Fiche_synthese_quel avenir pour les sevices publics

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Fiche_synthese_quel avenir pour les sevices publics
Quel avenir pour les services publics ?
par Lionel Gastine 1
Un service public est une « activité d’intérêt général, assurée ou assumée par une
personne publique, et régie au moins partiellement par des règles de droit public »2. Derrière
cette courte définition, se cachent des réalités multiples qui sont fonction d’une époque, d’un
pays et de la perception qu’ont les responsables politiques du rôle de leur collectivité. En
France, depuis les débats constituants de 1946, la notion recouvre à la fois les missions de
service public, le secteur public, les entreprises publiques et les agents publics. Cette
identification n’est pas allée sans un risque de confusion. Ainsi, pendant près de cinquante
ans, le modèle d’organisation français des services publics a eu tendance aux yeux des
citoyens à se réduire aux grands monopoles nationaux (France Telecom, EDF-GDF, SNCF)
qui confondaient un service, un monopole et une propriété publics. Pourtant, dès le début du
XXème siècle d’autres services publics, essentiellement locaux (alimentation en eau potable,
assainissement, transports en commun urbains), ont fait l’objet de modes de gestion
différents et ont pu être confiés à des personnes privées.
Dès lors, le besoin de clarifier ce que recouvre le service public dans sa définition et
dans ses modes de gestion s’impose. Une clarification rendue particulièrement nécessaire
au vu des récents bouleversements économiques et sociaux : réduction des capacités
financières des collectivités, libéralisations impulsées par l’Union Européenne, diversification
des attentes des usagers sont autant de facteurs qui font ressurgir d’impérieux besoins de
lisibilité et de modernisation des services publics. Dans un tel contexte, il paraît légitime de
se demander si la conception parfois ancienne et abstruse du service public en
France est encore pertinente aujourd’hui. N’est-il pas nécessaire d’adopter une notion
plus évolutive à la fois dans sa définition et dans sa mise en œuvre ?
Appréhender la notion française de service public à travers sa constitution historique
et juridique est indispensable (1) pour comprendre les évolutions économiques,
institutionnelles et sociales auxquelles elle est aujourd’hui confrontée (2). L’ampleur de ces
mutations conduit à remettre en question la conception classique de service public pour
adopter celle plus large de « service aux public » (3).
Le service public français, une notion floue… ................................................................................................................2
1. Service(s) public(s), secteur public, entreprises publiques…des notions à préciser............................................2
2. L’identification du service public, un pari impossible ? ..............................................................................................3
3. Des modes de gestion qui ne se réduisent pas au monopole public national.......................................................5
…que les évolutions économiques, institutionnelles et sociales…..........................................................................8
1. Des évolutions économiques qui incitent à introduire plus de concurrence...........................................................8
2. L’influence du droit communautaire : « service public à la française » vs SIG ?...................................................8
3. Des données sociologiques nouvelles et des exigences accrues chez les usagers ..........................................10
…obligent à reformuler dans le cadre plus large de « services au public » .........................................................12
1. Les « services au public », une notion nouvelle........................................................................................................12
2. Une approche plus cohérente et plus transversale créatrice de nouveaux partenariats ...................................13
3. D’incontournables objectifs d’efficacité et de qualité................................................................................................14
Bibliographie ...........................................................................................................................................................................16
1
Lionel Gastine, étudiant en Master à Sciences -Po a effectué un stage de 5 mois à la Direction prospective et
stratégie du Grand Lyon où il s’est particulièrement intéressé à l’évolution des services publics.
2
Dictionnaire de droit administratif, A. Colin, 2002.
1
Le service public français, une notion floue
Si le service public peut être considéré comme une « activité d’intérêt
général, assurée ou assumée par une personne publique, et régie au moins partiellement
par des règles de droit public »3, une telle définition ne saurait épuiser la réalité du service
public pour la majorité des Français. Il semblerait que dans notre pays, « par un glissement
verbal, on passe […] du service public, principe unificateur, aux services publics, activités
précises considérées une à une, puis aux organismes chargés de les fournir »4. Dès lors, un
effort de distinction entre la doctrine, les activités et les secteurs du service public s’impose
(1). Ce risque de confusion écarté, deux préoccupations viennent immanquablement à
l’esprit : établir des critères d’identification permettant de savoir quand une activité relève ou
non du service public (2) et, le cas échéant, savoir quelles en sont les modalités
d’organisation (3).
1. Service(s) public(s), secteur public, entreprises publiques…des notions à préciser
Naissance d’une doctrine : le service public
La doctrine du service public a pris naissance avec les travaux de juristes du début
du XXème siècle tels Duguit, Jèze ou Hauriou. Elle a fait l’objet d’âpres débats tant les
problèmes juridiques, idéologiques, économiques et sociaux qu’elle aborde sont larges et
exposés à la controverse : fondement du droit administratif5, légitimité de l’action publique,
respect de la liberté du commerce et de l’industrie, détermination des besoins collectifs…
Trois fondements unificateurs semblent toutefois s’être dégagés de ces réflexions. Il est
admis qu’ « à l’origine de tout service public se trouve un besoin reconnu par la collectivité
que l’initiative privée ne parvient pas à satisfaire »6. Ensuite, la doctrine accorde une
place centrale aux autorités publiques, qu’elles soient locales ou nationales car elles
définissent les missions de service public, déterminent les conditions d’exécution et
contrôlent leur exécution. Enfin, des principes de fonctionnement sont formulés à l’époque
sous le nom de « lois de Rolland » -continuité, adaptabilité et égalité (cf. encadré). En plus
de ces principes, sont généralement évoquées les exigences de neutralité, de transparence
et, dans le cas où les services sont fournis par un établissement public, de spécialité.
