Les organisations du travail tayloriennes et fordiennes ont
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Les organisations du travail tayloriennes et fordiennes ont
Les titres en couleurs servent à guider la lecture et ne doivent pas figurer sur la copie. Introduction Les négociations sur la pénibilité entamées en 2003 par les partenaires sociaux n’ont toujours pas abouti alors que ce critère pourrait être pris en compte lors de la réforme des retraites. Ces thèmes nous amènent à réfléchir aux conditions de travail proposées aux salariés. Celles-ci dépendent des organisations du travail des unités productives. Les organisations du travail fordienne et taylorienne ont-elles disparu ? L’organisation du travail désigne la façon dont les tâches productives sont réparties entre les salariés d’une entreprise ou d’une administration : sous l’angle vertical (entre conception-direction et exécution) et sous l’angle horizontal (spécialisation dans des tâches simples, requérant peu de qualification). Une parcellisation extrême peut être vécue comme aliénante. L’ingénieur Taylor (1856-1915) a théorisé et appliqué ces deux types de division du travail (DT). H. Ford (1863-1947) a peu après amplifié cette logique par trois biais : les convoyeurs, la standardisation des produits et la forte hausse des salaires (pour retenir les ouvriers épuisés par des conditions de travail difficiles). La DT amène de formidables gains de productivité source d’enrichissement économique général et de nombreuses transformations sociales. Ces organisations tayloro-fordiennes sont-elles notablement remises en cause ou alors y a t-il adaptation et modernisation des procédures de contrôle du travail d’exécution ? Sommes-nous entrés à l’ère du posttaylorisme ou restés à celle du néo-taylorisme ? Nous verrons d’abord que le taylorisme traditionnel est remis en cause, avant de montrer que les organisations tayloriennes et fordiennes progressent sous de nouvelles modalités. 1. Les organisations du travail tayloro-fordiennes sont remises en cause. A. Ces organisations présentent des inconvénients. a) Les organisations tayloriennes traditionnelles engendrent désintérêt et malfaçons. La diffusion des procédures tayloro-fordiennes dans l’industrie a abouti à de forts gains de productivité. De plus, ces organisations du travail ont permis d’intégrer dans l’emploi industriel de nombreux individus issus de l’agriculwww.annabac.com © H A T I E R 2010 ture ou de l’immigration car les gestes taylorisés nécessitaient peu de qualification. Mais cet atout historique s’est transformé depuis les années 70, en un handicap. Effectuant des tâches sans intérêt, les salariés employés sur des convoyeurs se sont désintéressés de la qualité de leur travail et de leur productivité. Les contraintes traditionnelles du taylorisme sont fortement ressenties par les jeunes générations d’ouvriers. b) Les organisations tayloriennes traditionnelles sont rigides et fragiles. La standardisation des produits a permis de satisfaire les besoins de la population du début des Trente Glorieuses, avide de biens nouveaux et conformes au modèle social d’alors. Mais les consommateurs, plus riches, plus éduqués et plus individualistes se sont lassés des produits dont disposent aussi leurs voisins. Le désir de se distinguer, d’affirmer son statut social à travers sa consommation a rendu les produits tayloriens obsolètes. La chaîne de montage, ne permettant pas de réaliser des produits différenciés, est devenue caduque. De plus, les postes tayloriens avec tâches très spécialisées sont faciles à robotiser. Ainsi, la part des emplois industriels diminue, passant de 35 % des actifs en 1949 à 13 % en 2007, avec une accélération depuis 1975 (document 2). B. Certaines unités productives cherchent la « détaylorisation ». a) Les entreprises cherchent à motiver leurs salariés. Dans les années 70, les limites du taylorisme conduisent certaines entreprises à rompre avec ses excès. Le mot clé de la « détaylorisation » est la motivation des salariés (document 4). Par des démarches participatives, les directions visent l’adhésion des salariés aux objectifs de l’entreprise. En effet, les entreprises cherchent aujourd’hui à utiliser au mieux la matière grise des salariés pour répondre aux défis de la concurrence par la qualité ou l’innovation, par exemple, par le biais de cercles de qualité. Dans l’industrie, les tâches sont recomposées afin de responsabiliser les salariés. b) Des évolutions sociales et techniques amènent une modernisation des organisations du travail. Aujourd’hui les salariés disposent de qualifications plus élevées grâce à l’allongement