La gestion de l`eau à Mexico D.F.

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La gestion de l`eau à Mexico D.F.
Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001 pp. 65-79
La gestion de l’eau à Mexico D.F.
La participation du secteur privé
Lilian Saade Hazin
es problèmes relatifs à l’approvisionnement en eau et aux
services d’assainissement sont de plus en plus préoccupants
dans le District fédéral de Mexico.
L
Le niveau moyen annuel des précipitations est d’environ
715 mm (CNA, Commission nationale de l’eau, 1999a). Malgré
un niveau de précipitations élevé la distribution de l’eau, au
niveau national, s’avère difficile et coûteuse car la localisation
géographique des réserves d’eau ne correspond ni aux besoins
ni à la répartition de la population. Environ 77 % des Mexicains
habitent les régions du Nord et les hautes terres du pays (où se
trouve également le District fédéral) et où les précipitations ne
représentent que 28 % du total annuel (CNA, 1999a). De plus,
90 % des terres irriguées se situent dans cette région qui génère 84 % du PIB national (24 % pour le District fédéral). Le PIB
par habitant est de près de 5 000 dollars US. En outre, les ressources en eau sont irrégulières au cours de l’année, les précipitations ayant principalement lieu pendant l’été.
Parmi les 600 aquifères identifiés, environ 100 sont dangereusement surexploités (CNA 1999a), tout spécialement ceux
situés dans la vallée de Mexico. Bien que ces aquifères soient
chaque année remplis de 700 millions de mètres cubes d’eau,
il en est extrait près du double. L’exploitation des réserves d’eau
a commencé au siècle dernier et l’abaissement du niveau de
l’eau a provoqué un affaissement moyen du sol de 7,5 mètres
dans le centre de Mexico, qui a aggravé une situation déjà préoccupante en raison des inondations et a endommagé les infrastructures de la ville (Noll et al., 2000). Les services de la ville
ont été obligés d’installer des pompes pour refouler l’eau vers le
« Grand canal » et l’évacuer par les réseaux de drainage de la
ville. De ce fait, la capacité actuelle du Grand canal n’est plus
que de 10 % de sa capacité initiale (Adelson, 1999).
Les politiques menées au niveau administratif et au niveau
des prix n’ont en général pas été efficaces pour répondre à la
demande toujours croissante en eau. En particulier, les recettes
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Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
provenant de l’alimentation en eau ont très peu contribué au
financement du système. De plus, il existe d’importantes subventions croisées entre les différents secteurs et c’est aussi pourquoi la participation du secteur privé a été recherchée pour
améliorer l’ensemble.
ALIMENTATION EN EAU ET SYSTÈME
D’ASSAINISSEMENT DE LA VILLE DE MEXICO
L’agglomération métropolitaine de Mexico (Zone métropolitaine de la ville de Mexico - ZMVM) comprend deux entités politico-administratives – le District fédéral et des municipalités
urbaines périphériques. La superficie du District fédéral est
d’environ 1 504 km2 (Conseil national pour la recherche,
1995). À la périphérie, l’agglomération s’étend vers l’Est, le
Nord et l’Ouest du District fédéral et englobe 17 municipalités
de l’État de Mexico sur une superficie de 2 269 kilomètres carrés. Environ un cinquième de la population du Mexique habite
dans la grande agglomération ZMVM, dont près de 9 millions
dans le District fédéral et un nombre légèrement supérieur dans
les circonscriptions attenantes à l’agglomération.
Au total, la région desservie par les réseaux de distribution
d’eau potable et de canalisation d’eau usée concerne 1 287
kilomètres carrés. Ces services sont cogérés par le District fédéral et l’État de Mexico, qui sont chacun responsables de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement qui relèvent du
cadre de leur juridiction. La Commission nationale de l’eau a la
charge de fournir l’eau en vrac aux différentes zones de services
(Conseil national pour la recherche, 1995). Le District fédéral
consomme 56 % des 62m3/seconde d’eau fournie par le
ZMVM, alors que les municipalités attenantes n’en consomment que 44 %.
Environ 32 % de l’eau fournie aux habitations est perdue
sous forme de fuites (1) qui sont essentiellement dues à un mauvais entretien de l’infrastructure et à des installations domestiques défectueuses. Il faut ajouter à cela l’augmentation du
coût moyen des services de l’eau que l’on doit fournir à une
population en croissance rapide.
La consommation d’eau à Mexico est relativement importante par rapport à celle des autres villes du Mexique et des
autres pays, sa moyenne, au cours des cinq dernières années, a
atteint environ 360 litres par jour, mais est inférieure à celle des
années 1984 à 1990, où elle atteignait 400 litres. Cette différence est due, en grande partie, au taux élevé de fuites mais
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aussi au fait qu’avant la mise en place du nouveau système, le
tarif en vigueur n’incitait guère le consommateur à l’économie.
Dans l’État de Mexico, la consommation moyenne quotidienne
par habitant est de l’ordre de 230 litres. Selon les autorités, la
plus grande consommation par habitant du District fédéral tiendrait au fait qu’il est plus développé et que de nombreuses
industries et commerces y sont implantés. En outre, l’État de
Mexico compte de nombreux puits privés qui ne sont pas
comptabilisés dans les estimations (Conseil national pour la
recherche, 1995) ; d’autres facteurs, notamment les revenus des
consommateurs, leurs habitudes, leurs coutumes, peuvent aussi
avoir une influence sur la consommation d’eau.
Deux tiers de l’alimentation en eau provient de l’aquifère
situé sous la ville. Le reste est fourni par des sources externes
dont la plupart font partie de l’unité de production d’eau
potable de Cutzamala ; celle-ci, située à quelques 130 km de
Mexico et à une altitude de 1 000 m au-dessous du niveau de
la ville, a nécessité de gros frais de pompage (2). Les besoins en
eau de Mexico ont entraîné une baisse rapide du niveau de
l’aquifère, et le sol étant meuble à cet endroit, un affaissement
du sol de plusieurs mètres au centre de la ville. Cette surexploitation est due à la forte population de la ville et aux habitudes de consommation prévalant dans cette zone.
