3,50 € - France Catholique

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3,50 € - France Catholique
FRANCE Catholique
FRANCE
ISSN 0015-9506
81 ème année - Hebdomadaire n°2972 - 15 avril 2005
www.france-catholique.fr
3, 50 €
L’heure du
Saint-Esprit
SOMMAIRE
ACTUALITÉ
4 REFERENDUM
Internet et opinions
Josiane Lambret
5 GRANDE-BRETAGNE
Mariage princier
Alice Tulle
6 IRAK
Un nouveau Saladin ?
Yves Lamarck
DOSSIER
10
Le Pape du pardon
JEAN-PAUL II
Bertrand Dumas-de Mascarel
12
Un père pour ceux qui souffrent
14
Plaidoyer pour un Pape Sud-Américain
Robert Masson
Yves Lamarck
16
Le Pape de la “génération Jean-Paul II”
19
Pourquoi sont-ils des millions à le pleurer ?
Père Daniel-Ange
Père Michel Gitton
ESPRIT
20 EN MEMOIRE DES JOURS
Le cri des pauvres
Robert Masson
21
Johannes Paulus Magnus
ECCLESIA
Père Ludovic Lécuru
“J’étais à Rome au Circus Maximus”
Marie-Gabrielle Leblanc
Des réactions russes
Père Patrick de Laubier
24
IVe dimanche de Pâques
LECTURES
Père Michel Gitton
MAGAZINE
25
AVORTEMENT
Naissance de Pascal
Dominique de Lafforest
26
Encore la complotite
OPUS DEI
Père Antoine de Rochebrune / Paul Chassard
28
LIVRES
30
CINEMA
”Mon petit doigt m’a dit”
31
THEATRE
“Opéra en délires”, “Maupassant”
Anges, démons... et stéréotypes
Marie-Hélène Congourdeau
Marie-Christine d’André
Pierre François
32
EXPOSITIONS
34
HISTOIRE
36
TELEVISION
Votre début de soirée
38
BLOC-NOTES
Vie associative et d’Eglise
Le nouvel âge de Matisse
Ariane Grenon
Rainier de Monaco
Philippe Delorme / Louis Luce
Marie-Christine d’André
Brigitte Pondaven
Couverture © Emmanuel Chaunu
2 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
héritage
L
L’
'agonie, la mort, les funérailles de Jean-Paul II sont déjà
dans nos mémoires comme des événements à méditer,
au-delà de l'accompagnement médiatique inévitable. Une
polémique est née, à laquelle il ne convient pas de donner
une importance démesurée mais qui pourrait se révéler
pernicieuse si une réponse appropriée ne lui était donnée.
Il faut faire soigneusement la distinction entre la réalité du chagrin
de ceux qui ont vécu le départ du Saint-Père comme quelque chose
de personnel avec une amplification médiatique qui donne à l'émotion une dimension trouble, pouvant brouiller les plus clairs des
messages. Je suis sur ce point en désaccord total avec mon ami Régis
Debray - nous aurons peut-être l'occasion de nous en expliquer
publiquement. Non le phénomène qui
s'est développé autour de la mort de
Jean-Paul II n'a rien à voir avec un processus de repaganisation. Il n'y avait
aucune idolâtrie chez les millions de
pèlerins qui sont accourus vers Rome,
mais l'expression sincère d'une reconnaissance à l'égard d'un père qui
n'avait cessé de les instruire et de les
conforter par l'intelligence de la foi.
Sans doute faut-il faire sa place à la
métamorphose
que confère la mort aux
par Gérard LECLERC
personnages historiques. Malraux l'a bien
montré. A l'occasion de la disparition d'un Kennedy, d'un Churchill,
d'un De Gaulle, il s'est produit à chaque fois une ressaisie dans
l'imaginaire de héros qui s'introduisaient dans le vaste musée de la
conscience humaine. Il ne pouvait en être autrement pour JeanPaul II, a fortiori avec l'orchestration de l'appareil médiatique qui
est né à peu près au moment de l'élection du pape polonais au
siège de Rome. Le phénomène est extraordinairement ambigu, il joue
sur des surenchères d'émotions, de courses aux rumeurs, d'anticipations irrationnelles. C'est pourquoi, il y a de la part de l'Église une
nécessaire prudence pour ne pas se laisser prendre elle-même dans
un entraînement aux effets pervers. Il est d'ailleurs remarquable que
les responsables du Vatican aient refusé systématiquement tout ce
qui, d'une façon ou d'une autre, pouvait livrer le deuil de l'Église à
une autre logique étrangère à son cadre liturgique et traditionnel.
Notons qu'il y a une nécessaire mise en scène de l'adieu que
toutes les dispositions prévues à cet effet sont ordonnées à la
maîtrise des émotions et des réactions face à ce qui surdétermine
la condition humaine. A ce propos, notre ami Damien Le Guay a justement rappelé les travaux du grand historien Philippe Ariès sur les
rites funéraires, consubstantiels à toute civilisation. Les effets de
la mort sont si grands sur l'inconscient qu'ils doivent être maîtrisés à travers une ritualisation canalisant la violence extrême du
trouble produit. De ce point de vue, la grande scène romaine cons-
EDITORIAL
transmettre
titue un extraordinaire cadre rituel
qui permet aujourd'hui au village
mondial de vivre un événement qui le
concerne profondément. Avec l'Église
la ritualisation est évidemment liturgique, elle objectivise les sentiments
personnels dans une prière qui fait
accéder à l'espérance du royaume.
La cérémonie des funérailles, place
Saint Pierre, constituait le sommet de
cette démarche dans une sorte de
perfection, qui excluait toute surcharge, sans interdire la juste expression de l'attachement du peuple
chrétien qui d'un sûr instinct reconnaissait dans le pape défunt une sainteté évidente. C'est, d'ailleurs cet
élément qui changeait tous les signes.
Cette sainteté n'était nullement
la projection d'une émotion irrationnelle, encore moins d'une idolâtrie
échappant à tous les contrôles de la
raison et de la foi éclairée. C'est ce que
ne comprennent pas toujours les
meilleurs de nos médiologues. Avec
Jean-Paul II, il y avait l'affirmation
d'une "réelle présence" qui faisait
éclater la bulle médiatique. Certes, le
Pape était le personnage le plus
médiatique de la terre, avec tous les
risques que cela comporte. Mais pas
un seul instant il ne s'est laissé absorber dans la machine à séduire. Cela
s'explique par une capacité d'intériorisation qui mettait sans cesse une
distance infranchissable avec ce
système qui a trop souvent inversé la
logique des institutions au point de
dissoudre la déontologie du bien commun et du dialogue ordonné du
pouvoir et du peuple. Insistons sur ce
point : Régis Debray a pu parler de
"l'État séducteur", en me précisant
personnellement qu'une "Église
séductrice" trahirait sa mission en
devenant objet frivole et en adoptant
un comportement en rupture totale
avec sa mission. Ce ne fut jamais le
cas de Jean-Paul II, qui, au contraire,
imposa, à temps et à contretemps, la
primauté de l'Évangile et de ses
exigences à l'encontre de tous ceux
qui exigeaient que le "chanteur"
adopte une tout autre chanson.
La réelle présence de cet homme
est peut-être ce qui a fasciné les médias, à rebrousse-poil de la nature autiste du système qui phagocyte tout
ce qui échappe à son emprise et à ses
dans son attitude face au secret de
l'éternité, dans sa relation avec ses
frères, dans sa conscience d'apôtre, on
se référera au testament spirituel
qu'il nous a laissé et qui a été ouvert
cette semaine à la connaissance de
tous. L'extrême simplicité des mots
employés témoigne de l'humilité
foncière d'un chrétien qui n'a jamais
dévié de sa rectitude native, de sa
vocation de prêtre et qui a assumé la
valeurs propres. Avec Jean-Paul II, il
y avait toujours "un reste", c'est-àdire une impossibilité à phagocyter
qui surdéterminait la machine à
images. On se souviendra de son étonnante faculté à se retrancher dans la
prière intérieure à toute occasion,
même lorsqu'il avait des millions de
personnes devant lui. D'ailleurs,
aurait-il pu "tenir" sans cette puissance d'intériorisation qui faisait
qu'en toutes circonstances cette réelle
présence manifestait la présence d'un
Autre.
Il y a des documents qui ne trompent pas. Si l'on veut savoir qui était
cet homme dans sa conviction intime,
lourde mission du pontificat avec la
même disponibilité, celle qui était la
sienne quand il avait décidé d'entrer
au séminaire. On sait par le témoignage de ses amis qu'il n'avait
jamais envisagé l'accession aux
hautes responsabilités dans l'Église. Il
ne rêvait que d'être vicaire ou curé de
paroisse pour exercer son ministère
auprès du peuple chrétien. Pour
reprendre l'expression qui fut la
sienne lors de l'homélie de son intronisation, c'est un Autre qui l'a conduit
là où il ne songeait pas à aller.
© DENIS LENSEL
à
(suite de l’éditorial, en page 9)
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AVRIL
2005
3
ACTUALITE
CAMPAGNE REFERENDAIRE
Internet
et opinions
par Josiane LAMBRET
La généralisation progressive de
l’accès à Internet entraîne une certaine
transformation de l’échange des idées
politiques qui se révèle à l’occasion
de la campagne référendaire.
elles et ceux qui ne
disposent pas d’un ordinateur savent cependant qu’on "surfe
sur le Net" (en bon
français : on va sur la Toile) pour
se divertir, s’instruire, acheter
des biens et services, bavarder
avec parents amis… voire se
livrer à des commerces illicites.
Selon une étude publiée par
l’Insee en mars, 59% des Français de moins de 60 ans possédaient un ordinateur en 2004
et 41% étaient abonnées à Internet. 50% des couples qui ont
des enfants scolarisés ont accès
à la Toile.
La communication entre
personnes s’en trouve modifiée
de différentes manières – grâce
au courrier électronique – mais
on oublie trop souvent d’évoquer la diffusion des idées. Or
nous sommes en train d’assister dans ce domaine à des changements qui bouleverseront à
moyen terme la publication des
journaux sur papier et qui changent déjà les formes de la propagande politique.
Les deux phénomènes sont
liés. Depuis deux siècles, la
presse écrite est le support privilégié de la diffusion des idées
et elle a, comme l’édition, bien
supporté la concurrence de la
radio et de la télévision. Cependant, les journaux d’opinion, qui
exerçaient une influence consi-
C
(
dérable jusqu’au milieu du
siècle dernier, ont peu à peu
disparu.
Or la publication d’un journal sur la Toile n’impose que des
coûts de fabrication très faibles,
les frais d’envoi par la poste sont
réduits à néant, et la diffusion
des journaux électroniques est
immédiate et massive. Les lecteurs disposent de surcroît d’archives importantes auxquelles
on peut accéder sans se déplacer pour une somme modique,
ou gratuitement.
D’où une évolution d’abord
insensible, qui se manifeste de
façon frappante à l’occasion de
la campagne référendaire. Alors
que la presse quotidienne sur
papier tend à une information
soigneusement lissée afin de retenir un public d’opinions diverses, la Toile est devenue le
lieu de l’échange des idées, de
polémiques appuyées sur des
informations bien référencées.
Certes, les grands quotidiens
continuent à publier des tribunes libres, mais elles sont en
général écrites par des personnalités en vue. Sur la Toile, des
professeurs de droit non répertoriés dans l’intelligentsia publient de très longues études
sur le traité constitutionnel
assorties de notes copieuses,
des associations qui ne disposent que d’un maigre bulletin
interne sur papier diffusent
largement leur point de vue, des
militants de base réagissent
aussi souvent et aussi longuement qu’ils le souhaitent.
Ceux qui lisent cette nouvelle presse d’opinion, parfois
savante, parfois virulente, peuvent diffuser ce qui leur paraît
important à leurs amis et relations, qui font de même. Ainsi
sont filtrées naturellement les
opinions folles qu’on peut aussi
trouver sur la Toile. De proche
en proche, des dizaines de milliers de citoyens sont touchés
par une argumentation ou une
autre tout en gardant la possibilité de consulter à tout moment le projet de traité ou la
déclaration de tel ministre.
Les formes classiques de la
propagande par collage d’affiches et par distribution de
tracts, coûteuses en temps et
en argent, deviennent déri-
De proche en proche, des dizaines
de milliers de citoyens sont touchés
4 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
soires. Les grands partis politiques (UMP, PS) ne négligent
pas cette mutation d’un point
de vue technique mais commettent l’erreur d’en rester psychologiquement à des campagnes
de "communication" selon les
principes posés à la fin du XXe
siècle (grandes affiches, petites
phrases, formules-choc, prestations télévisées...) alors que les petites formations militantes font
une propagande argumentée à
propos d’un traité qui est disséqué et critiqué, ou approuvé,
sur le fond. Les grands jouent
sur l’émotion, les petits brandissent des raisons.
La grande presse écrite a elle
aussi mis en place des “blogs”,
genre de tribunes libres-fleuves, et des forums de débat, sans
pouvoir se remettre en cause
pour autant. Elle a pourtant un
intérêt vital à réfléchir sérieusement sur ce retour par la petite porte électronique d’une
presse d’opinion que l’on croyait
moribonde. ■
ACTUALITE
GRANDE-BRETAGNE
par Alice TULLE
Une reine
en son Etat
Samedi 9 avril, le prince Charles et
Camilla Parker Bowles se sont mariés,
régularisant une longue liaison qui a
provoqué d’innombrables commentaires,
en Angleterre comme sur le continent.
T
événement mondial : la télévision, alors dans sa première jeunesse, y fut pour quelque chose,
mais les images reflétaient
l’union planétaire réalisée au
sein du Commonwealth. Bien
avant les discours sur la mondialisation et la diffusion des
thèmes féministes, il paraissait
normal, au tournant du XX e
siècle, qu’une femme deviennent chef d’Etat, et étendent
son pouvoir symbolique sur tous
les continents.
On ne trouva pas moins normal que cette reine d’un pays
réputé traditionaliste ait pour
Premier ministre une femme –
Margaret Thatcher – qui a durablement marqué l’histoire de la
Grande-Bretagne. A la même
époque, les Français virent comment la classe politique se débarrassait brutalement d’Edith
Cresson et le temps n’est pas encore venu où une femme pourra être candidate à une élection
présidentielle avec de bonnes
chances de l’emporter.
Quoi que l’on pense sur les
politiques menées par les chefs
de gouvernement évoqués, il est
dommage que les commentaires
émoustillés sur la famille royale
britannique n’aient pas cédé de
temps à autre la place à une
réflexion sur la "parité hommefemme" telle qu’elle est pratiquée par nos voisins. A partir de
ce critère très à la mode, il aurait
été possible d’apprécier plus justement la manière dont la monarchie britannique évolue dans
le monde tel qu’il est.
Si cette évolution paraît
lente (mais par rapport à quoi ?),
c’est parce que la monarchie
britannique, comme les autres
monarchies parlementaires européennes, doit répondre de manière toute fonctionnelle à des
exigences qui ne changent pas :
il s’agit de maintenir l’unité du
royaume, d’incarner l’identité
d’un peuple aussi compliqué que
tous les autres, de préserver les
liens avec cette étonnante internationale de nations que constitue le Commonwealth.
La reine remplit donc une
fonction symbolique. Le faste
d’un ancien empire peut fasciner, mais le rôle politique du
monarque britannique n’est pas
fondamentalement différent de
celui joué par la reine des PaysBas ou le roi des Belges. Sur ce
dernier point, le fait est qu’Elisabeth accomplit sa tâche : les
affaires sentimentales et les
scandales n’empêchent pas le
monarque d’être le point d’équilibre du système politique, de
résumer en sa personne l’histoire du pays et de garantir vaille
que vaille que cette nation millénaire, européenne à sa manière, continuera d’exister.
Le prince Charles reprendra
cette fonction, mais il présentera aux yeux de tous une faiblesse très humaine : celle de
n’avoir pas voulu sacrifier sa vie
personnelle aux exigences de sa
charge. Il est vrai que ce sacrifice, auquel un prince héritier
est voué de naissance, n’est pas
choisi. La durée et la dureté de
l’épreuve impressionnent et devraient inciter à modérer ses opinions sur les petites "histoires"
des dynasties historiques. ■
Répondre de manière fonctionnelle
à des exigences qui ne changent pas
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
(
out a été dit sur le
sujet, sauf ceci : l’histoire de Charles et
Camilla, comme celle
de Charles et Diana,
comme celle, beaucoup plus
ancienne, de Margaret et de
Peter Townsend, ne concernent
pas essentiellement la monarchie britannique mais la touche
de manière accidentelle.
Quant au prince héritier, il
s’agissait de régler une question
d’ordre religieux, puisque le
monarque britannique est le
chef de l’église anglicane, et le
problème de statut de Mrs Parker Bowles – qui est devenue
Altesse royale, sans qu’on sache
encore si elle deviendra reine
lorsque son époux prendra la
succession d’Elisabeth II.
Il est vrai que beaucoup de
journalistes, surtout à l’extérieur
du royaume, assurent que la
couronne a été sérieusement
ébranlée par les scandales qui se
succèdent dans la famille royale.
Cette idée de l’ébranlement
était beaucoup plus répandue
lorsque Edouard VIII décida d’abdiquer en 1936 parce que le gouvernement refusait d’autoriser
son mariage avec une femme divorcée. Mais Georges VI fut un
roi populaire, qui affronta les
épreuves de la guerre de manière exemplaire.
Le couronnement d’Elisabeth II, en juin 1953, fut un
5
ACTUALITE
IRAK
par Yves LAMARCK
Un nouveau
Saladin ?
Un chef d’Etat kurde à Bagdad,
alternative au grand Kurdistan.
Pour combien de temps ?
’élection de Jalal Talabani comme président
de la République Irakienne par l’assemblée
élue le 30 janvier dernier
est un symbole fort dans l’histoire du Moyen-Orient. Qu’un
non-arabe soit porté ainsi à la
tête d’un pays membre de la
Ligue Arabe est à soi seul un événement. Le seul précédent qui
vient à l’esprit est celui du grand
Saladin, issu d’une famille kurde
au service du gouverneur de
Mossoul et qui devint le Calife
d’Egypte et de Syrie au temps du
royaume croisé de Jerusalem au
XIIe siècle.
Les Kurdes qui ne sont ni des
Turcs ni des Arabes mais une population indo-européenne
parlant des langues relevant plutôt du groupe iranien, dispersés
à travers la Turquie, la Syrie, l’Irak
et l’Iran, n’ont jamais été unis.
En Irak même, ils sont traditionnellement divisés entre deux
clans, Barzani et Talabani, qui se
sont longtemps combattus.
Aujourd’hui, ils ont fait liste
commune pour les élections nationales irakiennes, obtenant
plus du quart des sièges, ainsi
que pour les élections au parlement régional du Kurdistan autonome, regroupant trois des
dix-huit provinces que compte
l’Irak. La division se retrouve dans
le gouvernement provincial, les
L
(
deux provinces du
nord, à la
frontière
turque, étant barzanistes,
celle du
sud-est, à la frontière iranienne,
étant talabaniste.
C’est ce Talabani qui a été investi du pouvoir à Bagdad, flanqué de deux vice-présidents, un
Chiite et un Sunnite (le précédent
chef de l’Etat de transition), le
poste de premier ministre revenant aussi à un Chiite.
Ce choix indique clairement
que l’option d’un Irak uni est
privilégiée par une majorité de
Kurdes et du reste des Irakiens.
Le processus démocratique est
néanmoins suffisamment complexe pour que le dernier mot
n’ait pas encore été dit :
nouvelle constitution, nouvelles élections à la fin de l’année.
Les Kurdes envisagent leur
avenir dans un Irak qu’ils voient
volontiers fédéral, autour de
deux nations, kurde et arabe.
On peut penser ici au modèle
canadien. Dès lors la question
la plus controversée est celle
des limites territoriales de la
nation kurde et du statut des
deux principales villes de Mossoul et surtout Kirkouk situées
aujourd’hui à l’extérieur des
trois provinces autonomes.
Cette question est historique puisque ce n’est qu’en
1925 que la Société des Nations
(SDN) a attribué le vilayet
(province) de Mossoul à l’Irak.
Après la dissolution de l’Empire
Ottoman, cette région du
Kurdistan était revendiquée
pour partie par la France
(Mossoul étant proche de la
Syrie dont le mandat était
revenu à la France), la GrandeBretagne (Kirkouk principale
région pétrolifère) et le tout par
la Turquie d’Ataturk. Plusieurs
traités (San Remo, Sévres,
Lausanne) n’avaient pas réussi
à trancher.