Les principes de fonctionnement des services publics
Le principe de continuité signifie que le service public doit fonctionner de manière régulière c’est à dire sans
interruptions hormis celles prévues par la loi. C’est un principe à valeur constitutionnelle (1) qui doit se conjuguer
avec le droit de grève. Le principe d’adaptabilité (ou de mutabilité) oblige l’administration et les personnes
privées chargées d’une mission de service public(2) à adapter les services publics aux besoins des usagers et aux
exigences de l’intérêt général. Le principe d’égalité est une application du principe général d’égalité énoncé par
la déclaration des droits de l’homme et des citoyens de 1789. Il se décline en plusieurs principes reconnus par le
Conseil d’État : égalité devant les charges publiques (3) , égalité des personnes entrant en relation avec le service
public(4) , égalité d’accès à la fonction publique(5) ou encore égalité des usagers du service public(6) , cette dernière
pouvant laisser place à une discrimination tarifaire pour des considérations d’intérêt général(7) ou des objectifs
d’équité. L’intervention du juge pour établir ces principes souligne le caractère essentiellement jurisprudentiel de
la notion de service public.
(1)
CC, 1979, continuité du service public de la radio et de la télévision ; (2) CE, 1902, Compagnie nouvelle du gaz
Deville de Rouen ; (3) CE, 1923, Couitéas ; (4) CE, 1951, Société des concerts du conservatoire ; (5) CE, 1954,
Barel ; (6) CE, 1938, Société l’Alcool dénaturé et CE, 1948, Société du journal l’Aurore ; (7) CE, 1974, Denoyez et
Chorques
3
Dictionnaire de droit administratif, A. Colin, 2002.
« Le service public », Rapport au premier ministre de la commission présidée par R. Denoix de Saint Marc, La
Documentation française, 1996.
5
cf. TC, 1873, Blanco, le service public comme critère de la compétence de la juridiction administrative.
6
Ibid.
4
2
Services publics ou secteur public ?
Les Français prêtent à l’ensemble des activités de service public une grande
cohérence au point de confondre services publics et secteur public. Cette confusion entre les
activités, les personnes chargées de les exercer et le secteur public trouve en partie son
origine dans les évolutions historiques.
Au début du XXème siècle, les services publics (hormis les services régaliens) sont
essentiellement locaux et font l’objet d’une délégation à un prestataire privé, la doctrine
laissant de grandes libertés quant à leurs modes d’organisation. Cette gestion contractuelle
a pendant longtemps différencié les services locaux (eau, assainissement, propreté,
transport) des services publics nationaux (énergie, transport, télécommunications, poste)
créés lors des vagues de nationalisation de 1936-39 et de 19467 pour réduire les inégalités
sociales et assurer la reconstruction de l’économie nationale. La prise en charge
systématique de ces services publics nationaux par la puissance publique8 fait
progressivement apparaître une confusion entre service public, monopole et propriété
publique. Chez les Français, elle efface la différence entre des services publics non
marchands (police, justice…) et des services publics marchands (communication, énergie,
transports) qui dans d’autres pays européens sont restés des services commerciaux
ordinaires.
Les nationalisations et l’évolution distincte des services publics locaux et nationaux ont
par conséquent fait naître un système parfois complexe, avec :
- un secteur public qui, en plus de recouvrir la fonction publique (État, collectivités
territoriales, hôpitaux), fait référence à des activités marchandes9 exercées par des
entreprises publiques nationales (transport, énergie).
- des (ex-)entreprises publiques qui ont rempli des missions de service public
(SNCF, La Poste) mais également commerciales (Renault, banques nationalisées)
avec parfois la création de filiales de droit privé (cf. Caisse des Dépôts).
- des personnes privées (Veolia, Suez…) qui exercent des missions de service
public 10 dans le cadre d’une gestion contractuelle ou d’une habilitation unilatérale.
Différencier une doctrine (le service public), des activités (les services publics) et d’un
champ d’intervention (le secteur public) est indispensable pour obvier au risque de
confusion, pour autant elle ne permet pas d’identifier une activité de service public en tant
que tel.
7
SNCF en 1937, Air France en 1945, EDF et GDF en 1946. Une troisième vague de nationalisation interviendra
également en 1982 dans les secteurs de la banque et des biens d’équipement.
8
L’article 9 du préambule de la Constitution de la IVème République souligne que "Tout bien, toute entreprise
dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir
la propriété de la collectivité". Historiquement, la prise en charge de ces services publics nationaux s’est faite
directement par l’État puis par des entreprises publiques (entreprises dans lesquelles l’État détient la majorité du
capital ou la majorité des voix attachées aux parts émises).
9
Ces activités sont la plupart du temps considérées comme des services publics à caractère industriel et
commercial (TC, 1921, Société commerciale de l’Ouest africain)
10
Cf. CE, 1912, société des granits porphyroïdes des Vosges pour l’apparition de la gestion privée des services
publics. A noter qu’un service public (géré par une personne publique ou une personne privée) peut être rentable
(TC, 1921, Société commerciale de l’Ouest africain).
