histoire des transports et de la mobilité

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histoire des transports et de la mobilité
Histoire des transports et de la mobilité
Entre concurrence modale et coordination
(de 1918 à nos jours)
Transport and mobility history
Between modal competition and coordination
(1918 in our days)
Gérard Duc, Olivier Perroux,
Hans-Ulrich Schiedt, François Walter (dir.)
Histoire des transports et de la mobilité
Entre concurrence modale et coordination
(de 1918 à nos jours)
Transport and mobility history
Between modal competition and coordination
(1918 in our days)
Collection Colloquium
Éditions Alphil-Presses universitaires suisses
© Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2014
Case postale 5
2002 Neuchâtel 2
Suisse
www.alphil.ch
Alphil Distribution
[email protected]
ISBN 978-2-940489-54-1
La présente publication provient d’une collaboration entre la Maison de
l’histoire de l’Université de Genève (Olivier Perroux et Gérard Duc) et
­
ViaStoria, Zentrum für Verkehrsgeschichte, Universität Bern (Hans-Ulrich
Schiedt).
Elle est issue du Colloque international « Histoire des transports et de la
mobilité. Entre concurrence et coordination (1918 à nos jours) » qui s’est
déroulé à l’Université de Genève les 24 et 25 novembre 2011. Ce colloque
a été organisé par la Maison de l’histoire de l’UNIGE en partenariat avec
ViaStoria, Zentrum für Verkehrsgeschichte, Universität Bern, le Laboratoire
de sociologie urbaine (LaSUR) de l’École polytechnique fédérale de Lausanne
(Prof. Vincent Kaufmann) et l’Observatoire universitaire de la mobilité (OUM)
de l’UNIGE (Prof. Giuseppe Pini).
Photographie de couverture : XXXXX
Responsable d’édition : Sandra Lena
Introduction et présentation de l’ouvrage
Les multiples problématiques
de la coordination de la mobilité
Gérard Duc, Université de Genève
Olivier Perroux, Université de Genève
Hans-Ulrich Schiedt, ViaStoria, Université de Berne
La décision d’organiser en novembre 2011 à Genève un colloque
international sur la mobilité des marchandises et des personnes partait
d’un questionnement très actuel. Les problématiques liées à celle-ci
figurent en effet au premier plan des agendas politiques de tous les
pays occidentaux. Elles concernent non seulement la planification et
les solutions à apporter à une croissance exponentielle de la mobilité
qui ne va pas décroître ces prochaines décennies, aussi bien au niveau
des longues distances (régionales, nationales et internationales) qu’au
niveau des espaces urbains, mais intègrent également les politiques
d’aménagement du territoire ou de lutte contre les pollutions atmosphérique et sonore. Nous sommes partis du postulat qu’en matière
de mobilité les historiens avaient leur mot à dire, au même titre que
les aménagistes, les géographes, les sociologues ou les économistes :
la situation actuelle et les réponses apportées à ces problématiques
complexes, faisant intervenir des acteurs aux objectifs contradictoires,
ont un solide ancrage historique 1.
C’est ce que Gijs Mom a signalé comme « the increasing efforts to rethink the
u­ se­fulness of history for current problems of mobility ». Cf. Mom Gijs, « Historians
Bleed Too Much : Recent Trends in the State of the Art in Mobility History », in Norton
Peter, Mom Gijs, Millward Liz, Flonneau Mathieu (eds.), Mobility in History. Reviews
and Reflections, Neuchâtel : Alphil, 2011, p. 20.
1
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Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
Le prisme de la politique suisse des transports
S’intéresser plus particulièrement à la coordination de la mobilité,
actuellement considérée comme une tentative d’optimalisation de l’utilisation des différents modes de transports dans une perspective, non
pas uniquement économique, mais également sociale et écologique 2,
répond à l’un des aspects les plus médiatisés de la politique suisse des
transports. Le percement des nouvelles transversales alpines ferroviaires (Loetschberg et Gothard), décidé au début des années 1990,
et les mesures fiscales favorisant le transfert modal de la route au rail
(redevance poids lourds liée aux prestations, soit RPLP), adoptées une
décennie plus tard, ont propulsé la Suisse au premier plan des pays
œuvrant en faveur de la coordination des transports m
­ archandises.
Ces deux interventions comptent parmi les faits les plus visibles de
ces dernières années en matière d’options de régulation rail-route
et seule la pratique – une fois le tunnel de base du Gothard mis en
service, vraisemblablement fin 2016, le Loetschberg de base fonctionnant depuis fin 2007 – pourra nous renseigner sur leur efficience réelle.
Mais le constat dressé par l’association Initiative des Alpes, destinée
à protéger l’espace alpin contre le trafic de transit motorisé, est pour
l’instant mitigé 3.
Les préoccupations liées au transport multimodal 4 ne se cantonnent
cependant nullement au cas helvétique. Ailleurs en Europe, elles
apparaissent avec une acuité redoublée ces dernières années. En 2004,
Hans-Liudger Dienel posait la problématique d’un ouvrage collectif
Keller Peter, « Intermodality of Network Points : The Planners’View », in Dienel
Hans-Liudger (ed.), Unconnected Transport Networks. European Intermodal Traffic
Junctions 1800‑2000, Frankfurt a. Main : Campus, 2004, p. 37.
3
Cf. notamment les communiqués de presse récents de cette association sur
http://www.alpeninitiative.ch /web/initiative-des-alpes/presse/communiques_de_presse.
html?topic=c87c7755-f027-4c7a-ab67-29a6947bf9f9 (site consulté le 15 octobre 2012).
4
La définition des termes « transport intermodal », « transport combiné » et « transport
multimodal » a été établie en 2001 conjointement par l’Organisation des Nations Unies
(ONU) et la Commission européenne (CE). Le premier se réfère à un transport de
marchandises qui transite successivement par au moins deux modes différents sans que
les marchandises elles-mêmes ne doivent changer d’unité (soit conteneurs, soit poids
lourds routiers) ; le deuxième désigne un transport intermodal dont la majeure partie
du trajet se fait par rail ou voie d’eau, seuls les trajets initial et final – aussi courts
que possibles – se faisant par la route ; le troisième se réfère à un transport quel qu’il
soit qui emprunte au moins deux modes de transport. Cf. Schmidt Michael, « Inter­
modal Junctions in EU Transport Policy & Research », in Dienel Hans-Liudger (ed.),
Unconnected Transport…, p. 51. Dans cette introduction, nous tâchons, lorsqu’il est
possible, de distinguer les trois termes.
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8
Introduction et présentation de l’ouvrage
paru dans le cadre du programme européen COST-340 Towards a
European Intermodal Transport Network : Lessons from History en ces
termes :
« […] we are investigating why responsible actors in transport
planning were so late in realizing the value of good intermodal inter­
faces at transport junctions for the economic development of public
transport systems. » 5
Présentes au niveau des États et des transports continentaux, les tentatives de coordination de la mobilité sont également à l’œuvre à l’échelon
inférieur des régions ou des localités, favorisées par la ­résurgence ou
la réorganisation des réseaux de transports en commun (trams, métros,
RER) et la généralisation de politiques urbaines de mobilité multimodale
(construction de parkings Park and Ride en périphérie des agglomérations
et aux abords des gares) 6. À nouveau, ces politiques, visibles en Suisse,
le sont également en Europe. Si l’on manque encore du recul nécessaire
pour poser un bilan objectif de ces tentatives de coordonner la mobilité 7,
une chose paraît certaine : transversales alpines et RPLP – deux projets
sur lesquels le peuple suisse a dû se prononcer – et résurgence des transports en commun d’agglomération – des objets également soumis au vote
lors de plusieurs scrutins cantonaux voire municipaux – ont contribué à
faire de la mobilité multimodale une thématique largement débattue au
sein de la société civile suisse.
Ces éléments récents de coordination de la mobilité, qui obéissent
certes à de nouveaux impératifs sociétaux, comme l’accroissement
de la mobilité pendulaire, l’engorgement des axes de trafic routier et
les effets environnementaux néfastes que celui-ci génère, l’apparition de conurbation induisant des problématiques de mobilité interne
nouvelles, ainsi que la mise sur pied de solutions techniques efficaces
réduisant les désavantages des transports intermodaux, notamment
pour le fret, ne signifient aucunement que les périodes antécédentes
ont été exemptes de coordination. Celle-ci est aussi ancienne que la
Dienel Hans-Liudger, « Why so late ? Questions concerning Intermodality of Transport Junctions », in Dienel Hans-Liudger (ed.), Unconnected Transport…, p. 11.
6
Au printemps 2012, l’Association transports et environnement (ATE), association
helvétique promouvant une politique des transports respectueuse de l’environnement,
a consacré un dossier à l’extension des réseaux de tramways au sein de plusieurs villes
helvétiques. Cf. « De nouveaux trams et trains urbains partent à la conquête du pays »,
ATE Magazine, n° 2, 2012, p. 8‑18.
7
Pour l’ATE le bilan est d’ores et déjà mitigé. L’extension des réseaux de transport en
commun arrive trop tard et parvient difficilement à contrecarrer une mobilité qui fait
encore la part belle à l’automobile.
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Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
c­ oexistence de deux modes de transports également performants et c’est
là une motivation majeure qui nous a guidés dans l’organisation de ce
colloque. Si aujourd’hui priment des impératifs environnementaux ou
d’aménagement du territoire, dès les années 1920 et la montée de l’automobilisme dominait la nécessité d’organiser un marché soumis à forte
concurrence et de protéger les investissements massifs c­ onsacrés depuis
le siècle précédent aux chemins de fer. On est là dans la ­multitude des
facettes liées à la coordination de la mobilité.
Un champ d’étude qui se renouvelle
En partie grâce au COST-340, le champ de l’histoire des transports a connu depuis quelques années une résurgence associée à un
renouvellement de ses problématiques. L’émergence sur le devant de
la scène médiatique et politique des problèmes liés à la mobilité n’est
pas étrangère à ce regain d’intérêt. En Suisse, celui-ci s’est traduit par
la parution, depuis 2006, sur un rythme bisannuel, de trois recueils
consacrés à l’histoire des transports 8. Au niveau international, c’est
­
dans le sillage de l’association Transport, Traffic and Mobility (T2M),
fondée en 2003, que se situent les changements les plus évidents relatifs
aux questions liées à l’histoire des transports et le glissement du champ
d’étude vers l’histoire de la mobilité 9. Dans l’introduction d’un ouvrage
récent s’interrogeant sur les principaux éléments qui distinguent
histoire des transports et histoire de la mobilité, Mathieu Flonneau et
Vincent Guigueno écrivent :
« Construit selon le découpage des modes – terrestre, maritime,
aérien – ou des infrastructures, l’histoire des transports analyse l’offre
des entreprises, son cadre juridique, sa régulation par les pouvoirs
publics, alors que l’histoire de la mobilité s’orienterait plus volontiers
vers les pratiques des agents, les controverses et les conflits d’usage de
l’espace public, en particulier de l’espace urbain. Le principal acquis
Revue suisse d’histoire, vol. 56, n° 1, 2006 (numéro spécial consacré à l’histoire
des transports) ; Traverse, n° 1, 2008 (numéro spécial Transport et développement
économique) ; Schiedt Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria,
Schwinges Rainer C. (dir.), Verkehrsgeschichte/Histoire des transports, Zurich : Chronos,
2010, 467 p.
9
Trois Yearbook de T2M faisant le point sur l’état de la recherche sont parus à ce jour.
Cf. Mom Gijs, Pirie Gordon, Tissot Laurent (eds.), Mobility in History. The State of the
Art in the History of Transport, Traffic and Mobility, Neuchâtel : Alphil, 2009, 260 p. ;
Mom Gijs, Norton Peter, Clarsen Georgine, Pirie Gordon (eds.), Mobility in History.
Themes in Transport, Neuchâtel : Alphil, 2010, 291 p. ; Norton Peter, Mom Gijs,
Millward Liz, Flonneau Mathieu (eds.), Mobility in History…, 162 p.
8
10
Introduction et présentation de l’ouvrage
de ce décloisonnement disciplinaire est à ce jour la “démodalisation”
de l’intérêt porté aux transports. Dorénavant des thèmes transversaux
[…] doivent ordonner en priorité les études. » 10
Gijs Mom, l’un des principaux animateurs et observateurs du
renouvelle­ment de ce champ d’étude, par ailleurs vice-président de T2M
après avoir présidé l’association de 2003 à 2009, mentionne de son côté
la relative importance numérique des communications adoptant une
perspective multimodale lors des conférences annuelles de T2M 11, tout
en posant quelques bases à un programme de recherche en histoire de
la mobilité, dont les maîtres mots seraient interdisciplinarité, approches
transnationale et multimodale 12.
L’étude de la coordination de la mobilité des marchandises et des
personnes, par l’approche multimodale qui doit la guider, la large part
qu’elle donne à l’analyse des conflits nés de l’apparition de nouvelles
formes et de nouveaux besoins de mobilité, et la fréquence et l’ampleur
des interventions provenant de tous les acteurs dans la construction de
solutions (politiques, gestionnaires de réseau, utilisateurs), s’intègre
dans ces nouvelles thématiques. La vingtaine de contributions que
nous avons rassemblées dans cette publication provient majoritairement d’historiens, mais pas uniquement. L’ouvrage est partagé en six
chapitres, témoignant de la multitude des définitions que les auteurs
ont données au concept de coordination de la mobilité. Nous offrons
ci-après un aperçu des contributions en suivant l’ordonnancement des
chapitres.
Présentation des contributions
Coordination de la mobilité internationale
Dès lors qu’elle emprunte une infrastructure, la mobilité
exige un effort de coordination entre les différentes administrations – publiques ou privées – qui la gèrent. L’exemple des chemins
de fer est ­particulièrement équivoque des difficultés inhérentes à
Flonneau Mathieu, Guigueno Vincent, « Introduction. De l’histoire des transports
à l’histoire de la mobilité ? Mise en perspective d’un champ », in Flonneau Mathieu,
Guigueno Vincent (dir.), De l’histoire des transports à l’histoire de la mobilité ?,
Rennes : Presses universitaires de Rennes, p. 19.
11
Dernières statistiques dans Mom Gijs, « Historians Bleed Too Much… », p. 25.
12
Mom Gijs, « Inventer et établir l’histoire de la mobilité : aux origines d’un changement
de paradigme », in Flonneau Mathieu, Guigueno Vincent (dir.), De l’histoire des
transports…, p. 34‑37. Cf. également, du même auteur dans le présent ouvrage,
« Transnational Coordination History : A Plea for a Cultural Turn ».
10
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Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
ce type ­
d’exercice. Construites, puis exploitées majoritairement par
des compagnies privées, les lignes de chemin de fer n’ont pas été cette
infras­tructure que certains précurseurs avaient imaginée libre d’accès.
Rapidement, une coordination entre administrations ferroviaires a dû
être initiée afin de permettre un trafic direct – aussi bien marchandises
que voyageurs – entre les réseaux d’un même pays. Puis, la même
problématique s’est transposée au niveau international : comment faire
en sorte que marchandises et voyageurs puissent transiter d’un pays à
l’autre sans rupture de charge, aussi coûteuse que peu pratique ? Durant
l’entre-deux-guerres, la même question s’est posée au niveau de la
mobilité routière, où des organismes internationaux ont permis l’uniformisation des législations et des standards et facilité l’avènement du
transport routier international.
En mettant en parallèle deux époques, celle du tournant du siècle
et celle de l’après Seconde Guerre mondiale, la contribution de
Martin Schiefelbusch offre un éclairage sur l’attitude des acteurs
clés dans la coordination de la mobilité ferroviaire internationale des
personnes. Pour la première période, l’auteur mentionne l’absence
d’association internationale susceptible de régler la coopération et le
rôle que va prendre, dès les dernières années du xixe siècle, l’Association des administrations ferroviaires allemandes (Verein deutscher
Eisenbahnverwaltungen), qui offre la particularité de regrouper en
son sein des compagnies autres qu’allemandes ou austro-hongroises.
En matière de trafic voyageurs longue distance, les efforts de coordination à l’échelle européenne mènent à l’introduction, dès 1884,
d’un système tarifaire commun aux administrations membres de
l’association faîtière allemande, ainsi qu’au développement des
célèbres trains de luxe de la Compagnie Internationale des WagonsLits et des grands Express Européens, fondée en 1874 par le Belge
George ­Nagelmackers.
Durant la Belle Époque, les efforts de coordination internationale
entre administrations ferroviaires se font au sein d’un marché du transport en situation de monopole. Dès l’entre-deux-guerres, le contexte
évolue avec la croissance de l’automobilisme. Le rail redoute la
remise en question de sa domination et les années 1930 voient partout
émerger les premières tentatives de coordination entre le rail et la route
(cf. la partie « Coordination de la mobilité dans un espace national »).
En Suisse, le rejet en votation populaire (1935) de la convention de
mai 1933, qui proposait un partage du trafic entre le rail et la route,
est passablement traumatisant pour les Chemins de fer fédéraux (CFF),
12
Introduction et présentation de l’ouvrage
soumis à une situation financière difficile 13. Analysant les multiples
raisons de la coopération des CFF avec la Reichsbahn pour le trafic international des marchandises durant la Seconde Guerre mondiale, l’article
de Gilles Forster insiste sur ce passif d’avant-guerre. À la concurrence
de la route – qui disparaît au début de la guerre, en même temps que les
combustibles liquides désormais réservés à l’armée –, l’auteur ajoute
la présence des axes contournant la Suisse – dont le Brenner – et les
projets de développement du réseau fluvial ou ferroviaire à voie très
large portés par les dirigeants du Reich pour expliquer la croyance de
la direction des CFF et des autorités « en la fiction d’une concurrence
nécessitant de défendre la place des liaisons suisses ». De là découle
une coopération sans faille avec la Reichsbahn et l’établissement d’une
coordination internationale des transports marchandises que l’auteur
appelle la « stratégie de la double voie » : soit le Brenner, intégré au
Reich pour le transport des armes et des troupes, et le Gothard, en territoire neutre, pour le transport de l’approvisionnement.
Pour les chemins de fer, l’après-guerre marque l’avènement définitif
de ce nouveau concurrent qu’est l’automobile. La contribution de
Sébastien Gardon montre qu’au niveau des instances internationales,
la route paraît d’autant plus armée pour traiter d’égal à égal avec le
rail que depuis les années 1920 elle dispose, au sein de la Société des
Nations (SdN), d’un Comité spécial d’étude de la circulation routière.
Ce comité, rebaptisé Comité permanent de la circulation routière
en 1927, s’occupe notamment de l’uniformisation des codes de la
­circulation routière et est intégré au sein de la Commission consultative et technique des communications et du transit, qui s’intéressait
auparavant principalement au transport ferroviaire, fluvial ou maritime.
Mais ce n’est certes pas un hasard si ce comité se forme au moment
où Gardon note un changement de paradigme et que « la question du
transit et des communications passe […] d’un enjeu de contrôle des
déplacements individuels – notamment entre pays – à celui d’un soutien
à la mobilité comme support du développement industriel et économique
des nations ». Une fois réglés les aspects techniques et juridiques de la
coordination routière transnationale au sein du comité de la SdN et des
groupes de travail de l’ONU qui lui ont succédé dès 1945, on comprend
que, face à la souplesse de l’automobile, les parts de marché dévolues
au rail aient subi un recul accentué, ce d’autant plus que le réseau
Kirchhofer André, Stets zu Diensten – gezwungenermassen ! Die Schweizer Bahnen
und ihre « Gemeinwirtschaftlichkeit » für Staat, Wirtschaft und Bevölkerung, Bâle :
Schwabe, 2010, p. 254-264.
13
13
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
routier longue distance européen se constitue et s’interconnecte dès les
années 1950 14.
Schiefelbusch insiste également sur le fait que les freins mis par les
administrations ferroviaires nationales elles-mêmes dans l­ ’établissement
d’une collaboration internationale ont en partie contribué à diminuer
les parts de marché des chemins de fer dans le trafic intra-européen.
Certains exemples sont symptomatiques. Alors même que la mobilité
de personnes longue distance et le trafic de containers sont généralement considérés comme des marchés potentiels pour le rail, ils ne
cessent d’être soumis à réévaluation par des administrations ferroviaires
qui ne voient pas forcément la longue distance internationale comme
un segment porteur. L’auteur prend l’exemple des trains Trans Europ
Express (TEE) développés dès les années 1950. Deux décennies plus
tard, la fermeture des premières lignes TEE intervient au moment où
les compagnies ferroviaires nationales développent la grande vitesse
domestique, que ce soit en Allemagne, en France ou en Angleterre.
Le constat est sévère : même si l’on note certaines convergences dans
la mobilité ferroviaire longue distance des personnes, Schiefelbusch
mentionne que « […] compared to the fast development of international
transport by other modes, the results achieved in the rail sector seem
less impressive ».
Le bilan tiré par Michèle Merger, dont la contribution couvre
plus d’un demi-siècle de tentatives d’établissement de l’intermodalité
rail-route dans le trafic marchandises européen, n’est guère différent.
Définissant plusieurs périodes, l’auteur identifie pour chacune d’elles
les freins à la généralisation du transport combiné. Ainsi, le « foisonne­
ment d’initiatives et des techniques » a-t-il retardé l’émergence d’un
système technique uniforme durant les années 1930 à 1970, alors que
les promesses de revitalisation du secteur ferroviaire émanant de la CE
dès le milieu des années 1970 n’ont pas toujours été suivies d’effets.
Au final, le constat que le transport combiné n’assumait que 9 % de
tous les transports de fret européen au tournant du siècle est expliqué
en grande partie par le « cadre national » qui a dominé « la conception
initiale des réseaux ferroviaires européens ». Cet élément a entraîné
des choix techniques différents qui viennent compliquer l’avènement
d’une coordination du transport combiné à l’échelle du continent.
À cela s’ajoutent d’autres freins, comme la priorité accordée au trafic
Voir notamment Mom Gijs, Tissot Laurent (eds.), Road History. Planning, building
and use, Neuchâtel : Alphil, 2007, 207 p.
14
14
Introduction et présentation de l’ouvrage
voyageurs sur un réseau partagé par les deux types de mobilité, ou les
caractéristiques propres à l’industrie européenne, qui exigent de très
nombreux flux de transport en petite quantité, ce qui avantage la route.
Coordination de la mobilité dans un espace national
En 1934, Paul Wohl et A. Albitreccia ont établi, pour le compte de
la Chambre de commerce internationale, un rapport de près de cinq
cents pages intitulé La route et le rail dans quarante pays 15. C’est
précisément durant l’entre-deux-guerres que la concurrence entre le
rail et l’automobile devient prégnante et que les premières solutions de
coordination sont pensées, et cela dans la plupart des pays européens.
Une partie des communications de cette troisième partie s’arrêtent sur
l’entre-deux-guerres, témoin de la première vague de tentatives de structuration du secteur des transports. Analysant le cas hongrois, Gàbor
Szalkai n’omet cependant pas de mentionner l’importance souvent
sous-estimée de la traction animale : ceci est particulièrement vrai en
Hongrie pendant la Grande Crise où l’on assiste à une résurgence de ce
mode de transport trop vite enterré et qui devient, en quelques années,
le « nouvel ennemi public » du rail, selon les termes mêmes de l’auteur.