Il est possible que l’ONU demain soit appelée à se prononcer. Les Américains qui arbitraient pour le moment un
équilibre délicat entre Kurdes,
Arabes, Turcomans et Assyriens,
ont dû reconnaitre la victoire
électorale des Kurdes désormais
majoritaires à Kirkouk grâce au
vote des réfugiés. Les pouvoirs
successifs, et spécialement
Saddam Hussein, avaient en
Il est possible que l’ONU demain
soit appelée à se prononcer
6 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
effet procédé à des déplacements de population. La proportion de Kurdes était passée
de 48% en 1957 à moins du
tiers en 1997. Les statistiques
sont néanmoins peu fiables car
manipulées en tous sens. La
notion de Turcomans, utilisée
par Ankara, est fluctuante. Les
Assyro-Chaldéens associent
race et religion. Les Kurdes,
majoritairement Sunnites,
peuvent être aussi Chiites ou
Chrétiens et se faire recenser
sous d’autres appellations. La
plupart des Arabes ont été
déplacés depuis le Sud Chiite.
De nombreux Kurdes avaient
fui vers le Nord mais aussi vers
Bagdad où ils seraient 750.000.
L’intégration du pouvoir à
Bagdad est le résultat d’un
marché entre Kurdes et Chiites
- le poste de president étant
plus symbolique que réel. Il se
double d’un partage des rôles
entre Kurdes eux-mêmes –
Talabani à Bagdad, Barzani à
Arbil, capitale de la région
autonome -, l’un pour l’intégration, l’autre pour le fédéralisme et l’annexion de Kirkouk.
Le tout est éminemment délicat et précaire. Il est très oriental. ■
BREVES
FRANCE
SOLIDARITÉ : Le ministre des Finances,
Thierry Breton, a fait appel le 5 avril à la
solidarité des Français envers les personnes âgées à propos du travail du lundi
de Pentecôte ; cette journée travaillée
supplémentaire devrait, selon lui, rapporter 2,1 milliards d’euros. Contestant ses
arguments - la CFTC s’est adressée à la
justice européenne - certains syndicats
appellent néanmoins à la grève ou à des
débrayages ce jour-là, à moins de 15
jours du référendum sur l’Europe. Alors
que la grande majorité des syndicats européens se déclarent favorables à la
Constitution, les syndicats français sont
en effet agités par de vifs débats internes, à l’exception de la CFDT qui a
rejoint le camp du "oui".
REFERENDUM : D’après une enquête BVA
publiée le 8 avril, les Français estiment
que la progression du "non" dans les intentions de vote pour le référendum du
29 mai s’explique principalement par les
inquiétudes dues à la situation économique, avant la mauvaise compréhension
du Traité ou la menace pour les acquis
sociaux ; si l’INSEE prévoit une stabilisation du chômage à 9,9% de la population
active en juin prochain (contre 10,1% en
février), l’objectif gouvernemental de
baisse de 10% du chômage ne pourra
être tenu. De son côté, le président de la
Banque européenne, J.C. Trichet, a exprimé le 7 avril ses préoccupations concernant le niveau élevé des prix du pétrole
qui lui paraît menacer la croissance de la
zone euro.
Le Président de la République a dialogué
le 14 avril avec 80 jeunes sur TF1 ; repoussé d’une semaine en raison des funérailles de Jean-Paul II, ce débat était la
première intervention du chef de l’Etat
dans la campagne référendaire. La présence des animateurs J.C. Delarue, M.O
Fogiel et E. Chain sur le plateau a déclenché les critiques des journalistes spécialisés dans les questions politiques.
EDUCATION : Le ministre de l’Education
nationale, Fr. Fillon, a donné le 6 avril des
instructions fermes aux recteurs et aux
préfets pour mettre un terme aux occupations de lycées. Les forces de l’ordre
sont intervenues le lendemain pour expulser quelques centaines de lycéens qui
avaient occupé des locaux des rectorats
de Paris et de Lille.
SANTE : Le ministre de la Santé, Ph.
Douste-Blazy, a annoncé le 6 avril que les
comptes de la Sécurité sociale révélaient
2 milliards d’économies de plus que
prévu en 2004, soit un déficit ramené de
14 à 12 milliards d’euros.
D’après une enquête de l’Inserm publiée
le 5 avril, le taux de décès par cancer
pour les hommes est supérieur en France
de 50% par rapport à la Suède, de 20%
par rapport au Royaume-Uni, ce qui s’explique par des fréquences plus élevées
des cancers du poumon, des voies aérodigestives et du foie. Deux nouveaux cas
de la maladie de Creutzfeld-Jakob ont
été identifiés en France le 4 avril ; il s’agit des dixième et onzième cas de la
forme humaine de la "maladie de la
vache folle".
Le décret relatif à l’organisation de la
permanence des soins (gardes et astreintes) a été publié le 8 avril au journal
officiel ; mais la grève des urgentistes
s’est poursuivie.
TRANSPORTS : Le secrétaire d’Etat aux
Transports et à la Mer, Fr. Goulard, a
inauguré le 8 avril la première "autoroute
de la mer" au départ d’un port français,
entre Toulon et Rome, dans le but de lutter contre l’engorgement des routes.
Une étude publiée le 6 avril par l’Agence
de l’environnement confirme que les
"4x4" émettent plus de CO2 que les
autres véhicules ; la mairie de Paris voudrait les interdire dans la capitale.
INFORMATION : Directeur de "La Croix",
Bruno Frappat a été nommé le 7 avril
président du directoire du groupe Bayard
pour succéder à Alain Cordier ; Dominique Quino devrait le remplacer à la direction du journal.
C’est le journaliste Jean-Pierre Elkabbach
qui a été nommé à la tête de la radio
"Europe 1" le 8 avril.
PATRIMOINE : "La Joconde" a été réinstallée le 5 avril dans la salle des Etats
au musée du Louvre après quatre années
de travaux financés par une chaîne de
télévision japonaise ; elle trône désormais au milieu des peintures vénitiennes
face aux "Noces de Cana" de Véronèse.
MONDE
PROCHE ORIENT : Alors qu’Ariel Sharon
rencontrait le président Bush au Texas, la
tentative d’extrémistes juifs de pénétrer
sur l’esplanade des mosquées à Jérusalem le 10 avril a fragilisé le processus de
paix.
ITALIE : Les élections régionales qui ont
permis à l’opposition de gauche de contrôler 16 des 20 régions d’Italie compliquent la tâche de Silvio Berlusconi à un
an des élections législatives de mai 2006.
Le Parlement a voté le 7 avril la ratification de la constitution européenne ; l’Italie est le 5e des 25 pays membres à avoir
adopté le texte après la Lituanie, la Hongrie, la Slovénie et l’Espagne.
ROYAUME-UNI : Les électeurs britanniques sont appelés aux urnes le 5 mai
prochain; le Parti travailliste de Tony
Blair part favori.
Le constructeur automobile MG Rover,
dernier constructeur britannique, a été
placé le 8 avril sous administration judiciaire, première étape d’une faillite qui
menace plus de 18 000 emplois. Les autorités, qui viennent de débloquer une
aide d’urgence de 9,5 millions d’euros,
espèrent encore un repreneur pékinois.
ARABIE SAOUDITE : Un des activistes les
plus en vue d’Al-Qaïda a été tué à Ryad
le 6 avril lors d’un affrontement avec les
forces de l’ordre.
COTE D’IVOIRE : Grâce à la médiation du
président sud–africain, un nouvel accord
a été signé entre belligérants le 6 avril,
appelant au démantèlement rapide des
milices.
EGYPTE : Quatre personnes, dont deux
Français, ont été tuées et une vingtaine
d’autres, dont plusieurs touristes français, blessées lors d’une explosion criminelle survenue le 7 avril dans un bazar du
Caire, non loin de la mosquée et de l’université d’Al-Azhar.
CHINE : Plusieurs milliers de personnes
ont manifesté le 9 avril à Pékin pour protester contre la publication au Japon de
manuels scolaires minimisant les atrocités nippones en Chine au cours des années 1930.
EUROPE : Face au déferlement des produits textiles importés de Chine depuis le
1er janvier, la Commission de Bruxelles a
défini le 6 avril les conditions dans lesquelles elle pourrait imposer des restrictions à ces importations pour protéger
les producteurs européens. Dès le 4 avril,
l’administration américaine avait annoncé une enquête sur les importations de
produits en coton chinois pour déterminer si des quotas devaient être rétablis.
KIRGHIZSTAN : Le parlement kirghiz a
accepté la démission du président déchu
Askar Akaïev et fixé la date de l'élection
présidentielle anticipée au 10 juillet.
J.L.
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
7
EDITORIAL
Il n'a répondu qu'à un appel qui le
conduisait toujours plus haut. Sa
détermination il ne la puisait que dans
la confiance dans le Seigneur et la
tendre sollicitude de la Vierge Marie.
Reprenons ces quelques phrases
du début de ce testament : "Totus
Tuus ego sum - il s'agit évidemment
de sa devise de consécration au
Seigneur par Marie. Au nom de la
très Sainte Trinité. Amen. "Veillez, car
vous ignorez le jour où votre Seigneur
viendra." (Mt. 24, 42) - Ces mots me
font penser au dernier appel, qui
adviendra lorsque le Seigneur le
et mon indignité." Ce qui frappe
également dans ce mémorial c'est la
familiarité du Saint Père s'exprimant
comme il l'a toujours fait dans la
cordialité avec tous ceux qui l'ont
côtoyé. Dans un dernier regard, il se
souvient de ses premières années, de
son village natal, de ses parents, de
tous ses compagnons d'enfance,
d'adolescence et de jeunesse.
Il n'écrit pas de mémoires officielles, ne prend pas de pose devant
la postérité. Il parle des hommes et
des femmes qui émergent dans son
souvenir et qu'il aime comme autant
de frères et sœurs.
Si Jean-Paul II a été tellement
voudra. Je désire Le suivre, et je désire
que tout ce qui fait partie de ma vie
terrestre me prépare à ce moment. Je
ne sais quand il viendra mais, comme
toute chose, je dépose ce moment-là
aussi dans les mains de la mère de
mon Maître : Totus Tuus. Dans ces
mêmes mains maternelles je laisse
tout et tous ceux auxquels m'ont lié
ma vie et ma vocation. En ces Mains,
je laisse surtout l'Église, et aussi ma
Nation et toute l'humanité. Je dis
merci à tous. A tous je demande
pardon. Je demande aussi la prière
afin que la Miséricorde de Dieu se
montre plus grande que ma faiblesse
aimé, s'ils étaient si nombreux à
accourir jusqu'à Rome pour prier
devant sa dépouille mortelle, c'est à
cause de cela, de cette vérité absolue
d'un pape qui a eu toutes les audaces, qui a rendu possible l'impossible, mais qui a d'abord été l'ami de
tous, parce qu'il les aimait tous en
Dieu. C'est le point de départ absolu.
C'est pourquoi toute surchauffe médiatique aurait été bien impuissante
à imposer un message étranger au
sien. Les catholiques savaient précisément qui il était, ce qu'il leur avait
enseigné, les commandements de
Dieu qu'il leur avait rappelés, les
© ETIENNE VILLEMAIN
Suite de la page 3
béatitudes dont il leur avait révélé
comment elles ouvraient le royaume...
Et même les non catholiques et les
incroyants en avaient quelque idée. A
partir de là se dessine l'héritage qui
est vraiment impressionnant. Ce
géant de l'histoire n'a cherché qu'à
approfondir et révéler le mystère du
Dieu trinitaire ayant fait alliance avec
toute l'humanité. Les trois encycliques
les plus importantes du pontificat
concernent ce mystère trinitaire et
toute la dynamique de la célébration
de l'entrée dans le troisième millénaire était ordonnée à la même méditation du secret de l'amour entre les
Trois Personnes divines ainsi qu'à celui
de la condescendance
inouïe qui permet à l'humanité de participer à
l'intimité de la vie de
Dieu.
Monseigneur Karol
Wojtyla avait inscrit dans
la constitution Gaudium
et Spes de Vatican II une
phrase sans laquelle la
substance de l'enseignement conciliaire ne serait
pas pénétrable : "Par son
incarnation, le Fils de
Dieu s'est en quelque
sorte uni lui-même à tout
homme". Nous trouvons
là l'extrême concentration théologique du message que le Pape n'a
cessé de développer dans
toutes ses dimensions. La
modernité qui a tout suspendu à l'affirmation de l'individu a beaucoup
fait pour son autonomie et son développement. Mais qu'en sera-t-il de
cet individu s'il a perdu la conscience
de sa dignité fondamentale qui ne
s'explique que par sa relation à Dieu ?
L'homme a été créé à l'image de Dieu,
racheté par son Fils de telle façon
qu'il accède à une dignité plus grande
encore. Jean-Paul II l'a martelé sur
toutes les routes du monde. C'est l'héritage qu'il nous laisse et qui ne
cessera d'inspirer l'Église sur le
chemin de tous les renouveaux.
G.L.
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
9
DOSSIER
DERNIER HOMMAGE
Portrait intime
du
par Bertrand
DUMAS DE MASCAREL
Un homme de 84 ans, et surtout un
Souverain pontife, peut-il encore avoir
des proches pour témoigner intimement
de lui ? Sans l’avoir jamais vraiment
connu, les millions de personnes qui
portent aujourd’hui son deuil, ne
contrediraient pourtant pas les mots de
la poignée de ses vrais amis. Ce que le
Pape a apporté à ses proches, des
peuples entiers l’ont reçu.
omme, lors des obsèques du roi Baudouin,
les prostituées ou les prisonniers qui sont
venus aux côtés des grands hommes
parler de “leur” souverain, toutes sortes
d’hommes témoignent aujourd’hui de
Jean-Paul II. Les plus inattendus, pourraient être
le journaliste Franz-Olivier Giesbert, ces derniers
jours (“puisse l’Eglise ne jamais prendre la forme
du siècle… Moi aussi j’ai envie de dire N’ayez pas
peur, n’ayez pas peur de crier vos vérités au monde”)
ou l’écrivain Philippe Sollers, posant au libertin,
familier de Rome et de Venise qui a dit : “Les positions du Pape passent pour être du refoulement,
alors que ce n’est pas son rôle d’expliquer”.
Même un camarade de classe, de Wadovice !
Karol Wojtyla en avait encore un, Joseph Beinstock,
devenu citoyen d’Israël. “Tu étais pour moi un bon
camarade, un ami” se souvient-il. Avec Jurek Kruger
ou Ginka Beer, amis juifs de son quartier, Karol
préparait les décorations de la fête Hanuka.
L’hommage du Grand Rabbin de Pologne, Michael
Schudrich : “Depuis 2000 ans, personne n’a fait
autant que lui pour la réconciliation entre les juifs
et les catholiques” trouve alors toute sa justification dès l’enfance. Une justification à laquelle le
Pape s’est toujours humblement soustrait. Pendant
des années, son secours ou non aux déportés était
demeuré une interrogation pour ses biographes,
jusqu’à ce qu’une certaine Edith Tzirer, rescapée du
camp de Skarzyko-Kamienna, le reconnaisse et témoigne : “C’était un Tzaddik, un juste, sans lui je
C
10 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
Jean-Paul II
écrit que
la personne
est la
priorité de
l’Eglise
Pape
serais morte. Je lui dois ma vie et donc mes cinq
petits-enfants […] Il m’a portée sur son dos, m’a
donné du thé, du pain, du fromage…” Cinquantecinq ans plus tard, au musée Yad Vachem, mémorial de la Shoah, c’est lui qui posera la main sur son
épaule pour marcher, en pleurant. Récemment,
encore, une juive américaine témoignait aussi : il
n’avait pas voulu la baptiser, comme le lui demandait la femme qui l’avait recueillie, afin qu’elle
retrouve les siens aux Etats-Unis et grandisse dans
sa foi.
Les avocats de tous les “sans voix” de ce monde
se feront l’écho des cris d’un pape qui finira aphone.
Mère Teresa se placera toujours humblement deux
pas derrière Jean-Paul II : “Partout où le Pape est
passé, la foi, l’espérance et l’amour ont pu s’épanouir” et “Le Saint-Père m’a dit que je devais encore
travailler, visiter nos maisons, être le témoin de
Jésus de par le monde. Alors, je fais ce qu’il m’a demandé, je fais la volonté de Dieu.” Jean Vanier,
fondateur des premières communautés de vie pour
personnes handicapées mentales trouvera aussi
chez le Pape les mots qui expriment son intuition :
la dignité de toute personne, même la plus petite,
même “débile”. “Dès sa première encyclique, dirat-il, Jean-Paul II écrit que la personne est la priorité de l’Eglise”. “A son contact, toute infirmité se
redresse durablement, dira Ghislaine, atteinte de
nanisme et sur laquelle Jean-Paul II avait trébuché au Parc des Princes (il ne l’avait pas vue).” Elle
est aujourd’hui religieuse.
Même parmi ceux qu’on voudrait mettre au
passif de ce pontificat, il se trouve des voix pour
se réclamer du défunt pape. Telle Lucienne Salé, une
Française, première femme - et laïque de surcroît
- à avoir reçu une haute responsabilité au Vatican :
“S’il est un pape qui a compris, aimé et exprimé la
dignité de la femme, c’est bien celui-ci !” Tel encore,
Franck, ancien chanteur de variété dans les années
85-87, homosexuel et mort du sida à 22 ans. Il
s’éteindra en exprimant sa joie d’avoir retrouvé
l’amour de lui-même en Jésus-Christ, par cette
église renouvelée au Parc des Princes et à Parayle-Monial.
Jean-Paul II a su garder aussi l’amitié des plus
grandes intelligences de notre siècle. Dans des
du
pardon
domaines qui furent le sien, comme la philosophie, ainsi que dans d’autres. Le professeur Lejeune,
père de la génétique moderne, s’extasiera : “Le
Pape est un homme entièrement bon et cela est très
rare”.
Les ennemis que la politique aurait dû lui garder
en ce monde, Jean-Paul II ne les aura pas, non
plus, à sa charge. Les mots bienveillants de Jaruselwski après le 13 mai 1981, et de Gorbatchev ou
même de Fidel Castro, aujourd’hui, resteront une
grande interrogation de l’Histoire.
Et l’Histoire n’a pas fini de recueillir des témoignages sur la personnalité profonde du défunt
parce qu’il est “sans aucun doute celui qui, dans
le monde de notre temps, a rencontré personnellement le plus grand nombre d’hommes. Pour les
gens simples, peu cultivés ou pauvres il n’est jamais
hors d’atteinte. Le titre de père (papa, pape) est
bien, ici, l’expression de cette relation vraie”, écrivait en 1998 le cardinal Ratzinger, qui connaît
Jean-Paul II depuis leurs travaux communs au
Concile Vatican II et devenu, depuis, préfet de la
Congrégation pour la doctrine de la foi. “Cet
homme est transparent, intact, quand il est devenu
pape j’ai repris avec lui les mêmes relations, avec
la même facilité”, dira le cardinal Garrone. Et Ratzinger d’ajouter : “A ses côtés, on comprend que
l’homme lui tient à cœur parce que Dieu lui tient
à cœur.”
Cette dernière phrase nous rappelle que la
chute du Mur de Berlin, l’événement le plus surprenant du XXe siècle, trouve sa source dans un discours de Jean-Paul II, le 2 juin 1979 à Varsovie :
“Nul ne peut exclure le Christ de l’histoire de
l’homme, en quelque partie du globe ! L’exclure est
un acte contre l’Homme !” Michnick, un observateur polonais athée estimera plus tard : “Les conséquences de cette visite demeureront impossibles
à évaluer. Tous ceux qui dans les queues quotidiennes se montraient frustrés et agressifs étaient
devenus sereins et joyeux. Avec leur dignité, ils
avaient retrouvé la conscience de leur force.”
L’écrivain français André Frossard, à l’issue
d’heures entières d’entretien, écrira de son côté :
“Ce pacifique est un homme qui croit assez aux
hommes – y compris à ceux qui portent la main sur
La
miséricorde
est un nom
de Dieu
manifesté
au monde
en
Jean-Paul II
lui – pour leur donner envie d’y croire aussi, et
assez à Dieu pour leur rendre, peut-être, le goût
d’y croire avec lui.”
Frossard fait allusion au geste le plus admiré
et sans doute le moins compris du Pape : son pardon
donné à Ali Agca. Un autre prélat romain, en a
donné la clef en 2001, son compatriote et secrétaire particulier de toujours, Mgr Stanislas Dziwisz.
Personne n’a jamais vraiment su ce que le pape et
l’homme se sont dit , ce jour-là. Le pardon avait déjà
été donné, du lit d’hôpital. Dziwisz, était présent.
En révélant : “Je n’ai pas entendu un mot de demande de pardon de la part du prisonnier. Seul le
mystère de Fatima l’intéressait, troublé qu’il était,
lui le tireur d’élite, par la force qui l’avait dépassé”.
Il nous confirme que le Saint-Père avait pardonné
à un homme qui n’exprimait aucun regret. Comme
si ce pardon ne lui appartenait pas, qu’il existait
déjà avant même l’acte d’agression.
