acquisitions en chine : achat d`actifs ou prise de participation

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acquisitions en chine : achat d`actifs ou prise de participation
NEWSLETTER CHINE 15 - JANVIER 2012
Lefèvre Pelletier & associés est l’un des premiers cabinets d’avocats français
ACQUISITIONS EN CHINE :
ACHAT D’ACTIFS OU PRISE DE PARTICIPATION ?
Le marché chinois des fusions-acquisitions offre chaque année davantage d’opportunités aux investisseurs étrangers: en
2010, le montant de transactions impliquant des entreprises étrangères s’élevait à 60,1 milliards d’Euros, en augmentation
de 21,2% par rapport à 2009. Aux yeux des entreprises occidentales dont les marchés sont en déclin, tous les pans de
l’économie chinoise semblent connaître un développement prometteur et toutes les statistiques invitent à voir dans
l’Empire du Milieu un relais durable de la croissance.
A présent, on fabrique, on construit mais on vend également en Chine et de plus en plus. Davantage encore qu’en
Russie, au Brésil et en Inde, c’est en Chine que l’industrie continue de se développer et que les consommateurs gagnent
chaque jour en pouvoir d’achat.
Les entreprises étrangères sont souvent séduites et sinon bien conscientes de la nécessité d’être présentes en Chine. Les
difficultés d’une implantation en propre dans un pays étonnamment différent du nôtre invitent toutefois les entreprises
étrangères bien informées à envisager une alternative : l’acquisition.
Acquérir en Chine pour s’implanter, c’est acquérir des marques, une réputation et une connaissance du marché
chinois ainsi que des réseaux de production et/ou de distribution. Toutefois, l’acquisition d’une société chinoise peut
également réserver des surprises (impôts et charges sociales sous-évalués, absence de certains permis ou non-respect
des réglementations applicables, titres immobiliers imparfaits, etc.). Se pose alors la question de savoir sous quelle
forme acquérir et certains investisseurs préfèrent s’orienter vers l’acquisition d’actifs de l’un de leurs sous-traitants,
fournisseurs, partenaires ou concurrents.
Acquisition de participation ou acquisition d’actifs, telle est au bout du compte souvent la question.
I- L’ACQUISITION VIA UNE PRISE DE PARTICIPATION
Les investisseurs étrangers peuvent directement acquérir la société cible chinoise ou l’acquérir indirectement par
l’intermédiaire d’une société holding hongkongaise en raison des nombreux avantages présentés par Hong Kong par
laquelle transite un tiers des investissements étrangers en Chine1.
Prise de particpation par le biais d’une société à Hong Kong
Hong Kong est une plateforme idéale pour y mener des opérations de fusions-acquisitions en raison de la souplesse
de ses règles juridiques et fiscales2. Par ailleurs, le dollar hongkongais est entièrement convertible et il n’existe aucune
restriction ou contrôle des changes pouvant rendre complexes les acquisitions transfrontalières.
L’acquisition d’actions d’une société hongkongaise répond à différentes stratégies d’investissement mais obéit au même
objectif : pénétrer le marché chinois et réussir à sortir de Chine les profits engendrés3 tout en garantissant une taxation
minimum des flux financiers. Certains investisseurs choisissent donc d’acquérir une société holding hongkongaise
parce que cette dernière détient déjà une filiale en Chine continentale, d’autres parce qu’ils souhaitent créer à partir
de la holding hongkongaise une société à capitaux étrangers ou un bureau de représentation en Chine. Utiliser Hong
Kong comme plateforme des investissements vers la Chine permet aussi de bénéficier, au bout d’un certain temps,
du statut privilégié d’investisseur hongkongais, ce qui garantit un accès à des secteurs d’activité en principe fortement
restreints à l’investisseur étranger (services financiers, conseil juridique, audit comptabilité, publicité).
