Dépistage et traitement préventif de la tuberculose dans un centre

Transcription

Dépistage et traitement préventif de la tuberculose dans un centre
INT J TUBERC LUNG DIS 10(7) : 761-767
© 2006 The Union
Dépistage et traitement préventif de la tuberculose dans un
centre de dépistage volontaire pour le VIH en Ouganda
B. Mugisha,* N. Bock,† J. Mermin,† R. M. Odeke,‡ B. Miller,† F. Adatu-Engwau,‡
R. Granich,† R. Bunnell‡
†
*AIDS Information Centre, Kampala, Uganda ; Global AIDS Program, National Centre for HIV, STD and TB Prevention,
‡
Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, Georgia, USA and Entebbe, Uganda ; National Tuberculosis and
Leprosy Program, Kampala, Uganda
_______________________________________________________________________________RESUME
CONTEXTE : Un important centre urbain d'accompagnement et de tests volontaires pour le VIH à Kampala, Ouganda.
OBJECTIF : En Afrique sub-saharienne, la tuberculose (TB) est la cause principale de morbidité et de mortalité chez les
sujets atteints d'une infection par le VIH. Un dépistage intensifié de la TB ainsi que l'utilisation d'un traitement préventif à
l'isoniazide (IPT) pour l'infection latente diminuent le fardeau de la TB, mais peu de programmes ont été mis en application
par suite d'inquiétudes en ce qui concerne la faisabilité.
SCHEMA : Evaluation rétrospective d'un programme de dépistage de la TB et de l’IPT.
RESULTATS : Sur une période de 25 mois, une évaluation a été menée chez 6305 patients chez lesquels une infection VIH
avait été récemment diagnostiquée : une maladie tuberculeuse a été décelée chez 293 d'entre eux (5%). Un traitement préventif ne venait pas en ligne de compte chez 1955 patients (37%) parce qu'ils vivaient à > 20 km, avaient une maladie VIH à un
stade avancé ou avaient été atteints antérieurement de TB. Le test cutané tuberculinique a été placé chez 2266 patients ; le
test a été lu chez 2548 (76%) ; de ceux-ci, 894 (35%) étaient positifs. Le traitement a été mis en route chez 506 personnes et
achevé chez 335 (66%).
CONCLUSION : Ce programme unique en son genre s'est avéré réalisable, a détecté une proportion élevée de TB non diagnostiquées et a traité avec succès les sujets atteints d'infection latente. L'extension de l'accessibilité à l'accompagnement et
aux tests volontaires pour le VIH ainsi qu'une collaboration entre les programmes VIH/SIDA et TB peuvent améliorer la
proportion de sujets infectés par le VIH qui peuvent bénéficier de ces programmes.
MOTS CLE : traitement préventif de la TB ; dépistage des cas suspects de TB ; VIH ; services de santé
Plus d'un quart des 42 millions de personnes infectées
par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) dans
le monde sont également infectées par Mycobacterium
tuberculosis ; 70% de cette population co-infectée vit en
Afrique sub-saharienne.1 Sans une intervention, au
moins 40% de ces personnes co-infectées développeront
une maladie tuberculeuse (TB) au cours de leur vie.2 Le
taux de mortalité de la tuberculose associée au VIH est
nettement augmenté : près de 25% des patients à bacilloscopie positive des frottis d'expectoration et 40 à 50%
des patients à bacilloscopie négative décèdent généralement de TB.3 La TB est dès lors une cause majeure de
morbidité et de mortalité chez les personnes infectées
par le VIH. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS),
se basant sur l'initiative ProTest,4 a recommandé des
activités spécifiques de collaboration dans le but de
réduire le fardeau de la TB chez les personnes infectées
par le VIH ; ces activités comportent le dépistage intensifié de la TB et l'utilisation du traitement préventif (IPT)
à l'isoniazide (INH) pour l'infection TB latente.5 Toutefois, peu de programmes ont été mis en application en
Afrique par suite d'inquiétudes en ce qui concerne leur
faisabilité et leur coût.