Selon la Commission de l’eau du District fédéral, 98 % des
résidents ont accès à l’eau courante, soit par un accès direct au
réseau, soit par un robinet de puisage commun situé dans le
voisinage. Les autres habitants stockent l’eau dans des containers qu’ils remplissent à partir des camions citernes. On estime
qu’environ 74 % des résidents du District fédéral ont une arrivée d’eau dans leur habitation, et que ce pourcentage est de
52 % environ dans la zone urbaine de l’État de Mexico (Conseil
national pour la recherche, 1995). Les chiffres de la
Commission nationale de l’eau indiquent que 90 % de la population de l’État de Mexico a accès à l’eau courante.
Quatre-vingt-dix pour cent de l’eau fournie par le District
fédéral est destinée à un usage domestique ; les 10 % restants
sont utilisés par les industries ou les commerces
(CADF – Commission de l’eau du District fédéral)).
Traitement des eaux usées
Des études montrent que la vallée de Mexico et la région de
Lagunera présentent la plus forte pollution des nappes phréatiques (Commission nationale de l’eau, 1994). Bien que 94 %
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
des foyers du District fédéral aient accès à un réseau d’égouts,
10 % seulement des eaux usées de l’agglomération de Mexico
(ZMVM) sont correctement traitées. Quatre-vingt-dix pour cent
des eaux non traitées sont évacuées hors du bassin de Mexico
par le réseau de drainage général et ensuite réutilisées pour l’irrigation de plus de 85 000 hectares de terres cultivables de la
vallée de Mezquital Valley dans l’état voisin d’Hidalgo (Conseil
national pour la recherche, 1995).
Les services des eaux du District fédéral ont été, comme
dans le reste du pays, largement subventionnés. Depuis 1996,
ils ont reçu une subvention annuelle de plus de 2 milliards de
pesos (plus de 210 millions de dollars US) sur les réserves budgétaires du gouvernement du District fédéral. Les dépenses
comprennent, entre autres, des investissements en vue de
grands projets, cofinancés par des emprunts extérieurs. On prévoit une augmentation des recettes et donc une amélioration de
la situation financière avec l’installation récente de compteurs
d’eau, une gestion opérationnelle et commerciale plus efficace,
et une augmentation des tarifs. La subvention annuelle nécessaire au fonctionnement et à la gestion du réseau d’alimentation
en eau de la ville de Mexico a été estimée à environ 0,5 % du
PIB national (Partenariat mondial de l’eau - Global Water
Partnership, 2000).
LA PARTICIPATION DU SECTEUR PRIVÉ DANS LA
DISTRIBUTION D’EAU DANS LE DISTRICT FÉDÉRAL
La participation du secteur privé a été encouragée par la mise
en application de la loi nationale sur l’eau de 1992. Elle fournit
un cadre réglementaire à l’aménagement des ressources en eau.
Elle souligne l’importance octroyée aux concessions, permettant ainsi une plus grande implication du secteur privé ; il est
cependant important de noter qu’elle n’est valable que pour les
infrastructures fédérales d’approvisionnement en eau.
Depuis 1993, deux concessions accordées à des sociétés
privées sont exploitées dans deux villes moyennes du pays :
Aguascalientes et Cancún. En outre, des contrats de services ont
été signés à Navojoa en 1997 et à Puebla en 1998. D’autres
expériences de participation privée ont eu lieu dans le pays
sous la forme de BOT (Build-Operate-Transfer). Sur les 43 projets de BOT, existants en 1997 et concernant le traitement des
eaux usées municipales seuls 12 sont opérationnels à ce jour,
représentant des investissements s’élevant à 170 millions de
dollars (Barocio Ramírez, 1999). Treize autres projets ont été
annulés et 18 sont actuellement en renégociation. La plupart de
ceux qui fonctionnent sont confrontés à des problèmes financiers et ne sont pas utilisés à pleine capacité. Les trois principales raisons de ces dysfonctionnements sont la mauvaise performance financière des compagnies municipales en charge de
la distribution de l’eau, et partant, leur peu de solvabilité, l’inadéquation structurelle des contrats de services et des concessions, et les procédures d’appels d’offres. Il faut ajouter à cela
les divergences entre les législations, les réglementations et les
cadres institutionnels des états et des municipalités. Cet article
s’attache principalement à étudier en détail le fonctionnement
des contrats de services passés dans le District fédéral.
Procédure de sélection
En octobre 1992, le gouvernement du District fédéral a lancé
une procédure d’appels d’offres international afin de sélectionner des compagnies privées qualifiées pour effectuer un recensement des utilisateurs, installer des compteurs et rénover le
réseau de distribution. Les consortia devaient selon les termes
de la procédure comporter une participation majoritaire mexicaine. En février 1993, sept compagnies ont soumis des offres,
dont quatre ont été sélectionnées. La mise en route des opérations a été retardée par l’un des consortia non retenus qui
contestait les attributions ; les quatre autres ont signé des
contrats généraux avec le gouvernement en octobre 1993. (voir
tableau 3.) Ces contrats avaient pour but de pallier plusieurs
défaillances du système d’évacuation des eaux usées de la ville
notamment des problèmes d’informations figurant dans la base
de données utilisateurs, une politique tarifaire inadéquate, et la
détérioration des réseaux.
Chaque consortium s’est vu confier la responsabilité d’une
zone (voir figure 1) qui comprend environ le même nombre de
raccordements d’eau ; et afin de permettre des économies
d’échelle on a attribué des districts municipaux (delegaciones)
voisins à certaines zones. En outre, on a pensé que le fait d’impliquer quatre compagnies différentes était susceptible d’entraîner une certaine compétition et d’inciter les entreprises à utiliser les technologies les plus performantes.
Les objectifs stipulés dans les contrats étaient très ambitieux (3) et comprenaient :
- la rationalisation de la consommation d’eau au sein du
District fédéral ;
- la réduction du pompage de l’eau à partir de l’aquifère ;
- l’extension du réseau secondaire ;
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Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
Tableau 1: Consortia impliqués dans le système de distribution de l’eau du District fédéral
Compagnie
Partenaires du
consortium (1)
Nombre de
branchements
(apport global)
Montant du
contrat (2)
(millions de pesos)
G.A. Madero,
Azcapotzalco
Cuauhtemoc
Servicios de Agua
Potable,
S.A. DE C.V.
