Charles Caruso - Le Compagnon-cuisinier

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Charles Caruso - Le Compagnon-cuisinier
Le Compagnon-Cuisinier
Art culinaire et art de recevoir
Dans la même collection
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Come dire “Ti Amo” in tre portate
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Charles Caruso
Le Compagnon-Cuisinier
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ISBN 978-2-36580-002-0
Ce livre est dédié à mon Parrain « Agenais le Bien Aimé »
Compagnon Cuisinier des Devoirs Unis de L’Union
Compagnonnique des Compagnons du Tour de France de
la Cayenne de Nice.
Le compas et l’équerre, symboles du Compagnon–Cuisinier
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Introduction
Définition de Compagnon tirée du Littré :
Autrefois, garçon qui, ayant fait son apprentissage en son
métier et n’ayant pas les moyens de se faire passer Maître,
allait servir et travailler chez les autres.
Définition de Cuisinier toujours tirée du Littré :
Celui dont la fonction est de faire la cuisine ; personne qui
sait faire la cuisine.
La définition qui nous intéresse :
Le Compagnon est celui qui partage son pain avec son
Frère de même métier.
Ce terme n’apparaît dans la langue française que vers 1080
du latin populaire companio-onis « celui qui mange son pain
avec ».
Il ne peut-être donné qu’à celui qui a fait son Tour de
France, ce travailleur est un modèle et ce titre n’est donné
qu’après avoir présenté son Chef-d’œuvre. Une cérémonie
initiatique secrète l’élève à la dignité de Compagnon. Il
reçoit alors les ‘couleurs’ et sa canne.
Sur le plan humain, le terme compagnonnage apparût
en France en 1719 et évoque l’entraide, la protection,
l’éducation, la transmission des connaissances uniquement
et exclusivement entre ses membres. Sa devise est :
« Travailler toujours mieux. Enseigner le métier.
Aider et soutenir ses Frères »
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L’historique
Le compagnonnage a toujours été et reste divisé en
Rites, placés chacun sous le ‘patronage’ d’un personnage
historique ou mythique, tous associés à la construction du
Temple de Jérusalem et par ce fait, cristallisent la triple
origine : « Biblique, Chevaleresque et Monastique ».
Biblique, car tous les Rituels se réfèrent à la Bible (Livres des
Rois) et il n’y a qu’à prendre pour preuve les éléments de
la Passion qui interviennent lors des ‘initiations’ et autres
cérémonies.
Chevaleresque, à l’image de l’Ordre du Temple, l’Ordre de
la Toison d’Or, ces derniers étant de grands constructeurs,
Châteaux, Forteresses, Églises.
Monastique, avec comme modèle les Cisterciens, ces grands
bâtisseurs.
Les Compagnons reconnaissent comme des Maîtres dans la
science du ‘Trait’ et de l’Art de bâtir (en 1151 il y avait 500
Abbayes et au xvie siècle plus de 1800) et si les moines étaient
les Maîtres d’œuvres, il n’en demeure pas moins qu’ils
contribuèrent grandement à la formation des Compagnons.
Pas de science sans conscience et c’est ainsi que les Compagnons
ont construit les cathédrales.
Fixer une date précise à la naissance du compagnonnage
nécessiterait de lui donner une définition précise qu’il n’a
jamais eu.
Le Compagnonnage désigne principalement des
associations de métiers qui existent depuis la plus haute
antiquité.
Il existait déjà au temps de la construction des cathédrales,
des signes et contre-signes particuliers aux compagnons
qui sont reconnaissables, ces compagnons voyageaient
dans tous les pays et principalement en France.
C’est peut-être de cette époque que datent les dénominations
au sein des compagnons de Pays (ouvrier pratiquant son
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métier sur le sol en atelier) et Coterie (ouvrier pratiquant
son métier en hauteur, sur les échafaudages).
Les gens du pays, ne souhaitant pas prendre de risques,
auraient fait venir des gens de la côte pour réaliser les
travaux dangereux sur les échafaudages.
Le titre de Compagnon est attribué à l’ouvrier qui, après avoir
rempli son temps d’apprentissage et s’être perfectionné sur
le tour de France, et réalisé un travail appelé communément
un ‘chef-d’œuvre’.
Il est dit travail de « Réception » : la réception est une
cérémonie qui donnera à l’aspirant le titre de compagnon.
Il poursuivra sa formation auprès de divers patrons et
« pays » ou « coteries » qu’il côtoiera sur le tour de France.
Au cours de son périple, il trouvera partout une maison de
compagnons, où sont situées Cayenne et Chambres.
Cette maison est gérée par une femme : « Dame économe »,
« Dame Hôtesse » ou « Mère » en fonction du degré
d’initiation reçue par cette dernière.
Chambres et Cayenne font référence, suivant les Métiers,
au lieu où se réunissent les Compagnons de chaque Métier.
