Schumpeter et Tocqueville,Du concept de liberté aux Penseurs
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Schumpeter et Tocqueville,Du concept de liberté aux Penseurs
Schumpeter et Tocqueville Schumpeter, au début des années 20 était dans un café à Vienne avec un ami; entre Max Weber, le grand, l’immense sociologue, et tous les trois de commencer à discuter sur ce qui se passait à ce moment la en Russie, avec la prise de pouvoir par les communistes. Schumpeter, très calmement annonce que l’expérience va échouer et qu’elle sera a l’origine de dizaines voir de centaines de million de morts d’abord en Russie, et ensuite dans le monde entier. Plus Schumpeter développe ses arguments, plus Max Weber devient agité et plus il se met à hurler qu’il est absolument intolérable de prévoir de telles horreurs et de ne rien faire pour les empêcher. Le ton continue à monter au point que Schumpeter se croit obligé de reprendre son manteau pour sortir. Une fois dehors, son ami (qui a rapporte cette altercation) demande a Schumpeter ce qu’il pensait de cette discussion. Très calme, notre héros lui dit : « Je ne comprends pas comment un homme aussi bien élevé peut crier aussi fort dans un café. » Il y a dans cette anecdote tout ce que j’aime chez Schumpeter. 1. Une capacité incroyable à analyser une situation et à en tirer une conclusion logique sans que ses préférences personnelles influent en quoi que ce soit sur son analyse. Von Mises ou Hayek auront aussi cette capacité, mais il sera toujours possible de leur opposer que leurs conclusions sont douteuses parce qu’entachées par leurs préférences politiques personnelles. Pas Schumpeter. Il analyse froidement la situation, et en tire les conclusions qui lui semblent s’imposer tout en faisant abstraction de tout à priori normatif. C’est ce qu’il appelait avoir l’esprit « scientifique ». 2. Il avait un humour incroyable que seuls Bastiat, Milton Friedman ou Keynes ont approché, tant il est vrai que la plupart des économistes sont d’un ennui foudroyant. Il disait qu’il avait trois buts dans la vie, être le meilleur économiste de tous les temps, mais aussi le meilleur amant et le meilleur cavalier. Ensuite, il ajoutait « et pour ce qui est des chevaux, j’ai encore des progrès à faire » 3. Il parlait toutes les langues, était d’une culture incroyable (voir son histoire des idées économiques) et il est mort en lisant les tragédies d’Eschyle dans le texte en Grec ancien. Il était aussi a l’aise en sociologie (son analyse de la sociologie de Karl Marx est un classique) qu’en économie ou en économétrie…Bref, un géant de la pensée, un vrai. Son grand livre s’intitule » Capitalisme, Socialisme et Démocratie » et c’est dans ce livre qu’il introduit la notion de « création destructrice » qui seule permet la croissance économique, mais ce grand livre est incroyablement pessimiste. Sa thèse, grossièrement résumée est la suivante. Le capitalisme permet la croissance économique et une hausse du niveau de vie de tout un chacun et il est le seul à les permettre. Cette hausse du niveau de vie va permettre à la population entière d’être éduquée Ce besoin d’éducation va créer une classe d’intellectuels qui ne pourront pas ne pas haïr de toutes leurs forces la création destructrice tant ils voudront être les seuls a y échapper (si on avait demandé aux dinosaures si le Darwinisme était une bonne idée, nul doute qu’ils auraient répondu par la négative). Cette classe intellectuelle allait certainement prendre le contrôle du système démocratique par le vote, et son seul et unique but serait d’empêcher la création destructrice d’avoir lieu, ce qui tuerait toute croissance et amènerait à de plus en plus d’interventions de la part du pouvoir politique et donc à une chute encore plus forte de la croissance, la fin ultime étant un corporatisme protectionniste et la stagnation économique au mieux, un écroulement du système démocratique, au pire. Schumpeter se hâtait d’ajouter que ce n’était pas ce qu’il souhaitait, mais ce qui lui semblait inévitable…On voit à quel point cette analyse est différente de celle de Milton Friedman, pour qui capitalisme et démocratie étaient l’envers et l’endroit de la même pièce de monnaie. J’ai longtemps cru que Milton avait raison et que Schumpeter avait tort. Les événements actuels m’amènent à penser qu’il n’avait peut être pas si tort que ca…Partout de pseudo intellectuels