Une autre idée de la société ? (01)

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Une autre idée de la société ? (01)
Index d'articles mis à jour le 04 Septembre 2013
Une autre idée de la société ? (01)
➫ 01. Devoirs de vacances pour les écolos : moins de politique, plus de lecture Rue89, 07.07.2013
➫ 02. Perception du risque et participation du public - Ministère de la Santé (portail)
➫ 03. René Passet : "Il faut prendre du recul pour voir qu’un autre monde est en train
de naître" - Basta!, 13.05.2013
➫ 04. Détroit, laboratoire du monde d’après le néolibéralisme - Basta!, 04.06.2013
➫ 05. "Strike debt" : un plan de sauvetage du peuple par le peuple - Basta!,
09.04.2013
➫ 06. Caroline Delboy, cool à facettes - Terra Eco, 24.04.2013
➫ 07. Eduquer au XXIe siècle - Michel SERRES, Le Monde, 05.03.2011
➫ 08. La troisième révolution industrielle et ses 3 piliers - ERH2, Bretagne
Observatoire, Mai 2013
➫ 09. There Are Good Alternatives to US Capitalism, But No Way to Get There - Alter
Net, 24.07.2013
➫ 10. How Successful Cooperative Economic Models Can Work Wonderfully…
Somewhere Else - Alter Net, 23.07.2013
➫ 11. After We Stop the Machine, How Do We Create a New World? - Alter Net,
➫ 12. Jardins, débrouille, partage : comment Detroit redémarre - Terra Eco, 27.07.2013
➫ 13. How Immigration Could Potentially Save Bankrupt Detroit - Alter Net, 24.07.2013
➫ 14. We'd All Be Much Wealthier If We Acted Like a Society—Instead We Prop Up
the Private Wealth of a Small Number of Elites - Alter Net, 23.08.2013
➫ 15. La croissance, leurre du bien-être - Libération, 25.08.2013
➫ 16. The Real Story of Detroit's Economy -- Good Things Are Really Happening in
Motown - Alter Net, 02.09.2013
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PHILO
07/07/2013 à 09h21
Sophie Caillat | Journaliste
01. Devoirs de vacances pour les
écolos : moins de politique, plus
de lecture
Alors que les écologistes ont plus que jamais
le blues, nous avons proposé à la philosophe
Catherine Larrère de nous proposer un choix
de lectures pour revenir aux fondamentaux de
l’écologie, la "science de la maison", ou l’art
de vivre ensemble sur une même planète.
Pour vous concocter cette nourriture intellectuelle, nous avons choisi
cette jeune retraitée de l’université Paris-I car elle vient de prendre la
présidence de la Fondation de l’écologie politique (un think tank rattaché
à Europe Ecologie - Les Verts).
Spécialiste de philosophie morale et politique, Catherine Larrère a surtout
travaillé sur les questions éthiques et environnementales. Elle est
notamment l’auteure de "Les philosophies de l’environnement" (PUF,
1997), et "Du bon usage de la nature. Pour une philosophie de
l’environnement" (Champs Flammarion, 2009).
la Fondation de
l’écologie politique
C’EST QUI ?
La fondation de
l’Ecologie politique,
inaugurée le 28 juin
est vice-présidée par
Lucile Schmid et son
conseil
de
surveillance compte
quatre membres
d’EELV sur douze :
Jean-Paul Besset,
Yves Cochet,
Sandrine Rousseau
et Alain Lipietz.
Selon elle, trois auteurs résument les grandes questions posées par
l’écologie politique. Elle nous explique pourquoi elle les a choisis et quelle résonance ils ont jusqu’à
aujourd’hui.
Piles de livres (Ryan Hyde/Flickr/CC)
➪ Thoreau : repenser notre rapport à la nature
André Gorz : l’écologie comme transformation du monde
Hans Jonas : le principe de précaution
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Thoreau : repenser notre rapport à la nature
Couverture de Walden (Wikimedia commons)
Catherine Larrère : Henry David Thoreau est surtout connu pour avoir,
au milieu du XIXe siècle, tourné le dos à la civilisation : pendant deux
ans, il est parti vivre une vie frugale et solitaire dans les bois, au bord
d’un étang, muni seulement d’une charrette et de quelques outils. Dans
"Walden ou La vie dans les bois", il décrit cette existence en portant une
attention continue à ses rapports à la nature.
Thoreau a dit toute l’importance du sauvage dans la préservation de
notre monde, il est l’un des premiers à avoir recommandé la protection de
la nature sauvage ou "wilderness".
Il s’est aussi élevé contre l’esclavage et a dénoncé l’extermination des
Indiens, comme la guerre impérialiste menée par les Etats-Unis contre le
Mexique. Refusant de payer ses impôts, il a passé une nuit en prison et a
justifié sa position dans son essai "De la désobéissance civile" publié en
1849 (et maintes fois republié depuis).
Cette rencontre entre défense de la nature et revendication démocratique
fait de Thoreau un des fondateurs de l’écologie politique.
De Pachamama à José Bové
Couverture du livre
La quête de Thoreau d’une vie plus sobre, moins attachée aux objets, a
eu une postérité gigantesque :
➪ dans le développement des éthiques environnementales qui ont mis
en avant la dimension morale de notre rapport de la nature, sa valeur
intrinsèque. A la suite de Thoreau, Aldo Leopold, un forestier américain
de la
première moitié du XXe siècle, a lui aussi exposé dans l’ "Almanach d’un
comté des sables" (1948), une écologie à la première personne, où on le
voit chassant, pêchant, décrivant ses observations de la vie dans la
nature, et dont il tire la leçon dans la première formulation explicite d’une
éthique de nos relations avec la nature, la "Land ethic" :
"Une chose est juste lorsqu’elle tend à préserver l’intégrité, la stabilité et
la beauté de la communauté biotique, elle est injuste lorsqu’elle tend à l’inverse."
➪ dans la formation d’un vaste réseau de parcs nationaux de protection de la nature,
particulièrement aux Etats-Unis. On a pu leur reprocher d’appliquer une conception occidentale d’une
nature sauvage dont l’homme doit être exclu : le premier parc américain créé en 1872, le
Yellowstone, l’a été en en chassant les Indiens qui s’y trouvaient.
Les peuples autochtones non occidentaux ont trouvé d’autres façons de protéger leurs modes de vie
dans des espaces naturels, et de les mettre à l’écart de développements destructeurs. L’article 71 de
la Constitution équatorienne proclame ainsi les droits de la nature :
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"La nature, ou Pachamama, où se reproduit et se réalise la vie, a droit au respect absolu de son
existence et au maintien et à la régénération de ses cycles vitaux, de ses fonctions et de ses
processus évolutifs. Toute personne, communauté, peuple ou nation, pourra exiger de l’autorité
publique le respect des droits de la nature."
➪ dans la sobriété que reprend l’idée latino-américaine du "buen vivir" (bien vivre) comme façon de
vivre avec la nature. Alors que nous comprenons qu’il ne peut pas y avoir de croissance illimitée
dans une nature limitée, nous avons besoin d’un autre modèle de vie, plus sobre, et mieux intégré
dans la nature ;
➪ chez Gandhi ou Martin Luther King, pour qui la non-violence joue un rôle important, mais aussi
dans la politique des mouvements écologiques, que ce soit chez José Bové et dans le mouvement
contre les OGM, ou avec Arne Naess, philosophe norvégien, résistant non-violent pendant la guerre,
et qui, dans "Ecologie, communauté et style de vie" (1989), où il expose sa conception de la "deep
ecology" ou écologie profonde, défend une politique alternative fondée sur la non-violence.
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André Gorz : l’écologie comme transformation du monde social
Catherine Larrère : Avec André Gorz, l’écologie, dans les années 70,
entre en société. Elle n’est plus simplement un rapport à la nature, elle
est transportée à l’intérieur même de la société, y représente l’aspiration
à un modèle social nouveau, où les hommes puissent vivre libres dans
un rapport apaisé à la nature.
Né dans une famille juive autrichienne ayant souffert du nazisme, André
Gorz a mis la liberté et l’autonomie (personnelle et collective) au centre
de sa réflexion et de son projet. Il peut se réclamer de plusieurs
influences :
➪ Jean-Paul Sartre, le philosophe de la liberté, chez qui il trouve les
éléments d’une reconstruction individuelle (et qui préface son livre "Le
Traître") et d’une critique sociale de l’aliénation ;
Couverture du livre
➪ Ivan Illich, à qui il emprunte sa critique d’une société où le
productivisme se retourne en son contraire (tout bien calculé, on ne va pas plus vite en automobile
qu’à pied), où les médecins rendent malades, où l’école abêtit et où la pauvreté se transforme en
misère. Comme Illich, Gorz évalue les technologies selon leur capacité à accroître l’autonomie
individuelle et à faciliter les relations sociales. Il nomme "écologie politique" le projet d’une société
conviviale.
Se libérer du travail
Pour Gorz, c’est surtout la question du travail qui compte. Comme il l’explique dans "Métamorphoses
du travail. Quête du sens", il ne s’agit pas de libérer le travail, mais de se libérer du travail, et,
surtout, de savoir que faire de notre temps libre. A l’opposé de la formule de Sarkozy, "travailler plus
pour gagner plus", il se demande comment travailler moins pour vivre mieux.
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Dans le rapport Meadows (1972) et la lecture des travaux de l’économiste Nicholas GeorgescuRoegen, André Gorz développe l’idée que l’activité humaine trouve dans la nature ses limites
physiques.
Tout en critiquant l’économisme socialiste et son productivisme, Gorz reste proche de Marx et des
marxistes dans sa critique du capitalisme et dans son opposition entre réforme et révolution. Dans
"Ecologie et politique" (1975), il questionne :
"Que voulons-nous ? Un capitalisme qui s’accommode des contraintes écologiques ou une révolution
économique, sociale et culturelle qui abolit les contraintes du capitalisme et, par là même, instaure
un nouveau rapport des hommes à la collectivité, à leur environnement et à la nature ? Réforme ou
révolution ?"
Gorz en tire l’idée, souvent reprise par les écologistes, que suivant la politique choisie, l’écologie peut
conduire à des dérives autoritaires (ce qu’il appelle "écofascisme") ou à un anticapitalisme radical,
ouvrant sur une autre société, qui aura échappé au productivisme. Gorz est un des introducteurs du
mot et du thème de la décroissance.
Avec Serge Moscovici (un des premiers à critiquer l’opposition nature/culture) et René Dumont
(agronome de la faim, expert international, et dont la candidature à la présidentielle en 1974 a lancé
le mouvement politique Ecologie), Gorz est donc l’un des pionniers et des piliers de l’écologie
politique en France.
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Hans Jonas : le principe de précaution
Couverture du livre
Catherine Larrère : Pour Hans Jonas, nous sommes les victimes de
notre succès : nous nous sommes bien rendus, comme le souhaitait
Descartes, "maîtres et possesseurs de la nature", mais le pouvoir ainsi
acquis nous échappe et nous menace.
La puissance technique dont nous disposons a des conséquences
néfastes et potentiellement catastrophiques : nous sommes en mesure
de mettre fin à la vie humaine sur Terre. Il nous faut donc nous rendre
maîtres de notre maîtrise, développer une éthique de la technique, qui
nous permette d’en écarter les conséquences néfastes, et de continuer à
vivre le mieux possible, nous et le reste de la nature.
Son impératif ("Agis de façon à ce que les conséquences de ton action
soient compatibles avec la persistance d’une vie authentiquement humaine sur Terre") est énoncé
dans le "Principe responsabilité" (1979), où Jonas développe une réflexion sur la vie, l’homme et la
technique déjà amorcée dans le "Phénomène de la vie" (1966), où il s’inquiète des conséquences
des biotechnologies sur la vie humaine.
Hans Jonas y développe une réflexion sur les conséquences morales de la technique moderne.
Cette réflexion est remarquable par :
➪ l’accent mis sur les conséquences à long terme de nos actions techniques et sur la nécessité d’en
tenir compte. Jonas est l’un des premiers à avoir introduit en morale (et en politique) le souci des
générations futures. Alors que traditionnellement, la morale ne se souciait que des rapports aux
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autres hommes dans l’ici et maintenant, Jonas introduit une éthique du futur dans une perspective
globale ;
➪ cette morale est une morale de la responsabilité, et de la responsabilité collective vis-à-vis du
futur. Alors qu’on se préoccupait de responsabilité pour attribuer une action passée à celui qui l’a
commise, Jonas se préoccupe d’une vision prospective de la responsabilité : être responsable, c’est
répondre de ce qui va venir, c’est surtout répondre à ce qui nous appelle. Le modèle de la
responsabilité est pour lui le nouveau-né dont nous devons prendre soin ;
➪ de solide et menaçante, la Terre est devenue menacée, fragile, vulnérable. L’éthique de Jonas est
une éthique de la vulnérabilité, et elle concerne aussi bien les hommes (dont nous devons
préserver la vie authentiquement humaine) que la nature (que nous avons fragilisée et dont nous
sommes responsables) ;
➪ le catastrophisme : c’est la catastrophe à venir qui nous contraint à la responsabilité (Jonas parle
de remords anticipateur), mais c’est elle aussi qui nous apprend quoi faire : c’est ce que Jonas
appelle l’heuristique de la peur. C’est dans la possibilité de perdre quelque chose ou quelqu’un que
nous en découvrons la valeur, et que nous comprenons quoi faire. Pour Jonas, nous devons toujours
privilégier le scénario du pire.
DÉFINITIONS
"Le développement durable est un mode de développement qui répond aux besoins des générations
du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs" (Rapport
Brundtland, 1987).
"Le principe de précaution dit qu’en l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances
scientifiques et techniques du moment, on ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et
proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement, à
un coût économiquement acceptable" (loi Barnier, 1995, intégré dans la Charte de l’environnement).
On retrouve Jonas :
➪ dans l’importance que la technique a prise dans l’évaluation de la crise écologique. Jonas, comme
Jacques Ellul, mais aussi comme Heidegger, insiste sur l’autonomisation de la technique : de
moyen, elle est devenue une fin, et s’impose à nous ;
➪ dans l’insistance sur la responsabilité : il ne suffit pas de respecter la nature, il faut aussi nous
porter responsables des conséquences de nos actions techniques ;
➪ dans l’attention portée aux générations futures ;
➪ dans le catastrophisme
tendance importante.
: tous les écologistes ne sont pas catastrophistes, mais c’est une
Hans Jonas n’est pas seulement une référence pour l’écologie politique (à l’éthique de laquelle il
peut contribuer), il a également une importance dans les politiques publiques, au niveau national,
comme international.
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http://www.sante-environnement-travail.fr/minisite.php3?id_rubrique=891&id_article=2723
02. Perception du risque et
participation du public
LE PUBLIC À UNE PERCEPTION COMPLEXE DES RISQUES
Lorsque l’on demande à un échantillon de citoyens d’estimer le nombre de morts associés à
différents dangers, leurs réponses correspondent à peu près à la connaissance des experts. Les
citoyens ont toutefois tendance à surestimer les risques avec les plus faibles probabilités et à sousestimer ceux avec les plus fortes probabilités. Ceci suggère que ces connaissances sont transmises
de manière relativement efficace et que, contrairement à ce que l’on entend souvent, l’écart entre
l’appréciation des risques par les citoyens et les évaluations officielles par les experts ne provient pas
d’un seul déficit de communication. La perception des risques par les citoyens ne se fonde pas
uniquement sur l’espérance mathématique de mortalité ou la probabilité d’un accident.
Différentes disciplines comme la géographie, la sociologie, l’anthropologie et la psychologie ont
contribué aux connaissances sur la perception des risques mais ce sont surtout les recherches
psychologiques qui ont été marquantes. Les travaux les plus connus, sous le vocable de paradigme
psychométrique, émanent notamment de Slovic et Fischhoff qui ont identifié un grand nombre
d’attributs qualitatifs ou subjectifs des risques qui influent sur la manière dont le public perçoit des
risques différents (voir encadré ci-après). Ils sont employés dans des méthodes d’analyse destinées
à produire des représentations quantitatives des perceptions et des attitudes des personnes à l’égard
des dangers qui les entourent.
Cette cartographie des perceptions peut être représentée comme un espace du risque à deux
dimensions principales (voir schéma ci-dessous) : sur l’axe vertical, les risques sont classés selon un
niveau de connaissance décroissant, sur l’axe horizontal, ils sont classés selon un niveau de crainte
croissant. Les risques qui sont à la fois les moins connus et les plus redoutés sont aussi
manifestement les plus difficiles à prévoir et à maîtriser. Parmi les principaux facteurs de crainte
figurent la catastrophe planétaire et les risques pour les générations futures. Le terrorisme mondial et
la production d’aliments génétiquement modifiés sont deux exemples récents. Les risques les moins
redoutés sont en général, ceux qui sont individuels, maîtrisables et aisément réductibles. Les plus
acceptables étant ceux qui sont connus, observables et à effet immédiat. En outre, plus les risques
sont équitablement répartis et plus ils sont acceptables pour le plus grand nombre.
En fait, plusieurs approches ont été successivement proposées pour décrire comment s’élaborent la
perception d’un risque, puis les attitudes, opinions et comportements qui s’ensuivent.
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•
•
•
L’approche psychométrique (Slovic 1975) : c’est le modèle stimulus - personnalité -réponse
où l’individu construit son opinion en confrontant ce qu’il perçoit de la réalité à ses acquis
culturels et émotionnels ;
L’approche culturelle du risque (Douglas 1982 et Thompson 1990) : le risque est un
discours, il fait partie de l’idéologie. La perception du risque est vue comme un processus
sociologique d’adhésion, les composantes psychologiques et cognitives étant secondaires. Le
risque est d’emblée une construction sociale ;
L’approche constructiviste, synthèse des approches précédentes, met l’accent sur la
dynamique et l’amplification sociale (Earle 1995, Kasperson 1988 et Pages 1990). L’individu
"émet une opinion" en toute conscience, sachant qu’il défend en même temps un système de
valeurs au sein de la société, et qu’il se positionne par rapport à tel ou tel groupe social.
Ce dernier niveau de complexité apparaît dans le passage des perceptions aux comportements.
L’acceptation ou le rejet d’une situation ne dépend pas du seul risque perçu. Des considérations sur
l’intérêt et la légitimité de l’activité ou sur la confiance accordée aux responsables interviennent.
La compréhension de ces liens a toujours été un souci des gestionnaires du risque. En France, la
réalisation et l’analyse d’enquêtes nationales sur la perception des activités nucléaires, et en
particulier de l’énergie, ont commencé en 1977 à l’initiative de l’Institut de protection et du sûreté
nucléaire. Elles sont sous forme d’un baromètre depuis 1988 que l’IRSN, successeur de l’IPSN, fait
toujours fonctionner (voir les enseignements du baromètre 2004 en encadré ci-contre).
Analyse multivariée des relations entre plusieurs caractéristiques de risque.
D’après Slovic 1987
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REPÈRE :
Attributs importants modifiant la perception du risque
Subi ➫ Un risque imposé (ex : les rejets d’une industrie polluante) sera jugé
moins acceptable qu’un risque assumé de plein gré (ex : fumer).
Incontrôlable ➫ L’incapacité de contrôler un risque le rend moins
acceptable.
Créé par l’homme ➫ Un risque technologique (ex : énergie nucléaire) est
jugé moins acceptable qu’un risque d’origine naturelle (ex : la foudre).
Inconnu ➫ Un risque peu familier ou inconnu (ex : la biotechnologie) est
jugé moins acceptable qu’un risque connu (ex : les accidents domestiques).
Craint ➫ Un risque qui est très craint (ex : le cancer) est jugé moins
acceptable qu’un risque qui ne l’est pas (ex : un accident à la maison).
Catastrophique ➫ Un risque catastrophique (ex : un accident d’avion) est
jugé moins acceptable que des risques diffus ou cumulatifs (ex : les
accidents de voiture).
Injuste ➫ Si un risque est considéré comme injuste ou injustement imposé à
un groupe en particulier, il sera jugé moins acceptable. Cela est encore plus
vrai s’il s’agit d’enfants.
Confiance ➫ Si la source du risque ou le responsable de sa maîtrise est
indigne de confiance, le risque sera jugé moins acceptable.
Incertain ➫ Un risque qui comporte une grande part d’incertitude et dont
nous savons peu de choses est jugé moins acceptable qu’un autre risque.
Immoral ➫ Un risque qui est perçu comme contraire à l’éthique ou immoral
est jugé moins acceptable qu’un autre qui ne l’est pas.
Mémorable ➫ Un risque qui est associé à un événement mémorable (ex : un
accident industriel) est jugé moins acceptable qu’un risque qui ne l’est pas
Source : baromètre IRSN 2004
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REPÈRE :
La perception des situations à risques par les Français en 2004 :
quelques enseignements.
1.
Les Français discernent de façon assez fine les différents types de risques évoqués
ci-après, qu’ils placent cependant tous derrière leurs préoccupations de nature
économique (chômage, exclusion, etc.) et qu’ils perçoivent différemment :
◦
Les comportements individuels (tabagisme des jeunes, drogue, alcoolisme,
obésité des jeunes, SIDA) sont considérés comme générant un risque élevé,
mais plutôt bien pris en compte par les politiques publiques.
◦
Les pollutions diffuses (pollution de l’air ou de l’eau, pesticides, retombées en
France de Tchernobyl, radioactivité, OGM) présentent des risques élevés ou
moyens, avec des scores très bas en termes de confiance dans l’action
publique et de crédibilité des informations mises à la disposition.
◦
Les risques technologiques attachés à des sites identifiables (déchets
radioactifs ou chimiques, installations chimiques, centrales nucléaires,
incinérateurs de déchets ménagers, etc.) viennent globalement en troisième
position avec là aussi, un déficit de confiance dans l’action des pouvoirs
publics, et dans l’information.
◦
Les risques non industriels (bruit, inondations, accidents domestiques,
canicule, etc.) sont réputés plutôt faibles, avec un niveau de confiance dans
l’action conduite au dessus de la moyenne.
2.
En matière de gouvernance des risques, les Français mettent très majoritairement
l’accent sur trois principes essentiels à leurs yeux : information, respect du principe
pollueur/payeur, indépendance de l’expertise.
3.
Les Français font majoritairement confiance à la science et à l’expertise. Ils
souhaitent cependant que les experts scientifiques prennent plus en compte les
préoccupations de la société et que les décideurs politiques s’appuient sur les
experts scientifiques.
4.
Les Français sont dans leur immense majorité en faveur du développement de
structures de concertation rassemblant face aux risques, décideurs politiques,
experts scientifiques, industriels, associations et citoyens.
© Afsset, juillet 2006, rédacteur : Benoit Vergriette. Remerciements pour relecture à : P Hubert
(Ineris), R Demillac (ENSP). Photo : Gettyimages.
Afsset & partenaires : Ademe, ENSP, Ineris, InVS, Inpes, FNE et FNES
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CHANGEMENT DE CIVILISATION
PAR AGNÈS ROUSSEAUX
13 MAI 2013)
03. René Passet : "Il faut prendre
du recul pour voir qu’un autre
monde est en train de naître"
Vivons-nous une simple crise passagère ou une profonde
mutation du système ? Pour l’économiste René Passet, face à
un pouvoir financier qui impose son tempo, les
gouvernements font fausse route en raisonnant à court terme.
Il n’est pas plus tendre avec les économistes, incapables
d’analyser le monde autrement que par le prisme des
marchés, un peu comme l’homme des cavernes ne concevait
l’univers autrement que magique. Sa solution : une
"bioéconomie", seul remède à la crise de civilisation.
Entretien.
Basta ! : Notre manière de penser l’économie dépend de notre perception
du monde. Et varie totalement en fonction des époques et du progrès
technique. Dans votre dernier ouvrage, vous proposez de relire l’histoire
économique à la lumière de ces mutations. Quelles sont les grandes
étapes de cette longue histoire ?
René Passet [1] : Ceux qui voient le monde comme une mécanique, une horloge, ne considèrent
pas l’économie de la même façon que ceux qui le voient comme un système énergétique qui se
dégrade. Les mêmes astronomes, armés des mêmes instruments, ne perçoivent pas les mêmes
choses dans le ciel, avant et après Copernic. Quand l’homme n’a que ses sens pour comprendre le
monde, l’univers lui apparaît mystérieux. C’est un univers qui chante, qui le nourrit, qui gronde aussi
parfois. Des forces jaillissent de partout. Il pense que des êtres mystérieux et supérieurs le jugent,
l’approuvent ou le punissent.
Avant même le Néolithique, l’homme s’aperçoit que la plante dont il se nourrit pousse mieux dans les
milieux humides. Ou que les déchets organiques favorisent la végétation. Il découvre ainsi les forces
productives de la nature et les régularités du monde naturel. Cela va faire reculer les esprits, qui se
réfugient sur les sommets des montages, comme l’Olympe. Les dieux succèdent aux esprits, le
monde mythique au monde magique. La civilisation grecque marque le basculement de l’esprit vers
la conceptualisation. Un tournant décisif, le début d’une réflexion sur la nature des choses, avec la
philosophie, science première. On passe ensuite des dieux au pluriel à un dieu au singulier. L’activité
économique est encore une activité pour le salut des âmes, dans la perspective chrétienne. Si vous
ne voulez pas finir vos jours dans les lieux infernaux, il faut vivre selon les préceptes économiques
des théologiens.
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Peu à peu la rationalité l’emporte, et la science se laïcise. Pour Descartes et Newton, le monde
fonctionne comme une horloge. C’est dans cette société "mécaniste", que naît l’école libérale
classique. Au 18e siècle, Adam Smith, qui était aussi astronome [2], propose une théorie
gravitationnelle de l’équilibre : le prix du marché gravite autour du "prix naturel", qui est le coût de
production de l’objet, exactement comme les astres gravitent autour du soleil.
Avec la machine à vapeur apparaît une nouvelle représentation du monde...
En 1824, le physicien Sadi Carnot découvre les lois de la thermodynamique : le principe de
conservation et le principe de dégradation. Imaginez un morceau de charbon. Il brûle, mais ne
disparaît pas : tous ses éléments constitutifs se conservent, répandus dans l’univers. Et s’il a produit
du mouvement, jamais plus il n’en produira, car il est désormais déstructuré, "dégradé". A ce moment
de l’histoire, on passe d’une représentation mécanique du monde à la société énergétique. Alors que
chez Adam Smith, chez Newton, c’est l’équilibre – statique – qui compte, les lois de l’énergie sont
des lois de probabilité. Quand on répand un gaz dans un volume, il va dans tous les sens, et le
hasard fait qu’il se répand partout de manière homogène. Au niveau de l’individu, il n’y a pas de
déterminisme apparent, mais au niveau des grands nombres, les mouvements se compensent : ce
sont les lois de probabilité. On change de causalité, et d’univers : le monde est en mouvement,
comme le montre aussi Darwin. Au même moment dans l’histoire économique, Marx et les socialistes
se mettent à penser non pas en terme d’équilibre mais d’évolution.
Ce passage d’une représentation mécanique du monde à la société énergétique a-t-il un
impact sur la vie des idées ?
Le mouvement des idées part alors dans trois directions. Avec Léon Walras, qui invente "l’équilibre
général" des marchés, c’est la loi de conservation qui prime. La deuxième loi, celle de la dégradation
entropique, amène à la théorie de l’autodestruction du système capitaliste, par Karl Marx. Au fil du
temps, le système entropique et le système capitaliste suivent un même cheminement, ils se
dégradent, se désorganisent. La loi de probabilité, on la retrouve chez Keynes [3]. Sa théorie est
celle de l’incertitude radicale : les acteurs économiques agissent dans un monde incertain, dont ils
ont une connaissance imparfaite. Une vision à l’opposé des analyses classiques sur la rationalité des
marchés.
Vient ensuite le temps de l’immatériel et de l’information...
La société énergétique, celle de la grande industrie, fonctionne par l’accumulation de capitaux et le
développement du secteur financier et bancaire. La vraie rupture entre les classes sociales apparaît.
La société s’organise hiérarchiquement. Au début des années 1970 deux événements vont marquer
un tournant important : la première crise du pétrole et la sortie du microprocesseur Intel.
L’informatique pour tous, et nous voici dans la société informationnelle (dans le sens de "donner une
forme"). Dans cet univers, la force productive est l’esprit humain. Les modes d’organisation changent
complètement. De l’entreprise au monde entier, l’économie est organisée en réseaux. Le monde se
vit comme unité, en temps réel. On gomme le temps et l’espace.
Est-ce l’avènement de la financiarisation de l’économie ?
L’ordinateur nous a donné le moyen du contact immédiat et la logique financière nous pousse vers
une économie de rendement immédiat. Avec la politique de libération des mouvements de capitaux
dans le monde, on assiste à une concentration de capital, et à la naissance d’une puissance
financière supérieure à celle des États. Avec des effets désastreux pour l’économie réelle. Un
exemple ? L’entreprise pharmaceutique Sanofi gagne des sommes colossales, licencie pourtant ses
chercheurs et n’invente plus rien, depuis que son PDG est issu du secteur de la finance. La finalité ?
Produire du dividende et non plus du médicament. On relève la barre de rentabilité, on externalise la
recherche et pour le reste, on dégraisse. Les chercheurs sont désespérés, ils ne font plus leur métier.
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"L’humanité est en train de résoudre son problème économique", disait Keynes, envisageant
un avenir prochain où l’homme pourrait travailler trois heures par jour, grâce à l’augmentation
de la productivité. Nous en sommes très loin... Avons-nous raté quelque chose ?
A toute époque, le progrès technique a pour effet d’augmenter la productivité du travail humain. La
productivité accroît la quantité de valeur ajoutée. Mais la façon dont celle-ci est partagée dépend du
rapport de force dans la société. Dans la vision fordiste, les intérêts des salariés et des entrepreneurs
sont convergents. Henry Ford le dit très bien : "Si vous voulez vendre vos bagnoles, payez vos
ouvriers". Progrès économique et progrès social vont alors de pair. Lorsque c’est le pouvoir de la
finance qui domine, le dividende se nourrit de la ponction qu’il effectue sur les autres revenus. La
logique ? Réduire l’Etat, les salaires, le nombre de salariés, les protections sociales. L’augmentation
de la productivité a été compensée par cette logique de la rémunération des actionnaires. Keynes a
raison ! Et la semaine de 32 heures est aujourd’hui un des moyens pour rétablir le plein emploi.
Keynes évoque aussi les risques psychologiques de cette évolution. Pour la première fois depuis sa
création, l’homme devra faire face à son problème véritable : comment employer sa liberté arrachée
aux contraintes économiques ?
Vous expliquez comment nous avons successivement fait tomber les barrières, entre espace
terrestre et céleste avec Galilée, entre l’homme et l’animal avec Darwin, entre conscience et
rationalité avec Freud. Que pensez-vous de cette nouvelle convergence qui s’opère, entre le
vivant et la machine, avec les biotechnologies, dont vous décrivez l’importance dans votre
ouvrage ?
Je ne crois pas à la fin de l’histoire, mais à la fin de l’homme. Avec les nanotechnologies et le
concept "d’homme augmenté", on prévoit d’introduire dans notre sang des robots qui vont nous
réparer. Et nous ne saurons bientôt plus quelle est la part humaine et quelle est la part robotique en
l’homme. Nous aurons dans le cerveau des puces avec de la mémoire. Est-ce que la puce va
appartenir à l’homme, ou bien le modifier ? Lorsque je m’interrogerai, la réponse arrivera un peu plus
vite. Mais est-ce vraiment moi qui répondrai, ou bien est-ce l’encyclopédie Universalis, à ma
disposition dans mon cerveau ? Quelles seront les conséquences de tout cela ? L’homme se crée luimême par les efforts qu’il fournit, en travaillant pour acquérir des connaissances, en transformant le
monde, comme disaient Hegel ou Marx. S’il dispose de prothèses pour faire le travail à sa place, je
crains que l’homme ne se diminue lui-même. Toute prothèse est atrophiante.
Vous n’êtes pas très optimiste…
Je suis très inquiet pour l’avenir de l’humain. J’ai peur qu’arrive, dans une humanité mécanisée,
robotisée, un autre homme dont on ne saura plus très bien ce qu’il est. Le grand cybernéticien Alan
Turing (1912-1954) a parié qu’aux environs de l’an 2000 on ne serait plus capable, dans une
conversation téléphonique, de faire la différence entre un homme et un robot. C’est une autre limite,
une autre frontière. Est-ce le sens de l’évolution ? Cela a-t-il une signification ? Je n’en sais rien.
Pouvons-nous maîtriser ces bifurcations de civilisation ?
Avons-nous maîtrisé les bifurcations précédentes ? Elles sont venues au fil de l’évolution, et nous les
avons suivies. Nous ne les comprenons qu’après coup, et nous nous adaptons à une nouvelle
normalité qui s’établit. Les gens les ont vécues comme la fin d’un monde, sans comprendre où allait
le monde nouveau. Il faut prendre du recul pour voir qu’un autre monde est en train de naître. Nous
vivons aujourd’hui une confusion entre crise et mutation. Nous mélangeons deux types de crises.
L’évolution est faite de ruptures et de normalité. La crise dans la normalité, c’est lorsque dans le
système établi apparaissent des dysfonctionnements qui nous éloignent de la norme. C’est la crise
au sens propre du terme, conjoncturelle. Le problème est alors de revenir à la norme. Si le sousemploi est conjoncturel, on va essayer de rétablir le plein-emploi dans les normes traditionnelles,
avec les moyens traditionnels.
13
Les crises de mutation, c’est passer d’un système à un autre. Et c’est ce
que nous vivons aujourd’hui. Ce n’est pas une crise économique, mais
une crise du système néolibéral. C’est la logique même du système qui a
provoqué la crise des subprimes en 2008. Notre vrai problème est
aujourd’hui de réussir la mutation. Or nous avons chaussé les lunettes de
la crise du court terme. Un exemple : rigueur ou relance ? Tous les
gouvernements raisonnent dans une logique de court terme ! Le pouvoir
financier impose sa vision du temps court. Cela fausse tout, nous
raisonnons à partir d’une économie complètement tronquée.
