Sarah - A quoi tient une identité de femme ? Genèse, à partir du

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Sarah - A quoi tient une identité de femme ? Genèse, à partir du
Dimanche 23 Novembre 2008
Isabelle FIEVET, aumônier au Centre pénitentiaire des femmes à Rennes.
Sarah - A quoi tient une identité de femme ?
Genèse, à partir du chapitre 12.
Musique : Schubert. Trio n°2 Opus 100 - Plage 2. SBK 89380.
Accueil / Introduction :
IF : La grâce et la paix nous sont offertes de la part de Dieu.
Pas facile d'annoncer la grâce de Dieu à une femme prostrée dans le souvenir du meurtre
qu'elle a commis. Pas facile d'annoncer l'amour de Dieu à une femme qui a tué son propre
enfant ! Pas facile d'annoncer la paix de Dieu à une femme qui toute sa vie a été humiliée,
violentée, battue, asservie, abîmée jusqu'au jour où elle a commis l'irréparable.
Pas facile… mais indispensable.
Car la grâce et la paix nous sont données à toutes et à tous, que vous soyez dans les murs ou
hors des murs de la prison.
Elles nous sont offertes de la part de Dieu, notre Père, en Jésus-Christ, notre frère.
Et elles nous sont données gratuitement : rien de ce que nous avons pu faire ne peut nous en
priver et nous n'avons rien à faire pour les mériter…
Musique : Schubert. Trio n°2 Opus 100 - Plage 2. SBK 89380.
A la prison de Rennes où je suis aumônier, il y a heureusement des moments où les femmes
se soutiennent dans leur malheur. Mais il y a aussi des temps de haine et d'exclusion.
Des moments où pour se donner des excuses, on cherche une autre détenue à rabaisser.
Où on se compare les unes les autres, comme pour établir une hiérarchie.
Qu'une nouvelle arrivante soit annoncée par la presse comme infanticide, et c'est sous les
huées et les injures qu'elle franchit la porte. Qu'un conflit oppose une jeune et une femme de
plus de cinquante ans, et l'insulte éclate, une insulte qui se veut blessante, pleine de mépris:
"Vagin desséché", c'est-à-dire : Même plus capable d'engendrer ! Même plus une femme !
On est une "héroïne" (le jeu de mots est facile) quand on a passé un gros paquet de drogue…
même si on a entraîné la dégringolade aux enfers de tout un tas de jeunes, voire leur mort…
mais… si c'était pour nourrir les enfants… alors, on comprend ! Paradoxe !
Mais si une femme a tellement été blessée au plus profond d'elle-même, au point qu'elle n'a
pas pu inscrire sa grossesse dans la réalité de son corps, au point de tuer le bébé à la
naissance, alors on l'écrase de mépris. Ou bien qu'une autre ait tué son enfant sous l'emprise
d'une drogue, alors la dealeuse s'offusque ! Et lui promet les pires souffrances, les pires
sévices dans un recoin discret des douches.
La hiérarchie dans la prison n'est pas sans lien avec la fonction maternelle.
Est-ce que les enfants seraient sacrés, pour rendre la maternité sacrée ? Ou l'inverse ?
Moi, je ne sais pas répondre à cette question de l'œuf et de la poule.
Mais c'est ce qui m'a donné l'idée de cette méditation que je vous propose aujourd'hui autour
de Sarah, personnage biblique du livre de la Genèse. Pour elle aussi, la question se pose: à
quoi tient une identité de femme ? A son rôle de mère, à son rôle d'épouse, ou à autre chose ?
Elle se pose aussi pour chacune d'entre nous.
Et donc aussi pour chacun d'entre vous, messieurs.
La prison est un concentré de notre société : l'être humain y est réduit comme ailleurs à sa
fonction et à son utilité. Il ne fait pas bon être malade, handicapé, vieux ou stérile :
Malheur à celui qui ne rentre pas dans les cases définies par les canons de la beauté et par les
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performances qu'exige l'économie. Beaucoup de femmes sont en prison justement parce qu'elles ne pouvaient
pas satisfaire à ces impératifs.
La société est une prison dans laquelle chacun est enfermé dans un rôle à tenir, dont on réclame qu'il le tienne, et
que malheureusement chacun s'empresse de tenir.
On réclame d'une femme qu'elle soit belle, bonne épouse, et mère.
On aurait pu croire que derrière les barreaux, elles refuseraient de se prêter à ce petit jeu… Mais non. A
l'intérieur de la prison, c'est la même société, les mêmes exigences, le même mépris, la même servilité, la même
méchanceté. Peut-être en pire, parce que moins dilués.
L'idéal de la femme productrice de vie biologique y est encore plus qu'ailleurs le critère de jugement des unes
vis-à-vis des autres.