Cette dernière confidence porte un éclairage
surnaturel sur la mort de Jean-Paul II, qui s’est
éteint avec les Vigiles du Dimanche de La Miséricorde. On pouvait déjà y voir une coïncidence,
la fête ayant été établie par ce pape au nom d’une
sainte, sœur Faustine, polonaise comme lui, et
canonisée par lui. Mais la Miséricorde est un nom
de Dieu, manifestée au monde en Jean-Paul II, par
son pardon personnel. Comme, en Mère Teresa, le
sera la Charité. Serait-il devenu Jean-Paul II, lui
Karol, pour donner un écho universel à cette révélation particulière ?
Alors, peut-être suffirait-il de retrouver sous
quel nom (foi, espérance, paix…) et dans quel pays
Dieu s’est à présent manifesté, pour y retrouver le
cardinal appelé à succéder à Jean-Paul II. ■
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL2005
11
DOSSIER
SOUVENIRS
Un
Père
pour ceux qui
Avec Fidel Castro qui - suprême
dérision ou signe de confusion
providentiel pour nos laïcistes
français ? - décrète un deuil national
sur l’île qu’il martyrise, pour le décès
de Jean-Paul II, remontent certains
souvenirs de ce Pape qui sut si bien
comprendre les victimes du
communisme. Robert Masson
se souvient du Pape accueillant
Jorge Valls...
i l’on veut comprendre la portée de l’événement qui vient de se produire avec la
mort de Jean-Paul II, peut-être faut-il
d’abord se souvenir. Car rarement à ce
point l’inattendu avait pareillement surgi,
sur les pas d’un homme qu’on disait venu de
Pologne et qui, à vrai dire, venait de plus loin
encore. De ces grands parcours d’existence selon
Dieu qui ont changé le cours de l’Histoire plus
profondément que tous les faiseurs d’empires.
Jean-Paul II n’avait rien dans les mains, sauf cette
faculté de les joindre qui tranchait tellement sur
toutes les imprécations dont l’humanité avait eu
à souffrir. Ce Pape qu’on n’attendait pas était un
revenant de la grande épreuve. Et qui sait lire a de
quoi entendre ce que l’Ecriture nous dit de ceux qui
ont lavé leur âme dans la grande épreuve précisément. Quand on finit par apprendre ce à quoi Karol
Wojtyla avait échappé sous la férule nazie, puis sous
l’emprise d’un système qui était son proche parent,
on commença à réaliser que les hommes, si implacables soient-ils, ne sont pas les seuls à décider de
nos destins ultimes.
Ce pape qui n’avait rien à démontrer, et encore
moins à imposer, apparaissait soudain pour ce qu’il
était vraiment, comme d’ailleurs toute l’Eglise dont
il prenait la charge : un signe de transcendance.
Ceux qui avaient eu à souffrir pour leur foi – et ils
furent et demeurent innombrables – se reconnaissaient dans ce pape qui dissipait, par sa seule
S
12 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
Un de ces
mouvements
de tendresse
dont
Jean-Paul II
avait le secret
présence, toutes les peurs. Un homme venu de
Cuba fut de ceux-là : au tournant de l’année 84,
quand le maître de La Havane consentit à le libérer, sous pression internationale, et sans même lui
consentir la moindre remise de peine. Il avait déjà
dépassé de plusieurs semaines les quarante ans
d’emprisonnement auxquels il avait été condamné de manière inique. Sans doute serait-il resté
emprisonné à vie s’il n’y avait eu pour le nommer
à la face du monde un de ces sursauts de conscience qu’on vit à l’œuvre en ce cas comme en
beaucoup d’autres. Sa première démarche, Jorge
Valls la réservait pour Rome, et il ne souhaitait pas
seulement y venir en son nom mais en celui de
beaucoup d’autres.
Il avait en effet promis à tous ses frères de
captivité de les confier, quand il le pourrait, au
successeur de Pierre. Nous eûmes la grâce à
quelques-uns de vivre le moment où le Pape et le
captif se reconnurent, dans un de ces mouvements
de tendresse dont Jean-Paul II avait le secret.
L’instant d’avant, tandis que nous attendions le
Pape dans un salon attenant, Jorge Valls m’avait
demandé une feuille de papier. J’avais d’abord
pensé qu’il souhaitait consigner par écrit ce qu’il
voulait dire au Pape. C’était à un tout autre usage
que le prisonnier d’hier songeait. Il avait sur lui
des échantillons de cette terre des martyrs dont il
souhaitait faire présent au Pape. C’était des grains
de terre, directement rapportés de ce lieu de terreur
où, à certaines périodes, on avait fusillé chaque nuit
des condamnés qui n’étaient coupables que d’avoir
cru en l’homme et en Dieu.
Jorge Valls gardait intact le souvenir de ce
martyrologe et ne pouvait trouver meilleur destinataire que cet homme de Dieu qui se faisait
partout dans le monde le défenseur de l’homme.
Jorge Valls sut trouver les mots et le Pape sut les
entendre de cette manière unique qui est le propre
des entendants de Dieu.
Déjà vingt ans ont passé, mais rien ne s’est
effacé de nos mémoires. Dans son exil américain,
à quoi le condamnent les obstinations rancunières
de Castro, Jorge Valls demeure en souffrance. A
distance, mais avec non moins de douleur, il a sans
doute vécu la mort du Pape qu’il tenait pour une
s
DOSSIER
par Robert MASSON
ouffrent
* Irina Alberti fut secrétaire de Soljénitsyne
au temps de son exil, puis directrice de
l’hebdomadaire "La Pensée russe" à Paris.
© ETIENNE VILLEMAIN
figure de ce temps. L’évocation des grandes heures
de ce pontificat nous renvoie à ce que nous avons
nous-mêmes partagé, dans ce journal pour
commencer. La vue des foules à Wadovice ou à
Cracovie, nous rappelait les grands actes de la foi
dont la Pologne fut capable. Le feu n’est pas
retombé et c’est bien celui dont le Christ nous
parle dans l’Evangile. Quelques-uns de ces grands
témoins qui ont éclairé notre route dans ce quart
de siècle, qui fut le temps de Jean-Paul II, nous
manquent désormais. Irina Alberti par exemple,
qui fut à sa façon une mère pour les dissidents de
ce qu’on appelait encore l’URSS. Jean-Paul II, qui
ne se trompait pas dans le choix de ses conseillers,
eut souvent à lui faire appel. Que de fois, l’ai-je
entendu me dire : "Nous avons avec ce Pape un
saint et nous ne le savons pas."
Les foules pour leur part savaient à quoi s’en
tenir. L’immense ferveur de la place Saint-Pierre ces
derniers jours, alors que Jean-Paul II en était à
souffrir son agonie, montait vers le ciel jour et nuit
dans une sorte d’action de grâce.
Qui aurait pu penser, il y a vingt-cinq ans, que
le Pape laisserait derrière lui autant de multitudes
en pleurs ? Les plus petits une fois encore en précèdent bien d’autres dans cette cohorte de la reconnaissance. Une maman à Tours doit se souvenir de
ce pape. Elle l’avait vu soudain s’arrêter à sa hauteur. L’inespéré pour cette femme qui tenait en ses
bras son enfant trisomique, dans l’espoir improbable de voir le Pape poser le regard sur elle. Mais
il y avait tant de monde. Pas suffisamment toutefois pour le distraire de cette maman en peine. Le
Pape qui savait voir avait pris l’enfant dans ses
bras, avait béni la maman et lui avait dit : "vous
êtes plus grande que moi". Est-ce si étonnant que
tant de gens se soient souvenus de ce pape à l’heure
de sa mort ? ■
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
13
DOSSIER
PROSPECTIVE POLITIQUE
Plaidoyer
pour un
Au moment où paraîtra ce journal, on
sera à quelques jours seulement de
l’élection du nouveau Pape. Celle-ci
obéit à des considérations purement
spirituelles. Les enjeux internes sont
immenses. Il s’agit d’abord de l’Eglise,
de son organisation, de sa doctrine.
Cependant, il n’est pas interdit
d’évaluer les conséquences politiques
externes d’une telle élection...
es cardinaux du précédent Conclave n’imaginaient sans doute pas que le mur de
Berlin allait tomber et le communisme s’effondrer au Centre et à l’Est de l’Europe dix
ans plus tard. La preuve : leur premier
réflexe deux mois plus tôt avait été d’élire le
patriarche de Venise.
Le Conclave d’avril 2005 aurait donc tort de
vouloir cette fois penser géopolitique à échéance
de dix, quinze ou vingt ans. Les bonnes causes
abondent : vouloir anticiper l’évolution de l’Islam
ou celles de la Russie ou de la Chine serait légitime. Le choix néanmoins n’est pas géographique,
mais religieux. Il est de la Personne au plus haut
sens du mot.
Ceci étant posé, pour ce qui est des enjeux
internationaux, l’on peut penser à une continuité
que l’on peut qualifier de "littérale" : l’Europe, le
rapprochement judéo-chrétien, étant les deux
lignes d’action principales, qu’on pourrait qualifier
de stratégiques, du pontificat qui vient de s’achever. Ou bien comme on l’a répété à satiété :
passer au "Sud", prendre acte du décentrement de
l’Eglise. Bien entendu nul mieux que Jean-Paul II
n’avait aussi incarné ce second axe tout aussi stratégique. On peut imaginer que son successeur
reprendra ces deux orientations, mais la question
qui mérite d’être posée est celle de savoir d’où
celles-ci seront conduites ? La réponse est évidente : depuis Rome. Mais par des Italiens,
L
14 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
La Maison
Blanche a
d’ailleurs
tout de suite
compris
l’importance
du Conclave
Pape
d’autres Européens, ou le moment n’est-il pas venu,
du fait même de l’universalisation de la Curie, de
confier les clés à un évêque, tout aussi catholique
et romain, mais d’un autre continent ?
L’Eglise n’est pas une organisation internationale au sens des Nations Unies, de la Banque
Mondiale ou de l’OMC. Elle n’est pas liée par les
majorités. 43% des catholiques vivent en Amérique
latine contre 25% en Europe. C’est un facteur mais
qui ne lie en aucune manière le Conclave. Un pape
d’Amérique latine réussirait-il à enrayer le déclin
du rôle de l’Eglise dans le sous-hémisphère mieux
que le pape polonais a pu résister à l’érosion de la
pratique dans son propre pays ? Le déclin religieux
en Europe sera-t-il accéléré si le Pape n’est plus un
Européen ? Ces questions à la lettre n’ont pas de
sens.
Il est néanmoins un facteur qui, si l’on pense
mondialement, doit être pris en compte : le rôle
dirigeant des Etats-Unis dont le quart des habitants
est catholique. Une réelle influence sur le cours de
l’Histoire passe par le positionnement de l’Eglise
face à Washington. La Maison Blanche a d’ailleurs
tout de suite compris l’importance du Conclave. Les
réactions du président Bush doivent être interprétées essentiellement à la lumière de cette
prochaine échéance sur laquelle il veut naturellement peser. C’est une chance unique qui s’offre à
lui et il ne faut pas compter qu’il la laisse passer
sans rien tenter. Bien sûr il ne peut rien. Il a néanmoins pour effet d’empêcher tout cardinal des
Etats-Unis d’être élu. On sait qu’il en est au moins
un de parfaitement plausible : le cardinal George
de Chicago. Mais celui-ci se retrouverait dans une
situation intenable comme Wojtyla face au gouvernement communiste polonais de 1978. Il ne pourrait pas ne pas critiquer son pays – George est un
des critiques les plus acérés du "modèle américain" – et serait dénoncé comme anti-patriote.
Il est néanmoins essentiel de se positionner
par rapport à ce modèle en voie de mondialisation.
La plus proche alternative à Chicago serait soit le
Mexique, mais avec le risque d’être "trop près des
Etats-Unis" (s’il est moins loin de Dieu désormais),
soit de préférence l’Amérique centrale, où s’im-
DOSSIER
Sud -Américain
© ETIENNE VILLEMAIN
par Yves LA MARCK
pose l’archevêque de Tegucigalpa, une sorte de
Cracovie ou de Wadowice des Caraïbes, la capitale
du Honduras, petit pays d’environ sept millions
d’habitants dont 80% vivent sous le seuil de pauvreté. Mgr Rodriguez Maradiaga est l’un des plus
récents cardinaux nommés par le Saint-Père
(promu en 2001), qui fut président de la Conférence
des évêques de l’Amérique latine (CELAM) jusqu’en
1999 et est bien connu à Rome. Salesien, Maradiaga s’est fait connaître internationalement grâce
à la campagne sur la dette des pays pauvres. Le
domaine de l’économie est certainement un des
nouveaux terrains prioritaires de l’évangélisation.
Si le président Bush peut nommer Wolfowitz président de la Banque Mondiale, pourquoi pas Maradiaga au Siège de Pierre ?
Faire un
nouveau saut
qualitatif ?
Le Conclave est-il prêt à faire un nouveau saut
qualitatif ? Les probabilités d’un pontificat de
transition, certains disent de pause, autour d’un
candidat de "compromis" sont plus fortes de la
part d’un Sacré Collège écrasé par l’immensité du
pontificat de Jean-Paul II et la responsabilité qui
incombe à ceux qu’il a lui-même nommés de défendre l’héritage plutôt que d’avoir à engager
l’après-Wojtyla. Or il ne s’agit pas tant de lui que
de l’institution, moins du passé que de l’avenir. Et
il n’est pas interdit d’avoir de l’imagination.
En tout état de cause, nous ne comptons pas
assez avec l’Amérique latine. Saisissons cette mise
en lumière de l’Eglise sud-américaine pour
redécouvrir un continent qui nous est pourtant si
proche. ■
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
15
DOSSIER
ACTIONS DE GRACES
Le
Pape de la géné
par le Père DANIEL-ANGE
Nous voici orphelins ! Nous
pleurons et nous débordons
d’action de grâces, pour tout ce
qu’il nous a donné au long de
ces années fantastiques où il a
été notre berger, notre
prophète, notre père après nous
avoir appris à vivre, il nous a
appris à souffrir et mourir.
I
Il commence
enfin son
évangelisation
l vient de vivre sa Pâques au-dedans de la fête tous azimuts
© ETIENNE VILLEMAIN
même de Pâques : dans la nuit octave de la
nuit pascale. Un premier samedi du mois :
Fatima : après avoir grandi toute sa vie dans
le sein de Marie ; le voilà né dans ses bras,
et par Elle offert au Père. Et, troisième coïncidence
bouleversante : en la fête de la Miséricorde qu’il
avait lui-même instituée. En le jour même de Marie,
et le diocèse de Cracovie a été le premier diocèse
du monde à célébrer la fête du Cœur de Jésus, il
part avec sa petite Faustina. Son dernier acte :
suivre la messe. Il entend saint Pierre : sans l’avoir
vu, vous l’avez aimé, sans le voir encore vous tressaillez d’une joie indicible et maintenant, vous
recevez la couronne, l’aboutissement de votre foi !
Son ultime évangile entendu : le Cœur ouvert
et glorieux … et voici que, c’est après la Pâques de
Jésus que son cœur s’ouvre : des torrents impétueux
d’eaux vives déferlent sur le monde, un gigantesque tsunami d’amour et de grâces. Une lame de
fond de vie divine balaye la planète.
A la stupeur de tous, voilà manifestée sa paternité universelle. Jamais dans toute l’histoire, un
homme n’a été autant vu et finalement aimé. La
planète est en larmes. Signe qu’il commence enfin
son évangélisation tous azimuts.
Il rassemblait des millions, ces jours-ci , il bat
tous les records : des milliards ! Tout ce qu’il a
fait sur terre n’était que les prémices. Comme
Thérèse, c’est maintenant qu’il commence vrai-
16 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
DOSSIER
ration
Jean-Paul II
ment sa mission, sans plus de contrainte de temps,
d’espace, de limites physiques. Il est totalement
libre en Dieu, d’être aussi partout avec chacun.
Ces jours-ci, des gens par dizaines de milliers se
tournent vers Dieu. Les gens se pressent jour et nuit
dans les églises. C’est une immense veillée de prière
non stop autour de son corps. A peine mort, le
voilà plus vivant que jamais !
Pentecôte sur le monde
Donne ton sang et reçois l’Esprit : il a donné tout
son sang et par ce sang mélangé à celui de
l’Agneau, il répand à flots l’Esprit (voir mon article
dans France Catholique n° 2943 du 10 septembre
dernier sur les larmes de Pierre et sur le pape silencieux).
Il vient de signer toutes ses paroles, de sceller
toute sa vie par ces 4 cris : son sang, ses larmes,
son souffle… son silence.
Tout semblait achevé, accompli, et voici l’ultime
cri : son cœur ouvert qui déjà contenant le monde,
et maintenant s’épanche sur ce monde qu’il a tant
aimé.
Vous les jeunes, c’est l’unique pape de votre
vie. Il a engendré votre génération. Vous êtes le plus
fabuleux cadeau qu’il a fait à l’Eglise : cette génération Jean Paul II qui va changer le monde parce
que vivant de son héritage. Vous êtes les enfants
de ses larmes, souffrance, prière, de sa passion
apostolique. Vous en êtes fiers, et heureux : vous
en serez dignes. Vous serez à la hauteur de ce qu’il
laisse entre vos mains. Il a été pour vous, pour
nous, l’icône vivante du Père du ciel. Bien plus : son
sacrement : le signe visible et tangible de la
tendresse du Père invisible. Comme l’a été Joseph
pour Jésus adolescent et jeune. Qui le voyait, voyait
le Père.
Et dans une génération sans repère, et si peu
de vrais pères, il a été le repère par excellence
parce que vivant pleinement sa paternité : faisant
toujours appel au meilleur de vous-mêmes, le
détectant, l’éveillant et le donnant au monde.
Personne n‘a eu un regard prophétique comme lui
sur chacun.
Vous les
jeunes, c’est
l’unique pape
de votre vie
Et voici, il vient de basculer dans votre monde.
Il n’a plus 84 ans depuis samedi soir…. Il a 18…25
ans. Il est entré dans l’éternelle jeunesse de Dieu !
Il n’est plus dans votre passé chronologique
(né avant vous), il vous devance dans votre avenir
chronologique, nous allons vers lui. Il nous attend.
Nous le retrouverons au ciel.
Imaginez la fête au ciel : ces milliers de bienheureux et de saints béatifiés et canonisés, dansant
avec lui : Gianna Molla, Térésa, Pierre Giorgio, les
enfants de Fatima, et tous, tous….
Nous allons vivre une nouvelle relation d’intimité avec lui comme jamais avant.
Comment ne pas exulter ? J’ai eu la grâce de
vivre ces jours immenses avec les jeunes de Ressuscito à Versailles : 55 heures quasi non stop
d’adoration. (Deux nuits et demie), de louange et
d’enseignements sur lui, une ferveur paisible,
douloureuse et joyeuse en même temps. Après
l’annonce, silence absolu, larmes , puis une explosion d’ovation non stop devant Jésus et devant sa
photo .
Encore ceci, plus personnel :
Jean-Paul II a marqué au fer rouge et l’Église
et le monde pendant plus d’un quart de siècle. Le
tiers de la phase terrestre de mon existence, je l’ai
vécue au jour le jour avec lui. Je me suis essoufflé
à courir derrière lui, tant son rythme a été marathonien, celui d’un entraîneur. Événement après
événement, nous réservant surprise sur surprise, son
"tempo" est époustouflant. (1)
Personnellement, je n’ai cessé de me nourrir
des innombrables textes, dont j’ai lu la majeure par-
(1) Pour s’en convaincre, il suffit de dévorer comme j’ai pu le faire, les mille
huit cents pages des deux sommes – bientôt des classiques – de Georges
Weigel (biographie à laquelle le Pape lui-même a activement collaboré)
Jean-Paul II, témoin de l’Espérance (Lattes 1999) et Bernard Lecomte, JeanPaul II (Gallimard 2003).
(2) Quatorze Encycliques. Quarante et une lettres apostoliques. Treize exhortations apostoliques. Vingt-huit Motu proprio. Trois mille trois cents discours.
Mille discours d’audience. Une autobiographie. Un livre-interview. Un recueil
de poèmes. Le tout totalisant Quatre-vingt mille pages en cinquante-quatre
tomes – dans les premières années : quatre mille par an c’est-à-dire sept fois
plus que Pie XII et deux fois plus que Paul VI – cela uniquement pour son
pontificat. Donc sans compter tous ses écrits de la période Cracovienne !
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
17
DOSSIER
Vous
allumerez le
feu dans le
monde entier
Comment ne pas en tressaillir de joie sous l’action du Saint-Esprit ? (Lc 10). En rendre grâce au
Seigneur qui, par ce pauvre et ce petit par excellence, a révélé – non à ceux qui se croient savants
et puissants – mais aux tout petits, les secrets de
son Royaume, c’est-à-dire les trésors de son
Cœur ?
