La faim du Pétrole
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La faim du Pétrole
« La faim du pétrole » Une civilisation de l’énergie vue par des géologues (Pierre Mauraud, Pascal Breton et Patrick De Wever) (Éditions edp sciences) Un des mérites de ce livre est de montrer la complexité des problèmes posés par la production et la consommation de l’énergie sous toutes ses formes et, principalement, sous ses formes fossiles. Un autre mérite est de nous fournir des données chiffrées et des explications de spécialistes qui nous sont nécessaires pour élaborer une opinion la plus objective possible. Il est écrit par des professionnels exerçant, pour deux d’entre eux, dans le secteur privé (Total) et dans le secteur universitaire. Le texte qui suit tend à dégager les principaux messages de l’ouvrage, mais ne prétend nullement être un résumé exhaustif et n’a pour objectif que de vous donner envie de lire. 1-Energie, vie et civilisation Ce premier paragraphe insiste sur le rôle de l’énergie dans l’apparition de la vie et de son entretien, ainsi que dans le développement des civilisations. Si l’on excepte les quelques formes de vie assujetties à la chaleur du noyau central de la planète (fonds marins), toute forme de vie sur terre utilise directement ou indirectement le rayonnement émis par la centrale thermonucléaire qu’est le soleil. Cette énergie est utilisée par les plantes grâce à la photosynthèse. Les formes de vie plus évoluées l’utilisent sous une forme concentrée dans la chaîne alimentaire : végétaux, animaux... L’espèce humaine a très tôt utilisé cette énergie sous ses formes les plus accessibles : bois, vent, cours et chutes d’eau. Puis, sous ses formes plus concentrées : charbon, gaz, pétrole. Le retour à l’utilisation des énergies renouvelables des origines se fait avec des moyens technologiques accrus : électricité photovoltaïque, éolienne, énergie solaire thermique… Après avoir développé, les processus décrits ci-dessus, les auteurs rappellent qu’il n’y a pas de création d’énergie. Pour lutter contre l’entropie, c’est-à-dire se maintenir et se développer, les organismes et les systèmes doivent dégrader des formes d’énergie : c’est ce que nous appelons improprement « consommer de l’énergie ». 2- Energie et pétrole Entre 1965 et 2007, la consommation mondiale d’énergie a presque triplé. Les sources d’énergies fossiles, hors nucléaire, ( pétrole, charbon, gaz) représentent 87% du total dont 30% pour le pétrole. Le nucléaire et les renouvelables (solaire, éolien et hydraulique) se partagent le complément, soit 13%. Si le pétrole est utilisé depuis la plus haute Antiquité, son exploitation industrielle ne débute qu’à partir du milieu du XIX ème siècle avec pour principale utilisation l’éclairage, se substituant ainsi à l’huile de baleine. Se constitue également pendant cette période, le premier cartel pétrolier, la Standard Oil qui intègre, en finale, toutes les activités de la chaîne de production, transformation et distribution. Puis, grâce à sa haute densité énergétique, le pétrole devient la source d’énergie principale des moyens de transport (excepté le rail) et produit stratégique. Se constituent alors les grandes compagnies pétrolières anglo-saxonnes (le Sept Sœurs) étroitement associées aux enjeux géostratégiques des nations dont elles sont issues. L’OPEP, qui regroupe les principaux pays producteurs, se constitue en début des années 70 et contrôle, maintenant, la plus grande partie de la production mondiale. Il existe une étroite corrélation entre le prix du pétrole et les crises géopolitiques et économiques qui ont provoqué les chocs pétroliers dont l’histoire est détaillée. Sont également évoquées les implications supposées ou réelles des grandes Compagnies pétrolières internationales dans les conflits ayant pour objet le pétrole, ainsi que dans les coopérations avec des régimes peu recommandables. Les techniques d’exploitation du pétrole, du gaz et, plus récemment du gaz et d’huile de schiste (ou, plus exactement: de « roche mère ») sont examinées sous l’angle de leur impact sur l’environnement. 3- Energie et économie Les pays de l’OPEP contrôlent la production de la fin du XXe siècle et l’ajustent à la demande mondiale. La recherche et la production constituent le cœur du métier de l’industrie pétrolière et mobilisent 80 à 90% des investissements qui sont en constante augmentation (50 milliards de dollars pour un seul champ d’exploitation au Kazakhstan). Aussi, seules les grandes compagnies sont capables de supporter la baisse des prix qu’entraîne la baisse des consommations (crise économique de 2008). Les grandes Compagnies émanent maintenant des états producteurs ; la plus grande étant la Saoudi Aramco (Arabie Saoudite) en termes de production et de réserves. Le pétrole de référence est le BRENT (pétrole de la mer du Nord) à partir duquel sont établis les prix des autres pétroles en fonction de leurs caractéristiques comparées. Un graphique montre une étroite corrélation entre ce