Le dépistage intensifié de la TB est défini comme la
recherche des symptômes et des signes objectifs de TB
chez les personnes à haut risque et comme un transfert
rapide des patients symptomatiques vers le secteur des
soins médicaux afin de réduire les délais du diagnostic
et du traitement. L'administration d'INH aux personnes
infectées par le VIH et atteintes d'une infection TB
latente peut prévenir le développement de la maladie
active.6,7 Les centres de dépistage volontaire pour le
VIH (CDV) constituent un point d'entrée pour les soins
liés au VIH, y compris des liaisons possibles avec les
services TB.
En 2001, en Ouganda, plus d'un demi million de personnes ont vécu avec le VIH/SIDA, jusqu'à la moitié
d'entre elles étant également co-infectées par M. tuberculosis.8,9 Dans le but de déterminer la faisabilité du dépistage intensifié et de l'IPT, nous avons mis en œuvre
un examen de dépistage et un programme de prévention
de la TB au Centre d'Information SIDA (AIC), le plus
important pourvoyeur de soins pour le VIH en Ouganda.
Actuellement plus de 100 000 personnes par an sont
testées dans cinq CDV/AIC indépendants et dans plus de
80 CDV basés dans des unités de santé soutenues par
l'AIC dans 31 districts. Le programme de dépistage et de
prévention de la TB a été mis en route en 2001 à la filiale de Kampala de l'AIC. Cet article expose les résultats de cette collaboration des programmes TB-VIH.
METHODES
Contexte
La filiale de Kampala de l'AIC est un CDV indépen-
Auteur pour correspondance Naomi Bock, MD, Centers for Disease Control and Prevention, 1600 Clifton Road, Mail Stop E-04,
Atlanta, GA 30333, USA. Tél : (+1) 404 639 8134. Fax : (+1) 404 639 6499. e-mail : [email protected]
[Traduction de l'article «Tuberculosis case finding and preventive therapy in an HIV voluntary counseling and testing center in
Uganda» Int J Tuberc Lung Dis 2006; 10(07) : 751-767.]
2 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
1 Patient avec
statut VIH connu
2
Antécédents
et examen
physique
3 3
Symptômes
Symptômes et
et signes
signes
objectifs
objectifs de
de TB
TB
4
Remplir la carte de
repérage ; prescrire 3
examens
d'expectoration pour
BAAR ; une semaine
d'antibiotiques ; CXR
seulement en l'absence
d'amélioration et avec
bacilloscopie (-)
OUI
NON
10 Présence
d'une des caractéristiques
suivantes:
• SIDA terminal
• jaunisse/maladie hépatique antérieure
• antécédents de traitement TB ou de
LTBI
• intolérance antérieure à l'isoniazide
• longue distance vers l'AIC
• autres*
5 TB active
diagnostiqué ?
6
Référer au NTLP.
Assurer le transport
NON
OUI
7
Maladie guérie
NON
8
OUI
NON
Pas d'IPT
d'IPT
Pas
11
Placer le TCT
Conseiller pour l'IPT
12
12
Symptômes et signes
objectifs de TB
extra-pulmonaire ?
13
OUI
9
Réévaluer pour la TB
active et les autres
affections non-TB, comme
dans l'encart 4. Si la
maladie n'est pas guérie,
référer à l'hôpital. Continuer
les soins, les conseils
et le soutien VI
NON
Accepte l'IPT ?
NON
19
OUI
20 20
16
15 Le
OUI
Rechercher une TB active (voir
encart 4). Arrêter l'IPT si la TB
active n'a pas été exclue après
2 semaines
NON
Continuer l'IPT
Schéma du dosage quotidien
d'IPT chez les adultes
Dosage
17
Le patient a un des signes
suivants:
• jaunisse
• éruption due au médicament
• effets collatéraux intolérables
• SIDA terminal
A deux reprises, retard ≥ 2
semaines pour les rendez vous.†
NON
OUI
14
TCT >5 mm ?
Non-enceinte ou non
allaitante ? Capable de se
passer d'alcool pendant l'IPT
patient a de la
fièvre ou tousse depuis
> 2 semaines ?
TB active
exclue ?
OUI
18 Arrêter
l'IPT
• Référer à un clinicien pour une
évaluation
300 mg INH
25 mg pyridoxine
NON
21 A terminé 9
mois d'IPT en au
moins une période
de 12 mois.