Quelles en sont les conséquences ?
Dans le temps court, le salaire n’est qu’une charge pour les entreprises, et la protection sociale, une
charge pour la société. L’impôt, c’est un prélèvement et rien d’autre. Si vous abordez le problème
avec cette vision, cela vous amène forcément à la rigueur : il faut restreindre la dépense publique.
Même si la crise ne vient pas de la dépense publique mais du secteur privé, en premier lieu des
banques avec la crise des subprimes. Il faut comprimer les salaires, travailler plus pour gagner
moins ! Le résultat ? Un cercle vicieux. Le second effet apparaît dans un temps plus long : le salaire,
c’est le support d’un revenu qui alimente la dépense de consommation. L’impôt, c’est le support de la
dépense publique. Il ne se perd pas dans les sables du désert ! Toute cette dimension nous manque.
Les gouvernements sont piégés dans cette logique de court terme, alors que le vrai problème est
celui de la réussite de la mutation.
"L’homme des cavernes pouvait difficilement – à la lumière de son expérience – se faire une
conception de l’univers autre que magique", écrivez-vous. Alors que les marchés sont
aujourd’hui présentés comme des oracles, ne serions-nous pas capables de faire mieux que
l’homme des cavernes ?
Dans une vision à court terme, la tendance est de défendre les structures existantes. Avec de très
bonnes intentions, on s’enferme dans des contradictions totales. Les gouvernements mènent une
politique de réduction des dépenses énergétiques, et de l’autre côté, n’acceptent pas la diminution
du nombre de raffineries, qui découle de cette politique. Le problème n’est pas que les salariés des
raffineries restent raffineurs, mais de les employer dans de nouvelles structures, et de voir quelles
sont les structures nécessaires à la poursuite de la mutation. En essayant de régler un problème de
long terme avec des instruments de court terme, nous nous enfonçons de plus en plus dans la crise,
à force de prendre des décisions à contre-sens. Au contraire, anticiper ces transitions, cette mutation,
devrait pourtant inspirer non pas le discours des politiques, mais leur action. On se trompera
forcément, mais par tâtonnement nous finirons par trouver la voie pour nous engager dans un cercle
vertueux.
Vous définissez la science économique comme un "système de pensée nombriliste, clos sur
lui-même, replié sur la contemplation inlassable des mêmes équilibres et des mêmes
procédures d’optimisation". De quelle science économique avons-nous besoin aujourd’hui ?
Lorsque j’ai publié mon livre L’économique et le vivant en 1979, les économistes m’ont dit : "Qu’estce que c’est que ce truc ? Ce n’est pas de l’économie." Depuis, beaucoup ont compris l’importance
de la transdisciplinarité. Confrontés aux mêmes réalités, chaque discipline interroge le monde sous
un angle différent. La nature de mes questions me définit comme économiste. C’est le lieu d’où je
questionne le monde, mais ce n’est pas une prison ! Si les chercheurs refusent de se hasarder dans
les zones d’interférences, certains problèmes ne seront jamais abordés. C’est pourtant dans ces
zones que se joue aujourd’hui la survie de l’humanité.
Comment recréer des espaces de réflexion interdisciplinaires ?
14
Il y a aujourd’hui des courants intéressants, comme celui des Économistes atterrés. On parle en ce
moment de la reconstitution d’une structure qui ressemblerait à celle du Plan, avec une ambition de
prospective. J’étais très favorable à la planification française, souple. Les objectifs des secteurs
stratégiques – sidérurgie, transports, énergie,...– étaient définis au sein des Commissions du Plan,
qui réunissaient des grands fonctionnaires, des intellectuels, mais aussi des syndicats ouvriers et
patronaux. Une concertation sociale permanente. C’est ce qui nous manque le plus aujourd’hui. De
cette rencontre sortaient des objectifs, ensuite arbitrés par l’État. On n’avait pas besoin de faire des
grands discours sur la concertation, on la faisait !
Vous défendez le principe de bioéconomie. En quoi cela consiste-t-il ?
Ce n’est pas une nouvelle branche de l’économie : c’est l’économie qui doit se faire bio. La
destruction de la biosphère menace actuellement l’humanité. Et si on détruit la biosphère, cela ne
sert à rien de disserter sur le Plan et l’avenir de l’humanité : il n’y aura pas d’avenir, pas d’économie.
Le monde est arrivé à ce moment où il atteint et dépasse la capacité de charge de la biosphère.
Toutes les conventions sur lesquelles était fondée l’économie sont remises en cause. La nature était
considérée comme inépuisable ? Elle devient un facteur rare que l’on épuise. Et c’est une des
conventions fondatrices de l’économie qui disparaît. Quand on cherche la combinaison optimale de
facteurs de production, ou de biens de consommation qui vont vous donner le maximum de
satisfaction, on procède par substitution de biens. C’est la deuxième convention de base de
l’économie : on optimise en substituant. Cela n’est plus vrai aujourd’hui : quand vous atteignez les
limites de la biosphère, certaines ressources ne peuvent plus être augmentés. La substituabilité
disparaît. Troisième convention : "Le plus est le mieux" – c’est en consommant davantage que l’on
accroît le bien-être. Nous atteignons aussi la limite où ce n’est plus vrai. Le paradoxe d’Easterlin
montre que dans les nations les plus riches le bien-être et le revenu ne vont plus de pair. Il arrive un
moment où la relation s’inverse carrément.
Comment l’économie peut-elle intégrer la question de la reproduction des ressources et du
vivant ?
L’économie est faite pour optimiser – ce n’est pas un vilain mot !. Cela veut dire tirer le maximum de
résultats, de choses positives, de satisfaction, à partir des moyens limités dont nous disposons. Mais
elle doit intégrer ces stratégies d’optimisation (de production et de consommation) dans les limites
des mécanismes de reproduction du système. Par exemple les rythmes de reproduction des
matières premières, des ressources renouvelables : "Voilà, on peut piocher dans les réserves jusque
ce niveau, mais pas plus". Ou des rythmes de prélèvement des ressources non renouvelables
compatibles avec des perspectives de relève, de remplacement de ces ressources. L’économie
retrouve alors sa vraie vocation : une science d’optimisation sous contrainte. Sans limites, il n’y a pas
d’économie, car cela veut dire que l’on peut faire n’importe quoi !
Le système économique actuel peut-il s’adapter à cette contrainte ?
Certains économistes voudraient que l’économie soit une science qui prenne en compte toutes les
contraintes, sauf celles de l’environnement ! Dans un système vivant, vous avez une finalité qui
domine, c’est la finalité du système tout entier : maintenir et reproduire sa structure dans le temps,
alors que les lois physiques, les lois d’entropie voudraient qu’il se désagrège. Cette finalité est
supérieure à toutes les autres. Dans une horloge, vous avez une seule loi, du ressort à la mécanique
entière. C’est très différent dans le vivant : on fait un saut dans le vivant, en passant de la molécule à
la cellule, c’est une autre logique qui s’applique. Et la logique de l’organe est différente de la somme
des logiques des cellules. La pensée n’est pas la somme des atomes du cerveau. En économie,
c’est pareil. C’est le paradoxe de Condorcet : il faut un choix à un moment donné, la logique du tout
n’est pas la somme des logiques particulières. On est loin de la "main invisible du marché" d’Adam
Smith, qui transforme mécaniquement les intérêts individuels en intérêt général.
15
Vous parlez de "point critique", ce moment qui nous fait basculer dans un autre univers.
Sommes-nous en train d’atteindre un tel point critique ?
Nous vivons une crise de civilisation, mais le dépérissement du système sera long, car trop d’intérêts
sont en jeu. Pour l’univers de la finance, ce système n’est pas mauvais : quand tout va bien, il
engrange les bénéfices, et quand tout va mal, la charge retombe sur la collectivité. La faillite d’un
paradigme n’implique pas qu’il disparaisse immédiatement. Il faut qu’une théorie concurrente soit
prête à prendre la place, comme le dit l’historien Thomas Kuhn. Le point critique, c’est lorsqu’un écart
évolutif, au lieu d’être ramené vers la moyenne, bifurque de manière totalement imprévisible vers une
nouvelle voie d’évolution.
Tout progrès est ambigu, à la fois chance et péril. C’est nous qui choisissons. Le progrès technique
nous donne actuellement la possibilité de gagner plus, de vivre mieux, de travailler moins. Et comme
nous avons libéré la cupidité des hommes, avec la libéralisation du secteur financier, ce sont les
effets pervers qui l’emportent. Ce qui devrait être un instrument de libération des hommes devient un
moyen d’asservissement. L’homme devient la variable d’ajustement de l’augmentation des
dividendes. Tant qu’on n’aura pas tranché le nœud gordien du pouvoir de la finance, rien ne sera
possible. Parce que le rapport de force agira toujours dans cette direction, et le côté pervers du
progrès technique l’emportera toujours. Sous la pression des événements et des drames qui se
multiplieront, serons-nous amenés à le faire à temps ? Sans cela, nous courrons à la catastrophe. Il
faut continuer à alerter et à travailler dans ce sens.
Propos recueillis par Agnès Rousseaux
@AgnesRousseaux sur twitter
Photo : CC via Owni
A lire : René Passet, Les Grandes Représentations du monde et de
l’économie à travers l’histoire, éditions LLL Les liens qui libèrent, 950 pages,
38 euros.
Notes
[1] René Passet, économiste spécialiste du développement et professeur
émérite à la Sorbonne, a été membre du Groupe des Dix, constitué à l’initiative
de Jacques Robin et de Robert Buron, au sein duquel il a travaillé avec des
biologistes, des physiciens, des sociologues, des anthropologues, des
informaticiens. Il a été le premier président du Conseil scientifique de l’association Attac.
[2] Auteur de l’ouvrage Histoire de l’astronomie.
[3] Qui a écrit un traité des probabilités avant de se pencher sur l’économie.
Nos dossiers :
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Eviter le dépôt de bilan planétaire
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Que faire face à la crise financière ?
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Réagir à cet article
1 - De Marc Roux | 19:33 | 13 mai 2013 |
Bonjour,
Je suis en général d’accord et j’apprécie grandement les analyses de René Passet que je lis
depuis un bon nombre d’années dans le Diplo ou les textes d’Attac, et celle-ci ne déroge pas.
Pourtant, il y a un passage de cette interview qui me fait réagir en contre. Confronté à la
question 'Que pensez-vous de cette nouvelle convergence qui s’opère, entre le vivant et la
machine, avec les biotechnologies', René Passet semble se figer d’effroi - comme beaucoup de
nos contemporains face aux questions abyssales qu’ouvrent la perspective transhumaniste.
Mais je pense que, d’une part, la peur est mauvaise conseillère lorsqu’il est question
d’aborder son propre futur et que, d’autre part, cette réaction témoigne peut-être d’un
certain manque d’imagination dans ces domaines d’anticipation. En effet, considérer qu’il y
aura une 'part robotique', des 'puces', une 'encyclopédie Universalis' qui ne sera pas la 'part
humaine', c’est comme dire que le marteau ou le stylo ne sont pas humains. Nos outils ont
toujours été des prothèses qui nous prolongent. Le fait que ceux-ci aient commencer à
intégrer notre corps ne change rien de fondamental à l’affaire, sauf peut-être en terme de
droit (il faudrait être propriétaire ou au moins maître de ce qui nous compose). Dire que
'Toute prothèse est atrophiante', c’est réagir comme Socrate face à l’écriture. Le père de la
philosophie considérait (selon le jeune Platon) que l’écriture était une invention délétère qui
rendrait les hommes paresseux et incapable d’effort de mémoire … Heureusement, face à la
remise en question de la limite homme-machine, René Passet se pose ces bonnes questions :
'C’est une autre limite, une autre frontière. Est-ce le sens de l’évolution ? Cela a-t-il une
signification ?' je vous propose de considérer que cela a en effet une signification. Par
exemple, cela pourrait vouloir dire que, dans l’aventure de l’humanité, la pérennisation d’une
pensée ou d’une conscience humaine aurait plus d’importance que la persistance de la forme
corporelle ou de la condition biologique qui permet jusqu’ici cette pensée ou cette
conscience ...
Marc Roux, Pdt de l’Association Française Transhumaniste : Technoprog !
www.transhumanistes.com
2 - De Eric | 22:06 | 13 mai 2013 |
René Passet nous parle d’économie, mais n’énonce pas le sens étymologique de ce terme :
"Administration de la maison" et non "Administration de la maison au moyen de la
monnaie". Ce ne sont pas les banksters qui ont rendu l’homme cupide, mais l’apparition du
système monétaire au VIIIe siècle avant Jésus-Christ. Il ne dit pas non plus que les
hommes ne sont pas maîtres de leur destin car ils ne vivent pas dans des démocraties, mais
sont opprimés par des gouvernements non représentifs (ou des dictatures). L’avilissant et
anachronique système monétaire et l’absence de démocratie sont les deux racines des
innombrables maux qui minent le monde.
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Le paradoxe d’Easterlin
Le paradoxe d’Easterlin tient son nom de l’économiste qui l’a mis en évidence en 1974 :
une hausse du PIB ne se traduit pas nécessairement par une hausse du niveau de bienêtre ressenti par les individus. Les explications avancées font notamment appel au paradoxe de
l'abondance. Le paradoxe d’Easterlin est l'une des réflexions à la base de l'économie du bien-être.
Richard Easterlin a mis en évidence le fait qu'une fois qu'une société a atteint un certain seuil de
richesse, la poursuite de son développement économique est sans influence sur l'évolution du bienêtre moyen de sa population. Ou du moins, l'effet n'a cours que sur une partie seulement de cette
dernière. L'évolution de ce bonheur est en réalité, selon Easterlin, à mettre en corrélation relative
avec celle de la richesse des membres les plus fortunés de la société. En clair, ce sont ces derniers
qui sont les plus heureux, mais uniquement parce que l'augmentation de l'inégalité leur permet de
progresser économiquement plus vite que le reste de la population ; cela signifie donc qu'un membre
d'une société dont l'évolution de la fortune se situe dans la moyenne ne se déclarera pas plus
heureux, à l'inverse des éléments qui progressent plus rapidement. C'est donc, plus prosaïquement,
le revenu relatif, et non sa progression brute, qu'il convient de prendre en compte. Cette relativité de
l'évolution (pourtant existante) du sentiment de bien-être, comparativement à la croissance
économique, aboutit donc à un paradoxe.
Le paradoxe a été remis en cause en 2008 par l'étude de Justin Wolfers et Betsey Stevenson,
montrant à l'aide de données individuelles collectées dans un grand nombre de pays qu'il existe bien
un lien entre le PIB par habitant et le degré de satisfaction des individus1.
Notes et références
1.
↑ (en) Justin Wolfers et Betsey Stevenson, "Economic Growth and Subjective Well-Being:
Reassessing the Easterlin Paradox", Brookings Papers on Economic Activity, vol. 39, no 1,
printemps 2008, p. 1-102 [texte intégral [archive] (page consultée le 15 mai 2012)].
Bibliographie
• (en) Richard Easterlin, "Does Economic Growth Improve the Human Lot?", dans Paul A.
David et Melvin W. Reder, Nations and Households in Economic Growth : Essays in Honor of
Moses Abramovitz, New York, Academic Press, 1974
• (en) Veenhoven et Hagerty, "Wealth and Happiness Revisited: Growing wealth of nations
does go with greater happiness", Social Indicators Research, vol. 64, 2003, p. 1-27 [texte
intégral]
• (en) Richard Easterlin, "Feeding the Illusion of Growth and Happiness: A Reply to Hagerty
and Veenhoven", Social Indicators Research, vol. 74, no 3, 2005, p. 429-443 [texte intégral]
• (en) Daniel Kahneman, Alan Krueger, D. Schkade et al., "Would you be happier if you were
richer? A focusing illusion", Science, no 312, 2006, p. 1908-1910
Voir aussi[
•
Richard Easterlin
•
Bonheur intérieur net
•
Économie du bien-être
•
Histoire de la pensée économique
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DÉCROISSANCE FORCÉE
PAR SOPHIE CHAPELLE
04 JUIN 2013
04. Détroit, laboratoire du monde
d’après le néolibéralisme
La ville de Détroit, symbole du
capitalisme et de l’industrie
automobile, n’est plus que l’ombre
d’elle-même.
En cinq ans, ses habitants ont subi
une brutale décroissance forcée : un
taux de chômage exorbitant, un
exode urbain sans précédent, des services publics délabrés.
Pourtant, derrière les scènes de désolation, une société postindustrielle est en train de naître, grâce à l’expansion d’une
agriculture urbaine et à l’émergence de solidarités de quartier.
Basta ! a rencontré celles et ceux qui bâtissent une nouvelle cité
sur les ruines de la Babylone déchue.
Des trottoirs et des parkings vides longent les vastes avenues. Une enfilade de magasins aux
rideaux baissés quadrille le centre-ville de Détroit, berceau de l’industrie automobile américaine. Les
banderoles "à vendre" et "à louer" se succèdent sur les façades des bâtiments. 80 000 logements
seraient abandonnés, soit près de un sur cinq. Avec ses maisons saccagées, brûlées ou envahies
par la végétation, "Motor City" donne l’impression d’une ville fantôme. Symbole de cette déroute,
Détroit vient d’être mis sous la tutelle d’un "coordinateur d’urgence" pour au moins un an.
"Pendant les soixante-dix dernières années, les habitants de Détroit ont cru à tort que leurs vies
étaient liées à General Motors, Ford et Chrysler, explique Maureen Taylor, militante depuis des
années dans la lutte contre la pauvreté. Ils nous ont mis dans la tête que ce qui était bon pour eux
était bon pour nous. Il nous fallait donc cesser de marcher et conduire des voitures. Et si nous
n’aimions plus cette voiture, nous en achetions une autre. Cela a duré pendant des décennies mais
aujourd’hui, c’est fini". Tournant le regard vers les rues désertes de Détroit, Maureen conte le
quotidien de ses habitants les plus touchés par la crise. Des gens mourant de froid sur les trottoirs,
des enfants retrouvés morts dans les maisons incendiées, un système de soin de santé inaccessible
pour les bas-revenus, "un monde de fous" résume t-elle.
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Exode urbain
Empruntant l’autoroute qui traverse la ville d’Est en Ouest, Peter Landon s’arrête sur la bande d’arrêt
d’urgence, au sommet du pont enjambant Red-River. De là surgit le complexe de Ford. Des fumées
s’en échappent encore. Dans les années 30, ces quatre km2 d’usines ont constitué la plus grande
entreprise intégrée du monde, employant jusqu’à 100 000 personnes ! "Aujourd’hui, c’est moins de 6
000 salariés" déplore Peter. Membre de l’Union démocratique des camionneurs (TDU), Peter Landon
a vu les effets dévastateurs de la crise de l’industrie automobile. Une crise qui n’en finit pas.
En 2008, Détroit a perdu près de 70 000 emplois. Si le taux de chômage officiel est de 15,8 %, il
augmente à mesure que l’on s’approche du centre-ville et dépasse 50 % dans certains quartiers.
Près d’une famille sur trois ont un revenu égal ou inférieur au seuil de pauvreté défini par le
gouvernement fédéral. Avec les crises immobilière et financière de ces dernières années, la situation
empire. Longtemps quatrième ville la plus importante des Etats-Unis, Détroit a vu sa population
baisser de plus de moitié, passant de 1,8 million d’habitants en 1950 à quelque 700 000 aujourd’hui.
Mouvement ouvrier : du compromis à la déroute
Près des chantiers navals, dont il ne reste qu’un monument commémoratif, nous rencontrons l’amie
de Peter, Wendy Thompson. Elle est l’ancienne présidente d’une section locale du syndicat des
Travailleurs Unis de l’Automobile (UAW). Après avoir travaillé 33 ans dans une usine de General
Motors (GM), Wendy est un témoin actif de l’histoire ouvrière de Détroit. Aujourd’hui retraitée, elle se
souvient des luttes menées pour obtenir de meilleures conditions de travail quand "à l’époque nous
travaillions douze heures par jour". Et nous conte cette inlassable lutte, ce rapport de force
permanent, entre les "Big Three" – Ford, GM, et Chrysler – et leurs salariés. La crainte des syndicats
et de l’organisation des travailleurs, l’industrie automobile la cultive depuis les années 30, n’hésitant
pas, pour détruire les collectifs de travail, à déménager leurs usines, parfois en dehors de Détroit, et
plus récemment hors du pays.
Au lendemain de la Grande dépression de 1929, l’industrie
automobile embauche largement les travailleurs des
plantations du Sud afin de contrecarrer l’activité des ouvriers
– en majorité polonais et italiens – très syndiqués. Ford, GM,
et Chrysler obtiennent que la ville d’Hamtramck, situé à 8
km, leur offre – déjà ! – des défiscalisations. Un paradis
fiscal en plein Détroit. Elles y déplacent de nombreuses
activités. "On voyait certaines usines fermer pour rouvrir
juste à côté sans réembaucher les militants les plus actifs".
Les crises successives du secteur vont accompagner
pendant des années les politiques patronales de
compression des salaires et de diminution des droits sociaux. Progressivement, les syndicats, pour
sauver le peu qui reste, préfèrent les "compromis" et les "accords" à l’usage de la grève et la
pression des salariés.
Le bon vieux temps de la consommation de masse
En 2009, en pleine crise financière, Chrysler et General Motors sont au bord de la faillite. L’UAW va
alors accepter de devenir actionnaire majoritaire de Chrysler, à hauteur de 55 %, mais aussi de GM à
17,5 %. Pieds et mains liés, le syndicat renonce à la grève jusqu’en 2015, accepte des baisses de
salaires et la reprise de la gestion de l’assurance-santé, au détriment des intérêts des salariés. Dans
le même temps, l’UAW perd des milliers de membres. Le siège de la section locale, comme tant
d’autres bâtiments, est d’ailleurs à vendre.
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Au milieu de maisons soldées à moins de 8 000 euros, s’élève la demeure centenaire de Grace Lee
Boggs. Agée de 94 ans, Grace est une anthologie vivante de soixante-dix années de luttes pour les
droits civiques et les droits des femmes. La rencontrer c’est saisir la chance de mieux comprendre
comment Détroit en est arrivé là. "Cette résidence a été construite en 1929, à une époque où
beaucoup de grandes maisons étaient construites ici. L’industrie apportait la prospérité et Détroit était
perçu comme le symbole de la réussite de la révolution industrielle", raconte-t-elle. Ainsi allait la vie à
Détroit pendant cette première moitié du XXe siècle. Le monde roulait dans les voitures sorties des
chaînes de montage et découvrait la consommation de masse grâce aux standards de production
inaugurés dans les mêmes usines par Henry Ford. Rebaptisée pendant un temps Hitsville USA, la
ville à succès, le monde se mit à danser sur les tubes concoctés dans les studios de la Motown, le
label de musique fondé en 1959 par un jeune afro-américain nommé Berry Gordy.
Face à la désindustrialisation : la drogue et les jeux
"Cette révolution n’a pas duré" poursuit Grace. Lorsqu’elle arrive à Détroit dans les années 50, les
autoroutes sont déjà construites et les populations blanches commencent à quitter le centre-ville pour
s’installer en banlieue. "La désindustrialisation a débuté après la deuxième guerre mondiale. Avec
l’automatisation, le nombre de travailleurs nécessaires sur les lignes d’assemblage a fortement
diminué. Face à la montée du mouvement ouvrier, beaucoup d’usines sont parties s’installer en
banlieue. Comme les jeunes ne trouvaient plus d’emploi, ils se sont dits : pourquoi aller à l’école si je
peux gagner de l’argent en une journée avec de la drogue ? L’économie de la drogue s’est donc
développée."
C’est le début de son engagement dans le mouvement des Black Power. Les révoltes en juillet 1967
vont marquer un tournant. Expression du ras-le-bol devant la ségrégation raciale, ce soulèvement va
permettre aux afro-américains d’accéder à des responsabilités qui leur étaient jusqu’alors interdites.
"Les structures de pouvoir en place ont reconnu qu’elles ne pouvaient plus maintenir l’ordre. C’est
ainsi que pour la première fois en 1973 un maire noir, Coleman Young, a été élu", rappelle Grace.
Mais durant ses vingt années à la tête de Détroit, le maire peine à ramener l’emploi au centre ville,
malgré sa politique en faveur de l’industrie du jeux. Les casinos remplacent les lignes d’assemblage.
Mais pas de jackpot pour nombre d’habitants, qui s’enfoncent dans la pauvreté. Une tentative qui fait
échos à certains grands projets aujourd’hui développés en Europe, comme le projet Eurovegas en
Espagne.
"Tuer les pauvres ne leur fait pas peur"
Maureen Taylor est de celles qui ne renoncent pas. Depuis des années, elle lutte pour que cessent
les coupures d’eau, de gaz et d’électricité des plus démunis. Elle est particulièrement en colère
contre "la politique agressive menée par DTE Energy", une compagnie privée qui n’hésite pas à
sanctionner les ménages incapables de payer les factures d’électricité, les jours où le thermomètre
approche des valeurs négatives. "Tuer les pauvres ne leur fait pas peur" dénonce t-elle. Ces
dernières années, plusieurs incendies mortels ont eu lieu dans des maisons qui ne recevaient ni gaz
ni électricité. Et de blâmer la réduction de moitié du nombre de pompiers à Détroit, alors même que
le taux d’incendie criminel est le plus élevé au monde avec 30 feux de structures par jour. "La
municipalité ferme volontairement les yeux", dénonce Maureen. Plusieurs dizaines de milliers de
résidences seraient également affectées par des coupures d’eau menées par la régie municipale.
"Toutes les questions que vous vous posez sur Détroit ont leur réponse dans la banlieue" affirme
William, un trentenaire ami de Maureen. Embarquement à bord d’une berline. Impossible en effet de
gagner les faubourgs autrement. Au royaume de la bagnole, les liaisons en bus sont très rares entre
son centre-ville et sa banlieue. Les trains de voyageurs sont quasi-inexistants. Le berceau de
l’automobile a beau être en crise, l’alternative en matière de transports en commun n’existe pas.
D’autant que des coupes drastiques ont été opérées dans le budget du transport : plus d’une
21
centaine de chauffeurs de bus licenciés, certaines lignes supprimées ou réduites. "Si tu n’as pas de
voiture à Détroit, tu ne peux rien faire", confirme William. Et pourtant, un quart des habitants n’en
posséderaient pas. Les inégalités sont aussi une question de mobilité.
Ségrégation et décroissance forcée
L’autoroute marque la séparation entre un centre-ville et sa population
noire à 85 % et une banlieue blanche à 80 %. "Il y a quelques
quartiers noirs à l’extérieur du centre-ville nuance William, mais les
plus riches restent incontestablement les quartiers blancs". De
l’autoroute, on aperçoit la gare centrale abandonnée, des écoles et
des hôpitaux fermés. En arrivant à Southfield, à une vingtaine de km
du centre-ville, le contraste est saisissant. "Vous nous demandiez où
étaient les magasins ? Ils sont ici. Vous n’en verrez aucun au centreville. Les gens qui ont de l’argent investissent là et y construisent leur
maison et leur commerce", assure William. "C’est une ségrégation de classe." Encore aujourd’hui, il
semble difficile pour les ménages noirs de s’installer dans des quartiers à majorité blanche.
Beaucoup, selon William, estiment que leur présence ferait baisser la valeur économique des biens
immobiliers.
Alors que le trafic ne cesse de s’épaissir à mesure que l’on pénètre la banlieue, les grandes
surfaces, villas cossues, banques et parkings bondés défilent. "Vous avez là ce à quoi ressemble le
rêve américain : chacun est un Don Quichotte qui croit pouvoir devenir ce qu’il veut", commente
William. Aux portières sont accrochés de mini-drapeaux américains. Des stickers "I love America"
ornent les vitres arrière. La moindre voiture garée sur les pelouses tondues au millimètre approche
les 40 000 $. On compte en moyenne deux à trois voitures par ménage. Derrière les grandes
maisons protégées, on devine le métier de son propriétaire, ingénieur, avocat ou manager pour la
plupart. "Toute notre éducation ici est basée sur l’argent, déplore William. A l’âge de 19 ans, tu dois
acquérir ta première maison. Tout autour de nous, le capitalisme continue d’opérer. Nous ne
reconnaissons toujours pas que nous avons fait une erreur. Pour l’instant, les effets collatéraux ont
seulement touché le centre-ville." C’est ce que l’on appelle aussi ici "l’effet donut", du nom de ces
beignets gras percés d’un trou en leur milieu.
"Les banques détruisent toute richesse à Détroit"
"Ce que fait le maire dans cette situation ? ironise William. Il prend des quartiers historiques, il dit
qu’ils sont morts, puis il ferme les écoles, les parcs publics, il démolit les bâtiments". Le maire de la
ville est pris en étau. D’un côté, les banques favorisent les saisies immobilières en exigeant le
remboursement des prêts des ménages endettés. Autant d’habitants et de revenus en moins pour le
budget municipal. De l’autre, ces mêmes banques prélèvent toujours plus d’intérêts pour financer la
dette de la ville, imposant à celle-ci et son maire des réductions de dépenses publiques. Aujourd’hui,
Détroit croule sous le poids d’un déficit budgétaire de 100 millions de dollars et d’une dette
obligataire de quelque 14 milliards de dollars.
Pour Jérôme Goldberg, avocat spécialiste des saisies immobilières, "les banques détruisent toute
richesse à Détroit". "Plutôt que de licencier ou diminuer les salaires des employés et supprimer des
services publics pour équilibrer le budget, le maire et son Conseil devraient résister aux banques et
mettre en place un moratoire sur le paiement de la dette", estime l’avocat. Car "le plus grand
problème à Détroit renchérit la syndicaliste Wendy Thompson, c’est l’école." D’ici 2016, la
municipalité envisage le départ de 13 000 étudiants du district scolaire. Cette prévision à la baisse
des inscriptions devrait accompagner la fermeture programmée de 28 écoles publiques de la ville.
Pour la fédération des enseignants de Détroit, c’est la mise en concurrence avec les charter schools,
ces écoles américaines laïques à gestion privée, qui expliquent cet exode. Et d’interroger :
22
"Comment faire croire aux gens qu’ils devraient nous confier leurs enfants si l’on procède à des
coupes constantes ?"
De la rouille à la verdure
"Les gens expérimentent le déclin ici depuis 60 ans mais il restent façonnés par un optimisme libéral,
comme si cette crise était seulement quelque chose de local. Quiconque que vous écoutiez, le maire,
les mouvements écolo, tous intègrent le mot croissance dans leur discours", déplore témoigne Killian
O’Brien, un professeur venu s’installer à Détroit en 2009. Détroit serait-elle définitivement devenue
une ville fantôme, un laboratoire abandonné de la mutation en cours ? Pas si sûr. "De plus en plus de
jeunes gens quittent les banlieues et regagnent le centre-ville pour s’y installer. Ils y achètent une
maison à bas prix, s’équipent d’un vélo et réinvestissent progressivement Détroit", s’enthousiasme
Grace Lee Bogs. "Avec la crise énergétique, le modèle des banlieues ne tient pas. Elles ont été
pensées pour un pétrole à bas-prix". Pour elle, une société post-industrielle est en construction dans
la métropole déchue. Détroit pourrait ainsi constituer "une opportunité unique" de repenser ce à quoi
une nouvelle communauté américaine pourrait ressembler.
Détroit : l'agriculture urbaine, antidote à la
désindustrialisation ?
from Alter-Echos
http://vimeo.com/66000659#
L’une des clés réside dans le mouvement autour de
l’agriculture urbaine en pleine expansion. Alors que la
portion de la ville inoccupée est évaluée à 233 km² (sur
une surface totale de 350 km²), Détroit et la ’Rust
Belt’ (littéralement, ceinture de rouille) [1] pourrait se
transformer en ’Green Belt’ (ceinture verte). Paradoxe
historique : un siècle plus tôt, dans les années 1890,
Détroit était le premier centre urbain à considérer
l’agriculture urbaine comme une nécessité. Le maire de
l’époque, Hazen Stuart Pingree, mit en place un plan
qui visait à transformer en potagers les territoires de la
ville laissés vacants afin de nourrir les plus démunis. En
1992, face à l’échec des politiques publiques, un mouvement – Détroit Summer – s’est mis en tête de
"reconstruire la ville en partant du sol". "Certains se préoccupèrent de développer le transport en
vélo, d’autres créèrent des groupes de travail en poésie afin d’exprimer leurs pensées", raconte
Grace. Aujourd’hui, plus de 1 300 jardins sont gérés par le programme Detroit Garden Ressource.
Moyennant entre 10 $ par an (7 euros) pour les jardins communautaires et 20 $ (15 euros) pour les
jardins familiaux, ce programme assure distribution de graines, plants et formations. 45 écoles
publiques seraient également impliquées dans les programmes Farm-to-School ("De la ferme à
l’école").
Révolution culturelle au pays des Fast-Food
Développer un jardin est un moyen de construire une solidarité de quartier. Dans la droite ligne du
sociologue américain Saul Alinski qui a fortement inspiré Barack Obama, l’objectif est de "construire
une communauté", et de la rendre en quelque sorte résiliente aux évènements extérieurs. " Il ne sert
à rien de dépenser son énergie à quémander auprès des pouvoirs publics qui n’ont plus de
ressources. Il faut se prendre en main pour changer nos façons de vivre", assène Leanne, membre
d’un jardin communautaire. Cette "transformation du rapport à la nourriture" générerait donc une
23
véritable révolution culturelle au pays des Fast-Food. Evidemment, les obstacles ne cessent de se
dresser à l’image de ce partenariat conclu entre des bibliothèques de la ville de Détroit et Mc
Donald’s : contre l’emprunt régulier des livres, les enfants voient leur carte de bibliothèque créditer de
bons gratuits chez le roi de la malbouffe. Ronald incitant à la lecture, difficile à avaler !