(SAPSA)
Constructora ICA
(Mexique) ;
Vivendi (France)
350,064
969
V. Carranza
Iztacalco
B. Juarez
Coyoacan
Industrias del
Agua S.A. de
C.V. (IASA)
Socios Ambientales de Mexico
(Mexique) ;
Azurix (États-Unis)
290,000
981
Iztapalapa
Tecnología y
Servicios del
Agua S.A. de
C.V. (TECSA)
Peñoles
(Mexique),
Lyonnaise des
Eaux (France)
304,059
979
M. Contreras
Cuajimalpa
M. Hidalgo
A. Obregon
Tlalpan
Agua de México
S.A de C.V.
(AMSA)
Grupo Gutsa
(Mexique);
(Royaume Uni)
291,990
880
Zone
Délégations
Nord-ouest
(Zone A)
Nord-est
(Zone B)
Sud-est
(Zone C)
Sud-ouest
(Zone D)
Source : Données provenant des documents du Secretaría de Obras y Servicios (1998) Haarmeyer et Mody (1998) et obtenues auprès du personnel de la CADF.
Note : Le nombre des branchements représente l’approvisionnement global à la date de la signature du contrat.
(1) La composition des consortia a été modifiée. En septembre 1999, Azurix a acquis 49 % du capital social de l’IASA, et en janvier 2000, Peñoles a acquis 51 % des parts
de TECSA’s de Bufete Industrial.
(2) Les montants en pesos restent constants depuis mars 1993, date à laquelle le taux de change était de 3,11 pesos pour un dollar US.
- l’utilisation des moyens du service des eaux par le gouvernement du District fédéral ;
- l’amélioration du fonctionnement et de la gestion du
réseau secondaire ;
- l’augmentation des recettes en vue de répondre aux besoins
financiers nécessaires pour fournir un service satisfaisant.
Une procédure échelonnée
Devant le manque d’informations relatives aux consommateurs, aux taux de consommation d’eau et à l’état réel du
réseau, il est apparu qu’une procédure de participation du secteur privé par étapes successives était la plus appropriée. On
peut considérer que les contrats consistent en un « menu » de
tâches à accomplir, notamment le fonctionnement et l’entretien d’un système secondaire de distribution d’eau et la mise
en place de centres de service clientèle qui n’était pas auparavant chiffrée de manière spécifique. À chacune de ces tâches
correspondait un prix fixé, et les options requises étaient iden-
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tiques pour chaque zone ; ces contrats étaient donc, à certains
égards, « uniformes ». Avant toute réalisation, la CADF
(Commission de l’eau du District fédéral) devait effectuer une
commande spécifique sur laquelle les entreprises, dans leur
zone respective, avaient le droit de premier refus ; cette clause
permettait aux collectivités locales du District fédéral de négocier un marché sans mise en concurrence pour des tâches de
faible importance qui auraient autrement nécessité une procédure d’appel d’offres. Les compagnies privées devaient avoir
réalisé toutes les tâches indiquées sur le menu à la date d’expiration du contrat. L’offre retenue, au moment de la sélection,
était celle qui présentait la plus faible valeur actualisée pour
l’ensemble des tâches. Les tarifs convenus devaient être étayés,
pour chaque tâche, par un tableau de ventilation des frais indiquant les coûts directs, les coûts indirects et les bénéfices
escomptés. Les différentes tâches incombant aux consortia
devaient être réalisées selon les trois phases suivantes, non
nécessairement consécutives.
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
urbaine d’environ 680 km2 (Secrétariat des travaux
et services, 1998).
Deux types de compteurs ont été installés :
classiques et électroniques ; au mois de décembre
1998, on en comptait plus de 1,1 million. Bien
qu’il ne soit pas possible de couvrir la totalité de la
région — il s’avère en effet nécessaire, avant l’installation de compteurs dans certains quartiers de la
ville, d’entreprendre certains travaux en vue d’améliorer la qualité de l’eau et la régularité de l’alimentation — le nombre d’installations pourrait
s’élever à environ 1,4 millions de compteurs. Plus
de 20 % des consommateurs qui ne possèdent pas
encore de compteurs sont actuellement facturés au
forfait, quelle que soit leur consommation ; cet état
de fait constitue malgré tout une amélioration significative par rapport à la situation antérieure, où
50 % des ménages n’avaient pas de compteurs.
Phase II
La deuxième phase a été menée suivant les mêmes
procédures contractuelles que celles de la phase I,
à savoir, un paiement distinct pour chaque tâche
accomplie. Des contrats spécifiques ont été établis,
notamment pour les relevés de compteurs, l’émission et le recouvrement des factures, le service
clientèle, et les nouveaux branchements. Avant le
Source : CADF
31 décembre 1996, la CADF (agissant pour le
compte des quatre compagnies) traitait 72,4 % de
toutes les factures d’eau, émises tous les deux
Figure 1 - Affectation des différentes régions du District fédéral
aux compagnies privées.
mois ; les autres étant du ressort du Trésor Public.
Au mois de septembre 1997, l’entière responsabilité de facturation a été transférée vers la CADF, soit en 1998,
Phase I
plus de 1,6 millions de factures bimensuelles.
Durant cette première phase, débutée en mai 1994, les compaOn a pu observer que le nombre de factures émises a auggnies ont procédé à l’installation des compteurs d’eau, créé une
menté d’environ 50 000 par an, pour s’établir actuellement à
base de données consommateurs et établi les plans des réseaux.
