SUR LES PAS DES MEULIERS... - La Ferté-sous

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SUR LES PAS DES MEULIERS... - La Ferté-sous
SUR LES PAS DES MEULIERS...
Le pain, nourriture essentielle de tous les temps, est fait de grains de
blé broyés.
Dès l'Antiquité, on écrase les grains à l'aide de pierres frottées les unes aux autres.
Au Moyen-Âge, on utilise les forces
motrices du vent et de l'eau pour actionner
les moulins. On extrait alors de la terre
d'énormes blocs de pierre, les “meules”,
pour moudre les grains. La qualité exceptionnelle de la pierre de silex
extraite à La Ferté-sous-Jouarre va donner à la ville une réputation
mondiale dans l'industrie meulière.
Après la Révolution, la libéralisation des terrains va accentuer l'essor
de cette industrie. Au XIXe siècle, l'industrie meulière fertoise est à
son apogée : on extirpe la pierre dans toutes les collines environnantes de La Ferté-sous-Jouarre : le Bois de la Barre, Tarterel, etc.
Dans les ateliers, situés en centre-ville, les pierres sont taillées puis
vendues par les négociants installés à proximité. Le bâti fertois de
cette époque (bâtiments communaux et particuliers) reflète cet âge
d'or.
Le progrès technique accompagne cet essor industriel. La
fabrication des meules “à l'anglaise” (constituées de plusieurs morceaux de pierres,
appelés “carreaux”) remplace
peu à peu la fabrication des
meules “monolithes”, constituées, elles, d'un seul bloc de pierre.
XXe
Au tout début du
siècle, une nouvelle technique de mouture, les
cylindres métalliques, révolutionne le travail de meunerie et annonce
le déclin des meules en pierre.
L'activité industrielle de La Fertésous-Jouarre disparaît peu à peu ; les
deux guerres successives finissent
d'achever cette épopée.
Aujourd'hui, il ne reste que quelques
traces visibles de ce riche passé : des
maisons racontent encore cette histoire et des témoignages architecturaux
dissimulés ici et là méritent l'attention
d'un œil éclairé et guidé.
1
PLACE DE L’HÔTEL DE VILLE
L'Hôtel de Ville actuel est le symbole de la politique édilitaire ambitieuse, menée au XIXe siècle par les patrons des grandes sociétés meulières qui, de l’extraction de la pierre à meule à son façonnage puis
son exportation dans le monde entier, est le symbole d’un âge d’or
sans pareil.
Il est érigé à l'emplacement du “Grand Dauphin Couronné”, auberge
du XVIe siècle transformée en mairie
en 1762 sous l'égide de Simon
Gueuvin, alors maire de la ville et
meulier.
En 1880, pour la construction du nouvel édifice, un concours architectural
est lancé, prévoyant chaque détail
depuis les matériaux (fondations en
pierre meulière, briques en provenance de Reuil-en-Brie) jusqu'aux poignées des fenêtres.
Le projet de Paul Heneux est retenu.
Il s'entoure alors des meilleurs artistes
de l'époque : Glaize, Bouché, Meslé
dont les toiles sont toujours visibles
dans les salons de l'Hôtel de Ville. Le nouvel édifice, réplique exacte
de l'Hôtel de Ville des Lilas, est inauguré en 1885.
Aujourd'hui, des visites sont organisées le premier mardi de chaque
mois, entre mai et octobre sur réservation auprès de l'Office de
Tourisme.
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RUE DES PELLETIERS
Le nom de “pelletier” provient des métiers liés au travail de la peau et
de la fourrure. Depuis le Moyen-Âge, la proximité des foires de
Champagne et l'élevage de moutons en Brie favorisent le développement de l'artisanat textile à La Ferté-sous-Jouarre, en marge de l'industrie meulière. Celui-ci est, un temps, assez prospère.
Au XVIIe siècle, toute ville, petite ou grande, située sur un cours d'eau
possède sa communauté de maîtres tanneurs. Tout en gardant un
caractère artisanal, la tannerie nécessite des capitaux assez importants car les opérations du tannage
sont longues et peuvent parfois durer
jusqu'à deux ans.
A La Ferté-sous-Jouarre, les marchands drapiers s'organisent en corporation, possèdent des boutiques
en centre-ville et participent à de
nombreuses foires et marchés à
Meaux, Melun et Provins. Les noms
des plus anciennes rues de La Fertésous-Jouarre témoignent de ces
métiers : rue des Tanneries, des
Étuves, des Cordeliers...