Le chapitre d’Anette Schlimm, consacré aux réflexions sur la
coordination rail-route menée au sein de deux commissions gouvernementales britanniques durant l’entre-deux-guerres, présente en
préambule le synchronisme du débat sur la concurrence modale
dans la majorité des pays occidentaux, mais remarque également la
­ressemblance des diagnostics posés et des solutions proposées. En
Grande-­
Bretagne, le travail des commissions aboutit au Road and
Rail Traffic Act de 1933 qui vise à abolir la concurrence entre modes
de transport en favorisant la collaboration et le partage du trafic. Les
communications de Bernd Kreuzer (cas autrichien) et de Szalkai
confirment cette interprétation. Aussi bien en Grande-Bretagne, qu’en
Autriche et en Hongrie, la solution préconisée par les experts aboutit à
une division des tâches et à un partage modal du trafic en 1933, similitude temporelle parfaite bien qu’en grande partie due au hasard 16.
Wohl Paul, Albitreccia A., La route et le rail dans quarante pays, Tours : Arrault
et Cie, 1934, 499 p. et tableaux. Pour un commentaire de ce rapport, cf. Larroque
Dominique, « Le rail et la route », Documents pour l’histoire des techniques, n° 16,
2e semestre 2008, p. 198‑200.
16
À noter une concordance également avec le cas helvétique : une convention est
signée en mai 1933 entre les CFF et les associations représentant les entreprises de
transport routier de marchandises pour un partage du trafic. Soumise à un référendum,
la convention est rejetée par le peuple suisse en 1935.
15
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Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
Schlimm fait appel à la notion de social engineering pour expliquer
cette tendance lourde qui traverse la majorité des États sans qu’il n’y
ait de synchronisation entre eux. En Grande-Bretagne les experts,
majoritairement des praticiens du transport, diagnostiquent la crise,
provoquée essentiellement par une dynamique de modernité et, tout
en considérant celle-ci comme éminemment bénéfique, essaient de
maintenir l’ordre existant. Ces social engineers, épris d’efficience
économique, ayant une haute idée de ce que doivent être l’intérêt
général et le progrès, tentent ainsi de restreindre la dynamique de
modernité à quelques zones (par exemple celles où la concurrence
modale est acceptée). Ailleurs la coordination, fondée sur une base
rationnelle (division des tâches et c­ oopération), doit prédominer. Une
analyse des biographies des membres des commissions agissant au
sein des autres pays pourrait confirmer cette hypothèse.
Pour sa part, Kreuzer insiste sur la politique ambivalente du
gouverne­
ment autrichien de l’entre-deux-guerres en matière de
coordination des transports : d’un côté, les autorités fédérales tentent
d’imposer des mesures légales afin de maintenir la prédominance d’un
secteur ferroviaire en situation délicate au lendemain de l’éclatement de
l’empire austro-hongrois ; d’un autre côté, aussi bien l’opinion publique
que certains experts gouvernementaux et des milieux de l’économie sont
favorables à une augmentation massive des investissements routiers,
le transport par camion ou autocar étant considéré comme plus efficient,
moins cher et plus rapide. Cette ambivalence explique que la Loi sur
les transports routiers promulguée par Vienne en 1933 et réservant aux
chemins de fer le transport marchandises longue distance ne sera jamais
respectée par les transporteurs routiers. La loi est supprimée en 1937,
mettant fin à toute tentative de coordination légalement imposée entre
la route et le rail.
Le débat hongrois (Szalkai) dénote également une défense des
intérêts ferroviaires, soutenus par la classe politique et l’économie.
Dans un pays à l’infrastructure routière encore limitée durant l’entredeux-guerres (sur les 26 800 kilomètres de routes que compte le pays,
un petit millier est asphalté), la concurrence intermodale se pose
pourtant avec autant d’acuité qu’ailleurs et on note même une précocité
dans l’élaboration d’une coordination à l’avantage du rail. Dès 1922, le
transport par camion est autorisé pour les petites distances, le trafic sur
les longues distances demeurant l’apanage du rail. La mobilité de la fin
des années 1920, marquée par une forte croissance de l’automobilisme,
demeure toutefois dominée par le rail, florissant, qui monopolise 73 %
de tous les transports. La Grande Crise interrompt l’ère des bénéfices
16
Introduction et présentation de l’ouvrage
pour le rail et ouvre la voie à une période caractérisée par une coordination intermodale plus équilibrée. En 1933, un accord liant la compagnie
ferroviaire nationale (MÁV) aux transporteurs routiers est signé pour le
trafic marchandises.
La contribution de Gijs Mom consacrée aux Pays-Bas insiste en
premier lieu sur l’auto-organisation, dès les années 1920, du transport routier marchandises au sein de la plupart des pays européens,
secteur composé essentiellement de petits entrepreneurs indépendants.
Aux Pays-Bas, en raison des mauvaises infrastructures routières et des
restrictions de circulation adoptées par maintes provinces ou villes avant
l’uniformisation législative de 1925, les routiers sont considérés comme
de véritables aventuriers. Si la majorité des transports par route se font
sur de courtes distances, dans les années 1930 certains routiers hollandais s’aventurent jusqu’à Brême ou Hambourg ; la législation allemande
de 1936, réservant au rail les transports de plus de 50 kilomètres,
rend ces trajets impossibles. L’immédiat après-guerre est marqué
par la volonté de tous les gouvernements européens de maintenir les
solutions de coordination rail-route établies durant les années 1930.
Alors que les relations de transports ne cessent de s’internationaliser, en partie favorisées par l’uniformisation des standards établie au
sein d’organismes internationaux à l’image du Comité des transports
intérieurs de la Commission économique pour l’Europe des Nations
Unies 17, la confrontation entre la vision anglo-saxonne, basée sur la
primauté des mécanismes du marché, et la vision continentale, faisant
du transport une activité d’utilité publique, aboutit à l’avantage de la
première. Dans la seconde partie de sa réflexion, Mom retrace le rôle
des Pays-Bas – « Trojan Horse of liberalism to the continent » – dans la
remise en question des politiques d’avant-guerre visant à protéger les
intérêts ferroviaires.
Le cas helvétique fait l’objet de deux contributions. La première,
provenant d’Ueli Haefeli, analyse la coordination des transports durant tout le xxe siècle, alors que la seconde, due à Stefan
Sandmeier, pose la focale sur les années 1970 et la Conception
globale suisse des transports (CGST). Haefeli constate que durant
tout le xxe siècle, les autorités fédérales n’ont été contredites qu’à
cinq reprises lors de scrutins populaires concernant la politique des
transports. Or, ces cinq refus concernent tous des objets ayant trait
Sur cet organisme, voir la contribution de Sébastien Gardon dans la partie
« Coordination de la mobilité internationale ».
17
17
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
au domaine particulier de la coordination des transports dont les
principes, depuis le refus de 1935 d’avaliser la convention entre les
CFF et les transporteurs routiers, n’ont jamais reçu l’aval du peuple.
L’auteur analyse les raisons de ce rejet populaire à l’aune des spécificités du système politique suisse (fédéralisme, démocratie directe et
coalition gouvernementale), ainsi que l’espace institutionnel susceptible de faire évoluer la coordination fédérale des transports, modeste
en comparaison i­nternationale.
Dans le même sens, Sandmeier insiste d’emblée sur les inflexions
qu’a pu imprimer la CGST à la politique suisse des transports, malgré
l’échec de la votation de 1988 (55 % de non). De plus, sa contribution démontre la nouvelle définition que la CGST va donner au concept
de coordination des transports. On dépasse désormais le partage du
trafic législativement imposé entre la route et le rail, qui a caractérisé
les politiques de coordination des années 1930 aux années 1950, pour
analyser les problèmes de transport dans une optique systémique. Les
questionnements liés à la coordination des transports sont inséparables
de problématiques sociales, économiques, démographiques, environnementales, politiques plus larges. Par bien des aspects, la CGST, en
recourant aux théories générales des systèmes et aux modélisations
complexes des ingénieurs de l’École polytechnique fédérale de Zurich
(EPFZ), sonne le glas de la conception purement économique et libérale
des transports qui domine les années d’après-guerre et dont l’un des
représentants les plus actifs fut sans nul doute Hans-Reinhard Meyer,
délégué aux questions économiques au Département fédéral des transports et de l’énergie (DFTE) et professeur à l’Université de Berne.
Au-delà, la volonté affichée par le conseiller fédéral Roger Bonvin
(1907‑1982) de confier l’expertise à l’extérieur du DFTE – soit auprès
de l’EPFZ, soit auprès de structures privées –, ne sonne-t-elle pas le
glas de « l’institutionnalisation de l’expertise », notée par Schlimm
pour l’entre-deux-guerres ?
Coordination de la mobilité dans l’espace urbain
Les études historiques sur les transports urbains ont précocement intégré les questionnements propres à l’histoire de la mobilité.
La problématique du transport multimodal et de la coordination se prête
en effet bien à l’espace urbain moderne. Comme le précise Ueli Haefeli
dans sa thèse d’habilitation, le cadre urbain permet, d­ avantage que
le cadre national, de saisir les confrontations nées de l’intervention
d’une nouvelle forme de mobilité, de mettre en relation les formes
­préconisées de circulation avec les processus d­ ’agglomération et de
18
Introduction et présentation de l’ouvrage
suburbanisation propres aux villes de l’après-guerre. La comparaison
de modèles urbains permet également d’analyser la croissance de la
mobilité, sa répartition modale ainsi que ses effets sur les budgets
municipaux 18.
La contribution de Caroline Gallez revient d’abord sur les doctrines
qui ont guidé la coordination entre urbanisme et transports. En matière
d’extension urbaine, le zonage est partout largement utilisé entre 1870
et 1930, ce qui suppose une spécialisation des fonctions au sein de la
ville et une multiplication des mobilités. Dès les années 1960 le zonage,
pourtant soumis à critique, gagne encore en intensité. Il faut attendre les
années 1990 pour que des préoccupations environnementales remettent
« la mixité sociale et fonctionnelle » au centre de la planification urbaine.
L’auteur analyse ensuite comment ces doctrines ont été appliquées sur le
terrain en recourant aux cas des villes de Berne, Genève, S
­ trasbourg et
Bordeaux. Si l’auteur note une évolution similaire des normes pour les
quatre villes – de la « ville automobile à la ville durable » –, elle relève
une mise en place de la planification urbaine de ces trente dernières
années très différente suivant les cas et analyse les hypothèses qui en
expliquent les raisons.
Aurélien Delpirou et Arnaud Passalacqua reviennent sur les échecs
répétés, depuis la fin du xixe siècle, des projets de doter Rome d’un
réseau de transport souterrain (métropolitain). Parmi les nombreuses
raisons qui expliquent qu’aujourd’hui la capitale italienne, malgré sa
taille et sa population, ne dispose que de deux lignes de métropolitain,
les auteurs retiennent les multiples concurrences : transports collectifs
de surface contre transports souterrains ; transports collectifs contre
automobile. Au-delà de cet aspect, ils mettent le doigt sur la difficile
coordination entre « projets de papier », longs à arriver à maturité, et
urbanisation rapide et peu maîtrisée. La coordination entre système de
transport et ville elle-même est ainsi régulièrement manquée. Le cas
romain, aussi exacerbé soit-il, illustre bien un rendez-vous manqué,
visible dans nombre de villes.
Coordination de la mobilité, conflits et groupes de pression
Les conflits relatifs à la mobilité et à ses tentatives de coordination
sont multiples. Ils peuvent être liés à l’exiguïté d’une voirie et d’un territoire qui peinent à accueillir tous les types de transport, aux ­externalités
Haefeli Ueli, Verkehrspolitik und urbane Mobilität. Deutsche und Schweizer Städte
im Vergleich 1950‑1990, Stuttgart : Franz Steiner Verlag, 2008, p. 16‑20.
18
19
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
négatives de certains modes non durables, voire aux distorsions de
concurrence observées entre modes de transport en c­ompétition.
À travers l’histoire, des groupes de pression défendant l’une ou l’autre
sorte de transport se sont le plus fréquemment chargés de mettre en
évidence les défauts – supposés ou vérifiés – du système de transport.
La multiplication actuelle des lobbies liés à la mobilité a ainsi un solide
ancrage historique.
Délaissant la traditionnelle confrontation modale rail-route,
Wulfhard Stahl et Peter Cox s’intéressent aux conflits entre usagers
de la route, notamment en remettant la bicyclette à la place qui fut
la sienne entre la fin du xixe siècle et la Seconde Guerre mondiale.
D’abord objet de luxe réservé à une classe privilégiée, la bicyclette
se démocratise progressivement durant la Belle Époque jusqu’à
devenir un phénomène massif dès la veille de la Première Guerre
mondiale. En procédant à une relecture des œuvres du juriste
allemand Hermann Ortloff (1829‑1920) et du romancier et philosophe Eduard Bertz (1853‑1931) – précoce lobbyiste de la cause
cycliste –, Stahl met en évidence le débat enflammé qui oppose,
au moment où la bicyclette amorce sa croissance, les tenants d’une
stricte et sévère régulation des usages de la route aux défenseurs d’un
libre accès à l’espace public pour le nouveau mode de locomotion.
Là où le juriste – par ailleurs très critique face à la bicyclette et ses
usages – défend une régulation, si possible internationale, sous l’égide
de l’Union postale universelle et éventuellement un système d’impôt
frappant les utilisateurs de bicyclettes, le défenseur de l’émancipation sociale qu’est Bertz s’en prend aux autres usagers de la route
qui tentent d’exclure les cyclistes. Comme tout nouveau mode de
mobilité destiné à partager un espace non extensible, la déferlante
cycliste – 33 000 engins à Berlin en 1896, 50 000 une année plus
tard – a causé nombre de problèmes sur le partage de l’espace public
au tournant du siècle et les accidents opposant notamment cyclistes
et piétons furent nombreux. Ils mirent sur le devant de la scène la
protection à apporter aux seconds, plus vulnérables.
Centrée sur le cas britannique, la contribution de Cox analyse le
prévisible conflit suivant, celui opposant à nouveau les usagers de
la route au moment de la forte croissance de l’automobilisme durant
l’entre-deux-guerres. Focalisant son propos sur la volonté d’imposer
un feu arrière rouge aux bicyclettes et d’établir des voies cyclables,
l’auteur montre en quoi ce débat sur la sécurité des cyclistes consiste
à c­onsidérer ces derniers – mais également les piétons – comme
des ­obstacles à la motorisation croissante des routes. Le conflit est
20
Introduction et présentation de l’ouvrage
exacerbé, à la fois par le rôle éminent que le gouvernement britannique
entend donner au transport routier motorisé dans l’approvisionnement
du pays, et ce depuis la grande grève de 1926 qui paralysa le transport
ferroviaire, et par la ségrégation sociale qui s’exprime dans l’accès aux
modes de mobilité dès l’avènement de l’automobilisme.
Au moment où la problématique des transports tend à se ­concentrer
– en Grande‑Bretagne comme dans tous les pays occidentaux – sur
les formes de coordination à établir entre le rail et la route (cf. à ce
sujet la partie « Coordination de la mobilité dans un espace national »),
la bicyclette, pourtant le mode de mobilité le plus répandu dans les
années 1920 notamment en milieu urbain, est vouée à des attaques
incessantes. Au-delà, l’article de Cox s’intéresse, à travers l’évolution du discours du Cyclists’Touring Club (CTC), à l’émergence des
cyclistes en tant que communauté organisée en association. Si, à la
fin du xixe siècle, le CTC réunit essentiellement des représentants de
la classe moyenne supérieure intéressés à faciliter leurs déplacements
grâce à un mode de locomotion moderne, la première décennie du
xxe siècle, par la démocratisation de la bicyclette, engage une évolution
sur le long terme, à la fois dans la structure sociale de l’association et
dans ses buts. La CTC connaît d’abord une forte diminution du nombre
de ses membres – que l’auteur oppose à la formidable croissance de
l’Automobile Association fondée en 1905 – et c’est seulement l’aggravation du conflit lié aux usages de la route à la fin des années 1920 qui
inverse la tendance. En même temps, on note un discours plus musclé
provenant de la CTC.
L’émergence d’un lobby routier structuré dans la Suisse des
années 1930 est également au centre de la communication d­ ’Olivier
Perroux et de Gérard Duc. Les auteurs se réfèrent à la théorie de
Wisemann et Peacock, qui postule une tendance de l’État à investir
toujours davantage de secteurs de l’économie, les crises jouant un rôle
d’accélérateur de dépenses non totalement réversible une fois les beaux
jours revenus. Ils démontrent comment, à la faveur de l’augmentation
des dépenses fédérales induites par les deux crises que sont les guerres
mondiales, la Confédération s’ingère de façon de plus en plus évidente
dans la gestion des routes. Cette tendance est simultanée à la structuration d’un lobby routier qui s’organise au niveau fédéral. Celui-ci devient
capable de s’opposer à toute tentative de coordination rail-route qui se
ferait au détriment de la route, en offrant une protection trop marquée
au marché ferroviaire, et milite pour un transfert du domaine routier des
cantons vers la Confédération.
21
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
Coordonner infrastructures de transport
et aménagement du territoire
Même si la planification des transports et l’aménagement du
t­erritoire n’ont jamais été entièrement déconnectés l’une de l’autre, la
tendance à penser la mobilité en termes de flux à organiser entre les
grands centres économiques a maintenu une certaine distance entre
ces deux champs d’activité, dépendant très largement d’administrations différentes. Ainsi c’est seulement ces dernières années que l’on
a redoublé d’efforts afin d’intégrer politiques d’aménagement du territoire et planification des transports 19. La communication de Sandmeier
sur la CGST (cf. la partie « Coordination de la mobilité dans un espace
national ») insiste sur les tensions qui s’expriment entre les principes
des économistes des transports et la vision des planificateurs de l’EPFZ
durant les années 1970.
À vrai dire, cette difficulté à tisser des liens entre les deux domaines
ne provient pas uniquement de la vision, essentiellement libérale, qui
domine les transports durant l’après-guerre, mais reflète également
la représentation négative des années 1960 quant à l’aménagement
du territoire, vu comme une intervention étatique propre aux régimes
autoritaires de type soviétique 20. Au seuil de cette décennie, l’introduction d’un ouvrage de la célèbre collection Que sais-je ? cernait bien
l’étroit carcan au sein duquel l’aménagement du territoire devait encore
se mouvoir :
« […] si une planification rigide est interdite à un régime libéral,
l’anarchie n’est pas nécessairement la loi de ce régime : le problème
concerne les moyens à mettre en action pour surmonter les difficultés
inhérentes au libéralisme. » 21
Depuis lors, les infrastructures de transport et les études sur la
mobilité sont devenues des pendants essentiels de la politique d’aménagement du territoire et par là même un moyen reconnu à mettre en
œuvre afin de résoudre ces « difficultés inhérentes au libéralisme. »
Stead Dominic, « Les politiques des transports et de l’aménagement du territoire
sont-elles vraiment coordonnées ? », Revue internationale des sciences sociales, n° 176,
2003, p. 371‑387.
20
Voir à ce sujet pour le cas helvétique Walter François, Histoire de la Suisse.
Certitudes et incertitudes du temps présent (de 1930 à nos jours), t. 5, Neuchâtel :
Alphil, 2010, p. 130‑131.
21
Delmas Claude, L’aménagement du territoire, Paris : Presses universitaires de
France, 1962, p. 8.
19
22
Introduction et présentation de l’ouvrage
Comme le démontrent les contributions rassemblées dans cette
partie de l’ouvrage, les politiques de coordination entre infrastructures de transport et aménagement du territoire, considérées en tant que
« […] recherche d’une cohérence, d’une concordance et d’une exhaus­
tivité, afin d’obtenir des résultats harmonieux ou compatibles » 22 butent
fréquemment sur deux temporalités divergentes. Les politiques récentes
en matière d’aménagement du territoire doivent en partie se satisfaire
soit d’infrastructures de transport héritées de périodes antécédentes
(xixe siècle ou première moitié du xxe siècle pour le chemin de fer ou
pour les canaux, années 1950‑1960 pour le réseau routier), soit d’un
« cadre de référence » déjà ancien 23.
La communication de Philipp Hertzog compare le succès variable
de deux villes de même taille – Göttingen et Dijon – dans leur tentative
de modifier en leur faveur le tracé des lignes ferroviaires grande vitesse
(LGV) au cours des années 1960‑1970. Dans le cas français, en matière
de planification ferroviaire, certains anciens cadres de référence, privilégiant la ligne droite et des critères de rentabilité économique avant
tout, ont prévalu et mis Dijon à l’écart de la LGV sud-est entre Paris
et Lyon. Ce n’est pas là un jugement de valeur, mais un élément qui
contredit les tentatives de décentralisation, propre à l’aménagement du
territoire en France durant ces années-là. Cette réaction désabusée de
la Chambre de commerce et d’industrie de Dijon, citée par Hertzog,
est ainsi symptomatique d’un manque pressenti dans la coordination entre planification d’infrastructures de transport et aménagement
du ­territoire :
« Le projet de turbotrain, tel qu’il est actuellement envisagé, semble
être parti de l’idée simpliste que la ligne droite est le plus court chemin
d’un point à un autre, sans se poser le problème de l’effet d’une
nouvelle infrastructure sur l’aménagement du territoire. »
En Allemagne, les choses ne se passent guère différemment, si ce
n’est que Göttingen parvient, contre l’avis des ingénieurs-­planificateurs
de la Deutsche Bahn et grâce au soutien du Land de Basse-Saxe qui
dispose de prérogatives en matière d’aménagement du territoire, à
modifier le tracé initialement prévu de la LGV Hanovre-Würzburg.
Stead Dominic, « Les politiques des transports… », p. 371.
Voir à ce sujet, Gallez Caroline, « La cohérence urbanisme-transport : un mythe ? »,
in Gallez Caroline, Kaufmann Vincent (dir.), Mythes et pratiques de la coordination
urbanisme-transport. Regards croisés sur quatre agglomérations suisses et françaises,
Paris : Recherches, 2010, p. 183‑220.
22
23
23
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
L’article de Pierre Tilly, consacré à la coordination des transports
dans la région transfrontalière de Lille, retrace, depuis le milieu du
xxe siècle, la longue maturation d’une intégration entre politique des
transports et aménagement d’un territoire transnational, avec tous
les enjeux supplémentaires que cela implique. L’intérêt est multiple :
dynamiser une région en pleine conversion industrielle, jouer sur des
échelles géographiques différentes – allant de projets régionaux à
l’intégration au sein d’une Europe des transports en pleine mutation
avec le projet de tunnel sous la Manche – et dépasser les logiques
nationales qui, depuis le xixe siècle, ont fait buter les lignes ferroviaires
sur la frontière. Au final, la région transfrontalière lilloise semble offrir
le visage d’une intégration réussie entre planification en matière de
transport et aménagement du territoire. Par rapport à la situation de
Dijon, exclue de la LGV sud-est planifiée dès la fin des années 1960,
Lille, placée plus tardivement à la fois sur les LGV nord et BruxellesLondres, a pleinement bénéficié des avancées de la décentralisation
propre à l’aménagement du territoire en France et de la politique
­ferroviaire européenne.
La troisième contribution de cette partie quitte le mode ferroviaire.
Sandro Fehr retrace la lente maturation d’une conception aérienne
suisse entre 1935 et 1956, en focalisant son propos sur les aéroports
nationaux. L’idée d’aménagement du territoire est sous-jacente à cette
politique, puisque la question se pose durant l’entre-deux-guerres et la
Seconde Guerre mondiale soit du maintien du « triangle d’aérodromes »
Zurich-Bâle-Genève, soit de l’élaboration d’un aéroport fédéral dans
la région centrale de Berne. Deux conceptions s’opposent, l’une
régionale – avec tout l’aspect de concurrence que cela suppose – et
l’autre centralisatrice, visant à donner à la Confédération la primauté
en matière de politique aérienne. Au final, en 1945, l’idée d’aéroport
central est rejetée par les autorités fédérales, alors que se dessine une
politique décentralisée en la matière, en reconnaissant l’existence des
trois grands aéroports actuels, à Zurich, Genève et Bâle. Au milieu
des années 1950, la classification de ces trois aéroports, qui reçoivent
le label d’« aéroports nationaux », est définitivement arrêtée : Zurich
obtient la dénomination d’aéroport intercontinental, Genève et Bâle
celle d’aéroport international.