1,7 million pour un parc de 1,2 million de compteurs (4). Le
Le gouvernement du District fédéral a donc signé avec chacun
des consortia des contrats par lesquels ils s’engageaient, dans
retard à l’achèvement de ces deux phases a été dû en partie à
une région donnée, à installer un nombre défini de compteurs
la situation économique et politique qui prévaut au Mexique
et à effectuer une étude de situation. Chaque tâche a été factudepuis décembre 1994, et qui a affecté la situation financière
rée séparément et sur la base d’un tarif unitaire. À l’exception
de la ville de Mexico. De nombreux contrats nécessitaient l’imde l’installation des compteurs, cette première phase s’est acheportation d’équipements, notamment de compteurs, dont la
vée le 31 décembre 1996, avec l’identification de 1,7 millions
dévaluation de 1994 a fait presque doubler le prix en pesos ;
d’utilisateurs et l’établissement de cartes couvrant une zone
ceci sans compter avec les restrictions budgétaires qui ont été
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Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
Tableau 2 : Facturation et compteurs en août 1998, selon les compagnies
Compagnie
SAPSA
IASA
TECSA
AMSA
Total
Factures émises
407 289
410 804
442 229
349 654
1 609 976
Compteurs installés
282 489
273 653
240 844
252 677
1 049 663
Remarque : Les factures sont émises tous les deux mois, les chiffres représentent le nombre total de compteurs installés. Ces informations ont été fournies par la CADF. Les
chiffres ne comprennent pas les gros utilisateurs qui sont directement du ressort de la CADF.
effectuées à tous les niveaux de l’État. Devant ces impératifs, la
CADF a dû retarder ou ajourner de nombreux contrats.
Les contrats généraux de la phase II comprenaient, entre
autres, la mise en place et le fonctionnement d’un centre d’assistance à la clientèle rattaché à chacune des 50 000 arrivées
générales d’eau, d’un centre d’information téléphonique et
d’équipes d’inspecteurs de terrain. Les entreprises ont établi
leurs prix en fonction de ceux des autres activités de la phase II
qui avaient été fixés. Dans la mesure où aucune instruction spéciale n’avait été donnée pour la répartition des coûts, les quatre
consortia ont proposé des options différentes. Certains ont augmenté le prix relatif à la facturation, d’autres à celui de la gestion des compteurs ; une compagnie a même réparti ses coûts
sous la forme d’un pourcentage constant à valoir sur toutes les
prestations de la phase II (5). Il en est résulté une extrême diversité de coûts relatifs aux mêmes prestations de la phase II. On
notera, en outre, que l’attribution partielle de la phase II a
entraîné de lourdes pertes pour l’entrepreneur qui avait opté
pour le pourcentage constant sur toutes les prestations de cette
phase, et qui ne récupérait que 30 % des coûts mensuels.
Phase III
La troisième phase comprend le fonctionnement, l’entretien et
la rénovation des réseaux de distribution d’eau et de drainage.
Elle a partiellement débuté en 1997, mais des problèmes de
politique intérieure concernant le cadre institutionnel, qui
seront évoqués plus loin, ont gravement retardé sa mise en
place et ont finalement conduit à envisager deux « sousétapes » distinctes. La première, qui avait déjà fait l’objet de
projets pilotes, a été suspendue. Elle était basée sur des contrats
spécifiques passés entre la CADF et les quatre compagnies pri-
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vées qui devaient se charger de sous-diviser leurs zones en plusieurs districts de relevés (DR). Des débitmètres, installés aux
entrées et sorties de chaque district, devaient mesurer le volume d’eau entrant et sortant. Dans la mesure où la quantité d’eau
consommée dans chaque DR pouvait être calculée à partir des
compteurs individuels installés au cours de la première phase,
les compagnies pouvaient en déduire la quantité d’eau perdue,
la plupart du temps due à des fuites ou à des raccordements illicites. En comparant les situations dans les différents DR, les
compagnies étaient à même de localiser les besoins prioritaires
en matière de détection de fuites et, dans certains cas, d’envisager des travaux de rénovation des réseaux.
La deuxième sous-étape de cette phase III (débutée en juillet
1997), comprend l’exploitation et l’entretien du réseau de distribution des DR impliquées dans la première sous-étape,
notamment la détection et la réparation des fuites, l’exploitation
et l’entretien du réseau de distribution et de ses équipements
(les cadres et tampons de regards d’égout, les robinets etc.), et
le remplacement des robinets et branchements. Certaines de
ces interventions n’étaient pas précisément stipulées dans le
contrat général, mais il était laissé une certaine liberté pour les
réaliser. L’administration actuelle a donné la priorité aux interventions relatives à la réparation des fuites et à l’amélioration du
réseau secondaire, sur la base d’une rémunération par intervention. En août 2000, les quatre compagnies avaient rénové
presque 542 km de réseau, remplacé plus de 68 000 branchements (ramales) et identifié et réparé les fuites (6).
L’établissement de contrats spécifiques à certaines activités
de routine, notamment l’émission des factures ou les relevés
des compteurs, n’ont pas posé de problèmes particuliers, alors
que d’autres missions, telles que l’installation de compteurs, la
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
Tableau 3 : Les progrès accomplis entre 1995 et 1999
Indicateur
Valeur 1995
Valeur 1999
Réseau d’alimentation en eau
98 %
98 %
Réseau d’assainissement
94 %
94 %
Approvisionnement en eau par habitant par jour (en litres)
360
360
Employés/1 000 branchements*
12
nd
Employés/1 000 utilisateurs*
8
nd
1 135
1 104
Recettes provenant des factures d’eau (en millions de pesos actuels)
771
2 507
Rentabilité (recettes/frais)
69 %
82 %
Rentabilité des relevés (relevés des compteurs/eau fournie)
68 %
75 %
Production d’eau (en millions de m3)
Source : D’après Haarmeyer et Mody (1998), et les données de la CADF.
* estimations de 1996
Remarque : En 1997, le taux de change était de 8 pesos par US$.
rénovation des réseaux et la détection et réparation des fuites
dépendent du budget alloué et de l’accord de la CADF. Les
contrats généraux stipulent clairement que la CADF se réserve
le droit de refuser de souscrire à un contrat spécifique à certaines tâches dans les cas suivants :
(i) lorsque le budget requis n’a pas été approuvé par
l’Assemblée législative du District fédéral (procédure annuelle) ;
(ii) lorsque la responsabilité de ces tâches n’a pas été pré-
cédemment confiée à d’autres départements du gouvernement
du District fédéral ;
(iii) lorsque la réalisation de ces tâches n’est pas jugée
nécessaire aux intérêts de la ville.