des études. Par ailleurs, le progrès dans l’application de l’informatique favorise de nouvelles modalités d’organisation du travail. La production en « juste-à-temps » permet la « différenciation retardée » des produits. Le document 3 décrit la nouvelle distribution des tâches qui prévaut dans les banques. Le guichetier est devenu polyvalent et s’occupe de presque toutes les demandes du client, qui par ailleurs se trouve satisfait d’être suivi par une seule et même personne. L’informatique mène à l’enrichissement des tâches, en permettant à des salariés de gérer les stocks de commandes et pas seulement de vendre les produits. www.annabac.com © H A T I E R 2010 [Transition] Si quelques modalités des organisations tayloriennes et fordiennes sont remises en cause dans certaines activités, les principes de rationalisation du travail et de contrôle des salariés demeurent. 2. Le taylorisme se transforme et même progresse dans de nombreuses branches. A. De fortes contraintes pèsent toujours sur les salariés, toutes branches confondues. a) Les contraintes déclarées par les salariés, tous secteurs confondus, augmentent, à l’exception du contrôle exercé par la hiérarchie. Entre 1994 et 2003 (document 6), par exemple, la part des salariés soumis à une cadence imposée par une demande extérieure progresse de 5,6 points. Le client remplace le contremaître en tant que prescripteur tandis que l’informatique sert d’outil de contrôle pointu des salariés (27 % des salariés déclarent avoir un contrôle ou un suivi par informatique en 2003). De plus, avec une production à flux tendus, les salariés sont contraints de travailler ordinairement en situation d’urgence. Ainsi, avec des modalités différentes et modernisées, la logique de rationalisation et de contrôle des exécutants s’accentue. b) Les contraintes strictement physiques qui épuisaient les salariés semblent moins fréquentes, mais de nouvelles contraintes se développent. Ainsi, au-delà des procédures apparemment démocratiques de participation des salariés, la division verticale du travail et le contrôle des salariés restent forts. S’ajoute une contrainte supplémentaire : le salarié doit s’engager psychologiquement dans son travail. L’indifférence à sa performance ou à celle de l’entreprise est mal vue. Pour les salariés, ces normes sont sources de nouvelles formes de souffrance au travail. L’actualité illustre certaines modalités de gestion du personnel qui, à l’extrême s’apparentent à des formes de harcèlement moral. B. Le taylorisme étend son domaine d’application à de nombreux services. a) De nombreux services marchands sont maintenant « taylorisés ». La rationalisation du travail se diffuse dans les services : restauration rapide, télétravail. Il y a « hyper-spécialisation », les gestes sont chronométrés, contrôlés selon une logique typiquement taylorienne. Sans avoir besoin de convoyeur, la logique tayloro-fordienne progresse dans le tertiaire, avec des contraintes de cadences élevées, « le tout agrémenté d’écoutes, de surveillance de la part des supérieurs » (document 3). D’autres exemples www.annabac.com © H A T I E R 2010 illustrent cette taylorisation des services – marchands ou non : nettoyage des chambres d’hôtel, toilettes des patients réalisées par des aides-soignantes… b) Les services publics sont aussi rationalisés au détriment de la qualité des services rendus aux usagers. Les activités non-marchandes sont aussi touchées par des processus de rationalisation. Ainsi, la part des emplois dans les services administratifs a diminué depuis 1999 (document 2). Comme ni la population, ni les missions de service public n’ont diminué, il y a donc eu rationalisation des activités non-marchandes. Des indicateurs chiffrés d’activité sont aussi mis en place et il y a recherche de gains de productivité, ce qui conduit à de nombreuses suppressions de postes. Cependant, au-delà de la productivité, les citoyens peuvent craindre une dégradation de la qualité du service public. Conclusion Le taylorisme est loin d’avoir disparu. Ses modalités se sont transformées et modernisées. Il y a essor du néo-taylorisme, donc adaptation des principes tayloriens aux nouvelles technologies et aux nouvelles conditions sociales de la demande des consommateurs et des travailleurs. La DT est porteuse de tant de gains de productivité qu’il est difficile d’y renoncer dans le monde de la production. À défaut de satisfaire pleinement les salariés qui y sont confrontés, il serait peut-être envisageable de limiter le temps au cours duquel ceux-ci sont soumis à ces conditions en décidant de diminuer le temps de travail. www.annabac.com © H A T I E R 2010