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PONT CHARLES-DE-GAULLE
Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, le pont Charles-De-Gaulle est un
des seuls points de passage de la Marne de la région.
A la suite d'une crue soudaine en 1784, le pont est détruit.
Messieurs Regnard de l’Isle et Bouchon (importants négociants
de meules) sont agréés comme constructeurs d'un nouveau pont
et envisagent la création d'un péage. Ce projet provoque une
révolte populaire chez les ouvriers meuliers qui, traversant le
pont chaque jour pour se rendre aux carrières, auraient perdu là
une grande partie de leur salaire.
Au milieu du XIXe siècle, les besoins de navigation exigent un
élargissement du cours de la Marne : l'exportation de marchandises particulièrement lourdes, à l'échelle planétaire, explique
l'importance des moyens logistiques mis en œuvre. C'est le début
des grands travaux qui modifient la ville : construction du port aux
meules, surélévation du sol,
remblaiement de l'ancien bras de
la Marne (situé à la place de l'actuel Boulevard Turenne).
En 1835, La Ferté-sous-Jouarre
compte 23 sociétés différentes. Les
plus grandes emploient près de 600
ouvriers et exportent des milliers de
meules chaque année aux quatre
coins du monde. Les quartiers de la
rive gauche concentrent l'essentiel du
processus de fabrication des meules
après extraction.
En 1849, l'arrivée du chemin de fer
provoque un bouleversement dans
l'implantation géographique de l'industrie meulière. Les nouvelles sociétés se construisent à proximité des
rails, ce qui réduit considérablement
les coûts d'expédition.
En 1865, le Boulevard Turenne
prend forme et le “Pont de
Fer” est ouvert à la circulation.
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QUAI DES ANGLAIS
Tourner à droite, Quai des Anglais (4) jusqu'aux anciens ateliers
de la Société Gueuvin- Dupety - Bouchon - Orcel.
Aux XVIIIe siècle, le commerce de meules de moulins échappe aux
maîtres meuliers (artisans indépendants) et tombe sous le contrôle
des grandes dynasties négociantes comme les Gueuvin, Dupety,
Bouchon, Regnard, Himbert...
Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, ces grandes dynasties bâtissent des fortunes colossales (une meule coûte le prix d'une maison).
Elles sont à l'origine des premières sociétés fertoises, comme la
Société Gueuvin- Dupety - Bouchon - Orcel, qui fut, au XVIIIe
siècle, la première grande entreprise à actions. Elle s'étend de
l'actuelle Médiathèque au “Leader Price”, et en triangle de la rue de
Condé jusqu'à l'Île Caquot et l'avenue Franklin-Roosevelt.
Au XIXe siècle, ces sociétés sont rejointes par des entrepreneurs plus
modestes ou nouvellement introduits dans le monde de la meulière.
AUJOURD'HUI, on peut apercevoir, quai des Anglais, les vestiges
des anciens ateliers du XIXe siècle. La grande halle de la corderie et
de l'atelier de cerclage se situe à l'emplacement de l'actuel supermarché. Derrière la façade d'aluminium très contemporaine, les murs du
XIXe siècle des anciens chantiers meuliers sont toujours là. On en
distingue encore quelques éléments de structure dans la continuité du
bâtiment moderne.
La maison du directeur de chantier située au numéro 50 de la Rue de
Condé est en excellent état. Propriété privée reconvertie en maison
d'habitation, elle se compose d'un étage sur rez-de-chaussée et
montre 5 fenêtres en façade, dont 3 à l'étage, de belles tailles, décorées d'un linteau en arc-de-cercle.
5
PORT-AUX-MEULES
Jusqu'au XIXe siècle, les meules, une fois taillées et stockées, sont
chargées depuis des plages aménagées sur les berges. Les bateaux
viennent se ranger sur la grève, un espace vide est alors aménagé en
arrière pour stocker les marchandises en attente de chargement ou
pour la manœuvre des équipages tractés.
La véritable naissance du Port-aux-Meules, unique au monde,
remonte aux années 1860-1870. L'augmentation de la production
amène des chalands de plus en plus imposants. L'aménagement du
quai permet ainsi de charger de lourdes pierres de plein bord, même
lorsque la rivière est en crue. Rappelons qu'une meule pèse entre 1
et 5 tonnes.
