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SESSION d’OCTOBRE 2011 Cas clinique un « Canal bleu » Caroline BONNET C.H.U. Bocage, DIJON [email protected] I l s’agit d’une jeune-femme âgée de 29 ans d’origine cambodgienne en France depuis quelques mois. Elle consulte pour bilan de dyspnée au moindre d’effort et accès de palpitations. Cette symptomatologie est ancienne et s’est accentuée depuis 1 an. Elle n’a pas de facteurs de risque cardiovasculaires ni d’antécédents notables hormis la notion de « problème cardiaque » à la naissance classé sans suite. Il n’y a pas d’antécédents familiaux. Elle ne prend pas de traitement et elle n’a pas d’allergie. A l’examen sa tension artérielle est normale. Il existe une désaturation prédominant aux membres inférieurs à 76% contre 88% aux membres supérieurs. Les bruits du cœur sont réguliers avec un éclat de B2 au foyer pulmonaire. Les pouls sont tous perçus et il n’y a pas de signes d’insuffisance cardiaque. Figure 1 Figure 2 L’ECG s’inscrit en rythme sinusal avec une surcharge droite (Image 1). A la radiographie pulmonaire, il existe une saillie importante de l’arc moyen gauche évoquant une dilatation de l’artère pulmonaire tronc (APT). Il n’y a pas de surcharge vasculaire pulmonaire. Il n’y a pas de cardiomégalie (Image 2). A l’échocardiographie, on retrouve une dilatation importante des cavités droites avec une hypertrophie ventriculaire droite (Image 3). Les cavités gauches sont de tailles normales mais déviées. Le septum inter ventriculaire est plat en faveur d’une pression ventriculaire droite au moins iso systémique (Image 4). En para sternal petit axe (PSPA), on confirme les données de la radiographie pulmonaire avec une dilatation importante de l’APT à 44mm et des branches pulmonaires (Image 5). Il existe une hypertension artérielle pulmonaire systolique (HTAP) estimée sur le flux IT à 105mmHg (Image 6). Il n’est pas retrouvé d’obstacle sur la voie éjection droite. Le flux trans-valvulaire pulmonaire est typique avec l’encoche méso systolique témoignant d’une HTAP importante (Image 7). La fonction d’éjection ventriculaire droite st conservée comme en témoigne le TAPSE (20 mm) et la mesure de l’onde S à l’anneau (10.3cm/s). Figure 3 Sur la base de ces premières constations, les hypothèses diagnostiques sont une HTAP secondaire à une cardiopathie congénitale (communication inter auriculaire associée ou non à un retour veineux pulmonaire anormal, communication inter ventriculaire…) ou secondaire à une cardiopathie notamment valvulaire. L’échocardiographie ne retrouve d’anomalies architecturales ni de cardiomyopathie ou encore de valvulopathie gauche. L’hypothèse d’une fenêtre aortopulmonaire ou d’une HTAP primitive sont à évoquer mais cela n’explique pas l’asymétrie de désaturation observée entre les membres supérieurs et inférieurs. Figure 4 Figure 5 46 • mars 2012 - N°27 L’incidence para sternal gauche petit axe (PSPA) gauche permet de faire le diagnostic en montrant en 2D un large canal artériel (Image 8). Son implantation est habituelle au toit de l’APT. Le doppler couleur retrouve un shunt exclusivement droit-gauche (Image 9). La visualisation du shunt droit-gauche est d’autant plus difficile que les repères anatomiques sont modifiés par cette dilatation de l’APT et que l’on peut prendre ce canal abusivement pour l’artère pulmonaire gauche. Le cathétérisme cardiaque droit confirme les données de l’échocardiographie. L’HTAP est systolo diastolique supra systémique (systolique/diastolique/moyenne) à 135/77/103mmHg pour une pression aortique (systolique/ diastolique/moyenne) à 98/75/87 mmHg). Les pressions de remplissage droit et gauche sont normales. La mesure des saturations ne retrouve pas de shunt à l’étage auriculaire ni ventriculaire mais un shunt à l’étage artériel avec une désaturation prédominant aux membres inférieurs. Le trajet de la sonde est typique avec une image reproduisant la lettre « phi » correspondant au passage de la sonde dans le canal depuis l’artère pulmonaire tronc (Image 10). Un traitement par bosentan a été débuté ainsi