ont pris le pouvoir (Obama, Holland, Monti, la commission Européenne), et ils n’ont comme point commun que leur détestation du capitalisme et de la création destructrice. Partout les prix de marché qui seuls permettent des décisions rationnelles sont supprimés (Euro, taux d’intérêts) ou manipulés (Taux de change, salaire minimum, privilèges de la fonction publiques, capitalisme de connivence,etc…).Partout ou les intellectuels ont pris le pouvoir, partout les entrepreneurs sont vilipendés et taxés a mortJamais l’écart entre ces élites éduquées et le peuple n’a été aussi immense, jamais les procédures électorales n’ont été autant manipulées pour que cette caste des « cognoscenti » reste au pouvoir envers et contre tout. Entre Berlusconi qui manipule l’électorat avec son réseau de télévisions et de journaux et les technocrates français au pouvoir depuis longtemps grâce au contrôle qu’ils ont du monde de la culture et de l’éducation nationale, je ne vois pas bien la différence.Pour éviter de tomber dans un pessimisme Schumpetérien et garder mon optimisme Friedmanien, je peux peut être faire l’analyse suivante. Il existe des pays où nous n’avions ni liberté économique ni Démocratie. Apres la chute du mur de Berlin, les autorités dans ces pays ont DU donner à leurs peuples la liberté économique et donc permettre à la destruction créatrice d’avoir lieu. La croissance a suiviCette croissance amènera à terme à la Démocratie (thèse de Friedman), qui après quelques décennies sera capturée par nos incompétents sur diplômés (thèse de Schumpeter). Peut être après tout le cycle long est-il: -Capitalisme -Hausse du niveau de vie -Apparition d’une classe d’intellectuels, qui s’emploient à tout foutre en l’air, avec tout le succès que l’on voit en France en ce moment. -Stagnation -Révolution ou Reforme -Baisse du niveau de vie -Dictature -Retour à la case départ? Ce qui voudrait dire que en ce qui concerne le placement des capitaux, il faudrait être aujourd’hui en Asie ou en Amérique Latine, surveiller les USA et la Grande Bretagne dans l’espoir d’un sursaut et rester en Suède ou au Canada qui sont déjà passés par la case Révolution ou Réforme Mais Dieu que l’Euroland est mal partie si cette analyse est juste… Par Charles Gave Du concept de liberté aux Penseurs libéraux D’où vient-il que nous puissions être libres ? A moins qu’il s’agisse d’une erreur de perception et de jugement, si l’on tente de considérer tour à tour liberté biologique, géologique, morale, intellectuelle, économique et politique… Reste, à moins d’avoir peur de la liberté, et de son insécurité constitutive, qu’elle est notre meilleure chance de développement. C’est ainsi qu’au cours de notre histoire les philosophes politiques réunis sous l’égide des Penseurs libéraux ont pu venir à notre secours pour assoir non seulement notre entendement et notre réalité libres, mais aussi notre enrichissement et notre bien-être. Ai-je la liberté d’avoir ce corps, ce patrimoine génétique issu de la loterie des êtres et d’une évolution darwinienne, ces forces et ces faiblesses, ces prédispositions à la santé ou aux maladies, d’avoir cette psychologie et ce tempérament, sans compter ce quotient intellectuel et affectif, quelque chose entre don des dieux et Némésis, entre cette grâce et ce libre-arbitre discutés par Saint-Augustin… Et d’être né sous cette condition matérielle, organique, parmi cette ère géologique, sur tel continent et pays, dans tel moment historique, plus ou moins favorisé de famine ou d’abondance, de génocide ou de liberté ? De plus, la psychanalyse a douté de l’autonomie de la raison, empêchée par le contenu parfois monstrueux de l’inconscient ; sans compter, de manière plus pertinente, le goût pour l’irrationnel, la tyrannie (qu’elle soit fasciste, théocratique ou communiste) et le mal de nombre de nos frères trop humains. Ce serait tomber dans un angélisme suicidaire que de nier ces nombreuses pierres d’achoppement sur le chemin d’une constitution du soi libre et d’une société des libertés. Chez les Grecs, est libre celui qui n’est pas esclave, qui est citoyen, délivré de la tyrannie par le soin de la démocratie. Grâce à la Réforme protestante, un pas est franchi vers la liberté individuelle lorsqu’à chaque croyant est licite de lire le texte sacré de la Bible, au point que cette liberté de lecture et d’interprétation ne soit pas étrangère à