Jean-Paul II, lors de son extraordinaire homélie pour la consécration de la basilique de la Miséricorde à Krakow, le 14 août 2002, a osé citer le
Seigneur confiant à sainte Faustyna Kowalska :
"J’aime particulièrement la Pologne, et si elle obéit
à ma volonté, je l’élèverai en puissance et en sainteté. D’elle sortira l’étincelle qui préparera le monde
à mon ultime venue". (3)
Pour moi, cette étincelle, c’est le petit KarolLolek, de Katowice. N’a-t-il pas réalisé ce mot de
Catherine de Sienne, qu’il lançait aux deux millions
de jeunes du monde entier massés à Tor Vergata,
au cœur du grand Jubilé 2000 : "Si vous êtes ce
que vous devez être, vous allumerez le feu dans le
monde entier". Cette étincelle, il l’a été. Ce feu, il
l’a allumé. Parce que d’abord, il s’en est laissé brûler. Laissons-nous brûler à notre tour… ■
(3) Petit journal – Paris
1997 – p. 568.
© BERTRAND DUMAS-DE MASCAREL
tie, de ce véritable Docteur de l’Église. (2)
Au cours de vingt-quatre années de "virées
apostoliques" dans plus de quarante pays, j’ai eu
la joie de retransmettre à des foules, dans d’innombrables rencontres (de parents et d’éducateurs, de prêtres et de séminaristes, d’étudiants et
de lycéens surtout) l’essentiel de sa pensée. Dans
chaque pays visité, en " piqûre-rappel " je citais
les discours qu’il y avait prononcés, m’ayant
précédé un peu partout. Dans d’autres pays, comme
au Kazakhstan, c’était au contraire la joie, de
préparer sa venue auprès des jeunes. En fait, ma
période de vie apostolique coïncide exactement
avec celle de son pontificat.
Sa pensée a donc illuminé la mienne, sa parole
a fécondé la mienne. Ses actions ont stimulé les
miennes. J’ai vibré intensément à tout ce qu’il
disait, enseignait, clamait, avec tant de force. Bien
plus profondément ma prière n’a cessé de s’unir à
la sienne. Il a été et demeure mon maître. J’ose
parler d’une véritable communion d’âme et de
cœur. Il a été et demeure mon père dans l’Esprit.
Pour terminer, j’avouerai, sans la moindre hésitation que Jean-Paul II est pour moi un des plus
grands génies humains de tous les temps, et un des
plus grands saints de toute l’histoire de l’Église, et
parmi les papes sûrement un des plus grands et des
plus saints. De plus, un des très grands Docteurs
de l’Eglise.
18 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
DOSSIER
PATERNITÉ
Pourquoi, sont-ils
par le Père Michel GITTON
des millions ?
Les images, chaque jour plus
frappantes, plus émouvantes,
qui nous parviennent de Rome
et du monde entier attestent
l’étonnant impact de ce pape
polonais, qu’on avait cru au
départ si décalé par rapport
aux attentes du monde
d’aujourd’hui.
eaucoup de choses ont été dites déjà sur
les raisons de cet extraordinaire respect qui
enveloppe à présent le souvenir du Pape
Jean-Paul II. Son rôle providentiel au
moment où le monde sortait de la guerre
froide, son engagement courageux pour les droits
des minorités et des cultures, son ouverture à Israël,
ses rappels de la dignité de l’amour humain, et tant
d’autres choses suffiraient sans doute à faire de lui
une des figures marquantes du XXe siècle. Mais je
ne suis pas sûr que ce soit là la raison profonde de
l’attachement que lui vouent tant d’hommes et de
femmes si différents par la culture, la nationalité ou
l’âge.
Ce qu’en lui beaucoup ont trouvé, pour la
première fois peut-être, c’est un père. Quelqu’un
qui n’avait pas à se justifier d’intervenir dans la vie
des individus et des peuples, quelqu’un qui n’avait
pas à se demander si son message passait, tout
simplement parce que Dieu l’avait envoyé pour cela
: aider cette pauvre humanité à échapper à ses
démons et à développer les possibilités qui
sommeillent en elle, et qu’il le faisait de tout son
cœur, jusqu’à la limite de ses forces. Il suffit de relire
n’importe lequel de ses textes - et Dieu sait qu’il en
a écrit et prononcé ! -, pour voir cette manière de
parler franche, directe, qui suppose un interlocuteur
que l’on respecte, mais à qui on veut apporter une
lumière, un encouragement, un avertissement. Nulle
crainte apparente, nul complexe, pas de retour sur
soi, même s’il y a beaucoup d’humilité finalement
dans cette manière d’aborder les autres.
B
Jean-Paul II
a su vieillir
à la barre de
l’Eglise
La paternité de Jean-Paul II a été tout de suite
ressentie par les jeunes, ceux qui ont le plus souffert de l’effacement de toute vraie paternité dans
le contexte du monde occidental des années d’après
68. L’ami exigeant qu’il prétendait être a tout de suite
trouvé le chemin de leur cœur. Pourtant nul moins
que lui n’a pratiqué la démagogie, les appels étaient
directs, mais, en osant proposer un christianisme
sans concession et quelquefois héroïque, il savait
rejoindre l’élan profond de l’être humain que n’ont
pas encore étouffé les scepticismes et les cynismes
de la vie. La confiance qu’il faisait à ces milliers de
jeunes venus l’entendre était à la mesure de son
exigence et les fruits ne sont pas près de disparaître.
Jean-Paul II a su vieillir à la barre de l’Eglise et
cela aussi était une leçon : on n’est pas père pour
une décennie, on l’est jusqu’au bout ou on ne l’est
pas. Malgré l’épreuve qu’ont représentée pour lui le
déclin de ses forces physiques et la dégradation de
son image extérieure, il a persévéré dans son rôle de
père et de grand-père. Il n’a pas cédé à la revendication de beaucoup qui, voyant dans l’Eglise une
administration à peine différente des autres, auraient
voulu qu’il se retire plus tôt pour laisser la place à
un titulaire plus performant. Le risque était grand
sans doute, mais la leçon est à la mesure du pari :
l’Eglise est apparue, grâce à son courage, comme ce
qu’elle est en vérité : un ensemble de rapports humains, où la gestion des choses n’est qu’une conséquence, nécessaire mais secondaire, alors que
compte avant tout ce lien d’homme à homme qui
unit tous les membres de la famille de Dieu depuis
le Pape jusqu’au plus récent des fidèles.
Nous avons perdu un père, mais le propre d’un
vrai père, c’est qu’il est source de maturité pour
ceux qu’il a élevés ; loin de les étouffer, il leur a fait
don de cette force qui l’habite, pour qu’ils soient
pères à leur tour. Il est encore trop tôt pour voir
comment l’influence de Jean-Paul II a renouvelé les
plus hautes instances de l’Eglise. Mais dans l’expérience du vide immense qu’il laisse, soyons sûrs que
l’Esprit Saint veille et, si nous pouvons être certains
qu’il n’y aura pas un autre Jean-Paul II, il y aura
ceux qu’il a entraînés, éveillés, et conquis pour le
Christ, et qui seront les pères de demain. ■
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
19
ESPRIT
En
mémoire des jours
Le cri des pauvres
Par
Robert Masson
’est peut-être l’un des plus
beaux textes qu’on ait pu
lire sur l’Eucharistie, en
cette année qui lui est consacrée. Il a paru dans La Croix ce
dernier Jeudi Saint (1) , où l’on
revivait les ultimes instants de
Jésus parmi les siens. Ce moment où “ayant aimé les siens,
il les aima jusqu’au bout”, nous
précise l’Evangile. Alors même
que le Père a remis toute chose
entre ses mains, qu’il est sorti
de Dieu, et qu’il va vers lui, Jésus le Maître et Seigneur se
lève de table, et ceint du
tablier de serviteur, se met à
laver les pieds de ses disciples.
A la stupeur de Pierre : “Toi
Seigneur, me laver les pieds !”
Comment ne pas comprendre
l’étonnement de Pierre, qui demeure probablement le nôtre ?
Jusqu’alors, et encore maintenant, c’étaient les esclaves, qui
lavaient les pieds de leurs
maîtres.
L’auteur du texte dont je
parle sait de quoi il s’agit. Il est
lui-même l’évêque d’un vaste
diocèse qui a l’étendue du Portugal, aux limites de la Bolivie
et du Brésil. Autant de lieux de
notre univers, qui ne sont pas
en conformité avec le dessein
divin sur sa création. Sinon, y
aurait-il autant de misères
auxquelles on ne saurait s’ha-
C
bituer ? Certes, et c’est parole
d’Evangile, il y aura toujours
des pauvres parmi nous. Mais
le Christ n’a pas parlé de misère, qui est circonstance aggravante, pour notre condition
humaine.
L’Eglise, en cette contrée
du monde, ne s’y trompe pas.
Elle se veut à l’image de cet
évêque d’Amazonie. Servante
et pauvre, elle l’est au niveau
le plus essentiel, qui est précisément celui de l’Eucharistie.
Don Géraldo Verdier, tel est son
nom, a la charge de 400 communautés chrétiennes, qui se
réunissent sans prêtre, tous les
dimanches.
Dénuement s’il en est, et
dont l’évêque prend encore
plus conscience, alors qu’il visite l’une de ces communautés,
tout près de la frontière avec la
Bolivie. Trois fois par an seulement, les chrétiens de l’endroit
peuvent espérer la visite d’un
prêtre, astreint lui-même à une
vie d’itinérance, qui en fait une
sorte d’intermittent, pour répondre aux attentes de ces
chrétiens esseulés, et qui le
sont encore plus quand le
bateau s’éloigne des rives où ils
vivent. Une interrogation déchirante s’élève chaque fois où,
la mort dans l’âme, Mgr Verdier
doit laisser repartir des prêtres
qui ne peuvent être que de
passage. Le cri des pauvres
monte alors jusqu’aux cieux,
pour dire l’état d’abandon de
ce peuple, qui ne se fait pas
prier pour aller à la messe
quand par bonheur un prêtre
passe, trois fois par an...
De quoi nous donner à réfléchir, nous qui ne semblons
guère éprouver l’absence de
l’Eucharistie pour ce qu’elle
est : “un drame, une misère,
au sens plein du mot”. Parce
que nécessité fait loi, ce petit
20 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
peuple d’Amazonie fait face de
son mieux. L’actuel évêque du
lieu souligne le rôle de ceux
qu’on appelle là-bas des ministres de l’Eucharistie. C’est
toute la grâce de ces communautés dites de base, qui ont
su se montrer inventives, pour
ce qui est précisément de l’Eucharistie. Chaque mois, des
hommes qui ont une haute
conscience de leur mission, se
rendent avec les moyens du
bord, en autobus, en moto, à
bicyclette, à pieds parfois, pour
chercher avec beaucoup de
respect, des hosties consacrées.
De retour à la communauté, ils
réunissent les familles, habituellement le vendredi soir,
pour une veillée d’adoration
devant le Saint Sacrement, en
préparation à la communion du
lendemain.
Cette heure d’adoration, ce
sont les chrétiens de là-bas qui
en ont eu l’idée, souligne Don
Géraldo Verdier. Heureuse surprise, écrit l’évêque, qui voit
dans cette initiative et dans
cette ferveur eucharistique, la
preuve que ce sont les pauvres
qui nous évangélisent. Quand il
fut nommé évêque, Mgr Verdier reçut confidence d’une remarque de frère Roger, son
ami, le prieur de Taizé : “Faites
attention, de ne pas blesser les
pauvres dans l’expression de
leur foi.” Leur nouvel évêque
ne risque pas de blesser la foi
de ces pauvres qui ont tellement à nous apprendre.
Le problème c’est de pouvoir répondre à la demande.
C’est particulièrement criant
dans le cas du sacrement de la
réconciliation, où il n’y a pas
toujours des prêtres pour
entendre ceux qui désirent se
confesser. Là encore, avec une
ferveur dont nous n’avons plus
forcément idée. Ce n’est pas
là-bas qu’on rêve d’une Eglise
sans prêtres. Un homme qui
était sur le point de mourir
suppliait un chrétien de son
entourage : “Permets que je te
dise mes péchés, tu les prendras dans ta main, tu les
confieras à un prêtre, qui pourra alors me donner l’absolution, même à retardement.”
A l’écoute de cet évêque
des lointains, on a le sentiment
de se retrouver aux premiers
temps de la foi. Quand tout
commençait dans un élan de
Pentecôte. Ici, en Amazonie,
relève Don Géraldo Verdier,
après soixante ans d’efforts,
des vocations sacerdotales
apparaissent. Des prêtres autochtones forment le clergé
local. La prière de ces chrétiens, leur faim eucharistique,
ne resteront pas vaines. Sans
parler du sang des martyrs qui
féconde ces terres.
C’est en ces contrées amazoniennes que Sœur Dorothy a
payé de sa vie sa fidélité à
l’Evangile, et spécialement au
sermon sur la montagne :
“Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, ils verront
Dieu.” Pour construire le Royaume, écrit cet évêque, le Seigneur souhaite des êtres libres,
des chrétiens capables d’aimer,
et de soutenir les causes les
plus nobles, les plus justes,
celle des Indiens et des enfants
de la rue, des migrants, des
laissés pour compte. Tous ceux
auprès desquels on retrouve
Jésus en tenue de service. Ils
l’ont compris, ceux qui le reconnaissent dans les plus
petits d’entre les siens. C’est
encore une parole d’Evangile,
elle nous jugera tous, à l’ultime
de nos jours. ■
(1) La Croix, jeudi 24 mars 2005
Johannes Paulus Magnus
L
es images des obsèques de Jean-Paul II nous ont tous remués. D’abord en
raison de la grandeur du personnage. Cet homme aux stigmates
invisibles a attiré une assistance qui ne s’était pas seulement rassemblée
place Saint-Pierre, mais partout dans Rome et dans le monde. Même les
chaînes des pays arabes ont retransmis la cérémonie. Ensuite, les
ornements rouges des prélats, le vent qui soufflait, donnaient à cette cérémonie
hors du commun un air de Pentecôte, comme si l’Esprit Saint confirmait l’œuvre
de Dieu accomplie à travers ce pape du IIIe millénaire, tout en laissant entendre
que le monde devra puiser longtemps encore dans la parole prophétique de ce
pasteur hors normes.
En de pareilles obsèques, on s’attendait bien évidemment à voir des mantilles
et des cravates noires portées par les grands de la scène internationale, qu’ils
soient élus ou couronnés. Mais des kéfis ? C’est dire qu’il faudra des années pour
évaluer l’impact du charisme diplomatique de Jean-Paul II. Des gouvernants
opposés entre eux, parfois jusqu’au conflit armé, se sont recueillis quasiment côte
à côte devant la dépouille d’un homme qui n’eut de cesse d’annoncer que seule
la paix est le chemin qui conduit l’humanité à la liberté. Tout aussi inédit le fait
que tant de chefs d’État, habitués à se rencontrer selon un ordre ultra
protocolaire, soient placés par ordre alphabétique. À quoi pensaient-ils, devant la
dépouille du Saint-Père ? Aux limites de leurs ambitions humaines ? À leur propre
finitude, tout-puissants soient-ils aujourd’hui ? Peut-être tout cela à la fois.
Dans son homélie, le cardinal Ratzinger a insisté sur l’itinéraire de foi et
d’abnégation du Saint-Père qui, à l’exemple de l’apôtre Pierre, a suivi le Christ
jusqu’au bout. Avant que la dépouille mortelle du Saint-Père ne franchisse une
dernière fois le seuil de la basilique pour reposer dans la crypte, c’est par une
ovation d’action de grâces que la foule a salué la fidélité de son pasteur et père.
Certains médias s’interrogent pour savoir comment le futur pape gérera
l’héritage de Jean-Paul II sans courir le risque de voir son action sans cesse
comparée à celle de son prédécesseur. La "vox populi" a déjà donné la réponse :
"Santo ! Santo ! Santo subito ! Saint tout de suite !" ont déjà scandé à plusieurs
reprises les fidèles. L’humanisme de Jean-Paul II, sa pensée, sa foi, son
abnégation, sa charité pastorale, se récapituleraient donc dans la sainteté. La "vox
Ecclesiae" confirmera-t-elle ce que la "vox populi" exprime depuis le 2 avril ? On
peut en tout cas commencer d’appeler Jean-Paul II Johannes Paulus Magnus.
Dom Ludovic LECURU
LA CEREMONIE
J'étais à Rome au Circus Maximus
(par Marie-Gabrielle Leblanc)
L'aube blanchit sur le Circus Maximus.
Les formes humaines anonymes, roulées
dans leurs couvertures, commencent à
bouger. Sortent des sacs une sœur des
Béatitudes, un scout, un soldat polonais
(touchant, ce groupe de militaires
polonais en treillis), un frère de Saint
Jean, un franciscain, une dame chic en
jean froissé, le directeur de Radio NotreDame, une missionnaire de la Charité,
une dame tchèque, etc. Nous ne saurons
jamais combien nous étions vraiment à
Rome aux obsèques de Jean Paul II : la
presse italienne dit 5 millions, les médias
français un million (ce dernier chiffre
paraît très insuffisant étant donné qu'il y
avait déjà 700 000 Polonais rien qu'à Tor
Vergata). Nous étions plusieurs dizaines
de milliers au Circus Maximus.
Partout claquent les drapeaux polonais
avec le ruban noir. On a vraiment de la
peine pour eux, doublement orphelins.
Mais aussi des drapeaux croates, slovaques, belges. Les portables ont du
bon : après 2 SMS, je retrouve Mateusz,
mon ami polonais de Varsovie - un jeune
peintre d'art sacré.
Il est intéressant de voir qui s'est
secoué en France pour aller à Rome : pas
les diocèses (on répondait au téléphone
"Comment voulez-vous qu'on organise
quelque chose en si peu de temps?"),
mais les communautés nouvelles (les
deux trains spéciaux de l'Emmanuel) et
une jeune agence, Ictus-voyages, qui se
considère impliquée dans la nouvelle
évangélisation (deux avions spéciaux
organisés en trois jours pour 310 personnes).
Mais en revanche, tous les âges, pas
seulement des jeunes (dur, quand on n'a
plus 20 ans, le réveil dans la rosée
glaciale, après une non-nuit roulé dans
une méchante couverture ou un sac de
couchage), mais aussi des mères de
grands enfants, des cheveux blancs.
Notre doyen, un monsieur de 82 ans,
professeur d'université honoraire, est
enthousiaste : "On ne se pose pas la
question de savoir s'il faut aller à la
messe le dimanche, ou si ça ne suffirait
pas de la regarder à la télévision. Ici c'est
pareil ! Mes enfants m'ont dit qu'ils
étaient fiers de moi."
Parmi les prêtres et religieux, à part le
Père Jacques Marin, toujours intrépide et
infatigable, surtout des communautés
nouvelles et des jeunes prêtres en col
romain de la "génération Jean-Paul II".
Ce qui domine, c'est que chacun de
nous a une histoire personnelle à raconter sur le Pape, une relation particulière avec Jean Paul II. Un tel lui doit
sa vocation, un autre son mariage, un
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005 21
autre sa conversion. Christine Boutin, qui
est avec nous, témoigne qu'elle n'aurait
jamais eu le courage d'entrer dans l'arène
politique si elle n'avait pas entendu le
"N'ayez pas peur!". En partant pour Rome
sans bagage, chacun d'entre nous avait
une sensation de liberté : faire quelque
chose de déraisonnable uniquement par
amour, pour ce Père si aimé qui a tant fait
pour nous.
L'apogée fut, juste après la splendide
homélie du cardinal Ratzinger, scandant
les phrases italiennes de son accent
bavarois, le coup de théâtre (auquel je
m'attendais avec certitude) : partout se
déploient des banderoles en polonais et
italien "Santo subito" (saint tout de suite).
Il paraît qu'au Vatican, la foule scandait
au même moment "Woytila santo". C'est
vraiment l'état d'esprit unanime ; on avait
l'impression de retrouver la canonisation,
par acclamation populaire spontanée, de
saint François d'Assise.
Pour terminer, voici mon souvenir
préféré de Jean-Paul II (même si ensuite je
l'ai rencontré plusieurs fois de près à
Castelgandolfo avec de petits groupes) : je
ne le partage qu'avec les quelques milliers
de personnes qui étaient dans la basilique
du Sacré-Cœur de Montmartre avec Mgr
Charles, en 1980 quand le Saint Père y est
venu prier après la veillée avec les jeunes à
Longchamp. Il arrive à près d'une heure
d'une matin dans une basilique bondée où
on l'attendait depuis des heures. Il remonte
rapidement l'allée centrale de son pas
gymnastique, comme aimanté par le Saint
Sacrement exposé, les yeux fixés sur le
Christ eucharistique, dégrafe son manteau
rouge et le passe sans se retourner au Père
Dziwisz qui le suit.
Arrivé en bas des marches du chœur, il
s'allonge de tout son long par terre sur le
dallage en marbre, et reste en adoration,
sans un mouvement, un bon quart d'heure.