Le port est constitué de 500 grosses meules monolithes empilées sur
huit niveaux qui forment un mur de près de 4 mètres de hauteur, au
droit des ateliers GueuvinBouchon et Compagnie.
Cette construction ne laisse
aucun visiteur indifférent, surtout à l'endroit où débouche
un passage souterrain, donnant à voir toute une colonne
de meules sur une bonne
partie de son diamètre...
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7
THÉÂTRE MUNICIPAL
Le Théâtre fut construit en 1892
puis inauguré en 1896. On le
baptise “Eldorado”.
Comme
de
nombreuses
constructions de cette époque
dans le bassin francilien, il est en
pierre meulière. Son architecture
massive et imposante traduit
une certaine vanité de ses commanditaires. Il reflète la richesse de la ville à cette époque.
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KIOSQUE À MUSIQUE
Face au théâtre, le kiosque à musique. Il est inauguré en 1903, grâce
au legs d'un généreux donateur, Alfred Cocu, ancien boucher de La
Ferté-sous-Jouarre, décédé en 1900. Il fait don à la ville de 10 000
Francs pour la construction de ce kiosque à musique, récemment restauré, typique de la Belle Époque, sur le Pâtis de Condé.
S'installe tout un ensemble de constructions allongées, les ateliers, à
l'extrémité du Pâtis de Condé mais aussi autour de l'actuel rond-point
de Condé et le long de l'Avenue Franklin Roosevelt, jusqu'au lieu-dit
la Haute Borne.
RUE DE CONDÉ
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la plupart des grands négociants demeurent sur la Rue de Condé, véritables “Champs-Élysées” des meuliers,
avec une forte concentration de beaux immeubles.
Puis, fortune faisant, au XIXe siècle, les anciens hôtels particuliers
sont délaissés au profit de manoirs et de châteaux implantés sur le
Pâtis de Condé et en périphérie, à Condetz, aux Bondons, à la
Fontaine aux Pigeons, à la Haute Vue.
N°35 : A l'emplacement de cette
école, se trouvait
le Château de
Lagny.
Deux
tours se dressaient aux extrémités de ce bâtiment qui possédait une ferme, un
colombier et un
vaste parc. Il est
détruit en 1940.
N°29 - 31 : Anciennes demeures de la famille Gueuvin. Le numéro 31
a été modifié mais le numéro 29 reste très proche de son état initial.
PÂTIS DE CONDÉ
Au XVIe siècle, Louis de Bourbon, Prince de Condé, Seigneur de La
Ferté-sous-Jouarre, concéde aux habitants le droit d'utiliser deux
pièces de prés, l'une du côté de Reuil et l'autre du côté des Îles de
Condetz : c'est le Pâtis de Condé. Les fertois y mènent paître leur
bétail.
A cette époque, la finition des meules et l'assemblage des carreaux
se déroulent aux abords des carrières. Les meules achevées sont
descendues vers les ports de la Marne et du Petit Morin afin d'être
montrées aux clients puis chargées sur les bateaux. Celles ayant
souffert du voyage sont abandonnées sur un coin de pré, notamment
sur le Pâtis de Condé.
A partir de la fin de la
Révolution et de l'abolition
des privilèges, le Pâtis de
Condé devient " bien national ". L'assemblage des carreaux, la finition des meules
et le rayonnage migrent
alors vers le quartier du
Faubourg.
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En face de ces maisons se trouve une borne routière royale datant du
XVIIIe siècle qui servait de repère pour le transport des meules.
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RUE DU PORT-AUX-MEULES
Au XIXe siècle, les patrons et négociants de meules s'installent Rue du Port
aux Meules, à proximité de leurs ateliers. Les riches demeures qui jonchent
la rue symbolisent à ce qu'on a appelé “l’encastellement” des dynasties.
N°22 : Issue de la “conquête du Pâtis de Condé” et
datant de la seconde moitié du XIXe siècle, cette
maison de style renaissance anglaise fut la dernière habitée par les descendants de son bâtisseur, Henri Dupety.
N°15 : Ce beau manoir du XIXe siècle appartient à la famille Bouchon qui habitait, avant
cette date, au numéro 15 de la Rue de Condé.