(1) Notamment grâce à l’accord CEPA (« Closer Economic Partnership Agreement ») lequel prévoit une ouverture préférentielle du marché chinois dans 18 sous-secteurs
d’activité aux investisseurs hongkongais ainsi qu’un « désarmement » douanier pour 273 catégories de produits en provenance de Hong Kong.
(2) Il n’y a pas d’imposition des plus-values de cession de titres.
(3) Tout transfert de fonds en provenance ou à destination de l’étranger fait l’objet d’un contrôle en Chine sous la supervision de l’Administration du contrôle des changes («
State Administration of Foreign Exchange »). Cette dernière peut refuser de transférer ces fonds sur le compte du destinataire.
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ACQUISITIONS EN CHINE :
ACHAT D’ACTIFS OU PRISE DE PARTICIPATION ?
Enfin, la combinaison des conventions fiscales existantes entre la Chine, Hong Kong et la France permet souvent de
rapatrier un profit engendré en Chine à un moindre coût fiscal qu’un rapatriement direct vers la France.
Toutefois, en raison de nombreux abus, les autorités fiscales chinoises ont mis en place un régime de taxation des
sociétés holding étrangères (et donc notamment hongkongaises) dont le seul objet est de détenir des participations dans
des filiales en Chine continentale.
En pratique, les acquisitions d’actions de sociétés hongkongaises non-cotées sont très simples à réaliser : le droit
hongkongais impose seulement, sous peine de nullité de la cession, que celle-ci soit formalisée par un document signé
par les deux parties (« instrument of transfer ») qui sera soumis à un droit d’enregistrement obligatoire (« stamp duty »).
Bien entendu, tout l’arsenal de garanties, d’ajustement de prix et autres peut être mis en place contractuellement avec
pour seule limite l’imagination des parties. Par ailleurs, il n’existe pas de législation anticoncurrentielle permettant
d’empêcher des phénomènes de concentration d’entreprise et de monopole. Cette simplicité contraste avec le régime
en vigueur en Chine continentale.
Prise de participation directement dans une société de Chine continentale
Les opérations d’acquisitions sont un phénomène récent en Chine, qui remonte au début des années 2000. Auparavant,
les investissements étrangers prenaient principalement la forme de la création d’une société commune nouvelle
(greenfield joint venture) avec un partenaire chinois. Les rares opérations d’acquisition se faisaient dans un cadre
juridique incertain, qui n’a commencé à être mieux précisé qu’en 2003 et seulement via la publication de mesures
provisoires relativement floues. Ce cadre juridique s’est précisé et renforcé depuis.
• Un cadre légal précis mais peu souple
De manière générale, le droit des contrats et le droit des sociétés n’offrent pas en Chine continentale la souplesse qu’ils
offrent à Hong Kong. Comme nous l’avons déjà mentionné par le passé dans une précédente newsletter, de nombreux
obstacles existent notamment si l’on veut étaler ou faire varier le paiement du prix.
Lorsqu’un investisseur étranger acquiert des participations dans une société domestique, cette dernière est, de fait,
« convertie » en une société à capitaux étrangers et cela peut changer beaucoup de choses et notamment remettre en
cause des avantages acquis auprès d’administrations telles que les douanes ou le fisc chinois. De plus, l’acquisition de
participations n’est autorisée pour les investisseurs étrangers que dans les secteurs dans lesquels des sociétés à capitaux
étrangers sont autorisées à exercer une activité en Chine.
Ces projets sont, par ailleurs, soumis à un certain nombre de modalités et de restrictions dont notamment :
• Les approbations administratives
L’un des premiers points à rappeler à un lecteur européen est qu’un projet d’acquisition d’une entreprise en Chine ne
peut être mené librement : il est soumis à un contrôle administratif poussé et ne peut être réalisé, même une fois les
contrats d’acquisition signés, qu’après obtention de l’approbation des administrations concernées. Ces administrations
seront les branches locales ou provinciales du Ministère du Commerce, ou ce ministère lui-même, selon l’importance
du projet d’acquisition.