"Détroit est aujourd’hui un désert alimentaire", observe Kwamena Mensah, un ancien fonctionnaire
investi au sein d’une petite ferme urbaine, D-Town farm. Les établissements les plus accessibles sont
des magasins à un dollar, des fast-food et des stations-service. "Nous avons ressenti le besoin de
reprendre le contrôle de notre propre alimentation et nous avons fondé un réseau pour assurer la
sécurité alimentaire de la communauté", explique Kwamena. "Nous ne pouvons plus continuer à
importer 98 % de notre alimentation. Cette ferme est la preuve que nous pouvons faire autrement".
Mais pour Kwamena, D-Town farm ne peut se contenter de produire de l’alimentation : l’enjeu est
aussi de créer des emplois. "Il n’est plus nécessaire de compter sur l’automobile, mais nous pouvons
par contre nous appuyer sur l’agriculture, plus saine pour tous et redonnant du sens à la vie
collective".
Regain d’intérêts pour les coopératives
Michèle Obama a été photographiée sous toutes
les coutures dans le potager de la Maison Blanche
et l’on a pu voir figurer l’agriculture urbaine dans le
plan de relance de l’économie américaine concocté
par son mari. Est-ce à dire que l’agriculture urbaine
pourrait suffire à nourrir la population de Détroit ?
Ce n’est pas ce que pense Randy Harmshire,
agriculteur bio rencontré au marché d’Eastern
Market et possédant une ferme d’un peu plus de 80
hectares à 130 kilomètres au Nord de Détroit.
Voyant d’un bon œil que les citadins "remettent les
mains dans la terre", il reste sceptique sur la
capacité à produire en ville des cultures à faible
valeur ajoutée, comme le blé ou le haricot noir, et considère qu’il est "urgent de préserver les fermes
victimes de la pression urbaine permise par la voiture".
Du côté des syndicats, la question de la reconversion des industries gagne du terrain. Du moins,
dans les courants les plus à gauche de l’UAW. "Avec toutes les usines qui ferment, beaucoup d’entre
nous évoquent la possibilité de les rouvrir pour produire des bus ou des trains, explique Wendy
Thompson. Mais "la faiblesse de la structure sociale en place pour que ce changement se produise
rend les choses difficiles". "Nous n’avons pas le choix", réaffirme de son côté Dan Carmody, le
président d’Eastern Market Corporation, le plus grand marché de produits frais de la ville.
Vers une société post-industrielle
"Les cinquante prochaines années seront très différentes car nous n’aurons plus accès au pétrole à
bas-coût et cela va tout changer. La raréfaction de l’énergie questionne l’alimentation, les transports,
les bâtiments. Nous faisons tous partie d’un système qu’il nous faut changer ou aucun d’entre nous
ne survivra". Très impliqué dans le mouvement pour la relocalisation de l’alimentation, Dan espère
que ce dernier saura s’inspirer du modèle économique de l’industrie de la bière aux Etats-Unis. "Les
grandes firmes comme Budweiser sont en train de perdre les marchés au profit de coopératives
produisant de la bière artisanale locale, nous devons être capable de faire la même chose dans le
domaine de l’alimentation".
24
Détroit est-elle entrée malgré elle en transition ? Pour Grace Lee Boggs, la ville a été pendant des
décennies le symbole international de l’industrialisation avant de devenir celui de la dévastation du
capitalisme. Aujourd’hui confie Grace, "nous créons une société post-industrielle, une nouvelle
civilisation. En sortant de chez moi, vous pouvez regarder autour de vous et voir seulement une ville
en ruine. Ou bien, regarder Détroit et vous dire, voici notre futur". Ce qui se joue à Détroit inspirera-til d’autres parties du monde frappées du même mal, qu’il se nomme austérité ou récession ?
Texte : Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle sur twitter
Vidéo : Sophie Chapelle et Maxime Combes / Alter-Echos
Photos : Jean-Paul Duarte / Collectif à-vif(s)
Notes
[1] La Rust Belt a été nommée jusque dans les années 1970 la Manufacturing Belt ("ceinture des
usines"), s’étendant de Chicago jusqu’aux côtes atlantiques, longeant les Grands Lacs ainsi que la
frontière canadienne, regroupant l’essentiel de la production industrielle américaine.
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ÉTATS-UNIS
PAR AGNÈS ROUSSEAUX
9 AVRIL 2013
05. "Strike debt" : un plan de
sauvetage du peuple par le
peuple
25
Trois ménages sur quatre sont endettés
aux États-Unis. Si l’État fédéral est venu
en aide aux financiers de Wall Street au
bord de la faillite, il n’a pas porté secours
aux familles plombées par des frais de
santé, un prêt étudiant ou un emprunt
immobilier. Le mouvement "Strike debt" a
imaginé une solution : retourner les pratiques bancaires aux
bénéfices des personnes endettées, en rachetant leurs créances
dépréciées pour tout simplement les annuler. Explications.
Le mouvement Strike Debt – "grève de la dette" – vient de réduire à néant plus d’un million de dollars
de dettes médicales dans les États du Kentucky et de l’Indiana. Un millier de personnes choisies au
hasard, ayant contracté une créance de 900 dollars en moyenne à cause d’une hospitalisation ou
d’une opération chirurgicale, ont vu leur dette effacée. Tout simplement. Et ce n’est pas un miracle :
c’est grâce au collectif Strike Debt, issu du mouvement Occupy Wall Street, qui a secoué les ÉtatsUnis il y a un an et demi. Ce collectif a décidé de retourner à son avantage, et aux bénéfices des
personnes lourdement endettées, une pratique bancaire courante.
Quand les emprunteurs n’arrivent plus à rembourser, englués dans un prêt immobilier à taux variable
ou un crédit étudiant à payer alors qu’on est au chômage, les banques cherchent à se débarrasser
de cette créance devenue toxique. Pour récupérer une partie de leurs avoirs, elles "vendent" ces
crédit à moindre coût à des organismes de recouvrement ou à des marchés spéculatifs. A eux, pour
entrer dans leurs frais, de tout mettre en œuvre pour obtenir le remboursement du prêt, du
harcèlement téléphonique à la saisie de biens dans certains cas. Strike Debt fait de même, sans en
arriver à ces extrémités qui précipitent dans la pauvreté des millions d’Américains.
Trois ménages sur quatre sont endettés
Le principe : acheter collectivement et à bas prix des dettes en défaut, sur le marché secondaire,
auprès des organismes collecteurs de dette. Ensuite, au lieu d’exiger le remboursement de ces
créances, Strike Debt les annule ! Lancée en novembre dernier, l’association Rolling Jubilee offre un
cadre juridique à ce processus. Elle assure être en mesure d’acheter et d’effacer 20 dollars de dette
pour chaque dollar collecté, grâce à la dépréciation de la valeur de ces crédits lors de leur revente.
Les 570 000 dollars collectés jusqu’à présent lui permettrait ainsi d’acheter et d’annuler plus de 11
millions de dollars de dette privée.
Une initiative intéressante, mais une goutte d’espoir dans un océan de dettes ! Si le mouvement
Occupy s’attaque au problème des dettes privées, c’est que celles-ci atteignent des sommets aux
États-Unis. Le total des crédits contractés par des particuliers s’élève à 17.000 milliards de dollars,
soit 116 % du PIB [1] ! Trois ménages sur quatre sont endettés. Et un américain sur sept est
poursuivi par un agent de recouvrement pour sa dette, pointe Rolling jubilee.
Les prêts étudiants : une bombe à retardement
Quant aux prêts étudiants, ils ont atteint le niveau record de 1 000 milliards de dollars ! Une "bombe
à retardement" qui pourrait être le déclencheur de la prochaine crise économique aux États-Unis,
estiment les experts. Car 60 % des étudiants contractent un prêt pour leurs études, et près d’un
emprunteur sur 10 est actuellement en défaut de paiement [2].
26
Le montant moyen des prêts étudiants est de 26 000 dollars. Il a plus que doublé en 20 ans [3]... Et
un étudiant sur 10 a contracté plus de 61 000 dollars de dettes avant de commencer à travailler ! En
cas de difficulté financière, les débiteurs peuvent difficilement se débarrasser de ces dettes, qui sont
en grande partie garanties par l’État fédéral. Celui-ci met donc en œuvre des moyens considérables
pour les recouvrer. En 2011, le ministère de l’Éducation a ainsi payé 1,4 milliards de dollars à des
agences de recouvrement, pour tenter d’obtenir le remboursement de 76 milliards de dollars de prêts
en défaut de paiement [4] ! Ces agences peuvent aller jusqu’à saisir les salaires et les cotisations
sociales. Il n’y a donc pas de marché secondaire, où s’échangeraient ces créances douteuses. Et
donc pas d’intervention possible sur ce type de dette pourtant hautement sensible, déplore Rolling
Jubilee, qui continue de chercher un moyen pour racheter des prêts étudiants et les effacer.
Des agences de notation pour les individus
Le mouvement se focalise pour le moment sur les dettes médicales. Deux tiers des "mises en faillite"
personnelles sont liées à des dettes contractées lors d’opérations médicales, d’admissions aux
urgences ou de soins. Le fait d’avoir une assurance santé ne préserve en rien de ces situations. Lors
de sa semaine d’action "La vie ou la dette", fin mars, Rolling Jubilee a réalisé une tournée des
compagnies d’assurance-santé aux pratiques jugées abusives. Les rémunérations annuelles des
PDG de quatre d’entre elles "permettrait d’acheter et d’effacer près de 2 milliards de dollars de dette
médicales, selon le système de Rolling Jubilee", expliquaient les manifestants.
"La dette n’est pas personnelle, elle est politique", clame Strike Debt. Celui-ci se donne pour mission
de "politiser" la question de la dette, en montrant qu’elle est avant tout un problème social et non pas
une défaillance individuelle ou une faute morale (lire également notre entretien : "La dette neutralise
le temps, matière première de tout changement politique ou social"). "Le système-dette veut nous
isoler, nous faire taire, et nous soumettre, par la peur des notes délivrées par les toutes-puissantes
agences de notation de crédit". Car aux États-Unis, des agences attribuent des notes à ceux qui
sollicitent une banque pour un prêt, selon un système très opaque. Ces notes "sont ensuite utilisées
par les banques et autres établissements de crédit pour déterminer l’octroi ou non d’une carte de
crédit, d’un prêt hypothécaire, le taux appliqué à tel ou tel prêt", explique Stéphanie Jacquemont du
Comité pour l’annulation de la dette du Tiers-monde (CADTM). "Les employeurs exigent même de
voir ces notes avant d’embaucher !"
"Jetés en pâture aux requins du prêt"
"Avoir une note de crédit, c’est un peu comme avoir un tatouage ou un
code-barres sur le front, et le tatoueur serait l’agence de
renseignements des consommateurs (Consumer reporting agency,
CRA), décrit Rolling Jubilee. C’est réellement pervers – nous acceptons
d’être observés, localisés, définis, classés et évalués. Et si nous
refusons ? Bannissement financier – nous sommes jetés en pâture aux
loups du crédit et aux requins du prêt."
"Cette activité est très peu régulée par l’État, écrit Stéphanie
Jacquemont. Alors même que son influence s’étend dangereusement :
les employeurs, les propriétaires, de plus en plus exigent qu’on leur
présente un rapport de crédit, les assurances ont commencé à prendre
en compte les notes de crédit pour déterminer leurs taux, et même les
hôpitaux utilisent ces données !"
Remettre les compteurs à zéro
En s’attaquant à la dette privée, ce mouvement s’en prend aux racines du système économique et
financier. L’association Rolling Jubilee veut aller jusqu’à une annulation globale des dettes. Le terme
"Jubilé" vient de la tradition religieuse d’"année jubilaire" : dans le judaïsme et le christianisme, il
s’agit d’une année spéciale, tous les cinquante ans, durant laquelle les terres doivent être
redistribuées de façon équitable et les esclaves libérés.
27
Une façon de remettre les compteurs à zéro, pour éviter que les situations de grande injustice ne se
pérennisent. "L’idée d’abolir la dette – libérer les esclaves, littéralement et métaphoriquement – est
un élan très puissant, très humain, que nous voulons actualiser pour le nouveau siècle", déclarait
l’humoriste David Rees lors de la cérémonie de lancement de la campagne Rolling Jubilee en
novembre dernier.
Un plan de sauvetage du peuple
"Les civilisations, les unes après les autres, ont reconnu que lorsqu’une dette devient ingérable, elle
doit être annulée", avance Rolling jubilee, qui met en avant le décalage entre la générosité envers
Wall Street lors de la crise financière et l’absence flagrante de secours aux ménages endettés et aux
municipalités en faillite. Un point de vue partagé par l’anthropologue David Graeber, dont l’ouvrage
Debt : The First 5,000 Years est devenu une référence pour le mouvement. Une annulation de dette
"serait salutaire, écrit-il. "Pas seulement parce que cela soulagerait une véritable souffrance
humaine, mais aussi parce que ce serait une façon de nous rappeler que l’argent n’est pas indicible,
que payer sa dette n’est pas l’essence de la moralité, que tout cela n’est qu’un arrangement humain
et que si la démocratie a un sens, c’est bien cette capacité à se mettre tous d’accord pour arranger
les choses d’une façon différente".
"Qu’est-ce que la dette, finalement ? Une dette est la perversion d’une promesse. C’est une
promesse corrompue avec des mathématiques et de la violence", ajoute le chercheur. "Les 1 % ont
joué avec nos moyens de subsistance. Contrairement à leur insouciance, ceux d’entre nous qui
prônent le refus de la dette prennent leur responsabilité
collective très au sérieux", conclut Rolling Jubilee. Le
mouvement Strike Debt offre des solutions concrètes aux
personnes endettées, pour tenter de sortir de la spirale
sans fin de l’endettement, individuel et collectif. Un plan
de sauvetage du peuple par le peuple.
Agnès Rousseaux
@AgnesRousseaux sur twitter
Le site de la campagne Rolling jubilee
Le mouvement Strike Debt (en anglais)
A lire : Manuel des résistants à la dette (en anglais)
Notes
[1] Chiffre de fin 2010, selon une étude internationale de la Banque de France. Par comparaison, le taux d’endettement
des ménages en France était en 2010 équivalent à 54,4% du PIB.
[2] Un foyer sur cinq devait rembourser un prêt étudiant aux États-Unis en 2010. Soit deux fois plus qu’il y a 20 ans, et
15 % de plus qu’en 2007, selon une étude de l’Institut Pew. Le taux de défaut sur ce type de crédit est de 9%, contre 6%
il y a dix ans. 85 % de ces prêts sont garantis par l’État fédéral Source
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28
Green People
24-04-2013
06. Caroline Delboy, cool à
facettes
(Crédit photo : Philippe Quaisse pour "Terra eco")
Ultraconnectée, joyeuse et
ambitieuse : cette entrepreneuse
est à l’image du militantisme
d’aujourd’hui. Après des études de commerce, la
jeune Française a trouvé sa voie en lançant les
Disco Soupes dans l’Hexagone. Le but : lutter
contre le gaspillage alimentaire.
Le Baromètre de cet article
Observer la génération qui débarque est un exercice fascinant. Un nouveau paradigme prend vie. Le
philosophe Michel Serres parle de "Petite Poucette" (1), "nouvel humain" qui tapote son écran tactile
et vit au cœur de la mutation de notre monde. Caroline Delboy, 26 ans, est l’une de ces Petites
Poucettes.
En mars 2012, elle a lancé en France les Disco Soupes, des fêtes où l’on cuisine, en musique, des
légumes de récup, pour militer contre le gaspillage.
Quelques mois plus tard, la jeune femme a même quitté son CDI de commerciale pour créer Sense
School, une entreprise qui fait appel à des étudiants pour résoudre les problématiques
d’entrepreneurs sociaux. Comme beaucoup de ses "potes", sur Facebook et dans la vraie vie,
Caroline incarne la partie réjouissante du basculement en cours.
C’est une brune ébouriffée que l’enthousiasme rend volubile. Œil qui pétille. Jean slim. Dégaine
décontractée. Elle a poussé en banlieue parisienne, à Meudon (Hauts-de-Seine). Suivi des études
dans une école de commerce parisienne – l’ESCP –, avec des pauses à Londres, Berlin et aux
Etats-Unis. A 24 ans, la voilà pourvue d’un diplôme, mais pas d’une vocation. "Je savais juste ce que
je n’avais pas envie de faire : audit, finances, etc."
Son stage à la régie pub de Canal Plus débouche sur un CDD. Elle reste, avec l’idée que "le métier
de commercial [lui] servira, de toute façon". Caroline gagne ensuite le Web, "là où ça se passe", chez
Dromadaire, un site de cartes virtuelles. Elle y aime l’ambiance jeune, l’autonomie, l’esprit start-up.
Mais le déclic tarde à venir.
29
Hold-up et gangsters
Il arrive quand Caroline rencontre Christian Vanizette, même âge, mêmes études. Il revient d’Asie, où
il est allé à la rencontre d’entrepreneurs sociaux. A son retour, il veut connecter ces derniers à des
étudiants capables de les aider. Il crée MakeSense en 2010 et invente les "hold-up d’idées" : un chef
d’entreprise sociale soumet son problème et des volontaires planchent, deux heures durant, sous la
houlette d’un "gangster", avec une méthodologie précise et une proposition concrète au final.
Volontaires et patrons se retrouvent lors de "Sense drinks", pour boire des coups, ou de "Sense
camps", pour refaire le monde. Caroline participe à son premier "hold-up" en 2011. Puis, s’envole en
janvier suivant pour un "Sense camp" à Berlin.
"Là, un truc magique se passe. En un seul week-end, je me suis plus nourrie de rencontres que dans
les deux années précédentes. Je me suis dit : “ C’est ça ! ” C’est avec ces gens-là que je me sens
bien. J’ai aussi découvert, ce week-end-là, le principe des Disco Soupes, les “ Schnippel Disko ”,
dans un marché couvert. En plus, j’ai vécu un an à Berlin et j’adore cette ville. C’était le nirvana ! Le
lundi, à Dromadaire, j’étais sonnée. Je me disais : “ Qu’est-ce qui s’est passé ? ”" La Petite Poucette
met un post sur Facebook, à propos des Schnippel Disko. "Et c’est parti."
Une demi-douzaine de personnes se mobilisent. Le 10 mars 2012, la première Disco Soupe fait
danser les éplucheurs à "Mutinerie", un espace de coworking parisien, au son d’un groupe folk-rock.
Trois événements se succèdent dans la capitale, avec les restes de grossistes de Rungis ou des
légumes abandonnés en fin de marché. Et en octobre 2012, l’équipe de Disco Soupe coorganise le
"Banquet des 5 000", sur le parvis de l’Hôtel de ville, à Paris, à l’invitation de Canal Plus. La chaîne
fait ainsi la promo du docu Global Gâchis. "A partir de là, plein de gens nous ont contactés. De
Bordeaux, Marseille…"
La bande est même invitée par le gouvernement dans un groupe de travail sur le gaspillage
alimentaire. "Il n’y a pas de chef, ici. On fonctionne en open source. On met notre méthodologie à
disposition, en demandant de respecter quelques principes de base : pas de récupération politique,
ni commerciale, des légumes destinés à la poubelle, de la musique…" A ce jour, les Disco Soupes
ont fait guincher, cuisiner et militer dans une vingtaine de villes de l’Hexagone. "Il y a aussi bien
Martine, 51 ans, à Toulouse, que des étudiants. La plupart se bougent pour la première fois."
Octobre 2012 : c’est le moment que choisit Caroline Delboy pour assumer sa vocation
d’entrepreneuse sociale. Elle crée Sense School, avec Marine Plossu, rencontrée dans l’avion pour
le "Sense camp" de Berlin. Leur idée ? "On apprend beaucoup avec MakeSense : créativité, défi,
rencontres, explique Marine. On organise donc des hold-up adaptés aux salles de classe, sur
deux jours." Elles lancent aussi des "Sense academies". Pour la première, de décembre à mars
dernier, étudiants designers, commerciaux et ingénieurs se sont creusé le ciboulot pour aider Siel
Bleu. L’asso propose des activités physiques adaptées aux personnes âgées, malades ou
handicapées et voulait concevoir du matériel spécialement conçu pour son public.
Facebook et dinosaures
"Petite Poucette" doit "inventer de nouveaux liens", affirme Michel Serres. C’est en cours. En 2012,
MakeSense a mobilisé 10 000 personnes, aidé 250 entrepreneurs, lors de 350 actions. En France, à
Lisbonne, Tokyo ou Singapour. "Notre réseau se répand de manière organique, avec du temps, de
l’énergie et la viralité de Facebook", observe Caroline. Le philosophe écrit encore : "Les Petits
Poucets, anonymes, annoncent, de leur voix diffuse, que ces dinosaures, qui prennent d’autant plus
de volume qu’ils sont en voie d’extinction, ignorent l’émergence de nouvelles compétences."
Elles sont pourtant réjouissantes, ces nouvelles compétences : "On n’est pas là pour blablater, lance
la jeune femme. Je suis entourée de gens ambitieux, qui passent à l’action. Et pratiquent la joie de
vivre. Si ça ne nous fait pas tripper, on ne le fait pas." Action, joie, réseaux sociaux : ce nouveau
paradigme est-il à la hauteur de l’enjeu, colossal ? Il est, c’est là l’essentiel. Pendant que nous
théorisons sur la nouvelle ère, les Petits Poucets avancent, à la vitesse d’un buzz sur Facebook. —
30
(1) "Petite Poucette" (Le Pommier, 2012).
Article publié dans le
N° 47 - mai 2013
Le mirage Notre-Dame-des-Landes
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07. Eduquer au XXIe siècle
Michel Serres
Avant d'enseigner quoi que ce soit à qui que ce soit, au
moins faut-il le connaître. Qui se présente,aujourd'hui, à
l'école, au collège, au lycée, à l'université ?
Ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n'a jamais vu
veau, vache, cochon ni couvée. En 1900, la majorité des
humains, sur la planète, travaillaient au labour et à la
pâture; en 2011, la France,comme les pays analogues, ne compte plus qu'un pour cent de paysans.
Sans doute faut-il voir là une des plus fortes ruptures de l'histoire, depuis le néolithique. Jadis référée
aux pratiques géorgiques, la culture, soudain, changea.
Celle ou celui que je vous présente ne vit plus en compagnie des vivants, n'habite plus la même
Terre, n'a plus le même rapport au monde. Elle ou il n'admire qu'une nature arcadienne, celle du
loisir ou du tourisme.
- Il habite la ville. Ses prédécesseurs immédiats, pour plus de la moitié, hantaient les champs. Mais,
devenu sensible à l'environnement, il polluera moins, prudent et respectueux, que nous autres,
adultes inconscients et narcisses. Il n'a plus la même vie physique, ni le même monde en nombre,
la démographie ayant soudain bondi vers sept milliards d'humains; il habite un monde plein.
- Son espérance de vie va vers quatre-vingts ans. Le jour de leur mariage, ses arrière-grands parents
s'étaient juré fidélité pour une décennie à peine. Qu'il et elle envisagent de vivre ensemble, vont-ils
jurer de même pour soixante-cinq ans ? Leurs parents héritèrent vers la trentaine, ils attendront la
vieillesse pour recevoir ce legs. Ils ne connaissent plus les mêmes âges, ni le même mariage ni la
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même transmission de biens. Partant pour la guerre, fleur au fusil, leurs parents offraient à la patrie
une espérance de vie brève; y courront-ils, de même, avec, devant eux, la promesse de six
décennies ?
- Depuis soixante ans, intervalle unique dans notre histoire, il et elle n'ont jamais connu de guerre, ni
bientôt leurs dirigeants ni leurs enseignants. Bénéficiant d‘une médecine enfin efficace et, en
pharmacie, d'antalgiques et d'anesthésiques, ils ont moins souffert, statistiquement parlant, que
leurs prédécesseurs. Ont-ils eu faim ? Or, religieuse ou laïque, toute morale se résumait en des
exercices destinés à supporter une douleur inévitable et quotidienne : maladies, famine, cruauté du
monde. Ils n'ont plus le même corps ni la même conduite; aucun adulte ne sut leur inspirer une
morale adaptée.
- Alors que leurs parents furent conçus à l'aveuglette, leur naissance est programmée. Comme, pour
le premier enfant, l'âge moyen de la mère a progressé de dix à quinze ans, les parents d'élèves ont
changé de génération. Pour plus de la moitié, ces parents ont divorcé. Ils n'ont plus la même
généalogie.
- Alors que leurs prédécesseurs se réunissaient dans des classes ou des amphis homogènes
culturellement, ils étudient au sein d'un collectif où se côtoient désormais plusieurs religions, langues,
provenances et moeurs. Pour eux et leurs enseignants, le multiculturalisme est de règle.
Pendant combien de temps pourront-ils encore chanter l'ignoble "sang impur" de quelque étranger ?
Ils n'ont plus le même monde mondial, ils n'ont plus le même monde humain. Mais autour d'eux, les
filles et les fils d'immigrés, venus de pays moins riches, ont vécu des expériences vitales inverses.
➫ BILAN TEMPORAIRE
Quelle littérature, quelle histoire comprendront-ils, heureux, sans avoir vécu la rusticité, les bêtes
domestiques, la moisson d'été, dix conflits, cimetières, blessés, affamés, patrie, drapeau sanglant,
monuments aux morts, sans avoir expérimenté dans la souffrance, l'urgence vitale d'une morale ?
➫ VOILÀ POUR LE CORPS; VOICI POUR LA CONNAISSANCE
- Leurs ancêtres fondaient leur culture sur un horizon temporel de quelques milliers d'années, ornées
par l'Antiquité gréco-latine, la Bible juive, quelques tablettes cunéiformes, une préhistoire courte.
Milliardaire désormais, leur horizon temporel remonte à la barrière de Planck, passe par l'accrétion
de la planète, l'évolution des espèces, une paléo-anthropologie millionnaire. N'habitant plus le même
temps, ils vivent une toute autre histoire.
- Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur
faculté d'attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux
questions à quinze secondes, chiffres officiels; dont le mot le plus répété est "mort" et l'image la plus
représentée celle de cadavres. Dès l'âge de douze ans, ces adultes-là les forcèrent à voir plus de
vingt mille meurtres.
- Ils sont formatés par la publicité; comment peut-on leur apprendre que le mot relais, en français
s'écrit "- ais", alors qu'il est affiché dans toutes les gares "- ay" ? Comment peut-on leur apprendre le
système métrique, quand, le plus bêtement du monde, la SNCF leur fourgue des "s'miles" ? Nous,
adultes, avons doublé notre société du spectacle d'une société pédagogique dont la concurrence
écrasante, vaniteusement inculte, éclipse l'école et l'université. Pour le temps d'écoute et de vision,
la séduction et l'importance, les médias se sont saisis depuis longtemps de la fonction
d'enseignement. Critiqués, méprisés, vilipendés, puisque pauvres et discrets, même s'ils détiennent
le record mondial des prix Nobel récents et des médailles Fields par rapport au nombre de la
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population, nos enseignants sont devenus les moins entendus de ces instituteurs dominants, riches
et bruyants.
Ces enfants habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l'usage de la toile, lecture
ou écriture au pouce des messages, consultation de Wikipedia ou de Facebook, n'excitent pas les
mêmes neurones ni les mêmes zones corticales que l'usage du livre, de l'ardoise ou du cahier. Ils
peuvent manipuler plusieurs informations à la fois.
Ils ne connaissent ni n'intègrent ni ne synthétisent comme nous, leurs ascendants. Ils n'ont plus la
même tête.
- Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes; par GPS, en tous lieux; par la toile, à tout
le savoir; ils hantent donc un espace topologique de voisinages, alors que nous habitions un espace
métrique, référé par des distances. Ils n'habitent plus le même espace.
Sans que nous nous en apercevions, un nouvel humain est né, pendant un intervalle bref, celui qui
nous sépare des années soixante-dix. Il ou elle n'a plus le même corps, la même espérance de vie,
ne communique plus de la même façon, ne perçoit plus le même monde, ne vit plus dans la même
nature, n'habite plus le même espace. Né sous péridurale et de naissance programmée, ne redoute
plus, sous soins palliatifs, la même mort. N'ayant plus la même tête que celle de ses parents, il ou
elle connaît autrement.
- Il ou elle écrit autrement. Pour l'observer, avec admiration, envoyer, plus rapidement que je ne
saurai jamais le faire de mes doigts gourds, envoyer, dis-je, des SMS avec les deux pouces, je les ai
baptisés, avec la plus grande tendresse que puisse exprimer un grand-père, Petite Poucette et Petit
Poucet. Voilà leur nom, plus joli que le vieux mot, pseudo-savant, de dactylo.
- Ils ne parlent plus la même langue. Depuis Richelieu, l'Académie française publie, à peu près tous
les vingt ans, pour référence, le dictionnaire de la nôtre. Aux siècles précédents, la différence entre
deux publications s'établissait autour de quatre à cinq mille mots, chiffres à peu près constants; entre
la précédente et la prochaine, elle sera d'environ trente mille. A ce rythme, on peut deviner qu'assez
vite, nos successeurs pourraient se trouver, demain, aussi séparés de notre langue que nous le
sommes, aujourd'hui, de l'ancien français pratiqué par Chrétien de Troyes ou Joinville.
Ce gradient donne une indication quasi photographique des changements que je décris. Cette
immense différence, qui touche toutes les langues, tient, en partie, à la rupture entre les métiers des
années récentes et ceux d'aujourd'hui. Petite Poucette et son ami ne s'évertueront plus aux mêmes
travaux. La langue a changé, le labeur a muté.
➫ L'INDIVIDU
Mieux encore, les voilà devenus tous deux des individus. Inventé par saint Paul, au début de notre
ère, l'individu vient de naître ces jours-ci. De jadis jusqu'à naguère, nous vivions d'appartenances:
français, catholiques, juifs, protestants, athées, gascons ou picards, femmes ou mâles, indigents ou
fortunés… nous appartenions à des régions, des religions, des cultures, rurales ou urbaines, des
équipes, des communes, un sexe, un patois, la Patrie. Par voyages, images, Toile et guerres
abominables, ces collectifs ont à peu près tous explosé. Ceux qui restent s'effilochent. L'individu ne
sait plus vivre en couple, il divorce; ne sait plus se tenir en classe, il bouge et bavarde; ne prie plus
en paroisse; l'été dernier, nos footballeurs n'ont pas su faire équipe; nos politiques savent-ils encore
construire un parti plausible ou un gouvernement stable ?
On dit partout mortes les idéologies; ce sont les appartenances qu'elles recrutaient qui
s'évanouissent. Ce nouveau-né individu, voilà plutôt une bonne nouvelle. A balancer les
inconvénients de ce que l'on appelle égoïsme par rapport aux crimes commis par et pour la libido
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d'appartenance – des centaines de millions de morts –, j'aime d'amour ces jeunes gens. Cela dit,
reste à inventer de nouveaux liens. En témoigne le recrutement de Facebook, quasi équipotent à la
population du monde. Comme un atome sans valence, Petite Poucette est toute nue.
Nous, adultes, n'avons inventé aucun lien social nouveau. L'entreprise généralisée du soupçon et de
la critique contribua plutôt à les détruire. Rarissimes dans l'histoire, ces transformations, que j'appelle
hominescentes, créent, au milieu de notre temps et de nos groupes, une crevasse si large et si
évidente que peu de regards l'ont mesurée à sa taille, comparable à celles visibles au néolithique, à
l'aurore de la science grecque, au début de l'ère chrétienne, à la fin du Moyen Age et à la
Renaissance. Sur la lèvre aval de cette faille, voici des jeunes gens auxquels nous prétendons
dispenser de l'enseignement, au sein de cadres datant d'un âge qu'ils ne reconnaissent plus:
bâtiments, cours de récréation, salles de classes, amphithéâtres, campus, bibliothèques,
laboratoires, savoirs même…cadres datant, dis-je, d'un âge et adaptés à une ère où les hommes et
le monde étaient ce qu'ils ne sont plus.
Trois questions, par exemple : que transmettre ? A qui le transmettre ? Comment le transmettre ?
➫ QUE TRANSMETTRE ? LE SAVOIR !
Jadis et naguère, le savoir avait pour support le corps du savant, aède ou griot. Une bibliothèque
vivante… voilà le corps enseignant du pédagogue. Peu à peu, le savoir s'objectiva : d'abord dans
des rouleaux, sur des vélins ou parchemins, support d'écriture; puis, dès la Renaissance, dans les
livres de papier, supports d'imprimerie; enfin, aujourd'hui, sur la toile, support de messages et
d'information. L'évolution historique du couple support-message est une bonne variable de la fonction
d'enseignement. Du coup, la pédagogie changea au moins trois fois : avec l'écriture, les Grecs
inventèrent la Paideia; à la suite de l'imprimerie, les traités de pédagogie pullulèrent. Aujourd'hui ?
Je répète. Que transmettre ? Le savoir ? Le voilà, partout sur la Toile, disponible, objectivé.
Le transmettre à tous ? Désormais, tout le savoir est accessible à tous.
Comment le transmettre ? Voilà,c'est fait. Avec l'accès aux personnes, par le téléphone cellulaire,
avec l'accès en tous lieux, par le GPS, l'accès au savoir est désormais ouvert. D'une certaine
manière, il est toujours et partout déjà transmis.