Figure 1 Protocole du programme de dépistage intensifié des cas de tuberculose et du programme de l'IPT. *Les femmes qui allaitent et/ou qui sont enceintes et les personnes gravement atteintes de n'importe quelle infection aiguë devraient être informées de se
†
représenter lorsqu'elles seront éligibles pour le programme. Le traitement des patients qui ont une excuse valable pour manquer un
rendez-vous devrait être poursuivi. TB = tuberculose ; BAAR = bacilles acido-résistants ; Abx = antibiotiques ; CXR = cliché thoracique ;
NTLP = Programme National de Tuberculose et de Lèpre ; IPT = traitement préventif à l'isoniazide ; SIDA = syndrome d'immunodéficience acquise.
Programme intégré des soins pour le VIH et la TB
dant doté des services conjoints tels les services cliniques pour infections sexuellement transmises, le traitement de la maladie TB et de l'infection TB ainsi
qu'un club post-test assurant un soutien psychosocial
continu aux personnes atteintes par le VIH. Chaque
année, dans ce centre, plus de 200 000 personnes bénéficient du test VIH, environ la moitié d'entre elles y
venant pour un premier test. Nous avons eu recours à
une base de données extraite de la base de données du
dispensaire AIC qui n'a pas inclus des identificateurs
individuels pour cette évaluation. Le travail a été classé
comme «non-recherche» lors de la révision à l'US
Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
Procédés
Les patients qui ont recours aux services de l'AIC bénéficient d'un accompagnement individuel avant et après
le test par des conseillers formés. Le test VIH est réalisé sur place selon un algorithme standard par étapes et
les patients reçoivent les résultats du VIH dans l'heure.
Pour les patients chez qui on a diagnostiqué une infection VIH, l'accompagnement post-test porte sur la réduction du risque de transmission, comporte des conseils
positifs de vie, la possibilité d'avoir sur place le jour
même un dépistage TB et une évaluation pour l'IPT par
un agent médical (Figure 1). A partir d'avril 2002, les
patients du CDV chez qui les résultats du VIH sont
négatifs mais qui se plaignent de symptômes de TB
active peuvent être référés pour dépistage de la maladie
TB (mais pas pour IPT), à la discrétion des conseillers.
Le clinicien dépiste la maladie TB grâce à une liste
de contrôle comportant les symptômes (par exemple
toux, hémoptysie, fièvre, perte de poids, et sueurs nocturnes), l'examen physique et pour ceux dont les symptômes sont suggestifs d'une tuberculose pulmonaire
(TP) l'examen microscopique réalisé sur place de trois
échantillons d'expectorations pour recherche de bacilles
acido-résistants (BAAR) sur les frottis. Les personnes
symptomatiques avec trois résultats négatifs pour les
BAAR de frottis d'expectoration reçoivent une cure
d'antibiotiques par voie orale, soit de l'amoxicilline,
soit du cotrimoxazole et ceux dont l'état ne s'améliore
pas subissent un cliché thoracique (CXRT). Ils sont soit
diagnostiqués comme tuberculeux à bacilloscopie négative (si le CXR est compatible avec une TB) soit
référés à l'hôpital pour une évaluation complémentaire.10 Le CXR ne fait pas partie du processus de dépistage chez les patients asymptomatiques.11
Chez les patients infectés par le VIH où la TB active a été exclue, l'éligibilité pour l'IPT est déterminée
après s'être assuré que le patient n'a pas été traité antérieurement pour TB, qu'il ne réside pas à plus de 20 km
du dispensaire, qu'il n'est pas à un stade terminal du
SIDA, qu'il n'a pas d'antécédents d'hépatite ou de
convulsions et s'il s'agit d'un consommateur d'alcool,
qu'il consent à arrêter de boire pendant le traitement.
On propose alors le TST selon la technique de
Mantoux aux patients potentiellement éligibles pour
l'IPT. On leur demande de revenir 48 à 72 h plus tard
pour la lecture du TST. Le résultat est considéré
comme positif lorsque l'induration est ≥ 5 mm et l'on
3
propose à ces patients une prise quotidienne autoadministrée de 300 mg d'INH et de 25 mg de pyridoxine pendant 9 mois. On explique aux patients les
symptômes collatéraux du médicament et ceux de la
TB active et on leur demande de se présenter au dispensaire si ces symptômes apparaissent. Ils reçoivent
30 comprimés dans une boite résistante et sont informés de revenir à l'AIC dans un mois ; les visites suivantes au dispensaire sont programmées à 3, 5 et 7
mois. A chacune de ces visites, les patients reviennent
avec leur boite de médicaments et on note le décompte
des comprimés restants. On recherche les symptômes
des effets collatéraux des médicaments et de la TB
active. Ceux qui supportent bien le traitement reçoivent
60 comprimés supplémentaires d'INH et de pyridoxine
lors de chaque visite consécutive.