qu’une supplémentation en fer pour lutter contre la microcytose secondaire à la polyglobulie associée à une contraception orale. A 6 mois, la patiente se dit moins dyspnéique comme en témoigne le test de marche de 6 min qui a 450m versus 342m avant la mise en place du traitement par bosentan. Les données échocardiographiques sont inchangées. La deuxième partie de cette présentation sera consacrée à la persistance du canal artériel en excluant volontairement la période néonatale. Le canal artériel se développe à partir de la portion distale du 6ème arc aortique gauche. En fin de grossesse, il relie le toit de l’artère pulmonaire tronc et l’isthme. Sa fermeture fonctionnelle a lieu dans les 24-48h de vie. Sa fermeture définitive avec formation d’un tissu fibreux (ligament artériel) dans un délai de 2-3 semaines. On parle de Persistance du canal artériel (PCA) au-delà du 3ème mois de vie. Sa fréquence est de 1 pour 2500-5000 naissances soit 9-12% des cardiopathies congénitales un sex ratio 2 à 3 filles pour un garçon. Figure 6 Figure 7 Figure 8 Figure 9 Les modalités de découverte sont variables depuis la période néonatale jusqu’à l’âge adulte. Schématiquement, on distingue le CA silencieux découvert fortuitement. En l’absence de souffle, l’abstention thérapeutique est de mise. La 2ème situation est un canal artériel persistant découvert sur un bilan de souffle sous clavier gauche. La symptomatologie est fonction du diamètre et du rapport Figure 10 mars 2012 - N°27 • 47 SESSION d’OCTOBRE 2011 des résistances vasculaires pulmonaires et systémiques (RVP/RVS). En cas de PCA modéré, on aura en échocardiographie une surcharge des cavités gauches et une dilatation de l’APT. La 3ème situation est le cas de la jeunefemme qui correspond à un large CA négligé ou non traité ayant évolué vers l’HTAP. Dans ce cas, il existe une contre-indication à fermer le canal artériel qui au contraire est une voie de décharge pour le ventricule droit. Cette voie de décharge explique la relative « bonne tolérance » des patients ayant un syndrome d’Eisenmenger (HTAP secondaire à une cardiopathie congénitale) par rapport aux autres étiologies d’HTAP. Figure 11 L’examen de référence pour faire le diagnostic de PCA est l’échocardiographie. L’incidence PSPA gauche permet de dégager la bifurcation pulmonaire. S’il y a un canal, on le visualisera au doppler couleur d’autant plus facilement que le shunt est gauche-droit. Dans cette incidence, l’alignement est optimal pour mesurer le gradient systolique pic à pic entre l’aorte descendante et l’APT (Images 11 et 12). L’incidence supra sternale permet aussi la visualisation d’un PCA surtout chez l’enfant d’autant plus facilement que le shunt est gauche-droit (Image 13). Généralement les canaux artériels persistants sont accessibles à une fermeture per cutanée. Le recours à la chirurgie est rare en dehors de la période néonatale. Il existe une classification des CA persistant en fonction de l’aspect anatomique (Image 14). Schématiquement, on fermera un PCA par un coïl si le diamètre est < à 3mm (Image 15) et par une prothèse si il est > à 3mm (Image 16). Le choix final est de toute façon guidé par l’aspect anatomique du canal à l’angiographie initiale. Figure 12 Il existe une particularité à l’examen clinique des patients ayant un syndrome d’Eisenmenger secondaire à un large canal artériel. Le shunt artériel est à l’origine d’une désaturation plus importante aux membres inférieurs par rapport aux membres supérieurs. Initialement, cela se traduit cliniquement par un hippocratisme digital intéressant seulement les orteils (Image 17). Figure 13 Remerciements à mes collègues les Docteurs Jean-Christophe Eicher et Abdelkader Touiza. Figure 15 Figure 14 48 • mars 2012 - N°27 Figure 16 Figure 17 : Anoop et al, NEJM 2011(17); 364: 7. Un cœur transplanté Sébastien HASCOET C.H.U. Rangueil, TOULOUSE [email protected] Observation Mr S. a eu une transplantation cardiaque en 1992 à l’âge de 34 ans pour insuffisance cardiaque sévère dans les suites d’un infarctus du myocarde antérieur. La connexion des