3
2. L’identification du service public, un pari impossible ?
Une classification fonctionnelle utile mais susceptible de varier
L’inventaire des services publics selon leur fonctionnalité permet d’identifier les
champs qu’ils couvrent. Il rappelle que la création d’un service public correspond à une
finalité. Les services peuvent ainsi être arbitrairement regroupés en quatre catégories selon
leurs finalités :
- les services assurant le maintien ou l’instauration de l’ordre et la régulation des
activités (justice, police, défense nationale…)
- les services ayant une finalité de protection sociale et sanitaire (hôpitaux, aides et
actions sociales, Sécurité sociale…)
- les services à vocation éducative et culturelle (enseignement, recherche, loisirs,
communication audio-visuelle…)
- les services publics à caractère économique (transport, eau potable, énergie…).
Ces finalités, et les missions afférentes, sont à l’évidence susceptibles de varier : le
contexte économique et réglementaire, les progrès techniques et la vision que se font les
élus du rôle de leur collectivité évoluent en fonction du temps et des sensibilités politiques.
Toute classification fonctionnelle n’est donc que temporaire et ne permet pas de dégager
des critères d’identification stables. En fait, procéder à une telle identification semble être
une véritable gageure tant la multiplication des activités de service public en France a pu
diluer la notion même de service public.
Des principes juridiques d’identification flous
La définition générique du service public -« une activité d’intérêt général assurée soit par
une personne publique, soit par une personne privée rattachée à une personne publique et
soumise à un statut juridique particulier » 11- permet de mentionner trois critères
d’identification avancés traditionnellement par le droit administratif : un critère finaliste (la
mission d’intérêt général), un critère organique (le rattachement à une personne publique) et
un critère matériel (la soumission plus ou moins prononcée au droit public en s’appuyant sur
la distinction entre Services Publics Administratifs –SPA- et Services Publics à caractère
Industriel et Commercial -SPIC-).
La mission d’intérêt général et le rattachement à une personne publique
La mission d’intérêt général signifie que les services publics sont « des activités qui
présentent, au regard des nécessités de l’organisation sociale et des besoins des usagers,
des caractéristiques telles qu’elles ne peuvent être assurées par le simple jeu du marché » 12.
Si certaines fonctions (fonctions régaliennes, fonctions liées aux activités sociales) semblent
rentrer naturellement dans ce cadre, cette conception laisse une large place à l’intention
des pouvoirs publics13. Ce pouvoir discrétionnaire de création des services publics est
11
M ORAND-DELIVER J., « Cours de droit administratif », Paris, Montchrestien, 1997.
AUBY Jean-François, « Les services publics en Europe », Paris, PUF, 1998.
13
Le juriste Gaston Jèze soutenait ainsi qu’il n’existe pas de service public « par nature », « sont uniquement
services publics les besoins d’intérêt général que les gouvernements d’un pays donné, à une époque donnée, ont
décidé de satisfaire par le procédé du service public ». A titre indicatif, il est ici possible d’évoquer l’évolution des
activités de service public entre la période de libéralisme économique du XIXème siècle et l’événement du
socialisme municipal au début du XXème siècle.
12
4
d’ailleurs reconnu constitutionnellement 14 à condition qu’il se fasse dans le respect du
principe de la liberté du commerce et de l’industrie 15.
Quant à la référence à la personne publique , elle rappelle que le service public est
« assuré ou assumé par une personne publique, et régie au moins partiellement par des
règles de droit public » 16. Elle n’exclut pas la possibilité pour une personne privée de se voir
confier par une autorité publique des missions de service public. En revanche, seules les
personnes publiques peuvent créer ou supprimer un service public. Cette création est
législative (parfois liée à une disposition constitutionnelle) ou administrative, l’État ou la
collectivité locale 17 décidant dans ce cas d’ériger une activité en service public.
SPIC/SPA : une distinction juridique remplie d’incertitudes
La distinction entre service public administratif (SPA) et service public à caractère
industriel et commercial (SPIC) est également utilisée par le droit administratif. Elle est
fondamentale puisqu’elle détermine le degré de soumission de l’activité au droit public qui
est plus fort pour un SPA que pour un SPIC. Cette distinction se fait par exclusion : les SPA
sont les services qui ne remplissent pas les critères18 suivants utilisés pour qualifier les
SPIC :
- une activité financée, au moins partiellement, par une redevance versée par les usagers
du service public (critère dominant),
- une activité comparable à celle exercée par une personne privée,
- une activité dont les modalités de fonctionnement et d’organisation du service sont
similaires à celles pratiquées dans les entreprises privées comparables.
Sachant que les SPA concernent essentiellement les services régaliens, sociaux,
éducatifs et culturels alors que les SPIC regroupent les services marchands, cette distinction
pourrait constituer un élément d’identification. La réalité montre malheureusement qu’il
n’existe pas de summa division, que la distinction faite par le juge, en plus de souffrir de
nombreuses exceptions, peut se révéler aléatoire. Au final, l’analyse des éléments
traditionnels d’identification des services publics ne laisse pas de poser un problème à qui
veut tenter de les qualifier.
3. Des modes de gestion qui ne se réduisent pas au monopole public national
En plus de s’interroger sur les moyens d’identifier un service public (et plus
indirectement de savoir quand il est possible de le créer), la question de son mode
d’exécution, et particulièrement de son mode de gestion, se pose de façon inévitable. Une
fois encore, l’autorité publique dispose en la matière d’un pouvoir discrétionnaire sauf pour
les services dont la délégation est proscrite à l’exemple des services régaliens. Les SPA de
façon fréquente gérés directement par une personne publique au niveau national (justice,
défense, enseignement…) alors que les SPIC font souvent l’objet de modes de gestion
variés :
14
CC, 1986, loi de privatisation
Loi des 2 et 17 mars 1791 ; la liberté d’entreprendre a également valeur constitutionnelle (DC 16 janvier 1982).
