Traitement des eaux usées domestiques au Cameroun

Transcription

Traitement des eaux usées domestiques au Cameroun
Proceedings of International Symposium on Environmental Pollution Control and Waste Management
7-10 January 2002, Tunis (EPCOWM’2002), p.726-736.
Traitement des eaux usées domestiques au Cameroun : Performances épuratoires comparées
du lagunage a macrophytes et du lagunage a microphytes
Sewage treatment in Cameroon: Comparison of the purifying efficiency of macrophytic and
microphytic lagoon systems
NYA J.1, BRISSAUD F.2, KENGNE I.M.1, DRAKIDES C.2, AMOUGOU Akoa1, ATANGANA ETEME R1., FONKOU T.3,
& P.L. AGENDIA †
1.
Wastewater Research Unit, Faculty of Science, University of Yaounde I, P.O. Box: 8404 Yaounde, Cameroon.
Email : [email protected] ; [email protected]
2.
Hydrosciences, University of Montpellier II, France, 34095, Montpellier Cedex 05
3.
†
Faculty of Science, University of Dschang, P.O. Box: 67 Dschang, Cameroon
In memoriam
ABSTRACT
In order to propose a long-lasting administration of domestic sewage of a quarter of Yaounde, a study of the
purification performance of macrophytic (November 1997 to October 1998) and microphytic (October 1999 to
September 2000) lagoons was carried out at the Biyem-Assi pilot plant (750 m2 and serves a population of 650
inhabitants). The main results showed:
The plant, a series of 8 ponds is overloaded according to international standards and the charge increase from a year to
another (450 kg/DBO/ha/j and 530 kg/DBO/ha/j respectively for the first and the second study).
Wastewater quality is more improved for most of the physico-chemical parameters during macrophytic stage in
comparison with microphytic. Meanwhile, the reduction of nutrients and bioindicators of faecal contamination is neatly
better with microphytic lagoon (CF : 1,5 104, UFC; SF : 6 103 UFC and CF : 2,7 105, UFC; SF : 3,6 104 UFC
respectively for microphytic and macrophytic lagoons).
As the priority of water purification in Africa is to protect the population against water borne diseases, the
microbiological efficiency is a noteworthy argument on the choice of the procedure to be exploited and in this case,
plead in favour of microphytic lagoon. Moreover, the raising of the size of the first pond could significantly improve
efficiency of this method.
KEYWORDS
sewage, macrophytic lagoon, microphytic lagoon, abatement.
1. Introduction
La gestion des déchets en général et des déchets liquides en particulier constitue aujourd’hui, une question
environnementale très préoccupante dans les pays tropicaux. Si ce constat est général, la situation est particulièrement
grave dans les zones urbaines en raison des fortes densités de population. Face à cette menace, la plupart des pays
africains, au lendemain de leur indépendance ont opté pour les systèmes classiques d’épuration des eaux usées (boues
activées notamment) (Agendia, 1995 ; Kengne, 2000). Mais, ce choix technologique s’est souvent révélé très inadapté à
cause du coût très élevé des installations et de leur équipement, de l’absence de techniciens bien préparés à assurer leur
726
Performances épuratoires
maintenance et des choix de priorité fait par les puissances publiques : d’où la vétusté du matériel, la surcharge et
l’abandon des ouvrages. Par ailleurs, la croissance démographique dans ces pays est si rapide qu’à moyen terme, les
systèmes d’assainissement à envisager doivent être flexibles et modulables, ce qui n’est pas le cas de ces derniers.
Pourtant, pour apporter des solutions à ce problème, il existe des alternatives connues, tant du point de vue
technique, que du point de vue socio-économique : ce sont les méthodes naturelles de traitement des eaux usées
(Ghrabi et al, 1993). Parmi elles, les lagunages, et en particulier, le lagunage à macrophytes et à microphytes sont en
pleine expansion en Afrique (Mara, 1982).
Ces deux formes de lagunage sont aujourd’hui en compétition ouverte en Afrique. Or, leurs performances ne
sont pas équivalentes, et les avis des chercheurs sont partagés.