Enfin, il est intéressant de noter qu’au moins 40 contrats
spécifiques sont signés chaque année avec l’une des quatre
compagnies et que cela requiert une somme énorme de travail
administratif qui rend difficile un planning à long terme (7).
Tableau 4 : Révision du calendrier de mise en place des différentes phases d’interventions
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Première phase
*
Deuxième phase
Troisième phase (2 sous-étapes)
Source : Analyse de l’auteur. * La réalisation de la première phase a débuté en mai 1994.
Prévision
Réalisation
Travaux amorcés (sous-étape 1 de la phase III)
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Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
ACTEURS
ET INSTITUTIONS
En juillet 1992, en vue d’améliorer les problèmes d’eau de la
ville, une nouvelle commission a été mise en place à savoir, la
Commission de l’eau du District fédéral (CADF). La CADF est
un organisme indépendant (órgano administrativo desconcentrado) sous le contrôle du Secrétariat des travaux et services
(Secretaría de Obras y Servicios) du gouvernement du District
fédéral. Depuis sa création, la CADF s’est vue confier la responsabilité de la participation du secteur privé dans le domaine de l’eau ; elle gère également la base de données utilisateurs,
est chargée des relations avec la clientèle, dresse les plans et
assure l’entretien des réseaux de distribution d’eau et de drainage, et émet les factures.
Les deux plus importantes missions qui incombent à la
CADF sont d’une part, l’émission des factures, d’autre part la
distribution de l’eau aux gros utilisateurs (grandes usuarios),
dont le nombre, qui avoisinait les 10 000 en 1992, atteint
actuellement presque 17 000. On notera que ces gros utilisateurs, qui ne représentent que 1 % du nombre total des utilisateurs, fournissent environ 50 % des recettes (8). La CADF se voit
octroyer le contrôle de ces comptes.
Certains pouvoirs publics continuent de jouer un rôle
important dans le secteur de l’eau, d’où la grande diversité des
institutions impliquées dans le fonctionnement et la gestion des
services, ce qui ne manque pas de poser certains problèmes. La
durée des contrats généraux demeure aussi un sujet de discussion ; on considère qu’une période de dix ans est un minimum
acceptable pour parvenir à réaliser les objectifs et permettre aux
entreprises de récupérer leurs investissements, mais on a observé aussi que des périodes plus longues réduisent l’efficacité des
actions.
Bien qu’il incombe à la CADF de superviser les travaux des
quatre consortia privés et d’analyser leur état financier, les pouvoirs publics restent encore largement impliqués dans le secteur
de l’eau comme la CNA ou des organismes rattachés au gouvernement du District Fédéral.
- La Commission nationale de l’eau (CNA), organisme autonome (organismo desconcentrado) placé sous la tutelle du
ministère de l’Environnement, des Ressources Naturelles et de
la pêche (SEMARNAP), est la principale autorité responsable de
l’aménagement des ressources en eau, et donc de l’approvisionnement en eau de la ville, au niveau fédéral.
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Dossier
- La Direction générale de construction et opération
hydraulique (DGCOH), rattachée au Secrétariat des travaux et
services du gouvernement du District fédéral, est l’organisme
responsable de l’approvisionnement et de la distribution de
l’eau dans la ville. La DGCOH est également en charge de
l’épuration des eaux et des installations de production d’eau
potable de la ville, des puits et du système d’assainissement
agricole (notamment des réseaux de tunnels profonds qui évacuent l’eau de surface et les eaux usées hors de la ville) ; ainsi
que de l’exploitation et de la gestion de nouveaux réseaux.
- Le Département du Trésor à qui incombe la responsabilité générale de la gestion des recettes provenant du secteur de
l’eau et de l’allocation des budgets aux différents services.
- Les 16 districts politiques et administratifs (delegaciones) (9) qui sont chargés de l’exploitation et de l’entretien
des réseaux secondaires de distribution de l’eau et de drainage,
sous la direction de la DGCOH.
- Enfin, conformément au décret présidentiel du 21 octobre
1997 (Gouvernement du Mexique, 1997b), le Secrétariat des
travaux et services prend en charge, sous la direction du gouvernement du District fédéral, la responsabilité de l’exploitation
et l’entretien des réseaux secondaires de distribution d’eau et de
drainage. Cependant, ce décret ne stipule pas spécifiquement si
ces fonctions seront du ressort de la CADF ou de la DGCOH,
bien que, dans le cadre des interventions des quatre consortia,
il soit vraisemblable que la CADF en ait la charge.
Bien qu’en théorie un rôle distinct soit assigné à chaque
organisme, on assiste souvent, sur le terrain, à un manque de
coordination et même à des duplications et chevauchements au
niveau des interventions. En particulier, la mauvaise transmission des informations a des répercussions financières graves.
Les quatre consortia rencontrent généralement des difficultés
pour évaluer la rentabilité dans chacune de leur zone d’intervention (factures émises/payées) ou pour poursuivre les mauvais
payeurs, dans la mesure où, même s’ils connaissent les utilisateurs qui ont renvoyé leur paiement, ils n’ont pas accès à l’information concernant l’encaissement effectué auprès des
banques ou des autres services du Trésor. Pour tenter de pallier
certains de ces problèmes liés au manque de coordination, la
CNA continue d’approvisionner la ville en eau en gros, mais au
niveau du District fédéral, il est prévu de limiter les agences res-
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
Tableau 5 : Activités et responsabilités relatives aux réseaux d’adduction et
de distribution d’eau dans le District fédéral
Activités
Situation actuelle
Situation future
Transport en vrac de l’eau vers la ville
et épuration
Commission nationale de l’eau (CNA)
CNA
Distribution de l’eau en vrac vers le
réseau principal. Désinfection de l’eau
des puits souterrains. Exploitation des
stations de production d’eau potable
Secrétariat des travaux et services
(SOS) par l’intermédiaire de la
DGCOH
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
Installation et entretien des tuyaux de
raccordement de diamètre supérieur à
15 mm*
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
Exploitation et entretien du réseau
secondaire (phase transitoire)
Municipalités (delegaciones)
SOS (vraissemblablement par l’intermédiaire de la CADF)
Mise à jour du fichier utilisateurs, installation des compteurs et facturation
SOS par l’intermédiaire de la CADF
(tâches réalisées par les quatres compagnies)
SOS par l’intermédiaire de la CADF
Facturation. Les recettes sont destinées
au Département du Trésor
Trésor
SOS par l’intermédiaire de la CADF
Responsabilité de l’ensemble des
réseaux d’égouts
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
Responsabilité des réseaux profonds
d’égouts
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
SOS par l’intermédiaire de la DGCOH
Source : d’après des informations provenant de la CADF.