16
Dictionnaire de droit administratif, A. Colin, 2002 ; attention, cette référence n’implique pas que toute activité
d’intérêt général d’une personne publique soit un service public (ex : la gestion du domaine privé des collectivités
territoriales)
17
Pour les collectivités locales, l’organe délibérant définit les missions du nouveau service public et détermine
ses modalités de gestion et ses conditions d’exécution. Cependant les collectivités doivent obligatoirement
assurer des services publics prévus par la loi et se soumettre à l’interdiction de créer un service public pour
répondre aux besoins financiers d’une personne publique (même pour assurer par ce biais le financement d’un
autre service).
18
Cf. CE, 1956, Union syndicale des industries aéronautiques.
15
5
-
la gestion publique directe (régie directe ou indirecte),
la gestion publique indirecte : le service est confié par la collectivité à un organisme
permanent qui lui est dépendant, de type établissement public,
la gestion déléguée : le service est confié par la collectivité à une entreprise privée,
mixte ou publique. Elle peut revêtir des formes variées –régie intéressée, affermage,
concession- (cf. tableau de comparaison infra),
le contrat de partenariat défini par l’article 1 de l’ordonnance du 17 juin 2004 repris
dans l’article L. 1414-1 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) : « la
personne publique confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée
d'amortissement des investissements […], une mission globale […]19 concourant à
l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est
chargée. Le cocontractant de la personne publique assure la maîtrise d'ouvrage des
travaux à réaliser. […] La rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la
personne publique pendant toute la durée du contrat. Elle peut être liée à des objectifs de
performance assignés au cocontractant ». Déjà engagés par l’État (projets autoroutiers,
conception, construction et gestion d’hôpitaux et de prisons…), ces contrats de
partenariat sont amenés à se généraliser aux collectivités territoriales 20.
Comparaison des différentes formes de gestion contractuelle des services publics
Délégations de service public
Régie intéressée
Affermage
Concession
Service public
Service public
Service public
Travaux de 1
établissement
Public
Public
Privé
Privé
Travaux de
renouvellement
Public
Public/privé
Privé
Privé
Public
Public
Privé avec retour
au public
Privé avec retour
au public
Principalement
usager
Principalement
public (étalée)
Objet de contrat
er
Financement de
projet
Contrat de
partenariat
Prestation
concourant au
service public
Propriété des installations
Source
rémunération
Rémunération
Public
Redev. Fixe +
proport., selon
niveau d’utilisation
par les usagers
Selon niveau
d’utilisation par les
usagers
Selon niveau
d’utilisation par les
usagers
Selon objectifs de
performance
Risques financiers et commerciaux
Public
Privé
Privé
Privé
Durée du contrat
Courte
Moyenne
Longue
Longue
Variation
rémunération
Un rappel historique (§I.1) a pu mettre en évidence l’erreur qui consiste à réduire
l’organisation du service public « à la française » au seul monopole hérité des
nationalisations. Cette erreur reviendrait à nier le contraste assez net qui a pu exister entre
les modes de gestion des SPIC nationaux (modèle des monopoles publics nationaux) et
ceux utilisés de longue date par les SPIC locaux (concession, affermage). Cette différence
explique que le droit communautaire, notamment avec l’introduction de la concurrence,
n’affecte pas (et n’affectera pas) de la même façon les services publics nationaux et les
services publics locaux.
19
« relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service
public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur
maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services ».
20
cf. circulaire du 29 novembre 2005 relative aux contrats de partenariat à l’attention des collectivités territoriales
du Ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie.
6
Si l’aperçu des différents modes de gestion se présente sous un ensemble diversifié
mais plutôt cohérent, les tentatives d’identification ont indéniablement renvoyé une image
floue et confuse des services publics. Cette imprécision n’est pas propice aux débats et aux
mesures de modernisation du service public qu’imposent les récentes évolutions
économiques, institutionnelles et sociétales.
7
Des services publics confrontés aux évolutions économiques et sociales
Les services publics doivent aujourd’hui faire face à d’importantes mutations. Alors
que certains voisins européens avaient déjà commencé à les adapter en réponse au
nouveau contexte économique (1), les changements intervenus en France se sont
principalement produits sous l’influence du droit communautaire (2). Les âpres débats et les
réticences que ce dernier a pu faire naître ne doivent pas occulter les inévitables besoins de
modernisation et d’adaptation qu’imposent les évolutions sociales (3).
1. Des évolutions économiques qui incitent à introduire plus de concurrence
Dans les années 1980, les évolutions macro-économiques, la réduction des
capacités financières des États et la volonté d’optimiser l’efficacité des exploitants ont incité
les gouvernements de plusieurs pays européens à modifier les modes d’organisation de
leurs services en réseau par plusieurs procédés :
- limitation du monopole à la seule infrastructure,
- introduction de la concurrence parmi les exploitants,
- dissociation de la gestion de l’infrastructure de l’exploitation du service,
- réduction du financement public de certains secteurs,
- instauration d’autorités indépendantes de régulation chargées d’organiser de façon
équitable la coexistence des ex-monopoles avec leurs nouveaux concurrents.