24
Introduction et présentation de l’ouvrage
Coordonner mobilité et tourisme
Les liens entre tourisme – qui sous-entend un déplacement
physique – et transports ne sont plus à prouver. Dans un pays quadrillé
de lignes ferroviaires à vocation touristique comme la Suisse, une partie
consacrée à la coordination entre cette activité économique fondamentale et la mobilité s’imposait 24.
La lecture chronologique de l’accessibilité des stations de montagne
que nous propose Xavier Bernier témoigne des liens entre transport et
tourisme. Dans la logique de coordination mobilité/tourisme, il fait se
succéder trois étapes qui peuvent se chevaucher en fonction des cas :
dans un premier temps, l’arrivée des chemins de fer dans les vallées
induit la domination de celles-ci sur la montagne qui devient ainsi
périphérie et se dépeuple durant la seconde moitié du xixe siècle. Dans
un deuxième temps, au tournant du siècle, intervient la conquête des
hauts grâce aux chemins de fer de montagne puis aux téléphériques,
avec une mobilité qui évolue peu à peu vers l’automobile à mesure que
le xxe siècle avance. La montagne perd alors son statut de périphérie.
Enfin, le géographe note l’avènement d’un nouveau type de coordination, un « système de mobilités contenues où les dynamiques spatiales
s’inversent pour une maîtrise qui s’opère à nouveau depuis l’aval ».
L’une des illustrations les plus éloquentes de cette nouvelle relation
intermodale entre la vallée et la montagne est Bourg-Saint-Maurice,
en Savoie, relié par TGV aux grandes capitales européennes (Paris,
Londres, Bruxelles) et par un funiculaire à l’importante station touristique des Arcs. Ce modèle de coordination multimodale entre la vallée
et les stations de montagne se renforce depuis le début du millénaire
et est sans doute appelé à se développer ces prochaines années. Dans
certains cas, les stations misent carrément sur une interdiction d’accès
aux voitures. Les fonds de vallée, accessibles par chemin de fer et
autoroute, deviennent ainsi des lieux de rupture de charge, le funiculaire
ou les remontées mécaniques prenant ensuite seuls le relais.
Pour le cas suisse, de nombreuses publications notamment de Laurent Tissot, et
plus récemment de Cédric Humair, établissent le lien entre transport et tourisme.
Cf. notamment pour les publications récentes Humair Cédric, Tissot Laurent (dir.),
Le tourisme suisse et son rayonnement international (xixe-xxe siècles) : « Switzerland,
the playground of the world », Lausanne : Antipodes, 2011, 222 p. ; Tissot Laurent,
« D’une Suisse aimée à la Suisse aimante : tourisme, transport et mobilité dans
l’historiographie économique de la Suisse aux xixe et xxe siècles », Traverse, Zurich,
2010, p. 156‑170 ; Tissot Laurent, « La philosophie du Saint-Gothard, ou la naissance
d’un profil touristique alpin », in Il San Gottardo : dalla galleria di Favre all’Alp
Transit : atti del Convegno internazionale di studi sull transversali alpine svoltosi a
Locarno, il 17‑19 ottobre 2007, Bellinzone : Salvioni, 2009, p. 147‑159.
24
25
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
Si les liens entre tourisme et transports semblent évidents, « la
relation transport/tourisme s’inscrit dans un processus très complexe » 25
et l’un des deux secteurs ne paraît pas mécaniquement entraîner l’autre.
Le cas des chemins de fer est à ce niveau éclairant : si une ligne ferroviaire n’a que très rarement créé de toutes pièces une station ­touristique,
celle-ci, de son côté, a également pu se développer sans l’apport ferroviaire 26. Par ailleurs, et pour le tourisme helvétique, on peut même
affirmer que « […] l’acteur ferroviaire reste en retrait de l’activité
touristique pendant les cinquante années qui précèdent [le début du
xxe siècle] laissant ainsi les contours du tourisme helvétique se dessiner
sans lui, mais pas en dépit de lui » 27.
Le cas hongrois analysé par Márta Jusztin offre des similitudes avec
ces conclusions. Durant les cinquante ans qui séparent le Compromis
austro-hongrois de 1867 et la Première Guerre mondiale, la Hongrie
s’équipe en voies ferroviaires. La motivation dans la ­construction de ce
réseau est économique, liée au commerce des céréales, à l­’élevage et à
l’exploitation du bois, mais nullement touristique. Malgré le peu d’attention que reçoit le tourisme de la part des chemins de fer, l­’accessibilité
des lieux touristiques s’en trouve améliorée, notamment le lac Balaton,
dont la rive sud est précocement longée par une voie de chemin de fer.
Avant même la Grande Guerre, la coopération entre la compagnie ferroviaire et les milieux touristiques est initiée. Au lendemain du conflit, la
collaboration entre les milieux touristiques et le rail, qui domine outrageusement un marché du transport où la route est encore quasi absente,
se poursuit et la compagnie nationale MÁV joue le « rôle principal
dans la promotion touristique » en proposant divers arrangements,
comme des billets réduits, des trains spéciaux ou des carnets de circuits
qui offrent, hormis des rabais pour les transports, des coupons pour
les hôtels et les restaurants de Budapest. Si le train apparaît comme
l’élément dominant du système de transport hongrois de l’entre-deuxguerres – la contribution de Szalkai insiste également sur cet élément
(cf. la deuxième partie « Coordination de la mobilité dans un espace
national ») –, l’auteur n’omet cependant pas de parler des améliorations
du système routier et de l’apparition du t­ransport aérien. Durant les
Tissot Laurent, « Développement des transports et tourisme : quelles relations ? »,
Revue suisse d’histoire…, p. 37.
26
Sulmoni Stefano, « Système de transport et développement touristique. Le cas de la
ville de Lugano et de ses alentours pendant la Belle Époque, 1880‑1920 », in Schiedt
Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C. (dir.),
Verkehrsgeschichte…, p. 435.
27
Tissot Laurent, « Développement des transports… », p. 37.
25
26
Introduction et présentation de l’ouvrage
années 1930, aussi bien la compagnie MÁV, d­ isposant de bureaux de
vente dans toutes les capitales européennes et les grandes villes étatsuniennes, que l’Aéro-club de Hongrie, ­possédant la liste des détenteurs
d’avions privés à l’étranger et des membres des aéro-clubs, c­ ollaborent
activement avec les milieux touristiques. Au final, les rapports
­transport/tourisme paraissent avoir fonctionné avec une certaine efficacité en Hongrie, facilités certainement par la présence dominante de la
­compagnie MÁV et la relative faiblesse de la concurrence routière en
matière de mobilité touristique.
Le cas helvétique étudié par Cédric Humair et Mathieu Narindal
dénote une collaboration plus conflictuelle entre tourisme et transport.
En se focalisant sur les années 1930 et la crise qui touche le secteur
touristique helvétique, à l’image d’autres secteurs d’activité, les deux
auteurs mettent au jour le jeu des nombreux acteurs qui prennent part
aux tentatives de coordination entre modes de transport et hôtellerie.
Les logiques poussant les protagonistes à la coopération peuvent obéir
à des objectifs différents : là où les chemins de fer désirent empêcher
l’augmentation de la part modale de la route, l’hôtellerie tente de se
battre contre la concurrence étrangère. Certaines réussites, à l’image
d’Hotelplan et de son offre combinée abonnement régional de transport,
hôtel et trajet d’accès mettent également en évidence le rôle des agences
de voyages, considérées, suivant la jolie formulation de Laurent Tissot
« comme des “agences matrimoniales” facilitant le rapprochement
entre le tourisme et le transport » 28. Un rôle, également mis en évidence
par Jusztin en ce qui concerne l’agence de voyages hongroise IBUSZ.
Aussi complexes que soient les relations entre tourisme et transport, elles visent cependant un but commun : améliorer l’accessibilité
des lieux touristiques et fournir de nouvelles recettes au transporteur
et à l’opérateur touristique. Que se passe-t-il lorsqu’un de ces deux
acteurs refuse « le principe de la mobilité pour tous et dans toutes
les situations » ? Cette question est au centre de la contribution de
Valérie Lathion qui retrace les discours et les actions menées par
les milieux protestants évangéliques entre la fin du xixe siècle et les
années 1960 afin de freiner notamment la mobilité de loisirs le dimanche
et les jours de fête religieuse. Au tournant du siècle, William Barbey
(1842‑1914), riche philanthrope vaudois, tente d’imposer ce modèle au
Chemin de fer Yverdon-Sainte-Croix, chemin de fer qu’il finance de
sa poche à condition que son exploitation soit entièrement suspendue
Tissot Laurent, « Développement des transports… », p. 33.
28
27
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
le dimanche. Alors que les trains de plaisir partout voient le jour, que
les trains à crémaillère à vocation touristique – donc destinés à circuler
davantage encore le dimanche que la semaine – gagnent les plus hauts
sommets, on peut sans peine imaginer l’accueil plutôt froid que les
milieux de la finance réservent à William Barbey. Lathion note une
filiation avec les mouvances chrétiennes qui développent également,
dans les années 1950‑1960, un discours critique face à l’exode citadin
du week-end en direction des campagnes qui se fait, cette fois-ci, au
moyen de l’automobile.
Ce lien, parfois conflictuel à la mobilité, mis en évidence par certains
milieux chrétiens du xixe siècle ou du milieu du siècle dernier, mérite
réflexion aujourd’hui encore. Il ressurgit dans une société plus pétrie de
mobilité que jamais, qui peine encore à prendre pleinement conscience
des implications de celle-ci, cette fois-ci non pas sur un plan purement
spirituel mais aussi sur le plan des conséquences environnementales
et sociétales. Pour clore cette introduction, ces quelques constatations
récentes de Gérard Poffet, sous-directeur de l’Office fédéral de l’environnement, sont dignes de nourrir le nécessaire débat actuel et à venir
sur notre mobilité :
« Les Suisses ne se sont jamais autant déplacés. Nos aïeux auraient
peine à le croire : on vit à Nyon, mais on passe les fins de semaine dans
le val d’Anniviers ; on travaille à Zurich alors qu’on habite le canton
de Schwytz ; ou par passion de l’escalade, on quitte régulièrement
Lyss (BE) pour rejoindre le canton du Jura. Sans oublier les vacances :
en 2010, nos concitoyens ont entrepris quelque 10 millions de voyages
à l’étranger. […] une chose est sûre : même sous forme écologique, la
mobilité finit par atteindre ses limites. Quel que soit le mode de dépla­
cement choisi, il vaudra toujours mieux travailler à proximité de son
domicile. Et un week-end à Barcelone aura toujours un plus gros impact
environnemental qu’un tour à vélo dans la campagne à notre porte. » 29
Poffet Gérard, « Mobiles et futés », Environnements, n° 3, 2012, p. 3.
29
28
Introduction and presentation of the proceedings
The many facets of coordinating mobility
Gérard Duc, University of Geneva
Olivier Perroux, University of Geneva
Hans-Ulrich Schiedt, ViaStoria, University of Bern
The decision to hold an international symposium on the mobility of
goods and people in Geneva in November 2011 was very timely: issues
surrounding mobility are at the forefront of the political agenda of all
Western countries. They relate not only to planning for and providing
solutions to the ongoing exponential growth of mobility, both in terms
of long-distance traffic (regional, national and international) and urban
transport, but also to policies on land use and offsetting environmental
and sound pollution. The symposium was premised on the belief that,
when it came to mobility, historians had as much to say as planners,
geographers, sociologists and economists: the current state of mobility
and the responses to these complex issues, involving actors with
opposing objectives, have a solid basis in history 1.
As Gijs Mom has previously described as “the increasing efforts to rethink the useful­
ness of history for current problems of mobility ”, Mom Gijs, “Historians Bleed Too
Much: Recent Trends in the State of the Art in Mobility History ”, in Norton Peter,
Mom Gijs, Millward Liz, Flonneau Mathieu (eds.), Mobility in History. Reviews and
Reflections, Neuchâtel: Alphil, 2011, p. 20.
1
29
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
The prism of Swiss transport policy
To focus specifically on the coordination of mobility, currently
viewed as an attempt to optimise the use of various transport modes
from an economic, social and environmental standpoint 2, fits with one
of the most publicised aspects of Swiss transport policy. The decision
in the 1990s to build the new Alpine railway links (Lötschberg and
Gotthard) and the adoption a decade later of fiscal measures to incite
a switch from road to rail (i.e. a service-based user charge for heavy
goods vehicles) propelled Switzerland to the vanguard of countries
working towards coordinating freight transport. These actions are
among the most visible in recent years in terms of options for rail
and road regulation, but only future experience – the Lötschberg base
tunnel has been operational since the end of 2007, while the Gotthard
Base Tunnel is expected to open at the end of 2016 – will determine
their actual efficiency. However, the report of the Alpine Initiative, an
association that aims to protect the Alpine region against transit traffic,
is for the time being ambivalent 3.
Concerns regarding multimodal transport 4 are by no means limited
to Switzerland. Elsewhere in Europe, the problem has grown more
acute in recent years. In 2004, Hans-Liudger Dienel posed the problem
in a collective paper published as part of the European programme
COST-340, Towards a European Intermodal Transport Network:
Lessons from History, as follows:
“(…) we are investigating why responsible actors in transport
planning were so late in realizing the value of good intermodal
Keller Peter, “Intermodality of Network Points: The Planners’ View”, in Dienel
Hans-Liudger (ed.), Unconnected Transport Networks. European Intermodal Traffic
Junctions 1800-2000, Frankfurt a. Main: Campus, 2004, p. 37.
3
See the association’s recent press releases at://www.alpeninitiative.ch/web/initiative-des-alpes/presse/communiques_de_presse.html?topic=c87c7755-f027-4c7a-ab6729a6947bf9f9 (retrieved on 15/10/2012).
4
The terms “intermodal transport”, “combined transport” and “multimodal transport”
were defined in 2001 by the United Nations, jointly with the European Commission.
The first term refers to freight transport that transits via at least two different modes in
succession, without the freight itself changing units (either containers or heavy goods
vehicles); the second designates intermodal transport primarily via rail or water, with
only the initial and final stages – which are kept as short as possible – are covered
by road; and the third refers to any transport using at least two modes (see Schmidt
Michael, “Intermodal Junctions in EU Transport Policy & Research”, in Dienel
Hans-Liudger (ed.), Unconnected Transport…, p. 51). In this introduction, we will
attempt as much as possible to distinguish between all three terms.
2
30
Introduction and presentation of the proceedings
interfaces at transport junctions for the economic development of
public transport systems.” 5
Attempts to coordinate mobility are visible at the country and continental transport levels, but also at the regional and local levels, fostered
by a resurgence or reorganisation of collective transport systems (trams,
subways and suburban trains) and the spread of urban policies of multimodal mobility (e.g. the construction of park-and-rides on the outskirts
of towns or near stations) 6. Once again, these policies are also seen
elsewhere in Europe. Although we do not yet have the hindsight needed
for an objective assessment of these attempts at coordinating mobility 7,
one thing is clear: alpine railway links and user charges, two projects
submitted to Swiss voters, and the resurgence of urban public transport, on which Swiss citizens have also voted in cantonal or municipal
referendums, have contributed to making multimodal mobility a widely
discussed issue among Swiss civil society.
Such recent elements of mobility coordination may meet new
societal imperatives, namely, increasing numbers of commuters,
congestion on main roads and its harmful environmental effects, new
internal mobility problems stemming from urban sprawl and the implementation of efficient technical solutions to minimise the drawbacks
of intermodal transport, especially of freight. However, this does not
imply that the past has been devoid of coordination. Coordination is as
old as the coexistence of two equally efficient transport modes, hence
one of the major motivations behind the symposium. The environment
and land use may be overriding concerns nowadays but, as early as the
1920s and the rise of motor vehicles, there has been a need to ­structure
a market that was subject to strong competition and to preserve the
massive investments in rail made since the previous century. There are
a multitude of aspects to coordinating mobility.
Dienel Hans-Liudger, “Why so late? Questions concerning Intermodality of Transport
Junctions ”, in Dienel Hans-Liudger (ed.), Unconnected Transport…, p. 11.
6
In spring 2012, the Transport and Environment Association (ATE), a Swiss association promoting environmentally friendly transport policies, dedicated a report to the
expansion of tram networks in several Swiss cities (see “De nouveaux trams et trains
urbains partent à la conquête du pays”, ATE Magazine, no. 2, 2012, p. 8-18).
7
From the point of view of the ATE, results are mixed. The expansion of collective
transport networks has come too late and is struggling to offset mobility that remains
heavily dependent on cars.
5
31
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
The revival of a field of study
Thanks in part to COST-340, the field of transport history has seen
a revival in recent years, owing to a resurgence of these issues. The
rise to prominence of mobility problems in the media and politics
is not unconnected with the revival. In Switzerland, it has led to the
publication every two years since 2006 of three collections devoted to
­transport history 8. Internationally, the revival of issues linked to transport history and the research shift towards the history of mobility have
been most obvious 9 in the wake of the 2003 foundation of Transport,
Traffic and Mobility (T2M). In the introduction of a recent paper on the
main elements differentiating the history of transport from the history
of mobility, Mathieu Flonneau and Vincent Guigeno write:
“Built on the basis of the distribution of the various modes – land,
sea or air – or of infrastructure, the history of transport examines
the supply side, the legal framework and government regulation;
whereas the history of mobility focuses more on the practices of
agents, controversies and conflicts over the use of public spaces,
especially in urban settings. The main result of rejoining the
two disciplines has so far been the ‘demodalisation’ of the focus
on ­transport. From now on, studies should be grounded (…) in
­crosscutting themes.” 10
Gijs Mom, one of the main drivers and observers of the revival
of this field, and who served as president of T2M from 2003 to
2009, mentions the relatively high number of statements at T2M
annual conferences 11 that adopt a multimodal approach, and lays the
­groundwork for a research programme in history of mobility of which
Revue suisse d’histoire, vol. 56, no. 1, 2006 (special edition on transportation history);
Traverse, no. 1, 2008 (special edition on transport and economic development); Schiedt
Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C. (dir.),
Verkehrsgeschichte / Histoire des transports, Zurich: Chronos, 2010, 467 p.
9
Three T2M Yearbooks describing the state of research have been published to date:
Mom Gijs, Pirie Gordon, Tissot Laurent (eds.), Mobility in History. The State of the Art
in the History of Transport, Traffic and Mobility, Neuchâtel: Alphil, 2009, 260 p.; Mom
Gijs, Norton Peter, Clarsen Georgine, Pirie Gordon (eds.), Mobility in History. Themes
in Transport, Neuchâtel: Alphil, 2010, 291 p.; Norton Peter, Mom Gijs, Millward Liz,
Flonneau Mathieu (eds.), Mobility in History…, 162 p.
10
Flonneau Mathieu, Guigueno Vincent, “Introduction. De l’histoire des transports
à l’histoire de la mobilité ? Mise en perspective d’un champ”, in Flonneau Mathieu,
Guigueno Vincent (eds.), De l’histoire des transports à l’histoire de la mobilité ?,
Rennes: Presses Universitaires de Rennes, p. 19.
11
Latest statistics in Mom Gijs, “Historians Bleed Too Much… ”, p. 25.
8
32
Introduction and presentation of the proceedings
the keys words would be interdisciplinary, transnational approach and
multimodal 12.
The study of coordinated mobility of goods and people fulfils these
thematic requirements through the multimodal approach by which it
should be guided, the considerable attention paid to analysing conflicts
arising from the emergence of new forms of and new needs for mobility,
as well as the frequency and scope of involvement of all actors in the
building of solutions (i.e. politicians, network managers and users). The
20 papers that make up these proceedings are primarily, but not entirely,
by historians. The proceedings are divided into six chapters, demonstrating the number of definitions ascribed by the authors to the concept of
mobility coordination. The remainder of this introduction will provide
an overview of the papers, as they relate to the various chapters.
Presentation of the proceedings
Coordinating international mobility
Insofar as it requires infrastructure, mobility implies a coordination
effort between the various authorities, public and private, that manage
that infrastructure. The example of railways particularly epitomises the
problems inherent in such an exercise. Built and then operated primarily by private companies, railways have not been the free infrastructure that some pioneers had envisioned. Early on, coordination had to
be set up between railway authorities to allow direct traffic, for freight
and travellers alike, between the networks of a single country. Then,
the same problem arose internationally: how could transit of freight and
passengers from one country to another be ensured without intermediate reloading, a practice both costly and impractical? In the interwar
period, the same question arose regarding road traffic, such that international organisations aligned legislation and standards, bringing about
international road transport.
By opposing two eras, namely, the turn of the 20th century and the
post-World War II period, Martin Schiefelbusch sheds light on the
attitude of the key players in coordinating international passenger rail
transport. In relation to the former period, the author cites the lack of an
international body capable of arranging coordination and the part played
Mom Gijs, “Inventer et établir l’histoire de la mobilité : aux origines d’un changement de paradigm”, in Flonneau Mathieu, Guigueno Vincent (dir.), De l’histoire des
transports…, p. 34-37 and, in these proceedings, “Transnational Coordination History:
A Plea for a Cultural Turn”.
12
33
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
by the Association of German Rail Operators (Verein deutscher Eisen­
bahnverwaltungen), with its specificity of regrouping companies other
than German or Austro-Hungarian ones. As to long-distance passenger
travel, European coordination efforts led to the 1884 introduction of a
joint fare system among members of the German umbrella association
and the development of the famous luxury trains of the ­Compagnie
Internationale des Wagons Lits et des grands Express Européens,
founded in 1874 by Belgian George Nagelmackers.
During the Belle Époque, international coordination efforts between
railway authorities occurred within a monopolistic transport market.
In the interwar period, the situation changed with the rise of motor
vehicles. The railways feared that their dominance was in jeopardy, so
the 1930s saw the first attempts at road-rail coordination (see Coordina­
ting national mobility). In Switzerland, the people’s rejection in a 1935
referendum of the agreement of May 1933 that proposed traffic-­sharing
between rail and road was quite traumatising for the Swiss Federal
Railways (SBB), under strained financial circumstances 13 at the time.
In an analysis of the many reasons behind the cooperation of the SBB
with the Reichsbahn in matters of international freight traffic during
World War II, Gilles Forster’s paper focuses on the passiveness of the
pre-war period. These reasons include competition from road transport
– which disappeared with the outbreak of war, as did fuel, then reserved
for the army –, the existence of roads bypassing Switzerland, such
as the Brenner, and the waterways and broad-gauge railway network
development projects which the Reich peddled in a bid to maintain the
belief of SBB heads and the authorities in a “fabricated competition
that made it necessary to defend Swiss links”. This led to unswerving
cooperation with the Reichsbahn and the institution of international
freight ­transport coordination, termed the “two-track strategy” by the
author; in other words, the Brenner, a road integrated into the Reich for
weapons and troop transport, and the Gotthard supply route located on
neutral ­territory.
