Département des Affaires étrangères et du Commerce
international du Canada, le Département des affaires étrangères
irlandais, le Département des affaires étrangères de la
République fédérale Suisse, le Département du RoyaumeUni pour le développement international, le ministère allemand
des Affaires étrangères, le ministère des Affaires étrangères de
la République Fédérale d'Autriche, le ministère belge des
Affaires étrangères, le ministère des Affaires étrangères de la
République de Chine (Taiwan), le ministère finlandais des
Affaires étrangères, le ministère français des Affaires étrangères,
le ministère des Affaires étrangères de la Principauté du
Liechtenstein, le ministère luxembourgeois des Affaires
étrangères, le ministère néerlandais des Affaires étrangères,
le ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni et du
Commonwealth, le ministère suédois des Affaires étrangères, le
ministère tchèque des Affaires étrangères, le ministère royal des
Affaires étrangères du Danemark et le ministère royal norvégien
des Affaires étrangères.
Les fondations et donateurs du secteur privé regroupent:
Atlantic Philanthropies, Carnegie Corporation of New York,
Compton Foundation, Ford Foundation, Fundação Oriente,
Fundación DARA Internacional, Bill & Melinda Gates
Foundation, William & Flora Hewlett Foundation, Hunt
Alternatives Fund, Korea Foundation, John D. & Catherine T.
MacArthur Foundation, Moriah Fund, Charles Stewart Mott
Foundation, Open Society Institute, Pierre and Pamela Omidyar
Fund, David and Lucile Packard Foundation, Ploughshares
Fund, Sigrid Rausing Trust, Rockefeller Foundation, Rockefeller
Philanthropy Advisors et la Sarlo Foundation of the Jewish
Community Endowment Fund.
Janvier 2005
De plus amples renseignements concernant Crisis Group sont disponibles sur notre site web: www.crisisgroup.org
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
Page 24
ANNEXE E
RAPPORTS ET BRIEFINGS DE CRISIS GROUP DEPUIS 2003
AFRIQUE
AFRIQUE AUSTRALE
Dealing with Savimbi’s Ghost: The Security and Humanitarian
Challenges in Angola, Rapport Afrique N°58, 26 février 2003
Zimbabwe: Danger and Opportunity, Rapport Afrique N°60,
10 mars 2003
Angola’s Choice: Reform Or Regress, Rapport Afrique N°61,
7 avril 2003
Decision Time in Zimbabwe, Briefing Afrique Nº15, 8 juillet
2003
Zimbabwe: In Search of a New Strategy, Rapport Afrique
Nº78, 19 avril 2004
Blood and Soil: Land, Politics and Conflict Prevention in
Zimbabwe and South Africa, Rapport Afrique Nº85, 17
septembre 2004
Zimbabwe: Another Election Chance, Rapport Afrique N°86,
30 novembre 2004
Post-Election Zimbabwe: What Next?, Rapport Afrique Nº93,
7 juin 2005
Swaziland: The Clock Is Ticking, Briefing Afrique Nº29, 14
juillet 2005
Zimbabwe's Operation Murambatsvina: The Tipping Point?,
Rapport Afrique Nº97, 17 août 2005
AFRIQUE CENTRALE
The Kivus: The Forgotten Crucible of the Congo Conflict,
Rapport Afrique N°56, 24 janvier 2003
A Framework For Responsible Aid To Burundi, Rapport
Afrique N°57, 21 février 2003
Les Rebelles Hutus Rwandais au Congo: Pour une Nouvelle
Approche du Désarmement et de la Réintégration, Rapport
Afrique N°63, 23 mai 2003 (aussi disponible en anglais)
Congo Crisis: Military Intervention in Ituri, Rapport Afrique
N°64, 13 Juin 2003
Tribunal pénal international pour le Rwanda: pragmatisme
de rigueur, Rapport Afrique N°69, 26 septembre 2003
Réfugiés et Déplacés au Burundi: Désamorcer la Bombe
Foncière, Rapport Afrique N°70, 7 octobre 2003
Réfugiés et Déplacés Burundais: Construire d’urgence un
Consensus sur le Rapatriement et la Réinstallation, Briefing
Afrique Nº17, 2 décembre 2003
Northern Uganda: Understanding and Solving the Conflict,
Rapport Afrique Nº77, 14 avril 2004
Fin de Transition au Burundi: Franchir le Cap, Rapport
Afrique Nº81, 5 juillet 2004 (aussi disponible en anglais)
Congo: s'éloigner du gouffre, Briefing Afrique Nº18, 7
juillet 2004, (aussi disponible en anglais)
Maintaining Momentum in the Congo: The Ituri Problem,
Rapport Afrique N°84, 26 août 2004
Élections au Burundi: Parier sur la paix, Briefing Afrique
Nº20, 9 décembre 2004 (aussi disponible en anglais)