Objectivé, certes, mais, de plus, distribué. Non concentré. Nous vivions dans un espace métrique,
dis-je, référé à des centres, à des concentrations. Une école, une classe, un campus, un amphi, voilà
des concentrations de personnes, étudiants et professeurs, de livres en bibliothèques, d'instruments
dans les laboratoires… ce savoir, ces références, ces textes, ces dictionnaires… les voilà distribués
partout et, en particulier, chez vous – même les observatoires ! mieux, en tous les lieux où vous vous
déplacez; de là étant, vous pouvez toucher vos collègues, vos élèves, où qu'ils passent; ils vous
répondent aisément. L'ancien espace des concentrations – celui-là même où je parle et où vous
m'écoutez, que faisons-nous ici ? – se dilue, se répand; nous vivons, je viens de le dire, dans un
espace de voisinages immédiats, mais, de plus, distributif. Je pourrais vous parler de chez moi ou
d'ailleurs, et vous m'entendriez ailleurs ou chez vous, que faisons-nous donc ici ?
Ne dites surtout pas que l'élève manque des fonctions cognitives qui permettent d'assimiler le savoir
ainsi distribué, puisque, justement, ces fonctions se transforment avec le support et par lui.
Par l'écriture et l'imprimerie, la mémoire, par exemple, muta au point que Montaigne voulut une tête
bien faite plutôt qu'une tête bien pleine. Cette tête vient de muter encore une fois. De même donc
que la pédagogie fut inventée (paideia) par les Grecs, au moment de l'invention et de la propagation
de l'écriture; de même qu'elle se transforma quand émergea l'imprimerie, à la Renaissance; de
même, la pédagogie change totalement avec les nouvelles technologies. Et, je le répète, elles ne
sont qu'une variable quelconque parmi la dizaine ou la vingtaine que j'ai citée ou pourrais énumérer.
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Ce changement si décisif de l'enseignement – changement répercuté sur l'espace entier de la
société mondiale et l'ensemble de ses institutions désuètes, changement qui ne touche pas, et de
loin, l'enseignement seulement, mais aussi le travail, les entreprises, la santé, le droit et la politique,
bref, l'ensemble de nos institutions – nous sentons en avoir un besoin urgent, mais nous en sommes
encore loin.Probablement, parce que ceux qui traînent, dans la transition entre les derniers états,
n'ont pas encore pris leur retraite, alors qu'ils diligentent les réformes, selon des modèles depuis
longtemps effacés.
Enseignant pendant un demi-siècle sous à peu près toutes les latitudes du monde, où cette crevasse
s'ouvre aussi largement que dans mon propre pays, j'ai subi, j'ai souffert ces réformes-là comme des
emplâtres sur des jambes de bois, des rapetassages; or les emplâtres endommagent le tibia, même
artificiel : les rapetassages déchirent encore plus le tissu qu'ils cherchent à consolider. Oui, depuis
quelques décennies je vois que nous vivons une période comparable à l'aurore de la Paideia, après
que les Grecs apprirent à écrire et démontrer; semblable à la Renaissance qui vit naître l'impression
et le règne du livre apparaître; période incomparable pourtant, puisqu'en même temps que ces
techniques mutent, le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la souffrance et la
guérison, les métiers, l'espace, l'habitat, l'être-au-monde.
➫ ENVOI
Face à ces mutations, sans doute convient-il d'inventer d'inimaginables nouveautés, hors les cadres
désuets qui formatent encore nos conduites, nos médias, nos projets adaptés à la société du
spectacle. Je vois nos institutions luire d'un éclat semblable à celui des constellations dont les
astronomes nous apprirent qu'elles étaient mortes depuis longtemps déjà.
Pourquoi ces nouveautés ne sont-elles point advenues ? Je crains d'en accuser les philosophes,
dont je suis, gens qui ont pour métier d'anticiper le savoir et les pratiques à venir, et qui ont, ce me
semble, failli à leur tâche. Engagés dans la politique au jour le jour, ils n'entendirent pas venir le
contemporain. Si j'avais eu à croquer le portrait des adultes, dont je suis, ce profil eût été moins
flatteur. Je voudrais avoir dix-huit ans, l'âge de Petite Poucette et de Petit Poucet, puisque tout est à
refaire, puisque tout reste à inventer.
Je souhaite que la vie me laisse assez de temps pour y travailler encore, en compagnie de ces
Petits, auxquels j'ai voué ma vie, parce que je les ai toujours respectueusement aimés.
Michel Serres, de l'Académie française
Michel Serres AFP / Etienne de MALGLAIVE
Pour lire l'intégralité des textes de la coupole du 1er mars, reportez-vous sur le site de l'Institut
deFrance.
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08. La troisième révolution
industrielle et ses 3 piliers
La troisième révolution industrielle (celle de l'énergie) et ses trois
piliers fondateurs:
1) Le développement des énergies renouvelables,
2) Les technologies de stockage, dont l’hydrogène,
3) Les réseaux énergétiques intelligents.
Selon l’économiste américain Jeremy Rifkin, La fin de l’ère du pétrole approche à grand pas,
notamment par la forte augmentation de la demande des pays émergents comme l’Inde ou la Chine.
Le prix des produits pétroliers sur le marché ne cesse de croître (135 dollars le baril en mai 2008) et
les prochaines décennies nous entraîneront vers un plafonnement de sa production.
Dans le même temps, la hausse spectaculaire des émissions de gaz à effet de serre résultant de la
consommation d’énergies fossiles est en parfaite corrélation avec l’augmentation de la température
moyenne de la planète et fait courir le risque d’un changement climatique important qui pourrait voir
l’extinction de l’espèce humaine d’ici la fin de ce siècle.
Par conséquent, il est grand temps que toutes les décisions économiques et politiques
prennent en compte ces indicateurs environnementaux alarmants ainsi que le coût accru de
l’énergie fossile.
La question la plus importante est donc : Comment assurer la croissance durable d’une économie
mondialisée dans les décennies à venir, qui verront le déclin du système énergétique, et dont les
coûts externes et les défaillances croissants pèsent désormais plus que les avantages potentiels,
naguère considérables ?
Les produits pétroliers continueront certes à fournir une part substantielle de l’énergie consommée
en région Bretagne et en France pendant une quarantaine d’année encore. Pour autant, chacun
s’accorde à penser que nous sommes dans une période de transition où notre dépendance de la
consommation d’énergies fossiles devient de plus en plus insupportable et ralentit fortement
l’économie de la région Bretagne et de la France.
Pendant cette période incertaine de transition, les départements bretons feront leur maximum
pour accéder à une utilisation optimale et plus efficace du stock d’énergies fossiles.
A cette fin ils mettront en œuvre les méthodes expérimentales indispensables pour valoriser les
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techniques énergétiques "propres", tout en limitant la production de CO2 résultant de la combustion
d’énergie fossiles.
Ces efforts sont en totale cohérence avec les objectifs de réduction des émissions globales de CO2
de 20% (comparées à 1990) d’ici 2020, et avec l’objectif du facteur 4 (réduction par 4 d’ici 2050),
pour lesquels s’est engagée la France et l’Europe.
La gestion économe des sources d’énergie et la diminution des émissions de gaz à effet de serre ne
permettront pas à elles seules de répondre efficacement à la crise sans précédent que constituent le
réchauffement climatique et la raréfaction des produits pétroliers.
Pour préparer l’avenir, chaque région française devra explorer de nouvelles sources énergétiques et
établir de nouveaux modèles économiques avec l’objectif d’atteindre au plus près le niveau zéro
d’émissions de gaz à effet de serre.
La "troisième révolution industrielle", n’est pas une idée nouvelle, elle est étayée par les travaux
de spécialistes comme Victor A. Goltsov, T. Nejat Veziroglu en 2001, John O’M Bockris, en 2003 et
2006 et plus récemment par Jeremy Rifkin en 2007 qui est le président de la Fondation pour les
Tendances économiques à Washington, DC.
Mr. Rifkin est le conseiller du président de l'Union européenne, pour les questions d'énergie et
d'économie. Il est aussi conseiller spécial du groupe du Parlement européen sur l'avancement de la
Troisième Révolution Industrielle et le recours à l'économie de l'hydrogène.
Le concept d'utiliser l’Hydrogène comme une solution à long terme aux problèmes du réchauffement
climatique planétaire et la pollution a été déclenchée par une conversation sur les calculs menés par
Lawaczek, qui affirmait dans les années 1930 que l'envoi de l'énergie par des tuyaux serait moins
cher que l'envoi par des fils. J.O’M. Bockris a publié la 1ère note qui propose le stockage de
l’hydrogène et la transmission de l'énergie à travers l'utilisation de piles à combustibles, ainsi que la
solution générale à la dégradation de l'environnement climatique en 1971, un document en 1972 et le
1er livre en 1975. L’hydrogène serait utilisé à la place du gaz naturel dans l'industrie, en particulier
dans les extractions métallurgiques et à la maison.
Les Trois piliers fondamentaux de la 3ème révolution industrielle doivent être développés
simultanément et être conçus de façon entièrement intégrée pour que chacun des composants de
la filière puisse développer entièrement son potentiel et pour que le nouveau paradigme économique
devienne opérationnel :
Le développement des énergies renouvelables,
Les technologies de stockage, dont l’hydrogène,
Les réseaux énergétiques intelligents.
Les formes renouvelables d'énergie – énergie marémotrice, énergie d'origine solaire, éolienne,
hydraulique, géothermique, marine, biomasse - constituent le premier des trois piliers de la Troisième
Révolution Industrielle.
Ces énergies en émergence ne représentent encore qu’une faible part de l'ensemble des
énergies en Bretagne. Mais, elles se développent rapidement car la France et la Région fixent
des objectifs et des références pour favoriser leur large introduction sur le marché tandis que
leurs coûts décroissants les rendent de plus en plus compétitives. De plus les incitations
fiscales et les subventions en faveur de ces énergies renouvelables sont financièrement très
intéressantes en France, malgré la lourdeur administrative pour obtenir les documents et
autorisations nécessaires à leur expansion.
37
En France des centaines de millions d’euros de fonds publics et privés vont à la recherche, au
développement et à la pénétration du marché, tandis que les entreprises et les particuliers cherchent
à diminuer leurs émissions de carbone et à obtenir un meilleur rendement dans leur utilisation
d'énergie et à tendre vers l’indépendante énergétique.
Elles sont passées d’une production de 2786,6 TWh en 1997 à 3604,4 TWh en 2007, soit 817,8 TWh
supplémentaires ce qui équivaut à plus de deux fois la production d’électricité du Royaume-Uni.
Le plan Européen SET pour les technologies énergétiques stratégiques
Les technologies énergétiques ont un rôle essentiel à jouer dans la lutte contre le réchauffement
planétaire et l'approvisionnement en énergie de l'Europe et du monde. Pour réaliser les objectifs de
l'Europe à l'horizon 2020 et 2050 en matière d'émissions de gaz à effet de serre, d'énergies
renouvelables et d'efficacité énergétique, il faudra prendre des mesures dans le domaine du
rendement énergétique, des normes, des mécanismes de soutien et de la tarification des émissions
de carbone. La réalisation de ces objectifs suppose également le déploiement de nouvelles
technologies plus efficaces. Par conséquent, un important effort de recherche s'impose.
L'Europe dispose d'un potentiel énorme pour développer une nouvelle génération de technologies
énergétiques "décarbonisées" ('décarbonées'), comme les technologies de l'énergie éolienne en mer
ou de l'énergie solaire ou les technologies de la 2e génération pour l'exploitation de la biomasse.
Malheureusement, la recherche sur l'énergie dans l'UE est souvent insuffisamment financée,
dispersée et mal coordonnée.
Pour profiter des occasions qui s'offrent aujourd'hui à l'UE, il faut organiser et mettre en œuvre avec
plus de détermination des actions visant à mettre au point de nouvelles technologies énergétiques, à
réduire leur coût et à favoriser leur lancement sur le marché.
C'est la raison pour laquelle la Commission européenne propose le 22 novembre 2007 le plan
stratégique pour les technologies énergétiques (plan SET), un vaste plan visant à doter l'Europe d'un
nouvel agenda de recherche dans le domaine de l'énergie. La Commission estime que l'Europe
devrait réduire le coût des énergies non polluantes et placer les entreprises de l’UE en position de
pointe dans le secteur des technologies à faible intensité carbonique, un secteur en rapide
expansion. Le plan doit aller de pair avec une meilleure utilisation et une augmentation des
ressources tant humaines que financières pour accélérer la mise au point et le déploiement des
futures technologies à faible intensité carbonique.
"La politique énergétique de l'Europe a besoin d'une nouvelle révolution industrielle. Comme toutes
les révolutions industrielles, celle-ci aura pour moteur les technologies, et il est grand temps de
transformer nos ambitions politiques en actions concrètes. Les décisions qui seront prises au cours
des 10 à 15 prochaines années auront des conséquences profondes pour la sécurité énergétique, le
changement climatique, la croissance et l'emploi en Europe. Si nous nous laissons distancer dans la
compétition mondiale, de plus en plus disputée, pour la conquête des marchés des technologies à
faible intensité carbonique, nous risquons de devoir recourir à des technologies importées pour
atteindre nos objectifs", a déclaré Andris Piebalgs, membre de la Commission européenne chargé de
l'énergie.
Les 3 piliers de la troisième révolution industrielle de l'énergie:
1) Le développement des énergies renouvelables,
2) Les technologies de stockage, dont l’hydrogène,
3) Les réseaux énergétiques intelligents.
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01: Présentation des énergies renouvelables
Présentation
Les formes renouvelables d'énergie – énergie marémotrice,
énergie d'origine solaire, éolienne, hydraulique, géothermique,
marine, biomasse - constituent le premier des trois piliers de la
Troisième Révolution Industrielle.
Ces énergies en émergence ne représentent encore qu’une faible
part de l'ensemble des énergies en Bretagne. Mais, elles se
développent rapidement car la France et la Région fixent des
objectifs et des références pour favoriser leur large introduction sur
le marché tandis que leurs coûts décroissants les rendent de plus en plus compétitives.
De plus les incitations fiscales et les subventions en faveur de ces énergies renouvelables sont
financièrement très intéressantes en France, malgré la lourdeur administrative pour obtenir les
documents et autorisations nécessaires à leur expansion.
En France des centaines de millions d’euros de fonds publics et privés vont à la recherche, au
développement et à la pénétration du marché, tandis que les entreprises et les particuliers cherchent
à diminuer leurs émissions de carbone et à obtenir un meilleur rendement dans leur utilisation
d'énergie et à tendre vers l’indépendante énergétique.
Elles sont passées d’une production de 2786,6 TWh en 1997 à 3604,4 TWh en 2007, soit 817,8 TWh
supplémentaires ce qui équivaut à plus de deux fois la production d’électricité du Royaume-Uni.
02: Tarifs de rachats de l'électricité d'origine
renouvelable
Tarifs de rachat de l’électricité renouvelable et durée du contrat (2011)
➫ Biogaz et méthanisation
Entre 7,5 et 9 c€/kWh selon la puissance, + prime à l'efficacité énergétique comprise entre 0 et 3 c€/
kWh, + prime à la méthanisation de 2c€/kWh.
➫ Énergie éolienne
Éolien terrestre : 8,2 c€/kWh pendant 10 ans, puis entre 2,8 et 8,2 c€/kWh pendant 5 ans selon
les sites. Dans les DOM, Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte, le tarif d’achat est de 11 c€/kWh.
Éolien en mer : 13 c€/kWh pendant 10 ans, puis entre 3 et 13 c€/kWh pendant 10 ans selon les
sites
➫ Énergie photovoltaïque
Le nouveau cadre réglementaire de mars 2011
La commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du Sénat et le
groupe d'études de l'énergie ont organisé, le mercredi 9 mars 2011 au Sénat, une table ronde sur
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l'avenir de la filière photovoltaïque française. Les intervenants invités à s'exprimer dans le cadre de la
table ronde étaient les suivants :
- M. Pierre-Marie Abadie, directeur de l'énergie à la direction générale de l'énergie et du climat
(DGEC) ;
- M. Arnaud Mine, président de la commission solaire du Syndicat des énergies renouvelables ;
- M. Didier Marsacq, directeur du Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies
nouvelles et les nanomatériaux (LITEN) ;
- M. Richard Loyen, délégué général d'Enerplan ;
- Mme Fatima Berral (Tenesol) ;
- M. Thierry Lepercq (Solaire Direct) ;
- M. Paul Grizel de la Fédération française du bâtiment.
La parole a été également donnée au public assistant à la table ronde.
Rapport disponible sur: http://www.senat.fr/rap/r10-442/r10-442_mono.html
Suite à la phase de concertation, la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports
et du logement, la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et le ministre chargé de
l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique ont pris deux arrêtés, datés du 4 mars 2011, qui
fixent un nouveau cadre réglementaire dont un bilan est d'ores et déjà prévu pour 2012 :
- le premier arrêté abroge le dernier arrêté tarifaire du 31 août 2010, décrit précédemment ;
- le deuxième arrêté fixe les nouvelles conditions d'achat de l'électricité produite par les
installations photovoltaïques.
➫ Une cible de 500 MW par an est fixée pour les nouveaux projets. Cette cible pourrait être
réévaluée à 800 MW/an si un grand nombre de projets actuellement en file d'attente n'étaient pas
réalisés.
➫ S'agissant des petites toitures, la trajectoire prévue est de :
- 100 MW pour le segment résidentiel ;
- 100 MW pour le segment non résidentiel.
Il n'y a pas de contingentement, mais le tarif d'achat, d'ores et déjà abaissé de 20 % environ,
s'ajustera automatiquement chaque trimestre en fonction du volume de projets déjà déposés. À titre
d'exemple, ces tarifs seront, le premier trimestre, de :
- 46 c€/kWh pour une petite toiture intégrée au bâti ;
- 28,85 c€/kWh pour un projet de 36 à 100 kWh avec intégration simplifiée au bâti ;
- 12 c€/kWh pour une installation sans aucune intégration au bâti.
Ces tarifs baisseront de 10 % environ par an si le nombre de projets déposés demeure dans la
lignée de la trajectoire prévue.
➫ S'agissant des centrales au sol et des installations sur grandes toitures d'une puissance
supérieure à 100 kW (soit une installation d'environ 1 000 m² de panneaux), le tarif d'achat est
remplacé par des appels d'offres, lancés dès l'été 2011. Ces appels d'offres ont pour objet de mieux
réguler ce secteur qui peut faire l'objet de dépôts de dossiers massifs.
Trois cibles de puissance installée par an sont fixées :
- grandes toitures de 100 à 250 kWc : 120 MW ;
- très grandes toitures de plus de 250 kWc : 20 MW ;
- centrales au sol : 160 MW.
D'après les éléments fournis par M. Pierre-Marie Abadie, directeur de l'énergie, lors de la table ronde,
les centrales au sol pourraient être soumises à des appels d'offres "multi-critères" classiques, tandis
40
que les grandes toitures feraient l'objet d'appels d'offres plus automatisés et rapides, suivant une
procédure d'adjudication de lot.
Certaines questions devront être précisées : poids des critères (prix, impact environnemental),
articulation avec les programmes des collectivités territoriales...
· Concernant les procédures :
- une garantie bancaire sera demandée pour les installations de plus de 9 kW lors de la
demande de raccordement ;
- l'énergie annuelle rachetée est plafonnée sur la base d'un ensoleillement de 1 500 heures
(1 800 heures outre-mer) ;
- les projets devront répondre à une obligation de recyclage.
➫ S'agissant des mesures transitoires, les petites installations (moins de 3 kW) ou celles pour
lesquelles la demande complète de raccordement a été effectuée avant le 2 décembre 2010
continueront à bénéficier des conditions d'achat en vigueur à ce moment-là.
Le décret a conduit à suspendre 3 250 MW de projets, sur une file d'attente totale de 6 400 MW. Ces
projets ne devraient pas être "repêchés", pour des critères tant juridiques (difficulté à sélectionner les
projets) que de coût.
Parmi les 3 100 MW de projets non suspendus, une proportion importante, évaluée à 35 % par la
direction de l'énergie et à 65 % selon M. Arnaud Mine (commission solaire du Syndicat des énergies
renouvelables) lors de la table ronde du 9 mars, ne parviendra sans doute pas à aboutir par manque
de financement ou faute de respecter le délai de 9 ou 18 mois prévu pour la réalisation.
· Enfin, le gouvernement étudie la création d'un fonds de garantie des projets afin de diminuer les
risques et de soutenir la filière française.
41
LES NOUVEAUX TARIFS D'ACHAT
Critères d'intégration au bâti:
Une installation photovoltaïque sur toiture respecte les critères d'intégration au bâti si elle remplit
toutes les conditions suivantes :
- le système photovoltaïque est installé sur la toiture d'un bâtiment clos (sur toutes les faces
latérales) et couvert, assurant la protection des personnes, des animaux, des biens ou des
activités ;
- le système photovoltaïque remplace des éléments du bâtiment qui assurent le clos et couvert,
et assure la fonction d'étanchéité. Après installation, le démontage du module photovoltaïque
ou du film photovoltaïque ne peut se faire sans nuire à la fonction d'étanchéité assurée par le
système photovoltaïque ou rendre le bâtiment impropre à l'usage ;
- pour les systèmes photovoltaïques composés de modules rigides, les modules constituent
l'élément principal d'étanchéité du système ;
- pour les systèmes photovoltaïques composés de films souples, l'assemblage est effectué en
usine ou sur site. L'assemblage sur site est effectué dans le cadre d'un contrat de travaux
unique.
Critères d'intégration simplifiée au bâti:
Une installation photovoltaïque sur toiture respecte les critères d'intégration simplifiée au bâti si elle
remplit toutes les conditions suivantes :
- le système photovoltaïque est installé sur la toiture d'un bâtiment assurant la protection des
personnes, des animaux, des biens ou des activités. Il est parallèle au plan de ladite toiture ;
- le système photovoltaïque remplace des éléments du bâtiment qui assurent le clos et couvert, et
assure la fonction d'étanchéité.
Source : Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC)
42
➫ Géothermie
Métropole : 12 c€/kWh, + prime à l'efficacité énergétique comprise entre 0 et 3 c€/kWh.
DOM : 10 c€/kWh, + prime à l'efficacité énergétique comprise entre 0 et 3 c€/kWh.
Solaire :
L’hélioélectricité traite de la transformation directe de l’énergie solaire en énergie électrique.
L’hélioélectricité, qui traite de la transformation directe de l’énergie solaire en énergie électrique, est
apparue en 1930 avec les cellules à oxyde cuivreux puis au sélénium, mais ce n’est qu’à partir de
1954, avec la réalisation des premières cellules photovoltaïques au silicium dans les laboratoires de
la compagnie Bell Telephone, que l’on entrevoit la possibilité de fournir de l’énergie. Très rapidement
utilisées pour l’alimentation des véhicules spatiaux, leur développement et de rapides progrès ont été
motivés par la conquête de l’espace. Mais, pour les raisons techniques évoquées dans l’introduction,
cette nouvelle source d’énergie électrique a tardé à s’imposer en dehors du domaine spatial.
Cependant, au cours des années 80, la technologie photovoltaïque terrestre a progressé
régulièrement par la mise en place de plusieurs centrales de quelques mégawatts, et même est
devenue familière des consommateurs à travers de nombreux produits de faible puissance y faisant
appel : montres, calculatrices, balises radio et météorologiques, pompes et réfrigérateurs solaires.
Un système photovoltaïque, aussi appelé système PV, produit de l’électricité. Des modules
photovoltaïques comme les panneaux bleutés que l’on rencontre souvent génèrent du courant
électrique lorsqu’ils sont exposés à la lumière du soleil. Cette énergie peut aussi bien combler des
besoins isolés d’électricité qu’être envoyée sur un réseau électrique, servir à alimenter des appareils
d’aussi faible puissance qu’une calculatrice ou une horloge, que de contribuer à alimenter les grands
réseaux électriques nationaux.
L'atout de l'hydrogène est de permettre le stockage de l'électricité, en produisant de l'hydrogène
lorsque l'ensoleillement est fort et que les besoins en électricité sont faibles. Lorsque le temps se
couvre et que les besoins d'énergie sont importants, l'hydrogène pourra être réinjecté dans une pile à
combustible afin de fournir l'électricité nécessaire. Cette hydrogène pourra aussi être réutiliser
comme carburant pour les véhicules.
Les modules photovoltaïques génèrent du courant continu. Aussi, selon les applications, un système
photovoltaïque comprendra des appareils permettant de convertir l’électricité en courant alternatif,
nécessaire au fonctionnement des appareils les plus communs. Les systèmes photovoltaïques
autonomes comprendront également des accumulateurs électriques permettant de stocker
l’électricité produite pendant les heures ensoleillées pour la rendre disponible la nuit et par temps
nuageux.
Les systèmes photovoltaïques permettent également le pompage de l’eau pour alimenter en eau
potable des communautés et des troupeaux, à partir de puits ou de nappes d’eau éloignés d’une
source électrique. Les systèmes de pompe à eau ont la particularité de pouvoir facilement stocker le
produit auquel on est intéressé dans un réservoir, ce qui est plus facile que de stocker de l’électricité.
Les communautés isolées apprécient les nombreux avantages des systèmes photovoltaïques,
comme on le voit au Bengale occidental en Inde.
Tout d’abord les modules photovoltaïques sont la source d’électricité la plus fiable parmi les
systèmes électrogènes. Ils n’ont pas de pièce mobile, et n’ont besoin d’aucune surveillance pendant
plusieurs dizaines d’années. Ceci est un atout dans des régions où la main d’oeuvre spécialisée
n’existe pas à un coût abordable. De tels endroits ne se trouvent pas uniquement dans les pays en
voie de développement mais aussi en mer et dans l’espace pour l’exploration duquel les premiers
systèmes photovoltaïques ont été développés.
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Les systèmes photovoltaïques ont peu de composants et s’entretiennent facilement. Ils sont aisés à
utiliser même par des utilisateurs ayant peu de compétences techniques, à la différence d’un groupe
électrogène à moteur thermique.
Les systèmes photovoltaïques sont modulaires, c’est-à-dire que l’on peut facilement ajuster le
nombre de modules photovoltaïques en fonction des besoins d’électricité et de l’ensoleillement
disponible. De plus, de tels modules existent dans des tailles différentes. Ainsi, un ménage peut
d’abord se contenter d’un simple kit d’éclairage comprenant un seul module, ce qu’il peut se
permettre d’acquérir. Si quelques années plus tard, un téléviseur est acheté, il suffira alors d’ajouter
un autre module photovoltaïque et/ou un autre accumulateur électrique.
Un système photovoltaïque est attrayant : il offre une image "Hi-Tech" et écologique dans les pays
industrialisés alors que dans les pays en voie de développement, il est un signe de modernité et
contribue à diminuer la fascination et l’attirance des grands centres urbains.
Enfin, ces systèmes sont très appréciés des utilisateurs pour leur silence, pour l’absence d’odeurs
générées et aussi pour leur faculté de fournir de l’éclairage sans chaleur, un atout dans les pays
chauds.
Du point de vue du bâtiment, le composant principal d’un système photovoltaïque est le champ
photovoltaïque, c’est-à-dire l’ensemble des modules photovoltaïques.
Un module photovoltaïque est formé de cellules photovoltaïques raccordées et scellées ensemble.
Ces cellules convertissent directement la lumière en électricité dans un matériau semi-conducteur qui
se présente sous la forme de minces galettes ou de bandes de films minces. Le semi-conducteur le
plus courant utilisé pour fabriquer des cellules photovoltaïques est le silicium, un matériau abondant
dans la nature, dans le sable par exemple.
En plein ensoleillement, une cellule photovoltaïque typique de 10 x 10 cm produira environ 3 A sous
0,5 V soit une puissance de 1,5 W. En raccordant 30 cellules en série, on obtiendra un module
pouvant générer 3 A en 15 V soit près de 50 W, ce qui permet de répondre à certains besoins. Pour
former un module, les 30 cellules seront encapsulées sous une plaque transparente, en verre, par
exemple.
Lorsqu’on a besoin de plus de puissance, on utilise plusieurs modules, formant ce que l’on appelle
un champ photovoltaïque orienté de manière à optimiser la quantité d’énergie solaire reçue, c’est-àdire par exemple un toit incliné face au sud, dans l’hémisphère Nord.
Comme un module photovoltaïque ne génère de l’électricité que pendant la journée, et en produit
moins par temps nuageux, la capacité de production de puissance du champ photovoltaïque, d’un
système autonome, doit excéder les besoins, et le surplus produit par temps ensoleillé sera stocké
dans des accumulateurs électriques ou encore dans un réservoir pour un système de pompe à eau.
Environ 90% des accumulateurs utilisés dans les systèmes photovoltaïques sont de type acideplomb à cause de leur moindre coût et de leur disponibilité. Les accumulateurs électriques ont besoin
d’être remplacés plusieurs fois au cours de la durée de vie d’un module photovoltaïque et demandent
de l’entretien comme l’ajout d’eau ou de surveiller les connexions électriques.
L'atout de l'hydrogène est de permettre le stockage de l'électricité.
Un système photovoltaïque comprend également un système électronique de contrôle et de
régulation de la puissance, de manière à ce que les niveaux de courant et de tension produits
correspondent à ceux de la charge. De tels systèmes de contrôle comprennent également un
onduleur, un appareil qui permet de convertir le courant continu en courant alternatif, ce qui permet
44
alors d’utiliser des appareils électriques communs, conçus normalement pour fonctionner sur le
réseau électrique ou encore fournir cette électricité au réseau.
Institut national de l’énergie solaire (INES) : www.ines-solaire.com
Association professionnelle de l’énergie solaire : www.enerplan.asso.fr
Annuaire de l’énergie solaire : http://www.portail-solaire.com
Boutiques d’objets solaires :
http://www.boutiquesolaire.com
http://www.websolaire.com
Eolien :
Les pales tournent grâce à la force du vent, entraînent le
générateur électrique. Elles sont orientées face au vent grâce à un
ensemble de moteurs reliés à une girouette. Elles peuvent
également tourner sur elles-mêmes en fonction de la vitesse du
vent, évaluée par un anémomètre, et ainsi avoir une vitesse de
rotation régulée.
L'électricité produite peut être utilisée ou stockée dans des batteries.
L'intérêt des technologies de l'hydrogène est de permettre le stockage avantageux de l'énergie
éolienne sous forme d'hydrogène. Il sera ensuite réutilisé à travers une pile à combustible pour
redonner chaleur et électricité. L'hydrogène pourra aussi être source de carburant pour le véhicule.
Les conditions d'installation d'une éolienne sont :
➪ Un vent régulier et suffisamment puissant
➪ L'absence d'obstacles (forêt, bâtiments, pylônes…)
➪ une éolienne de moins de 12 m est autorisée selon le Code de l'urbanisme et l’électricité peut
ou pas être revendue à EDF.
➪ Déclaration de travaux d’une éolienne de plus de 12 m
➪ Demande de permis de construire (mairie, DDE).
➪ Demande d'autorisation éventuelle auprès de l'Aviation civile et de l'armée de l’Air.
➪ Demande à l'installateur de délivrer une attestation de conformité
➪ Demande du droit d'exploiter de l'énergie auprès de la direction de la Demande et des
Marchés énergétiques (Dideme).
7 avantages
➪ Ressources - taxes professionnelle et foncière, location de terrain... des ressources
nouvelles qui permettent d’initier de nouveaux projets et de développer des services pour la
collectivité.
➪ Patrimoine - de l’entretien des routes à la préservation de l’habitat rural, autant d’occasions
d’utilisation des retombées financières.
➪ Image - écologique par la production d’une énergie propre, et valorisante par l’utilisation
d’une technologie innovante.
➪ Tourisme - un parc éolien suscite curiosité et intérêt. Il devient un but de promenade et
localement une source d’activités complémentaires.
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➪ Développement - un parc éolien peut constituer le point de départ d’un projet territorial plus
global, à vocation culturelle, pédagogique, touristique ou économique.
➪ Relations intercommunales - la conduite d’un projet éolien favorise la concertation entre les
équipes municipales de différentes communes.
➪ Environnement - le territoire participe au respect des engagements de Kyoto en contribuant à
la diminution des émissions de CO2, tout en étant attentif à l’environnement local. Les élus
porteurs d’un projet éolien sont animés par le développement de leur territoire, avec la volonté
de rester fidèle à l’environnement local.
Des retombées financières :
la filière éolienne présente des avantages économiques incontestables :
➪ elle est créatrice d’emplois, à la fabrication, mais aussi à l’installation :
Plus de 45 000 emplois directs ou indirects ont été créés en Allemagne, où plus de 20 600 MW
éoliens sont installés (fin 2006) contre près de 2 500 (en 2007) en France ;
➪ un parc éolien offre des revenus intéressants pour les collectivités locales.
Combien un parc éolien rapporte-t-il aux collectivités ?
Aujourd’hui, les propriétaires d’éoliennes paient une taxe professionnelle aux communes ou aux
communautés de communes, au département et à la région. Pour une éolienne de 1 MW, cela
représente par an environ 6 000 € pour la commune (ou la communauté), 6 000 € pour le
département et 1 200 € pour la région.
Témoignages:
➪ "La taxe professionnelle nous rapporte 180 000 euros. Cela représente 10 % de notre budget.
Cela nous permet de financer des travaux sans avoir recours à l’emprunt". Jean-Yves Gagneux,
maire de Bouin (Vendée)
➪ "La location de nos terrains représente environ 5 % de notre budget. Nous avons ainsi inscrit au
budget la réalisation de travaux que nous n’aurions pas pu financer sans cet apport". Roger
Ramoneda, maire de Oupia (Hérault)
➪ De nouvelles activités
"La ferme éolienne va servir de point de fixation pour la création d’une zone d’activités". Roland
Renard, président de la communauté de communes de Saint-Simon (Aisne)
"Pas moins de 150 groupes ont déjà fait le déplacement, sans compter tous les visiteurs individuels.