Cet élément important du patrimoine meulier
fertois ne figure pas sur le plan cadastral de
1829, ce n'était alors qu'un vaste jardin clos en
face de leur ancienne maison.
N°13 : Appartenant à la famille Dupety, cette maison est
connue à La Ferté-sous-Jouarre pour sa girouette en forme de meulier
taillant sa meule, aujourd'hui disparue.
N°18 : L'ancien propriétaire, Henri François Dupety , est le fondateur
d'un des ateliers situé Quai des Anglais. Excepté l'ajout des chiens
assis, l'état de la bâtisse est très proche de celui du début du XIXe
siècle.
N°15 : L'ancien propriétaire est Louis Jean Bouchon. Il possède aussi
un atelier Quai des Anglais. Ce très bel hôtel particulier est probablement construit en 1734 pour les Houdrichon, famille importante de La
Ferté-sous-Jouarre (maire perpétuel de La Ferté au
Col, échevin et marchand de meules). Il est
racheté en 1770 par les Bouchon, qui sont
également marchands de meules.
N°9 : Appartenant à Simon Gueuvin,
ancien maire de La Ferté-sous-Jouarre et
Conseiller Général de Seine-et-Marne,
cette maison est le berceau d'une des plus
importantes et anciennes dynasties fertoises de négociants meuliers. C'est un
élément essentiel du patrimoine meulier
national.
N°3 - N°7 : Anciennes propriétés de la famille
Himbert de Feligny. Le numéro 3 est probablement l'ancienne demeure de la famille avant la
construction du Château des Bondons alors que le numéro 7, plus
modeste, était certainement le logement d'un de leurs employés.
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LA FERTé-SOUS-JOUARRE
RUE DU FAUBOURG
« Sur les pas des meuliers »
Remonter en centre-ville par la Rue du Faubourg.
Le quartier du Faubourg
est un ancien quartier de
commerçants, d'habitations de meuliers et de
commis (aide, assistant)
de marchands.
Dans les ateliers, chaque
étape de fabrication fait
appel à des compétences particulières : les
dresseurs polissent la surface de la meule, le fabricant choisit les morceaux des meules à carreaux, les assembleurs les ajustent et les
scellent, les cercleurs posent des cercles à chaud autour de la meule,
les chargeurs remplissent la face opposée, enfin, les rayonneurs
creusent les rayons. Vers 1850, l'industrie meulière emploie 3 000
personnes, du grand patron au simple carrier. L'habitat fertois, avec
ses maisons modestes et ses imposantes propriétés, reflète ces disparités sociales.
34, rue des Pelletiers - 77260 La Ferté-sous-Jouarre
Tél : 01 60 01 87 99
Mail : [email protected]
www.la-ferte-sous-jouarre.fr/office-tourisme
N°39 : L'ancien propriétaire, Louis Pierre Joseph Bertrand, est marchand de meules. En 1876, il obtient une médaille pour ses meules à
l'exposition internationale de Philadelphie. Auteur d'un ouvrage sur la
meulerie, son œuvre sera publiée entre 1867 et 1875.
N°21 (angle avec la Rue du Port-aux-Meules) : Ancienne propriété
d'Antoine Pigeon, commis de négociants de meules. La façade Rue
du Port aux Meules est refaite suite au prolongement de la chaussée
et à la destruction de la traboule (passage à travers des cours d'immeuble qui permettent de se rendre d'une rue à une autre).
Cependant, la façade arrière reste bien conservée.
N°10 : L'ancien propriétaire, Auguste Blazy, est commis de négociants
de meules. Cette maison, très proche de son état d'origine, est un élément important du patrimoine meulier fertois.
La plupart des commis de négociants résident en centre-ville.
Certains sont toutefois installés dans les quartiers périphériques,
comme au Limon.
Les “mains bleues”
(nom
donné
aux
ouvriers meuliers dont
les mains étaient bleuies
par les éclats de silex),
quant à eux, habitent
dans les hameaux (les
Bondons,
Mourette,
Saint-Martin, Favières
ou Bécart), à proximité
des carrières.
A partir de la seconde moitié du XIXe siècle, la Rue Pierre Marx et les
environs de la gare deviennent un quartier d'habitations bourgeoises.
Comment venir à La Ferté-sous-Jouarre ?
PARCOURS HISTORIQUE
Du façonnage à l’exportation
L’industrie meulière
au coeur de la Ville
Circuit pédestre - 1h30

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