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Par ailleurs, la loi chinoise sur les concentrations (la «Loi Anti-monopoles»)4 , qui est entrée en vigueur en 2008, impose
désormais pour tout projet d’acquisition impliquant une entreprise étrangère importante et une entreprise chinoise de
taille moyenne, de vérifier en amont si l’opération envisagée entre dans le cadre de cette loi. Il s’agira de contrôler les
chiffres d’affaires, dans le monde et en Chine, des entreprises concernées par l’opération puis, le cas échéant, d’analyser
l’impact possible de l’opération (par exemple, en termes de concentration de parts de marché) sur le marché intérieur
chinois.
En cas de franchissement des seuils fixés par la Loi Anti-monopoles, une notification spécifique devra être faite à
l’agence spécialisée créée à cet effet, avec un dossier complet décrivant l’impact attendu du projet sur la concurrence au
sein du marché chinois.
Si le projet concerne une industrie particulière (banque, assurance, santé, etc.) ou une société cotée, l’approbation
d’autres administrations spécialisées sera nécessaire. Le résultat de la combinaison de ces multiples approbations, qu’il
faut prendre en compte très tôt, est d’allonger les délais de réalisation de l’opération et d’augmenter l’incertitude de
son aboutissement.
• Le contrôle de sécurité nationale
De nouvelles règles, publiées le 3 février 2011, établissent également un mécanisme de contrôle de sécurité nationale
lors de l’acquisition de sociétés domestiques par des investisseurs étrangers5 : désormais, les prises de participation
majoritaires par des investisseurs étrangers dans des sociétés domestiques chinoises (c’est-à-dire des sociétés enregistrées
en Chine et dont moins de 25% du capital est détenu par des investisseurs étrangers) dans les secteurs «stratégiques»
(industries de la défense, alimentaire, énergie et ressources, infrastructures, technologie, transports, etc.) feront l’objet
d’une revue spécifique supervisée par le Conseil d’Etat, et menée conjointement par le Ministère du Commerce, la
Commission de Réforme et Développement National (NDRC) et d’autre agences gouvernementales selon les industries
concernées.
On notera cependant que ces nouvelles règles et cette revue spécifique ne s’appliqueront pas aux opérations d’acquisitions
de sociétés à capitaux étrangers en Chine (c’est-à-dire des sociétés enregistrées en Chine et dont plus de 25% du capital
est détenu par des investisseurs étrangers). Ces nouvelles règles sont destinées à contrôler des opérations sensibles
d’investissement étranger dans certains secteurs importants pour la sécurité et l’économie chinoise.
Une autre stratégie retenue par certains investisseurs étrangers est d’acquérir seulement certains actifs de la société cible,
tels que les outils de production.
(4) “Anti-monopoly Law of the People’s Republic of China ”, texte publié le 30 août 2007 par le Comité Permanent du Congrès du Peuple, et entré en vigueur le 1er août 2008.
(5) “Notice Regarding the Establishment of National Security Review Mechanism for Mergers and Acquisitions of Domestic Enterprises by Foreign Investors”, texte publié par le
Conseil d’Etat le 3 février 2011.
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II- L’ACQUISITION VIA L’ACHAT D’ACTIFS
Achat d’actifs en Chine continentale
Cette solution peut avoir la préférence des investisseurs étrangers du fait du risque minime qu’elle représente : l’acquéreur
d’actifs, à la différence de l’acquéreur de participations qui se porte responsable des obligations et dettes de la cible
chinoise dans la limite de son investissement, n’assume pas le passif de l’entreprise.
Le droit chinois6 permet classiquement à l’investisseur étranger d’acquérir les actifs d’une société vendeuse selon l’une
ou l’autre des options suivantes :
(i) constitution d’une société à capitaux étrangers suivi de l’acquisition d’actifs par cette structure ; ou
(ii) acquisition des actifs par la société mère laquelle les apporte ensuite en nature au titre de la société nouvellement
créée ou si elle existe au titre d’une augmentation de capital.