La controverse qui oppose le lagunage à macrophytes au lagunage à microphytes apparaît dès lors comme un enjeu
important pour le développement des stratégies d’assainissement appropriées en Afrique. Il importe donc de déterminer,
dans le contexte régional, le niveau respectif de compatibilité de chaque système avec son environnement et de
progresser dans la caractérisation de leurs performances.
La présente étude a donc pour but, d’évaluer les performances épuratoires physico-chimiques et bactériologiques d’une
installation de lagunage, exploitée successivement sous la filière à macrophytes et à microphytes, l’étude devant à
terme guider le choix du système à mettre en œuvre.
2.Description du site, matériel et méthodes
Créée en 1986 avec le concours de la MAETUR, de LRE et de la Faculté des Sciences de l’Université de
Yaoundé, la station pilote de Biyem-Assi a servi de cadre à ce travail. Cette station d’une superficie de 1000 m² traite
environ 45 m3 d’eaux usées brutes par jour en provenance du Camp SIC de la même localité. Elle est située dans la
partie sud de la ville de Yaoundé (capitale politique du Cameroun) (Fig. 1). Elle comporte 8 bassins disposés en série
(B0, B1, B2, B3, B4, B5, B6, B7) (Fig. 2), séparés par des digues de terre compactée d’un mètre de largeur et
communiquant entre eux par des tuyaux PVC (polyvinylchlorure). Les eaux usées circulent par simple gravité d’un
bassin à l’autre ; elles se déversent par trop plein dans l’autre. La forme géométrique des bassins ainsi que
l’emplacement des ouvrages de communication ont été conçus afin d’éviter les zones d’eaux mortes et les écoulements
préférentiels. Les données de bases ainsi que les caractéristiques de chaque bassin sont détaillées respectivement dans
les tableaux I et II.
Le fonctionnement du système est divisé en deux phases principales : une phase primaire de décantation-digestion
anaérobie dans le bassin B0 où la matière organique solide est décradée et liquéfiée. Les plantes telles que Enydra
fluctuans, Commelina nudiflora et Ipomoea aquatica y sont cultivées et permettent la stabilisation de la croûte
semi-solide provenant de la remontée en surface des matières fermentescibles ; une phase secondaire de lagunage
proprement dite dans les bassins B1 à B7. Au cours du cheminement de l’eau dans cette partie, 2 composantes
essentielles contribuent à l’épuration : ce sont d’une part les micro-organismes qui décomposent la matière organique et
d’autre part, les plantes (macrophytes) ou le phytoplancton (microphytes) qui absorbent ces substances issues de la
dégradation microbienne tout en leur fournissant un microclimat favorable à leur croissance (métabolites, O2 dissous,
etc.).
Pour l’exploitation du lagunage à macrophytes, Pistia stratiotes (macrophyte flottant) constitue le support de
l’épuration. Cette plante a été ensemencée dans tous les bassins de lagunage. Son système racinaire très développé
constitue un support pour les microrganismes aérobies. Elle se multiplie par stolonification et son cycle de vie est très
court. Pour une bonne gestion, il est recommandé de récolter tous les 25e jour, 3/5e de sa biomasse dans chaque bassin,
ce qui permet de la maintenir en permanence en phase d’activité maximale.
727
Nya et al.
Pour l’étude du lagunage à microphytes, les plantes telles que Enydra fluctuans et Ipomoea aquatica ont été
ensemencées dans les bassins B1 afin d’atténuer l’émanation des mauvaises odeurs. Les bassins B2 à B7 ont été
totalement débarrassés des plantes afin de favoriser le développement du phytoplancton.