For the railways, the post-war period marked the definitive advent of
its new rival, the car. Sébastien Gardon demonstrates that, at the level
of the international organisations, road transport was in a good p­ osition
to compete with railways given that, since the 1920s, the League of
Kirchhofer André, Stets zu Diensten – gezwungenermassen! Die Schweizer Bahnen
und ihre “Gemeinwirtschaftlichkeit” für Staat, Wirtschaft und Bevölkerung, Basel:
Schwabe, 2010, p. 254-264.
13
34
Introduction and presentation of the proceedings
Nations had set up a special study committee on road traffic. The
committee, renamed the Standing Committee on Road Traffic in 1927,
dealt in part with standardising traffic regulations and was integrated
into the Advisory and Technical Committee for Communications and
Transit, which had until then mainly addressed rail, river and sea transport. It was not a coincidence, however, that the Standing Committee
was established at a time when Gardon notes a paradigm shift in which
the “issue of transit and communications shifted from a matter of
controlling individual movement – especially between countries – to one
of promoting mobility to support the industrial and economic develop­
ment of nations”. Once the technical and legal aspects of transnational
road coordination were settled by the Standing Committee and the
United Nations working groups that succeeded it from 1945 onwards, it
is understandable that, given the flexibility of cars, the market share of
rail transport dropped sharply, particularly since Europe’s long-distance
road network had been growing and becoming interconnected as early
as the 1950s 14.
Schiefelbusch also emphasises the fact that it was the breaks which
the national railway authorities themselves applied to establishing international cooperation that contributed to lowering the market share of
railways in intra-European traffic. Some examples are symptomatic.
Although long-distance passenger transport and container traffic were
generally considered potential markets for the rail sector, they were
constantly reassessed by the railway authorities which did not necessarily see international long distance as a growth sector. The author
uses the example of the Trans Europ Express (TEE). Developed in the
1950s, the first TEE lines were shut down two decades later as national
railway companies in Germany, France and England were setting up
their domestic high-speed rail links. Schiefelbusch findings are harsh:
despite some convergence in long-distance passenger transport, he
states that “(…) compared to the fast development of international
transport by other modes, the results achieved in the rail sector seem
less impressive”.
The assessment by Michèle Merger, whose paper covers more than
half a century of attempts to establish road-rail intermodality in European
freight transport, is very similar. The author defines a number of periods
and identifies for each one the obstacles to widespread combined
See for example Mom Gijs, Tissot Laurent (eds.), Road History. Planning, building
and use, Neuchâtel: Alphil, 2007.
14
35
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
t­ransport. For example, the “proliferation of initiatives and techniques”
hindered the emergence of a standard technical system between the
1930s and 1970s, while pledges made by the European Community in
the 1970s to revitalise the rail sector were not always followed up on.
The fact that combined transport still accounted for merely 9 per cent of
all European freight transport at the turn of the century was largely due
to the “national framework” that dominated the “initial perception of the
European railway networks”. This led to varying technical choices that
hampered the establishment of c­oordinated combined transport at the
continental level. Other ­obstacles included priority to passenger traffic
on networks shared between both modes of transport and the specificities of the European industry which required very large numbers of
small loads, thus favouring road t­ransport.
Coordinating national mobility
In 1934, Paul Wohl and A. Albitreccia produced for the International
Chamber of Commerce a nearly 5,000-page report entitled Road and
Rail in 40 Countries 15. It was during the interwar period that competi­
tion between railways and cars became acute, and the first coordination
solutions were devised in most European countries. Some of the papers
in this chapter focus on this period, which saw the first wave of attempts
to structure the transport sector. In an analysis of the Hungary case,
however, Gàbor Szalkai does not fail to include the often downplayed
significance of animal traction. It was particularly relevant in Hungary
during the Great Depression when this mode of transport, which had
been sidelined too quickly, re-emerged and became within a few years
the “new public enemy” of rail transport.
Anette Schlimm’s paper, devoted to the discussion of road-rail
coordination by two British government commissions during the
interwar period, notes at the outset the chronological similarity of the
debate around modal competition in most Western countries, but also
draws parallels between the diagnoses and proposed solutions. In
Great Britain, the work of the commissions led to the 1933 Road and
Rail Traffic Act, which aimed to end competition between transport
modes by fostering cooperation and traffic-sharing. Bernd Kreuzer
(the Austrian case) and Szalkai confirm this interpretation in their
Wohl Paul, Albitreccia A., Road and Rail in 40 Countries, Tours: Arrault et cie,
1934, 499 p. plus tables. For a commentary on the report, see Larroque Dominique,
“Le rail et la route”, in Documents pour l’histoire des techniques, no. 16, 2nd semester
2008, p. 198-200.
15
36
Introduction and presentation of the proceedings
own papers: in Great Britain, Austria and Hungary alike, the solution
put forward by experts led to a division of labour and a modal separation of traffic in 1933, an exact, if coincidental, temporal similarity 16.
Schlimm uses the concept of social engineering to explain how the
trend appeared in most countries without prior consultation amongst
each other. In Great Britain, the experts, who were mainly transport
practitioners, diagnosed the crisis as provoked primarily by a modernising trend but, though they considered the trend highly beneficial,
tried to maintain the status quo. These social engineers, blinkered by
economic efficiency and having lofty ideas about public interest and
progress, thus attempted to circumscribe the modernising trend to a
few areas (e.g. where modal competition was accepted). In other areas,
rational coordination (i.e. division of labour and cooperation) had to
prevail. Studying the biographies of the members of the commissions in
other countries could confirm this analysis.
In his paper, Kreuzer focuses on the Austrian government’s
ambivalent policy regarding transport coordination during the interwar
period. On the one hand, federal authorities attempted to impose legal
measures to preserve the dominance of the rail sector which, following
the break-up of the Austro-Hungarian Empire, was in a fragile state.
On the other hand, public opinion as well as some government officials
and economists favoured a surge in road investment since transport by
truck or bus was considered more efficient, cheaper and faster. For this
reason, the law on road transport enacted by Vienna in 1933, which
reserved long-distance freight transport for the rail sector, was never
observed by road hauliers. The law was repealed in 1937, ending any
attempt at statutory road-rail coordination.
The debate in Hungary (Szalkai) also shows that railway interests
were defended by the political class and the economy. In a country
where road infrastructure remained limited in the interwar period
(merely 1,000 kilometres of road were paved out of the country’s
26,800 kilometre-long network), intermodal competition was nonetheless as acute as elsewhere, and there was even early coordination
in favour of the rail sector. As early as 1922, transport by truck was
authorised for short distances, while long-distance traffic remained in
the railway domain. Transport at the close of the 1920s, characterised
Congruently, in the Swiss case, a traffic-sharing agreement was signed in May 1933
between the SBB and the associations representing road hauliers. Subject to referendum,
the agreement was rejected by the people in 1935.
16
37
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
by a strong rise of motor vehicles, still remained dominated by the rail
sector, which was booming and monopolised 73 per cent of all traffic.
The Great Depression ended the golden era of the railway and paved the
way for a period of more balanced intermodal coordination. In 1933, an
agreement on freight traffic was reached between the national railway
company (MÁV) and road hauliers.
Gijs Mom’s paper regarding the Netherlands centres initially
on how road freight transport in most European countries, a sector
mainly composed of small independent entrepreneurs, began to self-­
organise from the 1920s onwards. In the Netherlands, owing to poor
road infrastructure and restrictions on movement adopted by several
provinces and cities prior to the legal harmonisation of 1925, hauliers
were considered true adventurers. In the 1930s, although most road
transport covered short distances, some Dutch hauliers ventured as far
as Bremen and Hamburg. However, legislation adopted by Germany
in 1936, reserving transport of more than 50 kilometres for the rail
sector, made such trips impossible. In the immediate post-war period,
all European governments were keen to preserve the road-rail coordination solutions implemented in the 1930s. As transport relations became
increasingly international, fostered in part by the harmonisation of
standards undertaken by international organisations, such as the Inland
Transport Committee of the United Nations 17 Economic Commission
for Europe (for information on this body, see the paper by Gardon
under Coordinating international mobility), the opposition between the
British vision, based on the primacy of market forces, and the continental vision, which saw transport as being in the public interest, culminated in the triumph of the former. In the second section of his paper,
Mom retraces the role of the Netherlands – “the Trojan Horse of libera­
lism to the continent” – in reassessing pre-war policies that tended to
protect the interests of the railways.
The Swiss case is considered in two papers. The first, by Ueli
Haefeli, analyses transport coordination across the 20th century, while
the second, by Stefan Sandmeier, focuses on the 1970s and the Swiss
comprehensive transport policy. Haefeli finds that over the entire
course of the 20th century, the federal authorities were challenged only
five times in popular votes on transport policy. The five rejections all
concerned proposals relating to the specific issue of transport coordination, the principles of which had never, since the 1935 rejection of
the agreement between the SBB and road hauliers, been sanctioned
by the people. The author analyses the reasons behind the rejection in
See Sébastien Gardon’s contribution in the part “Coordinating international mobility”.
17
38
Introduction and presentation of the proceedings
light of the specificities of the Swiss political system (i.e. federalism,
direct democracy and government by coalition) and the domination of
the institutional arena by the federal authorities who wished to move
forwards with efforts at transport coordination, which were considered
a comparative success internationally.
In the same vein, Sandmeier focuses on the influence of the comprehensive policy on Swiss transport policy, despite its rejection by 55 per
cent of voters in 1988. His paper also illustrates the new definition of
transport coordination under the comprehensive policy. It was no longer
simply a matter of the statutory traffic-sharing between rail and road
that characterised coordination policies from the 1930s to the 1950s, but
rather one of taking a systemic approach to transport problems. Questions
tied to transport coordination were inseparable from broader social,
economic, demographic, environmental and policy considerations. In
many ways, the comprehensive policy, through general systems theory
and complex models created by the engineers of the Zurich Federal
Institute of Technology, was the death knell of the purely economic and
liberal approach to transport that dominated the post-war years and of
which one of the most active proponents was certainly Hans-Reinhard
Meyer, spokesperson for economic affairs at the Federal Transport and
Energy Department and professor at the University of Bern. Moreover,
as Schlimm points out, the apparent resolve of federal councillor Roger
Bonvin (1907-1982) to seek expertise outside the Federal Transport and
Energy Department – either from the Federal Institute of Technology or
the private sector –also signalled the end of the “institutionalisation of
expertise” in the interwar period.
Coordinating urban mobility
Historical studies of urban transport began integrating issues
related to the history of mobility early on. The problems of multimodal
transport and coordination lend themselves well to the modern urban
­landscape. As stated by Ueli Haefeli in his post-doctoral thesis, the urban
context, more so than the national context, makes it possible to grasp
the oppositions stemming from a new form of mobility and to connect
the preferred forms of transit with the expansion and s­uburbanisation
processes typical of post-war cities. Furthermore, comparing urban
models makes it possible to analyse the growth of mobility, its modal
distribution and its impact on municipal budgets 18.
Haefeli Ueli, Verkehrspolitik und urbane Mobilität. Deutsche und Schweizer Städte
im Vergleich 1950-1990, Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 2008, p. 16-20.
18
39
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
The paper by Caroline Gallez begins by revisiting the doctrines that
have guided the coordination of urban planning and transport. In the
area of urban expansion, zoning was widely used everywhere between
1870 and 1930, suggesting a functional specialisation of cities and a
proliferation of types of traffic. In the 1960s, zoning increased, despite
criticism. It was not until the 1990s that, owing to environmental
concerns in particular, “social and functional diversity” returned to
the heart of urban planning. In the second section, the author analyses,
through the examples of Bern, Geneva, Strasbourg and Bordeaux, how
these doctrines were transposed in practice. Although Gallez notes a
similar evolution of norms in all four cities – from “car-friendly city
to sustainable city » – she identifies very different practical realisations of urban planning concepts in the last 30 years and examines the
hypotheses explaining why.
In their paper, Aurélien Delpirou and Arnaud Passalacqua take
a look at the repeated failures, since the end of 19th century, to equip
Rome with an underground transport network (subway). Among the
many reasons why Rome, despite its size and population, has only two
subway lines to this day, the authors point to various levels of competition; for example, above-ground public transport versus underground
transport and public transport versus cars. They also put forward the
difficulty of coordinating between theoretical projects, which take a
long time to come to fruition, and rapid and poorly controlled urbanisation. Coordinating between the transport system and the city itself thus
routinely fails. The case of Rome, though quite extreme, undoubtedly
expresses a mismatch experienced in a number of cities.
Coordination of mobility, conflict and lobbies
There are many conflicts connected with mobility and attempts at
coordinating it. These can relate to the size of roads or a given territory
which makes it difficult to include all modes of transport peacefully,
the adverse externalities of certain unsustainable modes or competitive distortions between rival modes. Throughout history, lobbies that
defend a given mode of transport have more often than not put forward
the disadvantages – real or imagined – of the transport system. Thus the
current proliferation of transport lobbies has solid historical roots.
Moving away from the usual modal opposition between rail and
road, the papers of Wulfhard Stahl and Peter Cox examine the
conflicts among road users, including by reinstating bicycles in the
position they occupied between the end of the 19th century and World
War II. Having begun as a luxury good, bicycles were progressively
40
Introduction and presentation of the proceedings
democratised during the Belle Époque, becoming a mass phenomenon
as early as World War I. In his rereading of the works of German jurist
Hermann Ortloff (1829-1920) and novelist and philosopher Eduard
Bertz (1853-1931) – an early lobbyist of the cycling cause – Stahl
highlights the impassioned debate that, at the time when bicycles
were beginning their ascent, pitted the proponents of strict and harsh
­regulation of road use against defenders of unfettered access to public
spaces for the new mode of locomotion. Ortloff – who was very critical
of bicycles and cyclists – defended regulation, if possible international
regulation under the aegis of the Universal Postal Union, and even a tax
system for cyclists; whereas Bertz, as a defender of social emancipation, went after other road users who tried to exclude cyclists. As with
the arrival of any new mode of transportation that requires sharing of a
non-expandable space, the cycling tidal wave – some 33,000 bicycles in
Berlin in 1896 and 50,000 by the following year – generated a number
of problems at the turn of the 20th century relating to shared public
space. There were also many accidents involving cyclists and pedestrians, which thrust onto centre stage the protection of pedestrians as
the more vulnerable of the two groups.
Centred on the British case, Cox’s paper examines the predictable
conflict that arose among road users with the considerable rise of cars
in the interwar period. Focusing on the determination to impose a red
rear light on bicycles and set up special lanes for them, the author looks
at how the debate about cycling safety consisted in turning cyclists,
and pedestrians, into an obstacle to the growing motorisation of roads.
The conflict was exacerbated by both the preeminent part the British
government intended to give motorised road transport in supplying
the country, following the 1926 General Strike that had paralysed rail
traffic, and the social segregation of transport modes resulting from the
advent of motorised vehicles.
At a time when transport issues tended to focus – in Great Britain
as in all Western countries – on the shape of road-rail coordination
(see Coordinating national mobility), bicycles, although still the most
widespread mode of transport in the 1920s, especially in urban settings,
were prone to incessant attacks. The paper by Cox also examines,
through the changing rhetoric of the Cyclists’ Touring Club (CTC), the
emergence of cyclists as an organised community. At the end of the
19th century, the CTC was mainly composed of members of the upper
middle class who wished to make travel easier by way of a modern
means of locomotion, while in the first decade of the 20th century, with
the democratisation of bicycles, it undertook a long-term shift of both
41
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
its social structure and goals. At first, the CTC saw its membership drop
significantly – which the author correlates with the tremendous growth
of the Automobile Association founded in 1905 – and it was only when
the conflict between road users worsened at the end of the 1920s that
the trend was reversed. At the same time, the CTC’s rhetoric became
tougher.
The emergence of a structured road lobby in Switzerland in the 1930s
is the focus of the paper by Olivier Perroux and Gérard Duc. The
authors refer to the theory of Wisemann and Peacock that states have
a tendency to take over increasingly more sectors of the economy and
that crises accelerate these expenditures which are not entirely reversible when prosperous times return. They demonstrate how, through
increased federal spending due to the World Wars, the state got more
and more visibly involved in road management. Concurrently, a road
lobby was set up at the federal level, which became strong enough to
oppose any attempts at road-rail coordination that, by affording excessively overt protection to the rail sector, would disadvantage the road,
all the while campaigning for the transfer of jurisdiction over roads
from the cantons to the federal government.
Coordinating transport infrastructure and land-use planning
Even though transport and land-use planning have never been
entirely disconnected from each other, the tendency to see mobility
in terms of organising traffic between large economic centres has
maintained a certain distance between these two fields, which usually
come under different authorities. It is only in recent years that
efforts have been scaled up to integrate land-use policy and transport
planning 19. In his paper on the Swiss comprehensive transport policy
(see Coordinating national mobility), Sandmeier focuses on the
tensions that arose during the 1970s between the principles of transport
economists and the vision of planners from the Zurich Federal Institute
of Technology.
The difficulty of creating links between the two fields did not stem
only from the essentially liberal view that dominated transport after
the war, but also reflected the negative image of land-use planning
that prevailed in the 1960s, when it was considered state intervention
Stead Dominic, “Les politiques des transports et de l’aménagement du territoire
sont-elles vraiment coordonnées ?”, Revue internationale des sciences sociales, no. 176,
2003, p. 371-387.
19
42
Introduction and presentation of the proceedings
of the type seen under authoritarian rule such as the Soviet regime 20.
In the early 1960s, the introduction to a piece in the famous Que
sais-je ? collection aptly depicted the straightjacket in which land-use
planning still operated: “(…) rigid planning may be forbidden in a
liberal regime, but anarchy is not necessarily the law of that regime
either: it is a matter of which means to employ in order to overcome the
­difficulties inherent in liberalism” 21. Since then, transport infrastructure
and mobility studies have become one of the crucial aspects of land-use
policy and a recognised means of resolving the “difficulties inherent in
liberalism”.
As demonstrated by the papers in this chapter, policies of coordination between transport infrastructure and land-use planning, seen as
“(…) a hunt for coherence, congruence and exhaustiveness in order
to achieve harmonious or compatible solutions” 22, frequently run up
against two diverging temporalities: recent land-use policies must make
do with either infrastructure inherited from previous eras (i.e. the 19th
century or the first half of the 20th century in the case of railways and
the 1950s and ’60s for roads) or an outdated “frame of reference” 23.
In his paper, Philipp Hertzog compares the varying success of
two same-sized cities, Göttingen and Dijon, in their attempts to have
high-speed trains rerouted their way during the 1960s and ’70s. In
the case of Dijon, certain old frames of reference in railway planning,
which favoured the criteria of straight lines and cost-effectiveness
above all else, prevailed and sidelined Dijon from the high-speed
link connecting Paris and Lyons. It was not a value judgement, but
rather a contradiction of the decentralisation efforts typical of French
land-use planning at the time. The disillusioned reaction of the Dijon
Chamber of Commerce and Industry, cited by Hertzog, was symptomatic of a lack of coordination between transport infrastructure and
land-use planning: “the turbo-train project, as is currently envisioned,
appears to have begun with the simplistic notion that straight lines are
On this topic, as relates to Switzerland, see Walter François, Histoire de la Suisse.
Certitudes et incertitudes du temps présent (de 1930 à nos jours), book 5, Neuchâtel:
Alphil, 2010, p. 130-131.
21
Delmas Claude, L’aménagement du territoire, Paris: Presses Universitaires de
France, 1962, p. 8.
22
Stead Dominic, “Les politiques des transports…”, p. 371.
23
On this topic see Gallez Caroline, “La cohérence urbanisme-transport : un mythe ?”,
in Gallez Caroline, Kaufmann Vincent (dir.), Mythes et pratiques de la coordination
urbanisme-transport. Regards croisés sur quatre agglomérations suisses et françaises,
Paris: Recherches, 2010, p. 183-220.
20
43
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
the shortest path from one point to another, without considering the
effect of new infrastructure on land-use planning”. In Germany, things
were scarcely different, except that Göttingen, against the advice of
engineers and planners of the Deutsche Bahn and thanks to the support
of Lower Saxony, which had jurisdiction over land-use planning,
managed to have modified the original route of the Hanover-Würzburg
high-speed link.
The paper by Pierre Tilly, dedicated to transport coordination in
the border region of Lille, retraces from the mid-20th century onwards
the long process to integrate transport policy and land use in this trans­
national area, with all the additional considerations its location implied.
Concerns were manifold: revitalising a region undergoing industrial conversion, playing on varying geographic scales (from regional
projects to integration into European transport in the midst of change
brought on by the Channel Tunnel project) and overcoming nationalistic interests which, since the 19th century, had hampered cross-border
railway traffic. In the end, the border region of Lille seems to have been
successful in integrating transport and land-use planning. Compared to
the situation of Dijon, excluded from the South-East high-speed link
devised at the end of the 1960s, Lille, placed after the fact on both the
North and Brussels-London high-speed links, has fully benefitted from
the advances in decentralisation typical of French land-use planning
and in European railway policy.
The third paper in this chapter turns away from the rail sector.
Sandro Fehr retraces the slow development between 1935 and 1956
of Swiss air transport policy, by focusing his discussion on national
airports. The underlying issue was land use: the question arose during
the interwar period and World War II as to whether to keep the “triangle
of airfields” Zurich-Basel-Geneva or to establish a federal airport in the
central region of Bern. Two visions – one regional, with all its competitive implications, and the other, centralising, aiming to give the federal
government primacy over air transport policy – were pitted against each
other. In the end, in 1945, the idea of a central airport was rejected by
the federal authorities, while a decentralised policy was emerging that
recognised the existence of the three aforementioned large airports.
In the middle of the 1950s, the classification of these three airports,
which had been given the label of “national airports”, was definitively
decided: Zurich was designated as an intercontinental airport while
Geneva and Basel were designated as international airports.
44
Introduction and presentation of the proceedings
Coordinating mobility and tourism
The links between tourism – which implies physically moving from
one place to another – and transport no longer require demonstration. In
a country such as Switzerland, crisscrossed by railway lines for tourism
purposes, a chapter dedicated to coordination between this fundamental
economic activity and mobility was necessary 24.
Xavier Bernier’s chronological look at the accessibility of mountain
resorts reveals the links between transport and tourism. From the
perspective of mobility/tourism coordination, he describes three successive stages which can overlap depending on the case: first, the arrival of
railways in valleys led to their domination over the mountains, which
thus became peripheral and depopulated in the second half of the 19th
century. Then, at the turn of the 20th century, the peaks were conquered
thanks to mountain railways and cable cars, transport turned increasingly
to cars as the century progressed and mountains lost their peripheral
status. Lastly, Bernier indicates the rise of a new type of coordination: a “system of self-contained transport where spatial dynamics are
reversed and control is once again exercised upstream”. One of the most
telling examples of the new intermodal relationship between valley and
mountain is Bourg-St-Maurice, in Savoie, France, which is linked by
high-speed train to the great European capitals (i.e. Paris, London and
Brussels) and by funicular to the large tourist resort of Les Arcs. This
model of multimodal coordination between valleys and mountain resorts
has been enhanced since the 2000s and will undoubtedly continue to
grow in the coming years. In some cases, resorts bet outright on prohibiting access to cars. Valleys, accessible by rail and highway, are becoming
reloading areas, with funiculars or ski lifts then taking over.