La France ne s’est pas empressée de reprendre ces mesures à son compte, peut-être
parce que sa population était plus satisfaite que ses voisines européennes de services
publics nationaux qui avaient atteint un niveau de performance relativement élevé. Pourtant
le pays est lui aussi exposé aux changements techniques et économiques partout à l’œuvre.
La réduction de la capacité budgétaire de l’État conjuguée à la situation financière de
certains monopoles (cf. France Telecom) et la dégradation de la position de certains
exploitants (cf. Air France) ne pouvaient qu’entraîner un certain nombre de réformes. Cellesci allaient être introduites par les politiques d’ouverture à la concurrence de l’Union
Européenne.
2. L’influence du droit communautaire : « service public à la française » vs SIG ?
L’UE ignore les «services publics » mais reconnaît les Services d’Intérêt Général
(SIG)
L’Union Européenne a eu pendant longtemps une approche limitée des activités d’intérêt
général, appelées en France services publics. Elle s’est d’abord fait remarquer par une
politique volontariste d’ouverture à la concurrence secteur par secteur. Ces évolutions,
parfois brutales et souvent vécues par les Français comme imposées par l’Union
Européenne, pouvaient paraître difficiles à admettre d’autant plus que le droit français et le
droit communautaire n’obéissent pas aux mêmes logiques. Le droit français part de la
puissance publique considérée comme garante des solidarités et des libertés fondamentales
et comme conciliatrice des exigences de services publics avec la liberté de commerce et
d’industrie ; le droit communautaire en revanche part de la liberté de circulation des
personnes, des biens et des services sur le marché européen, il adopte une approche
sectorielle basée sur le service rendu à la personne et dans laquelle la concurrence
constitue un moyen essentiel pour atteindre la prospérité. A la différence du droit français, il
n’établit pas de lien entre une obligation de service public et l’intervention publique.
8
Après les débuts de sa politique volontariste d’ouverture à la concurrence, l’Union
Européenne a nuancé sa position en reconnaissant en 1996 la notion de Services d’Intérêt
Général (SIG). Cette expression désigne selon la Commission « l’ensemble des services
marchands et non marchands considérés comme d’intérêt général et soumis à des
obligations spécifiques de service public »21. Cependant l’UE, contrainte de faire la synthèse
des différentes définitions et terminologies utilisées dans les États membres, ne développe
pas cette notion de SIG dans son droit positif. Faute de disposer de précisions juridiques
supplémentaires qu’auraient pu apporter le projet de Traité constitutionnel 22 et l’adoption
d’une loi cadre, il est nécessaire de se référer à la fois au Livre blanc des SIG (2004) et à la
jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes.
Les différentes catégories de SIG
Les SIG sont aujourd’hui considérés d’après ce Livre blanc comme « un pilier du modèle
européen de société », ils « demeurent une responsabilité partagée de l’Union et des
États ». Il est en outre précisé que « la définition des missions et des obligations de service
public doit rester du ressort des autorités publiques » même si la fourniture du service peut
être confiée au secteur privé. Au regard du droit communautaire actuel, les SIG se
décomposent en trois types de secteur :
- les services non économiques correspondent aux services d’ordre régalien et aux
régimes de base de sécurité sociale obligatoires. Ils restent de la compétence exclusive
de l’État.
- les Services d’Intérêt Économique Général (SIEG) correspondent aux services en
réseau libéralisés (transport, communication, énergie…). Ils relèvent d’une responsabilité
partagée entre l’Union Européenne et les États membres. Les directives sectorielles les
ont souvent ouverts à la concurrence. Elles ont également imposé aux prestataires
certaines obligations de fourniture appelées service universel qui peuvent être revues à
la hausse par chaque État membre (prix, qualité, couverture territoriale…).
- les services économiques non régulés correspondent aux services n’ayant pas encore
fait l’objet de directives de libéralisations (distribution de l’eau, traitement des déchets…).
Le droit communautaire conduit à la libéralisation des SIEG français
L’évolution de la réglementation européenne ne devrait pas avoir de grandes
conséquences sur les SIG non économiques, ces derniers restant de la compétence
exclusive de l’État. Des interrogations subsistent cependant pour savoir dans quelle
catégorie (SIG/SIEG) seront classées les activités ayant à la fois une prédominance sociale
et économique (santé, éducation).
En revanche, l’influence sur les SIEG est loin d’être anodine. En réponse aux
directives européennes (ouverture à la concurrence des télécommunications en 1996, de
l’électricité en 1999, du gaz en 2000) les SIEG français ont fait l’objet d’importantes
réformes que d’autres pays avaient déjà entamées (cf. §2.1) : séparation des activités de
services et de la gestion de l’infrastructure pour le secteur ferroviaire en 1997 et pour
l’électricité en 2001, introduction progressive de la concurrence dans ces secteurs, création
de l’Autorité de Régulation des Télécommunications (ART) en 1997 devenue Autorité de
Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) en 2005, création de
la Commission de Régulation de l’Électricité (CRE) en 2000, définition d’obligations de
21
Rapport du Conseil économ ique et social, « Aménagement du territoire, services publics et services aux
publics » (janvier 2006)
22
Le projet de Traité prévoyait le principe du respect de l’Union Européenne de l’accès aux SIG tel qu’il est prévu
par les dispositions nationales, la reconnaissance du rôle des SIEG dans la cohésion sociale et territoriale, la
responsabilité partagée de l’Union et de l’État pour définir les modes de fonctionnement de ces SIEG
9
service public (loi de régulation postale du 20 mai 2005 fixant un service universel)...