Tableau I. Données de bases de la station pilote de Biyem-Assi
Constructional characteristics of the Biyem-Assi treatment system
Données
Population desservie
Débit de l'affluent
Surface totale occupée par la station
Surface totale occupée par les bassins
Nombre de bassins d'épuration
Temps de rétention
Observations
Environ 650 habitants
32 à 59 m3/jour
1000 m2
720m2
8
12 – 17 jours
Table II. Caractéristiques des différents bassins
Design characteristics of the different ponds
Bassins
B0
B1
B2
B3
B4
B5
B6
B7
Longueur (m) Largeur
(m)
7,5
3,5
22
4,4
22
4,3
22
4,4
22
4,3
22
4,3
22
4,4
18
6,6
Profondeur (m)
1,8
0,7
0,8
0,9
0,8
0,9
0,9
0,5
Surface
(m2)
26,3
97,0
94,0
96,0
95,0
95,0
96,0
119,0
Volume
(m3)
47,3
67,9
75,2
86,5
76,0
85,5
86,4
59,5
L’évaluation du lagunage à macrophytes a été effectuée entre novembre 1997 et octobre 1998, sur des
échantillons d’eau prélevés toutes les 2 semaines en matinée, à l’entrée et à la sortie de chaque bassin. Quant au
lagunage à microphytes, son évaluation a eu lieu entre octobre 1999 et septembre 2000 suivant la même périodicité.
Les paramètres physico-chimiques suivants ont été mesurés : la conductivité de l’eau (CND), les solides
dissous totaux (SDT), les matières en suspension (MES), la turbidité, la couleur, l’oxygène dissous (OD), la demande
biochimique en oxygène (DBO5), la demande chimique en oxygène (DCO), le phosphore (P), l’ammoniaque (NH4+) et
les nitrates (NO3-). L’analyse bactériologique a porté sur les coliformes fécaux (CF) et les streptocoques fécaux (SF).
Les débits et la température ont aussi été mesurés.
Les analyses ont été faites à partir du protocole expérimental décrit par HACH (1992) et contenu dans Water
Analysis Hand Book. Pour ce qui est des analyses microbiologiques, la méthode dite "colimétrie sur membrane
filtrante" a été utilisée. Pour la détermination des coliformes fécaux, le milieu de culture utilisé a été la gélose lactosée
au TTC 7 et au tergitol, et la culture incubée à 44,5 ± 0,5°C pendant 24 heures. Pour ce qui est des streptocoques fécaux,
la gélose à la bile, à l’esculine et l’azide de sodium (Bile esculin azide agar) a été utilisé, le tout incubé pendant 24
heures à 35 ± 0,5°C.
Les différents résultats ont été comparés à partir du logiciel MINITAB Release 8 en utilisant le test non
paramétrique de KRUSKALL-WALLIS.
728
Performances épuratoires
Fig. 1. Localisation géographique de la station de Biyem-Assi.
Geographic localisation of the Biyem-Assi domestic sewage treatment system.
Affluent
B0
B7
B1
B2
B3
B4
B5
B6
Fig. 2. Plan de masse de la station de lagunage de Biyem-Assi.
Layout of the Biyem-Assi pilot domestic sewage treatment system.
729
Effluent
Nya et al.
3. Résultats et analyses
•
Caractéristiques de l’ affluent
La station pilote de Biyem-Assi reçoit en moyenne entre 44 et 48 m3 d’eau usée chaque jour. La charge
polluante de l’affluent est très élevée (1628 et 2367 mg/l de DCO ; 835 et 880 mg/l des MES ; 709 et 756 mg/l de
DBO5; 2,5 et 8,5 x 107 UFC/100 ml de CF ; 1,7 et 13 x 106 UFC/100 ml de SF, etc. respectivement pour le lagunage à
macrophytes et à microphytes). Les températures sont constantes et élevées (26,5 °C et 27,2 °C en moyenne
respectivement pour l’affluent du lagunage à macrophytes et du lagunage à microphytes). Les teneurs en oxygène
dissous sont relativement faible (0,2-0,3 mg/l). Le rapport de la DCO/DBO5 est très élevé lors de la filière à
microphytes (3,15) (tableau III). Globalement, on note une nette augmentation des concentrations des différents
polluants dans les eaux brutes au cours de l’exploitation du lagunage à microphytes par rapport au lagunage à
macrophytes (p = 0,012).