l’éthique économique protestante constitutive de l’esprit du capitalisme[1]. De même, la séparation de l’église et de l’état, dès le « Rendez à César ce qui est à César » de l’Evangile, caractéristique de la tradition gréco-romaine et du christianisme, en passant par le libre-arbitre de Saint Thomas d’Aquin, contribue à la liberté en tant qu’il s’agit de récuser non seulement la théocratie, mais aussi, implicitement, une idée théocratique de l’état, hélas infuse dans le concept de « volonté générale » présent dans le principe du socialisme, a fortiori dans celui du communisme, et tel qu’énoncé par Rousseau : « Il importe donc pour avoir bien l’énoncé de la volonté générale qu’il n’y ait pas de société partielle dans l’Etat et que chaque citoyen n’opine que d’après lui. [2] » Cependant, lors de la révolution anglaise, en passant par Milton et sa « liberté d’imprimer sans autorisation ni censure » -dans laquelle il exige : « Par-dessus toute autres libertés, donnez-moi celle de connaître, de m’exprimer, de discuter librement selon ma conscience[3] »-, puis par les Lumières, l’idée de liberté ira plus loin encore dans la séparation des inséparables. La séparation des pouvoirs, de Locke à Montesquieu, permettra de fragmenter et d’individualiser les décisions, qu’elles soient publiques ou personnelles. De plus en plus, l’émergence de la volonté individuelle fonde le rejet du souverain absolu, puis de l’état omnipotent. Le laisser-faire économique, anticolbertiste puis anti-keynésien, devient également un laisser penser, un laisser vivre en paix. L’homme parvient alors à être le législateur de la société, au contraire d’une société législatrice de l’homme, y compris au moyen de sa subjectivité, au point que Shelley puisse aller jusqu’à écrire : « Les poètes sont les législateurs non reconnus du monde.[4] » Depuis les sociétés holistes traditionnelles, jusqu’à l’individualisme contemporain, un progrès indéniable s’est fait jour, non seulement en matière d’autonomie de la personne humaine, mais aussi de reconnaissance de sa sécurité et de son bonheur, ce dernier terme étant inscrit dans la constitution des Etats-Unis. Lorsque la société civile permet que nous n’appartenions plus à un tyran ou à un Dieu, elle n’empêche pas pour autant la dimension sociale de l’individu, non au sens d’une captation obligée par le social mais au sens des interactions entre individus libres. La capacité à prendre des décisions personnelles et leur adéquation avec les événements et les faits sont les ressorts et les fins de la liberté. En toute logique, il y a cohérence sine qua non entre la liberté de conscience et des mœurs d’une part et la liberté économique, fondée sur la propriété et le capitalisme de concurrence et de contrat d’autre part. A l’encontre des caricatures, cet individualisme n’est pas incompatible avec les sentiments moraux[5], l’empathie, l’amour, l’altruisme, étant entendu qu’individualisme s’oppose à collectivisme, quand altruisme s’oppose à égoïsme, quoique ce dernier soit, en sa capacité à contribuer à l’émergence de richesses privées et d’échanges profitant à la société entière, redoré par des auteurs comme Mandeville[6], Adam Smith[7] ou Ayn Rand[8]. L’agapè, la charité, qu’elle soit personnelle ou associative n’est pas persona non grata dans le cadre ouvert du libéralisme. La seule acceptation de l’individualisme d’autrui suffit à assurer une indispensable tolérance, une réciprocité, un équilibre enfin. Ce pourquoi le libéralisme moral, intellectuel et politique n’est pas dénué de règle assurant sa légitimité. En ce sens l’autonomie et l’indépendance de l’individu ne sont pleinement possibles que dans le cercle souple et polymorphe d’une société des libertés et de la croissance des possibilités, munis cependant de garde-fous : la liberté ne peut se passer d’un état assurant la sécurité des biens, des contrats et des personnes, au moyen de la justice, de la police et de la défense, qui sont ses fonctions régaliennes. De surcroit, jusqu’où doit-elle se munir d’un rempart répressif contre ce qui doit avoir la liberté de se dire, quoique en menaçant par sa prochaine tyrannie, idéologique puis factuelle, cette même liberté ? La question du voile intégral est à cet égard cruciale : liberté de conscience et de comportement, ou bien prosélytisme de l’oppression de l’individu et plus particulièrement de la femme… Qu’est-ce