Remarque : * La CADF est responsable de l’installation et de l’entretien des tuyaux de raccordements de moins de 15 mm de diamètre.
ponsables de la distribution de l’eau au nombre de deux, à
savoir la DGCOH et la CADF (voir le tableau 5.), toutes deux
rattachée au Secrétariat des travaux et services du gouvernement du District fédéral.
l’amélioration ou la dégradation des fuites. Il serait intéressant
de savoir si cette mesure a été effectivement mise en place et si
elle peut être réglementée.
Le rôle de régulateur sectoriel de la CADF est plus direct au
niveau des contrats de services qu’à celui d’autres formes de
participation du secteur privé. Les gains des compagnies ne
proviennent que de l’exécution des contrats spécifiques passés
avec la CADF qui se charge par ailleurs de procéder à l’expertise des travaux. Le contrat général comprend une clause stipulant la révocation du contrat dans le cas où les performances
financières ou techniques de la compagnie sont contestables. À
l’origine, il avait été prévu d’inclure un système de prime/pénalité, calculé selon les données recueillies par la DR, relatives à
La réalisation de ce projet a été également affectée par la
première élection d’un gouvernement d’opposition à la tête du
District fédéral. Au moment de la prise de pouvoir du nouveau
parti (PRD), en décembre 1997, les autorités ont procédé à un
réexamen minutieux des contrats, qui a entraîné certaines
modifications des paramètres de la phase III à savoir, la révision
des prix relatifs aux interventions prévues dans cette phase. On
espère que les changements administratifs survenus en
décembre 2000 n’auront pas d’incidence grave sur le déroulement futur de ces contrats.
Dossier
73
Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
TARIFICATION
La participation du secteur privé à la distribution d’eau potable
du District fédéral et la teneur des contrats de services ont deux
conséquences essentielles au niveau social et environnemental
à savoir, la préservation des ressources limitées en eau et l’élargissement de l’accès aux ménages les plus pauvres. Le recensement des ménages, le dénombrement des raccordements, une
facturation plus rationnelle, enfin la rénovation des réseaux de
distribution, devraient permettre de mieux gérer les besoins en
eau et de ne pas faire peser de manière excessive l’augmentation des coûts sur les ménages les plus pauvres.
En ce qui concerne le District fédéral, les montants des tarifs
de l’eau qui figurent dans son Code financier sont actualisés
chaque année conformément aux recommandations des
experts de la CADF, de la Direction générale de construction et
opération hydraulique (DGCOH.), des municipalités, du
Département du Trésor et sont approuvés par l’Assemblée législative (gouvernement de Mexico, 1997a). Avant la mise en
place du plan actuel d’aménagement des ressources en eau, les
tarifs étaient fixes et largement subventionnés dans la plupart
des régions (Casasús, 1992). Malgré quelques tentatives effectuées par le biais de programmes d’information à caractère écologique, qui visaient à motiver la population du District fédéral
à mieux utiliser l’eau, les utilisateurs continuaient à considérer
que celle-ci était une denrée peu chère et disponible en quantité illimitée.
En 1997, l’Assemblée législative a approuvé la mise en
vigueur d’un nouveau système de tarification par mètre cube
consommé, de préférence à un forfait correspondant à une fourchette de volume donnée. Toutefois, dans le cadre du nouveau
plan d’aménagement des ressources en eau, bien que les compagnies privées soient souvent consultées, c’est aux autorités du
District fédéral qu’incombe, en dernier recours, la responsabilité de fixer les tarifs. Il est important de noter que la mesure de
la consommation individuelle de la plupart des utilisateurs n’a
été rendue possible que grâce aux travaux de recensement et
d’installation de compteurs stipulés dans les contrats de services.
Après la mise en place de la nouvelle facturation de la
consommation mesurée par les relevés de compteurs, l’usage
domestique de l’eau a diminué dans plusieurs zones d’une
moyenne de 20 % (10). Il faut cependant remarquer que, malgré ces améliorations, les tarifs actuels de l’eau ne couvrent
74
Dossier
même pas 50 % des coûts de pompage et d’acheminement de
l’eau vers la ville, et cela sans chiffrer la valeur de rareté de
l’eau.
Le fait que la population n’était pas « habituée à payer » a
encore accentué le phénomène de gaspillage de l’eau. Une
campagne d’information actualisée a fait augmenter de plus de
30 % le nombre des utilisateurs qui paient leur facture, et à ce
jour 82 % des factures émises sont payées. Conformément au
Code financier du District fédéral, les utilisateurs « mauvais
payeurs » peuvent voir leur consommation réduite à une
« ration minimale de survie ». De plus, comme il a été mentionné plus haut, la CADF estime que 68 % seulement de l’eau
fournie par le réseau de distribution arrive chez les consommateurs ; quelque 32 % étant perdus sous forme de fuites. On
notera ici que l’importante rénovation des réseaux a contribué
à la réduction de ces pertes d’eau.
Il n’en demeure pas moins de sérieux problèmes, en particulier celui de l’alimentation discontinue des nappes situées
dans la partie Est de la ville, qui est due en grande partie au fait
que les sources d’eau, qui proviennent de l’Ouest, alimentent
d’abord les quartiers de l’ouest et du centre de la ville, et sont
souvent taries avant de parvenir aux régions est. Il en résulte que
quatre municipalités dépendent de puits locaux surexploités,
dont l’eau, d’aspect souillé, contient du fer et du manganèse. Le
gouvernement du District fédéral a tenté de remédier à ces problèmes en distribuant l’eau à partir de camions-citernes (11).