The links between tourism and transport may seem obvious, but
“the transport/tourism relationship is part of a very complex process” 25
In the Swiss case, a number of publications by Laurent Tissot, and more recently
Cédric Humair, establish the link between transport and tourism. See for example,
Humair Cédric, Tissot Laurent (dir.), Le tourisme suisse et son rayonnement international
(xixe‑xxe siècles) : “Switzerland, the playground of the world”, Lausanne: Antipodes,
2011, 222 p.; Tissot Laurent, “D’une Suisse aimée à la Suisse aimante : tourisme, transport et mobilité dans l’historiographie économique de la Suisse aux 19e et 20e siècles”,
Traverse, Zurich, 2010, p. 156-170; Tissot Laurent, “La philosophie du Saint-Gothard,
ou, La naissance d’un profil touristique alpin”, in Il San Gottardo : dalla galleria di
Favre all’Alp Transit : atti del Convegno internazionale di studi sull transversali alpine
svoltosi a Locarno, il 17-19 ottobre 2007, Bellinzona: Salvioni, 2009, p. 147-159.
25
Tissot Laurent, “Développement des transports et tourisme : quelles relations ?”,
Revue suisse d’histoire…, p. 37.
24
45
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
in which neither of the sectors appears mechanically to drive the other.
The railway example is telling on that score: the presence of a railway
line has but very seldom generated a tourist resort, and resorts, in turn,
can develop without a rail component 26. Moreover, with respect to
Swiss tourism, it can be said that “(…) rail was sidelined from tourism
during the 50 years prior to the [start of the 20th century], enabling
Swiss tourism to take shape without it, but not in spite of it” 27.
The case of Hungary, examined by Márta Jusztin, leads to
similar conclusions. During the 50 years between the Austro-Hungarian Compromise of 1867 and World War I, Hungary developed its
railway infrastructure. The motive behind constructing the network
was economic, tied to the grain trade, animal husbandry and lumber,
and not in the least due to tourism. Despite the meagre attention the
railways paid to tourism, access to tourist attractions did improve, such
as Lake Balaton, thanks to the railway line set up early on along its
south shore. Cooperation between the railway company and the tourism
sector began even before the Great War. Following the War, cooperation between tourism and rail, which outrageously dominated the transport market in areas where roads were virtually non-existent, continued.
The national company, MÁV, played the “main part in promoting
tourism” by offering various deals, such as discounted tickets, special
trains or tour packages that included, in addition to reductions on transport, vouchers for Budapest hotels and restaurants. Although trains
were the dominant constituent of the Hungarian transport system in
the interwar period – Szalkai also focuses on it (see Coordinating
national mobility) – Jusztin does not neglect the improvements to the
road network and the emergence of air transport. During the 1930s,
both MÁV, with its sales bureaus in all the European capitals and
large cities of the United States, and Aero-Club Hungary, which kept
a register of all private aircraft owners abroad and aero-club members,
cooperated actively with the tourism sector. Transport/tourism relations
seem to have run fairly efficiently in Hungary, probably made easier by
the dominating presence of MÁV and the relative weakness of competition from the road in terms of tourist travel.
In the case of Switzerland, examined by Cédric Humair and
Mathieu Narindal, cooperation between tourism and transport was
Sulmoni Stefano, “Système de transport et développement touristique. Le cas de la
ville de Lugano et de ses alentours pendant la Belle Époque, 1880-1920”, in Schiedt
Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C. (dir.),
Verkehrsgeschichte…, p. 435.
27
Tissot Laurent, “Développement des transports…”, p. 37.
26
46
Introduction and presentation of the proceedings
more conflictual. Focusing on the 1930s and the crisis that hit the Swiss
tourism sector, much like it did other sectors, the authors shed light on
the many actors who took part in the attempts to coordinate between
modes of transport and the hospitality industry. The various players
sought different goals through cooperation: in places where railways
wished to hurt the road’s market share, the hospitality industry tried to
fight foreign competition. Some success stories, such as Hotelplan and
its package combining a regional transport pass, accommodation and
map, also highlight the role of travel agencies, which were considered,
as Laurent Tissot aptly puts it, “ ‘matchmaking agencies’ bringing
together tourism and transport” 28. Jusztin also emphasises this role
with respect to the Hungarian travel agency IBUSZ.
As complex as the relationship between tourism and transport may
be, both sectors have a common goal, namely, to improve access to
tourist attractions and generate new income for transport companies and
tour operators. What happens when one of these players rejects “the
principle of mobility for all and in all situations”? That is the central
question of the paper by Valérie Lathion, who retraces from the end
of the 19th century to the 1960s the rhetoric and actions of evangelical protestant groups to stop leisure travel on Sundays and religious
holidays. At the turn of the 20th century, William Barbey (1842-1914),
a rich philanthropist from Vaud canton, attempted to impose this model
on the Yverdon-Sainte-Croix railway, which he funded on condition that
it suspends operations on Sundays. At a time when leisure trains were
cropping up everywhere and cogwheel trains for tourists – by definition
destined to run more often on Sundays than during the week – were
reaching the highest peaks, it is not difficult to imagine the rather cold
reception William Barbey received from the banking world. Lathion
draws a parallel with Christian groups who, in the 1950s and ’60s, were
also critical of the weekend exodus of urbanites towards the countryside which, for its part, took place by car.
The parallel underscored by some Christian groups in the 19th
century or the mid-20th century, sometimes at odds with mobility, still
deserves thought to this day. It re-emerges in a society where travel
is ever-more present and which still struggles to fully understand the
implications of travel, not on a purely spiritual level, but rather in terms
of its environmental and societal impacts. To conclude this introduction, the following recent statement by Gérard Poffet, Deputy Director
Tissot Laurent, “Développement des transports…”, p. 33.
28
47
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt
of the Federal Office for the Environment, feeds the essential current
and future debate on mobility:
“The Swiss have never travelled more. Our forefathers would have
trouble believing it: you can live in Nyon but spend the weekend in
Val d’Anniviers; you can work in Zurich yet live in Schwytz canton;
or you can regularly leave Lyss (Bern canton) for the Jura to satisfy
your passion for climbing. Let us not forget holidays: in 2010, our
compatriots undertook some 10 million trips abroad. (…) [O]ne thing
is for sure: even in an eco-friendly format, travel will reach its limits.
Whatever mode of transportation you choose, it will always be better
to work close to home and a weekend in Barcelona will always have
a bigger environmental impact than a bike ride in the ­neighbouring
countryside” 29.
Poffet Gérard, “Mobiles et futés”, Environnements, no. 3, 2012, p. 3.
29
48
Transnational Coordination History
A Plea for a Cultural Turn
Gijs Mom, Eindhoven University of Technology
Scholars of the “struggle between rail and road” tend to define the
issues at stake in the “coordination debate” as efforts towards a rational
distribution of transport capacity at lower costs. From a historical point
of view, this primarily economic approach not only takes the place of
one of the historical actors’ positions (which is fine, but then should be
acknowledged), it also leaves an entire realm of human behavior out of
the equation: apart from acting as “homo economicus”, human beings
also behave as “homo sociologicus” as well as “animal symbolicum” 1.
In this introduction, discussion of the scholarly involvement in the
coordination debate, including its institutional history, is combined with
a plea for a “cultural turn” in this involvement. The following overview
of the work done so far does not have the ambition to provide a solid
historiographical survey 2.
Reckwitz Andreas, Die Transformation der Kulturtheorien; Zur Entwicklung eines
Theorieprogramms, Weilerswist: Velbrück Wissenschaft, 2000. I thank Clay McShane
(emeritus, Northeastern University, Boston) for his extensive comments on an earlier
version of this paper. I also thank the participants of the Geneva workshop.
2
This contribution developed out of an introductory presentation at the conference
“Histoire des transports et de la mobilité; entre concurrence et coordination, 1918 à nos
jours”, Geneva, 24-25 November 2011.
1
49
Gijs Mom
Work done so far
An historicized definition of coordination might run like this: it was
the struggle between rail and road during the interwar years and beyond.
Thus, coordination is seen as part of an ongoing tension between two
mobility concepts, each of them representing a type of society: the
one based on the railroads (and heavy industry), the other on the road
(and retail industry) 3. When we emphasize, in the following pages, this
aspect of two clashing cultures of mobility, we are only able to do so
due to a foundation of earlier work.
Attention to the coordination debate among historians of transport
and mobility is scarce, probably because of the complexity of the case.
Many historical actors did not have a good overview of what exactly
was at stake. As a result, the historical sources contradict each other
fundamentally when it comes to costs and allocation of costs. On top
of this, the conflict was one between clearly distinguishable “camps”,
reflecting the tensions of current-day modality partisanship between
historians which is a difference not only between preferences in vehicle
type (rail vehicles versus road vehicles), but also between opinions
about these vehicles’ usage (public versus private transport).
Nevertheless, some exemplary studies have been conducted during
the last decade. In the USA, Bruce Seely, Paul Barrett and Mark Rose
dedicated a book-length overview to this part of mobility history 4,
whereas in the UK the nationalization of public transport by the
post-war socialist government provided an extra incentive and led to
the publication of various texts. One example, in the Journal of Trans­
port History, generally took the form of an analysis of public transport
by motor bus in opposition to railways 5. In Germany, the coordination
debate has been studied against the background of a history of general
transport policy (Verkehrspolitik), whereas in France a detailed ­analysis
See: Mom Gijs, “Multiple Mobilities: Road vs. Rail in the North-Atlantic World”,
Paper presented at the workshop “Models of Mobility”, York University, Canada, 23
and 24 March 2012. The two categories are not mutually exclusive - a lot of industrial
goods move by trucks and a lot of commercial goods by rail.
4
Rose Mark H., Seely Bruce and Barrett Paul F., The Best Transportation System in
the World; Railroads, Trucks, Airlines, and American Public Policy in the Twentieth
Century, Columbus: The Ohio State University Press, 2006.
5
Hibbs John, The history of British bus services, Newton Abbot: David & Charles,
1968; Glaister Stephen and Mulley Corinne, Public Control of the British Bus
Industry, Aldershot: Gower, 1983; Mulley Corinne, “The background to bus regulation in the 1930 Road Traffic Act: Economic, political and personal influences in the
1920s”, in The Journal of Transport History, September 1983, p. 1-19.
3
50
Transnational Coordination History
of the very instruments of national, regional and local coordination
practices was published by Nicolas Neiertz, who has undoubtedly
carried out the most extensive and detailed work so far on this topic 6.
Two initiatives undertaken during the last decade to enhance the
study of the road-rail controversy deserve special mention: COST 340
and a series of Dutch Rijkswaterstaat workshops 7.
While the former emphasized public transport and the freight transport functions and addressed intermodality from within this realm, and
while it also tended to take an economic and business history perspective, the latter initiative actually included all modalities and thus also
allowed for approaches that looked beyond economic and business
history. Both initiatives were international in coverage of topics and
in scholarly participation, but while the former resulted in an inventory of national studies, the latter was set up in such a way that participants were invited to respond to a set of basic texts that emphasized
international, if not transnational approaches, with the Netherlands as
central case for comparison 8. In February 2003, the same year that they
would decide to co-found the International Association for the History
of Transport, Traffic and Mobility (T2M) at a conference in Eindhoven,
the Netherlands, COST 340 and the Mobility History group, within the
Tensions of Europe research project, organized a common workshop in
Neuchâtel where various coordination-related papers were presented 9.
Pohl Hans (ed.), Die Einflüsse der Motorisierung auf das Verkehrswesen von
1886 bis 1986; Referate und Diskussionsbeiträge des 11. Wissenschaftlichen Sympo­
sium der Gesellschaft für Unternehmensgeschichte e.V. 27./28. November 1986 in
Fellbach (Zeitschrift für Unternehmensgeschichte, Beiheft 52), Stuttgart: Franz Steiner,
Wiesbaden, 1988; Rohde Heidi, Transportmodernisierung contra Verkehrsbewirtschaf­
tung; Zur staatlichen Verkehrspolitik gegenüber dem Lkw in den 30er Jahren, Frankfurt a. Main: Peter Lang, 1999; Neiertz Nicolas, “La coordination des transports en
France de 1918 à nos jours (Thèse, sous la direction de M. le Professeur François
Caron, Septembre 1995, Université de Paris IV - Sorbonne)”. A book appeared four
years later: Neiertz Nicolas, La coordination des transports en France de 1918 à nos
jours, Paris: Comité pour l’histoire économique et financière, 1999; International:
Schiedt Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C.
(ed.), Verkehrsgeschichte / Histoire des transports, Zürich: Chronos, 2010, 467 p.
7
COST 340 network, “Towards a European Intermodal Transport Network: Lessons
from History” (see: cordis.europa.eu/cost-transport/src/cost-340.htm).
8
For an overview in English of the main results, see: Filarski Ruud (in cooperation
with Mom Gijs), Shaping transport policy; Two centuries of struggle between the public
and private sector – A comparative perspective, The Hague: Sdu Uitgevers, 2011.
9
In particular: Haefeli Ueli, “Stadt und Verkehr; Akteure und Diskurse in Deutschland
und der Schweiz 1950-1970”, paper COST 340/Tensions of Europe – Mobility History
Group conference, Neuchâtel, Switzerland, 13-15 February 2003.
6
51
Gijs Mom
Of the three workshops that took place in 2008 and 2009 in Utrecht,
half of the final one was dedicated to the coordination debate. One
afternoon was reserved for a discussion between historians and civil
servants of the Ministry, resulting in a set of conclusions that may be
worthwhile to present here, if only to enhance and incite the further
development and diversification of a – hitherto quite modest – tradition
of coordination studies.
In the first place, the conclusion at the Utrecht workshop was that
the 1920s should be an explicit part of the periodization of the coordination crisis, despite the fact that the actual legislative measures were
often not taken until the 1930s. This also applies to other countries
than the Netherlands. lready in the prior decade, the systems of rail
and road started to clash. This is especially important if one prefers not
to consider coordination as a sequence of regulations, the result of a
“top-down” planning practice, but rather to include the practices of the
stakeholders. Indeed, it was on the street and on the rails, as much as
in the commissions and in Parliament, that the struggle was fought and
that the clash of the cultures took place.
Second, the coordination process was characterized by a continuous tension between centralization and decentralization. While the
national state used the conflict to intervene ever deeper in society, a
process which had reached its first zenith during World War I, regional
and local authorities had other interests at stake: they wanted to control
access to roads by heavy trucks, decide which roads were to be built
where, and grant licenses to tramway companies, to give just a few
examples of the many activities constituting “coordination” as a local
practice. As part of the classic center-periphery politics, local stakeholders emphasized adverse economic circumstances if national policy
did not prioritize local needs. The end result was that the middle level
of governance (the provinces, the states, the counties, the Länder, the
départements) became the preferential level of execution for measures
that were formulated, standardized, and financed centrally, a model that
we see reappearing over and over again since then.
Third, whereas the conflict seems to lend itself exceptionally well
to a (large technical) systems (LTS) approach, such an approach tends
to forget that one of the main tensions was between large companies
and an ever-growing contingent of small-scale actors, often one-man
enterprises. A single (or a single group of) system builder(s) is therefore
hard to identify. To put it another way, by choosing the LTS approach,
one tends to insert a large-systems bias and thus privilege the railway
“camp” over an actor who was much less centrally coordinated and
52
Transnational Coordination History
did not speak with just one voice. The historical actors themselves,
however, had an advantage, as they could “infiltrate”, so to speak, the
system from below, and this is exactly what happened. Indeed, it is
at this point that a cultural history of coordination could focus upon:
to understand this tension, knowledge of simple cost calculations and
business models is not enough. In the 1920s and the 1930s, small enterprises were part of a general wave of private, if not anarchic initiatives,
driven by the inflation of the early 1920s (and the subsequent crisis
among shippers in inland navigation, for instance) and the Depression
of the late 1920s and 1930s 10. The head-on collisions such stakeholders
experienced with the powers that were provide an excellent locus for
a study of mobility culture, in particular the embryonic emergence of
neo-liberalism as opposed to the self-confident and almost paternalistic
planning attitude of bureaucrats and technocrats. Partisan historians of
mobility may not like it, but there was an embarrassing paternalism and
arrogance on the railway side struggling with an equally embarrassing
narcissism and self-centered vandalism on the automobile side: one saw
mobility-neoliberalism emerge in opposition to a monopolistic attitude
that was facing (or fearing) obsolescence.
Looking at “local history” provides an opening for a continued
debate between historians and policymakers, the aim being to determine
to what extent writing about history can contribute to solving current
traffic and transport policy problems 11. To tackle such problems, but also
to diminish the complexity of the coordination debate, it is worthwhile
to analyse this debate from a variety of perspectives. By looking at
the differences between freight and passenger transport, the tension
between a bottom-up and a top-down approach, the conflict between
urban and regional versus a national level of governance, and the difference between small and large countries. Most of all, it is worthwhile
to analyse coordination as a highly political phenomenon: when British
lorry drivers (educated in the army during the war) started transporting
For a similar analysis on the US, see: Hamilton Shane L., “Trucking Country: Food
Politics and the Transformation of Rural Life in Postwar America (unpubl. diss., Massachusetts Institute of Technology, June 2005)”; Hamilton Shane L., Trucking Country;
The Road to America’s Wal-Mart Economy, Princeton/Oxford: Princeton University
Press, 2008.
11
Mom Gijs, “Droit à la mobilité, liberté ou contrainte? Plaidoyer pour des recherches
nouvelles sur la mobilité/Freedom of Mobility; A Plea for new mobility studies”, in
Gay Christophe, Kaufmann Vincent, Landriève Sylvie, Vincent-Geslin Stéphanie,
Mobile Immobile; Quels choix, quels droits pour 2030; Choices and rights for 2030,
Paris: Éditions de l’Aube/Forum vies mobiles, 2011, p. 143-151.
10
53
Gijs Mom
freight in their army-surplus trucks in the midst of railway strikes, they
not only did so to earn money, they also saw themselves acting against
the “Red Scare”, which was particularly developed among the ranks of
railway workers 12.
The two most recent major studies, by Gustav Sjöblom and Anette
Schlimm, each resonate, in their own way, with some of the desiderata
formulated here 13. Both leave behind the question of national history 14
in that they compare the two countries that could not yet boast a
monographic study of the local coordination debate like that of Neiertz:
Germany and the UK. But while Sjöblom positions his analysis within
the tradition of policy-oriented studies, using, perhaps a bit tautologically, a “private mobility paradigm” as an explanatory concept, Schlimm
breaks with this tradition by bringing into her framework the discourse,
the shaping of a culture among planners and policymakers. Both thus
build bridges to current-day policy issues because they position the
topic in a transnational context without losing sight of the specificities of the local cultures. Sjöblom proposes an approach based on the
concept of Large Technical Systems, compensating for the absence of a
central system builder by proposing to give the mobility users that role.
Schlimm comes out of another tradition: a recent wavelet of interest,
especially among German historians not necessarily related to Mobility
Studies, in (spatial) planning and the culture of “ordering” (Ordnung)
and “social engineering”. Such an interest may provide a perspective
on history that has even more resonance with current-day debates on
Plowden William, The motor car and politics in Britain, Harmondsworth/Ringwood:
Penguin, 1971, p. 366.
13
Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs; Arbeit an der Moderne - deutsche und
britische Verkehrsexpertise im 20. Jahrhundert, Bielefeld: transcript Verlag, 2011; see
also: Schlimm Anette Schlimm, “ʻHarmonie zu schaffen, ist Sinn und Zweck’; Der
Verkehrsdiskurs und die räumliche Ordnung des Sozialen”, in Etzemüller Thomas
(Hg.), Die Ordnung der Moderne. Social Engineering im 20. Jahrhundert, Bielefeld:
transcript Verlag, 2009, p. 67-86; Sjöblom Gustav, “The Political Economy of Railway
and Road Transport in Britain and Germany, 1918-1933 (unpubl. diss., Darwin College,
University of Cambridge, 16 April 2007)”; see also: Sjöblom Gustav, “The shift from
railways to roads: Four propositions about the interwar period in Britain and Germany”,
in Jahrbuch für Wirtschaftsgeschichte, 2007, No. 1, p. 55-65. For an excellent overview
of the post-war transport policy in the UK, see: Starkie David, The Motorway Age;
Road and Traffic Policies in Post-war Britain, Oxford/New York/Toronto/Sydney/Paris/
Frankfurt: Pergamon Press, 1982.
14
Such is still the case in Hey Kevin, “Transport co-ordination and professionalism
in Britain; Forging a new orthodoxy in the early interwar years”, in Journal of Trans­
port History, June 2010, p. 25-41, where the national history is analysed in splendid
­isolation.
12
54
Transnational Coordination History
the limits of neo-liberalism 15. Seen from the perspective of long-term
mentality history, the coordination debate fits into a three-phase model
proposed by German historian Anselm Doering-Manteuffel, who
distinguishes between a first, anti-historicist phase, a second phase
(from World War I until the 1960s) governed by “modernization
theory” (both characterized by an interventionist attitude as opposed
to ­nineteenth-century laissez-faire), and a post-World War II phase of
post-structuralism in a fluid and networked society, culminating in the
election of Thatcher and Reagan 16.
In other words: the coordination crisis fits into a phase of permanent
but ordered change, of “planned progress” and of emergent logistics,
based upon the practices of experts and upon the channeled flows along
highways.
See, for instance: Leendertz Ariane, Ordnung schaffen; Deutsche Raumplanung
im 20. Jahrhundert, Göttingen: Wallstein Verlag, 2008, and the edited volume by
Etzemüller Thomas (Hg.), Die Ordnung der Moderne…
16
Etzemüller Thomas, “Social engineering als Verhaltenslehre des kühlen Kopfes.
Eine einleitende Skizze”, in Etzemüller Thomas (Hg.), Die Ordnung der Moderne…,
p. 11-39; Doering-Manteuffel Anselm, “Konturen von ‘Ordnung’ in den Zeitschichten
des 20. Jahrhunderts”, in Etzemüller Thomas (Hg.), Die Ordnung der Moderne…,
p. 41-64.
15
55
Première partie
Coordination de la mobilité internationale
First Part
Coordinating international mobility
Issues and instruments
for international rail development 1
Martin Schiefelbusch, nexus Institut Berlin
Abstract : Starting from single route-based projects promoted by individual states
or companies, rail became the dominant mode of transport in Europe in the 19th
century. Railway networks covered nearly every part of the continent. As part
of the process of linking the many routes and different companies, solutions for
coordinating the various activities had to be found and procedures for cooperation
across networks had to be developed. As the advantages of an integrated network
quickly became clear, a differentiated system of coordination emerged by the end
of the century.
After World War II, the railways lost their dominant position to motorised road
transport. Although the problems they faced were similar in all countries, and in
spite of the fact that the political and economic integration of Western Europe was
proceeding steadily, solutions for modernising rail transport were mainly sought
on the national level. As a result, European railways presented an increasingly
fragmented offer. Only in the more recent past, starting in the 1990s, have activities
to (re-)connect them on a continental scale begun.
The paper discusses the vision and ideas for international rail services during these
two periods, namely, the heyday of railways in the late 19th century and their
decline in the mid-20th century. The empirical basis consists mainly of industry
sources: the journal of the Association of German Rail Operators (with members
from all Central Europe), and industry periodicals and documents from the Union
Internationale des Chemins de Fer.
The author gratefully acknowledges the assistance of Melissa Gómez and Sonja
Ziener in the synthesising of material and the preparation of this article.
1
59
Martin Schiefelbusch
The paper concludes that in the first period, integration and cooperation evolved,
driven by needs and pragmatism rather than a shared vision. Indeed, different
views were expressed and discussed freely in the journal. In the second period,
political stakeholders and some industry leaders called for closer cooperation quite
early on, but these views were not shared by key industry players who associated
the new proposals with loss of influence and excessive risk.