Jamais il ne paraissait si grand qu'ainsi
prosterné devant son Dieu. Puis à deux
heures du matin, il rentre enfin dormir, et
sa voiture redescend de Montmartre par
l'avenue Junot. Une jeune mère me
racontera le lendemain qu'elle l'attendait
en pleine nuit dans la rue déserte avec ses
deux bébés, et lui fit signe au passage.
L'apercevant, il a fait arrêter la voiture et a
pris le temps de bénir les enfants.
Une Foi immense, un "bloc de prière"
et une grande tendresse : tel était notre
Saint Père (ce mot si souvent prononcé
prend maintenant tout son sens) Jean-Paul
II le Grand.
M.-G. L.
22 FRANCECatholique N°2972 15
AVRIL
Les messages que l’on reçoit en direct
permettent une communion inédite et
instantanée : il n’y a plus de temps
(Apo.10, 6).Le 1er janvier 2005, le SaintPère avait parlé d’une "citoyenneté
mondiale", elle s’est manifestée sous nos
yeux.
Pour ne prendre qu’un exemple, citons
ici des amis orthodoxes russes dont
certains avaient été les convives de Jean
Paul II et se sont exprimés, comblant
ainsi, à mes yeux, une certaine absence
de leur Eglise le 8 avril. Voici trois
témoignages :
Nous sommes avec tous les catholiques
durant ces jours difficiles. Ces jours,
l’unité mystique de l’Eglise apparaît avec
évidence. Nous nous sommes
rassemblés ; un prêtre, vice–recteur de
l’Académie théologique Serguev-Possad,
pleurait en disant que le monde avait
perdu "un grand Starets (Père spirituel).
Plusieurs me téléphonent pour dire leur
peine à la mort du pape.
On regrette qu’il n’ait pas pu venir en
Russie. Certes il y a d’autres opinions,
mais aujourd’hui on ne les entend pas en
Russie. Nous prions pour Jean Paul II,
pour que le Seigneur l’accueil dans son
Royaume. J’espère que le deuil et les
larmes sont plus faibles que la joie
pascale dans laquelle le Pontife nous a
quittés. (Alexis Kozyrev, université de
Moscou, MGU, professeur de philosophie).
poétesse Olga Sédakova de l’université de
Moscou, était aussi présente charmée d’avoir un si éminent lecteur.
Voici enfin la réaction d’Irina, fille d’un
ancien haut dirigeant du Parti communiste
soviétique, elle devint orthodoxe à 18 ans
et voyait en Jean-Paul II le Pasteur selon le
Cœur de Dieu :
Je ne trouve toujours pas les mots
appropriés pour exprimer ma tristesse
profonde et cet immense chagrin qui envahi nos cœurs et le monde entier devant
la perte d'un Père, d'un guide qui avait tant
d'amour pour tous ses frères en humanité.
Personnellement j'ai l'impression d'être
abandonnée…Je sais que le Bon Dieu ne
va pas nous abandonner et il y aura bien
sûr, je l'espère de tous mes vœux, une
continuité, à partir du testament spirituel
de Jean-Paul II , dans les futures actions de
l'Eglise. Que cette continuité concerne
aussi mon très ardent désir d'un rapprochement avec l'Eglise Orthodoxe qui en a
tant besoin.
Il faut, nous enseigne l’Evangile, que le
blé soit jeté en terre pour fructifier. On
peut attendre de la plus grande Eglise
orientale des fruits que Jean Paul II aura
semé dans les larmes et que d’autres
moissonneront dans la joie. Il est question
de faire de la fête de Notre Dame de Kazan
la fête nationale en Russie, or ce jour
correspond au 4 novembre du calendrier
grégorien, fête de saint Charles (Karol).
Dieu sait ce qu’Il permet.
Voici maintenant un autre professeur,
Konstantin Sigov, appartenant à l’Eglise orthodoxe du Patriarcat de Moscou, il est
ukrainien et enseigne la philosophie à
l’université Mohyla de Kiev (les lecteurs de
“France Catholique” le connaisse bien ):
Nous prions à Kiev avec vous pour Jean
Paul II et répétons avec les pèlerins :
SANTO SUBITO. Aujourd’hui c’est le
grand jour de l’humanité unie, avec le
visage purifié par les larmes. Il est
impossible d’exprimer toute la profondeur de cette révélation de Pâques.
Reconnaissance profonde et amour
fraternel.
Jean Paul II désirait tant se rendre en
Russie, alors il invita de jeunes universitaires à sa table et, six années (19931998) de suite les membres d’une société
Vladimir Soloviev (1853-1900), auteur cher
à Jean Paul II, se retrouvèrent à ses côtés.
Parmi eux Serge Avérintsev (1938-2004)
qui fut si populaire dans le monde universitaire russe et qui décrivait Jean Paul II
comme "Celui qui a le souci de tous". La
Patrick de LAUBIER +
2005
MARCEL CLEMENT
Marcel Clément, écrivain, professeur de
philosophie, spécialiste de la doctrine
sociale de l’Eglise, est décédé vendredi 8
avril. Il fut directeur du bimensuel catholique “L’Homme Nouveau” de 1962 à
1998. Ses obsèques ont eu lieu mercredi
13 avril en l'Eglise Saint-Ferdinand des
Ternes de Paris (17e). La messe a été dite
par Dom Antoine Forgeot, père abbé de
Notre-Dame de Fontgombault.
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La cour d'appel de Paris a confirmé le 8
avril l'interdiction de l'affichage publicitaire des stylistes Marithé et François
Girbaud, s'inspirant de La Cène de Léonard
de Vinci, qu'avaient obtenue, le 10 mars,
les évêques de France devant le tribunal de
grande instance.
L’homélie du cardinal Ratzinger
De la fenêtre du Ciel, Jean-Paul II continue de bénir les
foules : c’est l’image que le cardinal Joseph Ratzinger, doyen du
collège des cardinaux, et en tant que tel président de la
célébration, a laissée à la foule rassemblée place Saint-Pierre
pour les funérailles de son ami Jean-paul II, vendredi matin. Une
homélie au cours de laquelle le cardinal s’est ému à plusieurs
reprises. Treize fois les applaudissements de la foule ont scandé
ses propos. Il expliquait : « Il a interprété pour nous le mystère
pascal comme mystère de la Divine miséricorde ».
Rouge, deuil pontifical, rouge du collège des cardinaux
rassemblés. Vent, brise de Pentecôte. Bois, de cyprès qui
embrasse le corps du défunt, et où son blason est gravé : la croix
et le " M " de Marie à l’ombre de la Croix. Autant de signes
marquant la célébration de ces funérailles du siècle, sur le parvis
de la basilique Saint-Pierre, sous l’effigie du Christ ressuscité.
« Pour nous tous, disait le cardinal à la fin de son homélie,
demeure inoubliable [applaudissements] la manière dont en ce
dernier dimanche de Pâques de son existence, le Saint-Père,
marqué par la souffrance, s’est montré encore une fois à la
fenêtre du Palais apostolique et a donné une dernière fois la
Bénédiction Urbi et Orbi. Nous pouvons être sûrs que notre Pape
bien-aimé [applaudissements] est maintenant à la fenêtre de la
maison du Père, qu’il nous voit et qu’il nous bénit
[applaudissements]. Oui, puisses-tu nous bénir, Très Saint Père,
nous confions ta chère âme à la Mère de Dieu, ta Mère, qui t’a
conduit chaque jour et te conduira maintenant à la gloire
éternelle de son Fils, Jésus Christ, notre Seigneur. Amen. »
Le Cardinal a commenté la rencontre de Pierre et du Christ
ressuscité dans l’Evangile de saint Jean et les trois appels de Karol
Wojtyla, au sacerdoce, à l’épiscopat, au siège de Pierre.
« "Suis-moi", dit le Seigneur ressuscité à Pierre; telle est sa
dernière parole à ce disciple, choisi pour paître ses brebis. "Suismoi" – cette parole lapidaire du Christ peut être considérée
comme la clé pour comprendre le message qui vient de la vie de
notre regretté et bien-aimé Pape Jean-Paul II, dont nous déposons
aujourd’hui le corps dans la terre comme semence d’immortalité
- avec le cœur rempli de tristesse, mais aussi de joyeuse
espérance et de profonde gratitude. »
Il a alors salué "de façon particulière les jeunes", qui ont
éclaté en applaudissements. Il a ajouté : « Les jeunes que JeanPaul II aimait définir comme l’avenir et l’espérance de l’Église ».
Il a rappelé le premier appel de Karol Wojtyla : « Depuis qu’il
était jeune étudiant Karol Wojtyla s’enthousiasmait pour la
littérature, pour le théâtre, pour la poésie. Travaillant dans une
usine chimique, entouré et menacé par la terreur nazie, il a
entendu la voix du Seigneur : “Suis-moi”! Dans ce contexte très
particulier, il commença à lire des livres de philosophie et de
théologie, il entra ensuite au séminaire clandestin créé par le
Cardinal Sapieha et, après la guerre, il put compléter ses études à
la faculté de théologie de l’université Jagellon de Cracovie. Très
souvent, dans ses lettres aux prêtres et dans ses livres
autobiographiques, il nous a parlé de son sacerdoce, lui qui fut
ordonné prêtre le 1er novembre 1946. »
Puis vint le deuxième appel, que le cardinal Ratzinger résume
ainsi : « Suis-moi ! En juillet 1958, commence pour le jeune
prêtre Karol Wojtyla une nouvelle étape sur le chemin avec le
Seigneur et à la suite du Seigneur. Karol s’était rendu comme
d’habitude avec un groupe de jeunes passionnés de canoë aux
lacs Masuri pour passer des vacances avec eux. Mais il portait sur
lui une lettre qui l’invitait à se présenter au Primat de Pologne, le
Cardinal Wyszynski et il pouvait deviner le but de la rencontre :
sa nomination comme évêque auxiliaire de Cracovie. Laisser
l’enseignement académique, laisser cette communion stimulante
avec les jeunes, laisser le grand combat intellectuel pour
connaître et interpréter le mystère de la créature humaine, pour
rendre présent dans le monde d’aujourd’hui l’interprétation
chrétienne de notre être – tout cela devait lui apparaître comme
se perdre soi-même, perdre précisément ce qui était devenu
l’identité humaine de ce jeune prêtre. »
Le cardinal Ratzinger évoque cette vie toute donnée: « "Suismoi" – Karol Wojtyla accepta, entendant la voix du Christ dans
l’appel de l’Église. Et il a compris ensuite jusqu’à quel point était
vraie la parole du Seigneur : "Qui cherchera à conserver sa vie la
perdra. Et qui la perdra la sauvegardera" . Notre Pape – nous le
savons tous – n’a jamais voulu sauvegarder sa propre vie, la
garder pour lui; il a voulu se donner lui-même sans réserve,
jusqu’au dernier instant, pour le Christ et de ce fait pour nous
aussi".»
Le cardinal raconte ainsi l’élection au siège de Pierre : «"Suismoi !" En octobre 1978, le Cardinal Wojtyla entendit de nouveau
la voix du Seigneur. Se renouvelle alors le dialogue avec Pierre,
repris dans l’Évangile de cette célébration : "Simon, fils de Jean,
m’aimes-tu ? Sois le pasteur de mes brebis !" À la question du
Seigneur, Karol, "m’aimes-tu ?" l’Archevêque de Cracovie répond
du plus profond de son cœur : "Seigneur, tu sais tout : tu sais
bien que je t’aime". L’amour du Christ fut la force dominante de
notre bien-aimé Saint-Père; ceux qui l’ont vu prier, ceux qui l’ont
entendu prêcher, le savent bien. Ainsi, grâce à son profond
enracinement dans le Christ, il a pu porter une charge qui est audelà des forces purement humaines : être le pasteur du troupeau
du Christ, de son Église universelle. »
«"Suis-moi !" En même temps qu’il lui confiait de paître son
troupeau, le Christ annonça à Pierre son martyre », ajoute le
cardinal doyen.
Et d’expliquer : « Dans la première période de son pontificat,
le Saint-Père, encore jeune et plein de force, allait, sous la
conduite du Christ, jusqu’aux confins du monde. Mais ensuite il
est entré de plus en plus dans la communion aux souffrances du
Christ, il a compris toujours mieux la vérité de ces paroles : "C’est
un autre qui te mettra ta ceinture ...". Et vraiment, dans cette
communion avec le Seigneur souffrant, il a annoncé
infatigablement et avec une intensité renouvelée l’Évangile, le
mystère de l’amour qui va jusqu’au bout.»
Le Pape s’en est allé aux premières vêpres du dimanche de la
Miséricorde. Le cardinal Ratzinger explique cette orientation de
tout le pontificat, cette alchimie de l’amour : « Il a interprété pour
nous le mystère pascal comme mystère de la Divine miséricorde.
Il écrit dans son dernier livre la limite imposée au mal "est en
définitive la Divine miséricorde ». Et en réfléchissant sur
l’attentat, il affirme : « En souffrant pour nous tous, le Christ a
conféré un sens nouveau à la souffrance, il l’a introduite dans
une nouvelle dimension, dans un nouvel ordre: celui de l’amour
[...]. C’est la souffrance qui brûle et consume le mal par la
flamme de l’amour et qui tire aussi du péché une floraison
multiforme de bien. »
« Animé par cette perspective, le Pape a souffert et aimé en
communion avec le Christ et c’est pourquoi le message de sa
souffrance et de son silence a été si éloquent et si fécond », ajoute
le cardinal.
Il ne pouvait pas ne pas évoquer la Mère de Dieu : « Divine
miséricorde : le Saint-Père a trouvé le reflet le plus pur de la
miséricorde de Dieu dans la Mère de Dieu. Lui, qui tout jeune
avait perdu sa mère, en a d’autant plus aimé la Mère de Dieu. Il a
entendu les paroles du Seigneur crucifié comme si elles lui
étaient personnellement adressées : "Voici ta Mère". Et il a fait
comme le disciple bien-aimé : il l’a accueillie au plus profond de
son être – Totus tuus. Et de cette Mère il a appris à se conformer
au Christ. »
L’homélie a été saluée par un long applaudissement : autant
de gratitude pour cette évocation pleine de profondeur, de
beauté, d’affection, en syntonie avec les sentiments de la foule,
que de gratitude pour celui auquel il rendait ainsi hommage.
ZF05040801
FRANCECatholique N°2972 15
AVRIL
2005 23
ESPRIT
Lectures de la messe du 17 avril 2005
IVème dimanche de Pâques :
La Miséricorde
● C’est le "Dimanche du Bon Pasteur", mais chaque année
la lecture de l’Evangile varie, car dans le chapitre 10 de
Saint Jean, le thème est abordé de plusieurs manières.
Nous avons cette année le début qui insiste sur la
différence entre le bon pasteur et les voleurs qui cherchent
à s’emparer du troupeau sans y avoir aucun droit. La
différence se marque à deux traits : les intrus n’ont pas la
clef de l’enclos, ils ne peuvent donc pas passer par la porte
et ils entrent en escaladant la palissade, alors que le vrai
berger, lui, entre par la porte ; les intrus se font remarquer
à leur voix, ils n’ont pas la voix du pasteur, les brebis ne les
reconnaissent pas. Dans les deux cas, Jésus se présente
comme le bon pasteur parce qu’il intervient
légitimement, il n’a pas à entrer par effraction, le cœur de
l’homme a été fait par lui et pour lui. Il est chez lui dans
l’héritage de son Père. Les brebis le connaissent parce
qu’au fond de leur cœur sommeille l’image du Fils. Alors il
peut les entraîner vers les verts pâturages.
● C’est encore l’image de la porte : non seulement Jésus
passe par la bonne porte pour accéder à son troupeau,
mais il est cette porte même, le point d’accès à notre
humanité. Tous les leaders politiques ou religieux ont
essayé de trouver le ressort qui fait fonctionner l’être
humain. Seul Jésus tient en main la clef de notre vie, seul
il est le point de passage qui donne accès à notre vie
24 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
par Michel GITTON
profonde. Seul aussi il ne l’exploite pas. Et en
retour cette porte permet au troupeau de
sortir, d’accéder au monde extérieur et d’y trouver sa
nourriture.
● Saint Pierre, dans sa lettre, nous retrace l’"exemple" du
Christ, qui nous est proposé "afin que nous allions sur ses
traces ". Le berger fut d’abord (et en même temps) brebis
muette, aux mains des tondeurs. S’il peut nous conduire,
c’est parce qu’il a commencé par prendre le chemin du
Golgotha, saisir tout le plus dur de notre condition
humaine pour nous en délivrer. L’Agneau immolé est notre
pasteur !
● A la foule réunie le jour de la Pentecôte, le même Pierre
retrace la destinée fulgurante du Serviteur devenu
"Seigneur et Christ". L’effet ne tarde pas à se manifester :
"que devons-nous faire ?". A travers la voix de son Apôtre,
l’appel du Christ, du bon berger a touché le cœur de ces
hommes dont beaucoup avaient souhaité sa mort. Sans
rien forcer en eux, son appel retentit et se fraye un chemin
jusqu’à leur cœur. Ils reconnaissent sa voix et lui ouvrent la
citadelle.
● Jésus notre bon berger, notre beau pasteur, dit le texte,
entraîne-nous à ta suite ! ■
NOUVELLE
A LA MANIERE DE
par Dominique
de LAFFOREST
Mémoires anciennes
E
“
pour l’édification des générations futures”
lle avait eu si grande frayeur, la pauvre
Antoinette, que l’on craignit qu’elle ne
garderait point l’enfant. Trois jours durant, elle fut vomissant, pâle et sans voix.
Le bon Etienne, son mary, ne lui ménageait pas sa peine, se tenant jour et nuit en la
chambre, autant que lui permettait son ouvrage.
Il avait heureusement dans ce temps là un commis des plus sages qu’il avoit passé des mois à
bien former dans le droit et qui pouvait le remplacer en la plupart des affaires.
Après quatre jours dans les alarmes les plus
vives, Maître Pascal fit appeler la sage femme de
Montpeyroux, laquelle étoit connue comme l’une
des commères les plus avisées à l’entour. Elle
étoit déjà fort avancée en âge mais elle se laissa
convaincre ; au vu de l’insistance de Maître Pascal, elle consentit à monter en la voiture envoyée
de Clermont, qui la conduisit auprès de notre
pauvre nièce.
Antoinette pensait mourir et déjà les suées
couvraient son front, d’une pâleur de cire vierge.
On laissa la commère. Elle fut un très long temps
sans mot dire. On ne sçavait si le fruit des entrailles d’Antoinette étoit encore en vie, ou si le
choc, la terreur ou le mal lui avaient été fatals.
Auquel cas, il eût fallu l’extirper avant qu’il ne
gâtât les organes de la mère. Or, Antoinette, pardessus tout, voulait que l’enfant vive. Et comment
le pourrait-il, si elle se laissait choir dans la
mort ? Elle tint bon, arc-boutée dans son vouloir,
contre les forces qui cherchaient à l’agripper et
saisir dans les crocs de la mort.
Ah, l’admirable message qu’ils nous donnèrent
à voir, ces deux époux luttant ensemble comme
sur le rebord de la fosse où d’autres mères, moins
fortunées qu’Antoinette durent descendre !...
Le printemps vint, et puis l’été. Antoinette
sentait venir le terme. Elle était fière, d’un côté,
d’avoir triomphé de l’épreuve en hyver, mais d’autre côté, elle se sentait toute détachée, toute
pauvre et libre devant la Providence qui l’avoit
aidée à garder le fruit fragile qu’elle portait. Que
serait l’enfant ? Porterait-il quelque marque du
choc subi par sa mère ? Serait-il fait comme il
faut, ou verrait-on au jour un petit être difforme
ou affligé d’une infirmité sans remède ?... Toutes
ces questions, Antoinette les retournait en sa
Ah,
l’admirable
message
qu’ils nous
donnèrent à
voir !
tête, dans ces jours où son terme approchait. Elle
n’était point seule à y songer constamment : sa
bonne mère, Messire Bégon son père, ses sœurs, y
pensaient pareillement, et même la vieille Bathilde avait entendu Dame Bégon soupirer, un
jour de mars, près de la fenêtre en regardant la
neige tomber sur la rue Pré au Duc : "Ah ! Si ce
petit là pouvait ne pas venir au bout, ce serait
mieux pour Antoinette comme pour lui !..."
Maître Etienne aussi portait de semaine en
semaine le poids de ses questions. Si cet enfantserait ce un fils, serait ce une fille ?-allait venir
inachevé ou porteur d’une tare affreuse ?
Il faudrait l’accueillir. Et on l’accueillerait.
Mais quel fardeau cela serait pour la famille !
Selon son habitude, Etienne Pascal s’en remettait
à Celui qui fit le Ciel et la Terre. C’est Lui qui avait béni l’union d’Antoinette Bégon et de luimême, Etienne ; pourquoi douter que ce fût pour
leur bien, et pour le bien du fruit de leur rencontre ?...