Cela profite directement aux restaurateurs et aux commerces qui vendent les produits locaux". JeanYves Gagneux, maire de Bouin (Vendée)
➪ Une mise en valeur de l’environnement
"Cet argent, nous allons le consacrer à l’investissement, notamment en mettant en valeur le bâti rural
qui représente un véritable patrimoine. Cela donne de la valeur aux habitations et du travail aux
artisans". Bernard Lebaron, maire de Clitourps (Manche)
"Lors d’une journée portes ouvertes, une petite fille de douze ans, émerveillée par le mouvement des
éoliennes, est venu me dire : “Je suis fière de ma campagne” !". Roland Renard, président de la
communauté de communes de Saint-Simon (Aisne)
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"Le projet a entraîné l’effacement de tous les réseaux électriques sur la longueur du parc éolien".
Jean-Yves Gagneux, maire de Bouin (Vendée)
➪ Un engagement citoyen
"Deux éoliennes dans le ciel, ce n’est pas la fin du monde ! C’est peut-être même le début d’un
nouveau monde plus propre, plus soucieux de son environnement, à court et à long terme". Colette
Lesouef, maire de Saint-Martin des Besaces (Calvados)
"Notre commune participe à l’effort collectif. C’est un geste de solidarité car nous ramenons des
richesses dans des pays enclavés". Jean-Pierre Ladreyt, maire de Freyssenet (Ardèche)
http://www.planete-eolienne.fr/
Suivi de la production d’énergie éolienne en France : www.suivi-eolien.com/
Hydroélectrique :
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Usines Marémotrices et force des marées
L'usine Marémotrice de Saint-Malo/Dinard est un exemple formidable de production d'énergie
renouvelable:
La plus importante usine marémotrice du Monde est en Bretagne, toujours Pionnière en matière
d'énergie marine renouvelable.
L'usine marémotrice de la Rance est la première centrale marémotrice du Monde. Elle a demandé 25
années d'études dans des domaines aussi divers que la physique du globe, l'hydraulique et la
corrosion ou les travaux de la mer. D'une longueur de 750 mètres entre la pointe de la Brebis à
l'ouest et la pointe de la Briantais à l'est, au sud de Dinard et Saint-Malo, à l'embouchure du fleuve
côtier de la Rance, elle possède un bassin de retenue de 180 millions de mètres cubes utiles.
Le principe de fonctionnement est le même que celui des moulins à marée à la différence que le
bulbe permet aussi de turbiner dans les deux sens d'écoulement de la mer.
48
Inaugurée le 26 novembre 1966 par le président de la république De Gaulle. Elle utilise la force des
marées pour produire de l'électricité à travers 24 alternateurs de 10 000 kW couplés à d'énormes
hélices appelées Bulbes.
C'est la principale source d'énergie électrique de toute la région Bretagne.
Elle produit 3,5 % de l'énergie électrique consommée par la région Bretagne, ce qui représente aussi
60 % de l'énergie électrique produite en Bretagne.
Le stockage de l'énergie est réalisé par "pompage".
Caractéristiques techniques:
Production électrique: 500 GWh par an (de quoi alimenter environ 250 000 foyers.)
Puissance totale installée: 240 MW
Production nette annuelle: 544 000 MWh (énergie de pompage déduite)
Energie annuelle consommée par le pompage: 64.5 MWh
Le coût de production d'électricité est évalué à 12 cents d'euros du kWh
Nombre de Vannes: 6
Turbines:
Type Kaplan horizontale à distributeur conique
Nombre: 24
Puissance: 10 MW chacune
Diamètre de la roue: 5,35 m
Nombre de pales: 4
Inclinaison des pales variables de - 5° à + 35°
Alternateurs:
Type synchrone à excitation statique
Vitesse de rotation nominale: 93,75 tr/min
Survitesse maximale: 260 tr/min
Tension de sortie: 3,5 kW
Réfrigération par air comprimé à 2 bars absolus
Services auxiliaires alternatifs:
Alimentés avec 2 transformateurs de 5 MVA 63 kV / 5,5
kV raccordés en dérivation sur un cable qui relie Dinard et
Saint-Malo.
Un réseau de 5,5 kV distribue l'énergie produite à une
série de 8 postes de transformation 5500 V / 380 V. Deux
groupe électrogènes diesel assurent l'alimentation des
auxiliaires nécessaire si la tension manque sur le réseau
63 kV.
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D'autres sites de production ont été étudié en Bretagne, mais les conditions ne sont pas réunies pour
en construire d'autres.
EDF : http://energies.edf.com
Le dossier de presse de EDF (juillet 2011) :http://energie.edf.com/hydraulique/energies-marines/
carte-des-implantations-marines/usine-maremotrice-de-la-rance/presentation-51516.html
La plus importante centrale marémotrice du Monde est depuis Septembre 2011 est coréenne
Le 29 Aout, la centrale marémotrice de Sihwa, située à la ville d’Ansan, à 40 km au sud-ouest de
Séoul (Corée du sud), a commencé à produire de l’électricité . Avec une capacité en puissance
maximale de 254 MW, la centrale de Sihwa est la plus importante dans le monde devant la centrale
marémotrice française de la Rance en Bretagne (240 MW).
Grâce à cette centrale la Corée du sud entre dans le club très restreint des pays producteur
d'énergie marémotrice avec la France, le Canada et la Chine.
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L'entreprise internationale hydroélectrique, VA Tech Hydro, gérera l'installation et Pennsylvania
based, Matcor, offrira une protection cathodique contre la corrosion, un élément clé de toute
installation d'énergie sous-marine. L'exploitant sera Kwater.
Caractéristiques techniques de la centrale de Sihwa:
Surface: 138 000 m²
Puissance maximale: 254 MW
Production annuelle d'énergie: 543 GWh
Turbines: 10 d'une puissance 25.4 MW (actuellement seules 6 sont en route, les 4 autres seront
démarées progressivement)
Diamètre coureur des turbines: 5,7 m
Vitesse de rotation nominale de turbines: 64,29 tour par min
Diamètre du stator: 8m
Tension de stator: 10,2 kV
facteur de charge: 0,95
Vannes d'écluse: 8
Nombre d'habitants dont les besoins électriques seront satisfaits: 500 000
Coût de la construction: 227.7 Millions d'Euros
Différences maximales de niveau des marées en Corée du Sud: 9,16 mètres
Potentiel de production sur toute la Corée du sud: de 4,05 et 5,09 millions kW ( 7,4 % de la
production électrique nationale)
Des aciers spéciaux à teneur en molybdène accrue seront utilisés pour les composants de base, les
zones critiques seront soudés avec des alliages résistant à l'eau de mer et d'un système de
protection cathodique contre la corrosion pour protéger les pièces en acier inoxydable et enduit de
structures en acier au carbone contre la corrosion par un changement de potentiel dans la région
cathodique . Le courant de protection nécessaires dépend de la teneur en oxygène de l'électrolyte
(mer ou saumure), de la teneur en sel, de la salinité des surfaces protégées, de la température et,
dans une grande mesure, de la vitesse d'écoulement qui doit être adapté en permanence. Parce que
l'assemblage doit être effectué dans un environnement d'eau de mer, des précautions particulières
seront nécessaires.
➪ Source: agence de presse sud coréenne Yonhap
Pour en savoir plus: http://www.waterpowermagazine.com/story.asp?storyCode=2041292 (en
anglais)
Hydrolien
"Prométhée a donné le feu divin aux Hommes, Paracelse et Lavoisier leurs ont donné l'hydrogène"
Bruno Mansuy
Au large de Paimpol (côtes d’Armor), un projet hydrolien de 6 machines
d’une puissance total de 5 MW est en cours de construction. Annoncé par
EDF en juillet 2008, il sera opérationnel en 2011.
Pôle mer Bretagne : http://www.pole-mer-bretagne.com/
marenergie.php
Trois Projets labellisés par le pôle mer Bretagne (ou en cours de
labellisation):
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1) Le projet Winflo est un projet d'éoliennes flottantes mené en partenariat par Nass&Wind , DCNS,
Saipem, In Vivo environnement, l'Ifremer et l'ENSTA Bretagne.
➫ L'objectif est de construire et de mettre à l'eau un démonstrateur proche de l'échelle 1 en 2012
pour le tester en 2012 et 2013, vraisemblablement au large de Groix.
Le projet WINFLO associe des industriels majeurs des secteurs naval, parapétrolier et éolien. Il
conduira à un démonstrateur proche de l’échelle 1, d’une puissance de 2,5 MW, installé au large de
la Bretagne et raccordé au réseau électrique. Installée sur une plate-forme semi-submersible liée au
fond marin par des ancrages caténaires, cette technologie, baptisée Free Floating Platform (FFP),
permettra outre une construction plus légère du système d’ancrage et du flotteur, de déconnecter et
de remorquer facilement la machine pour sa maintenance.
Les entreprises partenaires:
➫ NASS&WIND, Lorient, porteur du projet, développement, financement, construction et
exploitation de parcs éoliens,
➫ SAIPEM, implanté à Brest et Lorient au travers de sa filiale SOFRESID Engineering,
conception de plateformes pétrolières et gazières,
➫ DCNS, implanté à Brest, Lorient et Nantes Indret, conception, production, entretien de
systèmes complexes navals,
➫ IN VIVO Environnement, La Forêt Fouesnant, diagnostics et analyses d’impact
environnemental en milieu marin.
Les centres de recherche partenaires:
➫ IFREMER, Brest, et ses compétences en hydrodynamique et océano-météorologie,
comportement des matériaux, développement de systèmes instrumentaux, acoustique et
sismique, essais sur modèle réduit en bassin,
➫ ENSIETA, Brest, laboratoire LBMS : recherches en hydrodynamique, sur le comportement
des matériaux et sur la tenue structurelle des ouvrages en mer.
Contacts Nass&Wind SAS :
Directeur Projet WINFLO : Christophe Philippe ;
Directeur Communication: Xavier Ferrey
[email protected]
➫ Fiche projet: http://www.pole-mer-bretagne.com/winflo.php
2) Le projet Sabella porte sur un démonstrateur d'hydrolienne avec, pour partenaires, Sofresid,
Hydrohelix, Veolia environnement, Direct énergie, le Bureau Veritas et Ifremer.
➫ Le projet "SABELLA D10" résulte de l’expérimentation de "D03", et vise à concevoir et à réaliser
sur les mêmes principes technologiques une tête de série pré industrielle de 10 m de diamètre, et
d’une puissance allant de 200 à 500 kW selon la cinétique du site.
Ce projet bénéficie des acquis capitalisés et des voies de progrès identifiées dans l’interprétation des
résultats de "D03". Une ingénierie poussée de l’hydrodynamique du rotor et de la chaine de
production électrique permettra d’atteindre les performances projetées pour cette machine.
"SABELLA D10" sera raccordée au réseau, fera l’objet d’essais sur site et de caractérisation du
signal électrique livré.
➫ http://www.sabella.fr/
52
3) Le projet Orca, projet d'hydrolienne, qui sera développé à Nantes par Alstom, avec l'Ecole
centrale et le Cetim, puis testé sur la zone Paimpol-Bréhat.
➫ Objectif: Fédérer des acteurs-clés de la filière hydrolienne française pour créer une offre nationale
et internationale et développer les éléments indispensables à l’émergence de cette filière.
ORCA va s’appuyer sur la création d’une hydrolienne de grande taille, et l’analyse de ses
performances, pour réaliser les économies d’échelle nécessaires à une diminution du coût de
l’électricité produite.
Ce projet bénéficie aussi d’un réseau de compétences, rassemblant des industriels et des
organismes publics de recherche, indispensables au succès de l’opération.
La conception et les études techniques, sociétales et environnementales seront réalisées jusqu’en
2012. Les phases de fabrication de l’hydrolienne et les tests interviendront en 2011 et 2012.
L’installation est prévue à la fin de l’année 2012. Après l’exploitation, le démontage, l’inspection et le
rapport final sont prévus pour la fin 2013.
Ce projet est piloté par ALSTOM avec pour partenaires EDF, SECTOR, STX France, École Centrale
de Nantes, Ifremer, CETIM, NEXANS, IUEM de Brest et 3 laboratoires : ARTS/ENSAM Chambéry,
INP Toulouse, Laboratoire Laplace (laboratoire plasma et conversion d'énergie) et le consultant
STAT-Marine.
➫ Le dossier de la région Bretagne sur les énergies marines: http://www.bretagne.fr/internet/jcms/
preprod_72890/les-energies-marines-source-d-innovation-pour-la-bretagne
Biomasse :
Utiliser la biomasse pour produire électricité et chaleur.
Methanisation:
53
Principe de la méthanisation : production de gaz et de chaleur
La méthanisation produit deux types d´énergies : 35 à 40 % est sous forme d´électricité, le reste est
sous forme de chaleur.
Le principe consiste à incorporer dans un digesteur (3) (ou cuve de méthanisation) le lisier et une
source de carbone (végétaux, maïs.).
Au bout de 40 à 60 jours, on récupère des gaz, essentiellement du méthane (65 %), et un digestat,
liquide à 3 à 5 % de MS, qui pourra être épandu, voire traité.
Un co-générateur transforme le CO2 en chaleur et combustible, en l´occurrence de l´électricité.
5 à 10 % de la chaleur produite sert à chauffer le digesteur.
Quant à l´électricité, une partie pourrait être réutilisée pour le fonctionnement de la station de
méthanisation, mais, en Allemagne, et compte tenu des conditions de revente de l´électricité, les
éleveurs ont encore intérêt à acheter cette électricité aux fournisseurs nationaux, plutôt qu´utiliser l
´électricité qu´ils produisent, plus intéressante à la vente !
Les avantages de la méthanisation:
Intérêts environnementaux
•
Diminution des gaz à effet de serre (CH4, CO2...).
•
Réduction importante des odeurs lors du stockage des effluents et lors de l'épandage.
•
Reconquête des plans d'épandage (distance par rapport aux tiers).
Intérêts économiques
•
Activité économique de valorisation de matière organique : la biométhanisation permet de
traiter des coproduits extérieurs à valeur négative (l'agriculteur est rémunéré pour les
méthaniser).
•
Le procédé de méthanisation permet d'utiliser des cultures énergétiques produites sur
l'exploitation (y compris sur les jachères) : l'agriculteur récupère la marge brute de sa culture
ainsi que la valeur ajoutée issue de sa transformation.
•
Création d'un revenu complémentaire et sécurisé : EDF a une obligation d'achat à un tarif fixe
et indexé pendant quinze ans.
Intérêts agronomiques
•
Pouvoir hygiénisateur de la fermentation anaérobie sur les pathogènes des effluents.
•
Amélioration de la valeur fertilisante des effluents. Le digestat apporte des éléments
directement assimilables par les plantes.
•
Désactivation des graines d'adventices présentes dans le digestat.
•
Conservation de la valeur en minéraux du digestat.
•
Modification de la viscosité : l'épandange est facilité.
Exemple en Bretagne:
54
La première unité de méthanisation agricole de
Bretagne a été inaugurée, en septembre 2009, à
Plélo (Côtes-d’Armor). Installée à côté d’un
élevage porcin, elle produira 510 000 m3 de biogaz
par an, à partir de 2 800 tonnes de lisier,
700 tonnes de déchets verts et 1 600 tonnes de
graisses issues de l’industrie agroalimentaire,
mélangés dans un vaste digesteur en béton.
Le biogaz produit est stocké dans une membrane
élastique. Il passe ensuite dans un local adjacent,
où il fait tourner deux moteurs de cogénération,
produisant en une année 1 170 MWh d’électricité,
l’équivalent de la consommation de 390 foyers, et
1 280 MWh de chaleur, soit la puissance de
chauffage nécessaire à 70 maisons individuelles.
L’électricité produite est injectée sur le réseau. La
chaleur sert à chauffer les bâtiments d’élevage et plusieurs habitations du village. L’unité de
méthanisation évitera ainsi chaque année l’émission de 410 tonnes de CO2 dans l’atmosphère.
L’investissement s’élève à 900 000 euros.
Il a été soutenu par l’ADEME et la région Bretagne à hauteur de 236 800 euros, dans le cadre du
contrat de plan État-région.
Le Conseil général des Côtes-d’Armor a également versé une aide, d’un montant de 118 400 euros.
Revenu espéré: Environ 200 000 euros par an
Armelle Damiano, de l'association Aile, a été mandatée par l’ADEME pour animer le Plan biogaz
agricole des régions Bretagne et Pays-de-la-Loire.
C’est elle qui a aidé l’éleveur porcin à concevoir son unité selon la technologie Biogas Hochreiter,
spécialiste allemand de la méthanisation. "Nous souhaitions favoriser un transfert de technologie afin
de créer une filière française de méthanisation", précise Mélanie Chauvin.
Biogas Hochreiter a donc transmis son savoir-faire à l’entreprise française AEB-Méthafrance, qui
peut désormais construire d’autres unités similaires de méthanisation. Vingt six autres projets sont en
cours dans l’Ouest, suivis par Aile et l’ADEME.
Géothermie :
➪ La production de chaleur interne par la Terre est
essentiellement la conséquence de la désintégration
radioactive.
➪ Ces processus dépendent du temps, ce qui fait
que la Terre est une machine thermique dont le
potentiel énergétique ne cesse de diminuer.
➪ La température croit avec la profondeur.
➪ Le transport de la chaleur de l’intérieur vers
’extérieur est un processus complexe qui s’effectue
55
principalement par conduction dans les couches limites thermiques (lithosphère, limite noyaumanteau) et par convection à l’échelle des temps géologiques dans les couches capables de se
déformer par fluage (manteau, noyau).
➪ L’énergie interne produite par la Terre est la source de tous les phénomènes internes qui s ’y
produisent : tectonique des plaques, séismes, volcanisme, variation du CMT et du champ de
pesanteur.
➪ L’énergie géothermique peut être utilisée comme source de chauffage ou de production
d’électricité.
Type de géothermie
Caractéristiques du
Utilisations
‘réservoir’
Très basse
Nappe à moins de 100Chauffage et
énergie
m
rafraîchissement de locaux, avec
Température < à
pompe à chaleur
30°C
Basse énergie
30°C < Température Chauffage urbain, utilisations
< 150°C
industrielles, thermalisme,
balnéothérapie
Moyenne et Haute
180°C < Température Production d’électricité
énergie
< 350°C
Géothermie profonde Roches chaudes
Au stade de la recherche, pour
sèches à plus de 3
l’électricité ou le chauffage
000 m de profondeur
La géothermie en France:
La géothermie occupe actuellement en France la 3ème place des énergies renouvelables, en terme
d’énergie produite, derrière la biomasse et l’hydraulique.
Types de géothemie (Source ADEME)
56
Plusieurs technologies sont possibles, mais celle du puits canadien ou puits provençal reste la
meilleure solution (rapport qualité/prix)
Association Française pour les pompes à chaleur : http://www.afpac.org
géothermie perspectives: http://www.geothermie-perspectives.fr
le stockage de l'énergie
Introduction
L'introduction du premier pilier exige la simultanéité de l’émergence de ce 2ème pilier afin,
d’une part de maximiser et de fiabiliser l’énergie renouvelable souvent intermittente, d’autre
part de réduire au minimum les coûts.
Les batteries, le transfert d'énergie hydraulique par pompage, la compression de l’air et d'autres
moyens, peuvent fournir une capacité de stockage limitée.
Les systèmes électrochimiques permettent des applications dans différents domaines de la vie
économique, notamment dans les applications aux transports lourds ou légers.
Suivant l'application considérée, les accumulateurs, la pile à combustible et les super condensateurs
sont plus ou moins bien adaptés et le choix, ainsi que leur association doivent être effectués en
fonction des objectifs qui doivent être privilégiés pour chacune de ces applications.
En tout état de cause, les systèmes électrochimiques présentent la propriété remarquable de pouvoir
transformer de l’énergie chimique en énergie électrique et réciproquement et ce, dans des
conditions, voisines de la réversibilité thermodynamique, sans émission de polluant, sans nuisances
sonores et très peu de conditions de maintenance. Leur coût, relativement élevé, limite encore leur
utilisation à des applications particulières.
Il y a, cependant, un moyen de stockage largement disponible et qui peut être relativement efficace :
l’hydrogène.
Les STEP (Station de transfert d'énergie par pompage)
Les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) sont des installations hydroélectriques qui
puisent aux heures creuses de l'eau dans un bassin inferieur afin de remplir une retenur en amont
(lac d'altitude). L'eau est ensuite turbinée en heures pleines. l'électricité de ces stations est appelée
essentiellement en période de pointe. Les STEP interviennent en dernier recours notamment en
raison du cout de l'eau à remonter (alimentation électrique).
Consommatrices d'énergie les STEP ne sont pas considérées comme productrices d'énergie de
source renouvelable.Néanmoins le barrage marémoteur de la rance utilise cette technique de
stockage lorsque les différences de niveau sont similaires et l'énergie utilisée est moindre, ce qui la
rend compétitive.
Ces dernières années en France les STEP sont intervenues pour moduler 3 TWh par an, notamment
pour stocker l'énergie issue des centrales à fission nucléaire.
57
En France, EDF exploite une trentaine de stations de ce type, dont six de grand gabarit dans les
Alpes, les Ardennes et le Massif central, la plus importante étant celle de Grand'Maison, en Isère."La
puissance disponible est d'environ 5 gigawatts (GW) et il est possible d'installer 2 ou 3 GW
supplémentaires", indique Jean-François Astolfi, directeur de la production hydraulique.
Batteries électriques et supercondensateurs:
Il y a cinq principaux critères d’évaluation des batteries:
➪ La puissance instantanée qu'elles peuvent fournir. C'est aussi la puissance instantanée qu'elles
peuvent absorber pendant un freinage et ce qui détermine la durée de leur recharge. On la mesure
en unité de charge: une batterie qui supporte un courant de 0,33 fois sa capacité (0,33C) (mesurée
en Ampère-heure) en restant efficace peut être rechargée en 3 heures. Ce sont les caractéristiques
des batteries au Lithium en production. Une telle batterie peut supporter, en pointe, plus de courant
que ces 0.33 C. Les batteries au Lithium peuvent atteindre 1C, voire 1,5C, sans trop de pertes de
rendement.
➪ La quantité d’énergie stockée par unité de poids (l’énergie spécifique) mesurée en Watt-heure/
kilogramme (Wh/kg). Par exemple, pour les batteries Plomb, 30 Wh/kg, pour les batteries NiCd (en
voie de disparition à cause de la toxicité du Cadmium), 40 Wh/kg, pour les batteries NiMh (NickelHydrures métalliques) de 40 a 45 Wh/kg, pour les batteries Li de 160 à 170 Wh/kg.
➪ Le prix d'achat par Watt-heure de capacité (par exemple $/Wh) : 0.3 $/Wh pour les batteries au
Plomb, 1 $/Wh pour les batteries Ni-Cd, 2 $/Wh pour les batteries Ni-MH...Les premières batteries
Li-ion coûtaient 2 $/Wh ; on est en train d'en produire à 0.3 $/Wh, au prix d'une baisse d’énergie
spécifique a 120 Wh/kg. Les Chinois sont en pointe dans ce domaine.
➪ Le nombre de cycles de charge-décharge possibles, pour les batteries au Plomb, 1000 cycles,
pour les NiMH également 1000 cycles. Actuellement les batteries Li-ions sont limitées à environ 500
cycles (téléphones ou ordinateurs portables) ; on espère que pour les applications automobiles on
puisse obtenir un compromis satisfaisant avec plus de 1000 cycles.
➪ La faisabilité, les problèmes de sécurité, le recyclage.. Les batteries au Lithium ont fait l'objet de
20 ans de travaux et arrivent à maturité pour ces aspects. Il faudra récupérer le Lithium, qui n'est pas
trop cher et est abondant. Les batteries au Plomb de voitures sont à peu près systématiquement
recyclées.
La batterie au plomb est très ancienne, puisqu'elle a été inventée par G. Planté en 1897...et que l'un
de premiers véhicules à dépasser les 100 km/h fut la "Jamais contente" de Camille Jenatzy, en 1899
(Course Paris-Bordeaux), équipée d'accumulateurs au plomb.
L'ennui des batteries au plomb, c'est qu'elles pèsent lourd, et sont finalement assez peu
énergétiques.
L'avantage, c'est que leur principe est ancien, donc connu, que la fabrication est bien maîtrisée, donc
les coûts faibles.
Mais face à la montée en puissance de l'électronique embarquée, il faut trouver des solutions, c'est à
dire d'autres types de batteries, plus énergétiques, moins encombrantes, moins lourdes.
Pour juger des performances d’une batterie, divers facteurs sont à prendre en considération :
➪ le rapport entre l’énergie stockée et le poids de la batterie (ou entre la puissance fournie et le
poids)
58
➪ le rapport entre l’énergie stockée et le volume de la batterie (ou entre la puissance fournie et le
volume)
➪ le taux de décharge admissible (proportion de l’énergie accumulée que l’on peut récupérer sans trop- détériorer la batterie) ;
➪ le cyclage maximum (nombre maximum de cycles charge/décharge qu’une batterie peut supporter
avant d’être hors d’usage). On parle aussi de "cyclabilité" c’est-à-dire de l’aptitude de la batterie à
supporter des cycles successifs charge-décharge ;
➪ la tendance à l’autodécharge.
Il faut aussi considérer la vitesse à laquelle la batterie peut être rechargée et, en fonction de l’usage
prévue, savoir si la batterie est à forte densité de puissance, c’est-à-dire si elle peut fournir une forte
puissance pendant un temps court (par exemple pour les véhicules hybrides) ou si elle est plutôt à
forte densité d’énergie, c’est-à-dire apte à délivrer une faible puissance mais pendant un temps plus
long (pour les véhicules tout électriques).
Les accumulateurs au lithium existent déjà. On les trouve notamment dans les ordinateurs portables,
pour lesquels ils procurent de 3 à 5 heures d'autonomie en moyenne, ainsi que dans les téléphones
mobiles.
D'une manière simplifiée, tous les accumulateurs de génération nouvelle sont "à insertion", car au
moins le matériau servant de cathode est un composé chimique dont la structure cristalline permet
d'insérer et de désinsérer (de façon plus ou moins réversible) les ions lithium. L'anode peut être
aussi un composé d'insertion (couramment le graphite, mais il en existe d'autres), ou tout simplement
du lithium métallique. L'électrolyte peut être soit liquide, soit polymère (voire sous une forme mixte :
un gel).
59
En fait, le lithium est très réactif (même si ce métal est un grand "mou" !), et va avoir la fâcheuse idée
de se combiner avec l'eau H2O notamment, pour former de la lithine LiOH, composé particulièrement
stable, mais sans grand intérêt pour l'électrochimiste.
De sorte que les procédés de R&D, d'industrialisation doivent se faire dans des atmosphères
inertes... (Le coût de fabrication devient donc assez élevé.)
Le tableau suivant présente diverses technologies, et résume celles les plus couramment
rencontrées à l'heure actuelle.
Le rendement Charge / décharge des batteries et accumulateurs:
accumulateur au Plomb:
accumulateur nickel-métal hydrure:
accumulateur Cadmium Nickel:
accumulateur Lithium Ion:
accumulateur Lithium Polymère:
50 %
66 %
70 à 90 %
99,9 %
99,9 %
Les différentes technologies:
Source : http://www.mines-energie.org/
Dossiers/Stock2005_15.pdf
La batterie LMP (Lithium métal polymère) de L'entreprise BATSCAP:
60
Caractéristiques électriques :
Caractéristiques générales :
Caractéristiques thermiques :
Avec des caractéristiques en
densité d’énergie spécifique et
volumique supérieures
respectivement, à 100 Wh/kg et
100 Wh/l, ce module entièrement
autonome
offre
des
performances remarquables de
légèreté et de compacité.
La Batterie LMP de la Bluecar Bolloré-Pinifarina:
61
La batterie est le coeur de la
voiture électrique. Le groupe
diversifié Bolloré, réalisant 10
milliards de dollars de chiffre
d’affaires annuel et employant 35
000 personnes est depuis 30 ans
le numéro un mondial des
composants pour condensateurs.
Grâce aux connaissances
acquises dans les stockages de
l’électricité et l’extrusion de
polymère, Bolloré travaille depuis
15 ans, à travers sa filiale
Batscap, à la mise au point d’une
batterie “tout solide” à base de
Lithium Métal Polymère.
Cette batterie stocke, à poids
équivalent, cinq fois plus
d’énergie qu’une batterie
traditionnelle et se recharge en quelques heures. Ne nécessitant aucun entretien, elle a une durée
de vie de l’ordre de 200 000 km et assure une sécurité incomparable. De plus la batterie L.M.P. est
uniquement composée de matériaux non polluants n’offrant aucun danger pour l’environnement. En
fin de vie elle sera récupérée et tous ses composants seront recyclés, ou valorisés.
Les condensateurs :
Historiquement, l'accumulation statique de l'électricité fut découverte en 1745 par P. van
Musschenbroek , de l'Université de Leyde en Hollande et indépendamment par Von Klaist en
Poméranie (Prusse) vers la même période. La "bouteille de Leyde" consiste en un récipient de verre
contenant de l'eau, dans lequel est inséré un collecteur métallique.
Un condensateur permet le stockage d'électricité de façon statique, par accumulation de charges, sur
les deux électrodes servant de collecteurs lorsqu'on impose un potentiel entre celles-ci.
En fait, une accumulation de charges se produit dès qu'on place un conducteur électronique dans un
électrolyte. La mise sous tension d'un tel système accroit l'accumulation proportionnellement au
voltage entre les deux électrodes.
Ces électrodes sont séparées soit par le vide, soit par un matériau diélectrique en couche mince. La
tension entre les armatures peut être très élevée (de l'ordre de plusieurs kVolts/cm). Comme
l'accumulation des charges par polarisation des électrodes se fait sans modification de structure aux
électrodes, la longévité en cycles de charge-décharge de ce type de système est très élevée,
puisque plusieurs dizaines de milliers de cycles sont possibles. De plus, les temps de chargedécharge sont très courts ( < ms) d'où des puissances d’impulsion extrêmement élevées .
L'optimisation de la puissance est aussi liée au voltage, mais aussi à la résistance. Cette résistance
peut être optimisée en jouant sur les facteurs d'amélioration des conductivités de chaque elément du
condensateur (connectique, électrodes, épaisseur,...) mais aussi l'électrolyte (concentration,
conductivité, épaisseur) pour les supercondensateurs.
Divers types de condensateurs :
62
Le développement des capacités de type double-couche trouve son origine en 1975 chez Sohio et
Panasonic.
Les supercondensateurs de type redox ont été conçus par B.E. Conway,
en collaboration avec Continental Group en 1975, et en utilisant RuO2 et
des mélanges d'oxydes de métaux de transition.
Les condensateurs électrochimiques et supercondensateurs :
mitsubishi-i-miev-battery
Dans ces condensateurs "double couche", la distance critique n'est plus
(seulement) la distance entre les électrodes, mais bien cette distance interfaciale entre charges
ioniques et électroniques de l'ordre de quelques Angströms
La mise sous tension entraîne une séparation des charges ioniques de l'électrolyte, qui viennent
accentuer le phénomène de double couche. De plus, la surface d'interaction est la surface spécifique
active du matériau d'électrode, souvent bien plus grande que la surface géométrique.
Cependant, le composé diélectrique (électrolyte) utilisé entre les électrodes est sensible aux fortes
différences de potentiel. Par exemple, dans des condensateurs utilisant un électrolyte aqueux
comme un acide, le domaine d'activité est limité à 1.1 Volts environ, tandis que pour les électrolytes
organiques, on peut atteindre 3 à 4 Volts, ce qui reste très inférieur aux valeurs obtenues avec les
condensateurs classiques de l'électronique.
Pour finir, et à la différence des condensateurs "classiques", la présence des charges ioniques (dans
l'électrolyte liquide ou polymère) induit une résistance de diffusion du condensateur (et des fuites de
courant, donc), qui va limiter la puissance impulsionnelle, par exemple.
Les supercondensateurs sont du type double couche.
Les matériaux d’électrode utilisés sont :
- Le charbon actif
- Les Tissus activés
- Autres matériaux d'électrodes à base d'oxyde de ruthénium RuO2
63
Les supercondensateurs présentent donc une technologie complètement différente des batteries. Au
lieu d'un stockage de type faradique, le stockage de l'énergie est capacitif : le nombre de cycles
obtenus est très élevé. La technologie mise en œuvre est moins lourde que pour les batteries, le plus
souvent avec des procédés similaires sur le principe (collecteurs, deux électrodes, ...).
Cependant, les supercondensateurs n'ont pas connu l'essor marketing escompté actuellement, d'où
leur cantonnement à des marchés de niche. Néanmoins, sur le plan conceptuel, l'étude de ces
systèmes électrochimiques entraîne celle de l'interface électrochimique, assez méconnue, et donc le
développement d'idées extrêmement intéressantes, et fructueuses.
Le matériau diélectrique est un électrolyte et les électrodes sont idéalement polarisables. A l'interface
électrode-électrolyte existe une différence de potentiel, et une double couche électrostatique d'ions
de l'électrolyte d'une part et de charges électronique de l'électrode d'autre part.
L'économie de l'Hydrogène
L'hydrogène est le moyen universel qui "stocke" toutes les formes d'énergie renouvelable afin
d'assurer qu'une ressource stable et fiable soit disponible pour la production d'énergie et, ce qui est
aussi important, pour le transport
Nous sommes à la veille d’une course dont personne n’ose donner le coup de départ. Une
compétition dont la ligne d’arrivée profile une nouvelle ère énergétique basée non plus sur les
énergies fossiles comme le pétrole, mais sur le vecteur d’énergie qu’est l’hydrogène.
64
En fait, nous sommes actuellement dans une situation de redistribution des cartes liés à cette
nouvelle économie qu’est "l’économie hydrogène".
Les solutions sont bien là et il est urgent que nos responsables mettent en place une nouvelle
politique en matière de transport et d’énergie.
Le 25 janvier 2008, les conclusions de la recherche Européenne dans le cadre du projet HYWAYS
permettent de démontrer que l'hydrogène est une des options les plus réalistes pour améliorer la
viabilité écologique et économique dans les transports, en particulier le transport de voyageurs, les
utilitaires légers et les autobus.