Concernant ces évolutions, l’Union Européenne a toujours affirmé sa neutralité à l’égard du
régime de propriété des entreprises chargées d’une mission de service public, elle n’a donc
pas obligé à la privatisation des entreprises publiques.
Ce mouvement de libéralisations devrait conduire à une plus grande efficacité, une
diversification de l’offre et à une baisse des prix. Si la création de nouveaux services et une
baisse des prix ont effectivement pu être constatées après la libéralisation des
télécommunications, dans d’autres secteurs les évolutions restent à déterminer et peuvent
paraître plus difficiles. Plusieurs auteurs23 ont d’ailleurs souligné les risques de
dysfonctionnements du marché et de non respect d’objectifs d’intérêt général comme la
protection de l’environnement et l’aménagement du territoire.
Ces ouvertures à la concurrence méritent donc un suivi régulier de la part de l’État et
des autorités de régulation. Elles impliquent également de préciser le cadre juridique relatif à
la compensation des obligations de service public (service universel) et de fournir un cadre
communautaire pour le choix des entreprises chargées d’un SIEG (aujourd’hui inexistant
pour les délégations de services publics et les contrats de partenariat). De façon plus
générale, la création d’une directive cadre sur les SIG s’impose pour définir un socle de
principe commun en droit positif.
3. Des données sociologiques nouvelles et des exigences accrues chez les usagers
Une répartition nouvelle de la population et le besoin de se rapprocher des
administrés
La population française est aujourd’hui à 90% urbaine. Le maintien des services
publics en zone rurale et la création de nouveaux services dans les zones rurbaines posent
inévitablement des problèmes de coûts. Au cœur des agglomérations, l’apparition
d’inégalités à l’échelle fine des quartiers exige d’adapter l’offre de services aux besoins
spécifiques de populations marginalisées. Ces disparités remettent en cause le principe
d’égalité du service public pour le faire tendre vers un principe d’équité : il semble en effet
légitime de faire bénéficier certains territoires, compte tenu de leur handicap, de traitements
spécifiques voire inégaux mais justifiés et donc équitables du point de vue de l’intérêt
général 24.
Par ailleurs, la France, de tradition centralisatrice, n’a pu rester à l’écart de la mise en
œuvre du principe de subsidiarité. Avec les mouvements de décentralisation (1982 puis
2004), les collectivités territoriales ont été amenées à assurer des compétences de plus en
plus nombreuses afin de les exercer au plus près des citoyens (et également de pallier
parfois aux difficultés budgétaires de l’État).
23
Cf. entre autres, Luc Baumstark, « Utilities », Commissariat général du Plan, 2004.
Comme le précise le Conseil constitutionnel, « le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle
de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général,
pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qu’il en résulte soit en rapport direct avec l’objet
de la loi qui l’établit » (2005 - 514 DC).
24
10
Des exigences de qualité et d’adaptabilité accrues
Les exigences des usagers, qu’ils soient citoyens ou professionnels, s’accroissent. La
qualité, l’accessibilité ou l’utilisation des progrès techniques permettant d’améliorer l’offre
constituent pour eux des préoccupations majeures. Avec l’évolution des modes de vies, les
usagers formulent des attentes nouvelles, notamment en ce qui concerne les lieux et les
horaires de fourniture des services. Au niveau local, la participation aux comités consultatifs
des services publics locaux25 permet d’exprimer leurs exigences.
Les mutations sociales, économiques et institutionnelles contraignent les services
publics à évoluer dans leurs activités et dans leur identification. Parmi ces facteurs
d’évolutions, le droit communautaire occupe un rôle majeur et parfois redouté. Pourtant
selon Philippe Herzog, l’Union Européenne ne doit pas être « le bouc émissaire de nos
problèmes […] Elle incite à une modernisation de la gestion publique. Elle oblige à clarifier
les missions, à se préoccuper de l’efficacité des services »26.
25
Comités auxquels les usagers participent pour améliorer la qualité et l’efficacité des services publics locaux.
Philippe Herzog cité dans le rapport du Conseil économique et social, « Aménagement du territoire, services
publics et service au public » (janvier 2006)
26
11
Faire évoluer les services publics vers les « services au public »
Les mutations économiques, la réduction des capacités financières des collectivités
et les nouvelles exigences des usagers obligent à moderniser les services publics tout en
intégrant les évolutions apportées par le droit communautaire. Pour mener à bien cette
modernisation, le Conseil économique et social propose dans ces récentes réflexions27 de
substituer une notion nouvelle et plus large de « services au public » à celle traditionnelle de
service public (1). Une telle approche offre une conception globale et transversale des
services en privilégiant la demande plutôt que l’offre (2) tout en insistant sur les efforts
d’efficacité et de qualité indispensables à leur fourniture (3).
1. Les « services au public », une notion nouvelle
Face aux apories de la notion classique de service public, le rapport du Conseil
Économique et Social (CES) intitulé « Aménagement du territoire, services publics et service
au public » (janvier 2006) suggère d’en modifier l’approche et d’utiliser le terme « services au
public ». Cette terminologie conduit à regrouper sous la même appellation « l’ensemble des
services, publics et privés, nécessaires aux populations, répondant aux besoins des usagers
et indispensables à la vie des territoires à un moment donné ».