Résultats et analyse des données
Les données recueillies en routine ont été utilisées pour
calculer les niveaux d'éligibilité de l'IPT, le consentement et l'adhésion aussi bien que la prévalence de la
maladie TB chez les patients du CDV. La prévalence de
la maladie a été déterminée pour deux groupes de patients qui ont été soumis au dépistage TB à l'AIC : ceux
chez qui on a décelé une nouvelle infection VIH et ceux
dont les tests VIH ont été négatifs mais qui ont été
considérés comme atteints de TB par leur conseiller.
Les doses d'INH prises par le patient (définies
comme le nombre de comprimés donnés lors de la visite
précédente diminué du nombre de comprimés restant
dans la boite) sont notées à chaque visite et additionnées
pour l'ensemble des visites. Les patients sont considérés
comme ayant terminé le traitement s'ils se sont présentés
à la consultation du dispensaire aux mois 1, 3, 5 et 7
pour obtenir le réapprovisionnement en médicaments et
si le nombre total de doses d'INH noté atteint au moins
180. Ceci parce que peu de patients viennent au dispensaire à la fin des 9 mois quand le décompte final pourrait
comporter l'entièreté des 270 doses.
On a utilisé le test χ2 ou le test exact de Fisher pour
l'analyse statistique des comparaisons entre les fréquences des groupes. L'analyse a été réalisée grâce à
Epi Info 6.04 vd12 et au logiciel SAS (SAS Institute,
Cary, NC, USA).
RESULTATS
Entre le 1er septembre 2001 et le 30 septembre 2003,
27% des sujets testés pour la première fois ont été
diagnostiqués comme séropositifs pour le VIH. Au
cours de cette période de 25 mois, on a référé 7453
nouveaux patients séropositifs pour le VIH vers les
services de dépistage et de prévention de TB ; 6305 ont
été soumis à une évaluation médicale et 293 (5%)
étaient atteints de la maladie TB (Tableau).
Entre le 1er avril 2002 et le 30 septembre 2003, on a
référé 243 patients du CDV dont les tests VIH étaient
négatifs parce que leurs conseillers suspectaient une
maladie TB ; celle-ci a été diagnostiquée chez 52
(21%) d'entre eux (Tableau).
A la Figure 2, sont repris les résultats des 7453 patients du CDV, séropositifs pour le VIH et référés pour
4 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
Tableau Dépistage des cas de TB au CDV pour le VIH du Centre d'Information SIDA, Kampala, 2001-2003
Nouveaux patients
séropositifs pour le VIH
soumis à une évaluation clinique
(n = 6305)
Avec maladie TB
Sans maladie
(n = 293)
TB (n = 6012)
%
%
Caractéristiques
Sexe féminin
Age, médiane en années, (extrêmes)
Traitement antérieur pour TB
Actuellement au travail
Habitant en ville
Formation au delà des primaires
Type de TB
Pulmonaire, bacilloscopie (+)
Pulmonaire, bacilloscopie (-)
Extra-pulmonaire
52
32 (16-70)
†
13
32
80
42
†
65
†
31
4
Patients
séronégatifs pour le VIH
suspectés de TB par les conseillers
(n = 243)
Avec maladie TB
Sans maladie TB
(n = 52)
(n = 191)
%
%
36*
33 (13-77)
12
38*
77
51*
39
29 (15-54)
23
33
76
43
45
30 (13-78)
21
38
75
58*
-
81
15
4
-
* P<0,05, différence entre ceux avec et ceux sans maladie TB.
†
P<0,03, différence entre ceux avec et ceux sans infection VIH. .