The railways and their specific integration challenges
Although railways were first built as individual lines in “niches”
where they were particularly useful or where circumstances were
favourable, their potential as a means of integration and the benefits of
a comprehensive network were quickly recognised. The idea of Europe
as a single market, as an arena of experience as well as a space of civil
identity against the still monarchist and aristocratic governments with
their political and military elites, became visible through the railways,
and with reference to this technology, the vision of a civil empire of
peace was promoted.
At the same time, railway technology is a challenging object of
integration. “Integrated” railway traffic, meaning its seamless flow
across borders, requires the establishment of standards in many fields.
It is not sufficient to use the same track gauge; there also have to be
agreements on rolling stock, operative regulations and signalling,
energy supply, configuration of prices and products, and much more 2.
Further challenges arise from the overlapping of different demands on
the rail network. Trains stopping frequently or travelling at low speed
for other reasons occupy more track capacity than those passing without
any stops, and the demand for direct, fast services may conflict with
local needs 3.
Puffert D. J., “The technical integration of the European railway network”, in
Sabbuci P., Giuntini A., Merger M. (eds.), European Networks 19th-20th centuries:
New approaches to the formation of a transnational transport and communications
system, Milan: Eleventh International Economic History Congress, 1994, p. 129-139;
Schot Johan, Buiter Hans, Anastasiadou Irene, “The dynamics of transnational railway
governance in Europe during the long nineteenth century”, History and Technology,
vol. 27, n° 3, 2011, p. 265-289.
3
Schiefelbusch M., Trains across borders. Comparative studies on international
cooperation in railway development, Baden-Baden: Nomos 2013, chapter III;
­
­Schiefelbusch M., Dienel, H.-L., “Rom und/oder Ostende? Zielkonflikte und Interessensgegensätze bei der Entwicklung des europäischen Eisenbahnsystems”, in A
­ mbrosius
G., Neutsch C., Henrich-Franke C. (Hg.), Internationale Politik und Integration
europäischer Infrastrukturen in Geschichte und Gegenwart, 1. Aufl. Baden-Baden:
Nomos, 2010, p. 61-86.
2
60
Issues and instruments for international rail development
Hence the benefits of a “well-integrated” rail come at a price: extra
efforts are necessary to negotiate and maintain “standards” in the
interest of integration, even in cases where the need for it may not be
obvious. In light of the above, this paper explores the understanding
of key stakeholders in the railway industry regarding the attitude to
be taken towards international cooperation in the development of rail
passenger services. We compare the situation in the late 19th/early 20th
century with that of about 60 years later, hence a period in which the
basic preconditions for international services – a linked-up network –
were in place, and ask what has been made of this asset 4.
To get an overview despite the limited resources available, we
analysed periodicals issued by the main railway industry associations
and some archive sources. For the first period, we used the journal
of the Association of German Railway Administrations (“Zeitung des
Vereins deutscher Eisenbahnverwaltungen”) 5 published between 1878
and 1914. This journal provides information about practical development in the railway industry (new routes, tariff changes, etc.) and was
used to publish and discuss new ideas. It should be noted that, in spite
of its name, the Verein had allowed non-German or Austro-Hungarian
companies as full or associated members almost since its foundation.
Administrations from other countries joined in later years. It thus can
be considered an international organisation 6.
For period 2, the following journals were examined: “Die Bundesbahn” (the main professional journal issued by the railways in the Federal
Republic of Germany), “Internationales Archiv für Verkehrswesen”,
“Revue Generale des Chemins de Fer” and “Rail International” (from
1970), the latter issued by the International Union of Railways (“Union
internationale des chemins de fer”, UIC). Particular attention was given
to reports on international projects as well as to relevant editorials, which
A more comprehensive presentation of this issue is provided in Schiefelbusch M.,
Trains across borders…
5
The abbreviation [short form] “Zeitung” with year and page number is used as reference in the following. Articles are shown [referred to] with their headline due to the
frequent lack of a named author […; if the name of the author is known, it is given in
brackets after the headline?]. The short forms “Verein” or “VDEV” are used to refer to
the organisation.
6
On the history of the association, see Kaessbohrer A., “Der Verein Mitteleuropäischer Eisenbahnverwaltungen”, Archiv für Eisenbahnwesen, n° 56, 1933, p. 12-34 ;
p. 345-380; Schot Johan, Buiter Hans, Anastasiadou Irene, “The dynamics of transnational…”, p. 265-289.
4
61
Martin Schiefelbusch
were often written by leading railway managers or t­ransport ministers.
Archive material for this period was taken from the UIC documentation
centre 7 and the German Federal Archive 8.
Discussions about international passenger
services in the Journal of the Association
of German Railway Administrations
The railways on the transport market
– debates on integration and equity
The railways were well aware of their potential to facilitate travel
and thus contribute to spatial integration. In 1871, the new German
Reich had been founded, which facilitated movement within its territory,
although forms of political integration between its individual states had
existed for some time. Similar reports from other countries also showed
how movement of people, but also of goods, had grown. But in contrast
to the image outlined above, the railways were not immune to crises and
had to learn to handle loss-making operations, in particular during the
late 1870s when the German economy was in a difficult situation. Two
strands of arguments emerged from this: to make clear the railways’
contribution to society at large, and to integrate the public’s concerns
into the industry’s strategy in order to become (or at least appear to be)
responsive to its needs.
One argument put forward in favour of railways was the contribution they could make to regional development. A recurring topic
was whether the railways should be extended even further to stimulate regional development and, if so, who should organise and plan
this. Linked to this is the discussion on the role of the state and the
private sector in this industry. Without going into too much detail here
– as much has already been written on the subject 9 – it is interesting
UIC, Conférences commerciales voyageurs, Groupe Permanent Commun: Avenir du
Trafic International voyageurs, Sous-commission mixte commercial-mouvement, and
Groupe ad hoc Confort Optimum Voyageur (referred to as DOC UIC in the following).
8
Bundesarchiv Koblenz (referred to as BA KO in the following), Sections B 108
(Federal Department for Transport, Bundesministerium für Verkehr, BMV), and B 121
(Headquarters of Deutsche Bundesbahn).
9
See, for example, Caron F., “The evolution of the technical system of railways in
France from 1832 to 1937”, in Mayntz R. H. (ed.), The development of large technical
systems, Frankfurt am Main: Campus, 1988, p. 69-103; Fremdling R., “European
Railways 1825-2001, an Overview”, in Ehmer J., Fremdling R., Kaelble H. (Hg.),
Jahrbuch für Wirtschaftsgeschichte, Neue Ergebnisse zum NS-Aufschwung, Köln:
7
62
Issues and instruments for international rail development
to note that this issue was discussed in different countries and covered
by articles in the Zeitung. Many writers supported the involvement
of the state, be it as a planning and coordinating body or as a service
provider. In a comprehensive review of railway policy, Heinrich von
Wittek (a former Austrian minister) praised the efforts of France and
Italy, who developed comprehensive national railway plans already in
the late 1870s. He then demanded a “planned completion of the rail
network”, describing it as “both a matter of poetic justice, which also
allows the less developed parts of the country to participate in the
benefits provided by the railways, and a matter of labour and industry
policy, calling for a balanced use of manpower and machinery” 10.
According to the articles, there seems to have been a preference for
a strong state involvement in the late 19th century. But some authors
also pointed out that public ownership should not imply low fares and
continuous subsidies, as these would undermine the industry’s viability
in the long term 11.
Instruments for international collaboration and integration
These examples show that the railway industry was well aware of its
importance for society, but had differing views on how this role should
be understood and fulfilled. Turning towards the role of the railways on
the international level, we can again distinguish two main arguments:
the railways’ role in international exchange, and international cooperation within the railway sector itself.
The “Verein” itself can be seen as one of the first institutions for
international cooperation, and was also referred to as such in several
articles. According to a review from 1886, the organisation had
develo­ped into a truly “central European organisation”, and it was time
to convince the Swiss and Italian administrations to become members
AkademieVerlag, 2003/1, p. 209-221; Gall L. P., Pohl M. (Hg.), Die Eisenbahn in
Deutschland. Von den Anfängen bis zur Gegenwart, München: Beck, 1999; Klenner M.,
Eisenbahn und Politik 1758-1914. Vom Verhältnis der europäischen Staaten zu ihren
Eisenbahnen, Wien: WUV-Univ.-Verlag, 2002; Ziegler D., Eisenbahnen und Staat
im Zeitalter der Industrialisierung. Die Eisenbahnpolitik der Deutschen Staaten im
Vergleich, Stuttgart: Steiner, 1996 - with reference to the present, e.g., Andersen S. S.,
Eliassen K. A. (eds.), Making policy in Europe. The Europeification of national
policy-making, reprinted, London: Sage, 1998, p. 71 seq.
10
“Grundzüge der Eisenbahnpolitik in Anwendung auf die Einzelgebiete des Bahnwesens” (Heinrich Ritter von Wittek), Zeitung 1909, p. 1541-2.
11
“Zur Tarifreform”, Zeitung 1890, p. 772, and “Grundzüge der Eisenbahnpolitik
in Anwendung auf die Einzelgebiete des Bahnwesens” (Heinrich Ritter von Wittek),
Zeitung 1909, p. 1541-1542.
63
Martin Schiefelbusch
as well. The authors also pointed out that other railway associations
should not be considered as substitutes, because “they actually derive
their regulations from those of the Verein, and so their members have
a serious interest in taking part in the development of these original
regulations [by becoming member of the Verein, author’s note]”.
The time would come when the Verein, reacting to the growth
of its territory, would have to change its name – a sacrifice that,
according to the author, should be taken without regret 12. This actually
took place in 1932 13. The Verein’s standard-setting function was also
mentioned in one of the papers on passenger fares, where the author
observed that “once the fare issue has been solved by the German
and Austrian railways [the main members of the Verein, author’s
note], the other Western European administrations will not stick to
the current p­ rinciples […] and the moment will come when one can
start to look after international passenger traffic together, without
­intermediaries” 14.
The Verein’s coordinating role covered several fields, including
technical standards, rules for joint use of vehicles, and clearing of
revenues between its members 15. In passenger transport, the most
important activity was the so-called “Vereinsreiseverkehr”, a common
fare system for journeys involving its member organisations. These
tickets were first issued in 1884, but their spatial availability expanded
several times as new administrations joined the scheme. In later stages,
non-members of the Verein and non-rail operators (mainly shipping
companies in the North Sea and the Mediterranean) also participated.
In 1903, a review concluded that practically all of Europe could be
“tran­sited by the traveller under favourable conditions” 16.
There is no doubt that this service was an important factor in facili­
tating international travel. In fact, it had already been part of many
railway visionaries’ thoughts in the earlier 19th century. But in the
later years, the more conceptual articles in the Zeitung did not devote
­particular attention to the issue of international connections.
“Der Verein Deutscher Eisenbahn-Verwaltungen und seine Entwicklung als Mitteleuropäischer Eisenbahnverein”, Zeitung 1886, p. 899.
13
Kaessbohrer A., “Der Verein…”, 1933, p. 345-380.
14
“Die Personenbeförderungsfrage auf den Eisenbahnen und die Personentariffrage”,
Zeitung 1889, p. 261.
15
For details see Kaessbohrer A., “Der Verein…”, 1933, p. 345 seq.
16
“Zusammenstellbare Fahrscheinhefte”, Zeitung 1903, p. 1049. The evolution of this
tariff will be described in more detail in a later publication by the author.
12
64
Issues and instruments for international rail development
Long distance and international service development
While the debate on the role of the railways and on topics such as
fare systems receive continuous attention in the Zeitung, the number
of articles on service design (timetables, service standards, vehicle
design and the like) is more limited. Articles worth mentioning deal,
for example, with commercial speed 17, and types of accommodation
provided. The strategies used in different countries can therefore be
compared 18.
The most important “international” issues were without doubt the
international express and sleeping car services and their main provider,
the “Compagnie Internationale des Wagons Lits et des Grands Express
Européens” (CIWL). The CIWL had been founded in 1874 by the
Belgian George Nagelmackers and was unusual in that it was a genuine
private train operator on the one hand, and yet obliged to collaborate
closely with the other rail operators on the other. It ran sleeping car
services either as individual coaches or as complete luxury trains,
but traction was provided by the rail companies whose territory was
served. Furthermore, it operated restaurant cars and later set up hotels,
travel agencies and restaurants as well. The transfer of the sleeping car
concept from America to Europe by Nagelmackers was without doubt
a significant improvement for long distance travellers. The ­company’s
income was generated from a supplement of the first class fare,
while fare revenues themselves were passed on to the train operators,
­providing motive power. In 1898, 18 routes were served by complete
CIWL trains; single sleeping cars ran on another 57 routes, restaurant
cars on 58 and salon cars on four 19. Night trains were also operated on
other routes by other companies, but the CIWL remained unique in the
level of service it provided and as a symbol of both a truly European
service and of peaceful interaction 20.
Average speed of a train achieved over a longer distance, hence after including all
time losses due to passenger and scheduled service stops.
18
“Unsere Schnellzüge”, Zeitung 1888, p. 881 seq; “Verminderung der Klassenzahl im
Personenverkehr”, Zeitung 1902, p. 535-537; “Zur Reform der Personenbeförderung”,
Zeitung 1885, p. 37 seq; “Der Personentarif der Eisenbahn”, Zeitung 1889, p. 185 seq;
“Personenbeförderung auf den Eisenbahnen u d Personentariffrage”, Zeitung 1889,
p. 245 seq.
19
“Internationale Schlafwagen- und Expresszuggesellschaft”, Zeitung 1898, p. 141 seq.
20
“Das 25jährige Jubiläum des Orient-Expresszuges”, Zeitung 1908, p. 868 seq.;
cf. also Dienel H.-L., “Die Eisenbahn und der europäische Möglichkeitsraum,
1870-1914”, in Roth R. (Hg.), Neue Wege in ein neues Europa. Geschichte und Verkehr
im 20. Jahrhundert, Frankfurt am Main: Campus, 2009, p. 105-123.
17
65
Martin Schiefelbusch
In the above list of CIWL’s luxury trains, the Orient Express was the
first and clearly the most famous service. It was opened in stages from
its first run in 1883 and developed into a group of services. Innovative
approaches were tried in various areas such as the shifting of customs
procedures into the train to speed up onward connections 21. Locomotives were equipped with cow catchers to reduce problems with cattle on
the tracks in the Balkan area. The company sought to speed up the train
as much as possible, and the coordination of timetables across the many
company and state boundaries was without doubt a major achievement
for the time. In spite of this, one has to remember that the Orient Express
was a luxury service catering only for a very small elite customer base.
This kind of service therefore seemed out of place in the light of other
demands made by the public, such as lower fares and faster services 22.
The future of international trains in the European
transport policy debate in the 1970s
International cooperation
Although the railways lost much of their market share and thus
p­olitical importance over the second period, optimistic or even
­enthusiastic voices praising the opportunities offered by the European
integration can be heard throughout this period. They are most evident
in the mid-1950s and the early 1970s, when several institutions, in
particular the UIC and the then European Economic Community
(EEC), started to look for ways of revitalising the rail sector after a
period of decline. Statements of “borders being obsolete”, the need
to “think international” 23 and go beyond national thinking 24 can be
found in particular in the journal editorials. Commentators pointed to
progress that had recently been made in European economic integration (Common Market). The rail industry, it was said, needed to adapt,
take up this opportunity and learn from it instead of locking itself
into a purely national approach of problem solving 25. To revitalise the
“Der Orient-Expresszug”, Zeitung 1885, p. 785 seq.
“Ein Beitrag zur Reform der Personentarife”, Zeitung 1885, p. 253 seq.
23
Ratter J., “The continental concept of railways”, Rail International, 1970, p. 73.
24
Sudreau P., “Le rail et l’Europe”, Rail International, 1970, p. 113-116; Bruin M. G.
de, “Zu einer engeren Zusammenarbeit zwischen den europäischen Eisenbahnunternehmungen”, Schienen der Welt, 1971, p. 479-491; Bruin M. G. de, “Experiences
of 50 years of cooperation, orientations to the future”, Rail International, 1972,
p. 723-729.
25
Sudreau P., “Le rail et l’Europe…”, p. 115.
21
22
66
Issues and instruments for international rail development
railways on a European rather than a national scale would offer significant economies of scale 26. As we shall see below, this enthusiasm about
the general thrust of European integration was neither universal nor free
from concerns and conditions. But it nevertheless went beyond being a
mere slogan put forward in high-level debates and similar occasions.
A range of measures was discussed to put integration into practice.
The UN ECE’s 27 document from 1969 discussed two main topics: levels
of comfort for passenger rail services and the division of transport tasks
between road and rail. Both were covered in good detail. In contrast to
what might be expected from a political body, the document was detailed
regarding service development, but did not consider ways to put these
ideas into practice 28. The ECMT’s 29 report from the same year was more
comprehensive in the issues addressed and also included reflections
on the reasons for the railways’ current situation 30. The document was
prepared as part of the ECMT’s work programme and based on consultations with the national delegations. Two main areas of activity were
identified: (a) the removal of administrative barriers hindering international rail traffic, and (b) getting the administrations (departments) to
develop incentives for the railways to intensify their cooperation in both
technical and commercial matters. Two chapters were devoted to each of
these two areas, focusing on practical and short- to medium-term issues.
The report explicitly acknowledged the specific challenges for collaboration in the rail sector by stating that “the present system of operation
is still characterised by each network’s focus on activities on a national
scale, and this system has never reached the industrial dimensions
which would be adequate for a truly trans-­national scale. [This can be]
explained without doubt by the singular phenomenon that the railways
are the only type of transport which does not ‘export’ its services across
the national borders” (p. 25-26).
On the political level, there was far-reaching agreement that this
was to change. The most radical proposals went as far as to claim
that in a unified Europe, the time had come for railways to unite, too,
hence a call to merge the national railway companies into some kind
Lacarrière P., “L’avenir…”, p. 367.
United Nations Economic Commission for Europe.
28
All documents in BA KO B108/28977.
29
European Conference of Ministers of Transport.
30
“Bericht zum Thema der Förderung des internationalen Eisenbahnverkehrs”,
CM(70)25, Paris 16 Nov 1970 - BA KO B108/55626. All quotations in this paragraph
from this document.
26
27
67
Martin Schiefelbusch
of supranational entity 31. A less radical position proposed the formation of new jointly owned companies to take over the most important
(and prestigious) tasks on a supranational level. In the discussion of
the EEC’s initiative and report on cooperation in the rail industry, the
French delegation proposed, for example, a joint commercial organisation to recapture traffic for which “the railways, according to their
potential, should be the natural carrier” 32. The proposals of the Dutch
delegation went in the same direction and provided further details on
how such a joint organisation serving the main traffic flows could be set
up 33. International container services and fast international passenger
trains were suggested as areas of activity. Another, again less novel
approach suggested more intense collaboration of the national rail
operators on specific tasks in cross-national coordinative bodies, which
could be either existing or new foundations. The UIC, with its system
of ­
sub-institutions, working groups, thematic circles, etc., was also
proposed as a good forum for developing a more intense cooperation.
The need for cross-national collaboration was not challenged in
public. However, the unpublished sources examined for this analysis
show that this enthusiasm was met with scepticism by important
stakeholders. There was a fear that interests organised on the national
level would lose influence, a fear expressed through warnings against
a premature handing over of competencies or duplication of existing
structures, and through the suggestion that existing cooperative structures (mainly those provided by the UIC) should be better used before
establishing new ones.
In their response to the consultation held in 1970-71 by the EEC
on its policy document about the collaboration of Europe’s railways,
the rail companies argued that the time for a “European rail company”
had not yet come 34. They conceded the need for better cooperation,
Lacarrière P., “L’avenir…”, p. 369; Sudreau P., “Le rail et l’Europe…” [ditto],
p. 115; Bruin M. G. de, “Zu einer engeren Zusammenarbeit…”; Leber G., “Le chemin
de fer…”.
32
“Erklärung der französischen Delegation zur Zusammenarbeit zwischen den Eisenbahnen der Mitgliedsstaaten” at Council meeting 4 Jun 1970, BA KO B108/52907, p. 2.
33
“Note der niederländischen Delegation hinsichtlich kurzfristig zu ergreifender
Maßnahmen zur beschleunigten Verwirklichung einer gemeinsamen Verkehrspolitik” at
Council meeting 4 Jun 1970, BA KO B108/52907; see also Bruin M. G. de, “Zu einer
engeren Zusammenarbeit…”; Bruin M. G. de, “Experiences of 50 years of cooperation,
orientations to the future”, in Rail International, 1972, p. 723-729.
34
Statement by the grouping of the railways of the 6 EEC Member States to the EEC
Council, 8 Oct 1971, p. 3- BA KO B108/52907.
31
68
Issues and instruments for international rail development
but their statement made it clear that they preferred to work together
in the existing arrangements as separate entities. A detailed description
of current activities, studies and objectives for the coming years was
attached to support their claim. Reference was repeatedly made to the
UIC’s activities, which would also provide a more suitable geogra­phical
area of reference than the six EEC states 35.
This “pragmatic” approach can be traced back mainly to German
interventions, both from the Department of Transport and the Bundesbahn headquarters 36. In a letter from 15 September 1970 37, the president of the Bundesbahn, Oeftering, recommended that his colleagues
welcome the proposals in principle, but work against the establishment of new international organisations (which had been suggested
by other countries) to promote cooperation. Nevertheless, according
to Oeftering, new working groups and a closer contact of the EEC
members’ railways within the UIC should be developed. The German
Department of Transport was prepared to agree with the French
proposals, but quite explicit in its rejection of the Dutch ideas, which
were seen as an illegitimate attempt to increase the Netherlands’
influence on freight traffic to and from the North Sea ports. Any
“brainwashing” of the railways and any attack on their commercial
independence would be unacceptable 38.
The practical scope of this debate was to prevent the Community
from formulating too detailed and demanding expectations regarding the
railways’ future international collaboration. The EEC Council discussion reflects the different opinions on how much should be expected
from them, but the resolution itself also contained ­alternative wordings
on who should be obliged to report on progress 39. Even this issue was
regarded with scepticism on the German side because it feared that
overly comprehensive and detailed reports could lead to c­onclusions
As before, p. 8.
The records in the German archive do not contain detailed information from the
other EEC’s railways, but minutes from full group meetings show that Italy, Luxemburg
and Belgium agreed with the German position in the subsequent debate. Cf. BA KO
B108/52907.
37
Cf. BA KO B108/52907.
38
The term “Gehirnwäsche” (brainwashing) is used in the internal minutes of BMV,
unit E2, meeting of transport issues group, Brussels 16 Sep 1970, BA KO B108/52907.
On Dutch interests regarding port access, see letter of BMV unit E2 to unit A3, 13 Jul
1970, p. 9 seq., and undated memo of BMV units A3 and E2 - all BA KO B108/52907.
39
“Entwurf für eine Entschließung des Rates über die Zusammenarbeit zwischen den
Eisenbahnen” (R/2437/d/70), and minutes of Council discussion on 8 Oct 1970, BA KO
B108/52907.
35
36
69
Martin Schiefelbusch
which might endanger the railways’ independence 40. As evident from
the second draft of the resolution, the railways’ pressure on their
counterparts was successful: the final document of 1972 contained
numerous requests for the railways to report on or better investigate
possible cooperation in various fields, but placed no formal obligations
on them 41.
Protecting their “independence” from government interventions
and control was an interest shared by many European railways, but the
German Bundesbahn’s (DB) insistence on this issue is bewildering for
two reasons: first, at the same time, DB complained about insufficient
financial support from the government. Second, the Bundesbahn was
actually among those with the least commercial freedom and the largest
dependence on government approval for its actions 42.