Table III : Caractéristiques physico-chimiques et bactériologiques de l’affluent
Physicochemical and bacteriological characteristics of the affluent
Paramètres
Type de lagunage
Max - Min
Moyenne ± δ
Débit (m3/j)
Macrophytes
38 - 50
44 ± 4,4
Microphytes
22,1 – 55,2
48 ± 12,77
PH
Macrophytes
6,80
– 8,88
7,63 ± 0,39
Microphytes
7,38 – 8,33
7,78 ± 0,30
T (°C)
Macrophytes
23,3 - 30
26,5 ± 1,6
Microphytes
25,1 – 29,6
27,2 ± 1,0
CND (µS/cm)
Macrophytes
740 – 2300
1504 ± 342
Microphytes
840 – 2250
1500 ± 327
MES (g/l)
Macrophytes
300
– 3480
835 ± 572
Microphytes
370 – 1885
880 ± 389
Turbidité (FTU)
Macrophytes
280 – 4425
790 ± 1197
Microphytes
590 – 2700
1136 ± 494
Couleur (Pt-Co)
Macrophytes
915 – 8150
2859 ± 726
Microphytes
2380 – 7400
4058 ± 1438
OD (mg/l)
Macrophytes
0 – 2,5
0,3 ± 0,8
Microphytes
0,006 – 0,535
0,20 ± 0,147
DCO (mg/l)
Macrophytes
720 – 3930
1628 ± 726
Microphytes
1330 – 4170
2367 ± 914
DBO5 (mg/l)
Macrophytes
338
– 994
709 ± 139
Microphytes
480 – 975
756 ± 136
P (mg/l)
Macrophytes
8 – 254
32,4 ± 39,3
Microphytes
15,0 – 103,9
51,5 ± 20,1
NH4+
Macrophytes
11 – 230
121,2 ± 45,1
Microphytes
30 – 255
144 ± 55
CF (UFC/100 ml)
Macrophytes
2,05 x 107
1,1 x 106 – 1,6 x 108
7
Microphytes
8,5 x 10
11 x 106 – 2,4 x 108
6
SF (UFC/100 ml)
Macrophytes
1,7 x 10
3 x 106 – 1,6 x 108
7
Microphytes
1,3 x 10
106 – 1,6 x 108
•
Profil d’élimination des différents polluants
La figure 3 montre l’évolution des paramètres indicateurs de la pollution dans les différents bassins le long
des deux filières de traitement. Globalement, on note une forte réduction des polluants dans les 3 premiers bassins
730
Performances épuratoires
(correspondant à environ 80 % d’abattement). Le pH, alcalin dans tout le système (pH 7-8), augmente légèrement entre
le 2e et le 8e bassin de lagunage. Dans l’ensemble, la cinétique d’élimination des polluants physico-chimiques présente
la même allure pour les 2 filières d’assainissement, même si une légère baisse est observée dans le lagunage à
microphytes (MES : 89 contre 30 mg/l ; DCO : 244 contre 139 mg/l ; DBO5 : 151 contre 83 mg/l respectivement pour
l’effluent du lagunage à macrophytes et à microphytes).
En revanche, le comportement du lagunage à microphytes assure une meilleure élimination des germes
pathogènes (5,4 contre 4,16 unité log. de CF et 4,55 contre 3,78 unité log de SF respectivement pour le lagunage à
macrophytes et à microphytes), soit environ une amélioration d’une unité log. de micro-organismes en faveur du
lagunage à microphytes (p = 0,033).
* Performances épuratoires des différentes méthodes
La figure 4 et le tableau IV résument respectivement les abattements des différents paramètres
physico-chimiques et microbiologiques suivant les différentes filières d’assainissement considérées. Les paramètres
physico-chimiques tels que les MES, la turbidité, la couleur et la DBO5 présentent un meilleur abattement par le
lagunage à macrophytes. En revanche, les nutriments (P et NH4+) et les germes tests de contamination fécale sont
nettement mieux réduits par le lagunage à microphytes. Cette faible élimination des nutriments contraste ainsi quelque
peu avec les qualités généralement accordées au lagunage à macrophytes dans ce domaine.