retours veineux a été réalisée par une anastomose bi-atriale. L’évolution a été marquée par une vasculopathie du greffon ayant nécessité des gestes d’angioplastie avec pose de stents à 3 reprises. Mr S. a récemment été transféré dans notre unité pou une dyspnée de stade NYHA 3 avec dilatation des cavités droites et hypertension pulmonaire modérée ayant fait découvrir une communication inter auriculaire large. Images 1 Images 2 - Avant d’envisager la fermeture de cette CIA, les pressions pulmonaires ont été évaluées par cathétérisme. d’envisager la fermeture de cette CIA, les pressions pulmonaires ont été évaluées par cathétérisme. À l’échographie transthoracique, la CIA est « centrale » shuntant exclusivement de la gauche vers la droite. Le VD est très dilaté (surface TD en A4C à 35 cm2) avec un anneau tricuspide dilaté à 42 mm. La fonction systolique VD est légèrement altérée (TAPSE à 13 mm, Sa à 8.5 cm/s, FRS 35%). Le VG est non dilatée de bonne fonction systolique (DTD VG 40 mm, FEVG Simpson biplan 60%). On note une hypertension pulmonaire avec PAPS estimé à 55+15 mmHg sur l’IT et PAPD à 12+15 mmHg sur IP. L’AP est dilatée avec un tronc à 46 mm un anneau pulmonaire à 31 mm. On suspecte une élévation des pressions de remplissage droites et donc gauches par la CIA sur une VCI dilatée à 33 mm avec une faible variation respiratoire (28 mm en inspiration). (inf.12 mm, ant. 18 mm, sup 10 mm, post 22 mm). Les oreillettes sont dilatées avec des rapports anatomiques particuliers sur ce cœur transplanté. L’ETO 3D permet d’apprécier la morphologie ovalaire du défect et l‘aspect des berges. En particulier la berge postéro inférieure parait peu épaisse. Un scanner cardiaque a été réalisé et s’est révélé relativement décevant n’apportant pas d’informations complémentaires importantes (Images 2). Cathétérisme Pressions : Pao = 140/70 moy 90 mmHg POG = POD = PCP = 20 mmHg PAP = 65/25 moy 40 mmHg PVD = 65/1/20 mmHg HTP post capillaire réactive Saturations : Sat Aorte = sat VP = 95% Sat sang veineux 70% Sat VD=APD et APG = 80% Qp/Qs = 1,7 RVP/RVS = 1/6ème L’indication de fermeture de cette CIA a été retenue et une tentative de fermeture percutanée a été réalisée. La calibration passive au ballon de 40 mm ne permettant pas de supprimer tout le shunt (Image 3) et le support offert par la berge postéro-inférieure n’étant pas suffisant, une fermeture percutanée n’a pas été jugée réalisable. Une fermeture chirurgicale a été réalisée. L’échographie transoesophagienne 2D, 2D biplan et zoom 3D temps réel (Images 1) permet d’estimer la taille de la CIA à 29 sur 44 mm, des berges larges mars 2012 - N°27 • 49 SESSION d’OCTOBRE 2011 L’analyse périopératoire a permis de confirmer le mécanisme de cette CIA, à savoir un « lâchage » de la suture entre le greffon et le receveur au niveau du septum interatrial. Sur l’image 4 est visible le reste du fil de suture sur une des berges. La CIA a été fermée par un patch en dacron. Image 3 L’ETO2D postopératoire a confirmé l’absence de shunt résiduel (Image 5). L’ETO 3D s’est révélée décevante en post opératoire avec un réglage du gain difficile et faisant croire à tort à un défect résiduel (Images 6). Conclusion Cas exceptionnel de CIA « acquise » par lâchage de suture chez un patient transplanté. Image 5 Images 4 Remerciements au Dr Gauthier et au Dr Berry pour leur contribution à l’iconographie et au Pr Leobon pour l’iconographie peropératoire. Images 6 50 • mars 2012 - N°27 ETO 3D>2D et au TDM pour préciser la morphologie du défect, l’aspect des berges et guider le choix thérapeutique. ETO 3D < 2D pour l’analyse du patch. Une histoire de valves… Pamela MOCERI C.H.U. Pasteur, NICE [email protected] Observation Chirurgie Jane, 19 ans Fermeture de l’ostium primum Pas d’atcd particulier en dehors d’un souffle (connu depuis 4 ans) Suture de la fente 1 m 70, 66 kg Résultat satisfaisant en ETO Sportive (course, gym) Insuffisance VAV gauche minime/ Pas de CIA résiduelle Test de continence ok Dyspnée d’effort progressive, limite ses entrainements Sortie à J6 post-op Souffle systolique 3/6 Pas