Mais ces solutions étant apparues insuffisantes, le gouvernement recherche actuellement une solution plus durable, et
socialement plus acceptable à savoir, la construction d’une
conduite d’adduction (acuaférico) qui acheminera directement
l’eau d’Ouest en Est. Malgré un certain retard, l’achèvement des
travaux était initialement prévu pour 2005. En réalité, on se doit
de constater que ce projet ne sera réalisable que si la quatrième
phase des travaux nécessaires au niveau de l’unité de production de Cutzamala à savoir, l’arrivée de 5 m3 d’eau supplémentaires par seconde vers la ville, est effectivement terminée. En
fait, les principales raisons du retard du projet Cutzamala sont
d’ordre social ; les habitants des régions affectées par les travaux
nécessaires s’y sont opposés, car ils ne veulent pas souffrir de
dommages sous le prétexte que les habitants de la ville de
Mexico ont besoin d’eau (Tortajada, non daté).
Ces contrats de services sont susceptibles de contribuer à
alléger les charges financières des ménages les plus pauvres car
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
En réalité, plus de la moitié des consommateurs résidentiels
(ayant une consommation de 30 à 220 m3 ) ont observé une
baisse significative des tarifs entre 1996 et 1998. Cette réduction est due à l’augmentation de la subvention croisée entre utilisateurs résidentiels et non-résidentiels. Dans le même temps,
les consommateurs non-résidentiels ont vu leurs tarifs augmenter en termes nominaux et en monnaie constante, ce qui a
entraîné une augmentation des écarts de prix. Dans la mesure
où la consommation des consommateurs non-résidentiels correspond à environ un quart de la consommation totale, le prix
réel à la consommation a diminué. La baisse des tarifs de l’eau
en monnaie constante peut s’expliquer d’une part par la dévaluation du peso en décembre 1994, d’autre part, par la crainte
des politiques d’augmenter les tarifs.
Cependant, ces subventions croisées ne profitent qu’aux
ménages raccordés au réseau. Selon la Commission des droits
de l’homme du Mexique, les ménages très pauvres paient cinq
fois plus cher l’unité de volume d’eau, dans la mesure où précisément ils n’ont pas accès à l’eau courante dans leur habita-
Paiement en pesos courants
(pago de derechos en pesos corrientes)
la mesure de la consommation par les relevés de compteurs et
les tarifs basés sur la consommation réelle pourront permettre
de mettre en place des subventions croisées entre ménages
riches et pauvres. Bien que la tarification progressive par
tranches, qui permet ces subventions croisées, soit de plus en
plus largement appliquée dans le District fédéral, ses implications réelles n’en sont pas si évidentes. Entre 1996 et 1999, les
tarifs ont légèrement augmenté (en valeur relative) pour les utilisateurs résidentiels qui consommaient moins de 30 m3 tous les
deux mois, alors qu’ils ont considérablement augmenté pour
ceux qui consommaient plus de 120 m3. Pour les consommations comprises entre 30 à 90 m3, aucun changement significatif de tarifs n’est intervenu, et certains utilisateurs ont même profité de certaines réductions les incitant ainsi à payer leur facture. Enfin, pour les consommations comprises entre 90 et
120 m3, les tarifs ont légèrement augmenté (voir figure 2). Il est
intéressant de noter que, selon la CADF, environ deux tiers des
utilisateurs résidentiels consomment moins de 60 m3 tous les
deux mois. En 2000, les utilisateurs qui consommaient 30 m3
payaient environ 0,13 dollars US par m3.
Consommation (mètres cubiques)
Source : Données provenant du Code financier du District fédéral
Le graphique présente les tarifs de 1996 à 2000 et les paiements selon la consommation
Figure 2 - Paiements selon la tarification dans le District fédéral
Dossier
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Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
tion et doivent se fournir auprès d’autres prestataires dont les
tarifs sont beaucoup élevés. Il existe en fait peu de données
concernant l’approvisionnement en eau de ces ménages les
plus pauvres habitant dans le District fédéral. Des études
concernant les installations non-conformes ont montré que certains résidents étaient approvisionnés gratuitement en eau par
des camions-citernes, alors que d’autres étaient facturés d’après
des relevés de compteurs dûment installés, et que d’autres
encore payaient un forfait (Conseil national pour la recherche,
1995). De plus, l’augmentation des tarifs par tranches peut
affecter les ménages qui dépendent de plusieurs raccordements
différents. En tout état de cause, de sérieux efforts sont entrepris
pour parvenir à installer un compteur par ménage et émettre
des factures distinctes.
Au sein du District fédéral, une réduction de 50 % est
allouée, sur justification, aux retraités ou aux résidents de plus
de 60 ans. En outre, l’annulation des pénalités de retard de
paiement et les amendes contractées entre 1995 et 1998, a été
consentie aux résidents qui ont régularisé leur situation en un
seul versement (Gouvernement du Mexique, 1999). Il est intéressant de noter que le gouvernement du District fédéral perpétue sa tradition d’exemption des pénalités de retard de paiement ou de réduction des factures dans le but de régulariser la
situation des débiteurs. Mais si celles-ci se poursuivent, ces initiatives répétées risquent d’inciter les consommateurs à ne plus
respecter les délais de paiement.
Enfin, la Commission de l’eau du District fédéral est
confrontée à la pression de plusieurs catégories de la population qui se sont plaintes des services de l’eau. Certains grands
ensembles d’immeubles notamment n’autorisent pas l’installation de compteurs et ne sont pas satisfaits du nouveau système
de facturation. D’autres utilisateurs encore considèrent qu’ils ne
constatent pas les améliorations des services qui auraient dû
accompagner l’augmentation des tarifs. (Secrétariat des travaux
et services, 1998).
CONCLUSION.
Depuis 1993, la participation du secteur privé dans le domaine
de l’eau s’est progressivement mise en place, à Mexico, par le
biais de contrats de services. L’exécution des contrats a été
ralentie par la crise financière de 1995 et par l’insuffisance des
réglementations, ou par son excès avec des coordinations sec-
76
Dossier
torielles qui ont nécessité certaines renégociations. De nombreuses leçons ont donc été tirées de cette procédure.