Market environment
The changes in the competitive environment of the railways constituted an important topic in the industry’s reflection on its potential
future role. Commentators in the period around 1970 were aware that
the railways had experienced a period of decline not only in their
market share, but also in terms of perception among users and policymakers. Public interest and confidence could not be taken for granted
anymore 43.
The loss of their monopoly position was acknowledged in the
industry, leading to a debate on what the future role of rail could be in
a world where road transport was continuously gaining market share.
Another factor which in the end worked against a pro-active approach
to international cooperation was the reliance of railway managers on
regulation and other types of state intervention as a means to combat
losses of market share 44.
As above, p. 4 of minutes.
Draft translation in internal document, BMV unit E2, BA KO B108/52907.
42
Mäger F.-O., “Die Deutsche Bundesbahn als Verkehrsunternehmen”, Gegenwarts­
kunde. Zeitschrift für Wirtschaft und Schule, vol. 14, 1965, p. 111-122; Kopper C.,
Die Bahn im Wirtschaftswunder. Deutsche Bundesbahn und Verkehrspolitik in der
Nachkriegsgesellschaft, Frankfurt am Main: CampusVerlag, 2007.
43
Laccarière P., “L’avenir…”.
44
E.g., UIC, Die Lage der europäischen Eisenbahnen. Maßnahmen aus der
Denkschrift des UIC vom Februar 1951, Anregungen für in Aussicht zu nehmende
neue Maßnahmen, Bundesarchiv Koblenz, B121/493/UIC, Die Lage der europäischen
Eisenbahnen von 1953, Bundesarchiv Koblenz, 1953, B121/493; Kopper C., “Die
Bahn im…”.
40
41
70
Issues and instruments for international rail development
The competitive situation clearly influenced the debate on promising
markets for rail. Sometimes this was expressed positively as “areas of
competitive advantage” 45, but occasionally also by an explicit acknowledgement that certain activities should be given up 46. Such considerations were developed at about the same time both on the European level
and within the different countries, and often led to new policy guidelines
or reports on future rail and transport (e.g. the well-known Beeching
report in Britain, the Nora report on the French railways, and the transport policy programme developed in Germany after the new Minister
Georg Leber took office in 1969) 47. Long distance traffic, container
trains and some other aspects of freight transport, and local passenger
services in agglomerations were usually recognised as markets with
potential for rail. Even within these segments, however, a need for some
consolidation and withdrawal of unprofitable activities was considered
necessary 48. While the reductions discussed affected mainly short-distance and rural traffic, this does not mean that the long-distance sector
was generally seen as an interesting market. International services were
not necessarily addressed explicitly.
Service development
Despite of the negative developments in rail’s market share, the
period under review was also a time of progress. Steam traction was
replaced by electricity and combustion engines, and the mainline infrastructure was modernised. These technical issues were also discussed
on a supra-national level, even though common standards could not
always be achieved.
One “visionary” strategy for offering something new on this market
is clearly the Trans Europ Express or TEE network of fast premium train
connections between different European states. This was introduced with
the summer timetable of 1957, following an idea first set out by the president of the Dutch Railways, Den Hollander, in 1953. His idea was to
connect the most important cities in Europe with a network of fast, direct
Lacarrière P., “L’avenir…”, p. 367.
UN ECE, Inland Transport Committee, sub-committee “Railways”, Secretariat’s note
- W/TRANS/SC2/220, p. 3 seq., BA KO B108/28977.
47
Cf. Kopper C., “Die Bahn im…”, p. 30, Zeilinger S., Wettfahrt auf der Schiene. Die
Entwicklung von Hochgeschwindigkeitszügen im europäischen Vergleich. Deutsches
Museum – Beiträge zur Historischen Verkehrsforschung, Frankfurt am Main: Campus,
2003, p. 98 seq.
48
UN ECE, Inland Transport Committee, sub-committee “Railways”, Secretariat’s note
- W/TRANS/SC2/220, p. 3 seq., BA KO B108/28977.
45
46
71
Martin Schiefelbusch
passenger trains of a premium standard, to create yet another symbol
of collaboration among Europe’s railways 49. The seven administrations
that agreed on the TEE’s introduction 50 formulated a set of quality standards for this service 51. The TEE network was to expand further in the
following years, also into countries not yet served, but gradually shrank
from the early 1970s onwards, until services officially ended in 1987 52.
In terms of integration and standardisation, it is worth noting that the
original concept underwent significant changes both before it was first
implemented and during its existence, making these “standards” very
flexible. The most important deviation from the original concept was
the provision of services by the national operators on their own (with
bilateral technical collaboration), whereas Den Hollander had originally
envisaged TEE trains being run by a new “European” company jointly
owned by the national administrations. In the debate that followed,
it quickly became clear that the proposed new type of service was
welcomed, but that the formation of a separate company was c­ onsidered
too difficult and not necessary 53.
The topic was picked up again in the late 1960s in the debate on the
railways’ future on the passenger market. In these discussions on a new
“standard” model for international passenger services, the TEE concept
was still an important, apparently unchallenged model 54, although the
first route closures were to be discussed almost at the same time.
Working group members agreed that a similar model, but with a wider
“Une page nouvelle dans l’histoire du Chemin de fer: le Trans-Europ-Express”,
Bulletin de l’Union Internationale des Chemins de Fer, vol. 28, n° 6, 1957, p. 177-178;
Ratter J., “The continental…”, p. 73; Bruin M. G. de, “Zehn Jahre TEE…”, p. 303.
50
Belgium, France, Federal Republic of Germany, Italy, Luxemburg, Netherlands,
Switzerland.
51
Huber E. W, “Zur kommerziellen Gestaltung des Trans-Europ-Express-Dienstes”,
Die Bundesbahn, 1957, p. 598-601; Stöckl F., Trans-Europ-Express. Der Werdegang
des TEE-Betriebes, Augsburg: Rösler & Zimmer, 1971; Steenwinkel M. de, “L’organisation du service du Trans-Europ-Express”, Bulletin de l’Union Internationale des
Chemins de Fer, vol. 28, n° 6, 1957, p. 180-186; Bruin M. G. de, “Zehn Jahre TEE…”,
p. 303.
52
For details, see Mertens M., Trans Europ Express, TEE, Düsseldorf: Alba, 1987;
Stöckl F., Trans-Europ-Express…
53
Kopper, C., “Die internationale Zusammenarbeit der Deutschen Bundesbahn”, in
Ambrosius G., Neutsch C., Henrich-Franke C. (Hg.), Internationale Politik und Integ­
ration europäischer Infrastrukturen in Geschichte und Gegenwart, 1. Aufl. BadenBaden: Nomos, 2010, p. 213-231.
54
Note of the GPC to the Pushing Group on issues raised by Mr Wichser (SBB),
attachment 4 to agenda of Pushing Group meeting 1 June 1970 (original German), DOC
UIC 1375.
49
72
Issues and instruments for international rail development
commercial outreach, in particular regarding non-­premium customers,
would be desirable. But there was no agreement on what this model
might look like. At the time of these discussions, the “Intercity” (IC)
brand had been introduced for fast, high-quality domestic trains in
Germany 55, Britain 56 and some other countries. The first German
IC network (introduced in May 1971) consisted of several fixed
routes where first class-only trains operated at 2-hour intervals with
consistent speeds and stopping patterns. In the UIC’s discussions of
the early 1970s, this concept was one of the options discussed, but
participants could neither agree on it nor find a ­convincing alternative.
The group’s work was also criticised by insiders. Some initiatives to
analyse the decline of international traffic in the 1960s had led to insufficient responses by the member administrations, and efforts to obtain
precise data were not taken far enough 57. The wide range of topics was
beyond the scope of the restricted time and resources its members could
devote to their work 58. On the other hand, the coordination between the
different UIC bodies was criticised as leading to unnecessary duplications. In 1971, the GPC’s president resigned because of the lack of
support and progress 59.
Already in 1967, a “Commission for Prospective Research” had
been set up following a decision by the UIC to develop conceptual
long-term planning. It submitted its report to the Executive Committee
in March 1970 60. Under the presidency of the French SNCF, a survey of
member administrations’ activities and ideas was conducted. Regarding
the status quo analysis, a convergence of ideas and tendencies regarding
the improvement and development of the rail offer was noted. However,
compared to the fast development of international transport by other
modes, the results achieved in the rail sector seem less impressive.
Gall, L. P. (Hg.), Pohl M., Die Eisenbahn in Deutschland….
Shin, H., InterCity: the regeneration of Britain’s railways, 1950s-1970s, 8th T2M
Annual Conference, New Delhi, December 2010.
57
Minutes of Commercial Conference on Passenger Services, section on the analysis
of international passenger traffic (original French), Basel, 23 Sept. 1968, p. 146, DOC
UIC 3902.
58
Method of working of GPC, attachment B to agenda of 14 Dec 1970 (original:
German), DOC UIC 1377.
59
Letter of Mr Weber to Mr de Bruin as acting president of the Pushing Group, attachment C to PG meeting 7 June 1971 (original German), DOC UIC 1372.
60
UIC Recherche Prospective, “La recherche prospective dans les chemins de fer”,
Revue générale des chemins de fer, 1970, p. 537-553; “Le Comité de gérance de
l’Union Internationale des Chemins de fer”, Rail International, n° 4, 1970, p. 273-274.
55
56
73
Martin Schiefelbusch
Analysis and outlook
If we compare these findings, the role of the “international dimension” in the two periods shows interesting differences. Simplifying as
far as possible we may conclude the following: in the first period, no
common vision – in the form of a commonly discussed and agreed
document – emerged from the documents studied. No call for such a
vision could be identified either. On the other hand, the “internationality of railways” was practised in various ways, in particular through
the ongoing expansion of networks and services and through the necessary evolution of cooperation within the industry. This “internationalising” tendency arguably kept pace with the evolving needs of the
public. The fact that rail development was to a larger extent driven by
profit-­oriented both public and private interests certainly contributed to
this, and may explain why international issues were less controversial.
The references made to the situation in other countries in the Zeitung’s
articles show that, as a frame of reference and source of ideas, international exchange was lively and useful.
In the second period, not one but several visions were put forward
(from technical cooperation via service standards to a pan-European rail
operator), but on the whole the outcome was less impressive. In the
1950s, railway industry leaders were caught up in the enthusiasm for
European integration like many others, and developed the TEE brand
as their contribution. At the same time, however, as shown in section 3,
rail lost ground in the transport sector. Industry leaders had some of the
railway managers as their allies, and in the early 1970s the first plans
for a European network were presented at last. However, the references in this paper also show that the rail industry did not agree on the
way forward in every respect. While this might not have been a major
problem in itself, it is also evident from the sources that the future vision
for the industry was closely linked to influence and control. Influential
parts of the industry tried to prevent the formation of new, competing
bodies and to keep the role of outsiders to a minimum. Thus there may
have been visions, but no visionaries to implement them.
74
Politique commerciale internationale des chemins
de fer fédéraux (CFF) durant la Seconde Guerre
mondiale – Entre concurrence fantasmée
et coopération effective
Gilles Forster, HEAD – Genève (HES-SO)
Abstract : Rail transit through Switzerland increased significantly during World
War II (the volume of transit traffic was four times pre-war volumes). This article
highlights the main reasons behind the growth: the historical and geostrategic
context, the law and the policy of neutrality, the financial interests of the Swiss
Federal Railway (SBB), and competition in international freight transport. Through
its specific focus on the economic perspective, the article provides a new point of
view of Swiss transport policy during World War II.
Comment expliquer la très forte croissance du trafic à travers
la Suisse durant la Seconde Guerre mondiale ? En quoi la concurrence, principalement de la ligne ferroviaire du Brenner, constituet-elle un facteur explicatif de l’augmentation du trafic par le Gothard
et le Loetschberg-Simplon ? Voici quelques-unes des interrogations
auxquelles cet article a l’ambition d’apporter réponse. Mais avant, il
convient de décrire l’augmentation du trafic international en Suisse
pendant la guerre et les différentes raisons qui expliquent cette
croissance inédite. Outre la concurrence, nous en avons déterminé
­
trois : le contexte historique et géostratégique, le droit et la politique de
neutralité et les intérêts financiers des Chemins de fer fédéraux (CFF).
En ­conclusion, nous discuterons de la notion de concurrence dans ce
contexte particulier. Auparavant, un bref rappel du rôle des chemins de
fer durant la Seconde Guerre mondiale s’impose.
75
Gilles Forster
Le quasi-retour au monopole des chemins de fer
durant la Seconde Guerre mondiale
Alors que depuis les années 1920, mais surtout 1930, le trafic routier
s’érige en véritable concurrent du train, tant pour le trafic marchandises
que de personnes, la guerre et ses restrictions vont consacrer le chemin
de fer comme « l’unique moyen de transport » 1. Les carburants liquides
qui sont désormais – et dans toute l’Europe – réservés aux seuls convois
militaires font disparaître tout mode de transport ­concurrent. ­L’historien
Philippe Burrin estime ainsi que le Troisième Reich est avant tout un
empire ferroviaire 2. Cette nouvelle réalité va se traduire concrètement par une très forte augmentation du trafic ferroviaire international
à travers la Suisse. Tandis que durant les années 1930 les volumes
transportés plafonnent entre 2 et 3,54 millions de tonnes 3, la guerre va
­représenter une rupture. Le bond quantitatif (jusqu’à plus de 8 millions
de tonnes) est remarquable.
Le volume record de 1941 ne sera rejoint qu’en 1965, et il faudra
attendre douze ans – de 1945 à 1957 – pour transporter autant de
marchandises en transit que durant la Seconde Guerre mondiale, soit
environ 32 millions de tonnes 4. Entre 1940 et l’été 1943, le volume de
ce transit nord‑sud est en moyenne près de quatre fois plus important
qu’en 1938 5. À lui seul, le charbon constitue 90 % du trafic entre 1938
et 1940 et plus des trois-quarts ensuite 6.
« Die Eisenbahn als einziges Transportmittel », p. 12, Bundesbahnen im Kriege,
Archives fédérales suisses (AF), E 8300 (A) 1998/246, vol. 75a. Le thésaurus a été
effectué par les Archives fédérales suisses. Les cotes ont été changées lors du transfert
de ces fonds à la Fondation pour le patrimoine historique des CFF. Des tables de
conversion permettent néanmoins de retrouver les documents.
2
Burrin Philippe, in Association pour l’histoire des chemins de fer (AHICF), Une
entreprise publique dans la guerre : la SNCF, 1939-1945, Paris : Presses universitaires
de France, 2001, p. 173.
3
Burkhardt Peter, Der schweizerische Gütertransitverkehr – Eine Untersuchung über
die Bedeutung des schweizerischen Eisenbahn und Strassennetzes für den europäischen
Güterverkehr, Winterthour : P.G. Keller, 1960, p. 29.
4
Forster Gilles, Transit ferroviaire à travers la Suisse (1939-1945), Zurich &
Lausanne : Chronos & Payot, 2001, p. 42‑44 ; Forster Gilles, « L’importance de la
ligne du Gothard pendant la Seconde Guerre mondiale », in Panzera Fabrizio, Romano
Roberto (a cura di), Il San Gottardo. Dalla galleria di Favre all’AlpTransit, Bellinzone :
Salvioni, 2009, p. 133‑139.
5
Moyenne de 1938 : 108 000 tonnes. Moyenne mensuelle de 1940 à juillet 1943 :
423 000 tonnes. Données : « Statistische Ausgabe für internen Gebrauch », AF, E 2001
(D) -/3, vol. 348 ; « Notiz Mitteilung von Herrn Stabler », AF, E 2001 (D) -/3, vol. 347.
6
Transit de charbon entre 1938 et 1940 : 7 927 000 tonnes ; transit total nord‑sud :
8 776 000 tonnes. Entre 1941 et 1944, transit de charbon : 16 739 000 tonnes ; transit
total nord‑sud : 21 860 000 tonnes.
1
76
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
Graphique 1 : Évolution du trafic ferroviaire de transit à travers la Suisse
en millions de tonnes nettes (1885‑1980)
mio t
12
10
7
6
5
4
3
2
1
0
1885 90
1900
1910
1920
1930
1940
1950
1960
1970
1980
Source : Ratti Remigio, « Les relations commerciales européennes à travers
les Alpes : l’espace de marché du Saint-Gothard », in Dokumente und
­Informationen zur Schweizerischen Orts-, Regional- und Landesplanung
(DISP), n° 68, Zurich, 1982, p. 26.
Tous parcours confondus, c’est toutes les vingt minutes qu’un train de
charbon se met en route d’Allemagne vers l’Italie, soit 72 trains par jour 7.
Il passe ainsi entre 1 000 et 1 500 wagons par jour, avec des pointes
à 1 800 8. On imagine sans peine les problèmes techniques que pose un
pareil trafic.
Le charbon n’est pas seul en cause. L’économie de guerre de l’Italie
dépend encore de l’importation de métaux, fer et acier surtout, et de
Piekalkiewicz Janusz, Die Deutsche Reichsbahn im Zweiten Weltkrieg, Stuttgart :
Motorbuch Verlag, 1979, p. 107 ; Rieder Maximiliane : « Zwischen Bündnis und
Ausbeutung – der deutsche Zugriff auf das norditalienische Wirtschaftspotential
1943‑1945 », Quellen und Forschungen aus italienischen Archiven und Bibliotheken,
Tübingen, 1991, Bd 71, p. 628.
8
Tanner Jakob, « Or & Granit. La défense nationale et les liens économiques entre
la Suisse et le Troisième Reich durant la Seconde Guerre mondiale », Les Annuelles,
Lausanne, 1990, p. 38.
7
77
Gilles Forster
céréales 9. Le transit des métaux croît sensiblement durant les hostilités. Entre 1941 et l’été 1943, la Suisse en voit passer entre 950 000
et 1,1 million de tonnes 10. Le tunnel du Gothard offre en effet le lien le
plus direct entre les grands centres sidérurgiques allemands et le pôle
industriel italien le plus dynamique 11. Enfin, pour l’Italie qui connaît
des conditions alimentaires particulièrement précaires, le partenaire
allemand expédie en 1943 300 000 tonnes de céréales, dont tout laisse
supposer que la plus grande partie est passée par la Suisse 12.
Dans le sens sud-nord, le trafic augmente également fortement,
surtout avec le pillage économique de l’Italie qui se met en place à
partir de l’invasion allemande de septembre 1943. Ce trafic répond
toutefois à une logique spécifique qu’il est difficile de mettre en
relation avec celui du Reich vers la Péninsule. Du reste, les autorités
suisses ont reconnu les bouleversements et adopté une politique différenciée. Pour ces raisons, le trafic sud-nord ne sera pas traité dans le
présent article 13.
Le contexte historique et géostratégique
D’un point de vue géographique, la Suisse se situe véritablement
entre les deux puissances de l’Axe que sont le Troisième Reich et l’Italie
mussolinienne (cf. carte 1). Avec la guerre, les relations é­conomiques
entre les deux régimes se resserrent grandement. L’historienne Angela
Raspin le souligne : « L’Allemagne était de loin le principal fournisseur
de l’Italie, et l’Italie le plus gros client de l’Allemagne. » 14
Le rapprochement italo-allemand se traduit principalement par
l’envoi de charbon allemand à destination de l’Italie qui en est presque
« Das Entscheidende sei, dass die fünf Schlüsselpositionen der italienischen Kriegs­
wirtschaft, nämlich Kohle, Eisen und Stahl, Mineralöl, Aluminium, und Kautschuk
gesichert seien. » (Botschaft in Rom – Auswärtiges Amt, 22 février 1941, Akten zur
deutschen auswärtigen Politik (ADAP), D12, n° 71, Göttingen : Vandenhoeck &
Ruprecht, 1969, p. 104‑107, p. 105).
10
On estime qu’entre 45 % (1941) et 76 % (1942) des importations italiennes de fer
brut passent par la Suisse. Forster Gilles, Transit…, p. 64‑65.
11
Tissot Laurent, « Les traversées ferroviaires alpines suisses et leur rôle sur l­ ’économie
européenne (1880‑1939)», Histoire, économie et société, no 1, 1992, p. 95.
12
Forster Gilles, Aspects internationaux du trafic ferroviaire suisse pendant la
Seconde Guerre mondiale : enjeux humanitaire, économique, politique et stratégique,
thèse de doctorat, Université de Bâle, 2004, p. 78‑79.
13
Sur le trafic sud-nord, on peut se référer à Forster Gilles, Transit…, p. 91‑110 ;
Forster Gilles, Aspects…, p. 110‑129.
14
Raspin Angela, The italian war economy with particular reference to italian relations
with Germany, New York : Garland Pub., 1986, p. 378.
9
78
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
totalement dépourvue. En février 1939, l’Allemagne s’engage à
lui fournir 12 millions de tonnes par an. Or à cette date, ce ne sont
encore que 26 % de ces exportations qui empruntent le rail ; le reste
est acheminé par voie maritime via le détroit de Gibraltar. Mais avec le
blocus maritime anglo-saxon de mars 1940, les Allemands sont obligés
de tout expédier à travers les Alpes, un million de tonnes mensuelles,
et uniquement par chemin de fer 15. C’est alors que le transit à travers la
Suisse prend une importance stratégique cruciale : le charbon allemand
est désormais indispensable à la survie économique de l’Italie et « le
ravitaillement en charbon n’est plus un problème de production, mais
de transport » 16. Transports qui sont, comme le remarque le ministre de
la Propagande Goebbels, la clef de la guerre 17.
Si l’on compare les volumes en transit et le total des importations
italiennes, c’est plus de 45,5 % des importations italiennes de charbon
qui traversent la Suisse 18. Les données fournies par Carl Clodius en
septembre 1943 nous indiquent la proportion voisine de 42,7 % 19. En
outre, la part du charbon en transit a tendance à augmenter au cours de
la guerre. Avant le conflit, la part suisse n’était que d’environ 15 % ;
elle dépasse deux fois les 50 % pour les trois premières années des
hostilités. Elle atteint même 62 % en 1944. Par rapport au charbon
consommé en Italie, on remarque qu’environ un quart a transité par
la Suisse entre 1940 et 1943 et que cette proportion frôle les 50 %
en 1944. C’est donc lorsque l’Italie est occupée par les nazis et que son
économie est complètement asservie à une stratégie de guerre totale que
son approvisionnement dépend le plus des liaisons transalpines suisses.
Les lignes du Loetschberg-Simplon et du Gothard sont en effet avec le
Brenner les principales voies de transports ferroviaires reliant les deux
pays (cf. carte 1).
Aufzeichnung Schmidt (Büro RAM), 10 mars 1940, ADAP, D8, n° 665, BadenBaden & Frankfurt/Main : P. Keppler, 1961, p. 695‑702. Sur la prise de conscience
par les autorités suisses des conséquences de ce changement : Masson au Département
politique, 19 mars 1940, Documents diplomatiques Suisses (DDS), vol. 13, n° 254,
Berne : Benteli, Cop. 1991, p. 599‑601.
16
Raspin Angela, The italian war economy…, p. 147.
17
Cité par Hildebrandt Klaus, « Die Deutsche Reichsbahn in der nationalsozialistischen Diktatur 1933‑1945», in Gall Lothar, Pohl Manfred (eds.), Die Eisenbahn in
Deutschland : von den Anfängen bis zur Gegenwart, Munich : C.H. Beck, 1999, p. 224.
18
Forster Gilles, Transit…, p. 58-60.