•
•
Parmi ces services, pourraient être distingués :
les services publics qui remplissent une mission de service public définie par la
puissance publique et qui réclame une prise en charge (directe ou indirecte) par la
collectivité. Une distinction serait faite entre :
- les services publics non marchands (services régaliens, éducation, santé publique,
protection sociale…) dont la compétence relèverait exclusivement de l’État.
- les services publics marchands, en particulier les services en réseaux (énergie,
transport, télécommunication, poste…) dont l’exploitation est ouverte à la
concurrence.
Les services privés, associatifs ou à but lucratif, considérés comme de première
nécessité sur un territoire (services à la personne, activités artisanales et commerciales
de proximité…). Ces activités ne sont pas ou peu encadrées par la puissance publique.
Selon le rapport, cette nouvelle définition devrait permettre de mieux identifier les
obligations de service public applicables à chaque secteur. Par ailleurs, la ligne de partage
entre les différentes catégories ne doit pas être considérée comme immuable, la puissance
publique pouvant, hormis dans les secteurs régaliens, réduire ou étendre son champ
d’intervention.
27
Rapport du Conseil économique et social, « Aménagement du territoire, services publics et service au public »
(janvier 2006).
12
2. Une approche plus cohérente et plus transversale créatrice de nouveaux
partenariats
L’importance de la mission de service public
L’approche privilégiée par le CES exige de considérer avant tout le service public
comme une mission. Elle suppose de la part des autorités publiques de redéfinir clairement
les obligations de service public applicables à chaque secteur. Cette posture nécessite la
rédaction de cahier des charges précis, la formulation d’objectifs à atteindre, la mise en
place systématique de l’évaluation et la certitude que les collectivités exercent pleinement
leur rôle d’autorités organisatrices.
Les « services au public », une approche globale
La notion de « services aux publics » incite à dépasser les cadres juridiques
prédéfinis. L’attention se porte plus sur les besoins réels des populations et des territoires
que sur l’offre même de services. Un diagnostic partagé des besoins doit conduire à une
vision globale et cohérente des services sans préjuger de la nature de leur fournisseur (i.e.
en optant pour une conception fonctionnelle axée sur le service rendu plutôt que sur une
conception organique). Les autorités publiques ne pouvant plus prétendre définir seules
l’intérêt général, ce diagnostic sera d’autant plus efficace qu’il associera les autres acteurs
du territoire à l’image de ce qui peut être fait au niveau local avec les comités consultatifs
des services publics locaux.
L’approche préconisée par le rapport du CES n’est pas sans rappeler la circulaire du
ministre de l’aménagement du territoire du 2 août 2005 concernant l’étude des besoins des
populations en services en milieu rural. Cette circulaire précise que la « vision stable et
prospective sur l’offre de services » doit résulter d’une concertation et d’un diagnostic
s’appuyant sur « les besoins des usagers tels qu’ils les expriment et tels qu’ils peuvent être
mesurés » en prenant en compte « le service public, mais aussi d’une façon plus large les
services au public, les services à la personne et les services de proximité, qu’ils soient
publics ou privés ».
Une démarche créatrice de partenariats et d’innovations
Le nouveau concept de « services au public » devrait amener la puissance publique à
choisir le meilleur cadre juridique. Elle devrait également l’inciter à soutenir ou à orienter le
service privé lorsqu’il supplée ou complète le service public (ex : attention aux initiatives du
mouvement associatif et du secteur privé dans l’émergence des services à la personne,
facilitation pour l’installation des professionnels de santé dans les zones sous-médicalisées).
Ces perspectives devraient être à l’origine de nouveaux partenariats que ce soit entre les
secteurs public et privé 28 ou au sein même des services des autorités publiques
(État/collectivités locales). Elles devraient aboutir à des solutions innovantes comme :
- le regroupement de plusieurs services dans un même lieu (maisons de l’emploi lancées
par le plan de cohésion sociale de 2004, permission donnée par la loi sur le
développement des territoires ruraux de 2005 pour qu’une activité ne relevant pas d’une
mission de service public puisse participer à une maison de services publics),
28
Voir à ce titre la loi sur les territoires ruraux du 23 février 2005 entérinant le partenariat public/privé et incluant
la possibilité pour une personne publique de confier à une personne privée l’exercice d’un service public dans le
but de maintenir le service.
13
-
-
la fourniture de services publics par d’autres acteurs publics (vente de billet SNCF par La
Poste) ou par des acteurs privés (service postal rendu par un commerçant), ou la
fourniture se services privés par des acteurs publics (portage de médicaments par les
facteurs),
l’utilisation des nouvelles technologies (télé-procédures) pour éviter le déplacement des
usagers.
3. D’incontournables objectifs d’efficacité et de qualité
Prendre en compte l’efficacité
Les contraintes financières, les exigences nouvelles des usagers incitent à « viser
l’efficacité au meilleur coût pour la collectivité » 29. Cet objectif passe par l’identification et
l’élimination des doublons entre les divers niveaux d’administration que ce soit entre l’État et
les collectivités territoriales ou au sein des collectivités (communes/groupements de
communes). Il commande également de rechercher le meilleur coût tout en prenant en
compte le long terme, les services publics constituant des éléments déterminants pour la
cohésion sociale et territoriale.
Coûts, qualité et efficacité : « la gestion des services publics d’eau et d’assainissement »
Dans ce rapport de 2003, la Cour des comptes analyse la gestion des services publics d’eau et d’assainissement.
