III. La reconstruction de l`Histoire

III. La reconstruction de l'Histoire
L’ailleurs peut se dissimuler sous la recherche nostalgique d’une époque révolue, traversant des
âges antérieurs et, dès Winckelmann, les reconstruisant idéalement.
Johann Joachim Winckelmann (1717-1768)
1717-1768
Il joua un rôle essentiel dans l'apparition du néoclassicisme et peut être considéré comme le
fondateur de l'histoire de l'art et de l'archéologie.
Il fut envoyé par le roi de Saxe à Rome et s'y persuade de la supériorité de l'art de l'Antiquité sur
l'art baroque de son époque. Il visite les fouilles de Pompéi et Herculanum.
Son œuvre principale est l’Histoire de l’Art de l’Antiquité (1764). Il rejette la passion dans l'art et
idéalise le « beau antique », idéal à imiter dans l'art. La Grèce du IV è siècle devient le modèle à
imiter.
Winckelmann fait aussi de l'archéologie une science plutôt qu'un passe-temps.
1. Le néo-classicisme
a) contexte historique
La référence à l'Antiquité, une constante de la civilisation occidentale
Après la fin de l'empire romain d'Occident en 476, le flambeau passe à Constantinople jusqu'en
1453. Le Moyen-âge a la nostalgie de l'empire romain, recréé par Charlemagne, puis par Otton 1
sous l'appellation du St Empire Romain Germanique, qui durera jusqu'à Napoléon. L'Eglise
catholique reprend aussi à son compte les symboles romains, et l'évêque de Rome, « souverain
pontife », en devient le chef.
La Renaissance entraîne un retour à la culture antique, qui se retrouve dans les thèmes de la peinture
ou dans le décor architectural. L'Antiquité est considérée comme un moment privilégié et son art
comme le symbole de la beauté et de l'harmonie. L'enseignement continue de se faire en latin
jusqu'à Napoléon et l'Eglise le conserve jusqu'en 1962. Le latin reste une matière essentielle
jusqu'aux années 60 et l'histoire de l'Antiquité est enseignée dans les programmes scolaires
d'histoire.
Le classicisme est la traduction artistique de cette référence à partir du XVIIè siècle
Au XVIème siècle se développe à partir de la contre-réforme l'art baroque, qui ne rompt pas avec
les thèmes antiques, mais qui a une autre approche esthétique, qui n'est pas influencée par
l'Antiquité.
Louis XIV en France réagit contre le baroque en favorisant un art tourné autour de sa personne,
identifiée à Apollon, et utilisant les références antiques dans la peinture et la sculpture à Versailles.
http://www.chateauversailles.fr/les-actualites-dudomaine/evenements/evenements/expositions/versailles-et-lantique?archive=1
http://www.chateauversailles.fr/resources/360/antique/fr/index.html
Heinrich Wölfflin, Principes fondamentaux de l'histoire de l'art, 1915, établit une différence entre
les principes du classique et du baroque à travers l'histoire de l'art
La comparaison habituelle est entre Poussin et Rubens, le dessin contre la couleur, la raison contre
le sentiment, la droite contre la courbe, l'ordre contre le désordre. L'esprit classique imprègne la vie
culturelle française pour des siècles.
Le néo-classicisme, un désir d'ailleurs
Le néo-classicisme est né du voyage, de la découverte d'un ailleurs géographique au cours du
« Grand Tour », et le retour à l'Antiquité apparaît comme une forme d'exotisme.
Le néoclassicisme apparaît au cours du 18è siècle en réaction contre le rococo et l'insouciance qui y
est liée, sous l'influence de la découverte d'Herculanum (1738) et Pompéi (1748). Avec l'art de
l'antiquité, on remet à l'honneur les vertus civiques des Romains, on cherche des modèles, on
préfère la simplicité des formes de l'art gréco-romain à la complexité du rococo, on considère
l'Antiquité gréco-latine comme un modèle. Le goût nouveau se propage d'italie en Angleterre et
Allemagne par grâce aux voyageurs (le Grand Tour anglais, Goethe et l'Italie). Winckelmann le
théorise en Allemagne, David en est le représentant principal en France, Goethe en Allemagne
procède de cet esprit lorsqu'il décore les jardins de Weimar de pavillons grecs.