Toutefois, le recours à cette forme d'énergie nécessite des changements progressifs sur l'ensemble
du système énergétique, et donc une planification rigoureuse à ce stade.
La période de transition offre à l'Europe l'occasion de prendre la tête du développement de la filière
hydrogène, de la technologie des piles à combustible et de leurs applications dans les transports et
l'approvisionnement énergétique. Les défis sont importants et il faut agir aussi judicieusement que
rapidement pour que l'Europe ne paie pas le prix d'une entrée tardive sur le marché.
Le rapport démontre que l'hydrogène pourrait permettre de réduire la consommation de pétrole dans
les transports routiers de 40% d'ici à 2050.
L'hydrogène est l'élément le plus léger et le plus abondant dans l'univers et quand il est utilisé
comme source d'énergie, ses seuls sous-produits sont l'eau pure et la chaleur.
L'énergie nécessaire au fonctionnement de nos vaisseaux spatiaux depuis plus de 30 ans a été
fournie par des piles à combustible de haute technologie fonctionnant à l'hydrogène.
L'hydrogène se trouve partout sur la Terre. Cependant il existe rarement à l'état libre dans la nature,
et il faut donc l’extraire.
Nous pouvons extraire l'hydrogène de 4 façons principales :
➪ Des carburants fossiles : pétrole, gaz naturel, charbon… 98 % de la production Française
d’hydrogène en 2005 est faite à partir de gaz naturel, façon la plus rentable actuellement, mais la
tendance s’inverse avec la flambée des prix du gaz et des produits pétroliers. De plus les réserves
de gaz sont limitées et le processus produit de très fortes quantités de gaz à effet de serre et va à
l’encontre de l’objectif premier de réduction des émissions de CO2.
➪ De l’énergie nucléaire pourrait être utilisée, c’est l’axe de recherche de la France, mais cela
augmenterait significativement la quantité de déchets radioactifs dangereux, ainsi que l’utilisation
d’eau froide disponible pour le refroidissement des réacteurs et créerait des menaces de sécurité
sérieuses dans une époque de terrorisme et pour finir, accroîtrait considérablement le coût que les
contribuables et les consommateurs doivent consentir pour disposer de l'énergie.
➪ De l’eau :
Pourtant, il y a une autre façon d'utiliser l'hydrogène, comme support de stockage pour toutes les
formes d'énergie renouvelable. Les sources renouvelables d'énergie - d'origine solaire, éolienne,
hydraulique, géothermique, océanique - sont de plus en plus utilisées pour produire de l'électricité.
Cette électricité, à son tour, peut être utilisée, dans un processus appelé l'électrolyse, pour séparer
l'eau en hydrogène et oxygène.
65
➪ De la biomasse :
L'hydrogène peut aussi être extrait directement de récoltes énergétiques, de déchets animaux et
forestiers, et de déchets organiques - biomasse - sans passer par le processus d'électrolyse.
Les algues vertes qui infestent Bretagne et qui produisent du sulfure d'hydrogène H2S (gaz mortel)
pourraient être valorisées avec des procédés par plasmas qui sépareraient l'hydrogène et le soufre.
Ces procédés existent pour produire de l’hydrogène et récupérer du soufre à partir des gaz
contenant une forte teneur en H2S. Quand la teneur en H2S est moins importante, des techniques
plasma peuvent également être utiles pour assister certains étages du procédé classique Claus ou
réaliser ce procédé pour des gaz non conventionnels. Les tests allant jusqu’à l’échelle industrielle
sont menés dans divers réacteurs à plasmas et les résultats encourageants rapportés de la littérature
et de la recherche propre laissent envisager des prochaines applications.
(Voir les programmes de l'ANR 2005 - 2009 (Agence nationale de la recherche))
Sécurité
L’hydrogène est aussi dangereux que l’essence, mais peut être aussi plus sûr de par ses
caractéristiques de sécurité.
• L’hydrogène est plus léger que tous les autres éléments.
• L’hydrogène a une densité plus faible et donc une plus grande flottabilité
• L’hydrogène se diffuse plus vite dans l’air que n’importe quel carburant gazeux
• L’hydrogène est sans odeur, dans goût, sans couleur et non toxique
• L’intervalle d’allumage de l’hydrogène a de grandes différences de concentration
• La flamme du brûlage de l’hydrogène est invisible de jour comme de nuit
• L’énergie d’allumage de l’hydrogène pour certaines concentrations est très basse
• Le taux de flamme de l’hydrogène est plus élevé que celui d’autres carburants
• La température d’allumage de l’hydrogène est plus élevée que celle de l’essence
• L'hydrogène est explosif dans un grand intervalle de concentration quand il est confiné, mais il
lui est difficile d’exploser en plein air
Ce n’est pas l’hydrogène qui causa l’explosion de Hindenburg. Une étude de l’accident a mis en
cause la peinture utilisée sur la peau du dirigeable, qui contenait le même composant que le
carburant d’une fusée. Une décharge électrique a mis feu à la peau, et le s’est propagé à la surface
du dirigeable. L’hydrogène brûla rapidement, vers le haut et loin des personnes à bord de l’engin.
Roadmap européenne de la production d’hydrogène:
Projets Européens sur l’hydrogène et les piles à combustibles
➪ Zero Regio - Vers les voitures zéro émission – Flottes de Voitures à hydrogène et infrastuctures de
remplissage en stations services publiques multi-énergies.
➪ H2moves- Hydrogène pour les transports – information des citoyens sur les projets hydrogène
dans l’UE
➪ Premia - Cadre d'évaluation
➪ HyLights - Activité de coordination pour les démonstrations
➪ Hychain-Minitrans - Démonstration de nombreux véhicules légers de transport et applications)
➪ HyFLEET-Cute - Démonstration de plusieurs flottes de bus et infrastructures à travers l’Europe
66
➪ HyApproval - Formalités d'approbation pour les infrastructures
➪ Roads2Hycom - Activité de coordination pour la recherche hydrogène et piles à combustibles
➪ CEP - Démonstration de véhicules à hydrogène et infrastructure - Clean Energy Partnership
Allemagne)
Le stokage des énergies renouvelables:
Le point important à souligner est que l'énergie renouvelable devient viable dès lors qu'une partie de
cette énergie peut être stockée sous forme d'hydrogène. Cela tient à ce que l'énergie renouvelable
est intermittente. Quand une énergie renouvelable n'est pas disponible, l'électricité ne peut pas être
produite et l'activité économique s’arrête.
Mais si une part de l'électricité produite quand l'énergie renouvelable est abondante peut être utilisée
pour extraire l'hydrogène de l'eau, qui peut alors être stocké pour une utilisation postérieure, la
société aura alors une fourniture continue d'énergie.
D'autres technologies de stockage incluant des batteries électriques, des stations de transfert
d'énergie hydraulique par pompage, des volants, les ultra-condensateurs, et autres, fournissent la
capacité de stockage le long du réseau de fourniture d'énergie intelligent et complètent l'hydrogène
dans le maintien d'une fourniture sûre d'énergie disponible. L'hydrogène peut aussi être extrait de la
biomasse et stocké de la même façon.
En 2001, le brésil a montré les conséquences d'une politique énergétique s'appuyant sur une forme
d'énergie renouvelable intermittente pour l'électricité sans aucun moyen de stockage. Plus de 80 %
de l'électricité du Brésil proviennent d'une source renouvelable d'énergie - l'hydro-électricité et en
2001, le Brésil a connu une grande sécheresse qui a énormément ralenti les débits d’eau, entraînant
des coupures d’électricité sur tout le territoire. Si une infrastructure à hydrogène avait été en place, le
67
Brésil aurait pu utiliser un peu de ses surplus d'électricité, produits quand le niveau de l'eau était
suffisant pour électrolyser l'eau et stocker l'hydrogène pour garantir la production d'énergie pendant
la sécheresse. En 2008, le Danemark se trouve en face d’un énorme problème de stockage de
l’électricité éolienne, qui représente 20% de son énergie électrique, très présente sur son territoire.
Les dépenses nécessaires à la mise en œuvre de l'énergie renouvelable deviennent rapidement
compétitives, le coût de production de l'hydrogène reste toujours relativement élevé. Cependant, de
nouvelles percées technologiques et des économies d'échelle réduisent radicalement ces dépenses
chaque année. De plus, les piles à combustible fonctionnant à l'hydrogène sont au moins deux fois
aussi efficaces que le moteur à combustion interne.
Corrélativement, les coûts directs et indirects du pétrole et du gaz sur les marchés mondiaux
continuent de monter et vont de records en records ces derniers mois (118 dollars le baril en avril
2008). Nous sommes très proches du point de rencontre entre le prix décroissant du couple "énergie
renouvelable et "hydrogène" et le prix croissant des carburants fossiles, à partir duquel l'ancien
régime de l'énergie laissera place à la nouvelle ère
de l'énergie.
Les bases d'une transition vers la troisième révolution industrielle a été établie par le conseil de
l'Union Européenne en Mars 2007.
L'Union européenne est devenue la première superpuissance à mettre en place un engagement
contraignant de produire 20 % de son énergie à partir de sources d'énergies renouvelables en 2020.
Quand la contribution d'énergie renouvelable à la production d'électricité devient significative, même
un ralentissement provisoire du flux solaire, du vent et du débit d'eau, peut entraîner une insuffisance
de production, une pointe dans les prix et des coupures d'électricité. Utiliser l'hydrogène comme
“support de stockage” pour l'énergie renouvelable sera essentiel si l'Union européenne doit assurer
une fourniture fiable d'énergie.
L'hydrogène est aussi la façon de stocker et d’utiliser l'énergie renouvelable pour tous les transports.
C’est la réalisation depuis 2002 du projet CUTE (clean urban transport for Europe) qui a mis en place
27 autobus à hydrogène en Europe, dont pas un seul en France ! (voir la rubrique véhicules propres)
La Commission européenne reconnaît que le recours accru aux formes renouvelables d'énergie
serait énormément facilité par le développement de capacité de stockage de piles à combustible
fonctionnant à l'hydrogène et, en 2003, elle a mis en place la Plate-forme de Technologie Hydrogène,
qui constitue un effort massif de recherche et développement pour placer l'Europe au premier rang
dans la course vers un futur faisant appel à l'hydrogène.
Les régions et les gouvernements nationaux à travers l'Europe ont déjà commencé à mettre en place
des programmes de recherche et développement sur l'hydrogène et commencent à introduire des
technologies à hydrogène sur le marché.
En 2006, l'Allemagne a consacré 500 millions d'euros à la recherche et au développement des
techniques à hydrogène et a commencé à préparer des plans permettant de créer un réseau
hydrogène national, dans le but affiché de conduire l'Europe et le monde dans l'ère hydrogène à
l'horizon 2020.
En 2007, la Chancelière Angela Merkel et les membres de son cabinet ont appelé à une Troisième
Révolution Industrielle dans des discours publics.
En octobre 2007, la Commission européenne a annoncé un partenariat public/privé de plusieurs
milliards d'euros pour accélérer l'introduction commerciale d'une économie de l'hydrogène dans les
68
27 Etats membres de l'Union européenne, en mettant principalement l'accent sur la production
d'hydrogène à partir de sources d'énergie renouvelable.
La région Bretagne importe 93 % de son énergie électrique de centrales nucléaire hors de la région.
Dans les 7 % que la région produit 60% vient d’énergies renouvelables avec l’usine marémotrice de
la Rance, dans le pays de Saint-Malo qui en produit la quasi-totalité.
La région Bretagne a été innovatrice avec la mise en place du barrage de La Rance et de son usine
marémotrice. En effet, sa construction commença en juillet 1963 et fût achevé en 1966 par
l’inauguration du président De Gaulle. Cela fait donc plus de quarante ans que la région est engagée
dans l’expansion des énergies renouvelables, premier pilier de la troisième révolution industrielle. De
plus la Bretagne, avec son très fort potentiel éolien voit l’expansion grandissante de ces parcs
éoliens et photovoltaïques et doit donc ouvrir la voie en généralisant ce type de stockage de l’énergie
renouvelable sous forme d’hydrogène.
La quasi totale dépendance énergétique de la région Bretagne, son fort potentiel de développement
des énergies renouvelables et son tissu économique conséquent permettront à la région de devenir
précurseur dans le stockage des énergies renouvelables intermittentes en mettant en place une
filière complète de l’hydrogène, des piles à combustibles et des batteries supercapacités.
Cela nécessite aussi la mise en place des applications liées à l’hydrogène notamment dans les
transports collectifs, industriels et véhicules particuliers.
Liens :
Démonstration de Bus à hydrogène en Europe (Projet CUTE 2002) : http://www.global-hydrogen-busplatform.com
Excellent site sur l'hydrogène en Islande:
http://odysee-islandaise.over-blog.com/article-l-islande-et-l-hydrogene-38193568.html
Hydrogène et piles à combustibles dans le plan Européen SET
stratégiques:
http://setis.ec.europa.eu/technologies/Hydrogen-and-fuel-cells
Technologies énergétiques
Plateforme de stockage de l'énergie photovoltaïque en Corse: MYRTE
Piles à combustible
La pile Genepac du CEA et de PSA Peugeot Citröen (Application
principale visée: les véhicules de transport de passagers)
01) Historique
La pile à combustible (PAC) est une des plus belles inventions de
l’Homme et on doit la connaissance de l’effet produit au chercheur
suisse Christian Schönbein qui expérimenta en 1839 l’électrolyse de
l’eau avec déjà de la mousse de platine.
William R. Grove réalisa peu de temps après un prototype de pile à combustible avec de l’acide
sulfurique comme électrolyte.
69
Ces travaux ne furent repris qu’en 1932, soit près d’un siècle plus tard, par Francis Bacon qui passe
d’un prototype de 1kW en 1953 à un proto de 5kW six ans plus tard qui servira de modèle aux piles à
combustibles utilisées dans les missions Apollo et Gemini à partir de 1966, et en plus elles
fournissent de l’eau aux spationautes.
En été 2007 le Japon commença à élaborer des normes sur les PAC, ainsi que des standards de
fabrication. Le Japon a de plus renforcé la sécurité de manière à faciliter l'usage généralisé de ces
piles à combustible sur la petite électronique et espère ainsi réduire de 50 % ses émissions de CO2
en proposant ces batteries dont l’autonomie est multipliée par trois.
02) Le Principe de la pile à combustible
La pile à combustible est une pile fournissant donc de l‘électricité. La particularité de cette pile est
qu’elle est alimentée en permanence par deux gaz : L’Hydrogène et l’Oxygène, je devrais plutôt dire
du di-hydrogène et du di-oxygène pour les chimistes puristes.
Ici le combustible réducteur est le di-hydrogène, c’est lui qui va fournir les électrons indispensables
aux courants électriques.
70
Le di-oxygène joue le rôle d’oxydant qui va capter des électrons pour faire circuler le courant
électrique. Le seul rejet de cette pile à combustible est … de l’eau H2O !
Le processus en jeu est exactement l’inverse de l’électrolyse de l’eau pure qui fournie de l’hydrogène
et de l’oxygène à partir d’eau pure et de courant électrique.
La pile à combustible transforme l’énergie chimique en énergie électrique ce qui en fait un
générateur électrique. Elle possède deux électrodes, cathode et anode, séparés par un électrolyte
qui assure le transport des charges électriques et ferme le circuit.
Comme dans une pile classique, le di-oxygène (l’oxydant) et le di-hydrogène (le réducteur) sont
consommés.
Remarque : Le réducteur peut être aussi du méthanol ou du gaz naturel.
1.Réaction d’oxydation à l’anode : H2 → 2H+ + 2e–
2.L'ion H+ passe de l'anode à la cathode et provoque un courant électrique par transfert des
électrons dans le circuit électrique.
3.Réaction de réduction à la cathode : les ions H+ sont consommés : O2 + 4H+ + 4e– → 2H2O
On obtient donc : de l’électricité de l’eau mais aussi de la chaleur.
La tension théorique maximum produite est de 1,23 Volt (à 25°C avec des pressions de gaz purs à 1
bar). En pratique, la tension obtenue est de l’ordre de 0,65 Volt.
Les réactions sont rendues possibles par la présence d'un catalyseur de dissociation de la molécule
d'hydrogène sur un support poreux recouvert d’une fine couche de platine divisé.
03) Les Technologies Principales
Bien que le principe de base soit toujours le même, les techniques mises en œuvre au sein des piles
à combustible sont très variées. Une des composantes fondamentales est l'électrolyte utilisé. Cet
élément rend possible la migration d'ions spécifiques, d'une électrode à l'autre.
Le type d'électrolyte utilisé va déterminer la température à laquelle la pile va fonctionner:
* - Pile à membrane polymère (80°C)
* - Pile à combustible alcaline (100°C)
* - Pile à acide phosphorique (200°C)
* - Pile à carbonates fondus (700°C)
* - Pile à électrolyte solide (800-1000°C)
04) Les différentes types de pac
➪ AFC - Alcalines (Alkaline Fuel Cells)
Combustible : H2 très pur, sans CO2, pas de reformage ;
Electrolyte : KOH ;
Ions transportés : OHCO maxi : quelques ppm (l'air de combustion doit être purifié pour èliminer le CO)
Température de fonctionnement 60 à 80 °C
71
Rendement électrique : 55 à 60 %
Applications : Transport, portable, aérospatial (navette US)
+ Electrolyte et catalyseur bon marché, démarrage rapide, fonctionnement à base
température.
- Sensible au CO2.
➪ DMFC - Direct Methanol Fuel Cells
Par extension, piles directement alimentées par n'importe quel alcool.
Rendement électrique : de l'ordre de 20 %
Applications : Source d'énergie primaire ou d'énergie rechargable pour GSM, ordinateur
portable, camera, lecteur de MP3, etc.
+ Grande densité d'énergie, fonctionnement à température ambiante, démarrage rapide,
bonne réponse au changement de régime de puissance, combustible liquide ne nécessitant
72
pas de reformatage (recharge instantanée),
- Emission de CO2, faible rendement
➪ MCFC - cabonates fondus (Molten Carbonate Fuel Cells)
Combustible : H2 reformé, CO, rerformage externe ou interne ; Electrolyte : Cabonates
fondus ;
Ions transportés : CO3- Température de focntionnement : 600 à 700 °C
Puissance : 250 kWe à quelques MWe
Rendement électrique : 50 à 60 %
Applications : cogénération, production d'électricité décentralisée (hôtels, hopitaux...)
+ Très efficace, combustible gaz naturel comme combustible, utilisation de la chaleur des
gaz d'échappement pour la co-génération.
- Démarrage lent, technologie haute température, sensible au choc thermique, application
difficile à l'automobile
Stade de recherche développement : 1 unité de 2 MWe, plusieurs de 100 à 250 kWe
(difficultés de fonctionnement)
➪ PAFC - A acide phosphorique (Phosphoric Acid Fuel Cells)
Combustible : H2 pur, H2 reformé, reformage externe ;
Electrolyte : acide phosphorique ; Ions transportés : H+
CO maxi : 1 % (V/V)
Température de fonctionnement : 180 à 200 °C
Puissance :
> 200 kWe pour la cogénération,
environ 100 kWe pour le transport
Rendement électrique : 36 à 45 %
Applications : cogénération, transport collectif (bus)
+ Commercialement disponible, technologie basse température
- Coût élevé, moins efficace que MCFC et SOFC, nécessite un reformage externe, sensible
au choc thermique, application difficile à l'automobile
Stade de développement : fabrication en petites séries; 200 unités de 200 kWe en
fonctionnement dans le monde (dont 20 en Europe).
C'est une pile de ce type qu'EDF et Gaz de France ont mis en service à Chelles en janvier
2000 à titre expérimental.
Fourniture à 200 foyers de l'équivalent des besoins en électricité et chaleur ;générateur de
200 kW électriques et 200 kW thermiques, fonctionnant au gaz naturel : Elle délivre au
réseau électrique de la ville un courant de 400 volts et alimente avec de l'eau à 80°C le
chauffage urbain
73
➪ PEMFC - membranes échangeuses de protons
(Polymer Electrolyte Membrane Fuel Cell)
Combustible : H2 très pur, avec ou sans CO2, H2 reformé (reformage externe) ;
Electrolyte : polymère (électrolytre solide) ;
Ions transportés : H+
CO maxi : quelques ppm (catalyseurs en platine)
Température de fonctionnement : 80 à 120 °C
Puissance :
piles miniatures : quelques Watts ;
téléphones, camescopes, panneaux signalisation... : moins de 10 kWe ;
résidentiel : 250 kWe pour la cogénération.
Rendement électrique : 32 à 40 %
Applications : cogénération résidentielle ou tertiaire, automobile, téléphones et ordinateurs
portables, sous-marin, spatial
+ Démarrage rapide, insensible au CO2, faible température de fonctionnement, bonne
gestion thermique, souplesse de fonctionnement, large plage de puissance.
- Nécessite un hydrogène de très haute pureté, contamination de la membrane par le CO et
le S, utilisation de platine (coût élevé).
Stade de développement : unités de 50 à 250 kWe
➪ SOFC - oxydes solides (Solid Oxide Fuel Cells)
Combustible : H2 reformé, CH4 ou CO, reformage externe ou interne ; Electrolyte :
céramique ; Ions transportés : O- Température de fonctionnement : 850 à 1000 °C
Puissance : 10 kWe ou 300 kWe à quelques MWe selon les technologies
Rendement électrique : 45 à 50 % ; 70 % avec une turbine adjointe pour récupérer la
chaleur
Applications : cogénération, production
d'électricité décentralisée
+ Plus efficace que le PEM (rendement
électrique élevé), combustible gaz naturel,
chaleur des gaz d'échappement utilisée pour la
co-generation.
- Technologie haute température, démarrage
lent.
Stade de recherche et développement : unités
de quelques kWe à 1 MWe
Des autobus canadiens équipés par la société
Ballard circulent depuis plusieurs années à
Vancouver et Chicago.
➪ 3 sous-systèmes
Cœur de pile (Stack) spécifique / technologie
Périphériques
74
Gestion électrique (conditionnement de courant/contrôle commande)
Exemples de piles à combustibles PEMFC hydrogène sur le
marché:
Heliocentris Nexa® 1200
o Tension nominale: 24,4 V
o Courant nominal: 52 A
o Puissance nominale: 1200 W
o Tension de sortie: 22 ... 36 V
o Consommation d'hydrogène: max. 15 SLPM *
(* SLPM = Standard Liter Per Minute = 1 L / min à la pression
atmosphérique et à 20°C)
Caractéristiques techniques:
Dimensions
* Largeur x profondeur x hauteur: 400 x 550 x 220 mm
* Poids: env. 22 kg
Stack
* Fabricant: Ballard Power Systems Inc
* Type: FCGen™ 1020 ACS
* Design: PEM, refroidi par air, cathode ouvert
Données sur le rendement
* Tension nominale: 24,4 V
* Courant nominal: 52 A
* Puissance nominale: 1200 W
* Tension de sortie: 22 ... 36 V
Media
* La qualité de l'hydrogène: 99,95% ou mieux
* La consommation d'hydrogène: 15 SLPM
* Air débit: 3000 SLPM (à la puissance nominale, à température ambiante
de 30 ° C )
Liens sur les piles à combustibles:
La pile DMFC au methano:l www.annso.freesurf.fr/DMFC.html
La pile à combustible au Laboratoire d'Energétique et de Mécanique Théorique et Appliquée UMR
CNRS-INPL-UHP 7563: http://lemta.ensem.inpl-nancy.fr/pac.html/
Un Travail personnel encadré (TPE) sur la pile à combustible: http://pilecombustible.free.fr/
Fonctionnement de la pile à combustible:
75
http://www.psa-peugeot-citroen.com/modules/pac/francais/index.html
Quelques conséquences de la disponibilité de
grandes quantités d'hydrogène
L’utilisation du gaz naturel dans la plupart de nos industries est d’une portée stratégique essentielle
en Europe. Les coupures d’approvisionnement de la Russie en Hiver 2008-2009, nous ont montré la
dépendance des pays de l’Europe de l’Est vis-à-vis de notre voisin Russe, la France n’important que
15% de gaz Russe a été quelque peu épargnée. L’utilisation de l’hydrogène dans le réseau gazier,
nous apporterait une indépendance relative beaucoup plus acceptable.
L'utilisation de la technologie de l'hydrogène dans la métallurgie pourrait être
d’une portée
considérable. Toutes les industries à l'heure actuelle qui polluent l'atmosphère devraient être
converties à l'utilisation de l'hydrogène et de l'électricité. Dans la métallurgie, il existe à l'heure
actuelle une évolution intégrant la récupération du nickel, du plomb et de leurs minerais par le biais
de réduction de l'hydrogène.
Les 50 prochaines années, entraîneront des changements dans la technologie chimique.
L'hydrogène sera de plus en plus utilisés pour obtenir des produits chimiques organiques à partir de
charbon (car le gaz naturel continuera l’augmentation de ses prix jusqu’à ce que les taux maximaux
supposés d'approvisionnement soient atteint. Le méthanol peut être obtenu électro-chimiquement.
Environ 30% des dépenses d'énergie en Europe proviennent du fonctionnement des machines dans
la fabrication. La métallurgie industries, la production alimentaire, du papier et d’autres produits
utilise le gaz naturel. L'utilisation de ce carburant devra être remplacée dès que les ressources
d’hydrogène mises à disposition seront suffisantes, car la combustion du gaz naturel entraîne une
augmentation des gaz à effet de serre, contrairement à l’utilisation de l’hydrogène.
La production d'électricité, qui utilise de plus en plus la combustion du gaz naturel et du charbon
(avec un gain important de rendement ces dernières années) doit être remplacée par le biais de
l'hydrogène dans les piles à combustible. L’hydrogène est un moyen de stockage des énergies
renouvelables qui sont intermittentes et ne fournissent pas toujours de l’électricité aux bons
moments.
La plupart des constructeurs automobiles ont des prototypes de véhicules à hydrogène
performants, des bus à hydrogène sont en circulation dans de nombreuses capitales européennes
depuis 2002 (Projet CUTE, Clean Urban Transports for Europe).
L'éclairage et la cuisine.
Le phosphore dans des tubes de verre réagit avec l'hydrogène pour donner l'éclairage. Un appareil
central, dans le sous-sol, pourrait produire de la lumière qui serait ensuite transmise à d'autres
pièces. La recombinaison de l'hydrogène avec l'oxygène de l’air dans des céramiques poreuses
donnerait de la chaleur d'usage domestique.
L'électricité à usage domestique.
Une pile à combustible alimentée en hydrogène fourni l’électricité et la chaleur. Des onduleurs
donneraient du courant alternatif.
Les appareils de chauffage peuvent être obtenus par des méthodes
inhibée de l'hydrogène.
impliquant la combustion
76
L’électricité utilisée pour le ménage est d’environ un quart de l'utilisation totale d'énergie, ce qui
pourrait être réduit de moitié par l’utilisation de l'hydrogène et de pile à combustible.
L'eau potable.
L'eau potable pourrait être produite par la maison avec la pile à combustible qui produit aussi de
l’eau pure. Elle est utilisée à bord des lanceurs spatiaux depuis les années 1960.
La moyenne des ménages utilise une énergie équivalente d'environ 5 kW de puissance ce qui
correspond à environ 6 l d'eau distillée par jour.
L'hydrogène dans la production alimentaire?
L'hydrogène peut être combiné avec du CO2 pour produire du formaldéhyde et de méthanol. Des
réactions avec de l'azote en présence d’enzymes peuvent conduire à des protéines.
Gestion des déchets.
La pyrolyse de déchets avec l’hydrogène fournit le méthane et l'éthylène, utilisés dans la synthèse
de matières plastiques.
Les arguments en faveur de l’économie de l’hydrogène sont trop nombreux pour être tous
évoqués ici mais certains facteurs économiques ressortent nettement des constats précédents:
1) La diversification des marchés rendra l’activité pérenne,
2) La filière hydrogène est en développement rapide :
- Les applications portables sont estimées en 2010
- Les applications Stationnaires sont estimées entre 2010 et 2012
- Les applications mobiles entre 2015 et 2020
Ces 3 domaines ouvriront de nouveaux marchés et de grandes opportunités de développement
3) Le développement de produits spécifiques
4) La diversification de l’offre technologique
Opportunités industrielles :
Fort potentiel de développement de toutes les architectures
- Production d’hydrogène (reformage, électrolyse de l’eau)
- Compression d’hydrogène ou liquéfaction (compresseurs spécifiques, production de froid)
- Stockage d’hydrogène (réservoirs composites, technologies des fibres de carbone, de l’acier …)
- Traitement du courant
- Activités transverses (Modélisation des systèmes, Bancs d’essai, Sécurité, réglementation, normes,
Services spécifiques, Formation professionnelle, Entretien, Réparation)
Utilisation de l’hydrogène :
- Moteurs à combustion (véhicules routiers, maritimes, aériens, turbines à gaz…)
- Réseau gazier, combustible domestique
- Piles à combustibles (5 technologies principales, fort potentiel de développement de toutes les
architectures)
77
Origine du problème
Effet environnemental Effet à grande échelle de
l'économie de l'hydrogène (H2)
La concentration de
l’atmosphère en CO2
due à l’usage des
combustibles fossiles
pour le transport,
domestiques, industriels
et à
des fins militaires
Température due à l’effet Réduction du taux d'augmentation de
de serre.
la température dans le monde jusqu’à
Hausse inacceptable
zéro en 50 ans.
dans les états du sud
d'ici à 2050
Augmentation de
L’effet de serre a
production de CH4
augmenté
(méthane) provenant
des
animaux domestiques et
peut-être de la Tundra.
Les Effets resteront mais seront
moins important si l'augmentation
des émissions de CO2 est Stoppée
SO2 (dioxyde de soufre
très toxique) provenant
de la combustion du
charbon → électricité
Les sources d'énergie renouvelables
è H2 è électricité è pas de
combustion du charbon
Les pluies acides, la
dégradation des
bâtiments et des
métaux, les poissons
dans les lacs
anciens réfrigérateurs →
La Pile à combustible électrique
fluorohydrocarbons.
Le cancer de la peau où fournira l’énergie aux refroidisseurs
Causes de la diminution la couche d’ozone est
thermoélectriques
de la couche d’ozone
mince
aux pôles
Cancérogénicité de
Le cancer (gorge et les Eliminé dans la mesure où les
l'inhalation des produits poumons ?)
produits pétroliers sont remplacés par
petroliers (essence …)
H2
et des produits de
combustion de ceux-ci.
Les matières organiques Il est connu que les
La disponibilité massive de H2
ajouté à l'eau aliments mères qui mangent les permettrait la production locale de
(conservateurs)
poissons des lacs
nourriture synthétique propre.
contenant du mercure
H2 + CO2 + N2 + enzymes èdes
ont des bébés avec une protéines
déficience de
l'intelligence. Le DDT est
maintenant dans tous les
cerveaux.
Le déversement de
pétrole en mer
Nous tuons le plancton à L’utilisation de pétrole déclinera
la base de la
comme le solaire-hydrogène
photosynthèse :
augmentera
CO2 + Lumière ==> O2
78
épuration des eaux
usées
Les boues d'épuration Traitées électrochimiquement
réparties sur les terres. → CO2 + H2 + N2
La pluie emmagasine les
métaux toxiques dans la
nappe phréatique
Détritus, ordures, etc
Les océans sont atteints. pyrolyse avec H2 → CH4 + C2H4 →
Heyerdahl a trouvé une synthèse
pollution de grande
portée.
Toxiques (par ex,
Nous tuons la faune en Des inhibiteurs de corrosion Nonl'inhibition de la
raison des effets de la toxiques peuvent être
corrosion)
bioaccumulation
synthétisés
Attaque de la mer sur les des substances
plates-formes en mer
toxiques sur les
enzymes dans le corps
Déchets nucléaires
militaires; Utilisation
civile de l'énergie
nucléaire
En raison de leur longue
demi-vie, de nombreux
noyaux radioactifs issus
des déchets sont
extrêmement dangereux
La production est éliminée dans
l’économie de l’hydrogène. Faible
niveau de déchets électrochimique
amovible
Les principales applications de l’hydrogène
Industries
Alimentaire et boissons
L'hydrogène pur est utilisé pour la production de plastiques, polyester et nylon. H2 est aussi utilisé
dans l'hydrogénation des amines et acides gras (huiles alimentaires).
Verre, Ciment et Chaux
L'hydrogène est principalement utilisé pour la création en combinaison avec l'azote d'une
atmosphère réductrice au-dessus du bain d'étain dans le procédé FLOAT. On utilise l'hydrogène pour
le traitement thermique (flamme oxy hydrogène) du verre creux et des préformes en fibre optique.
Industrie des métaux
Atmosphère réductrice pour des procédés de traitement thermique.
Laboratoires et analyses
L'hydrogène est utilisé comme gaz porteur en chromatographie en phase gazeuse et dans de
nombreuses techniques analytiques. Les plus communes sont l'utilisation dans les flammes des
détecteurs à ionisation de flamme (FID) ou des détecteurs à photométrie de flamme (FPD). On utilise
aussi des mélanges contenant de l'hydrogène dans les appareils d'étincelage et dans la mesure des
hydrocarbures totaux.
79
Soudage, coupage et projection thermique
Traitement thermique de divers métaux
Pétrole et dérivés
Désulfuration du fioul et de l'essence
Electronique
L'hydrogène est généralement utilisé comme gaz de balayage lors des étapes de dépôt de silicium
ou de croissance cristalline, aussi bien que dans le brasage sous atmosphère et le recuit de films de
cuivre. L'emploi d'hydrogène avec des gaz inertes protecteurs (H2 dilué dans de l'azote) permet
théoriquement d'éliminer la totalité de l'oxygène ainsi que ses inconvénients dans un milieu essentiel
pour les procédés à haute ou moyenne températures.