d’arythmie post-op B2 dédoublé Prophylaxie / endocardite Reste de l’examen sans particularités Contrôles M1 / M6 Le Canal Atrio-Ventriculaire Jonction AV commune Insuffisance valve AV gauche minime / dimensions VG normales Evolution Forme complète Grossesse - 12 mois post-op Partielle + Zone fibreuse centrale séparant 2 anneaux Déroulement « normal » Formes intermédiaires Echocardiographie fœtale normale CIA ostium primum PN 2kg950, au terme de 40 SA, bonne adaptation néonatale +/- CIV d’admission Valve AV gauche à 3 feuillets Perdue de vue Jonction AV commune : « valves AV au même niveau » Fente « mitrale » Voie de sortie aortique allongée Retour en cs de suivi à 3 ans post-op Motif : Fatigue Dyspnée d’effort Appartement en 1er étage sans ascenseur « difficile » mars 2012 - N°27 • 51 SESSION d’OCTOBRE 2011 Mécanisme de la régurgitation AV Fente de la valve AV gauche Réouverture Fermeture incomplète Feuillet rétracté Post-opératoire Manque de tissu Prolapsus d’1 ou plusieurs feuillets Restriction d’un feuillet Chirurgie (2) Suture complète de la fente Gradient moyen mitral post-op 4mmHg Pas de fuite post-op Sortie J10 L’insuffisance de la valve AV G est plutôt la complication de la 1ère réparation La sténose (de degré ± variable) est souvent la complication de la seconde chirurgie (fermeture complète voire excessive (?) de la fente Complications adultes du CAV réparé Insuffisance de la valve AV gauche Obstruction de la voie de sortie gauche BAV complet (même tardif) Arythmies Sténose de la valve AV gauche Insuffisance / Sténose de la valve AV droite Défects résiduels Grossesse (!) (40% de complications cardiaques) 50 • mars 2012 - N°27 52 Double orifice de la valve AV gauche + fréquent que le double orifice mitral Cardiologie congénitale et échocardiographie. Fermer ou pas fermer ? CIA et HTAP Jean-Marc SCHLEICH C.H.U. de RENNES [email protected] Observation Cathétérisme cardiaque Mélanie S. 31 ans GOD : 7 Dyspnée stade III NYHA aggravative depuis janvier 2010 PAP : 88 / 41 / 59 Avis pneumologique (juin 2010) => HTAP pré-capillaire importante Interrogatoire : Palpitations quasi quotidiennes Examen: souffle précordial 1/6 PSG / éclat de B2 Bilan étiologique OG : 8 « Qc » = 6,31l/mn Ic = 4,29 l/mn/m2 « RVP »: 8,1 UI Oxymétries : shunt G-Dt inter-atrial Qp/Qs : 2,6 Epreuve d’effort: Pic de VO2: 26,0 ml/Kg/mn RVPA partiel de la VPSD dans la VCS Désaturation d’effort : 90 % -> 63 % Que faire ? Fermeture chirurgicale par un patch fenestré Scanner thoracique : absence d’élément pour une maladie thrombo-embolique ou anomalie parenchymateuse EFR : discret syndrome obstructif Indice de Tiffeneau à 76% VEMS : 86% // théorique Scintigraphie pulmonaire : anomalies hétérogènes Échographie abdominale normale Echocardiographie Intervention le 23 novembre 2010 (Dr Langanay) Fermeture par « un patch de Gelseal redirigeant le flux des VP vers l’OG à travers la CIA » « Réalisation d’une découpe circulaire de 5-6 mm de diamètre au niveau de la partie centrale de la fosse ovale destinée à servir de soupape de sécurité » Evolution radiologique Dilatation majeure du VD Contrôle le 19 janvier 2011 : FE VG = 65% IT avec gradient VD-OD de 110 mm Hg VD modérément dilaté (DTD = 31 mm) VCI dilatée mais dépressible en inspiration IT avec gradient VD-OD de 50 mm Hg // 110 mm Hg en pré-opératoire TAPSE VD= 17 mm / Tei = 0,31 / onde S tric.= 14cm/sec CIA centrale résiduelle de 3-4 mm SIV paradoxal / «petit VG» / FE = 65% Shunt Dt-G spontané lors du « contraste » CIA sinus venosus de 15 mm mars 2012 - N°27 • 53 SESSION d’OCTOBRE 2011 Evolution en août 2011 Dyspnée de stade I / aucune palpitation TM6: 672 m saturation stable: 98 % => 96 % / Bjorg:2 STD VD: 25 cm2 / gradient IT : 45 mm Hg TAPSE = 13 mm VG : 41/26 mm / FE = 60% ETO : orifice résiduel de 5-7 mm excentré KT : OD :11 / PAP: 56/31/42 / PAPO: 14 (PAP: 88 / 41 / 59) Qc : 6,5 l/mn RVP: 4,3 UI (8,1 UI) Qp/Qs: 2,3 Que faire ? Fermeture percutanée précédé d’un test d’occlusion Conclusion Intérêt des fermetures fenêtrées ? Test d’occlusion avant fermeture ? 54 • mars 2012 - N°27