Musique : Schubert. Trio n°2 Opus 100 - Plage 2. SBK 89380.
C'était au temps où Sarah s'appelait encore Saraï. C'est le premier nom que lui donne la Bible au chapitre 11 du
livre de la Genèse. Saraï, ça veut dire ma princesse. Cette femme serait-elle vouée à toujours appartenir à
quelqu'un ? Princesse de qui ? De ses parents, de son mari, Abram ? Et ensuite le livre ajoute (Genèse 11:30)
qu'elle est stérile: "Et telle est Saraï, stérile. Il n'y avait pas d'enfant pour elle."
A l'appel de Dieu, Abram quitte le pays de ses ancêtres. Saraï avec lui. Et ils vont vers le pays de Canaan avant
qu'une famine ne les conduise en Egypte. La beauté de Saraï constitue alors une menace pour Abram: "Quand
les Egyptiens te verront, ils diront: voici sa femme. Ils me tueront et te feront vivre! Dis que tu es ma sœur, tu
seras mon bien, ainsi ma vie sera préservée !" Abram ne savait pas si bien dire : Pharaon prend Saraï pour
femme. Et "Abram reçoit du petit et du gros bétail, des ânes, des serviteurs, des servantes, des ânesses, des
chameaux". Autrement dit, cette femme vient de servir de monnaie d'échange. Saraï, serait-elle vouée à toujours
être "la femme de…" ?
Cependant, malgré toutes ces pérégrinations et tribulations, Dieu maintient la promesse faite à Abram: " Ta
descendance sera aussi nombreuse que les étoiles, innombrables" (Genèse 15: 5).
Mais toujours, Saraï reste stérile. Alors, elle en arrive à pousser sa jeune servante, Agar, dans le lit d'Abram.
Est-ce pour être fidèle à la promesse, est-ce de se sentir comme en faute, déconsidérée, ou bien de ne pas être à
la hauteur de la promesse ? Abram semble y consentir sans trop de retenue… "Abram va vers Agar."
Enceinte, Agar se prend à regarder sa patronne avec mépris. Comme un écho de ce que j'ai entendu à la prison :
" moi je suis jeune et capable de donner un fils à un homme. Toi, tu n'es qu'un vagin desséché."
Saraï, la stérile, ne fait pas le poids, nous dit la Bible…. Alors à son tour, elle maltraite Agar, au point de la
pousser à fuir dans le désert. Deux femmes prises de haine l'une pour l'autre, à travers l'image qu'elles se
renvoient au miroir de la maternité.
Abram et Saraï ont cru à la promesse de Dieu. Ils pensaient peut-être l'avoir bien interprétée.
Et ils avaient agi en ce sens, pour rendre cette promesse possible. Mais ils n'avaient pas vu que cette promesse
supposait un bouleversement bien plus profond que la mise en œuvre d'une solution biologique.
Dieu renouvelle sa promesse qui, cette fois-ci, va passer par un changement de nom.
Pour Abram comme pour Saraï.
Musique : Chants juifs pour violoncelle et piano par Sonia Vieder-Atherton. Plage 3. RCA Victor
74321425332
Abram, ça signifie "grand est le père". C'est un nom qui exprime l'importance sociale de la fonction paternelle.
C'est un nom qui fait peser sur soi le poids d'un père qui nous a précédés. Abram, c'est le poids d'une paternité
qui se comprend comme un droit de propriété, comme un statut d'honorabilité. Etre père, ça se respecterait,
parce que ce serait un statut de propriétaire. Or, pour pouvoir réellement être père, Abram va devoir changer de
nom. C'est-à-dire changer de regard sur son propre père (qui cesse d'être magnifié). Et sur lui-même (qui cesse
de se devoir d'être magnifique). Et sur son épouse (qui va cesser d'être sa propriété), en un mot, il va changer
de regard sur la paternité. Etre père ne peut passer que par la dépossession d'une part de soi. C'est le sens de la
circoncision. C'est aussi paradoxalement, le sens de l'agrandissement du nom. D'Abram à Abraham, il y a une
lettre en plus. Mais c'est un H! Un courant d'air, un souffle. "J'agrandirai ton nom… " a promis Dieu.
L'expression a deux sens. D'abord un sens métaphorique: je te donnerai une lignée! Et un second sens, littéral:
j'allonge ton nom d'une lettre… Mais cette lettre en plus, c'est une lettre qui donne de l'air, qui ouvre…
Comme si être père, c'était être ouvert à un avenir qui échappe, libéré du poids des générations; libéré du poids
de ses prétentions possessives !
Voilà pourquoi Dieu dit à Abraham : ta femme ne sera plus appelée Saraï, "ma princesse". Elle ne sera plus
princesse de personne ! Pas plus la tienne que celle de ses parents, ni d'aucun Pharaon. Elle ne t'appartient pas.