Et le jour fut là. La vieille Berthe, pour la dernière fois sans doute, avait encore consenti à se
faire transporter au chevet de la jeune Madame
Pascal. C’était un privilège, dont Maître Etienne
mesurait le prix : la bonne femme, du moins, saurait dire tout de suite si l’enfant serait viable, s’il
était bien formé ou si quelque chose n’était point
selon la nature. Et il fut là.
C’était un garçon. On le prénomma Blaise, du
nom de son parrain et aïeul. Maître Pascal, avec
le soulagement que l’on pense, s’en alla le faire
inscrire sur la page du registre que lui ouvrit
Vénérable et discret Missire Bernard, en l’église
Notre Dame de Clermont, ce jour de l’an de grâce
dix neuvième de juin, mille six cent vingt trois,
régnant en France le Roy Louis XIII, celui qui
offrit le Royaume à la benoîte Vierge Marie. ■
Blaise Pascal aurait pu… ne jamais voir le jour. Il
y a aujourd’hui 250 000 avortements annuels recensés dans ce même pays qui est le nôtre. Parmi ces
250 000 embryons condamnés tous les ans, combien
de Blaise Pascal ?... Comment une nation qui tue "ses
espérances" pourrait-elle prétendre à la paix ? Nous
n’aurions peut-être pas eu Sœur Emmanuelle si
Blaise Pascal n’avait pas existé…
Cf. "Vivre, à quoi ça sert ?" de Sœur Emmanuelle
avec Philippe Asso, Edition Flammarion 2004.
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005 25
EGLISE
OPUS DEI
Encore la
un habile “recylage de la mythologisation diabolisante de l’Opus Dei”. N’est-il pas consolant
de se savoir un cas d’école connu au C.N.R.S. ?
Il est pourtant triste de voir des gens se créer,
souvent avec sincérité, une image fausse et
stéréotypée de l'Opus Dei.
S'il y avait dans l'Opus Dei, comme ils le
croient, une recherche effrénée de pouvoir
social, politique ou économique, et même religieux, je serais le premier à la dénoncer ! Mais
le véritable but de l'Opus Dei est de promouvoir chez le plus grand nombre de personnes
une vie authentiquement chrétienne, avec la
spiritualité et le rayonnement apostolique qui
en découlent. Ce message s'applique à toutes
les situations de la vie : au milieu des joies et
des peines, des espérances et des difficultés,
seul ou en famille, que l'on ait une vie active,
ou que l'on soit en recherche d'emploi ou à la
retraite. Toute situation humaine est digne
d'être sanctifiée, élevée vers Dieu ; et l'Opus
Dei tâche d'aider ceux qui le lui demandent à
vivre l'Évangile au quotidien, avec cohérence.
L'abbé Antoine de Rochebrune
est vicaire de la prélature de
l'Opus Dei en France. Nous
l’avons interrogé à l'occasion de
la parution de plusieurs ouvrages
dénigrant, plus ou moins
violemment, la finalité et l'action
de l'institution qu'il dirige.
■ L'Opus Dei a été malmené par différentes publications. Tout d'abord le “Da Vinci Code”, pour distraire
en satisfaisant différents fantasmes, et maintenant
un livre intitulé, “L’Opus Dei” publié chez Flammarion,
à la suite d’une émission de Canal +, semble-t-il plus
directement méchant. Quelle est votre réaction face à
ces ouvrages ?
Il n'y a pas lieu de réagir de manière disproportionnée. Que l'Opus Dei ne plaise pas à
tout le monde, c'est compréhensible. Et cela ne
me dérange pas car j'ai confiance dans le bon
sens des lecteurs. Je note avec satisfaction que
la publication d'un ouvrage ou d'un article à
charge contre l'Opus Dei se traduit, à chaque
fois, par une croissance des consultations du
site Internet www.opusdei.fr, sans doute parce
que chacun peut y trouver les réponses aux
questions qu’il se pose.
■ Qu'est-ce qui vous gêne le plus dans les accusations
formulées ?
Ce qui me frappe le plus, c'est qu'aujourd'hui encore, certains voient dans l'Opus Dei
une armée en ordre de bataille. Le très médiatique sociologue Pierre-André Taguieff, spécialiste de tous les “prêcheurs de haine” et
notamment des complots antisémites, a été
interrogé par l’hebdomadaire “Le Point” le 24
février dernier, à propos de la recette du succès
de “Da Vinci Code”. Il y a notamment évoqué
26 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
comp
Toute
situation
humaine
est digne
d’être
sanctifiée
■ D'après vous, quelles sont les raisons de ce décalage
entre votre image et la réalité ?
Certains peuvent avoir une vision “cléricale”
de l'Opus Dei, ou imaginer que des personnes
sont manipulées, orientées vers des buts
opaques. Or la formation donnée dans l'Opus
Dei pousse à l'initiative personnelle, en favorisant chez les fidèles la liberté et la responsabilité personnelle nécessaires pour que chacun vive l'Évangile de façon autonome. Lorsqu'un fidèle de l'Opus Dei, qui reste d’ailleurs
un paroissien de sa paroisse, s'implique soit
dans la vie de l'Église, soit dans la vie sociale,
politique ou économique, il ne lui passe jamais
par la tête qu'il le fait au nom de l'Opus Dei.
■ Des personnes ayant quitté votre prélature, ou des
parents de jeunes membres s'inquiètent de possibles
dérives sectaires...
EGLISE
propos recueillis par Paul CHASSARD
lotite
Sans vouloir les minimiser, ces réactions
sont rares mais malheureusement inévitables
dans la vie de toutes les institutions de
l'Église : que ce soit par rapport aux séminaires, aux couvents, aux abbayes, aux communautés nouvelles etc. Il faut toujours y prêter attention et écoute. Il est normal que des
parents s’inquiètent à une époque où les sectes
sont actives. Il faut aussi que les jeunes évitent
les maladresses à l’égard de leur famille, quels
que soient les fossés d’incompréhension...
Mais, vous savez, l'Église a deux mille ans
d'existence, et l'Opus Dei existe depuis plus de
70 ans, avec des statuts connus, étudiés et approuvés par le Saint-Siège. Grâce à Dieu, dans
l'Église, les choses sont bien faites pour assurer
le discernement des vocations et éviter aussi
tout abus d'autorité. Ainsi, le gouvernement de
l'Opus Dei est collégial, et permet un contrôle
sage de l'exercice de l'autorité. De plus, j'y
insiste, personne dans l'Opus Dei ne vit en vase
clos. Notre vie est dans la rue, au bureau, à l'université, dans la famille etc. Les fidèles qui
s'engagent dans l'Opus Dei, qui sont tous
majeurs, savent bien qu'ils viennent chercher
un espace de formation chrétienne. Exercer
quelque contrainte que ce soit pour forcer des
gens à aimer Dieu n'aurait aucun sens ! Au
contraire, je vois chez ceux qui ont recours à
l'Opus Dei pour se ressourcer, des personnes
qui y trouvent un épanouissement personnel, y
compris au milieu des épreuves de la vie. C’est
là le fruit de leur vie de prière, et de leur volonté de placer le Christ au centre de leur existence.
■ Pensez-vous que l'Opus Dei soit unanimement apprécié dans l'Église ? Des prêtres vous critiquent...
Lorsque j’entends l'un de mes frères dans le
sacerdoce émettre publiquement des critiques
sur l’Opus Dei (ou aussi sur un évêque, voire sur
le Pape)... je pense à la prière du Seigneur quelques heures avant de souffrir sa Passion : “Que
tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi,
Antoine de
Rochebrune
Servir...
sans
chercher
les
applaudissements
et moi en toi”. J'ai de la peine et je prie pour lui,
afin qu'il aime davantage l'Église du Christ.
Pour ce qui est du soutien que l'Opus Dei
compte dans l'Église, j'aime rappeler ce qu'a
été la canonisation de saint Josémaria, notre
fondateur, le 6 octobre 2002 à Rome : une des
cérémonies les plus spectaculaires que JeanPaul II a célébrées, en présence de 300 000
pèlerins du monde entier, et d’un nombre extraordinairement élevé d'évêques et de cardinaux. En même temps je ne suis pas étonné
que quelques personnes critiques fassent plus
de bruit qu'une foule immense de sympathisants : notre monde est ainsi fait.
■ Jean-Paul II a eu l'occasion de manifester durant son
pontificat sa bienveillance envers l'Opus Dei. Pensezvous que ce sera le cas de son successeur ?
Tout comme ses prédécesseurs Pie XII, Jean
XXIII et Paul VI, le Saint-Père a manifesté son
affection et son encouragement à la prélature.
Avec tous les fidèles de l'Opus Dei, mon seul
désir est de servir l'Église comme elle veut être
servie : avec droiture, avec simplicité, sans
chercher les applaudissements. Le Saint-Père a
une paternité spirituelle sur tous les catholiques : c'est cela qui compte, et les gens de
l'Opus Dei aimeront le Saint-Père, quel qu'il
soit pour cette simple raison. ■
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
27
LIVRES
DAN BROWN
Anges, démons...
par Marie-Hélène CONGOURDEAU
et stéréotypes
Devant le succès du “Da Vinci
Code”, les éditions JC Lattès
publient un roman précédent de
Dan Brown, “Anges et Démons”,
nouveau thriller ésotéricomystificateur dont l’audience
oblige à dire un mot de réponse
sur le plan historique.
l ne s'agit pas de partir en croisade contre des
romans. Mais l'obstination de Dan Brown à truffer ses intrigues d'attaques insidieuses contre le
christianisme, jointe à la gloutonnerie avec laquelle ces truffes sont avalées, étonne. Laissons
de côté l'obsession antivaticanesque (trésors, secret,
intolérance...) pour ne citer que quelques incongruïtés
historiques :
- p. 200 : (Les Archives du Vatican recèlent) "...certains
livres censurés de la Bible" [...] “Le cantique des cantiques” ? Non : [la chambre forte du bureau du Pape]
"renfermait entre autres les manuscrits originaux des
14 (?!) évangiles qu'on nommait apocryphes"(p. 539).
Le Vatican se donne bien du tracas pour cacher des
livres qui se trouvent dans les bibliothèques de toutes
les Universités !
- p. 266 : "La sainte communion, la pratique qui
consiste à manger Dieu, est un héritage des Aztèques". Exploit des premiers chrétiens qui avaient
découvert l'Amérique 1500 ans avant Colomb !
- p. 267 : "La jeune Eglise chrétienne, pour représenter Dieu, a choisi (...) l'image d'un vieillard barbu,
(c'est-à-dire de) Zeus". Sans entrer dans l'histoire de
l'iconographie paléochrétienne, rappelons que les
premières images du Christ le montrent sous les traits
d'un jeune homme imberbe. L'Orient chrétien s’est
interrogé par la suite sur la légitimité de représenter
Dieu et a conclu que l'on peut représenter le Christ
parce qu'il s'est incarné, mais que représenter le Père
(que "nul n'a jamais vu", Jean 1, 18) est illégitime.
Deux traits nous retiendront davantage parce
qu’ils trahissent une vision du monde. A première vue,
D.B. se démarque de la "droite chrétienne" américaine : plusieurs allusions aux anti-darwinistes ou à
George Bush père en sont des indices. Mais en fait, il
semble bien appartenir à la même famille, pour qui le
monde se divise entre Occident et Islam (comprenez :
Bien et Mal). Lorsqu’il écrit que l'Eglise avait choisi,
I
28 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
S’il y a
bien un
“méchant”
en Occident,
il s’agit de
l’Eglise
catholique
pour stigmatiser ses adversaires, le nom de Shaitan, il
ajoute que ce nom est "de l'arabe, un nom islamique,
parce que c'était une langue considérée comme sale"
(p. 48). Ainsi, "arabe" = "islamique" et pour l’Eglise, l’arabe est "une langue sale". Exeunt, donc, les Arabes
chrétiens, la littérature chrétienne en arabe, les splendeurs de la liturgie arabe. L’Orient chrétien n’existe
tout simplement pas dans ce schéma. Quant à
l’islam, il existe bien, sous les traits de l’Assassin
(clône du moine (!) de l’Opus Dei dans le “Da
Vinci Code”) qui est de type "moyen oriental",
jure en arabe et se réjouit de venger les "milliers
de musulmans massacrés pendant les croisades"
(p. 406). Et s’il y a bien un "méchant" en Occident, il s’agit de l’Eglise catholique, vue à travers
le prisme de la vieille polémique anti-papiste.
Le second trait concerne les relations entre
science et religion. Autre tarte à la crème assez
onctueuse pour assurer un succès mondial.
D. B. est tellement persuadé que science et religion s’opposent forcément que le seul argument à la décharge de l’Eglise est que les gens
ont besoin d’une consolation. Que science et
révélation ne soient pas incompatibles en soi lui
échappe, et le seul personnage qui soit à la fois
scientifique et religieux ne cherche qu'une chose:
prouver la vérité de la Bible en reproduisant la création par une expérience scientifique. Quintessence du
concordisme, qui est la face inversée du scientisme.
Pourtant, dès les premiers siècles, des chrétiens
avaient écarté les sophismes récurrents sur la rivalité
de la science et de la religion, en affirmant que la
Bible et la science, n'ayant pas le même objet, sont
vraies chacune en son domaine et ne peuvent se
concurrencer. Pour Grégoire de Nysse, au IVe s., le
début de la Génèse enseigne des doctrines sur la
nature de l'homme "sous la forme d'un récit d'allure
historique" ; et pour le philosophe Jean Philopon,
deux siècles plus tard, le propos de la Genèse n’est
pas de donner un cours de cosmologie mais d'amener
les hommes à la connaissance de leur créateur .
La photographie de la quatrième page de couverture des deux romans montre un homme sympathique ; de plus, il sait écrire. On lui souhaite donc de
suivre une formation sur l'histoire du christianisme,
de façon à ce que ses critiques, s'il en a comme c'est
son droit, cessent de pourfendre des chimères. ■
Dan Brown, “Anges et Démons”, éd.
J.-C. Lattès, 600 pages, 22 €.
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CINEMA
Winnie l’ourson
et l’éfélant
MON PETIT DOIGT M’A DIT
Ce fut un cri terrifiant qui réveilla Winnie l’ourson et
ses amis, qui dormaient paisiblement dans la Forêt
des Rêves Bleus. C’était un éfélant, cela ne faisait
de doute pour personne, et, aussitôt, la petite
troupe décida de partir à sa recherche pour le
capturer. Mais ils laissèrent derrière eux le
malheureux Petit Garou, qu’ils estimaient trop petit
pour les suivre. Sans se démonter, celui-ci décida
de partir de son côté. C’est ainsi que Petit Garou
rencontra Lumpy, un bébé éfélant et devint son ami.
Depuis sa création par A. A. Milne, en 1926, le
succès de son conte «Winnie the Pooth» ne se
dément pas auprès des tout-petits. Car ces
aventures sont aussi charmantes que pédagogiques
et accessibles aux jeunes enfants. Ce nouvel
épisode est marqué par l’apparition d’un nouveau
personnage, Lumpy, qui permet aux auteurs de
dispenser une jolie leçon de vie sur l’amitié et
l’accueil de l’autre. Délicieux !
M.-L. R.
Film d’animation américain (2005) de Frank
Nissen, avec les voix de
Brenda Blethyn (la maman
éfélant), Jim Cummings
(Winnie l'ourson), Ken
Sansom (Coco lapin),
John Fiedler (Porcinet),
David Ogden Stiers (le
narrateur) (1h06). Sortie
le 13 avril 2005.
Akoibon
Nader et Daniel se retrouvent sur une petite île
méditerranéenne. Le premier est à la recherche de
Chris Barnes, le second d’une belle et mystérieuse
jeune femme rencontrée via Internet.
Il faut apprécier l’humour décalé et très second,
voire troisième degré, d’Edouard Baer pour goûter
cette comédie loufoque à la française. Quelques
comédiens inspirés, dont Jean Rochefort et Benoît
Poelvoorde, s’en donnent à cœur joie dans des
numéros dont ils ont le secret. Mais l’histoire (s’il y
en a une !) part dans toutes les directions et il y a
des maladresses.
M.-L. R.
Comédie française (2004) de
Edouard Baer, avec Jean
Rochefort (Chris Barnes),
Nader Boussandel (Nader),
Marie Denarnaud (Betsy),
Edouard Baer (Daniel Stain),
Chiara Mastroianni, Benoît
Poelvoorde, Léa Drucker
(1h38). Sortie le 13 avril 2005.
Une comédie Décalée
par Marie-Christine D’ANDRÉ
Pascal Thomas s’offre une
récréation avec cette comédie
policière réjouissante et
champêtre, interprétée par
deux merveilleux comédiens.
ertains auteurs sont des mines d’or
pour les adaptations cinématographiques. Agatha Christie fait partie
des écrivains qui ont le plus inspiré les
cinéastes, tant ses intrigues et ses personnages sont cinématographiques. Après
plusieurs jolis succès («La dilettante»,
«Mercredi folle journée») dans la comédie
de mœurs, le cinéaste s’est essayé, avec
bonheur, à la comédie policière.
L’approche de l’heure de la retraite
semble inquiéter Prudence Beresford,
qui a passé des années, avec son mari
Bélisaire, à travailler pour les services
secrets. Ne vont-ils pas s’ennuyer, s’ils
n’ont plus rien à faire ? Mais Prudence,
qui n’est pas du genre à rester inoc-
C
cupée, a soudain eu une intuition (sans
doute son petit doigt !) et elle s’est mise
en chasse sans rien dire à son cher et
tendre, lequel est inquiet pour elle. Il a
tort !
Qui mieux que Catherine Frot et
André Dussollier pouvaient donner corps
à ces délicieux personnages d’Agatha
Christie ? Avec leur fantaisie débridée et
leur poésie naturelle, ils sont les interprètes idéaux de ce couple de détectives
professionnels, toujours prêts à se lancer
dans les entreprises les plus folles.
(
Derrière la comédie
policière, il y a un bel
et discret hommage
à l’amour conjugal
Devant les paysages splendides du lac
du Bourget, Pascal Thomas filme leurs
aventures avec un beau sens du cocasse,
du pittoresque et de la plaisanterie
décalée. Et son couple de héros donne
un bel exemple d’amour conjugal fondé
sur la complicité amoureuse. Mais le
film, visible par un large public, manque
un peu trop de rythme et de nerf. ■
Mon petit doigt m’a dit. Comédie policière française
(2004) de Pascal Thomas, d'après Agatha Christie, avec
Catherine Frot (Prudence Beresford), André Dussollier
(Bélisaire Beresford), Geneviève Bujold (Rose Evangelista),
Laurent Terzieff (Maître Anet), Valérie Kaprisky (Mlle Blayes),
Bernard Verley (le général), Sarah Biasini, Alexandra Stewart,
François Seigner (1h45). Sortie le 13 avril 2005.
Brice de Nice
Avec ses cheveux longs et son tee-shirt jaune, Brice, un gosse de
riche assez frimeur, ne passe pas inaperçu. D’autant plus qu’il est
toujours en attente de la vague du siècle, celle qui lui permettra de
faire des étincelles sur sa superbe planche de surf. Mais, à Nice, il
peut toujours attendre. Et malheur à celui qui osera lui faire une
réflexion, car Brice est un vanneur qui n’a pas son pareil pour démolir
les autres en mots assassins.
James Huth, avec ce film construit autour du personnage créé par le comédien Jean Dujardin à ses débuts,
administre la preuve qu’il n’est pas facile de transformer en long métrage un sketch de café-théâtre. Car,
malgré deux ou trois gags amusants, on s’ennuie vite avec cette œuvrette mineure, voire niaise.
Marie-Lorraine ROUSSEL
Comédie française (2004) de James Huth, avec Jean Dujardin (Brice), Bruno Salomone (Igor d’Hossegor), Clovis Cornillac (Marius), Elodie Bouchez (Jeanne),
Alexandra Lamy (la sirène), François Chattot (le père de Brice) (1h38). Sortie le 6 avril 2005.
30 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
THÉÂTRE
"OPÉRA EN DÉLIRES"
Délire
pour rire
par Pierre FRANÇOIS
Aussi loin de la caricature facile
que de l’exercice d’érudition
professorale, "Opéra en délires" (1)
fleure bon la récréation de
talents confirmés capables
de désacraliser leur propre
art. A ne pas rater.
péra en délires" est une pièce proprement… délirante. Pour autant, il ne s’agit pas d’une caricature ou d’un mauvais pastiche. Non, "Opéra en délires"
est d’ailleurs monté par une équipe de
professionnels de l’Opéra. Le maître d’œuvre de l’équipe, qui s’est chargé des arrangements pour piano
et du montage, n’est rien de moins que directeur de
la musique de scène à celui de Paris. La soprano
vient de la troupe des solistes du théâtre de Nancy
et de l’Opéra du Rhin. Le baryton Verdi, qui fait la
démonstration de son talent en incarnant Carmen
l’espace de cinq minutes, a démarré sa carrière chez
les Petits chanteurs à la croix de bois et a aussi fréquemment travaillé avec le théâtre de Nancy. Quant
à la pianiste, elle est professeur au Conservatoire
national supérieur de musique depuis 1978, enregistre et court les festivals.