TB = tuberculose ; SIDA = syndrome d'immunodéficience acquise ; VIH = virus de l'immunodéficience humaine ; CDV = centre de dépistage volontaire.
dépistage TB et évaluation pour l'IPT ; 1148 (15%) ont
refusé l'évaluation clinique et parmi ceux qui l'ont acceptée, 293 (5%) ont été diagnostiqués comme tuberculeux,
1903 ont reçu une cure d'antibiotiques à large spectre et
691 ne se sont pas représentés pour le suivi. Dès lors,
5321 patients ont été soumis à l'évaluation pour l'IPT et
parmi eux 1955 (37%) ont été exclus du programme
TST. Les trois raisons principales de l'exclusion, justifiant plus de 90% de celles-ci, (de nombreux patients
avaient plus d'une raison d'être exclus) étaient 1) le fait
d'habiter à plus de 20 km du dispensaire (45%) ; 2) d'être
arrivé au stade IV de la maladie VIH (30%) ; et 3)
d'avoir des antécédents de TB (27%).
Au cours de la période de 25 mois, 3366 patients
ont été soumis au TST et 2548 (76%) sont revenus
pour sa lecture. Parmi ceux qui sont revenus, 894
Etapes du programme IPT
Référés pour dépistage TB
n=7453
Evaluation médicale pour
maladie TB
n=6305
Evaluation pour l'éligibilité IPT
n=5321
Placement du TCT
n=3366
Raisons de ne pas
poursuivre le programme
Ne se sont pas rendus
dans le secteur médical
n=1148
Maladie TB
n=293
(35%) avaient un résultat positif du TST et 599 (67%)
ont commencé l'IPT ; d'autres patients chez qui le TST
était positif, soit n'avaient pas continué à prendre leurs
médicaments soit avaient eu un TST au cours de
l'éva.luation pour la maladie TB et avaient été diagnostiqués comme tuberculeux.
A la date du 30 septembre 2003, 506 patients sous
IPT avaient fait partie du programme depuis un temps
suffisant pour évaluer un résultat ; 335 (66%) avaient
terminé le traitement et 93 des 599 patients qui avaient
commencé étaient encore sous traitement. L'âge médian (32 ans), le sexe (66% féminin), le statut d'emploi
(55% sans emploi) et le niveau d'éducation (57% avec
un niveau donné d'écolage (au-delà des primaires) de
ceux qui avaient achevé le traitement n'étaient pas
significativement différents de ceux qui ne l'avaient pas
achevé. A la Figure 3 apparaissent les raisons pour
lesquelles les 171 autres n'ont pas achevé leur traitement ; 83 (48%) ont été perdus de vue, 19 (11%) ont
déménagé et 19 (11%) ont refusé de continuer. Seuls
10 patients (6%) ont arrêté le traitement en raison d'ef-
Ne sont pas revenus
après l'antibiothérapie
d'essai
n=691
Ne sont pas revenus
pour la lecture
n=818
Raisons de non-achèvement
Non
achèvement
34%
Exclus
n=1955
de l'IPT
Achèvement
Achèvement
66%
66%
Maladie TB 5 (3%)
Grossesse: 8 (5%)
Lecture du TCT
n=2548
TCT négatif
n=1654
TCT positif
n=894
Perdus, refus,
remis à plus tard
n=296
Décès 12 (7%)
Effets collatéraux 10 (6%)
Ont déménagé 26 (15%)
Ont refusé 26 (15%)
Ont commencé l'IPT
n=599
Résultats des patients du VCT infectés par le VIH
er
référés à l'AIC pour évaluation pour IPT, 1 septembre 200130 septembre 2003. VIH = virus de l'immunodéficience humaine ; AIC = Centre d'information SIDA ; IPT = Traitement
préventif à l'isoniazide ; TB = tuberculose ; TCT = test cutané
tuberculinique.
Perdus de
vue 83
(49%)
Figure 2
Résultats chez les 506 patients IPT dont le résultat
est connu, Centre d'Information du SIDA de Kampala, Ouganda. IPT = Traitement préventif à l'isoniazide ; TB = tuberculose ; SIDA = syndrome d'immunodéficience acquise.
Figure 3
Programme intégré des soins pour le VIH et la TB
fets indésirables. Parmi les cinq personnes qui ont développé une maladie TB pendant le programme, quatre se
sont présentées avec des symptômes de maladie 5 à 8
mois après le début de l'IPT ; un patient s'est présenté
avec de la toux à la visite du premier mois. Tous ont
commencé le traitement standard avec quatre médicaments. Trois ont achevé le traitement TB, un est décédé
3 semaines après avoir commencé le traitement TB et
un autre a été perdu de vue.