Elle n'est pas ton objet reproductif.
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Elle n'est princesse de personne. Ni celle d'un mari, ni celle de ses enfants.
Elle est princesse, point. Sarah.
Etre mère, ce n'est pas être un instrument de transmission de semences.
Etre mère, ça passe par la délivrance du poids du père, le sien propre, et celui de ses enfants. Etre mère, c'est
aussi être délivrée du poids des enfants.
A notre époque où l'enfant est souvent roi, où bien des mères se croient obligées de satisfaire toutes les volontés
de leurs enfants, et même de les prévenir, il faut peut-être le rappeler: être mère, c'est d'abord renoncer à être la
princesse de son enfant.
Sarah ne sera pas la Saraï de son fils Isaac.
Musique : Louis Capart - CD "Patience". Portrait de femme à sa fenêtre Plage 6. Keltia Musique KM CD 13
Etre mère n'est pas un passage obligé pour être femme. C'est plutôt l'inverse.
Etre vraiment mère procède d'un désir de vie, pas d'un impératif naturel ou social.
En disant cela, je ne peux m'empêcher de penser à toutes celles qui ont été instrumentalisées par un homme
propriétaire. Qui se sont réfugiées dans le seul rôle qui semblait leur accorder un peu de reconnaissance, celui de
mère. Qui se sont trouvées coincées dans l'impasse d'une maternité censée leur apporter de la valeur, alors
qu'elle ne faisait que de les réduire à un statut d'objet. Etre mère pour garder un peu de semblant d'affection,
chez un compagnon volage… le plus souvent, ça n'occasionne pas de drame. C'est normal : ça ne remet rien en
cause dans notre société où maternité et paternité constituent un "droit à posséder". Mais, parfois, sur fond
d'alcool, de drogue, de violence ou de fragilité psychologique il arrive que ces situations virent au tragique: la
mort d'un enfant qui n'y était pour rien. La logique de l'objet a alors été poussée jusqu'au bout.
Le chemin vers la paternité et vers la maternité est un chemin à la fois conjoint et singulier.
Sarah et Abraham reçoivent séparément la promesse d'alliance. Deux bénédictions.
Et tous deux réagissent de la même façon : ils rient. "Abraham rit et dit en son cœur: naîtrait-il un fils à un
homme de plus de cent ans? Et Sarah, âgée de 90 ans? Accoucherait-elle?" (Genèse 17).
Et Sarah, de même, rit: "Maintenant que je suis usée, aurais-je encore des désirs? Et mon mari aussi est vieux"
(Genèse 18).
"Et pourtant, l'Eternel intervient en faveur de Sarah, comme Il l'avait dit" (Genèse 21:1) Elle devient enceinte et
donnera naissance à Isaac.
Sarah a ri à l'idée d'être enceinte! Trop vieille, trop usée, trop fanée, trop stérile! Et son mari aussi.
L'image qu'elle a d'elle-même est entièrement soumise à l'idée qu'elle a d'une femme qui n'a pas pu avoir
d'enfant et qui de toute façon est ménopausée. La Bible dit joliment : "Sarah avait cessé d'avoir ce qu'ont les
femmes". Elle se considère comme inutile, comme ayant été incapable de donner un fils à Abraham, comme
réduite, maintenant, à une vieille peau desséchée.
Or, avec sa nouvelle identité, lui est donnée une autre vie, fondée sur la confiance et non sur l'évidence des
certitudes. Fondée sur un appel et non sur une fatalité.
"Tu n'es pas réduite à être ce que tu crois être. Tu es appelée à une vie véritable et à un bonheur véritable." Voilà
ce que bénir veut dire.
En dépit de tout, de son âge, de sa stérilité, de son manque de confiance même, Dieu l'appelle à être une élue,
promise à un grand avenir: celle d'être enfant de Dieu.
Musique : Chants juifs pour violoncelle et piano par Sonia Vieder-Atherton. Plage 3. RCA Victor
74321425332
Sarah ! De quoi as-tu été féconde, au juste ?
Ton futur semblait inscrit au plus profond de ton corps : stérile à jamais.
Une parole t'a délivrée d'un futur stérile, pour te faire naître à une véritable fécondité.
Sarah a été féconde d'une parole autre que la sienne, autre que celle de l'évidence des apparences. Elle a été
féconde d'un nom reçu d'un Autre qu'elle-même, féconde d'une vocation qui faisait d'elle une fille de Dieu,
appelée à exister autrement qu'à travers sa stérilité, son âge, son inutilité, ses contre-performances.
Vous savez, ça été le cas de plein de femmes dans la Bible… Rebecca la belle-fille de Sarah, et puis Rachel la
belle-fille de Rebecca, et de génération en génération. Là où la maternité est comme retenue, suspendue à une
parole qui doit prendre le temps de mûrir.