La réalisation des travaux effectués sous contrat s’est, jusqu’à présent, avérée assez satisfaisante. Malgré quelques difficultés, les termes du contrat avaient prévu et ont su entériner
certains changements de procédures, notamment le transfert de
la responsabilité du réseau secondaire et de la facturation à la
CADF. Au niveau du District fédéral, la couverture du réseau
n’ayant pas été considérée comme l’objectif primordial, l’effort
a essentiellement porté sur l’amélioration de la performance des
services. On notera également que les collectivités locales, responsables du secteur de l’eau, n’ont pas été contraintes à
prendre en charge l’ensemble des coûts nécessaires au développement de nouvelles sources d’approvisionnement en eau
car elles devaient financer d’autres projets, tels que, par
exemple, les travaux sur le site de l’unité de production d’eau
de Cutzamala, qui, de ce fait, n’ont pas nécessité un important
investissement du secteur privé.
Les contrats de services ont présenté de grands avantages
par rapport à des contrats de concessions. Ces derniers auraient
été bien plus difficiles et hasardeux et auraient nécessité un
cadre juridique et réglementaire bien plus complexe. Mais,
malgré certaines réformes récemment mises en place, de nombreuses améliorations sont à envisager, notamment au niveau
de la réglementation.
L’approche échelonnée sur plusieurs phases a permis la collecte d’informations supplémentaires qui permettront d’établir
de meilleurs contrats et d’améliorer les réglementations du secteur eau. Elle a également apporté, par rapport à un contrat de
concession, une certaine souplesse qui a permis de corriger des
dysfonctionnements et de s’adapter à des situations imprévues.
Le fractionnement du contrat général en quatre contrats différents a permis aux pouvoirs publics de mieux réglementer le
secteur et de pouvoir établir des normes de performances au
niveau des entreprises. Il n’en reste pas moins que, dans la pratique, l’organisme de réglementation a été confronté à certaines
difficultés pour précisément comparer ces performances. Par
ailleurs, au niveau budgétaire, dans la mesure où le projet a été
conçu pour se dérouler en trois phases, certaines entreprises ont
pu, soit surfacturer la première phase, et alléger les autres, soit
procéder inversement. En fait, dans certains cas, les prix unitaires fournis par les entreprises ne concordaient pas avec les
Saade-Hazin - La gestion de l’eau à Mexico D.F.
coûts réels ; c’est ainsi que des municipalités différentes se sont
vues proposer des prix différents dans la même zone.
D’autre part, les changements administratifs survenus dans
les années 1997 et 2000 ont vraisemblablement influencé le
déroulement de ce projet dont la nécessité aurait dû dépasser
les considérations politiques.
Il paraît évident qu’un aménagement plus efficace des ressources en eau nécessiterait d’importants changements institutionnels. Dans la mesure où les entrepreneurs élargissent le
champ de leur responsabilité, fournissent de nouvelles informations sur les consommateurs et sur les éléments d’actifs, de nouveaux progrès ne seront accomplis et ne dépendront alors souvent que de la volonté et de la capacité des organismes de
réglementation. Il serait donc très utile de bien analyser les deux
rôles — entrepreneur et organisme de réglementation — de la
CADF, et d’examiner la possibilité et l’intérêt de séparer les
deux fonctions. On notera que les profits éventuels, entraînés
par la participation du secteur privé, sont limités par les termes
du contrat.
Enfin, au vu des relations importantes entre les réseaux de
distribution d’eau et les réseaux d’égouts qui desservent à la fois
le District fédéral et l’État de Mexico au sein de l’agglomération
métropolitaine de Mexico (ZMVM), il a été envisagé de créer
une Commission de l’eau métropolitaine qui coordonne les
actions dans l’ensemble de l’agglomération. Ce projet nécessite, de toute évidence, de plus amples débats, ceci d’autant plus
que l’eau provient des mêmes sources et que le manque d’eau
se fait sentir plus particulièrement dans les quartiers de la
ZMVM situés hors du District fédéral.
Lilian Saade Hazin
L’auteur fait partie de la Division de Management et institutions de
l’Institut international pour l’infrastructure, l’environnement et le génie
hydraulique (IHE-Delft). Elle a été conseillère auprès du ministre
chargé de l’aménagement au ministère de l’environnement, des
ressources naturelles et de la pêche du Mexique. Les opinions
exprimées dans cet article n’engagent que son auteur et ne reflètent
pas nécessairement celles des institutions auxquelles elle est rattachée.
NOTES
(1) Selon la CADF, ce chiffre est tombé de 37 % en 1997 à
environ 32 % en 1999.
(2) En ce qui concerne le réseau de distribution de l’eau et
les interconnextions entre les zones de services du District fédéral et de l’État de Mexico (ZMVM), se reporter aux données du
Conseil national pour la recherche (1995).
(3) Le contrat n’est pas confidentiel. Les informations qui y
figurent proviennent d’un document préétabli.
(4) Entretien avec le personnel de la CADF.
(5) Entretien personnel avec Agua de Mexico.
(6) CADF. Entretien personnel.
(7) De l’avis des entrepreneurs.
(8) Les quatre compagnies ne sont pas toutes impliquées
dans la facturation des gros utilisateurs.
(9) Le District fédéral est sous-divisé en districts politiques et
administratifs, les « delegaciones ». À la fin de l’année 1997, les
chefs des delegaciones avaient été élus par l’Assemblée législative après nomination par le Chef du gouvernement ; en juillet
2000, ils ont été élus par tous les citoyens de la capitale, au suffrage universel direct.
(10) Selon les estimations des entreprises.
(11) De plus, des efforts ont été entrepris pour ralentir l’urbanisation des régions sud-ouest du District fédéral ; on est en
effet confronté à des difficultés pour fournir les services essentiels dans ce secteur, qui, par ailleurs, possède un réservoir
naturel aquifère important.
Dossier
77
Flux n° 44/45 Avril - Septembre 2001
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