Il se développe à la faveur de la révolution française, qui met en avant les vertus antiques, et qui se
veut continuatrice des républiques athéniennes ou romaines, les USA le choisissent pour leurs
monuments civiques. Napoléon est pétri de références à l'Antiquité et se fait couronner empereur à
l'exemple des empereurs romains. On ajoute sous son règne la référence à l'Egypte.
Avec la Restauration, la mode s'essouffle et le romantisme s'impose peu à peu, avec des références
au Moyen-âge davantage qu'à l'Antiquité. Le néoclassicisme apparaît alors comme académique.
b) L'architecture néoclassique
Ange-Jacques Gabriel (1698-1782)
Le Petit Trianon
http://www.chateauversailles.fr/fr/122_Le_Petit_Trianon.php
Louis XV fait cadeau à Madame de Pompadour d'un petit château construit par Gabriel de 1762 à
1768, mais elle mourut avant (1764). Louis XVI l'offrira à Marie-Antoinette.
Inspiré de l'architecture palladienne. Façade ornée de pilastres, très dépouillée.
La place de la Concorde (1772)
Ordonnancement typiquement classique, avec une grande régularité, place conçue pour mettre en
valeur la statue de Louis XV.
On peut la comparer avec la place Stanislas de Nancy ou la Grand Place de Bruxelles, qui sont
baroques. Gabriel, premier architecte du roi, s'est inspiré de la colonnade du Louvre de Perrault,
préférée par Louis XIV au projet du Bernin
Place Stanislas, 1755
Hôtel de ville de Rouen, de Caen, maison de l'armateur au Havre
Théâtre de Bordeaux
Porte de Brandebourg à Berlin
Ile des Musées à Berlin
Karl Friedrich Schinkel (1781-1841)
Architecte des rois de Prusse, chargé de faire de Berlin une ville imitée de la Grèce antique, il
réalise le Gendarmenmarkt et l'île des Musées, en particulier l'Altes Museum; A Berlin, la Porte de
Brandebourg est déjà une référence à l'art de l'Antiquité, construite en 1791 en imitant les Propulées
de l'Acropole d'Athènes par Carl Langhans et couronnée du quadrige par Johann Gottfried Schadow
perspectives néoclassiques à Munich
Architecture civique aux États-Unis : le Capitole de Washington (1803-1856), Jefferson et
l'architecture palladienne, le greek revival
Le style palladien est inspiré des villas construites par Palladio sur la terre ferme de Vénétie ; la
Maison Blanche s'en inspire
Quelques peintres néo-classiques
Hubert ROBERT Vue de Rouen
1733-1808)
Passe plusieurs années à Rome, visite les fouilles de Pompéi en 1760, revient à Paris en 1765 et est
reçu à l'Académie Royale l'année suivante.
Série de vues de villes de Normandie dans la salle des Etats de l'archevêché de Rouen. Cela se
rattache à un courant pictural appelé védutisme, illustré en particulier par Canaletto et Guardi.
DAVID Le serment des Horaces, 1784
Musée du Louvre, 330 cm de haut par 425 cm de large
Peintre français 1748-1825
Prix de Rome en 1774, séjourne en Italie de 1775 à 1780. Favorable à la révolution, sa peinture
exalte les vertus civiques romaines en parallèle avec celles de la révolution française. Rallié à
Bonaparte, il peint le sacre de Napoléon Ier. A la chute de l'Empire, il doit s'exiler en Belgique.
Les frères Horace défendent Rome contre les frères Curiaces qui défendent Albe ; ils sont mariés
aux soeurs de leurs adversaires, qu'ils vont tuer. Le serment exalte les valeurs patriotiques. C'était
une commande du roi, peinte à Rome, exposé là bas, puis ramené pour être exposé au salon de Paris
en 1785. Ce fut un grand succès.
Perspective rigoureuse, construction très géométrique, structure très linéaire des hommes, courbes
pour les femmes et les enfants. Cependant, les sujets principaux sont décentrés.
INGRES ( 1780-1867)
La grande odalisque 1814
Pas vraiment orientalisme, quelques objets seulement, idée de perfection des proportions plutôt que
vraisemblance (3 vertèbres de trop et angle de la jambe droite impossible).