Espace et Aéronautique
L'hydrogène est utilisé sous forme liquide comme ergol pour la propulsion des étages cryogéniques
des fusées Ariane.
Automobiles et transports
L'hydrogène est un vecteur d'énergie nouvelle sans production d'oxydes de carbone utilisé dans les
piles à combustibles.
Liens sur l'hydrogène dans le Monde
Publications and News
•
The Hydrogen Journal - This site a news service for the hydrogen industry, covering
developments in fuel cells, technology, hydrogen supply, storage, projects and regulatory
policy.
•
Alternative Energy News - Hydrogen - This news site links to hydrogen articles across the
internet and is updated with several new articles each day
•
The Hydrogen and Fuel Cell Letter - This monthly newsletter, started in 1986, provides news
from across the spectrum from across the hydrogen and fuel cells industry
International Organizations
•
International Partnership for the Hydrogen Economy (IPHE) - The IPHE is an organization of
governments across the world that maintain hydrogen programs
•
International Association for Hydrogen Energy (IAHE) - This organization focuses on
collaborating on hydrogen research around the world and hosts the once-every-two-years
World Hydrogen Energy Conference (WHEC).
National Hydrogen Associations
•
Argentina:
Argentinian Hydrogen Association (AAH2)
•
Australia:
National Hydrogen Association of Australia (NHAA)
•
Bulgaria:
Bulgarian Hydrogen Society (BGH2)
80
•
•
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•
Canada:
Canadian Hydrogen and Fuel Cell Technology (CHFCA)
China (PRC):
China Association for Hydrogen Energy (CAHE)
Denmark:
Danish Hydrogen Association (DHA)
European Union:
European Hydrogen Association (EHA)
France:
Association Française de l'Hydrogène (AFH2)
Germany:
German Hydrogen Association (DWV)
German National Organization Hydrogen and Fuel Cell Technology (NOW-GmbH)
Greenland & Iceland:
North Atlantic Hydrogen Association (NAHA)
Italy:
Italian Hydrogen Forum (ITForum)
Italian Hydrogen and Fuel Cell Association (H2IT)
India:
Society for Hydrogen Economy and Research
Japan:
Hydrogen Energy Systems Society of Japan (HESS)
Mexico:
Sociedad Mexicana del Hidrógeno (SMH)
The Netherlands:
Dutch Hydrogen Association (NWV)
Norway:
Norwegian Hydrogen Forum (NHF)
Poland:
Polish Hydrogen and Fuel Cell Association (PSH2)
Portugal:
Portugese Hydrogen Association (AP2H2)
Russia:
Russian Hydrogen Association (TATA)
South Korea:
Korean Hydrogen Energy Society (KHES)
Spain:
Asociación Española del Hidrógeno (AEH2)
Sweden:
Swedish Hydrogen Forum (SHF)
Hydrogen Sweden
Switzerland:
Swiss Hydrogen Association (Hydropole)
United Kingdom:
U.K. Hydrogen Association (UKHA)
United States:
National Hydrogen Association (NHA) - The NHA is a non-profit industry association
representing hydrogen interests in the United States
United States Fuel Cell Council (USFCC) - The USFCC is an industry association representing
fuel cell interests in the United States
California Fuel Cell Partnership (CaFCP) - This organization is a group of both industry and
government members committed to fuel cell vehicles
California Hydrogen Business Council (CH2BC)
American Hydrogen Association (AHA)
81
National Projects
Canada
•
Hydrogen Village - The Hydrogen Village is a project in Toronto which focuses on creating an
experimental community in which hydrogen takes the leading role in energy.
European Union
•
H2mobility
•
European Integrated Hydrogen Project
•
Clean Urban Transport for Europe (CUTE et hyfleet Cute) (plateforme européenne de 47 bus
à hydrogène en Europe)
Japan
•
Fuel Cell Development Information Center
•
Hydrogen Energy Systems Society of Japan
•
WE NET
United States
•
American Methanol Institute (AMI)
•
Fuel Cells 2000
•
Hydrogen Energy Center in Maine
•
Hydrogen Fuel Cell Institute
•
Schatz Energy Research Center (SERC)
•
Society of Automotive Engineers Fuel Cell Showcase
3ème pilier : les réseaux
intelligents
Un réseau énergétique intelligent est capable de transmettre des flux d'informations et d'énergie
bidirectionnels entre distributeurs et consommateurs d'électricité.
En évaluant l’intérêt d’un changement ambitieux en faveur des énergies renouvelables et en
finançant un programme énergique de recherche et développement dans la technologie des piles à
combustible à l’hydrogène, l'Union Européenne a mis en place les deux premiers piliers de la
Troisième Révolution Industrielle.
Le troisième pilier, la reconfiguration du réseau électrique européen, s'appuyant sur le réseau
Internet, permettant aux entreprises et aux particuliers de produire eux-mêmes leur énergie et de la
partager, est en cours d'expérimentation au sein des compagnies électriques en Europe.
L’intérêt de la région Bretagne est ici évident, notamment en raison de l’expérience issue du fort tissu
de compétences informatiques et réseaux qu’elle a su établir.
L'inter-réseau intelligent de la région Bretagne sera constitué de trois composants essentiels.
- Des mini-réseaux permettant aux particuliers, aux petites et moyennes entreprises (PME)
ainsi qu'aux grandes entreprises de produire l'énergie renouvelable localement − au moyen de
piles photovoltaïques, de l’énergie éolienne, de la mini-hydraulicité, des déchets animaux et
agricoles, des détritus, etc.− et de l'utiliser hors réseau pour leurs besoins propres en électricité.
82
- La technologie du comptage intelligent permet aux producteurs locaux de vendre réellement
leur énergie au réseau électrique principal, mais aussi d'accepter l'électricité du réseau, rendant
ainsi les flux d'électricité bi-directionnels.
- La technologie du réseau intelligent est incorporée dans des appareils et des puces installés
dans tout le système du réseau, permettant de relier chaque appareil électrique. Le logiciel
permet à l’intégralité du réseau électrique de connaître la quantité d'énergie utilisée, à tout
moment, n'importe où sur le réseau.
Cette inter-connexion de la région Bretagne peut être utilisée pour réorienter les utilisations d'énergie
et les flux pendant les heures de pointe et les heures creuses et même de s'adapter à tout moment
aux variations de prix de l'électricité.
A l’avenir, les réseaux intelligents seront aussi de plus en plus connectés, en temps réel, aux
changements de temps enregistrant les variations des vents, des flux solaires, de la température
ambiante, etc., donnant au réseau électrique la capacité d'ajuster en permanence le flux d'électricité
aux conditions météorologiques externes ainsi qu'à la demande des consommateurs. Par exemple,
si le réseau électrique connaît un pic d'utilisation énergétique et une possible surcharge du fait d’un
excès de demande, le logiciel peut commander à la machine à laver d'un particulier de descendre
d’un cycle par charge ou de réduire la climatisation d'un degré. Les consommateurs qui sont d'accord
avec des ajustements légers dans leur utilisation d'électricité reçoivent des "crédits" sur leurs
factures.
Puisque le vrai prix de l'électricité sur le réseau varie constamment en 24 heures, l'information en
temps réel en matière d'énergie ouvre la porte "à une politique de prix dynamique", permettant aux
consommateurs d'augmenter ou faire chuter leur utilisation d'énergie automatiquement, selon le prix
de l'électricité sur le réseau. Jusqu'au point où la politique de prix permet aussi aux producteurs de
mini-réseaux locaux d'énergie de vendre l'énergie au réseau ou de s’en retirer, de manière
automatique.
L'inter-réseau intelligent donnera non seulement plus de pouvoir aux utilisateurs finaux pour leurs
choix en matière énergétique, mais sera aussi source d'une nouvelle efficacité significative dans la
distribution d'électricité.
De façon intéressante, le nouveau plan énergétique de l'UE prévoit l'inter-réseau, avec l'exigence
que le réseau électrique soit "dégroupé", ou au moins rendu plus indépendant par rapport aux
entreprises énergétiques qui produisent aussi le courant électrique, de telle sorte que les nouveaux
acteurs -en particulier les petites et moyennes entreprises et les particuliers - aient la possibilité de
produire et de vendre l' énergie au réseau dans les mêmes conditions de facilité et de transparence
que celles dont ils bénéficient maintenant dans la production et le partage de l'information sur
Internet.
La Commission européenne a mis en place une Plate-forme européenne de la Technologie des
Réseaux Intelligents et a préparé une vision à long terme et un document de stratégie en 2006 pour
reconfigurer le réseau électrique européen de manière à le rendre intelligent, uniforme et interactif.
En 2007, le Parlement européen a adopté une déclaration écrite appelant à une transition vers les
énergies renouvelables, une économie de l'hydrogène et la génération d'un réseau électrique
intelligent
- les trois piliers fondamentaux de la Troisième Révolution Industrielle.
Une majorité écrasante de parlementaires de l'UE a signé le texte, ainsi que les chefs des sept partis
politiques principaux de l'Europe et Hans-Gert Poettering, le président du Parlement européen. Le
83
Parlement européen est ainsi devenu la première assemblée parlementaire dans le monde à
endosser officiellement la stratégie des trois piliers pour entrer dans la Troisième Révolution
Industrielle.
La région Bretagne doit donc s’ouvrir et engager plus avant la poursuite de la mise en place de cette
nouvelle économie émergente à travers une politique de subventions et une politique fiscale
incitative pour faire démarrer le stockage de l’énergie sous forme d’hydrogène et le développement
des véhicules 0% d’émissions de CO2.
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BOOKS
Counterpoint Press / By Jerry Mander
July 24, 2013
09. There Are Good Alternatives
to US Capitalism, But No Way to
Get There
Jerry Mander's new book explores the
fatal flaws of the "obsolete" capitalist
system and strategies for change.
The following is an excerpt from Jerry Mander's new
bookThe Capitalism Papers: Fatal Flaws of an Obsolete
System (Counterpoint, 2013):
Which Way Out?
Let’s start with some good news. There is no shortage of
good alternative ideas, plans, and strategies being put
forth by activist groups and “new economy” thinkers in the
United States and all countries of the world. Some seek to
radically reshape the current capitalist system. Others
advocate abandoning it for something new (or old). There
is also a third option, a merger of the best points of other
existing or proposed options, toward a “hybrid” economic model that can cope with modern
realities.
84
Meanwhile, U.S.-style laissez-faire capitalists, who now dominate the politics and economy in
this country, continue to argue that all solutions must be determined by the “free market.” But
the free market does not focus on the needs of democracy, or the implications of rampant
inequity, or the catastrophic problems of the natural world. The free market is interested in
one thing: expanding wealth. That is its only agenda. Nothing else matters, at least until the
system collapses. Klaus Schwab had it right. And the situation is not much better abroad.
Ecological economist Brian Davey reported from the Beyond Growth Congress in Berlin
(2011) that there was “much talk of the need for democratization to facilitate the post-growth
economy. However, there was great skepticism for how much could be achieved. . . . The grip
of corporate lobby interests over politics at national [U.S.] and European levels is too great.
The state is a weak instrument for the kind of change that has to happen.” (Adbusters,
December 2011)
In the same issue, Simon Critchley, professor of philosophy at the New School, New York,
concurred: “Citizens still believe that governments represent the interests of those who elect
them, and have the power to create effective change. But they don’t, and they can’t. We do
not live in democracies. We inhabit plutocracies; government by the rich.”
So, the change will be up to us. And yet the puzzle persists: How do we get from here to
there? How do we bridge the chasm from corporate, oligarchic, global dominance of
governments, economies, media, and, not least important, military, all driven by the
ideologies of consumerism, growth, and “progress,” toward some new set of values and
structures?
What struck me most about the Occupy Wall Street movement was the way the Occupiers
initially resisted formally articulating the kinds of changes they hoped to see. By their very
lack of expression, they deliberately seemed to imply that the problem is more extreme.
Systemic. Total. They seemed to say that there was little point in describing ways to modify
governance, because all the currently available forms and instruments of power are
themselves inaccessible, and no longer valid. One of the precursors of the U.S. Occupy
movement, the Indignados (the “outraged”) of Spain—who’ve been doing mass
demonstrations in Madrid’s public squares since May 2011—put it explicitly: “You do not
represent us!” It’s their complaint about lack of responsive government, but also their desire
to break with representation altogether, and to act for themselves. It expresses a loss of faith
in the leaders and systems of governance as they now exist.
Living in the United States and watching the near dissolution of our own governance system
over recent decades makes it hard to disagree with the perception that government is
moribund, bought and sold by a small oligarchic class. As we try to describe good new
approaches begging for application toward transformative change, the governing institutions
of this society—corporate power, military power, media— continue to control all the levers of
change as few systems before have done. These governing institutions are emphatically not
interested in our transformative projects. This seems to apply nearly as much to the Obama
regime as it does to Republicans. At most, each party gives systemic reform some lip service.
But really, they prefer to co-opt, repress, or kill it in order to protect their benefactors.
In June 2011, the Nation published a special issue on “Reimagining Capitalism,” edited by
William Greider. In his introduction, Greider asked respondents to “imagine you have the
ability to reinvent American capitalism. Where would you start?” Greider acknowledged that
85
the political parties “are locked in small-minded brawls, unable to think creatively even to tell
the truth about our historic crisis.” As a result, he said, it would be extremely unlikely for the
proposed ideas “to have any traction in regular politics. . . . [But] at some point, it will become
obvious that our economy will not truly recover until American capitalism is refashioned,
stripped of its self-aggrandizing excesses, and made to serve the interests of society rather
than the other way around ... this will require deep structural change, not simply new politics.”
One response to Greider’s call came from Villanova University professor Eugene
McCarraher: “Why should we want to reinvent capitalism? The nature and logic of capitalism
are incorrigibly avaricious. As a property system driven by the need to maximize profit and
production, capitalism is a giant, ever-whirling vortex of accumulation. . . . Capitalism compels
us to be greedy, callous, and petty. It takes what the Greeks called pleonexia—an endless
hunger for more and more—and transforms it from a tawdry and dangerous vice into the
central virtue of the system. The sanctity of growth stems from this moral alchemy, as does
the elevation of market competition into a model of human affairs.”
Certain aspects of capitalism seem okay to me, at least if they’re small and local. For
example, I don’t see a problem with privately owned small businesses, in which someone
begins an enterprise and it supports him or her, plus their family and community. But by
“small,” I mean small! Serving a single community. Rooted locally. No outside controllers.
Predefined maximum size. Focused on a single line of products or services. Like the furniture
store in the first graphs of this book. Or local farmers. Or the publisher of this book. Or the
most marvelous small neighborhood coffeehouse/café located in Japantown, San Francisco,
YakiniQ, run by a young woman who is there every day, Christy Hwang, and an ardent and
cheerful young staff of students and artists. They are making a little profit but have no wish to
be Starbucks.
Scale is paramount. We don’t want Starbucks dominating the coffeehouses of the world. We
don’t want bookstores buying other book stores in other towns—and we don’t want any
Amazon.com shutting down our local bookstores or turning reading solely into an Internet
experience. We don’t want banks buying other banks, or banks buying corporations, or banks
or corporations buying governments. We don’t want military contractors like General Electric
buying up mass media. We don’t want Rupert Murdoch owning hundreds of newspapers and
broadcast outlets. We don’t want some rich guy coming into our neighborhood and buying up
all the property and local businesses for himself. We don’t want a few companies like Google
or Apple or Facebook dominating global communications in every form, as seems to be
rapidly developing.
Some aspects of capitalism could be easily reformed, if only the laissez-faire, antigovernment capitalist fundamentalists weren’t depositing gifts into the pockets of legislators.
Regulations could be advanced to control pollution and resource use, to prevent banking
excess, to stop the buying of all politicians and government, and to promote equity.
Theoretically, we could quickly start mitigating inequity problems. We could require that the
wealthy pay taxes at the same rate as the middle class, or at “surplus wealth” rates
(graduated rates that went as high as 90 percent) that rose from the presidencies of Franklin
Roosevelt and Harry Truman through Dwight Eisenhower. We could/should have “excess
profits” taxes on corporations to cover their externalized costs, or their depletion of the publicresources commons. We could ban tax havens and the many subsidized tax rates on
86
financial transactions and inheritance. We could establish maximum and minimum
guaranteed income levels. We could place controls on salary ratios within corporations.
That’s all good.
We could have better guarantees for workers’ rights and better public services for everyone—
health, education, transportation, childcare, elder care. We could prevent corporations from
abandoning local communities and moving to China. And we could establish a new, more
realistic relationship with the natural world, one based on equality, mutual dependence, and
the full acknowledgment of limits.
Most people would appreciate these interventions. They’re all good. I’m sure they would
make us a happier society. Maybe Americans would start voting again and eating less junk
food while permitting the natural world a deserved breather and long-term protections. Only
oligarchs and “free-market fundamentalists” would oppose them. Unfortunately, however, they
are in charge.
Those and a hundred others ideas are all doable by relatively simple acts of Congress and
the President. Many other modern countries— like Norway, Sweden, Denmark, France,
Germany, Italy, Spain, Iceland, and Japan—already enjoy many of those practices within their
own versions of a kind of “hybrid” economics, an active collaboration of capitalist and socialist
visions that most of these countries call “social democracy.” Of course, they have problems,
too—some of them caused, actually, by U.S. deregulation of finance under Clinton and Bush
II— but, according to friends in Europe and members of my own family who live in
Scandinavia, as well as the statistics we cited in the last chapter, these countries are in far
better shape than we are in terms of public satisfaction, economic balance, environmental
awareness, levels of equality, quality of public discourse, freedom from ideological
domination, willingness to adapt, and happiness.
Could Americans living in the world headquarters of laissez-faire capitalism do anything like
that? Obviously, such changes could happen in the United States only if the powers that be
were willing to allow them. They won’t. In the United States, ruled by the most ideologically
rigid form of capitalism in the world, any level of government engagement, intervention, or
partnership in anything but military adventures quickly gets labeled “socialist” or “communist.”
It makes transformation very difficult.
Unless there is an astonishing shift in political realities, or a massive uprising many times
larger than the Occupy movement, viable changes would be incremental and politically
unlikely. With government and media owned and operated by the super-wealthy, we can’t
expect much help from them. They don’t represent us.
So then. What we can do right now is start discussing and creating alternative pathways, so
we know what we agree on and what direction to start walking in. Hopefully each new path
will fill with walkers and lead to others. Critical mass is the goal.
Published with permission from Jerry Mander.
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87
ECONOMY
AlterNet / By Frank Joyce
July 23, 2013
10. How Successful Cooperative
Economic Models Can Work
Wonderfully… Somewhere Else
Capitalism rests on a foundation of myths, the first of which is that
there is no alternative.
Years ago food critic Ruth Reichl declared, “There is no bad
food in Italy.” She was right. Within Italy, the Emilia Romagna
region is thought by many to offer the best food of all.
But that is by no means its only distinction. What I did not
appreciate until a recent trip to Bologna, is that major
components of the entire economy are organized as co-ops.
That includes global market manufacturing businesses, facilities
management, social services, transportation, food and wine
production, banking and other financial services and food sales
from small markets to nationwide supermarkets and
hypermarkets (similar to Meijer).
Capitalism rests on a foundation of myths. One of them is that capitalism somehow “invented”
entrepreneurship. Another is that capitalism provides the only “market” economy. Then there is the
self-proclaimed virtue of capitalism that only capitalism is compatible with “self-reliance” and
individual responsibility. (The reality of course is that most people are utterly dependent on capitalists
for jobs, financing, education, transportation, health care, shelter and just about everything else.)
Capitalism also presents itself as the model of “efficiency,” when in truth it generates enormous waste
of all kinds.
Finally, the biggest whopper of all is that There Is No Alternative. All of this is nonsense. The
economy of the Emilia Romagna region of Italy and its largest city, Bologna, is living proof.
Even though Emilia Romagna has a “leftist” history, co-ops did not arise as an “anti-capitalist”
phenomenon. Many of the largest and most successful co-ops trace their origins back to the
19th century. Understanding that markets—a place where buyers and sellers meet—were in
existence for thousands of years before capitalism privatized ownership of the means of production,
co-ops offer a different way of organizing economic activity.
Production co-ops empower workers to create products and services. The manufacturers of Emilia
Romagna make industrial machines, ceramic tile and many other products. They are multi-billiondollar businesses that compete successfully in the global market. Likewise Manutencoop, from its artfilled and architecturally spectacular headquarters in Bologna, coordinates facilities management
88
(janitorial, security, building maintenance etc.) for schools, hospitals and shopping malls throughout
Italy.
Many co-ops contract with the government to provide various services. While this is similar to
“outsourcing” as we would describe it in the US, the result is very different because the intent is not to
drive down the wages, benefits and working conditions of those doing the work.
Co-ops can also offer innovative solutions to social and government problems. A co-op in Rome
composed entirely of ex-offenders offers waste management services to private sector and
government clients. (I learned in Italy that returning citizens in Springfield, Massachusetts who have
upholstery skills are in the process of setting up a co-op to organize and market their services.)
While comparable in scope and economic impact to for-profit businesses, co-ops are fundamentally
different from them. Their values and economic relationships between managers, workers and
communities are not driven by the obligation to deliver enormous wealth to top managers and distant
shareholders. While many of the larger co-ops have employees in the traditional sense, as well as
members who are the owners of the business, they all share common facilities such as cafeterias.
Managers are strictly limited in how much more they can make than workers.
Of course co-ops face their own challenges in competing within a dominant capitalist global economy.
Challenges of governance, especially of large co-ops, innovation and theoretical development are
actively under discussion. Without exception, however, every co-op member, manager or employee
we met emphasized the importance of the common good. In Italy, co-ops are seen as kind of second
or third economy. They are strongly supported in Italian law in part because they provide a check on
and a balance to the built-in excesses of cutthroat for-profit businesses.
As Detroit citizens struggle to invent a new economy to replace dysfunctional capitalism, co-ops are
worth considering for two reasons. First and foremost as new technology makes
community production of goods, services and food easier, co-ops are a good way to organize those
economic activities. Second, co-ops demonstrate that
There Is An Alternative.
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ACTIVISM
AlteNet / By Kevin Zeese, Margaret Flowers
July 26, 2013
11. After We Stop the Machine,
How Do We Create a New
World?
Countless numbers of us are building the world we want every day.
89
A simplified explanation of the strategy to transform our society
from a greedy plutocracy to a cooperative democracy, from our
destructive path to a sustainable future, is that there are two
simultaneous tracks: protest what we do not like and build what
we want. We call this “Stop the Machine, Create a New
World.”
This weekly report usually focuses on the protest part of the
resistance movement, but this week we will focus more on the
people who are working to create the world we want to see. It
is not that there are no protest actions to report on. There
continues to be a lot going on. Some examples from the last
week among many that you will find at PopularResistance.org, include:
➫ Updates on Edward Snowden including his attempt to leave the Moscow airport, which may have
been blocked by Secretary of State John Kerry. Also, how Snowden is driving the US security state
insane and was recognized as an “American who tells the truth.” Related, we highlighted a
propagandistic attack on Glenn Greenwald on a progressive website.
➫ NSA spying updates including how Obama and Democrats teamed with Republicans to block
efforts to stop NSA dragnet searches of Americans, as well as citywide surveillance in Oakland which
may become a national model. Also a victory in New Jersey where the Supreme Court now requires
warrants to track people using their cell phones.
➫ A successful challenge to TSA searches at airports by a young man who stripped down to his
underwear and wrote the Fourth Amendment on his chest.
➫ Updates on Bradley Manning, who won a peace prize this week, as closing arguments began on
Thursday after an unusual re-opening of the prosecutor’s case. International protests are planned for
the 27th and a protest in DC on the 26th. On Thursday, a full-page ad ran in the New York Times
saying “We are all Bradley Manning.”
➫ Trayvon Martin updates which include nationwide rallies and a “walk for dignity”, a long-term
occupation of Gov. Rick Scott’s office where protesters met with the governor about the Stand Your
Ground law and Cornel West’s response to Barack Obama as well as related protests against police
and urban violence.
➫ The escalation of environmental protests include Earth First!’s call to block supply lines for radical
energy sources from tar sands, hydrofracking and mountaintop removal, and reports on plans to
party along the entire KXL pipeline route, FBI surveillance of enviro-activists in Seattle, and a
hydrofracking victory in Pennsylvania.
➫ Ongoing efforts to close Guantanamo include protests at the first hearing in four years in which the
Obama administration refused to participate; solidarity hunger strikers calling for people to come to
DC on July 30th; and a potential victory with parole-like hearings finally beginning at Guantanamo.
➫ Actions by low-wage workers including domestic workers, Google security guards, Walmart
workers, baseball concession workers and truckers.
➫ Immigration protests including immigrants facing deportation who went back to Mexico then
returned to the US as a protest, and "education, not deportation" rallies.
It was a busy week. The under-reported revolts against the corrupt economy and dysfunctional
government continue and grow.
90
Building the World We Want
An important component of resistance is building systems based upon our desired values and
principles to replace the current dysfunctional systems. This is a powerful and positive way for
communities to work together to solve local problems and meet their basic needs. People around the
world are engaged in this constructive resistance. We will share some of the most recent efforts to
build the world we want.
We are inspired by the human potential to create, even in dire economic circumstances, illustrated by
this story of children from a slum dwelling in Paraguay. Out of the trash in the landfill their community
is built upon, they created the “Landfill Harmonic Orchestra.” This amazing video tells their story.
There is no question that part of building the world we want to see includes music, arts and culture.
Of course, at the root of many problems in the United States is the economy. We are experiencing in
the US what our government has forced onto poorer nations for decades, the accelerated selling off
of our resources and privatization of government services. This, combined with de-funding of public
institutions, is creating greater wealth for a few while the rest of us struggle to make ends meet.
The looting class believes that there is no threat of democracy breaking out when people are poor
and focused on meeting their basic needs. But economic democracy is quietly expanding throughout
the United States. We are two of the organizers of the Economic Democracy Conference which is
part of the Democracy Convention being held in Madison, WI beginning this August 7.
Two years ago when we organized a similar conference, economic democracy was beginning to take
root in the U.S. Since then, the movement has grown rapidly, under the radar of the corporate media.
One-third of the US public is now a member of some type of cooperative, including credit unions.
This year the Economic Democracy Conference will include 15 sessions. Some will focus on big
picture topics such as what the new economy looks like and discussions of money and debt, while
others will focus on the building blocks of the new economy, cooperatives, complementary
currencies, public banks, affordable housing, local investment networks and other ways to finance
local businesses and transitioning to municipal renewable energy. (You can register here.)
This week, there were a number of economic democracy projects in the news. In Seattle a group,
Community Sourced Capital, formed to help people invest in their local community. We know the
value of shopping locally, now people are figuring out ways to invest locally to build their communities
and avoid Wall Street.
Also, some members of the Occupy movement are launching the Occupy Money Cooperative. Their
first product will be the Occupy Money Card, a pre-paid debit card without the costs of a regular bank
account which they describe as a “bank on a card.” Forbes took notice of the Money Cooperative,
finding it ironic that Occupy would set up a bank. We see it as just the opposite. More alternatives to
Wall Street banks are needed and this is one of many models being developed.
Another alternative was announced in England. The Archbishop of Canterbury is telling the leading
payday loan service, which charges 1% a day for loans, that the Church of England is going to put
them out of business by starting its own credit union and working with non-profit loan agencies to
provide less expensive loan services.
In Minneapolis, people have solved one of the big problems caused by the Wall Street banks: the
housing crisis. They created an “eviction free zone,” as the world they want to see does not include
throwing families onto the street. Their tactics include pressuring banks, blocking evictions (as with
this example), occupying foreclosed homes and refurbishing homes. This kind of mutual support and
local solidarity also builds community. The city of Richmond, CA became the first to use its power of
91
eminent domain to seize underwater homes facing foreclosure and return them to the homeowners
with reduced mortgage payments.
And, an innovative approach to transit that began in Rochester, NY has now moved to Detroit. The
approach seeks to expand public transit without increasing fares or taxes by improving the "transit
experience," rewarding drivers for performance and partnering with schools, hospitals and housing
developments to supplement funding.
Strike Debt Bay Area is working to reverse the privatization of public services – in this case, the US
Postal Service. Their approach is education, including a teach-in on privatization tactics used by the
1%, the dangers of privatization to individuals and public institutions, and the threats to civil liberties
posed by the privatization of the United States Postal Service. Others are focused on ways the Postal
Service can expand and provide new services.
A lot of excellent work is being done to preserve water and healthy food. People are taking effective
steps to stop corporations like Monsanto. This November there will be a vote in Washington State
requiring labeling of GMO foods. If it succeeds, and it is leading right now, it could spur a national
change that will allow people to finally know whether a product contains GMOs or not. On a related
front, people are fighting for their right to buy directly from farmers, despite regulators’ efforts to curtail
the practice. And many individuals and municipalities are using a variety of techniques to preserve
water and use it more efficiently.
Progress is being made in the transition to a green energy economy. There are now 46 countries that
are getting 60 percent of their electricity from renewable, clean energy sources. Research shows the
US could achieve a renewable energy economy by 2050 at the latest. Last year, despite the hype
around hydrofracking for methane gas, the fastest growing source of new energy was wind, making
up 42% of new electricity. A study this week pointed to the benefits of targeting renewable energy in
areas dependent on coal or where it could produce the most environmental and health benefits.
As more Americans are joining efforts to stop the Trans-Pacific Partnership and its Atlantic trade
cousin through groups like Flush The TPP, a new creative approach to trade came up this week that
others may want to emulate. The Fair Deal Coalition concerned with our digital future, has launched
an open source “negotiation” of trade designed to give people what they want. They seek to openly
involve people and businesses in developing the future, rather than the secret approach of the
Obama administration.
The media is a major battleground for our future. The corporate media which dominates the
traditional mass media, is losing viewers, readers and money while an independent and citizen’s
media is growing. One reason we launched Popular Reisistance was to report on something the
corporate media avoids – the movement for transformation of the country through resistance. We
worked with AlterNet to bring this weekly news summary to a wider audience. And, each Wednesday,
we go in-depth on issues in Truthout that we first discuss on our radio/video show Clearing the FOG.
Now, we are teaming up with video maker Dennis Trainor, Jr. to assist his production of a weekly half
hour television program showing the actions of the movement. (You can help by assisting in crowdfunding this project.)
This is just a brief review of what is occurring to build the new world we want. Much more is
happening. In How to Design the World for Happiness, many more examples are described. Jay
Walljasper writes in the introduction: “We recognized it was up to us to make the neighborhood safer,
cleaner, more inclusive, interesting, and enjoyable.… Experiencing firsthand the collaborative
capacity of everyday people to shape their own community has influenced me deeply as a writer,
speaker, and consultant…. The articles gathered here explore the wide horizons of what’s possible in
communities everywhere.”
92
While there is a lot we can do as individuals, there is even more we can do when we build community
and when we build on the experiences of others. The world we want to see is literally being built
every day by uncounted numbers of us. There is no need to wait, the future is ours if we make it.
This article is produced by PopularResistance.org in conjunction with AlterNet. It is based
on PopularResistance.org’s weekly newsletter reviewing the activities of the resistance movement.
Kevin Zeese and Margaret Flowers are cohosts of Clearing the FOG on We Act Radio 1480 AM
Washington, DC. They also codirect Its Our Economy and are organizers of the
PopularResistancew.org.
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27.07.2013
Amélie MOUGEY
12. Jardins, débrouille, partage :
comment Detroit redémarre
Interview - Dans cette ville américaine désormais en faillite, un
nouveau modèle de société émerge à petits pas, comme l'explique
la doctorante en géographie Flaminia Paddeu. Ses piliers :
autonomie, écologie, anti-consumérisme et solidarité.
Faillite. Le mot a été lâché la semaine dernière. Sous le
poids de ses 18,5 milliards de dollars de dette (14 milliards
d’euros), l’ancien bastion de la construction automobile
américaine a touché le fond.
A Detroit, les retraités craignent désormais pour leurs
pensions, les salariés municipaux pour leurs emplois.
Mais depuis des décennies déjà, les 700 000 personnes
qui n’ont pas quitté la ville apprennent à composer avec le
déclin.
Abandonnées par les entreprises puis délaissées par la municipalité, elles font de la débrouille un
nouveau mode de vie. Flaminia Paddeu, doctorante en géographie et enseignante à l’université Paris
IV, prépare une thèse sur l’agriculture urbaine en contexte de crise à Detroit. Dans le cadre de ses
recherches elle a mené, en mai 2012, une trentaine d’entretiens auprès de membres et de leaders
d’associations de Detroit. Elle raconte l’ébullition qui règne dans les friches de la ville fantôme et, en
nuançant les images de désolation, donne quelques raisons d’espérer.
93
Terra eco : Alors que Detroit vient de se déclarer en faillite, vous parler de "destruction
créatrice", qu’entendez-vous par là ?
Flaminia Paddeu : Detroit est souvent présentée comme "la tête d’affiche de la
décadence urbaine" ou comparée à la Nouvelle-Orléans après Katrina, sans
l’ouragan. La ville a en effet perdu la moitié de ses habitants en cinquante ans, près
d’un quart des logements sont vides, les services sociaux disparaissent, le déclin est
évident. Pourtant, ce sombre portrait ne dit pas tout. Depuis la crise de 2008, et
même avant, des pratiques économiques alternatives émergent. Une nébuleuse
d’associations communautaires reprend la ville en main. La gestion des quelque 78
000 immeubles abandonnés en est une bonne illustration.
Faute d’action forte de la municipalité, ces bâtiments prêts à s’effondrer deviennent le repère de
trafiquants de drogue et ont un effet délétère sur les prix, déjà très bas, de l’immobilier. Pour enrayer
le phénomène, des associations se sont spécialisé dans leur déconstruction. Elles réutilisent ensuite
ces maisons en pièces détachées pour consolider et rénover un parc immobilier occupé de très
mauvaise qualité. A Detroit, on croise aussi de plus en plus d’espaces dédiés au recyclage, à la
réparation ou au partage des nouvelles technologies.