De fait, les transitions entre les trente airs
"fragments, réminiscences ou bribes" sont faites
avec beaucoup de finesse de sorte qu’une oreille
non avertie ne sait pas à quel moment précis a
lieu la solution de continuité. On sent la rigueur
des chanteurs qui ont classé les airs par nation,
avec un premier tableau consacré aux auteurs
français, un second à l’opéra italien, un troisième
à Wagner et un final viennois. Pas de démarche
didactique pour autant, ni de style catalogue, mais
un respect apparent des mélodies, avec des dérapages si bien contrôlés que seules les mélomanes
les perçoivent, et leur joie est bien visible.
Pour la mise en scène, les choses sont beaucoup plus évidentes et tout un chacun peut apprécier le capitaine Haddock surgissant lors de l’air de
Marguerite.
Il y a aussi les facéties liées au prétexte de la
pièce. En effet, la pianiste nous explique, un peu
laborieusement il est vrai en début de représenta-
D.R.
"O
Les chanteurs
ont classé
les airs par
nation
tion, que le couple de chanteurs a vécu le
grand amour mais que maintenant il se
déchire, y compris sur scène. Le passage le
plus réussi, de ce point de vue, est celui de
l’assassinat de la soprano par son partenaire
sur l’air de La Danza, réarrangé pour deux
voix.
De plus la soprano en pince - nous
explique-t-elle toujours - pour le pianiste
titulaire qu’elle remplace au pied levé, tandis que lui recherche les faveurs des jeunes
filles du chœur… Et de jouer de plus en plus
fort pour couvrir la scène de ménage qu’ils
se font juste avant leur entrée en scène.
Mais il y a encore cet humour par l’absurde
lorsque la pianiste nous décrit la scène -noire, occupée par un paravent seulement- comme si elle correspondait précisément aux indications du livret du
Trouvère avec un sentier muletier au fond, le jour
qui commence à poindre et un feu de camp. Ou
quand au milieu d’un air les chanteurs se mettent à
se frapper la paume des mains en croisant les bras,
comme les enfants, pour marquer le rythme. Le
public ne cesse d’avoir le sourire à la bouche en
attendant la prochaine incongruité burlesque.
La partie la plus insolente concerne sans conteste Wagner représenté fou… de son infirmière.
Bref, on a là de la vraie musique dans un vrai
contexte d’opéra, le tout détourné juste ce qu’il faut
pour initier les ignorants et réjouir les experts. ■
(1) "Opéra en délires", convocation de Leoncavallo,
Massenet, Gounod, De Curtis, Verdi, Rossini, Bizet, Wagner
et Franz Lehar par Marie Duisit, soprano, Christian Bihel,
baryton, Monique Bouvet, piano... Le dimanche à 15h et
mardi à 20h30, au théâtre des Cinq diamants, 10 rue des
Cinq diamants, 75013 Paris. Tél. : 01 45 80 51 31.
Maupassant
© LYDIE LECARPENTIER
En général, la péniche Adélaïde, petite sœur de la péniche
Opéra, a une programmation lyrique, voire parfois cabaretière
ou de variété. On y trouve en ce moment une autre musique,
celle des mots. Ceux de Maupassant dans "Une partie de campagne", "Idylle", "Miss Hariett" et "Le retour", avec cette sensualité à
double détente consistant à raconter avec une élégante ambiguïté les actes les plus sensuels. Reste la personnalité de l’aristocrate
qui méprise le "bas peuple" que, précisément, il décrit…
Et un talent de conteur. Celui de Daniel Soulier, qui évoque ou incarne, mais toujours
avec une distance suffisante pour laisser l’imagination du spectateur s’enflammer. ■
(1) "Maupassant", adaptations de "Une partie de campagne", "Idylle", "Miss Hariett" et "Le retour" par Daniel
Soulier. A la péniche Adélaïde, bassin de la Villette, face au 40 quai de la Loire, 75019 Paris. Les vendredis à
20h30 et samedis à 16h et 20h30 jusqu’au 23 avril. Places à 15,5 €, 11 et 9 €. Réservation recommandée.
FRANCECatholique N°2972 15
AVRIL
2005
31
EXPOSITIONS
MUSÉE DU LUXEMBOURG
par Ariane GRENON
de M
L’écrivain André Rouveyre et le
peintre Henri Matisse, anciens
camarades de Beaux Arts, se
sont écrit presque chaque jour,
à partir de 1941 et jusqu’à la
mort de Matisse en 1954.
Cette correspondance sert de
fil conducteur à l’exposition
"Matisse une seconde vie" du
Musée du Luxembourg à Paris.
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
Icare (1947)
de la série Jazz,
(planche VIII),
Pochoir
Tulipes et huîtres
sur fond noir
(février 1943)
Huile sur toile
32 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
La Gerbe (1953) - Gouache découpée marouflée sur toile.
La peinture
de Matisse,
si belle,
si libre
enveloppes semées de volutes, étoiles ou fleurs.
Tout commence avec la grande série de dessins
que Matisse réalise autour du thème de l’Arbre, sa
forte ossature et l’étalement de ses feuillages, distincts selon les espèces. Suivis par les "Amours de
Ronsard", 128 lithos couleur de sanguine où le
peintre jette le graphisme sinueux de la femme,
son corps allongé, son visage, la chevelure… Puis
sa peinture enfin, si belle, si libre, dans l’équilibre
de masses colorées, radicalement simplifiées.
On voit des "Natures Mortes" où les objets
sont énumérés, chacun à distance, coquillages,
pommes, cafetière et un vase, aux magnolias,
tulipes, tournesols... Ensuite des "Intérieurs" bai-
Intérieur jaune et bleu (printemps 1946)
Huile sur toile
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
U
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
ne seconde vie… L’expression est de
Matisse lui même pour qualifier le temps
qui suit une grave opération qu’il a subie
en 1941. Il poursuit alors son œuvre vers
un extraordinaire épanouissement. Cette
correspondance où il livre ses réflexions et aspirations, relate ce processus d’un renouvellement où
l’artiste redéfinit ses moyens d’expression.
L’exposition offre l’éclaboussement de ses
nouvelles formes, simples et de couleurs fraîches,
ponctué par les lettres ou des passages de lettres.
Avec cette correspondance assidue sont présentés, dans le climat vivant de réflexions alternées,
les toiles, dessins, livres illustrés, études ou
maquettes pour les tapisseries ou les vitraux et
décors de la chapelle de Vence.
C’est une folle et claire floraison qui s’éparpille le long des salles blanches où s’égrènent
poèmes calligraphiés d’une souple plume noire et
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
Le nouvel âge
EXPOSITIONS
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
L'enterrement de Pierrot
(1947) de la série Jazz,
(planche X), Pochoir
gnés de la lumière dans l’ombre, les barres de
soleil perçant au travers des persiennes et "l’air
bleu circulant dans la pièce" dit le peintre…
L’artiste traite son sujet avec une sorte d’abstraction dans l’expression de la lumière, si belle,
celle des huîtres, des tulipes blanches dans l’obscurité d’une pièce fermée : un grand noir,
quadrillé de lignes claires qu’il a grattées dans le
support afin de restituer l’éclairage et la pénombre ("Tulipes et huîtres sur fond noir", 1943).
Avec cette toile, qu’il donnera à Picasso, Matisse
s’aperçoit : "Je me suis rapproché de la matière
des choses... je suis arrivé à retrouver des qualités
naturelles mais que j’avais dû brider depuis longtemps, des saveurs de la peinture savoureuse."
Avec les "Poèmes de Charles d’Orléans", le
"Pasiphaë" de Montherlant, Apollinaire… les illustrations entremêlent l’arabesque des lignes, avant
que Matisse n’écrive (en 1947) : "Je suis engagé
dans la couleur définitivement." Les couleurs s’organisent entre elles par aplats, indépendamment
des objets représentés : "Intérieur jaune" (1946)
par exemple où deux rectangles bleus (la fenêtre
et le nappe) s’opposent au grand fond ocré. Le
dessin -guéridon, feuillage- se fait en transparence sur le fond ("Nature Morte en rouge de
Venise", 1946). On retrouve sur ces deux toiles, les
mêmes objets, vase de faïence, napperon brodé,
verre calice et trépieds portant un bouquet…
Et puis la dernière séquence de ces "Intérieurs
de Vence" avec la "Fougère noire", noire car elle
est dans l’ombre, avec son reflet, le tableau au
mur ; et "L’Ananas" quasiment abstrait, sur son
modeste guéridon, posé près de la serviette en désordre. Ecoutons le peintre, qui nous les fait
mieux voir : "Sur ces éléments de représentation
simplifiée, mettre une couleur venue du ton local
sublimé. Ou même inventée entièrement d’après
mon sentiment, chauffé par la présence de la
nature même". (1) C’est alors que Matisse va choisir de s’atteler à la grande décoration, la tapisserie, la peinture murale, le vitrail… Il compose deux
cartons sur le thème de la Polynésie, la mer et le
ciel, pour la manufacture des Gobelins. Le souvenir de son voyage à Tahiti, quinze ans auparavant,
lui revient "sous forme d’images obsédantes" ditil, "madrépores, coraux, poissons, oiseaux, méduses, éponges"… C’est à l’époque qu’il entreprend
d’exprimer la ligne dans sa force et sa sensibilité,
au moyen de ciseaux… un procédé qu’il a imaginé
depuis bien longtemps. Sa découpe est magnifiquement graphique dans du papier blanc au
départ, et dès lors coloré. Il privilégie la feuille en
© SUCCESSION H. MATISSE / 2005
Matisse
Saint-Dominique.
Ultime dessin
préparatoire
pour décoration
murale de la
Chapelle de Vence
(1949)
Pinceau et encre de
Chine sur papier
velin marouflé sur
toile avec corrections
de gouache blanche.
La "Gerbe",
composée
comme un
bouquet,
où les vides
comptent
autant que
les feuilles
forme d’algue qui devient son module formel à
l’échelle monumentale. Voici l’élément de fortes
constructions, dans les jeux innombrables de la
forme, positif-négatif, composition en aplats,
bipartites… Les teintes sont remarquables par leur
finesse, la justesse de leurs rapports et la puissance des combinaisons forme-couleur.
"Jazz" est un livre que l’éditeur, Tériade, voulait consacrer à la "couleur de Matisse". On voit
ici les planches originales du peintre, conservées
au Danemark ; l’impact expressif tient à la somptuosité chromatique et à la force du trait : "Icare"
tombant la tête haute, à la verticale, au milieu
des soleils ; la boule humaine qu’il trace dans
"Toboggan" et le monde surprenant des activités
de notre espèce, tels ces "Lanceurs de couteaux",
un "Avaleur de sabre" ou le "Cow boy". Une
incroyable jeunesse s’échappe de ces papiers
épinglés, dont la matière vibre dans la lumière, la
densité tactile des gouaches, la pureté du coup
de ciseau. La géante "Zelma" un modèle de plus
de 2 m de haut !, prouve avec ampleur que le
papier gouaché découpé est un moyen pictural à
part entière. Ainsi la "Gerbe", composée comme
un bouquet où les vides comptent autant que les
feuilles, ou l’immense "La Perruche et la Sirène",
composition à motifs de 3 m. sur 8 m… on reçoit
la conclusion plastique imposante de l’œuvre de
toute une vie. ■
(1) la ponctuation est ajoutée par la rédaction.
"Matisse, une seconde vie", jusqu’au 17 juillet 2005.
Catalogue. Musée du Luxembourg, 19 avenue de Vaugirard, 75006 Paris. Réservations, tél : 01.42.34.25. 95.
Site : www.museeduluxembourg.fr. L’exposition se tiendra au Louisiana Museum of Modern Art, Humlebaek,
Danemark, du 12 août au 4 décembre 2005.
Dans l'univers de... Matisse
Afin de compléter votre visite au musée du Luxembourg
éventuellement avec vos enfants ou petits-enfants, voici
un livre-cadeau bien documenté, pédagogique, ludique et
interactif sur Matisse. Il résume sa biographie, son itinéraire artistique, présente quelques-unes de ses œuvres,
offre un lexique des noms et mots employés, et propose
des ateliers afin de s'exercer à reproduire des tableaux de Matisse, ou à réaliser
des créations personnelles. Un test de connaissance sur l'artiste termine cet
ouvrage, qui permet d'évaluer son savoir.
Destiné donc aux jeunes lecteurs à partir de 9 ans. D'autres références, sur le
même principe, sont également disponibles "Dans l'univers de... «Miró»,
«Monet», «Pharaons», «Seurat»", qui offrent la possibilité d'aborder, d’une
manière concrète, des domaines très variés de l'histoire de l'art. ■
"Dans l'univers de... Matisse", Sophie Comte-Surcin et Caroline Justin. Belem éditions, collection "Carré d'art", 48 pages, 25 œuvres reproduites en couleur et photographies. 16 €.
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
33
HISTOIRE
RAINIER DE MONACO
Un
règne de
■ On présente souvent Rainier III comme le "prince
bâtisseur" ?
Le Prince Rainier III de Monaco
est décédé le 6 avril, à 81 ans,
après 55 ans de règne.
Ses obsèques religieuses ont
eu lieu le 15 avril, avec un grand
concours de chefs d’Etat.
Nous avons demandé à notre
ami, l’historien Philippe Delorme,
de remettre cet événement
en perspective.
■ Pourquoi un historien s'intéresse-t-il à un personnage
comme Rainier de Monaco ?
Tout d'abord parce qu'il est l'héritier d'une
longue dynastie, l'une des plus anciennes de
l'Europe. C'est en effet en 1297 que, selon la
légende, le premier Grimaldi, "Francesco Malizia" s'est emparé du Rocher, déguisé en
moine. Depuis lors, contre vents et marées, les
Grimaldi ont su conserver leur pouvoir sur ce
coin de terre de moins de 200 hectares, alors
que de grands empires étaient emportés par les
tempêtes de l'Histoire... Le fils de Rainier,
Albert II, 47 ans, semble d’ailleurs remarquablement bien préparé à assumer son rôle.
■ Comment expliquez-vous cette réussite ?
Existe-t-il un génie des Grimaldi ? Peutêtre. C'est ce que j'appelle dans mon livre
"l'empirisme grimaldien" : un sens géo-politique aigu, une adaptation permanente aux
conditions concrètes du temps. A chaque
époque, les princes de Monaco ont su se placer
dans le sillage de la puissance dominante :
l'Espagne de Charles-Quint, la France de
Louis XIV, les Etats-Unis au XXe siècle. Et aussi
une certaine modestie : les Grimaldi se sont
toujours contentés de "cultiver leur jardin",
sans rêve de grandeur ou de conquête.
34 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
Philippe
Delorme
Sous son règne Monte-Carlo a pris des allures de Hong Kong sur Méditerranée.
Mais cette "bétonisation", dommageable pour le cadre de vie, est la rançon d'une extraordinaire réussite économique. D’une manière toute pacifique ce
monarque a augmenté son territoire
d’un cinquième, simplement en remblayant la mer. C'est ainsi qu'est né le
quartier de Fontvieille, au pied du
Rocher. D'autres projets plus ambitieux
encore sont dans les cartons, comme
l'installation d'une vaste île flottante au
large de la principauté.
■ En quoi consiste cette réussite monégasque...
Ce
micro-Etat
attire
toutes les
convoitises
Peu de pays au monde égalent le niveau de
vie de la principauté. Et tous ses voisins comme la France - lui envient son bugdet qui
dispose de plusieurs années de réserve. Pas
question de déficit à Monaco ! C'est sans
doute pourquoi ce micro-Etat attire toutes les
convoitises.
Au cours de son long règne, Rainier III a eu
à affronter à plusieurs reprises les assauts de
Paris. On se souvient du conflit de 1962 avec le
général de Gaulle. Celui-ci avait menacé de
boucler la frontière, et Rainier avait répondu
qu'il dessalerait l'eau de mer et ferait venir
l'approvisionnement par voie maritime s'il le
fallait ! En réalité, le conflit s'est achevé l'année suivante par un compromis. Depuis lors, les
Français résidents en principauté sont tenus
d'acquitter l'impôt sur les revenus.
Plus récemment, en 2000, le rapport
Peillon-Montebourg, diligenté par le Premier
ministre Lionel Jospin, poursuivait un objectif
similaire : en accusant Monaco de malversations financières et de protéger différentes
mafias, la France a obtenu que ses ressortissants soient assujettis à l'ISF...
HISTOIRE
propos recueillis par Louis LUCE
55 ans
■ Cependant, Rainier III n'a eu de cesse de s'affranchir
de la tutelle de son "protecteur".
Effectivement. En 1949, lorsque Rainier III
succède à son grand-père Louis II, Monaco
n'est guère plus qu'une dépendance de la
France, presque une colonie. Cinquante-cinq
ans plus tard, la principauté a recouvré une
grande partie de sa souveraineté. En 1993, elle
a adhéré à l'ONU. En octobre dernier, elle est
devenue membre à part entière du Conseil de
l'Europe. Désormais, le ministre d'Etat - le Premier ministre - de Monaco sera désigné par le
prince parmi ses 7000 concitoyens, alors que
jusqu'à aujourd'hui, il s'agissait toujours d'un
haut fonctionnaire français, proposé par Paris.
De même, la magistrature monégasque va également être "nationalisée". Enfin, en renforçant
sa collaboration avec les autres petits Etats européens - comme Saint-Marin, Andorre ou le
Liechtenstein -, Rainier a renforcé sa crédibilité. "Le piccolo dans le concert des nations, disait-il en plaisantant. Mais sans fausse note !"
Le prince soulignait également que de telles
structures, en raison de leurs dimensions réduites, pouvaient constituer des laboratoires
d'idées et d'expériences, moins bureaucratiques
que les grands Etats, où les gouvernés sont plus
proches des gouvernants. Et il avait raison.
■ Votre livre est sous-titré : "Un prince de légende" (1).
Pourquoi ?
Parce qu'en épousant Grace Kelly, en 1956,
Rainier a inscrit son nom dans la légende du XXe
siècle. Ce mariage a été un des premiers grands
événements médiatiques de l'Histoire, retransmis dans le monde entier. Il présentait tous les
éléments du conte de fées : le jeune prince
triste et timide, dans son château poussiéreux,
la belle "bergère", blonde et diaphane, le soleil,
la mer... Au cours des années, de nouveaux chapitres se sont ajoutés à la saga : la naissance de
trois enfants, la disparition tragique de Grace en
1982, les unions malheureuses de Caroline
La religion
catholique,
apostolique
et romaine
est religion
d’Etat
(dont le dernier époux, Ernst-August de Hanovre
est de plus tombé gravement malade au
moment-même de la mort de Rainier...), les
"frasques" de Stéphanie", l'éternel célibat d'Albert... Un vrai "soap opera" pour les Français qui,
très républicains, ont trouvé avec les Grimaldi,
jusqu’à un certain point, une famille royale de
substitution.
■ Le catholicisme reste une composante majeure de
Monaco...
Il y aurait beaucoup à dire sur ce sujet.
Reste que selon l'article 9 de la constitution de
1962, la religion catholique, apostolique et romaine est religion d'Etat. Monaco constitue le
plus petit archevêché de la planète. "Ce Rocher
si solide aux yeux du monde, sur quoi reposet-il ? s'interrogeait le cardinal Tauran en 1997.
Sur des valeurs d'humanité et de dévouement
aux causes les plus nobles qui sont à l'honneur
des princes d'hier et d'aujourd'hui." Cette tradition de solidarité internationale n'est pas un
vain mot, et nombre d'institutions - écoles, hôpitaux, etc. - dans le tiers monde, bénéficient
des largesses monégasques. La devise des Grimaldi - Deo Juvante, Avec l'aide de Dieu n'est-elle pas pétrie d'esprit évangélique ? ■
(1) Rainier, un prince de légende, Philippe Delorme,
éditions Michel Lafon, 220 pages, 18 €.
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
35
TELEVISION
La jeune fille à la perle
Grands adolescents
Mardi 19, sur Canal + à 20h55
Delft, XVIIe siècle en Hollande, Griet une jeune
fille au pair s’occupe du ménage et des enfants
de la famille Vermeer. Le maître, Johannes Vermeer, est peintre, connu pour ses choix de couleur et ses mises en scène. Il fait vivre sa famille
grâce à son art, c’est-à-dire aux commandes
d’un généreux mécène. Devant le désordre
bruyant de sa maisonnée, il se retire dans son
atelier où l’ambiance est plus humaine et plus
paisible. C’est dans ce cocon de chaleur qu’il
sera séduit par la sensibilité et la douceur de
DR
Griet, que l’art de son maître semble fasciner.