Back to the Brink in the Congo, Briefing Afrique Nº21, 17
décembre 2004
Peace in Northern Uganda: Decisive Weeks Ahead, Briefing
Afrique N°22, 21 février 2005
The Congo's Peace is Failing: Crisis in the Kivus, Rapport
Afrique Nº91, 30 mars 2005
Shock Therapy for Northern Uganda's Peace Process, Briefing
Afrique Nº23, 11 avril 2005
The Congo: Solving the FDLR Problem Once and For All,
Briefing Afrique Nº25, 12 mai 2005
Building a Comprehensive Peace Strategy for Northern
Uganda, Briefing Afrique Nº27, 23 June 2005
Élections au Burundi: Reconfiguration radicale du paysage
politique, Briefing Afrique Nº31, 25 août 2005
A Congo Action Plan, Briefing Afrique N°34, 19 octobre 2005
AFRIQUE DE L’OUEST
Tackling Liberia: The Eye of the Regional Storm, Rapport
Afrique N°62, 30 avril 2003
The Special Court for Sierra Leone: Promises and Pitfalls of a
“New Model”, Briefing Afrique Nº16, 4 août 2003
Sierra Leone: The State of Security and Governance, Rapport
Afrique N° 67, 2 septembre 2003
Liberia: Security Challenges, Rapport Afrique N°71, 3 novembre
2003
Côte d'Ivoire: "The War Is Not Yet Over", Rapport Afrique
N°72, 28 novembre 2003
Guinée: Incertitudes autour d’une fin de règne, Rapport Afrique
N°74, 19 décembre 2003
Rebuilding Liberia: Prospects and Perils, Rapport Afrique N°75,
30 janvier 2004
Côte d'Ivoire: "Pas de Paix en Vue", Rapport Afrique N°82,
12 juillet 2004 (aussi disponible en anglais)
Liberia and Sierra Leone: Rebuilding Failed States, Rapport
Afrique N°87, 8 décembre 2004
Côte d'Ivoire: Le pire est peut-être à venir, Rapport Afrique
N°90, 23 mars 2005
Islamist Terrorism in the Sahel: Fact or Fiction?, Rapport
Afrique Nº92, 31 mars 2005
Guinée: Conjurer la descente aux enfers, Rapport Afrique
N°94, 13 juin 2005 (aussi disponible en anglais)
Liberia's Elections: Necessary but Not Sufficient, Rapport
Afrique N°98, 7 septembre 2005
Côte d'Ivoire: Les demi-mesures ne suffiront pas, Briefing
Afrique N°33, 12 octobre 2005
CORNE DE L'AFRIQUE
Sudan’s Oilfields Burn Again: Brinkmanship Endangers The
Peace Process, Briefing Afrique Nº13, 10 février 2003
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
Negotiating a Blueprint for Peace in Somalia, Rapport
Afrique N°59, 6 mars 2003
Sudan’s Other Wars, Briefing Afrique Nº14, 25 juin 2003
Sudan Endgame, Rapport Afrique N°65, 7 juillet 2003
Somaliland: Democratisation and its Discontents, Rapport
Afrique N°66, 28 juillet 2003
Ethiopia and Eritrea: War or Peace?, Rapport Afrique N°68,
24 septembre 2003
Sudan: Towards an Incomplete Peace, Rapport Afrique
N°73, 11 décembre 2003
Darfur Rising: Sudan's New Crisis, Rapport Afrique N°76,
25 mars 2004 (aussi disponible en arabe)
Biting the Somali Bullet, Rapport Afrique N°79, 4 mai 2004
Sudan: Now or Never in Darfur, Rapport Afrique N°80, 23
mai 2004 (aussi disponible en arabe)
Ultimatum Au Darfour: Nouveau Plan D’action
International, Rapport Afrique N°83, 23 août 2004 (aussi
disponible en anglais et arabe)
Sudan's Dual Crisis: Refocusing on IGAD, Briefing Afrique
Nº19, 5 octobre 2004
Somalia: Continuation of War by Other Means?, Rapport
Afrique N°88, 21 décembre 2004
Darfur: The Failure to Protect, Rapport Afrique N°89, 8 mars
2005 (aussi disponible en arabe)
A New Sudan Action Plan, Briefing Afrique Nº24, 26 avril
2005
Do Americans Care About Darfur?, Briefing Afrique Nº26, 1
juin 2005
Page 25
The AU's Mission in Darfur: Bridging the Gaps, Briefing
Afrique Nº28, 1 juin 2005
Counter-Terrorism in Somalia: Losing Hearts and Minds?,
Rapport Afrique Nº95, 11 juillet 2005
The Khartoum-SPLM Agreement: Sudan's Uncertain Peace,
Rapport Afrique Nº96, 25 juillet 2005
Garang's Death: Implications for Peace in Sudan, Briefing
Afrique Nº30, 9 août 2005 (aussi disponible en arabe)
Unifying Darfur's Rebels: A Prerequisite for Peace, Briefing
Afrique N°32, 6 octobre 2005 (aussi disponible en arabe)
The EU/AU Partnership in Darfur: Not Yet a Winning
Combination, Rapport Afrique N°99, 25 6 octobre 2005
Somalia’s Islamists, Rapport Afrique N°100, 12 décembre 2005
Ethiopia and Eritrea: Preventing War, Rapport Afrique N°101,
22 décembre 2005
Sudan: Saving Peace in the East, Rapport Afrique N°102, 5