qu’un libéral ? La réponse nous est donnée par Jean-François Revel : « un libéral est celui qui révère la démocratie politique, j’entends celle qui impose des limites à la toutepuissance de l’état sur le peuple, non celle qui la favorise. C’est en économie, un partisan de la libre entreprise et du marché, bref du capitalisme. C’est enfin un défenseur des droits de l’individu. Il croit à la supériorité des sociétés ouvertes et tolérantes » (p 744). En ce sens, JeanFrançois Revel est cohérent avec le Karl Popper de La Société ouverte et ses ennemis[9] qui voit, de Platon à Marx, en passant par Hegel, la menace philosophique de l’absolutisme d’état ossifier nos civilisations… Ne faut-il pas rétablir l’évidente solution de continuité entre la liberté de conduire sa vie et celle d’entreprendre, par le biais de la propriété individuelle et du capitalisme ? N’en doutons pas, l’histoire et la géographie économiques parlent assez en faveur de cette thèse. En effet, plus les économies sont administrées par l’état, soumises à une suradministration, au matraquage fiscal qui se veut redistributeur et égalisateur, de l’Etat-providence pré-thatchérien au communisme soviétique, en passant par le socialisme français des trois dernières décennies, plus elles ont vu s’affirmer leur échec, s’appauvrir leur population, stagner et péricliter leur croissance. Ludwig von Mises, dès 1920, avant que l’Union soviétique ait montré de manière éclatante son impéritie, « démontra qu’il est impossible de construire un système économique viable sans concurrence libre et sans propriété sur le capital. » (p 633). Il répond également à ceux qui rejettent le darwinisme social du libéralisme en objectant que « par la division du travail et l’échange, le libéralisme pacifie la société, alors que le marxisme, à travers la lutte des classes, valorise l’idée de lutte pour la vie qui fait l’essentiel du darwinisme sociologique » (p 634). Sans compter que la redistribution confiscatoire du socialisme, décourageant les initiatives, parvient à généraliser la tyrannie, la médiocrité et la pauvreté. Néanmoins, pour tout penseur rationnel, sans compter ses abondants détracteurs, sinon calomniateurs, le libéralisme n’est pas une panacée absolue aux maux de l’humanité, en particulier économiques. Reste ouverte en effet la question de l’égalité d’accès aux richesses. Que le développement soit possible et souhaitable pour ceux qui sont entreprenants ne suffit pas toujours à assurer l’essentiel à ceux qui ont de bien moindres qualités, aux démunis. Récompensant le travail, le mérite et la responsabilité, doit-il –et jusqu’où doit-il ?- pratiquer la redistribution en faveur des défavorisés, de façon à établir cette justice sociale qu’Hayek[10] sait illusoire, mensongère et tyrannique ? N’y-a-t-il pas à cet égard une actualité de Tocqueville : « L’Ancien Régime professait cette opinion, que la sagesse seule est dans l’état, que les sujets sont des êtres infirmes et faibles qu’il faut toujours tenir par la main, de peur qu’ils ne tombent ou ne se blessent ; qu’il est bon de gêner, de contrarier, de comprimer sans cesse les libertés individuelles ; qu’il est nécessaire de réglementer l’industrie, d’assurer la bonté des produits, d’empêcher la libre concurrence. L’Ancien Régime pensait sur ce point, précisément comme les socialistes d’aujourd’hui ». (p 425). Ou encore : « la démocratie veut l’égalité dans la liberté, et le socialisme veut l’égalité dans la gêne et la servitude ». (p 426). Pensons qu’il s’agissait là d’un « Discours contre le droit au travail » prononcé en 1848. Devant l’avalanche du « droit à » et de la dictature du besoin dénoncée par Ayn Rand[11], que sont devenus devoir, mérite, liberté, et responsabilité ? Ce sont tous ces auteurs que l’on trouve dans ce fort volume : Les Penseurs libéraux. Voltaire et son éloge du commerce, Adam Smith et la main invisible du marché, depuis La Boétie et son Discours de la servitude volontaire, en passant par leTraité de tolérance universelle de Pierre Bayle, les Français font jeu égal avec les Anglo-saxons, de Milton et Locke, en passant par John Stuart Mill et La désobéissance civile de Thoreau, jusqu’à l’école de Chicago et Milton Friedman… Les grands du libéralisme classique sont ici à l’honneur : Kant bien sûr, Hayeck et saRoute de la servitude, qui établissait la congruence du national-socialisme