Elle précise que la formation des prix et la structure des coûts de ce service sont mal connues par les usagers et
relève une maîtrise imparfaite des investissements particulièrement dans les communes équipées de services
techniques réduits. Afin de renforcer la maîtrise par les collectivités locales de la gestion de leurs services d’eau
et d’assainissement, la Cour des comptes a recommandé un certain nombre d’actions :
élargissement de la coopération intercommunale,
meilleur contrôle de la performance des services,
plus grande transparence du fonctionnement de la régie ou de l’exécution des contrats,
- incitation de l’exploitant à assurer une gestion de qualité en liant plus fortement la performance et la
rémunération du délégataire dans les contrôles.
S’assurer de la qualité des services rendus
La qualité du service public fait depuis plusieurs années l’objet d’une attention
particulière de la part des autorités publiques : circulaire relative au « renouveau du service
public » en 1989, « Charte des services publics » en 1992, circulaire relative à la réforme de
l’État dont le titre 2 s’intitule « mieux prendre en compte les besoins et attentes des
citoyens » en 1995 et plus récemment lancement de la « Charte Marianne » en 2005 dans
les services déconcentrés de l’État. Ces mesures récurrentes laissent toutefois penser que
la qualité n’est pas encore une exigence totalement intégrée par les administrations. Elle doit
donc demeurer une préoccupation forte des autorités publiques et devenir une réalité
vérifiable dans l’ensemble des administrations.
Mener des évaluations de façon systématique
S’assurer de l’efficacité et de la qualité des services publics ne peut se faire sans une
évaluation systématique. L’évaluation constitue un élément indispensable pour s’assurer de
l’efficacité, l’efficience, la cohérence et la pertinence de l’offre de services publics. Si elle est
amenée à jouer un rôle plus important à travers la réforme de la décentralisation et la
29
« Aménagement du territoire, services publics et service au public », rapport du Conseil économique et social
(janvier 2006).
14
réforme budgétaire 30, et si les premiers audits de modernisation de l’État ont récemment été
lancés en octobre 2005, elle reste peu répandue en France. Sa mise en place constitue
pourtant une priorité. Exemple parmi d’autres, les contrats de partenariat public/privé
montrent qu’il est nécessaire de s’assurer du bon usage des fonds publics et de pouvoir
disposer d’un personnel ayant des compétences adaptées aux nouveaux modes de
management. Pour se concrétiser, l’évaluation doit se traduire par la définition d’indicateurs
de performance en fonction d’objectifs assignés à chaque service que celui-ci soit assuré
directement, libéralisé ou géré par un contrat de partenariat.
*
*
*
La libéralisation des grands services industriels en réseau, la réduction des capacités
financières de la collectivité, les nouvelles exigences des usagers ainsi que l’évolution des
techniques obligent à revisiter la notion de service public.
Comme a pu le mentionner le rapport du CES et la circulaire du 2 août 2005 du
ministère de l’Aménagement du territoire, il semble judicieux d’adopter une conception plus
large de « services au public » qui part des besoins des usagers et qui regroupe l’ensemble
des activités d’intérêt général, publiques et privées. Cette nouvelle notion doit pouvoir
s’intégrer dans celle, européenne, de services d’intérêt général. Elle doit favoriser la mise en
œuvre de nouveaux modes d’élaboration et de gestion des services en s’appuyant sur des
solutions innovantes.
Facteur indispensable pour la cohésion sociale et l’attractivité du territoire français,
cette réforme des services publics ver les « services au public » ne pourra se mettre en
place sans l’implication et l’adhésion des usagers et des personnels. A ce titre, la collectivité
occupe un rôle majeur dans cette rénovation puisque c’est elle qui détermine les besoins, qui
définit le choix des moyens pour y répondre et qui doit assurer l’évaluation des performances
par rapport aux objectifs de qualité et d’efficacité fixés.
30
cf. pour la décentralisation la loi organique du 1 er août 2003 relative à l’expérimentation par les collectivités
territoriales et, pour la réforme budgétaire, la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001.
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Bibliographie
Rapports
•
•
•
« Le service public », rapport au Premier ministre de la commission présidée par R.
Denoix de Saint Marc, La Documentation française, 1996.
« La Qualité des services publics », rapport au Premier ministre de la commission
présidée par Y. Cannac, La Documentation française, mars 2003.
« Aménagement du territoire, services publics et services aux publics », rapport du
Conseil économique et social présenté par J-.A MARIOTTI, La Documentation française,
janvier 2006.
Ouvrages
•
•
•
AUBY Jean-François, « Les services publics en Europe », Paris, PUF, 1998.
DUPUIS G., GUEDON M-.J., CHRETIEN P., « Droit administratif », Paris, Armand Colin,
2005.
MORAND-DELIVER J., « Cours de droit administratif », Paris, Montchrestien, 1997.
Internet
•
•
www.vie-publique.fr, dossier sur la régulation des services publics en ligne :
http://www.vie-publique.fr/dossier_polpublic/regulation_sp/index.shtml
www.insee.fr,
- Insee première avril 1996, les nationalisations et les privatisations depuis 50 ans
(http://www.insee.fr/fr/ffc/ficdoc_frame.asp?doc_id=879&analyse=1&path=/docs_ffc/
IP860.pdf)
- Insee première juillet 2002, 1985-2000 : quinze années de mutations du secteur
public (http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/IP860.pdf)
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