4. Discussion et conclusion
Le faible débit à l’entrée de la station caractérise les ménages à faible consommation d’eau (environ 70 et 74
l d’eau par habitant contre 150 à 200 l/ha en Europe et jusqu’à 250 à 400 l / ha au USA) (Reddy & d’Angelo, 1996). Il
est responsable de la forte concentration des polluants. La charge moyenne appliquée est d’environ 530 et 450 kg de
DBO5/ha/jour respectivement pour le lagunage à microphytes et le lagunage à macrophytes, ce qui est du double au
triple de la valeur admissible dans les ouvrages de lagunage, c’est-à-dire 150 à 350 kg/ha/jour de DBO5 en région
tropicale (Gamrasni & Phelippot, 1976).
Une mesure de la vitesse de comblement des fonds effectuée dans les lagunes à microphytes a permis
d’enregistrer un dépôt de l’ordre de 25,1 cm dans le bassin B2 et de 8,8 cm dans B3 au cours de l’étude, montrant ainsi
la forte surcharge des bassins de tête. Cette remarque peut être liée au fait que la station à l’origine avait été construite
pour être exploitée sous la filière à macrophytes.
Le rapport DCO/DBO suggère que l’affluent n’est pas strictement d’origine domestique. La station traitant
uniquement les eaux usées en provenance de la SIC (Cité de la localité), ce résultat indique que les différents résidents
se livreraient à des activités autres que domestiques. Par ailleurs, la différence de ce rapport pendant les deux
expériences indique une variation des mœurs de la population concernée. L’augmentation de cette charge d’un essai à
l’autre est l’effet d’une augmentation continue des usagers de la station qui accentue le sousdimensionnement du
système au fil des années. Dans ces cas de figure, il est donc souhaitable de porter la profondeur du bassin de tête à plus
de 3 m, pour piéger les sédiments et éviter la généralisation de l’anaérobiose et permettre aux bassins suivants de mieux
fonctionner (Saggar and Pescod, 1995).
731
Nya et al.
8
OD (mg/l)
15
pH
7,5
7
10
5
6,5
0
B0
B1
B2
B3
B4
B5
B6
B7
B0
B1
B2
Bassins
Turbidité (FTU)
P (mg/l)
20
0
B0 B1 B2 B3 B4 B5 B6 B7
CND (µS/cm)
Couleur (Pt-Co)
Bassins
B6
B7
6000
4000
2000
500
0
B0 B1 B2 B3
2000
1500
1000
500
0
0
B0 B1
B2 B3 B4 B5
B4 B5 B6 B7
Bassins
B0
B6 B7
B1
B2
B3
B4
B5
B6
B7
B5
B6
B7
Bassins
Bassins
3000
1000
800
600
400
200
0
DCO (mg/l)
MES (mg/l)
B5
1000
40
B0
B1 B2
B3 B4
B5 B6
2000
1000
0
B0
B7
B1
B2
B3
B4
Bassins
Bassins
200
B0
B1 B2 B3 B4 B5 B6
Bassins
NH4+ (mg/l)
800
600
400
200
0
DBO5 (mg/l)
B4
1500
60
B7
10
SF
(log. FC/100ml)
Microphytes
6
4
2
0
B0
B1
B2 B3
Bassins
B4
B5
B6
50
0
B0 B1 B2 B3 B4 B5 B6 B7
Microphytes
Macrophytes
8
150
100
Bassins
Macrophytes
CF
( log. UFC/100 ml
B3
Bassins
B7
8
Macrophytes
6
Microphytes
4
2
0
B0 B1 B2 B3 B4 B5 B6 B7
Bassins
Fig.3. Profils des différents paramètres caractéristiques de la pollution pour les deux méthodes d’épuration.
Pollution profiles for macrophytic and microphytic lagooning..