DISCUSSION
Au niveau mondial, on porte une attention grandissante
à la fourniture de services pour les personnes atteintes à
la fois par la TB et le VIH. Nous avons trouvé que la
mise en œuvre d'un programme commun TB-VIH dans
un CDV important de Kampala était réalisable et bénéfique pour la collectivité et pour les patients à plusieurs
égards : découvrir et traiter parmi les personnes qui
fréquentent le CDV des cas de TB méconnue ; traiter
avec succès grâce à l'IPT les personnes co-infectées ; et
lorsque c'est nécessaire, référer les patients pour une
évaluation médicale plus approfondie. Le programme
de dépistage de la TB et de l'IPT mis en œuvre à l'AIC
résulte d'un effort de collaboration entre le Programme
National SIDA, le Programme National de la Tuberculose et de la Lèpre, le CDC et l'AIC. Nous avons élaboré un programme de formation commun pour les
conseillers du CDV et le personnel clinique de l'AIC en
ce qui concerne le diagnostic et le traitement de la
maladie et de l'infection TB. En considérant l'IPT
comme faisant partie des soins continus assurés aux
patients infectés par le VIH à l'AIC, mais en dehors du
programme TB, nous avons évité de détourner des
ressources du programme TB qui pouvaient être consacrées au diagnostic et au traitement de cas.
Nous avons constaté une prévalence élevée de la
maladie TB parmi les patients nouvellement diagnostiqués comme séropositifs pour le VIH (5%) ; cette donnée est compatible avec les rapports en provenance de
Haïti et d'Afrique du Sud concernant les programmes
de dépistage intensifié dans les CDV et pour la prévention de la transmission VIH de la mère à l'enfant.13,14
Une récente enquête dans les ménages portant sur le
dépistage de la TB active dans les faubourgs de Kampala a montré que 47% des cas prévalents de TB
n'avaient pas encore été détectés en routine par le système des soins de santé.15 Le dépistage intensifié des
cas de TB dans un CDV peut apporter une aide pour
éviter de tels retards et devrait fonctionner en routine
dans tous les CDV, même ceux qui ne peuvent pas
soutenir un programme IPT.
Une méta-analyse récente a montré que chez les personnes infectées par le VIH et dont les résultats du TST
étaient positifs, l'IPT pouvait réduire le risque de développement de la maladie TB de 62% pendant au moins 2
à 3 ans.16 L'organisation d'un programme IPT dans un
CDV avec un programme intensifié de dépistage de la
TB permet d'accéder aux personnes infectées par le VIH
qui ont subi un examen de dépistage pour la TB active.
Les résultats de l'adhésion pour les deux premières années du programme IPT de l'AIC ont été plus favorables
que ceux qui ont été rapportés ailleurs.17 Les raisons de
5
cette meilleure adhésion ne sont pas claires bien que
l'AIC joue, à côté de son activité dispensaire, le rôle d'un
centre de la collectivité et que les patients peuvent avoir
eu envie de revenir au centre pour d'autres services.
Nous n'avons donné aucun conseil spécifique concernant
l'adhésion. Des critères plus rigoureux d'éligibilité tel le
fait de résider à proximité du dispensaire, peuvent également avoir contribué à des taux plus élevés d'achèvement du traitement.
L'utilisation du TST pour repérer ceux qui seraient
susceptibles de bénéficier de l'IPT exige un personnel
entraîné, des procédés d'approvisionnement dignes de
confiance et une chaîne du froid. Vu que le TST n'est
pas utilisé en routine en Ouganda, le programme de
l'AIC a dû élaborer son propre programme de formation et de contrôle de qualité. Toutefois, l'emploi du
TST pour repérer les patients éligibles pour l'IPT a
fortement réduit la proportion de personnes qui auraient peu bénéficié du traitement car leurs résultats du
TST étaient négatifs.16 En Ouganda, l'AIC continue à
utiliser le TST au fur et à mesure de sa décentralisation
vers des sites supplémentaires. Néanmoins, le recours
au TST pour déterminer l'éligibilité pour l'IPT peut ne
pas être réalisable dans de nombreux contextes à ressources limitées et il n'est pas nécessaire dans les contextes où la prévalence de l'infection TB dépasse 30%.2
Le point faible le plus important du programme IPT
est que plus d'un tiers des patients qui ont achevé leur
évaluation médicale n'ont pas été éligibles pour l'IPT.