Jusqu'à Marie, elle aussi enceinte d'une parole.
Comme si la maternité relevait d'un chemin qui est toujours à faire. A chaque génération. Répétition incessante,
où toujours le poids du biologique menace la fragilité –pourtant essentielle- de la parole.
Comme pour nous rappeler que notre identité relève plus d'une parole enfantée que d'une production biologique.
C'est ce que dit l'apôtre Paul (Romains 9) : "Ce ne sont pas les enfants de la chair qui sont enfants de Dieu,
mais ce sont les enfants de la promesse qui sont comptés comme descendance".
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Un dernier clin d'œil: le mot ménopause vient du verbe méno, demeurer et pausis, la pause, au sens de faire une
pause, faire cesser une guerre, se reposer. Peut-être que c'est parce qu'elle est en ménopause, qu'elle n'a plus rien
à conquérir, qu'elle a mis une croix sur sa rentabilité féminine, c'est peut-être pour ça que Sarah peut simplement
accueillir la grâce que lui fait Dieu: elle n'est plus en activité génitale (comme disent les gynécologues), elle est
en disponibilité de grâce.
Je ne suis pas en train de dire que la stérilité qui fait souffrir tant de femmes et d'hommes est la conséquence
d'un manque de disponibilité à la grâce.
On ferait fausse route à entendre le texte biblique de cette façon. Ce serait même pervers.
Je crois qu'au travers de Sarah, la Bible veut nous dire tout autre chose.
Sarah nous rappelle que dans l'être humain, il y a une part qui demeure soustraite à toute logique comptable, qui
reste indéchiffrable… Il y a en l'être humain, une part imprenable, un sujet qui demeure hors de prise du pouvoir
des hommes et du temps.
Ce que me dit Sarah, c'est qu'il ya une part en chacun qui est imprenable et que nul ne peut y accéder que Dieu.
Cette part ultime et secrète, ne se superpose pas à mon image telle que le monde la perçoit ou la dicte. Il y a une
part qui est un "je suis" ultime, qui reste toujours à venir. Cette part qui est vraiment vivante en nous, se lève et
se relève, à chaque fois qu'une parole de bénédiction vient au devant d'elle.
Nous avons tous et toutes des désirs auxquels il nous faut renoncer, sur lesquels il nous faut faire une croix.
C'est notre lot d'humanité. La stérilité, c'est toujours une souffrance, qu'il faut toujours tenter de soulager. Par les
techniques médicales, tant qu'elles ne nous instrumentalisent pas trop, ni nous ni nos enfants. Par l'adoption, tant
qu'elle n'est ni un pis-aller ni un faire-valoir. Par l'acceptation. Qui peut être résignation douloureuse ou
ouverture à un autre avenir.
Nos deuils et nos limites, on peut les vivre sous le regard des autres et sous notre propre regard comme une
infamie ou une injustice.
Mais on peut aussi les vivre sous le regard de Dieu comme une invitation à la liberté. A une vie féconde, là où
on ne l'attendait pas. A une ouverture sur des possibles qu'on n'aurait pas soupçonnés. Une vie peut être
fécondée par une parole, ailleurs que dans un utérus!
Espérer, ce n'est pas attendre quelque chose que l'on sait, c'est attendre ce qu'on ne connait pas.
Musique : Schubert. Sonate Arpeggione. Plage 1. Calliope CAL 3614
A quoi tient une identité de femme ? A un rôle de mère, à un rôle d'épouse, ou à autre chose ? A quoi tient une
identité d'homme ? A un rôle, à une fonction, ou à autre chose ?
Notre identité tient d'abord à une parole qui vient vers nous, qui nous arrive. Et nous donne d'exister au-delà de
tout rôle, toute fonction, toute qualité.
Ce qui arrive à Sarah, c'est une lumière qui vient d'ailleurs pour mettre dans ses yeux autant de petites étoiles,
innombrables, celles de l'espérance.
Ce qui arrive à Sarah, c'est qu'elle se laisse visiter par une parole qui vient prendre vie en elle.
C'est ce qui arrive chaque fois que tu te laisses traverser par un souffle qui de toute détresse peut faire une
promesse.
C'est ce qui t'arrive chaque fois que tu te laisses trouver par Celui qui te connaît et te reconnaît au-delà de toute
apparence, chaque fois qu'une parole te fait passer de la mort à la vie. Sarah vient nous le redire à toutes et à
tous : "Tu n'es pas réduit à être ce que tu crois être. Tu es appelé à une vie véritable et à un bonheur véritable."
Que ces mots soient pour nous tous, bénédiction.
Amen !
Musique : Schubert par Alfred Brendel. 3 Klavierstücke D946 Plage 6 vol 4. Philips 422075-2
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