janvier 2006
OTHER REPORTS AND BRIEFINGS
For Crisis Group reports and briefing papers on:
• Asia
• Europe
• Latin America and Caribbean
• Middle East and North Africa
• Thematic Issues
• CrisisWatch
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Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
Page 26
ANNEXE F
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE CRISIS GROUP
Présidence
Lord Patten of Barnes
Wesley Clark
Ancien commissaire européen aux relations extérieures, Royaume-Uni
Pat Cox
Président Directeur Général
Gareth Evans
Ancien Ministre des Affaires Étrangères d'Australie
Comité de Direction
Morton Abramowitz
Ancien Secrétaire d'État adjoint américain; ancien Ambassadeur
américain en Turquie
Ancien Commandant suprême des forces alliées de l'OTAN, Europe
Ancien Président du Parlement européen
Ruth Dreifuss
Ancienne Présidente de la Suisse
Uffe Ellemann-Jensen
Ancien Ministre des Affaires Étrangères du Danemark
Mark Eyskens
Ancien Premier Ministre de Belgique
Leslie H. Gelb
Emma Bonino
Président émérite du Conseil des Relations étrangères, États-Unis
Membre du Parlement européen; ancien Commissaire européen
Bronislaw Geremek
Cheryl Carolus
Ancien Ministre des Affaires Étrangères de Pologne
Ancien Haut Commissionnaire Sud africain auprès du RoyaumeUni; ancien Secrétaire Général de l'ANC
Frank Giustra
Maria Livanos Cattaui*
I.K. Gujral
Ancien Secrétaire Général, Chambre de Commerce Internationale
Ancien Premier Ministre de l'Inde
Yoichi Funabashi
Carla Hills
Correspondant diplomatique et journaliste, Asahi Shimbun, Japon
William Shawcross
Ancien Secrétaire d'État au logement, ancien Représentant de du
Commerce Extérieure, États-Unis
Journaliste et auteur, Royaume-Uni
Lena Hjelm-Wallén
Stephen Solarz*
Ancien Premier Ministre Adjoint et Ministre des Affaires
Etrangères, Suède
Ancien Membre du Congrès américain
George Soros
Président, Open Society Institute
William O. Taylor
Chairman, Endeavour Financial, Canada
James C.F. Huang
Secrétaire Général Adjoint auprès du Président, Taiwan
Swanee Hunt
Président émérite, The Boston Globe, États-Unis
*Vice-Chair
Fondateur et Président de Women Waging Peace; ancien
Ambassadeur des États-Unis en Autriche
Adnan Abu-Odeh
Ancien conseiller politique auprès du Roi Abdullah II et Roi Hussein;
ancien Représentant Permanent de la Jordanie aux Nations Unies
Rapporteur Spécial des Nations Unis pour les exécutions
extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires; ancien Président de la
Commission des Droits de l'Homme au Pakistan
Kenneth Adelman
Shiv Vikram Khemka
Ancien Ambassadeur américain et Directeur d'agence du contrôle
des armes et du désarmement, États-Unis
Fondateur et Directeur Exécutif (Russie) du Groupe Sun, Inde
Ersin Arioglu
Fondateur et Président honoraire de America Online, inc. (AOL)
Membre du Parlement de la République Turque; Président, Yapi
Merkezi, Turquie
Bethuel Kiplagat
Diego Arria
Ancien Secrétaire Permanent, Ministère des Affaires Etrangères,
Kenya
Ancien Ambassadeur du Venezuela
Zbigniew Brzezinski
Ancien Conseiller à la Sécurité nationale auprès du Président des
Etats-Unis
Kim Campbell
Secretary General, Club of Madrid; former Prime Minister of Canada
Victor Chu
Président du First Eastern Investment Group, Hong Kong
Asma Jahangir
James V. Kimsey
Wim Kok
Ancien Premier Ministre des Pays Bas
Trifun Kostovski
Membre du Parlement de Macédoine; fondateur de Kometal Trade
Gmbh
Elliott F. Kulick
Président, Pegasus International, États-Unis
Katanga: La crise oubliée de la RDC
Crisis Group, Rapport Afrique n° 103, le 9 janvier 2006
Page 27
Joanne Leedom-Ackerman
Mohamed Sahnoun
Romancière et journaliste, États-Unis
Conseiller spécial auprès du Secrétaire Général des Nations Unies
pour l’Afrique
Todung Mulya Lubis
Juriste spécialiste des droits de l'homme et auteur, Indonésie
Ghassan Salamé
Ayo Obe
Ancien Ministre, Liban; Professeur des Relations Internationales, Paris
President, Civil Liberties Organisation, Nigeria
Salim A. Salim
Christine Ockrent
Journaliste et auteur, France
Ancien Premier Ministre tanzanien, ancien Secrétaire Général de
l’Organisation de l’Unité Africaine.