732
Performances épuratoires
Macrophytes
100
Microphytes
Taux d'abattement (%)
90
80
70
60
50
40
30
20
10
0
MES
Turbidité
P
NH4+
Couleur
DCO
DBO5
Paramètres de pollution
Fig. 4. Abattement des paramètres physico-chimique par chaque système.
Percentage improvement of the different parameters in the system.
Tableau IV. Abattement et caractéristiques microbiologiques des effluents
Abatement and the microbiological characteristic of the effluents
CF
SF
Bio-indicateurs UFC/100 ml Effluent
Lagunage à microphytes
14,5 × 103
Lagunage à macrophytes
Lagunage à microphytes
Lagunage à macrophytes
14,5 × 104
6 × 103
1,7 × 104
Abattement
99,982
99,000
99,953
99,927
La forte réduction des polluants dans les 3 premiers bassins est due principalement à la sédimentation des
polluants (Tchobanouglos, 1987). Le ralentissement de l’élimination dans les bassins suivants est l’action d’une
synergie d’action des facteurs climatiques, de la faune, de la flore, des processus redox et de précipitation, la
sédimentation étant faible. La baisse des charges dans les lagunes à macrophytes est due, en plus du métabolisme
végétal, à un piégeage des particules polluantes par les racines des plantes qui sont ensuite régulièrement récoltées
(Agendia, 1995 ; Agendia et al., 1999).
Le rendement épuratoire du lagunage à microphytes est sous-estimé par la méthode d’analyse, laquelle ne fait
pas fait intervenir la filtration des échantillons. En effet, dans les effluents des lagunages naturel, les algues peuvent
constituer jusqu’à 50% de la matière organique de néoformation (DBO biologique) (Pujol, 1982 ; Pearson et al., 1995 ;
Brönmark & Hansson, 1999), ce qui n’est pas le cas des lagunes à macrophytes où leur croissance est fortement inhibée.
Par ailleurs, la plus forte concentration de l’affluent du lagunage à microphytes crée un fonctionnement pratiquement
en anoxie des premiers bassins, inhibant la croissance des micro-organismes bactériens responsables de l’épuration. Les
courts temps de séjour (12 jours et 16 jours respectivement pour le lagunage à microphytes et le lagunage à
macrophytes), limitent les performances des lagunages. L’augmentation du pH dans les lagunes à microphytes est liée à
une consommation du CO2 au cours des activités photosynthétiques dans le milieu.
733
Nya et al.
La photolyse a une part essentielle dans la réduction des bioindicateurs de la pollution fécale. L’efficience
microbiologique des bassins à microphytes serait donc à prédominance liée à la facilité de pénétration des rayons
lumineux. Ce résultat confirme ainsi son rôle capital dans la désinfection des effluents domestiques (Mara, 1982 ;
Mandi et al., 1993 ; Saggar & Pescod, 1995).
La faible élimination des nutriments dans la filière à macrophytes pourrait s’expliquer par les phénomènes de
translocation racinaire des substances exocrines (Anonyme, 1975). De plus, la faible réduction des ions ammonium
serait également la conséquence d’une faible volatilisation, laquelle est importante dans les lagunes à microphytes
quand le pH est assez élevé (pH > 8). Par ailleurs, la forte élimination du phosphore serait à mettre en partie au compte
de la sédimentation des algues mortes. En effet, les algues sont capables de métaboliser et d’accumuler des grandes
teneurs en phosphore sous forme de polyphosphates au-delà des besoins nécessaires, pour leur croissance et le transfert
d’énergie (Reddy et al., 1999).
Des résultats similaires ont été observés par plusieurs auteurs parmi lesquels Mandi et al., 1993 et Ouazzani et
al. (1995), évaluant l’efficacité comparée de ces deux types de lagunage au Maroc. En effet, ils obtiennent
respectivement un abattement de 78 et 50% de P, 63 et 60% NH4+ par le lagunage à microphytes contre seulement 26 et
37% de P, 50 et 50% NH4+ par le lagunage à macrophytes, cependant 50 et 52 % de DCO par le lagunage à
microphytes contre 78 et 80% de DCO par le lagunage à macrophytes, corroborant ainsi l’efficience du lagunage à
microphytes pour l’abattement des nutriments.