prix et la production des pays de l’OPEP. Une analyse des prix du baril et de l’essence à la pompe analyse de façon détaillée les dépenses et les revenus de chacun des intervenants : pays producteur, compagnie pétrolière, pays consommateur. Il en ressort que le pays consommateur en retire 60% du prix de vente du combustible final. Suit un historique des découvertes des gisements avec, à partir des années 50, le début de l’exploitation des gisements en mer (Mer du Nord, ….) plus coûteux à prospecter et à exploiter. À partir de la fin du XXe siècle, la taille des gisements découverts et leur nombre diminue, alors que la consommation mondiale augmente ; ce qui laisserait présager à plus ou moins long terme un épuisement des ressources disponibles. Répondre à cette interrogation nécessite une évaluation des réserves potentielles qui est faite après un exposé technique de la morphologie des differents types de gisements de pétrole et de gaz. Il semblerait donc qu’il n’y aura pas de chute brutale de la production, mais plus vraisemblablement, un plateau légèrement décroissant qui ne suivrait pas la croissance de la demande au rythme actuel. Si l’on ajoute les ressources non conventionnelles (huile et gaz de schiste ou plus exactement de « roche-mére » ) les ressources potentielles sont nettement plus importantes. Là encore, l’évaluation repose sur des données géologiques après un nouvel exposé des techniques de prospection et d’extraction. En économisant, nous aurions encore du pétrole pour 50 à 150 ans, du gaz pour 100 à 200 ans et du charbon pour environs 500 ans Pour autant il ne faut pas en conclure que l’avenir énergétique à court et moyen terme repose sur les énergies fossiles. Des limitations d’origine économiques et environnementales imposent une autre orientation dès maintenant. 4- énergies fossiles et climat Il ne fait plus de doute, sauf pour les climato septiques, que la consommation des énergies fossiles contribue au réchauffement climatique consécutif à l’émission de CO2 (les énergies fossiles y contribuent pour 56 pour cent). Lequel contribue à l’accroissement de l’effet de serre dans l’atmosphère. D’autres sources naturelles et artificielles de gaz à effet de serre (dont le méthane) sont passées en revue et détaillées. Si nous voulons limiter les émissions de CO2, il nous faudra faire appel à toute une panoplie de mesures: efficacité énergétique accrue, modification du mode de vie des pays les plus consommateurs par habitant (USA, Europe,..), recours rapide aux énergies renouvelables non-émettrices de CO2, technologies nouvelles (captation de CO2 à la source),…. Compte tenu de l’accroissement de la population mondiale et du développement de certains pays les plus pauvres, il est évident que le simple maintient de la quantité de CO2 émise annuellement à son niveau actuel pendant les deux ou trois décennies à venir demandera des efforts considérables. Un graphique illustre de façon évidente les disparités importantes des consommations d’énergie par habitant depuis les années 60. Un habitant des USA consomme, à notre époque et en moyenne, 5 à 6 fois plus qu’un chinois et deux fois plus qu’un européen. 5-Quelles énergies pour demain ? D’ici 2030, la consommation mondiale d’énergie devrait croître de 40 pour cent. Et, quels que soient les efforts accomplis pour le développement des énergies renouvelables, elle sera assurée en grande partie par les énergies fossiles. Le pétrole est essentiellement utilisé pour les transports, grâce à la très forte densité énergétique des carburants qu’il produit. Les véhicules électriques ne font que déplacer le problème dans la mesure où l’électricité n’est pas une source d’énergie primaire. Le gaz et le charbon sont essentiellement utilisés pour produire de l’électricité. Les énergies renouvelables (essentiellement hydraulique) représentent (13 ? )14 pour cent du total. Les importantes réserves de gaz et de pétrole non conventionnels (de rochemére) non encore exploitées deviennent économiquement exploitables et pourraient, par ailleurs, assurer l’indépendance économique de certains pays (voir les USA). Malgré les dommages qu’une exploitation sans précautions pourrait causer à l’environnement, la tentation sera grande de les utiliser. Sont ensuite passées en revue les différentes énergies renouvelables (biomasse, hydroélectriques, solaires, éolienne, géothermie) qui progressent de 3 pour cent par an. Elles sont déclarées par les auteurs : utiles, nécessaire et inévitables. Elles posent également des problèmes d’acceptabilité par les populations. L’énergie nucléaire d’origine non fossile (15 pour cent de l’électricité mondiale) est très contestée, mais n’est pas productrice de CO2 pendant la phase de production d’électricité. Conclusion Dans ces quelques pages, les auteurs rappellent les tendances lourdes exposées précédemment et appellent à une mobilisation de tous les moyens disponibles dans tous les secteurs de la société. JC Fourny pour ICDD Le 28 septembre 2013