Toutefois, des patients similaires pourraient devenir
éligibles dans le futur. Pour ceux qui ont été exclus
parce qu'ils habitaient trop loin du dispensaire de Kampala, des centres plus décentralisés de dépistage et IPT
leur permettront d'avoir accès au traitement. Ceux qui
ont été exclus parce qu'ils étaient déjà à un stade avancé de la maladie VIH au moment du test VIH bénéficieront d'un accès élargi au CDV et d'une mobilisation
de la collectivité pour augmenter le recours au CDV et
amener ces patients à se faire soigner plus tôt, à un
moment où ils pourraient bénéficier de soins de santé
préventifs. Finalement en ce qui concerne ceux qui ont
été exclus en raison d'antécédents de TB, une étude
récente a montré que les personnes infectées par le VIH
qui bénéficient d'une prophylaxie secondaire à l'INH
sont significativement moins susceptibles de faire une
rechute de la maladie TB.18 Une fois son efficacité
ultérieurement démontrée, la prophylaxie secondaire
pourrait faire partie de l'ensemble des soins pour les
personnes qui vivent avec l'infection VIH.
Un des plus gros problème concernant l'administration d'IPT à des sujets infectés par le VIH est qu'ils
pourraient développer une maladie TB pendant la monothérapie à l'INH avec une probabilité plus importante
de développer une résistance acquise à l'égard de
l'INH. Ceci peut se produire si la maladie TB n'a pas
été mise en évidence lors du dépistage initial ou si les
patients n'adhèrent pas d'emblée à l'IPT et ne commencent à prendre leur médicament que lorsqu'ils développent des symptômes de maladie TB.16 Nous avons
diagnostiqué une maladie TB chez cinq patients sous
IPT. Un patient s'est présenté quatre semaines après
avoir commencé l'IPT et il peut s'agir d'un cas mécon-
6 The International Journal of Tuberculosis and Lung Disease
nu lors du dépistage. Les quatre autres avaient été traités pendant plusieurs mois, n'avaient signalé aucun
symptôme lors des évaluations cliniques antérieures et
le décompte des médicaments indiquait qu'ils avaient
pris au moins 80% des médicaments. La prévalence de
la résistance à l'INH en Ouganda était de 6,7% dans les
cas non traités précédemment sous surveillance depuis
1996-199719 ainsi donc, cette petite fraction des patients sous IPT développeront la maladie parce que
chez eux, on ne s'attend pas à ce que l'IPT soit efficient. En raison de la difficulté du diagnostic de TB
chez les personnes séropositives pour le VIH et de la
non-adhésion de certains patients, un petit nombre de
cas de tuberculose active surviendront même en l'absence de résistance à l'égard de l'INH.
CONCLUSION
Nous avons pu de mettre en œuvre avec succès un
programme de dépistage TB et d'IPT dans un vaste
programme de CDV en Afrique ; ce programme s'est
répandu depuis à tous les autres sites de l'AIC en Ouganda. Bien que ces données soient encourageantes,
puisque les programmes IPT traitent un plus grand
nombre de personnes co-infectées, maintenir des niveaux élevés d'adhésion, de dépistage soigneux de la
maladie TB active et de fourniture régulière des stocks
d'INH restera un défi. Puisque l'accès aux CDV se
répand comme une partie des nouvelles initiatives de
soins VIH/SIDA, il devrait être utilisé comme un point
d'accès aux soins à la fois pour la TB et le VIH, en
prenant en compte sérieusement la mise à disposition
de l'IPT aussi bien que le dépistage de la TB dans le
contexte des soins du VIH. La collaboration entre les
programmes TB et VIH/SIDA est essentielle.
Remerciements
Nous remerçions tous les membres du personnel ainsi que les
patients, spécialement R Downing et T Mujurizi pour leur
soutien au laboratoire, R Nakityo pour la prise en charge des
données ainsi que R Habineza, S Namond et J Harriet pour
leur soutien logistique.