Au sein des maisons, on trouve le premier aspirant qui
seconde la mère en cas d’absence et le Rouleur ou Rôleur,
Compagnon itinérant qui autrefois était chargé de
l’embauche et qui, maintenant, seconde le Prévost, tout en
faisant souvent office de Maître des Cérémonies.
Dans l’esprit du public, le Compagnonnage demeure
mystérieux, beaucoup de légendes courent sur le compte
de cette organisation humaine avant tout, certainement
la plus ancienne ayant subsistée jusqu’à notre époque, en
traversant les régimes et les empires, les royaumes et les
différentes républiques.
Au fil du temps et afin d’écarter le faux du vrai je vais
essayer de mieux vous faire connaître le trajet pour devenir
peut-être un jour Compagnon du Devoir.
De tout temps, il s’est trouvé parmi les ouvriers une ‘élite’
qui a compris la nécessité de se réunir, sans dépendance et
de s’instruire et de parvenir à la recherche de la perfection.
Cette perfection est-elle de ce monde ?
Certains font naître cet ordre en Egypte au temps de la
construction des pyramides, d’autres des collèges grecs où
Pythagore enseignait la Géométrie, plus près de nous au
temps des croisades avec les Templiers qui avaient amené
avec eux des ouvriers ‘bâtisseurs’ la truelle dans une main
et l’épée dans l’autre.
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La Tradition fait remonter l’organisation du travail des
premiers compagnons à la construction du Temple du roi
Salomon, à Jérusalem.
Une ‘tragédie’ de chantier, le meurtre du Maître d’œuvre
a divisé en plusieurs branches cette organisation ouvrière :
1. Les Enfants du Rite de Salomon, Devoir de Liberté
avec les Tailleurs de pierre dit Compagnon-étrangers,
les Menuisiers du Devoir de Liberté, les Gavots tout
comme les Serruriers, les Tonneliers-Foudriers du
Devoir de Liberté et enfin les Charpentiers du Devoir
appelés les Indiens.
2. Le Rite du Père Soubise, continuateur avec les
Tailleurs de pierre du Saint Devoir de Dieu et des
Honnêtes Compagnons avec les Charpentiers
du Devoir, Bons-Drilles du Tour de France, les
Couvreurs du Devoir et les Plâtriers-Stucateurs du
Devoir.
3. Le Rite de Maître Jacques, les Compagnons du
Devoir avec les Tailleurs de pierre, les Serruriers, les
Tanneurs du Devoir, les Cordiers, les Vanniers, les
Chapeliers, les Blanchets-Chamoiseurs, les Fondeurs,
les Épingliers, les Forgerons, les Tourneurs, les
Vitriers, les Selliers, les Poêliers, les Doleurs, les
Couteliers, les Ferblantiers, les Bourreliers, les
Charrons, les Cloutiers, les Toiliers, les MaréchauxFerrants, les Cordonniers, les Bottiers, les Boulangers,
les Tisserants, les Ferrandiniers, les Sabotiers et les
Potiers.
4. Point de Cuisiniers jusqu’à la création par Agricol
Perdiguier d’unir et de fédérer les ouvriers de tous
les Rites dans une unique fédération pourvue d’un
Rituel unifié, respectant la liberté de conscience et
ce rêve vit le jour, l’année ou Agricol Perdiguier
mourut en 1875.
5. L’Union Compagnonnique des Compagnons du
Tour de France des Devoirs Unis fut donc créée en
1889.
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∴
Lucien Blanc, dit « Provençal le Résolu », crée en 1889
l’« Union compagnonnique des devoirs unis » né le 20
août 1823 à Menerbes dans le Vaucluse, fréquenta l’école
pendant une année puis il entra en apprentissage du métier
de Bourrelier.
Il voyagea pendant 7 ans et travailla dans les principales
villes : Lyon, Paris, Nantes, Bordeaux et Marseille etc. de
façon à former par son voyage un ‘Pentagramme’ ou étoile
à 5 branches. Je cite : « L’effort de ma vie disait-il, ont été
de fusionner les Rites et les Devoirs et cette fusion seule
peuvent sauver de la mort le Compagnonnage ».
L’Union Compagnonnique des Compagnons du Tour de
France des Devoirs Unis que j’ai fondée et que je préside à
pour but tout en gardant les vraies et saines valeurs de la
Tradition de rajeunir et de réformer ses usages.
Elle se fait plus accueillante, ne les soumet plus à des dures
épreuves corporelles, mais exige d’eux, la compétence
professionnelle, des garanties d’honneur, d’honnêteté, de
probité et de vertu.
« Lucien Blanc se refusait à admettre que le Compagnonnage
eut des relations avec la Franc-Maçonnerie, cette dernière
citée n’a de commun que des lointaines origines, elle n’était
pas autre chose que le Compagnonnage des Ouvriers
Maçons ».
Comme toute société, elle avait ses Rites et ses Signes et
Contre-Signes qui permettaient aux travailleurs errants de
ville en ville de se reconnaître entre eux. Chacun sait du
reste qu’elle fut autrefois une belle association ouvrière
d’assistance mutuelle et de fraternité… très différente de ce
qu’elle est devenue aujourd’hui.