Sans compter l’agriculture urbaine...
C’est une des manifestations les plus visibles de ce mouvement multiforme. Des usines désaffectées
se transforment en serres ou en fermes urbaines. Celles-ci approvisionnent en circuit court les
habitants, les banques alimentaires et les soupes populaires, qui elles aussi se multiplient.
Mais ces fermes, qui fonctionnent comme des petites entreprises, ne produisent pas que des
légumes. Elles accueillent aussi des ateliers de réparation de vélos, des centres sociaux-éducatifs
pour les enfants. Autant de mesures qui visent à pallier les insuffisances de la municipalité : un
réseau de transport médiocre et un système éducatif délaissé. Et puis il y a surtout les 1 600 jardins
communautaires cultivés sur des terrains en friche. Ce nombre est considérable pour une ville de
700 000 habitants. A titre de comparaison, New York, qui abrite 8 millions de personnes, en compte
moins de 500.
Le protection de l’environnement est-elle au cœur de cette démarche ?
Aujourd’hui, c’est le cas. L’écologie est devenue l’un des piliers de cette action multiforme au même
titre que les enjeux sociaux ou éducatifs. Mais ce n’est ni une tendance, ni la motivation principale.
Les gens se sont mis à cultiver par nécessité. Quand les entreprises et les habitants ont quitté
Detroit, les supermarchés ont suivi le mouvement. Des quartiers entiers se sont alors transformés
en déserts alimentaires.
Cela signifie que si leurs résidents veulent acheter des fruits ou des légumes, ils doivent parcourir
plusieurs kilomètres. Or, comme à Detroit se déplacer est cher ou compliqué, ils se rabattent sur de
la nourriture malsaine (junk food) à proximité. Ce qui entraîne les conséquences que l’on connaît :
diabète, obésité… Dans ces circonstances, la notion de "droit à la sécurité alimentaire" est devenue
centrale et, afin d’atteindre cet objectif, les habitants se sont réappropriés la production alimentaire.
A Detroit, le terreau est-il particulièrement fertile pour de telles initiatives ?
Certainement. Les jardins communautaires existent depuis les années 1990. A l’époque, ils étaient
principalement cultivés par des retraités. Aujourd’hui, l’ampleur du mouvement est surtout lié à
l’ampleur de la vacance. Les friches qui sont apparues à la fin de l’âge d’or de la ville, dans les
années 1960, se sont multipliées. Cette vacance offre une marge de manœuvre considérable aux
citoyens, encore renforcée par le lâcher prise de la municipalité. L’inefficacité administrative prive
certains projets de soutien mais, en contrepartie, leur laisse de grands espaces de liberté.
Longtemps, les jardins communautaires sont restés en marge de la légalité mais en décembre
dernier, une loi a été adoptée pour les autoriser. C’est un symbole fort.
94
Peut-on parler de l’émergence d’un nouveau système ?
Pour les habitants de Detroit comme pour de nombreux américains, l’existence a longtemps été
nourrie par un rêve de consommation. Ce rêve s’est effondré. Jusqu’à la crise de 2008, ceux qui ont
connu la période faste où les "Big three" – Ford, Chrysler et General Motors – faisaient vivre la ville
espéraient encore revenir à la situation antérieure. Mais quand la crise des subprimes les a frappés,
l’illusion s’est effondrée. Ceux qui sont restés ont inventé de nouveaux mode de vie qui prennent le
contre-pied des systèmes capitalistes et consuméristes. Le troc se développe, la valeur d’usage
remplace l’échange monétaire. Ainsi, dans un jardin de l’East Side, un des quartiers les plus
sinistrés, des habitants troquent le miel qu’ils produisent contre des services de bricolage ou
d’informatique.
Une forme d’altermondialisme ?
Dans les associations, les leaders ne sont pas tous politisés, les idées pas toujours théorisées, mais
il y a souvent une proximité avec les courants altermondialistes, notamment avec l’émergence de
nouvelles solidarités. Pour autant il n’y a pas de consensus. Les décisions unilatérales de la
municipalité passent mal. C’est le cas du "downsizing" : pour faire des économies sur le ramassage
d’ordures et l’éclairage public, certains élus de Detroit voudraient vider complétement les quartiers
déjà délaissés. Mais lors des réunions publiques, certains habitants s’emportent contre cette mesure
et réclament du "bigsizing", c’est-à-dire la reprise des gros chantiers mis en place ces dernières
années dans l’espoir de relancer l’économie et la croissance.
Mais Detroit, ville en décroissance malgré elle, peut-elle finir par en tirer parti ?
Pour moi, ce qui se passe à Detroit pose les bases d’un mouvement durable. La mise en faillite de la
ville signifie qu’à terme elle pourra repartir avec une assise financière saine. D’ici une dizaine
d’années, ce qui n’est aujourd’hui qu’une nébuleuse d’initiatives pourrait devenir pérenne. Et dans
trente à cinquante ans, on peut envisager que Detroit se pose comme une ville alternative.
Aujourd’hui, même si la tendance démographique est loin de s’inverser, des gens commencent à s’y
installer. Des jeunes artistes et des créatifs attirés par le renouveau. On peut acheter un logement à
Detroit pour quelques milliers de dollars et commencer une nouvelle vie. Mais on ne sait pas à quoi
ressemblera la ville dans six mois.
Detroit est-elle une ville test ?
Detroit ne doit devenir ni une œuvre d’art ni un laboratoire. Ses habitants proposent un changement
de paradigme, mais il est trop tôt pour l’ériger en modèle. Et puis il faut relativiser ce mouvement
alternatif. S’il bénéficie à énormément de gens, tout le monde n’y participe pas. Quant aux
associations, de loin elles donnent l’impression de porter un message homogène, mais ce n’est pas
le cas. La principale zone d’ombre reste cependant la question des financements. Toutes les
associations vivent aux crochets de fondations comme celles de Kellogg, Ford ou General Motors,
les patrons d’hier. Toute la question est de savoir dans quelle mesure ces généreux donateurs
influencent les actions citoyennes. On dit qu’à Detroit les citoyens reprennent le pouvoir, c’est faux.
Si l’année prochaine les associations ne sont plus subventionnées, tout s’arrête. D’un point de vue
social et symbolique, ils gagnent énormément, mais sur le plan économique, comme politique, le
pouvoir leur échappe toujours.
Pour aller plus loin
Le site du prochain webdocumentaire "Detroit, je t’aime"
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95
I M M I G R AT I O N
ThinkProgress / By Esther Yu-Hsi Lee
July 24, 2013
13. How Immigration Could
Potentially Save Bankrupt Detroit
Yet another example of how immigrants can help foster the U.S.
economy.
Detroit, a city facing financial ruin, is becoming the destination
choice for immigrants looking to settle in Michigan.
Immigrants now make up five percent of the city’s population,
and are revitalizing the quality of life at a time that industries are
vanishing. Detroit has one of the most diverse immigrant pools,
with a slight majority of foreign-born Indians making up the
fastest growing immigrant group, according to a major Global
Detroit study released last week.
Detroit could certainly benefit from more immigrants moving in.
Steve Tobocman, director of Global Detroit said, “Immigrants can create jobs for all of us and help
everyone’s economic future.” A Fiscal Policy Institute study found that immigrants are twice as
likely to start small businesses than U.S.-born individuals in Detroit.
There are other major economic and public safety incentives for encouraging immigrants to move into
Detroit. For one thing, new immigrants buying the estimated 90,000 empty houses could put those
properties back on the tax roll. They would also discourage gangs and squatters. Immigrants
revitalized other cities this way. In Brooklyn, NY, there was a 90 percent drop in crime when
immigrants opened up businesses and actively made their neighborhoods safer.
Ethnic neighborhoods like Mexicantown offer proof that immigration helps population stabilize in
Detroit. Markets and restaurants have sprung up alongside cafes. Although the majority of the Latino
population in Detroit is low-income, it is the influx of new immigrants that reassures Tobocman. He
said, “I do think it may be the single great urban revitalization strategy in modern-day America, and
it’s one that doesn’t cost tax dollars.”
And at nearly half of its population between the ages of 25 to 44 years old, Detroit’s foreign-born
Indian population could continue to contribute to the economy during their prime working years.
Overall, Asian immigrants in the Greater Detroit area do well economically with over thirty percent
earning over $75,000. Meanwhile, the average household income for Detroit is $26,000.
Similarly, St. Louis launched the Mosaic Project in June to research ways that the city can attract
and retain immigrants. If Detroit does not take cues about immigrants from Mexicantown, it may do
well to look to St. Louis, which launched the St. Louis Mosaic Project in June to research ways that
the city can attract and retain immigrants. Over the coming months, St. Louis seeks to create “virtual
96
ethnic enclaves” that could make up for a physical community since immigrants are more likely to
move into areas that already have immigrants.
Other cities find the economic value of welcoming immigrants too.
Immigrants coming to Philadelphia is making up for its declining US-born population. Cleveland city
officials sent recruiters abroad and launched a social media campaign specifically geared at
encouraging Latinoand Asian populations to move to its city. Such initiatives to retain immigrants
could help such metropolitan cities garner the capital investment necessary to create high-tech
industries, which are overwhelmingly founded by immigrants.
Ester Yu-Hsi Lee is an Immigration Reporter/Blogger for ThinkProgress. She received her B.A. in
Psychology and Middle East Studies and a M.A. in Psychology from New York University. A Deferred
Action for Childhood Arrivals (DACA) beneficiary, Esther is passionate about immigration issues from
all sides of the debate. She is originally from Los Angeles, CA.
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ECONOMY
Robert Reich's Blog / By Robert Reich
August 23, 2013
14. We'd All Be Much Wealthier If
We Acted Like a Society—
Instead We Prop Up the Private
Wealth of a Small Number of
Elites
If we continue the present path, high-quality public goods will be
available to fewer and fewer.
Congress is in recess, but you'd hardly know it. This has been the most do-nothing, gridlocked
Congress in decades. But the recess at least offers a pause in the ongoing partisan fighting that's
sure to resume in a few weeks.
It also offers an opportunity to step back and ask ourselves what's really at stake.
97
Photo Credit: shutterstock
A society -- any society --- is defined as a set of mutual benefits and
duties embodied most visibly in public institutions: public schools, public
libraries, public transportation, public hospitals, public parks, public
museums, public recreation, public universities, and so on.
Public institutions are supported by all taxpayers, and are available to all.
If the tax system is progressive, those who are better off (and who,
presumably, have benefitted from many of these same public institutions) help pay for everyone else.
"Privatize" means "Pay for it yourself." The practical consequence of this in an economy whose
wealth and income are now more concentrated than at any time in the past 90 years is to make highquality public goods available to fewer and fewer.
In fact, much of what's called "public" is increasingly a private good paid for by users -- ever-higher
tolls on public highways and public bridges, higher tuitions at so-called public universities, higher
admission fees at public parks and public museums.
Much of the rest of what's considered "public" has become so shoddy that those who can afford to do
so find private alternatives. As public schools deteriorate, the upper-middle class and wealthy send
their kids to private ones. As public pools and playgrounds decay, the better-off buy memberships in
private tennis and swimming clubs. As public hospitals decline, the well-off pay premium rates for
private care.
Gated communities and office parks now come with their own manicured lawns and walkways,
security guards and backup power systems.
Why the decline of public institutions? The financial squeeze on government at all levels since 2008
explains only part of it.
The slide really started more than three decades ago with so-called "tax revolts" by a middle class
whose earnings had stopped advancing even though the economy continued to grow. Most families
still wanted good public services and institutions but could no longer afford the tab.
Since the late 1970s, almost all the gains from growth have gone to the top. But as the upper-middle
class and the rich began shifting to private institutions, they withdrew political support for public ones.
In consequence, their marginal tax rates dropped -- setting off a vicious cycle of diminishing revenues
and deteriorating quality, spurring more flight from public institutions.
Tax revenues from corporations also dropped as big companies went global -- keeping their profits
overseas and their tax bills to a minimum.
But that's not the whole story. America no longer values public goods as we did decades ago.
The great expansion of public institutions in America began in the early years of 20th century, when
progressive reformers championed the idea that we all benefit from public goods. Excellent schools,
roads, parks, playgrounds and transit systems would knit the new industrial society together, create
better citizens and generate widespread prosperity.
Education, for example, was less a personal investment than a public good -- improving the entire
community and ultimately the nation.
98
In subsequent decades -- through the Great Depression, World War II and the Cold War -- this logic
was expanded upon. Strong public institutions were seen as bulwarks against, in turn, mass poverty,
fascism and then Soviet communism.
The public good was palpable: We were very much a society bound together by mutual needs and
common threats. It was no coincidence that the greatest extensions of higher education after World
War II were the GI Bill and the National Defense Education Act, or that the largest public works
project in history was called the National Interstate and Defense Highways Act.
But in a post-Cold War America distended by global capital, distorted by concentrated income and
wealth, undermined by unlimited campaign donations, and rocked by a wave of new immigrants
easily cast by demagogues as "them," the notion of the public good has faded.
Not even Democrats still use the phrase "the public good." Public goods are now, at best, "public
investments." Public institutions have morphed into "public-private partnerships" or, for Republicans,
simply "vouchers."
Outside of defense, domestic discretionary spending is down sharply as a percent of the economy.
Add in declines in state and local spending, and total public spending on education, infrastructure
and basic research has dropped dramatically over the past five years as a portion of GDP.
America has, though, created a whopping entitlement for the biggest Wall Street banks and their top
executives -- who, unlike most of the rest of us, are no longer allowed to fail. They can also borrow
from the Fed at almost no cost, then lend out the money at 3 percent to 6 percent.
All told, Wall Street's entitlement is the biggest offered by the federal government, even though it
doesn't show up in the budget. And it's not even a public good. It's just private gain.
We're losing public goods available to all, supported by the tax payments of all and especially the
better-off. In its place we have private goods available to the very rich, supported by the rest of us.
Robert Reich is the nation's 22nd Secretary of Labor and a professor at the University of California at
Berkeley.
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25 août 2013 à 19:06
Par CHRISTOPHE ALIX
ÉCONOMIE
15. La croissance, leurre du bienêtre
Et si l’absence de retour durable à la croissance était une bonne nouvelle ? Une occasion unique de
changer radicalement de modèle ? Une fois refermé le percutant essai de rentrée de Dominique
Méda, n’importe quel "productiviste" doté d’un minimum d’honnêteté intellectuelle aura du mal à
99
soutenir que le retour au business as usual est une perspective d’avenir. Sauf à vouloir préparer le
pire aux générations futures… Le plaidoyer de Dominique Méda montre l’urgence qu’il y a à sortir de
cette "mystique de la croissance". Une mystique certes dépassée et de plus en plus illusoire mais qui
reste ancrée dans nos consciences marquées par des siècles de "toujours plus".
Agrégée de philosophie, ancienne élève de l’ENA, professeure de sociologie à Paris-Dauphine où
elle tient la chaire Reconversion écologique, travail, emploi et politiques sociales, l’auteure démontre
à quel point la reconversion écologique constitue la seule alternative raisonnable qui s’offre à
l’humanité. Enfin si l’on veut vraiment maintenir des conditions de vie humaines sur terre et permettre
à tous d’accéder à un emploi dans un rapport renouvelé au travail… Pointant la contradiction entre
l’impératif court-termiste du retour de la croissance et le fait que la croissance ne fait qu’accroître la
facture climatique et environnementale, Dominique Meda appelle à reconstruire une "cause
commune" planétaire.
La thèse avait commencé à émerger avant 2008 mais l’approfondissement de la crise l’a rendue
inaudible : la croissance est redevenue un mythe salvateur. Tout est donc à refaire pour sortir de
notre religion du PIB, cette "occultation suprême" faisant fi des dégâts de la croissance.
L’ouvrage permet aussi de mieux comprendre d’où vient notre addiction au "toujours plus produire et
consommer" : on a longtemps confondu croissance avec bien-être et progrès.
Plus grave, la mystique de la croissance focalisée sur la maximisation du profit est devenue une
drogue dure de nos économies. La nouvelle religion du libéralisme. Cette vaste entreprise de
"déréalisation" qui prend ses sources dans l’essor du christianisme, avance Dominique Meda, a
introduit une rupture par rapport à la sagesse grecque et son sens de la mesure. Déconstruction
d’une mystique de la croissance qui a connu son apogée au XXe siècle et a été partagée par tous les
courants issus des Lumières, d’Adam Smith à Marx, cet appel à penser autrement passe en
définitive par la fin de "l’économisme" triomphant. Une lecture aussi salutaire que stimulante.
"La Mystique de la croissance" de Dominique Meda. Flammarion, 250 pp., 17 euros. Sortie
le 4 septembre.
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ECONOMY
AlterNet / By Frank Joyce (activist and author. He can heard on
Dave Marsh's radio program, "Live from the Land of Hopes and
Dreams," SiriusXM 127, 1-4pm EST.)
September 2, 2013
16. The Real Story of Detroit's
Economy -- Good Things Are
Really Happening in Motown
100
The media is in a frenzy about Detroit's finances -- but there's a lot
more going on than just bad news.
Photo Credit: © Vladimir Mucibabic/ Shutterstock.com
As a life-long Detroiter who has lived both in the city and the
suburbs, I’ve been fascinated by the media frenzy over Detroit’s
bankruptcy. Like most big news topics these days, Detroit has
become a screen onto which people project whatever political
viewpoint they have.
First off, it’s worth considering why the bankruptcy is getting so
much attention. Is there really that much there, there? After
all, as with any bankruptcy, isn’t it just an argument among
some people about some money (or artworks, real estate and
other assets).
In the private sector companies file for bankruptcy every day without making much, if any, news.
And why not? Bankruptcy is a tool used by capital to manage failure.
Capitalist orthodoxy is that some degree of failure is both inevitable and desirable (it’s called creative
destruction).
It’s no surprise therefore that capitalism creates procedures to manage it.
At the height of the depression Congress added a new tool, Chapter 9, to the Bankruptcy Code to
address financial failure by local governmental bodies.
While it’s true that “failed states,” or in this case a failed city government, are different in various
ways from a corporation, the basic issues of who owes who how much are the same.
Admittedly municipal bankruptcy is not as common as private sector bankruptcy. (Not yet anyway.)
So, up to a point, the “look, look, a man is biting a dog” scenario is justifiably in play. Further,
because cities are units of elected governments, there is understandably a different sense of the
stakes.
In that context, what the MSM is mostly missing is the extent to which bankruptcy is but the latest
incremental step in a long running destruction of democracy for African-Americans. As of this writing
more than 55% of Michigan’s African American population lives in communities under some form of
Emergency Management. That means state government has already taken away the authority of
locally elected officials. Bankruptcy just moves that disenfranchisement to the federal level.
That does make news though because unlike state “emergency manager” laws, Chapter 9 federal
bankruptcy puts the banks, bondholders, bond insurers and hedge funds who lent the city money at
risk. That is something Michigan Governor Rick Snyder had worked very hard to avoid. Back in
June of 2011, he made a pledge to his Wall Street friends. "Detroit's not going into bankruptcy,"
Snyder told reporters, as he beamed with encouragement from his meetings Monday with three top
bond rating agencies in New York.
Predictably, what also excites and dominates MSM coverage is the blame game. The liberals did it
or the blacks brought this on themselves, scream the “conservatives.” It’s the racists and the right
wing’s fault, say the “liberals.”
101
The noise can be deafening. What follows is I hope a quieter version of what the “bankruptcy” of
Detroit means.
The government is bankrupt. Detroit is not.
There are four economies in play in Detroit. One is the old economy. That means preindustrial and
industrial. It’s old money. A lot of it is auto related.
Especially these days, capital is highly mobile and it has virtually no loyalty to any geographic entity.
If it’s not bound to a nation, it is surely even less loyal to a city.
Thus the old money led the disinvestment that removed so many of the economic assets that once
gave Detroit a version of what passed for prosperity in the mid-twentieth century. Long before
Detroit-based capital was relocating to Mexico and China, it was moving from Detroit to its suburbs.
My name for the second Detroit economy is the pizza economy.
Others might call it the
entertainment economy. As industry was moving out, the pizza economy was moving in, personified
by Mike Illitch, patriarch of the family that founded the Little Caesar’s Pizza chain. Illitch bought the
Detroit Tigers, the Detroit Red Wings and a premier downtown concert hall, the Fox theatre. Among
other things. Most of his properties have received some sort of city, state or federal subsidy. Even
now, bankruptcy notwithstanding, he is scheduled to receive $650 million in subsidies from Detroit
taxpayers for a new hockey arena.
Three gambling casinos also joined the Detroit entertainment scene. The core idea was that even if
you couldn’t persuade white people to live in Detroit you could build an economy around getting them
to visit.
Sensing something was happening downtown, FIRE (finance, insurance, real estate) gazillionare
Dan Gilbert (Quicken Loans among other assets) more recently jumped into the fray and now owns
19 downtown Detroit properties and is probably buying another one right this minute.
Then comes what we might call the SLOWS BarBQ economy—economy number three. SLOW’s
proprietor, Phil Cooley, personifies the urban pioneers who saw opportunity in the ruins of Detroit.
So did Jackie Victor and Anne Perrault who founded the socially responsible Avalon Bakery way back
in 1997.
Cooley has now added a Detroit business incubator to his restaurant and real estate interests.
Avalon recently acquired a huge abandoned factory in the city to service their growing business.
There is big buzz about Shinola (manufacturing high end watches and bicycles) in mid-town. Within
the last few months Whole Foods and the Meijer superstore chain opened stores in Detroit proper
too.
And then there is economy number four—everything else. I’ll have more to say about #4 later. For
now I’ll say this. Everyone has some sort of template in his or her mind about how a city is supposed
to operate. Detroit hasn’t fit that template for at least 40 years. But as the disinvestment in Detroit
stripped its conventional assets—good public schools, effective law enforcement, most of the good
union jobs, taxes derived from healthy middle class home values and so on, what was left was a
different kind of economy. Economy #4 is driven by the assumption that help is decidedly not on the
way.
Hundreds of thousands of people, mostly African-American, still live in Detroit. They do get by. They
do constitute an economy. Some have a connection to economies one through three. Many do not.
Despite the resourcefulness they repeatedly show, economies 1-3 generally consider them a
problem, not an asset.
102
So now, back to the bankruptcy. What has astounded me again and again in recent years is that
every single one of Detroit’s four economies is investing. A lot. Capital of all kinds is pouring into
Detroit. A recent issue of Crain’s Detroit Business reports on 24 new businesses that have opened in
midtown Detroit in the last year. Scores more have started up in downtown and other neighborhoods
too. Foundations, (the “trickle down” creations of economy number one) have spent at least 2 billion
dollars in Detroit in recent years. Dan Gilbert keeps closing offices in the suburbs and bringing those
jobs to downtown Detroit. In some parts of the city rents are rapidly rising.
If Detroit is so bankrupt and dysfunctional, how can that be?
Government? Apparently, we don’t need no stinkin’ government. Not economy 1. Or 2. Or 3. Or 4.
That’s the lesson to be learned from watching what people do as opposed to the hand-wringing
things some people say. Want to see a close up of the shared dream of Karl Marx and Grover
Norquist? Come to Detroit where the “state” has truly withered away, or been drowned in the
bathtub. Take your pick.
Well some of government as we know it anyway—the part where Detroiters had some say in their
own destiny. The reality is that Detroit has been “governed” for some time by a dizzying array of
state “emergency managers” and other state agency takeovers; private/public partnerships; private
services for security, waste management, worker training and many other things formerly done by
elected government and regional authorities of various kinds, not to mention many foundation
invented organizations. (Detroit Free Press reporter John Gallagher does a good job of describing
some of these dynamics in two books, Reimagining Detroit and Revolution Detroit. He also profiles
many of the authentic grass roots initiatives underway in the city.)
Illustrating the theory that the exception proves the rule, the sound of wailing recently heard about
the possible sale of artworks from the Detroit Institute of Art (DIA) is an example of one Detroit asset
suburbanites care about that they did not get around to protecting or relocating.
Does all this rearranging of the chairs mean that Detroit is now the promised land? Of course not—it
is anything but. For most residents, life is difficult at best. Exhibit A would be the impact of fourteen
years of control of Detroit Public Schools by the state government in Lansing. The results have been
disastrous, despite the best efforts of Detroit’s teachers who give new meaning to the term public
servants.
The physical devastation of the city is breathtaking. Much of what you have read from self-proclaimed
Detroit haters and defenders is accurate. The debt accumulated with the aggressive help of Wall
Street over the decades is staggering. Repeated lay-offs of city workers have severely curtailed even
basic services.
To be sure, corruption and incompetence from elected officials has played a role. It has made
already bad situations even worse than they needed to be. It has diverted needed resources to
addressing the corruption instead of dealing with other problems. And it has been like catnip to
whites who like to argue that it proves Detroit can’t govern itself.
Imprisoned former Mayor Kwame Kilpatrick provides the best and most well known target of all. But
what most whites don’t know or won’t admit is that he was well on his way to being defeated for
reelection until a cadre of white businessmen with major interests in the city came up with hundreds
of thousands of dollars in 11th hour campaign funds.
None of Detroit’s problems showed up suddenly. Seen from a long term perspective, the bankruptcy
filing comes into clearer focus. As with Ronald Reagan’s firing of unionized air traffic controllers
(PATCO) or the Supreme Court’s validation of big money control of politics in Citizen’s United,
103
Detroit’s bankruptcy is the effect of democracy’s power already lost—not the cause of it. It is but one
more small step in a decades-long process.
And yes, race does have everything to do with it. There are three counties that make up the political
economy of Southeast Michigan. Wayne County encompasses Detroit but also includes large
suburbs such as Dearborn, Livonia (the most segregated city of more than 200,000 residents in the
entire country) and most of the affluent Grosse Pointes. Oakland County immediately north of Detroit
is the 4th most affluent county of its size in the United States.
Nearby Macomb County is
predominately working class and the “birthplace” of “Reagan Democrats”.
Much of the Detroit punditry one reads or hears conveniently ignores race altogether, concentrating
instead on the decline of the domestic auto industry or macro economic trends. Usually when race is
included on a list of “causes for Detroit’s decline,” it is described with weasel words such as “racial
tensions” or “the racial divide.” Nonsense. What it was and what it remains, is white racism pure
and simple.
Bloviators love to talk about the “unsustainable legacy” costs of pensions for city workers.
never talk about the “legacy” costs of racism.
They
By 1980, African Americans out numbered whites within the city limits of Detroit. Yes, capital started
leaving Detroit in the 1940’s. But the population disinvestment is just as important. Make no mistake
about it. The extreme segregation that has long characterized Southeast Michigan was anything but
accidental.
For decades, it was the policy of the Federal Housing Administration to deny loans to African
Americans trying to buy houses in the suburbs. To this day, if you buy a suburban house that hasn’t
changed hands in a long time, the deed may well contain a “restrictive covenant” that explicitly
prohibits the sale of the house to Negroes.
That’s not all. Twenty-three out of twenty-three attempts to create a tri-county transportation authority
to improve region-wide public transit went down to defeat in the white controlled state legislature. So,
not only was it impossible for African Americans to buy homes near where the jobs were moving, it
was difficult to get to suburban jobs that came along with suburban growth.
And just to add insult to injury, the financial institutions that wouldn’t lend money to African
Americans to move out of the city wouldn’t lend it for home improvement in the city either. But they
would charge more, far more, for home and car insurance. For those too young to remember, that
practice was called redlining. It’s still prevalent today.
One dramatic example of the cost of racism born by Detroit is this: Detroit has an income tax on
those who work within the city limits. The two-tier tax is lower for those who work in the city but live in
the suburbs. In enacting the tax, the state legislature required employers based in the city to collect
the tax via payroll deduction as they do with federal and other taxes. Suburban based employers are
not required by the law to collect the tax. Most of them don’t. The revenue lost to Detroit per year is
estimated to be as much as $142 million.
Zooming out our historical lens even further, we see the unbroken pattern of white supremacy even
more clearly. The counterrevolution to the civil war was the Jim Crow system. The counterrevolution
to the end of Jim Crow is mass incarceration and other components of the institutionalized racism
that perpetuate and in some ways intensify white privilege today.
Detroit’s history as the national leader in residential segregation and all that flows from it definitely
underpins today’s Detroit crisis and that of Flint, Pontiac, Benton Harbor and Muskegon as well.
104
While observers sometimes notice that a majority of predominately African American cities in
Michigan are under some form of emergency management. The question they don’t ask is, why are
there predominately African American cities in the first place?
The beauty of this “willful ignorance” for many whites is that as the quality of life declined in Detroit,
the decline itself became the moral justification for whites for the inequality itself. It’s an old story.
Slave society did the very same thing. Slaves were routinely portrayed as lazy and shiftless. To put
the meme in contemporary terms, the slaves were demonized as the takers and the slave owners
were the makers.
If you want to see how this dynamic plays out today, just read the abusive and sickening comments
following any news story local, or national, about Detroit’s troubles. For that matter just read the
Detroit News—the “official” newspaper of white flight. Back in the day it was editorial policy of the
News to publish a front page story every day about a crime committed by an African-American.
Recently Detroit News Editor Nolan Finley, who has built his career on being the most steadfast and
flamboyant carrier of the “white man’s burden,” published a much hyped editorial titled “Can Detroit
Govern itself?” You can guess how he answered his own question.
And his coded speech is unmistakable. Everyone knows that what Finley really means is can African
Americans govern themselves? To which my answer is absolutely, if you and your one-percent pals
were capable of allowing such a thing. A step in the right direction would be for the News to publish a
reflective piece on how its coverage of the city and its hate filled comments section helps perpetuate
racism and segregation
The thing about residential segregation is that it changes not just economics, but politics as well. As
Detroit became more predominantly African-American, its influence, especially in state government
declined. Among other things, that made gerrymandering easier, contributing to the control of all
three branches of government by right-wing Republicans.
But there is more to this story—way more
Believe it or not, the worst of times is well on its way to becoming something truly inspiring The very
isolation of Detroit has created the conditions for economy number 4 to develop a new paradigm of
economic activity.
Economy number 4 is a complex, multi-layered thing in its own right. It is single moms stretching
dollars from government programs for the poor as creatively and as far as they can. It is back alley
auto repair shops and church’s selling dinners on the street. It is off the books home child care. It is
what African-Americans have had to do for many generations to make a way out of no way.
It is also scrappers who are repurposing the copper, weathered wood and other valuable products
left by the abandonment of homes, stores and factories. So, yes it’s crime too. Crime, after all, is a
form of economic activity whether it is Wall Street stealing homes through foreclosure or robbers who
target dope-dealers cuz “that’s where the money is.”
Some people look at the physical destruction of Detroit and see only the blight. What I see is
amazing resourcefulness on the part of the remaining residents to prevail again and again against
overwhelming odds.
Necessity truly is the mother of invention and in that spirit,
Detroiters are also developing a remarkable highly intentional economy.
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That economy includes increasingly sophisticated urban agriculture and a growing network of
alternative schools. It is neighborhood based conflict resolution; do-it-yourself solar street lighting;
community based manufacturing using the newest fab lab technology and alternative transportation
systems. It is new art and new music and new media. It is time-banking, co-ops and other forms of
creative finance. It is Skype conferences and face to face meetings with partners all over the world to
reimagine work, finance and democracy. It is the creative use of social services and churches to
create maker spaces and entrepreneurial opportunities for returning citizens. It is the hard below the
radar work of the Detroit Roundtable and others facilitating healing and practical new alliances
between the city and the suburbs.
The living, breathing Detroit new economy movement taps into Detroit’s deep political traditions of
advocacy for economic and social justice. It is especially dependent on the decades long visionary
analysis and activism of the late James Boggs and 98 year old Grace Lee Boggs.
Interestingly enough, the new economy component of Detroit’s fourth economy is itself attracting a
significant amount of tourism. Plans are already underway for new B & B’s to house both long and
short term visitors. Already people are coming from around the country and the world who want to
learn first hand what a fledgling post-capitalist, post industrial, new paradigm economy looks like.
Katrina or Canary? Detroit and the US of A
So, which is it? Is Detroit just a perfect storm of forces that hit a particular place in a particular way
such as New Orleans, albeit over a longer time frame? Or is Detroit the canary in the coal mine that
is previewing where the whole country and in some ways the whole world is headed?
I have spent a lot of time over the years thinking about that question. Every time I wind up with the
same conclusion. Sooner or later, this movie will come to a theatre near you. Either that, or it will
open nationwide, that is for the whole country. Dependence on debt, political paralysis that prevents
anything being done while the system and its component parts flounder and decay, an obsolete
system of organizing work—isn’t that exactly what Detroit has been through over the last 40? Add in
accelerating ecological catastrophe and you can see that one day we will all be able to say Ich bein
ein Detroiter.
Lest I be mistaken for a deficit hawk, I don’t care if even a right winger says it, our dependence on
debt is unsustainable. As individuals, students especially, as governments and as an economy—we
are truly living on borrowed money and borrowed time.
Just speaking of governments, if the standards invented for emergency managers to take over Detroit
or Flint were objectively applied nationwide—thousands of cities, counties and states would qualify.
And guess what, so would the United States itself. Who knows, perhaps one day the UN or China
will take over the powers of Congress and the Preident and replace them with an Emergency
Manager.
Whatever the ultimate outcome of Detroit’s municipal bankruptcy drama, we can be certain of one
thing.
It won’t fix any of the underlying problems of systemic racial, political and economic
dysfunction.
For that, we will have to rely on ourselves. And more and more, we are doing just that. For those of
us who believe the current dominant order is not only not working, but a menace to life on earth,
Detroit is exactly where we want to be. We are proud and grateful to be in the place and the time
where we get to have a part in making another world happen.
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