Ce projet a été soutenu par l'AIDS Information Center,
Uganda, les Centers for Disease Control and Prevention
(CDC) Atlanta, GA et l'United States Agency for International Development, Washington, DC, USA.
Les observations et conclusions présentées dans cet article sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement les vues du CDC.
Références
1 Corbett E L, Watt C, Walker N, et al. The growing burden of tuberculosis: global trends and interactions with
the HIV epidemic. Arch Intern Med 2003; 163: 10091021.
2 World Health Organization. Preventive therapy against
tuberculosis in people living with HIV. Weekly Epidemiol Rec 1999; 46: 385-398.
3 Stop TB Partnership. Working Group on TB-HIV. Scien
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
tific Panel. Guidelines for implementing collaborative TB
and HIV programme activities, Geneva, Switzerland:
World Health Organization, 2003.
Godfrey-Fausett P, Maher D, Mukadi YD, Nunn P,
Perriens J, Raviglione M. How human immunodeficiency
virus voluntary testing can contribute to tuberculosis control. Bull World Health Organ 2002; 80: 939-945.
Stop TB Department and Department of HIV/AIDS.
Interim policy on collaborative TB-HIV activities. Geneva, Switzerland: World Health Organization, 2004.
Mwinga A, Hosp M, Godfrey-Faussett P, et al. Twice
weekly tuberculosis preventive therapy in HIV infection
in Zambia. AIDS 1998; 12: 2447-2457.
Wilkinson D, Squire S B, Garner P. Effect of preventive
treatment for tuberculosis in adults infected with HIV:
systematic review of randomized placebo controlled trials. BMJ 1998; 317: 625-629.
Joint United Nations Programme on HIV/AIDS. 2004
Report on the Global AIDS Epidemic. Geneva, Switzerland: UNAIDS, 2004.
Aisu T, Raviglione M C, van Praag E, et al. Preventive
chemotherapy for HIV associated tuberculosis in
Uganda: an operational assessment at a voluntary counseling and testing centre. AIDS 1995; 9:2 67-273.
Ministry of Health – National Tuberculosis and Leprosy
Program. Tuberculosis Control & Community-based
DOTS as an essential component of District Health Systems. Guidelines. Kampala, Uganda: Ministry of Health,
2002.
Masomaneotsile B, Talbot E A, Moeti T L, et al. Value
of chest radiography in a tuberculosis prevention programme for HIV-infected people, Botswana. Lancet
2003; 362: 1551-1552.
Dean A G, Dean J A, Coulombier D, et al. Epi Info,
Version 6.04: a word processing, database and statistics
program for epidemiology on microcomputers. Atlanta,
GA: Centers for Disease Control and Prevention, 1994.
Nachega J, Coetzee J, Adendorff T, et al. Tuberculosis
active case finding in a mother-to-child HIV transmission
prevention programme in Soweto, South Africa. AIDS
2003; 17: 1398-1400.
Burgess A L, Fitzgerald D W, Severe P, et al. Integration
of tuberculosis screening at an HIV voluntary counseling
and testing centre in Haiti. AIDS 2001; 15: 1875-1879.
Guwatudde D, Zalwango S, Kamya M R, et al. Burden of
tuberculosis in Kampala, Uganda. Bull World Health Organ 2003; 81: 799-805.
Woldehanna S, Volmink J. Treatment of latent tuberculosis infection in HIV infected persons. Cochrane Database
Syst Rev 2004; 1: CD000171.
World Health Organization. ProTEST Lessons Learned
Workshop. Durban, South Africa, 3-6 February 2003.
Geneva,
Switzerland:
WHO,
2003.
http://www.who.int/docstore/gtb/TBHIV/Durban_feb03./
index.htm Accessed 20 March 2006.
Churchyard G J, Fielding K, Charalambous S, et al.
Efficacy of secondary isoniazid preventive therapy
among HIV-infected Southern Africans: time to change
policy? AIDS 2003; 17: 2063-2070.
The WHO/IUATLD Global Project on Anti-tuberculosis
Drug Resistance Surveillance. Anti-tuberculosis drug resistance in the world. Report no. 2. Prevalence and trends.
Geneva, Switzerland: World Health Organization, 2000.