Le droit chinois ne fait pas de distinction entre l’acquisition d’actifs d’une société locale ou d’une société à capitaux
étrangers en Chine. En revanche, l’acquisition d’actifs de sociétés domestiques par une société à capitaux étrangers est
soumise aux conditions s’appliquant à ces dernières (un montant de capital social minimum, etc.). La société cédant
les actifs devra également informer ses créanciers de cette acquisition et publier une annonce informant de la vente des
actifs dans un journal provincial ou d’un niveau plus élevé au moins quinze jours avant la soumission des documents
aux autorités chinoises.
Par ailleurs, les acquisitions d’actifs en Chine sont soumises à une vérification et une approbation du Ministère du
Commerce ou de l’une de ses branches locales, selon le montant de l’investissement et l’industrie concernée. Un
dossier complet devra être établi, incluant notamment la preuve de l’accord de la société cible ainsi que les documents
prouvant la constitution préalable, ou à défaut, l’intention de créer une société à capitaux étrangers dans le cadre de
la structuration de l’acquisition.
Les autorités chinoises seront également extrêmement regardantes sur le prix d’achat des actifs : il est interdit, en Chine,
de vendre des actifs ou participations à un prix manifestement inférieur à son prix d’évaluation (ce prix sera déterminé
par un cabinet chinois).
Enfin, la date de transfert effectif de propriété diffère en fonction de la solution choisie (solution précitée : option
(i) ou (ii)). Dans le cas où une société à capitaux étrangers serait créée en vue d’acquérir des actifs, ces actifs seront
effectivement transférés lorsque les conditions préalables d’enregistrement de société seront réunies. Si les actifs sont
acquis dans le but de contribuer au capital social de la société à capitaux étrangers devant être constituée, l’investisseur
ne pourra pas exploiter ces actifs avant d’avoir obtenu la licence d’activité7.
(6) Acquisition of Domestic Enterprises by Foreign Investors Provisions [juin 2009]; Administration of the Verification of Foreign-invested Project Tentative
Procedure [octobre 2004]; PRC Contract Law; PRC Law on Property Rights.
(7) Art. 23 of the Provisions on Foreign Investors’ Merger with and Acquisition of Domestic Enterprises [2009].
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ACQUISITIONS EN CHINE :
ACHAT D’ACTIFS OU PRISE DE PARTICIPATION ?
Le cas particulier d’une acquisition d’actifs à Hong Kong
Les acquisitions d’actifs à Hong Kong sont des opérations simples à réaliser, bénéficiant d’un régime souple et favorable:
pour ce type d’opérations il convient de rédiger un contrat de cession des actifs sélectionnés, étant précisé que l’acquéreur
peut refuser d’acquérir les obligations et garanties attachées aux actifs cédés ou n’en accepter qu’une partie. Libre dans
sa forme, il est cependant conseillé d’inclure dans ce contrat les clauses classiques de garanties de passif. Par ailleurs, il
est d’usage qu’une déclaration du vendeur attestant de la situation juridique des actifs cédés au jour de la cession soit
annexée au contrat de cession d’actifs, en complément de l’audit juridique.
Il est important de noter qu’il existe une différence en termes de formalités entre une simple cession d’actifs et le
transfert d’une branche complète d’activité. Afin de protéger les créanciers, le droit hongkongais exige en effet la
notification au public lors du transfert d’une branche complète d’activité un mois avant la réalisation de ce transfert.
En cas de manquement à cette obligation, l’acquéreur sera tenu des dettes liées à l’activité transférée.
Contacts
Paul-Emmanuel Benachi
Avocat associé, Responsable de l’Asie
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Tél. : +86 21 6135 9966
Raphael Chantelot
Avocat associé, Responsable du China Desk à Paris
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Fiscaliste, Responsable du bureau de Shanghai
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