Friedbert Pflüger
Douglas Schoen
Foreign Policy Spokesman of the CDU/CSU Parliamentary Group
in the German Bundestag
Partenaire Fondateur de Penn, Schoen & Berland Associates, ÉtatsUnis
Victor M Pinchuk
Pär Stenbäck
Membre du Parlement ukrainien; fondateur de Interpipe Scientific
and Indsutrial Production Group
Ancien Ministre des Affaires Étrangères, Finlande
Thorvald Stoltenberg
Surin Pitsuwan
Ancien Ministre des Affaires Étrangères, Norvège
Ancien Ministre des Affaires Étrangères de la Thaïlande
Grigory Yavlinsky
Itamar Rabinovich
Président du Parti Yabloko et de sa représentation à la Douma, Russie
Président de l'Université de Tel-Aviv; ancien Ambassadeur israélien
aux États-Unis; ancien Chef des négociations avec la Syrie
Uta Zapf
Fidel V. Ramos
Présidente de la Commission pour le désarmement, le contrôle et la
non-prolifération des armes au Bundestag, Allemagne
Ancien Président des Philippines
Ernesto Zedillo
Lord Robertson of Port Ellen
Ancien Président du Mexique; Directeur, Yale Center for the Study
of Globalization
Ancien Secrétaire Général de l'OTAN; ancien Ministre de Défense,
Royaume-Uni
CONSEIL GÉNÉRAL INTERNATIONAL
Le Conseil Général International est constitué de donateurs privés qui contribuent régulièrement, par leur savoir et leur
expérience, aux activités de Crisis Group.
Rita E. Hauser (Chair)
Marc Abramowitz
Anglo American PLC
APCO Worldwide Inc.
Patrick E. Benzie
BHP Billiton
Harry Bookey and Pamela
Bass-Bookey
John Chapman Chester
Chevron
Peter Corcoran
Credit Suisse
John Ehara
Equinox Partners
Dr. Konrad Fischer
Iara Lee & George Gund III
Foundation
JP Morgan Global Foreign
Exchange and Commodities
George Kellner
George Loening
Douglas Makepeace
Anna Luisa Ponti
Quantm
Baron Ullens
Michael L. Riordan
Sarlo Foundation of the Jewish
Community Endowment Fund
Tilleke & Gibbins
Stanley Weiss
Westfield Group
Don Xia
Yasuyo Yamazaki
Sunny Yoon
CONSEILLERS
Les Conseillers sont d'anciens membres du Conseil d'Administration qui maintiennent leur collaboration avec Crisis Group et qui
sont ponctuellement sollicités pour apporter leurs conseils et leur soutien à Crisis Group
Oscar Arias
Zainab Bangura
Christoph Bertram
Jorge Castañeda
Eugene Chien
Gianfranco Dell'Alba
Alain Destexhe
Marika Fahlen
Stanley Fischer
Malcolm Fraser
Max Jakobson
Mong Joon Chung
Allan J. MacEachen
Barbara McDougall
Matt McHugh
George J. Mitchell
Cyril Ramaphosa
Michel Rocard
Volker Ruehe
Simone Veil
Michael Sohlman
Leo Tindemans
Ed van Thijn
Shirley Williams
Janvier 2006