Les deux systèmes étudiés présentent une efficience microbiologique certaine (abattement > 99 %). Cependant,
avec une plus grande efficacité du lagunage à microphytes (réduction de plus d’une unité logarithmique de
micro-organismes dans l’effluent) (Fig. 3).
Malgré la surcharge de l’installation, le rendement microbiologique des 2 filières est supérieur à celui obtenu à
la station de l’EIER de Ouagadougou où, bien qu’ayant un temps de rétention plus long (18 jours) les abattements ne
sont que de 2,2 unités log pour les SF et de 2,4 unités log. pour les CF) (Klutsé, 1995) ; ou de celui obtenu par Mandi et
al., (1993) à Marrakech (abattement de 2,4 unités log pour les SF et 2,7 unités log. pour les CF avec un temps de
rétention de 50 jours). Ces bonnes performances sont dues pour l’essentiel à la géométrie des lagunes et la faiblesse des
vents qui favorisent un écoulement de type "piston".
La présente étude qui avait pour but de comparer les performances épuratoires physico-chimiques et
bactériologiques du lagunage à macrophytes et du lagunage à microphytes en climat tropical nous a permis de faire
plusieurs remarques intéressantes.
La station est plus surchargée (530 kg/DBO/ha/j au cours de l’exploitation du lagunage à microphytes ce qui
se traduit par une détérioration progressive des eaux brutes au fil des années. Cette forte concentration des eaux est due
à une faible consommation d’eau (70 l/ha) par ses usagers. Le rapport de la DCO/DBO5 est élevée et indique que les
eaux usées traitées ne sont pas exclusivement domestiques.
Sur le plan physico-chimique, le lagunage à macrophytes présente une plus grande efficience (MES, DBO5,
DCO, etc.). Cependant, il est à noter que l’analyse a été réalisée sur des échantillons non filtrés. En revanche,
l’abattement des nutriments (P et NH4+) est meilleur par le lagunage à microphytes, ce qui met ainsi en doute
l’efficacité accordée au lagunage à macrophytes sur ce plan.
Pour ce qui est des performances microbiologiques, elles sont appréciables dans les deux cas. Plus
spécifiquement, on obtient respectivement 99,98 % et 99,95 % de réduction de CF et de SF par le lagunage à
microphytes et 99,00 % et 99,92 % de réduction de CF et de SF par le lagunage à macrophytes. Ces performances
montrent une amélioration d’environ une unité log. d’abattement dans les effluents du lagunage à microphytes par
rapport au lagunage à macrophytes.
734
Performances épuratoires
Au terme de ce travail, il est à remarquer que chaque filière de lagunage présente une certaine spécificité. Ainsi,
si le lagunage à macrophytes montre une efficience certaine sur le plan physico-chimique, le lagunage à microphytes la
présente sur le plan microbioloque. Cependant, l’efficacité du lagunage à microphytes pour la réduction des nutriments
pourrait plaider en sa faveur. Alors, des travaux visant à améliorer ses performances seront très attendus. Il s’agira donc
ultérieurement, d’associer des poissons algivores dans les bassins de fin de séries afin de contrôler la pollution
biologique ; de redimensionner l’unité de tête afin d’éviter l’anaérobiose des bassins suivants.
Remerciements
-
Cette étude a été menée par les chercheurs du Wastewater Research Unit de la Faculté des
Sciences de l’Université de Yaoundé I et ceux du Laboratoire Hydrosciences de l’ISTEEM de
Montpellier II (France), dans le cadre du Programme Fédérateur de l’Assainissement des Eaux
usées en Afrique Sub-Saharienne financé par la Coopération Française (Programme CAMPUS)
et la FIS (Bourse A-1580/3F, Suède) ; nous remercions sincèrement les différents organismes et
intervenants ;
-
Nos remerciements vont également à l’endroit de feu Dr. P.L. Agendia initiateur de ce projet ;
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