La belle Zélie 1806
Buste de trois quarts, visage de face, châle rouge/bleu du ciel ; composition classique, nombreuses
spirales
Exposition INGRES au Louvre
http://mini-site.louvre.fr/ingres/flash_fr.html
On peut à partir de ces exemples définir le courant néoclassique: il s'agit d'un retour à l'équilibre, à
la sobriété, à la symétrie, comme dans l'art classique du 17ème siècle. Les citations antiques sont
complétées par des éléments nouveaux, goût des ruines et de la nature, par exemple, comme chez
Hubert Robert.
La sculpture
DAVID D'ANGERS
1788-1856
Scultpteur néoclassique
Statue de Corneille
Statues du commerce et de la navigation, musée des beaux arts de Rouen
Placées à l'origine sur les quais
Les enfants apportent des produits de leur continent : fourrures pour l'Amérique, tissu pour l'Asie,
café pour l'Afrique, livre pour l'Europe
Canova (1757-1822)
Sculpteur vénitien rallié aux idées de Winckelmann, qui fait de l'Antiquité son modèle, en
particulier pour le nu. Géométrie rigoureuse
L'amour et Psyché, 1793
Les arts décoratifs néo-classiques
UNE PIECE DU MUSEE NISSIM DE CAMONDO : LE STYLE LOUIS XVI
http://www.lesartsdecoratifs.fr/fr/04museecamondo/index.html
le wedgwood anglais
Manufacture de faïence fondée en 1759 par Josiah Wedgwood. Les motifs sont inspirés de
l'Antiquité.
http://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Josiah_Wedgwood_and_Sons?uselang=fr
2. Le néo-gothique
Contexte
Après la période néo-classique, la mode est au Moyen-âge, sous l'influence des Romantiques
allemands, d'abord néo-classiques (Sturm und Drang). Le Faust de Goethe se situe au Moyen-âge
est son inspiration est chrétienne, alors que le néo-classicisme ne jure que par l'Antiquité païenne.
En France, Victor Hugo écrit Notre-Dame de Paris, qui se passe dans un Moyen-âge idéalisé,
influencé par Walter Scott. La mode est aux châteaux-forts et aux cathédrales, et on décide en
Allemagne de finir la cathédrale de Cologne.
En Angleterre, influence des romans de Walter Scott, grande vogue du néo-gothique, avec la
construction des Maisons du Parlement (Charles Barry, 1840-1852)
Les préraphaélites
Arts and Crafts et l'art nouveau
Le symbolisme : Manifeste symboliste de Jean Moréas en 1886, mouvement littéraire en réaction
contre le naturalisme de Zola.
« il faut peindre uniquement ce qu'on n'a jamais vu et qu'on ne verra jamais » Tristan Corbière.
Le symbolisme trouve en partie ses origines dans le Romantisme et son goût de l'étrange, par
exemple William Blake ou Caspar David Friedrich.
On peut considérer la création en 1848 de la confrérie pré-raphaélite comme le point de départ du
symbolisme. Le nom vient du désir de retrouver la peinture d'avant Raphaël, donc avant la
Renaissance.
En France, Gustave Moreau, Odilon Redon, Puvis de Chavannes
Pour Gustave Moreau, l'art doit puiser dans le passé et dans l'imaginaire. Il s'intéresse
particulièrement aux mythes de l'Antiquité.
Exemple : l'apparition
Moreau rejette la société du second empire, trop matérialiste, et se réfugie dans le rêve. Il apprécie
chez Léonard de Vinci les personnages énigmatiques comme la Joconde, ou les décors de rochers
ou de paysages dans le lointain, qui selon lui créent une impression de mystère. Il utilise pour cela
une large palette de couleurs, souvent des couleurs chaudes.
Influence dans le domaine musical : Pelleas et Mélisande, par exemple, opéra dont le livret est de
Maeterlinck, poète symboliste; On ne sait rien des personnages et tout l'opéra baigne dans une
ambiance mystérieuse, où la lumière joue un rôle essentiel.
3. Autres « néos »
néo-byzantin
néo-roman
Influences égyptiennes
Les obélisques
Les sphinx de St Pétersbourg
L'ameublement Empire
http://www.napoleon.org/fr/salle_lecture/articles/files/@474787.asp
http://www.louvre.fr/expositions/de-l-allemagne-1800-1939-de-friedrich-beckmann
Exposition Versailles et l'Antique