ឭឭឭ Ce célèbre tableau de Vermeer, «La jeune fille à la perle», a inspiré Tracy Chevalier,
qui raconte l’histoire imaginaire d’une rencontre entre le peintre Vermeer et un jeune modèle.
Peter Webber a réussi à traduire en des images superbes la réalité d’une époque et d’un pays.
La reconstitution de la vie quotidienne à Delft, que ce soit en extérieur ou dans l’intérieur des
maisons, est d’une grande précision, et le travail sur la lumière restitue parfois l’atmosphère
des tableaux du peintre. Quant à la jeune Scarlett Johansson, déjà remarquée dans «Lost in
translation», elle est non seulement excellente comédienne, mais surtout le sosie parfait du
modèle du peintre.
ឭឭឰ Cet hommage à la peinture est aussi une magnifique leçon d’amour et de respect. La
relation qui s’instaure entre le peintre et sa jeune bonne est faite de délicatesse, de complicité et
de désir (exprimé uniquement par des regards et des gestes furtifs). Une brève scène suggestive.
Lundi 18 avril
Alice Nevers : Le juge est
une femme «La dernière étoile»
GA. Téléfilm avec Marine Delterme, Arnaud Binard. ឭឭឰ
Un épisode assez distrayant,
mais fort peu crédible.
TF1, à 20h55.
Ça se discute jour après jour
«Divorce, séparation : Comment
éviter que l’amour fasse place à
la haine ?». Magazine.
France 2, à 20h55.
Les survivants J. Documentaire de Patrick Rotman. Commentaire dit par Florence Pernel.
(Voir notre analyse)
France 3, à 20h55.
La classe de neige GA. Drame (1998) de Claude Miller,
avec Clément Van Den Bergh,
avec Lokman Nalcakan, François
Roy (1h34) (- 12 ans). ឭឭឰ
Un sujet original, traité avec
une grande maîtrise. Mais l’ambiance est lourde et pénible.
Arte, à 20h45.
Les survivants
Lundi 18, sur France 3 à 20h55
Peut-on raconter l'indiscible ? Les quelques survivants des
camps nazis, qu'ils soient juifs, résistants ou les deux, se
confient devant la caméra de Patrick Rotman. Entre le printemps 1944 et le printemps 1945, alors que l'Allemagne
nazie s'effondre, ils ont vécu les derniers mois de l'horreur,
puis la libération et, enfin, longtemps après, la liberté.
ឭឭឭ Ils avaient à peine 20 ans lorsqu'ils sont arrivés à
Auschwitz. Aujourd'hui, ils osent, face à une caméra, raconDR
ter ce que, souvent, ils n'ont pas pu raconter, lors de leur
retour en France. Loin de tout embellissement, ils racontent les dures lois de la survie dans un
environnement terrifiant. Les interviews de Jacques, Violette, Maurice et des autres sont illustrées d'images d'archives souvent inédites, parfois en couleurs, mais toutes plus terribles les
unes que les autres. La musique de Richard Bois, sobre et poignante, souligne ces scènes
affreuses. Une remarquable contribution à la face sombre de l'histoire de l'homme.
LUNDI 18 AVRIL
20.50 Paroles d'une génération,
présenté par Richard Boutry
Du haut de leurs 25 ans, ces jeunes
auteurs s’interrogent sur l’héritage reçu par leur génération.
MARDI 19 AVRIL
20.50 Le Secours Populaire, présenté par Valérie Tibet
Se divertir, changer d’air n’est pas un luxe, mais une expérience salutaire pour des familles qui vivent sous la pression constante de conditions difficiles.
MERCREDI 20 AVRIL
20.50 Aux côtés des sans-abri, présenté par Richard Boutry
Ils avaient parfois des parcours professionnels très riches,
des vies de famille remplies, mais un jour, tout a basculé.
JEUDI 21 AVRIL
20.50 Sans Famille (2/4), de Jacques Ertaud
Un enfant surgit dans l'ombre. Après la mort de Vitalis,
Remi est recueilli par un jardinier et sa famille : les
Acquin. Il se lie d'amitié avec la plus jeune des filles, Lise.
Mais Acquin est emprisonné pour dettes, et les enfants
sont éparpillés. Avec F. Josso, J. P. Bagot...
36 FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
VENDREDI 22 AVRIL
21.10 Les Cités de Dieu. Moscou (4/4), d’Olivier Mille
Comment le christianisme orthodoxe, qui compte aujourd’hui
250 millions de fidèles de par le monde, a-t-il survécu à l’anéantissement auquel le destinait le marxisme en URSS ?
SAMEDI 23 AVRIL
20.50 Bach et Kuhnau : Magnificat
Festival Bach de Leipzig 2003. En l’église Saint-Thomas de
Leipzig où les deux compositeurs furent successivement
Cantors, Ton Koopman interprète leurs Magnificat.
DIMANCHE 24 AVRIL
15.00 Célébration liturgique en mémoire des martyrs
arméniens victimes du génocide de 1915, en direct de
la cathédrale Notre-Dame de Paris
18.00 KTO Magazine. L'accueil d'un enfant
20.50 Un Autre Monde ?, de Laurent Boileau
Portant un double regard sur la vie monastique, avec ses
temps forts collectifs et les points de vue individuels de
quelques clarisses, ce documentaire dresse un portrait original de femmes qui ont choisi une vie de simplicité, de retrait
et de prière à l’antipode de notre société de consommation.
DR
Adolescents
Les aventuriers de l’arche
perdue J. Aventures (1981) de
S. Spielberg, avec Harrison Ford,
Karen Allen, Paul Freeman
(1h55). ឭឭឭ Un spectacle
très divertissant.
M6, à 20h50.
Phone game J. Suspense (2003)
de Joel Schumacher, avec Colin
Farrell, Kiefer Sutherland, Forest
Whitaker (1h18). ឭឭឰ Original et prenant, mais inégal.
Canal +, à 20h55.
Grand format «S21, la machine de mort khmère rouge» GA.
ឭឭឰ Un documentaire intéressant, mais qui manque d’analyse de fond et de vision d’ensemble.
Arte, à 22h15.
Mardi 19 avril
Le grand concours «Enfants
contre célébrités». Divertissement.
TF1, à 20h55.
Chouchou A/Ø. Comédie
(2003) de Merzak Allouache,
avec Gad Elmaleh. ឭឰ Une
TELEVISION
grosse farce banalisant l’homosexualité et des scènes gênantes
touchant l’Eglise.
France 2, à 20h55.
«Les kamikazes de Hitler». Documentaire.
Arte, à 20h45.
nexplicable... à la grande illusion». Divertissement.
TF1, à 20h55.
PJ «Ambitions» GA. Téléfilm
avec Charles Schneider (0h57).
ឭឭឰ Une histoire poignante,
mais inégale.
France 2, à 20h55.
Thalassa «Couleurs de mer
(2/4) : Mer Jaune». Magazine.
France 3, à 20h55.
Sa mère, la pute Ø. Téléfilm
de et avec Brigitte Roüan (1h38).
ឭឰឰ Une histoire atroce, peu
palpitante, souvent invraisemblable et très complaisante.
Arte, à 20h40.
Stargate SG-1. Série.
La musicale. Divertissement.
Canal +, à 20h55.
Canal +, à 20h55.
Dimanche 24 avril
ment.
M6, à 20h50.
Le convoyeur A. Policier (2004)
de Nicolas Boukhrief, avec Albert Dupontel, Jean Dujardin,
François Berléand (1h29).
ឭឭឰ Efficace et bien mené,
mais très violent.
Canal +, à 20h55.
Ça se discute «Comment vivre
avec une maladie de peau ?».
France 2, à 22h40.
Culture et dépendances «Les
incorrects». Magazine de FranzOlivier Giesbert, avec Jean-François Kahn, Jean Ziegler, Guillaume Chérel, Guy Carlier, François
Chérèque, Airy Routier.
France 3, à 23h30.
de Rob Cohen, avec Sylvester
Stallone, Amy Brenneman, Viggo Mortensen, Dan Hedaya
(1h50). ឭឭឰ Spectaculaire,
mais plutôt conventionnel.
TF1, à 20h55.
DR
Bachelor, le gentleman célibataire «La finale» Divertisse-
Daylight GA. Aventures (1996)
Showtime J. Comédie (2002)
de Tom Dey, avec Robert De Niro, Eddie Murphy, Renée Russo
(1h35). ឭឭឰ Assez amusant,
mais sans plus.
France 2, à 20h55.
On ne peut pas plaire à tout
le monde. Magazine.
Samedi 23 avril
Celebrity dancing. Divertisse- France 3, à 20h55.
ment.
Soirée thématique «PauseTF1, à 20h55.
Jeudi 21 avril
café»
Sylvie Vartan, au rythme du
Julie Lescaut «Mission spécia- cœur. Divertissement.
France 2, à 20h55.
le» GA. Téléfilm avec Véronique
Genest. ឭឭឰ Un épisode prenant, mais des invraisemblances
plus qu’il n’est permis.
TF1, à 20h55.
Bien dégagé derrière les
oreilles J. Téléfilm avec Clémentine Célarié, Daniel Russo. ឭ
Une comédie amusante, mais
lourde, sur l’usure du couple.
France 3, à 20h55.
L’aventure humaine «Evolution (4/5) : Le rôle du sexe» GA.
ឭឰ Un épisode intéressant,
mais très décousu, et avec une
scène suggestive.
Arte, à 20h45.
La trilogie du samedi. Séries.
M6, à 20h50.
100 minutes pour comprendre l’Europe. Magazine.
France 2, à 20h555.
Mulholland drive A/Ø. Drame
(1994) de David Lynch, avec
Laura Harring, Naomi Watts
(2h21). ឭឰឰ Confus et très
pénible.
France 3, à 20h55.
DR
vie» GA. Téléfilm avec Virginie
Lemoine, Christian Charmetant.
ឭឭ Un épisode très réussi et
truffé d’humour.
France 3, à 20h55.
Soirée thématique «De quoi
j’me mêle ! Pourquoi la Chine va
gagner»
Le milliardaire rouge GA.
ឭឭ Un voyage surprenant
dans la Chine d’aujourd’hui.
Good bye Mao GA. ឭឭឭ
Un documentaire lucide et
réaliste.
Débat.
Arte, à partir de 20h45.
Affaires de famille «Adoption : L’aventure de ma vie».
Magazine.
M6, à 20h50.
La jeune fille à la perle GA.
Comédie dramatique (2004) de
Peter Webber, avec Colin Firth,
Scarlett Johansson, Tom Wilkinson, Judy Parfitt (1h36). (Voir
notre analyse)
Canal +, à 20h55.
Vol de nuit «Savoir grandir». Magazine de Patrick Poivre d’Arvor,
avec le professeur Marcel Rufo,
Jacqueline Remy, Clémence Boulouque, Jacques de Guillebon,
François d’Epenoux, Antoine
Hardy, Guy Bedos.
TF1, à 00h35.
Vendredi 22 avril
Les mercredis de l’histoire La soirée de l’étrange «De l’i-
France 3 - Claude Medale
Famille d’accueil «Instinct de
cache la rumeur ?». Magazine.
France 3, à 20h55.
Bagdad Café GA. Comédie
DR
Confidence GA. Thriller (2003)
Le voleur de bicyclette J. Dra- de James Foley, avec Edward
me en NB et VO (1948) de Vittorio De Sica, avec Lamberto Maggiorani, Enzo Staiola (1h33).
ឭឭឭឭ Un grand et poignant chef-d’œuvre du néoréalisme.
Arte, à 20h40.
Nouvelle star. Divertissement.
M6, à 20h50.
[MI-2] (Spooks). Série.
Canal +, à 20h55.
Burns, Rachel Weisz (1h35).
ឭឭឰ Un excellent film avec
des arnaqueurs. C’est astucieux
et bien fait, mais les endroits et
les personnages décrits sont fort
peu fréquentables.
Repères
Père et maire «Une deuxième
vie» GA. Téléfilm avec Christian
Rauth, Daniel Rialet. ឭឰ Une
comédie lourde et émaillée de
plaisanteries de mauvais goût.
TF1, à 20h35.
Le tuteur «Pour le sourire de
Romain» J. Téléfilm avec Roland
Magdane, Jean-Marie Juan
(1h31). ឭឭ Une histoire prenante, avec de l’humour et
beaucoup de tendresse.
France 2, à 21h00.
Vie privée, vie publique «Que
DR
Mercredi 20 avril
T : Tout public
J : Adolescents
GA: Grands Adolescents
A : Adultes
(1987) de Percy Adlon, avec Marianne Sägebrecht, CCH Pounder, Jack Palance (1h27).
ឭឭឭឰ Une réjouissante comédie qui est également une
très belle histoire d’amitié. Mais
les images ne sont pas discrètes.
Café, une sombre passion.
Documentaire.
La route du café.
Sous pression. Documentaire.
Arte, à partir de 20h45.
Zone interdite «A l’école du
feu».
M6, à 20h50.
Football «Auxerre/Lyon».
Canal +, à 21h00.
La prison de verre GA. Suspense (2002) de Daniel Sackheim, avec Leelee Sobieski, Diane Lane, Stellan Skarsgard
(1h43) (- 12 ans). ឭឭឰ Bien
fait, mais très violent.
TF1, à 23h00.
ø
: Œuvre (ou scène) nocive
ឭ : Élément positif
ឰ : Élément négatif
FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
37
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Dieu ?", du 23 (9h30) au 24 avril
(17h). Courriel : [email protected]
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"Marche de la Foi", de l'abbaye
de Saint-Victor à Notre-Dame de
la Garde. Programme : 14h30 :
Grand'Messe chantée en grégorien, 16h : Marche. Rens. (programme complet, inscription au
repas de midi) auprès de : Nouvel
Elan Marial [Mouvement reconnu
canoniquement par l’Eglise, et qui a
reçu la bénédiction apostolique de
Jean-Paul II] , 90, rue de Rome,
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✔ L'Abbaye de Mondaye, 14250
Juaye-Mondaye propose, du 23
(9h30) au 24 avril (14h30), un
week-end augustinien : "Les fondements de la vie spirituelle :
offrir sa vie à la conduite de
l'Esprit de Dieu". Possibilité
d'arriver la veille. Rens. : Frère
François-Marie ✆ 02.31.92.58.
11, fax 02.31.92.08.05. Courriel :
[email protected]
Eure
✔ La fondation d'Auteuil (orphelins apprentis d'Auteuil) propose un
spectacle Gospel "Bâtisseurs
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d'espérance" par la troupe Arts
et Loisirs Centre-Normandie, le
19 avril (20h30) à l'Eglise de La
Madeleine, rue de la Paix, 27000
Evreux. Entrée libre. Rens. 02.37.
53.70.70.
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place Weyland, 57220 Valmunster, ✆ 03.87.35.77.28, une Journée de prière est proposée le 24
avril (9h30-16h30) sur le thème
"Avec le Messie, ouvrons-nous à
la nouveauté de Dieu", animée
par sœur Marie-Adang.
✔ Le Foyer de Charité d'Alsace,
51, rue Principale, 67530 Ottrott, ✆ 03.88.48.14.00, prévoit
une retraite du 18 au 24 avril sur
le thème "Ils le reconnurent à la
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(homélies et discours du Saint-Père)
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est organisée le 25 avril sur le
thème "Jésus se manifeste à
Marie de Magdala" (Jn 20,1118), par l'abbé Aloyse Schaff.
✔ A l'Ermitage St-Jean, 7, rue des
Moulins, 57160 Moulins-LèsMetz, ✆ 03.87.60.02.78, fax
03.87.60.06.33, un week-end est
proposé du 30 avril au 1er mai
sur le thème "Zen et vie chrétienne", avec le père Bernard
Durelle, dominicain.
Nièvre
✔ Une équipe (prêtre, religieuse,
laïcs) propose "La pause du lundi : un espace pour Dieu", « une
journée devant moi pour me
poser sous le regard de Dieu ». La
prochaine rencontre, le 25 avril
(9h30-16h), aura pour thème
"Devenir disciple". Un texte d'évangile nourrira notre méditation,
nos échanges, notre prière. Il sera
possible de rencontrer un accompagnateur spirituel. Inscriptions :
Espace Bernadette, La pause du
lundi, 34, rue Saint-Gildard,
58000 Nevers, ✆ 03.86.71.99.50.
Une retraite est également proposée à l'Espace Bernadette : du 22
(18h) au 30 avril (9h) "Disciple
de Jésus : regarde... écoute...
lève-toi... Dieu te fait signe" avec
la père Jean Pirot, rédemptoriste.
Courriel : [email protected]
Pas-de-Calais
✔ Au Foyer de Charité, 19, rue
Sacriquier, BP 105, 62240 Courset, ✆ 03.21.91.62.52, fax 03.21.
83.87.13, une retraite est prévue
du 2 au 8 mai "A l'école de
Marie, femme eucharistique",
avec le père Godefroy Delaplace.
Puy-de-Dôme
✔ A l'occasion du 50e anniversaire du père Pierre Teilhard de
Chardin, un colloque international se déroulera à ClermontFerrand, du 8 au 11 mai sur le
thème "Avenir de l'humanité... La
nouvelle actualité de Teilhard".
Rens./insc. : "Association Richelieu, Ita", 13 rue de Richelieu,
63400 Chamalières, ✆ 04.73.19.
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Var
✔ "Sainte Marie-Madeleine, pécheresse dans la ville ?", une
conférence d'un père dominicain
le 21 mai (10h). Entrée gratuite.
A la Maison St-Dominique, place
de l'Eglise, 83830 Callas.
Contacter Sœur Marie-Noël
(18h-20h), ✆ 04.94.39.09.30, fax
04.94.76.74.30. Possibilité de
séjour avant et après le 21 mai.
✔ Au sanctuaire Notre-Dame de
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dans ma paroisse = 10 € (de participation aux frais de port)
(*) France métropolitaine et DOM uniquement - (**) Pour les personnes n’ayant jamais été abonnées. (***) Dans la limite des stocks
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& liberté du 6/01/78 : vous disposez d’un droit d’accès et de rectification aux informations vous concernant. Par notre intermédiaire, vous pouvez être amenés à recevoir des propositions d’autres entreprises. Si vous ne le souhaitez pas, il suffit de nous écrire ou
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99 / 92, fax 04.94.69.64.91, courriel : [email protected]
"Vénération des reliques de Marie
Madeleine", le 25 avril ; "Fête de
Saint Joseph, artisan", le 1er mai ;
"Solennité de l'Ascension", le 5
mai ; "Journée de Prière pour la
défense de la nature et des soldats du feu", le 22 mai ; "Fête de
l'Enfant Jésus", le 25 mai.
Camp
✔ Camp d'été pour jeunes 18-30
ans, dans le cadre de l'Abbaye
d'Ourscamp (Oise), allier des
temps d'enseignement, de prière,
et de service communautaires.
Du 24 (10h) au 29 juillet (17h).
Inscription : frère hôtelier, abbaye
d'Ourscamp, 60138 Chiry Ourscamp, ✆ 03.44.75.72.14, fax 03.
44.75.72.04. Courriel : abbaye.
[email protected]
JMJ Cologne 2005
✔ "Tu veux participer aux JMJ de
Cologne ? Les moines et moniales
de la Famille de Saint Joseph (BP
16, 69380 Chasselay. ✆ 04.78.47.
35.26) te proposent de te préparer
et de t'accompagner à ce temps
fort. Pour cela, ils t'invitent les 2324 avril et 28-29 mai, avec enseignements, prière, partage, détente..." Rens./insc. : frère Elie,
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bancaire : 275.0512. 029.11.
Pèlerinages
✔ Le Mouvement Résurrection et
la communauté Aïn Karem organisent un pèlerinage à Vézelay
du 21 au 22 mai "Les sacrements : c'est aujourd'hui le jour
du salut !". 4 routes sont proposées : route rouge : collégiens,
lycéens, étudiants, jeunes professionnels, niveau de marche soutenu, couchage au sol, sous tente
(Hélène Duquennoy, ✆ 01.45.
41.32.87) ; route verte : adultes,
marche modérée, couchage en lit
ou au sol (Murielle Machicot
✆ 01.45.54.65.91) ; route jaune :
familles avec enfants, hébergement en village vacances, marche
adaptée à chacun, et route
bleue : aînés, marche très réduite,
hébergement en gîte (Michèle
Pruvot ✆ 01.48.94.53.02).
✔ Les Equipes du Rosaire d'Ilede-France vous invitent à participer le 4 juin au pèlerinage à la
Basilique de Lisieux "Au cœur
de l'Eglise... je serai l'Amour",
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Lyon, responsable maison avec 1 à 3 personnes,
accueil pèlerins, loyer gratuit, participation frais
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FRANCE CATHOLIQUE - hebdomadaire
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FRANCECatholique N°2972 15 AVRIL 2005
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