L’œuvre de ce Compagnon a été considérable, il a donné
sa vie à cette vieille société d’ouvriers traditionalistes,
éclairée, fraternelle, qui a fait plus qu’on ne le croit pour le
progrès social, pour les caisses de retraite, caisse mutuelle
de secours, orphelinat compagnonnique comme pour les
progrès professionnels.
Cette association repose sur une conception humaniste du
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travail. L'homme est le créateur, celui qui, par son travail,
transforme une matière première brute en un objet de
valeur puisqu'il y met tout son savoir et tout son habileté
ainsi que toute une tradition dont il est le successeur.
Le rôle de la Tradition, de la Transmission du Savoir par
un apprentissage sont des éléments importants et motivent
donc ce Tour de France que doivent faire les apprentis pour
devenir un jour des compagnons.
Ils doivent aller se mettre à l'école de compagnons anciens
reconnus et pour cela l'ordre met à leur disposition des
maisons, dirigées par une Mère ou une Dame Hôtesse. Il y
en a une trentaine en France et en Europe et elles peuvent
chacune accueillir de trente à cent jeunes en apprentissage.
C'est donc tout un réseau social qui est en place pour assurer
la tradition et la formation d'ouvriers qui seront sérieux du
produit de leur travail qu'ils mènent du début à la fin.
Le Tour de France à notre époque s’effectue dans le sens
des aiguilles d’une montre, pour les cuisiniers, bien souvent
il s’agit d’un tour d’Europe voire du monde, et il paraît
inutile de rappeler ici que de nombreux CompagnonsCuisiniers sont Meilleurs Ouvriers de France, professeurs
dans les lycées techniques professionnels, dans les Centres
de Formation Hôtelière etc.
Le Tour représente une dure école sur le tas, nécessaire
pour apprendre les recettes de chaque région, des façons
de bien faire, des tours de main et partout ou il y a un
chef de cuisine issu du Compagnonnage, il existe un foyer
susceptible d’engendrer de futur compagnon.
Le jeune homme diplômes en poche (CAP, BEP, BAC-PRO)
doit accomplir au sein de l’association un travail culinaire
situant ses connaissances du métier : premier ‘chefd’œuvre’ pour être admis ‘Aspirant’ et porter la couleur
verte, stagiaire reconnu de l’Union.
Au terme, il commence à voyager aidé par les compagnons
qui se préoccupent du placement de l’aspirant, puis vient la
seconde période, après avoir satisfait au devoir, l’obligation
de faire et de réussir un second Chef-d’œuvre ; il sera
alors reconnu par tout Compagnon-Cuisinier, il portera la
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couleur rouge, écharpe avec liseré blanc.
Ce cérémonial des couleurs et des réceptions marque à tout
jamais le compagnon et cette méthode vieille comme le
monde, de la sacralisation du Travail bien fait, du goût de
la ‘belle ouvrage’, de vie en communauté réalisée dans son
métier, crée une élite professionnelle reconnue, quasiment
insurpassable et des travailleurs heureux.
Je ne peux avec mon droit de ‘réserve’ citer dans ce court
exposé et pour chaque époque, les innombrables Chefsd’œuvre dus aux Compagnons du Tour de France qui
justifient que le compagnonnage a le droit d’être nommé
« La Chevalerie du Travail », distinction conquise par nos
Anciens et que le Devoir nous ordonne de sauvegarder.
Cette Chevalerie du Travail est un ordre dans lequel chacun
de ses membres a été minutieusement choisi et admis à
entrer dès lors que ses qualités professionnellement et
morales ont été reconnues suffisamment élever.
Le Compagnon est un homme libre et de bonnes mœurs,
mais il doit observer une discipline et respecter le Devoir.
La liberté de pensée, l’indépendance d’esprit sont des
maîtres mots pour les Compagnons qui sont tenus de ne
jamais faire état de leurs idées personnelles lorsqu’ils se
retrouvent et lorsqu’ils travaillent ensemble sur le même
chantier.
La ‘Cayenne’ est le lieu de réunion dans chaque ville étape
du tour de France, le soir est organisé des cours approfondis
sur le ‘Trait’ ou géométrie compagnonnique. Ces cours de
Trait sont bénévolement professés par des Compagnons
qui se font un devoir d’enseigner ce qu’ils ont le bonheur
de connaître.
Perpétuer l’œuvre des ‘anciens’ par le travail bien fait,
participer au bonheur de l’humanité et guider nos ‘jeunes’
dans le chemin du Bonheur sont les raisons essentielles
d’être du compagnonnage et en résumé, demain comme
aujourd’hui, il faudra des hommes aux mains adroites,
hautement qualifiés, capables de résoudre certains
problèmes compliqués, des hommes à l’esprit cultivé et
sachant manier avec précision : le Compas et l’Équerre.
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