allemand et du communisme, Mario Vargas Llosa ironisant contre « l’exception culturelle », ou Pareto dénonçant « le péril socialiste »… Mais connaissez-vous, en des textes parfois jusque-là indisponibles, Ortega y Gasset, Jurieu, Laboulaye, ou Lysander Spooner qui affirme que « le vote ne fonde aucune légitimité » et qui s’insurge contre « l’état bandit » ? L’ouvrage d’Alain Laurent et Vincent Valentin remplace alors, in nucleo, une bibliothèque entière, luttant par ailleurs à armes plus nombreuses avec un précédent de Pierre Manent : Les Libéraux[12]. Son abondante anthologie ordonnée est à la fois un vadémécum, un résumé fort réussi de l’histoire de la pensée, une constitution philosophique libérale portative, mais aussi une invitation à former une plus intégrale collection des nombreux ouvrages fondamentaux. Du « libéralisme renouvelé par l’acceptation partielle de la critique socialiste » (p 746) de Raymond Aron à l’anarchocapitalisme de Murray Rothbard dont « le laissez-faire intégral » ne peut s’accoutumer de l’état « ennemi naturel de la liberté » (p 802), tout le spectre libéral est couvert. Plaidant non seulement la cause du libéralisme, mais encore celle de l’équité qui réclame que l’on rende à cet immense courant de pensée et de regard sur le réel toute sa dignité humaine et philosophique contre ses détracteurs, le plus souvent ignorants et aveugles, à moins de considérer qu’ils veulent garder les places acquises qui leurs permettent de vivre au-dépens de tout le monde, ce livre ambitieux, certes pas d’un accès simplissime, n’est jamais démagogique. Pour ce faire, il se présente en trois parties : une vaste introduction, « L’idée libérale et ses interprètes » ; une plus vaste encore « Anthologie », thématique et chronologique, de « L’émergence du libéralisme contre l’absolutisme », jusqu’à l’actuel « courant libertarien » ; de nombreuses annexes enfin, de la complexe « généalogie d’un mot : libéralisme », en passant par un dictionnaire, jusqu’à une bibliographie. Livre savant, livre de chevet, aux argumentations beaucoup plus accessibles et claires que ce que le méfiant lecteur aurait pu craindre… A l’heure française, trop française, où la séparation des pouvoirs, en particulier politique et économique, devient de plus en plus un vain mot, où la liberté d’entreprendre, voire de conscience et d’expression, est fragilisées, il manque à nous tous une fondamentale porte de liberté : elle s’ouvre alors en osant le courage d’affronter les idées roboratives et dynamiques contenues dans Les Penseurs libéraux. Ses 900 pages, généreuses, encyclopédiques, comblent une lacune d’importance devant la pléthore d’ouvrages d’inspiration marxiste plaidant l’interventionnisme et la régulation économique qui formatent sans discernement les esprits. Faut-il espérer qu’en la noble compagnie d’initiatives comme le Dictionnaire du libéralisme[13] et le collectif Libres[14], cet opus magnus qu’est Les Penseurs libéraux soit le signe d’un juste infléchissement de la pensée contemporaine et à venir ? Car il n’y a pas de philosophie politique sans libéralisme. Thierry Guinhut Thierry Guinhut: une vie d’écriture et de photographie photo-2032240-Bibliotheque-1448_JPG.html [1] Voir à ce sujet Max Weber : L’Ethique protestante et l’esprit du capitalisme, Plon, 1964. [2] Jean-Jacques Rousseau : Du Contrat social, Œuvres complètes, Pléiade, tome III, p 372. [3] John Milton : Areopagitica pour la liberté d’imprimer sans autorisation ni censure, Aubier, 1956, p 211. [4] Percy Bysshe Shelley : Défense de la poésie, La Délirante, 1980, p 45. [5] Voir à ce sujet : Adam Smith : Théorie des sentiments moraux, PUF, 1995. [6] Bernard de Mandeville : La Fable des abeilles, Vrin 1990. [7] Adam Smith : Enquête sur la nature et les causes de la richesse des nations, PUF, 1999. [8] Ayn Rand : La vertu d’égoïsme, Les Belles Lettres, 1993. [9] Karl Popper : La Société ouverte et ses ennemis, Seuil, 1979. [10] Friedrich A. Hayek : Droit, législation et liberté, PUF, 1981. [11] Ayn Rand : La Grève, Les Belles Lettres, 2011. [12] Pierre Manent : Les Libéraux, Hachette Pluriel, 1986 et Tel, 2001. [13] Dictionnaire du libéralisme, sous la direction de Mathieu Laine, Larousse, 2012. [14] Collectif La Main invisible : Libres, Editions Roguet, 2012 Au sujet de ces deux derniers volumes, voir : Deux manuels des libertés : Libres, Dictionnaire du libéralisme