19
Clodius indique qu’entre le 1er avril 1940 et le 31 août 1943, la quantité de charbon
livrée aux Italiens est de 40 260 000 tonnes. C’est à partir de cette donnée que nous
trouvons la proportion de 42,7 % (Aufzeichnung Clodius, 11 septembre 1943, ADAP,
E6, n° 309, Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 1979, p. 528‑532).
15
79
Mont-Cenis
Nice
Lausanne
SUISSE
80
Gênes
Milan
Chiasso
ITALIE
Bregenz
Florence
Bologne
Verone
Bolzano
San Candido
Brenner
Innsbruck
ALLEMAGNE
Villach
Venise
Trieste
Udine
Piedicorte
Tarvisio
Spital
Source : Forster Gilles, Transit ferroviaire à travers la Suisse
(1939‑1945), Zurich & Lausanne : Chronos & Payot, 2001, p. 169.
Vintimille
Turin
Simplon
Gothard
Goldau
Zurich
Schaffhouse
Lucerne
Loetschberg
Bienne
Bâle
Carte 1 : Lignes ferroviaires directes entre l’Allemagne et l’Italie (1938‑1945)
Klagenfurt
Ljubljana
Assling
Gilles Forster
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
Dans ce contexte, les voies suisses présentent quelques avantages 20.
Le premier repose sur la situation géographique des tunnels helvétiques : ils offrent la liaison la plus directe entre les grandes régions
industrielles du bassin rhénan et de la Lombardie. Le deuxième atout
est la capacité de transport des voies suisses : le Gothard et le Simplon
supportent des trains de 1 200 tonnes, alors que la capacité du Brenner
ne dépasse guère 750 à 850 tonnes. Le chef des renseignements de
l’armée suisse, le colonel Masson, souligne la faiblesse relative du
Brenner. En mars 1940, il estime que celui-ci ne peut assurer plus de
30 % du transport de charbon pour l’Italie. Le troisième avantage des
infrastructures ferroviaires suisses tient à leur performance. Le réseau
helvétique servant au transit est électrifié, la ligne du Gothard presque
entièrement doublée. Il n’en est pas de même au Brenner. L’électrification du réseau permet à la Reichsbahn d’économiser de l’énergie et
de bénéficier de la traction des locomotives suisses pour rallier l’Italie.
Un droit et une politique de la neutralité
favorables au développement du trafic
ferroviaire international
Le deuxième facteur qui explique la forte croissance du trafic
est le contexte juridique. De manière générale, les conventions du
Gothard et de La Haye qui régissent ce trafic prévoient la liberté de
transit. Certains articles permettent néanmoins aux autorités de la
limiter en temps de guerre. L’article 2 de la cinquième Convention
de La Haye de 1907 précise en effet qu’il « interdit aux belligérants
de faire passer à travers le territoire d’une Puissance neutre des
troupes ou des convois soit de munitions, soit d’approvisionnements ».
La Suisse a respecté à la lettre cet article. À aucun moment, elle n’a
toléré – à la différence de la Suède – le passage de troupes, d’armes
ou de munitions. En revanche, l’interprétation du terme, assurément
imprécis, d’« approvisionnements » a posé problème. Berne l’a d’abord
interprété dans son sens étroit, celui des « approvisionnements » directement liés aux combats, soit des armes, munitions, véhicules de
guerre. Mais à partir de 1943, et sous la pression des Alliés, fut adopté
un sens progressivement plus large englobant les biens qui faisaient
l’objet de la guerre économique. Des marges de manœuvre existaient
pour réduire le trafic. Elles n’ont pas ou peu été utilisées 21.
Forster Gilles, Transit…, p. 41‑42.
Schindler Dietrich, « Fragen des Neutralitätsrechts im Zweiten Weltkrieg », in
Commission indépendante d’Experts Suisse – Seconde Guerre mondiale (éd.),
20
21
81
Gilles Forster
Au-delà des discussions juridiques et des interprétations de ces conventions, il est utile d’analyser la liberté de transit aussi comme un élément
de la politique de neutralité. Le Conseil fédéral, seul juge en la matière,
octroie le libre transit à travers le Gothard et le Simplon en espérant
obtenir la même chose pour les exportations suisses et les produits à
destination de la Suisse qui doivent traverser le Reich et les territoires
sous son contrôle. Dans les faits, cela ne fonctionne pas vraiment. Avant
janvier 1945, il n’est jamais fait de lien entre importation et transit 22. Cela
n’empêche pas les autorités fédérales, les CFF et les différents acteurs de
se montrer très attachés à la notion de liberté de transit, dont l’interprétation bénéficie pleinement aux transports ­allemands. En effet, pour les
CFF, cette liberté signifie « l’obligation de transporter tout ce qu’ils [les
CFF] sont à même de transporter » 23. Elle se traduit sur le terrain par une
série de pratiques et de décisions concrètes.
D’une part, il y a la faiblesse, voire l’absence d’un contrôle sérieux
du trafic de transit. Le manque de collaboration entre Douanes et CFF et
les contraintes techniques liées au grand trafic l’expliquent. La densité
de circulation des trains était telle qu’une immobilisation prolongée
à des fins d’inspection aurait paralysé le trafic. En refusant jusqu’à la
fin de la guerre un examen frontalier des marchandises, les autorités
fédérales font primer le trafic sur son contrôle 24.
Dans le même sens, il y a la décision d’accepter, à partir de
juillet 1940, la circulation en transit des wagons chargés d’une tonne
supplémentaire à la limite autorisée. Ainsi, les CFF prennent le risque
d’accidents pour lutter contre le manque chronique de matériel roulant
de la Reichsbahn 25. Ou encore, les exceptions accordées par le Conseil
fédéral aux chemins de fer en matière d’obscurcissement. Elles visent,
La Suisse, le national-socialisme et le droit, vol. 1 : Droit public, Zurich : Chronos,
2001, p. 79‑126 ; Forster Gilles, Transit…, p. 44‑48 ; Forster Gilles, Aspects…,
p. 58‑63, p. 199‑202.
22
Forster Gilles, Transit…, p. 55‑56.
23
Paschoud Maurice, Procès-verbal du conseil d’administration (PVCA) des CFF du
29 mai 1941, p. 6. AF E 8300 (A) 1999/78, vol. 165.
24
Ce que déplore un officier : « Tant que la frontière reste ouverte, les trains la passent
sans y être contrôlés. Des accords ont en effet été passés avec les pays voisins pour
désigner les gares, soit sur notre territoire soit sur le leur, où auront lieu les contrôles.
Un contrôle ne sera opéré à la frontière que lorsque celle-ci sera fermée. » Züblin
(major EMG, chef de la section des opérations de l’État-major général de l’armée)
au colonel EMG Streiff, 10 juin 1944, AF, E 27, vol. 13187.
25
Mierzejewski Alfred Carl, The most valuable asset of the Reich : a history of the
German National Railway, vol. 2 (1933‑1945), Chapel Hill N.C : The Univ. of North
Carolina Press, 2000 p. 90, p. 116.
82
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
elles aussi, à augmenter le trafic sur les axes de transit. Comme le
dit Marcel Pilet-Golaz, ces exceptions conduisent néanmoins à « […]
une contradiction entre obscurcissement des villes et celui de[s] voies
ferrées » 26. Ces différents exemples illustrent le très large consensus
qui existe chez les différents acteurs en matière de transit 27.
Une perspective financière intéressante ?
La forte augmentation du trafic peut également s’expliquer par
­l’intérêt financier qu’on y trouve. La perspective d’importants revenus
provenant du transit est en effet rapidement jugée intéressante. Ainsi,
dès avril 1940, le colonel Simon de la Section des chemins de fer
constate que : « La Suisse, elle aussi, a un intérêt financier à accepter
un trafic aussi grand que possible ; un train de 100 essieux en transit
pour l’Italie laisse un bénéfice de paraît-il fr. 9 000. » 28
La situation financière difficile des CFF dans l’entre-deux-guerres
explique certainement cet intérêt. Le trafic international lui permet de
sortir enfin des chiffres rouges.
Ce fait n’est pas passé inaperçu auprès des autorités allemandes. En
février 1944, le SS-Brigadeführer Harster écrit au ­Reichssicherheitshauptamt
(RSHA) que :
« Dans l’entourage du délégué général à l’armement et à la produc­
tion de guerre, à Milan, on a appris que le trafic de transit intéresse la
Suisse elle-même, notamment parce qu’il permettrait de renflouer les
caisses des Chemins de fer fédéraux dont la situation financière n’est
guère reluisante. » 29
Du point de vue des finances globales des CFF, il faut néanmoins
relativiser l’intérêt financier du trafic de transit. Ce n’est pas par cupidité
que les CFF y consentent. Ce trafic représente au maximum 16 % des
recettes totales (contre 3,7 % en 1930 et 6,4 % en 1938). De plus, les
­Italiens et les Allemands payent mal. Inclus dans le clearing italo-suisse
depuis le 1er juillet 1940, le compte spécial concerné est chroniquement
Notice de Pilet-Golaz concernant la visite du chargé d’affaires d’Italie,
M. ­Allessandrini, 25 mars 1943, AF, E 2809 (-) -/1, vol. 3.
27
Forster Gilles, Aspects…, p. 80‑83.
28
Colonel Simon au sous-chef d’État-major transports, 8 avril 1940, AF, E 27,
vol. 13187.
29
Dr Harster (SS-Brigadeführer u. Generalmajor d. Polizei), à RSHA, 25 février 1944,
Archivio Centrale dello Stato, Roma (ACS), archivi diversi, uffici di Polizia e comandi
tedeschi in Italia, b.4, f. 3, stf 15, Transitverkehr Schweiz/Trasporti in transito per la
Svizzera.
26
83
Gilles Forster
Graphique 2 : Compte profits et pertes des Chemins de fer fédéraux
en milliers de francs courants (1929‑1946)
40000
en milliers de francs courrants
20000 1929
0
-20000
1939
1930
1931
1937
-40000
-60000
-80000
1932 1933
1938
1934
1935
1940
1946
1941
1942 1943 1945
1945
1936
Source : Abschlüsse der Betriebsrechnung und der Gewinn- und Verlust­
rechnung 1903‑1948, Geschäftsbericht und Rechnungen der Schweizerischen
Bundesbahnen, Bern : Generaldirektion SBB, 1948, p. 47.
s­ous-alimenté par les autorités italiennes. Les administrateurs de la régie
fédérale s’inquiètent vivement pour leurs créances 30. Considérant le transit
comme « surtout une prestation d’ordre politique » 31, les CFF vont adresser
leurs revendications en premier lieu au Conseil fédéral. Le vice-président
du Conseil d’administration des CFF, Emil Klöti, estime alors :
« Les Chemins de fer fédéraux ont avantage à faire valoir aux yeux
du Conseil fédéral qu’il leur est impossible, du point de vue purement
commercial, d’accepter le fardeau que constituent ces transports
gratuits. » 32
À partir du 1er septembre 1942, les autorités obtiennent que les
expéditions de charbon en Italie soient envoyées franco frontière
italienne et qu’ainsi les frais de transport soient imputés au clearing
Allemagne-Suisse. À la fin de la guerre, la Confédération détient tout
de même, du fait du transit, des créances envers les pays vaincus, donc
fort douteuses, de 89 millions de francs. Une somme considérable
puisqu’elle dépasse le montant des recettes cumulées du transit de 1943
et 1944 33.
Frech Stefan, Clearing : Der Zahlungsverkehr der Schweiz mit den Achsenmächten,
Zurich : Chronos, 2001, p. 195‑206; Forster Gilles, Transit…, p. 145‑147.
31
Laur, PVCA des CFF, 19 mai 1942, p. 5, AF, E 8300 (A) 1999/78, vol. 167.
32
Klöti, PVCA des CFF, 19 mai 1942, p. 5, AF, E 8300 (A) 1999/78, vol. 167.
33
Frech Stefan, Clearing…, p. 195‑206 ; Forster Gilles, Transit…, p. 145‑147.
30
84
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
On peut aussi arguer que la grande proximité administrative et la
« solidarité de métier » qui lient les compagnies allemande et suisse joue
un rôle dans la forte croissance du trafic. Cette « solidarité de métier »
entre administrations concurrentes a pu se développer par exemple au
sein d’organisations internationales réglant les horaires et les échanges
de matériel roulant. Le compte rendu d’une réunion tenue à Munich en
janvier 1941 pourrait l’illustrer :
« Les discussions se sont déroulées dans la même atmosphère de
cordialité que celles des précédentes conférences. Les Allemands n’ont
formulé aucune observation permettant de conclure qu’ils désiraient
modifier quoi que ce soit à l’organisation de la Conférence européenne
des horaires et par exemple confier la présidence à une autre adminis­
tration. Ils voudraient au contraire que cet organisme international fut
reconstitué le plus tôt possible, et cela sous la présidence des Chemins
de fer fédéraux. » 34
Si elle peut expliquer la relative facilité avec laquelle les autorités
ferroviaires suisses accèdent aux demandes allemandes, cette proximité
ne constitue certainement pas un facteur explicatif décisif de l’augmentation du trafic international. La lutte contre la concurrence étrangère
apparaît par contre comme un facteur déterminant.
Un marché concurrentiel
qui requiert une politique commerciale offensive
Lorsqu’on aborde la question de la concurrence, nous nous trouvons
face à un paradoxe. Car, comme nous l’avons vu, le trafic est presque
à la limite des capacités de transport et il n’est donc pas influencé
ou influençable par la concurrence. Celle-ci est néanmoins vécue de
manière forte par les CFF qui continuent, malgré la guerre, de percevoir
le marché en terme concurrentiel. Ainsi, en septembre 1941, lorsque
les CFF discutent de diminuer éventuellement le nombre de trains en
transit, le représentant du service commercial s’indigne :
« Le service commercial souhaite également que l’on évite, dans
la mesure du possible, de diminuer le nombre de trains traversant
notre territoire. Une telle diminution aurait pour effet, d’une part,
de discréditer nos lignes de transit et, d’autre part, d’entraîner un
manque à gagner qui pourrait se chiffrer en millions. Le discrédit jeté
Réponse de Paschoud à une question de Walther, PVCA des CFF, 29 mai 1941, p. 5,
AF, E 8300 (A) 1999/78, vol. 165.
34
85
Gilles Forster
sur nos lignes de transit aurait en particulier des effets néfastes après la
guerre, lorsque nous offrirons à nouveau nos services de transport. » 35
Cette compétition sur le marché ferroviaire international est significative des craintes causées par la volonté allemande de redessiner la
carte ferroviaire européenne. Il est vrai que la Reichsbahn est perçue
comme un acteur particulièrement dynamique. Dans le domaine des
transports, comme dans la plupart des autres secteurs économiques, la
prise de pouvoir de Hitler va coïncider avec un rétablissement rapide
de l’économie. Les chemins de fer et, en particulier la Reichsbahn,
contribuent à ce renouveau national et mettent en avant leurs performances techniques 36. Rappelons qu’en 1939, la Reichsbahn exploite les
trente-deux trains les plus rapides d’Europe, dont le fameux fliegender
Hamburger qui atteint les 160 km/h. Même si une composante de
propagande est évidente, il est indéniable que la Reichsbahn est perçue
comme un modèle par beaucoup de compagnies de chemins de fer
européennes.
La compagnie nationale allemande va aussi s’intégrer progressivement dans la réorganisation de l’économie européenne voulue
par les nazis selon l’idée générale d’un Grosswirtschaftsraum. À cet
égard, le réseau allemand à voie très large (Breitspur-Fernbahn) est
exemplaire et suscite de fortes craintes. Diverses liaisons nord-sud sont
en effet envisagées : un Hambourg-Berlin-Leipzig-Nuremberg-­MunichLinz‑Vienne-Budapest-Belgrade-Bucarest-Istanbul et un Berlin-DresdePrague-Vienne 37. La Suisse serait alors contournée. Le fait que le Reich
et l’Italie aient désormais une frontière commune renforce ces craintes.
Le Conseil d’État argovien s’en inquiète en tous les cas :
« Depuis que l’Allemagne et l’Italie ont une frontière commune
au Brenner, la politique internationale des transports a sensiblement
« Besprechung vom 1. September 1941 mit Herrn Schwalm vom Kommerziellen
Dienst betreffend Herabsetzung der Anzahl Kohlenzüge Deutschland–Italien », AF, E
8300 (A) 1999/152, vol. 8.
36
Mierzejewski Alfred Carl, The most valuable asset… ; Mierzejewski Alfred Carl,
« The German Nation Railways confronts its competitors (1920-1939) », Business and
Economic History, no 25, 1996, p. 89‑102.
37
Bachelier Christian, La SNCF sous l’occupation allemande 1940-1945, 1996,
chapitre 5-2-2 (disponible sur le site : www.ahicf.com) ; Gottwaldt Alfred, Julius
Dorpmüller, die Reichsbahn und die Autobahn : Verkehrspolitik und Leben des Verkehrs­
ministers bis 1945, Berlin : Argon, 1995, p. 207 ; Joachimsthaler Anton, « Gigantomanie auf Rädern, Die Breitsspureisenbahn Adolf Hitlers », in Zug der Zeit – Zeit der
Züge, Deutsche Eisenbahn 1835‑1985, Berlin : Siedler Verlag, 1985 ; Joachimsthaler
Anton, Die Breitsspureisenbahn Hitlers : eine Dokumentation über die geplante trans­
kontinentale 3-Meter- Breitspureisenbahn der Jahre 1942‑1945, Freiburg in Br. : Eisenbahn Kurier Verlag, 1981 ; Hildebrandt Klaus, « Die Deutsche Reichsbahn… », p. 226.
35
86
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
changé et il est à craindre que le Gothard doive faire face à une forte
concurrence. De nouveaux grands projets, telle la construction de la
nouvelle ligne alpine Leermos–Imst–Landeck–Mals, sont évoqués et, vu
le rythme auquel on construit en Allemagne nationale-socialiste, leur
réalisation paraît loin d’être impossible. » 38
De larges milieux, y compris syndicaux, partagent ces ­appréhensions
et la menace est même perçue comme provenant des pays occupés par
l’Allemagne. En décembre 1940, le secrétaire général du syndicat des
cheminots s’inquiète : « Un nouveau danger nous guette dans le domaine
du trafic de transit : les puissances de l’Axe pourraient contourner la
Suisse en passant par la France. » 39
Face à ces inquiétudes, les CFF vont poursuivre la politique d’alignement de leurs tarifs sur ceux de la concurrence. Le fait que la situation
ne soit désormais clairement plus concurrentielle ne la modifie en rien 40.
À noter que la concurrence peut aussi être interne à la Confédération.
Lorsqu’en 1941, les CFF décident de faire passer une partie des convois
de charbon par la ligne Bâle-Bienne-Lausanne-Brigue-Domodossola, les
dirigeants de la Compagnie de chemin de fer des Alpes bernoises (BLS)
se sentent floués et écrivent aux représentants des chemins de fer italiens
et allemands pour se plaindre de cette décision 41.
La question de la concurrence internationale n’est pas le seul fait
du train. La concurrence fluviale est également prise au sérieux avec le
développement de grands projets de réorganisation de la carte fluviale
Le Conseil d’État d’Argovie au Conseil fédéral, 19 juillet 1940, AF, E 27, vol. 15188.
Il faut préciser que le Conseil d’État argovien espère ainsi obtenir une amélioration de
son réseau ferroviaire.
39
« Protokoll über die Sitzung des Verbandsvorstandes SEV vom 14/15. Dezember
1940 », p. 7, archives SEV. La place du Gothard, « épine dorsale du réseau CFF [et]
première ligne de transit d’Europe », va être défendue dans le journal des cheminots en
faisant abstraction du contexte politique :« Ainsi, pour leur permettre d’accomplir leur
mission européenne, doit-on non seulement prendre les mesures tarifaires requises en
l’occurrence, mais encore donner à ces lignes [de transit] le meilleur équipement possible.
[On peut dès lors se réjouir de l’électrification qui] témoigne en effet que la Suisse est
consciente du rôle que jouent ses voies de communication dans le cadre de l’économie
européenne et qu’elle fut et qu’elle reste décidée à se montrer à la hauteur de sa tâche.
[…] Les chemins de fer suisses sont d’une telle valeur pour le pays et l’ensemble de
l’Europe qu’il apparaît comme une des tâches capitales de l’État d’en poursuivre sans
cesse le perfectionnement ». « La ligne du Gothard », in Le Cheminot, 3 janvier 1941.
40
Une tonne de charbon de la Sarre à l’Italie coûte 10,49 RM par la Suisse et 11,6
RM par le Brenner. Une tonne de charbon de la Ruhr à l’Italie coûte 13,7 RM par la
Suisse, 12,9 RM par le Brenner et 16,7 RM par la France. Forster Gilles, Transit…,
p. 130‑131.
41
Le chef de l’exploitation des CFF regrette le « peinlicher Eindruck » qu’a fait cette
plainte à l’étranger. Forster Gilles, Transit…, p. 128.
38
87
Gilles Forster
européenne 42. L’arrivée au pouvoir de Hitler fait éclore ou ressortir des
tiroirs des projets de nouvelles liaisons. Par exemple une liaison compétitive entre le Danube et le Rhin – via l’Oder et un agrandissement du
Ludwigskanal (Main-Donau). Ce projet inquiète en Suisse car il est
en concurrence avec une liaison Danube-Rhin par le lac de Constance
et Bâle. Nombre d’hommes politiques – jusqu’au sein du Conseil
d’administration des CFF – vont alors tenter de réactiver la réalisation de la voie navigable du Haut-Rhin. Des personnalités de premier
plan déposent des interpellations devant le Parlement et poussent les
autorités à montrer que la Suisse entend compter au niveau des transports fluviaux européens. On évoque aussi un Haut-Rhône navigable,
une liaison entre le lac Majeur et Venise ou encore un canal transhelvétique qui permettrait de relier le Rhône au Rhin par la Suisse.
Aujourd’hui, cette concurrence paraît risible et ressemble davantage
à un fantasme qu’à une réelle menace. Même si ces projets retournent
rapidement dans les tiroirs, leur rôle dans l’augmentation du trafic de
transit pendant la guerre ne peut être négligé.
Conclusion : une intégration économique
que peu de personnes ont su concevoir
Pour conclure, la concurrence dans le marché international des
transports ferroviaires durant la Seconde Guerre mondiale est assurément faible. Toutes les infrastructures sont mises à contribution suite
au blocus britannique du Reich de mars 1940. Pour les Allemands,
la question n’est pas de gagner des parts de marché. Pour eux, les
voies suisses s’avèrent en effet indispensables à la réalisation de leur
programme de transport. Utiliser les lignes helvétiques permet de
bénéficier d’une grande capacité, de diminuer les manœuvres de formation de convois, et d’économiser une quantité substantielle d’énergie
et de matériel de traction. Pendant un certain temps, ces transports ont
même l’avantage d’être effectués gratuitement.
La politique allemande vise à maximiser les transports vers l’Italie
en organisant le trafic en fonction du territoire traversé. C’est ce que
Forster Gilles, « Le canal du Rhône au Rhin, 1900‑2006. Projets, contextes et
discours », in Schiedt Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges
Rainer C. (Hg.), Verkehrsgeschichte/Histoire des transports, Zurich : Chronos, 2010,
p. 291‑302 ; Forster Gilles, « Projets nazis de réaménagement des réseaux de transport
européen et réactions suisses », in Polino Marie-Noëlle (éd.), Transports dans la
France en guerre : 1939‑1945, Mont-Saint-Aignan : Presses universitaires de Rouen et
du Havre, 2007, p. 122‑130 ; Forster Gilles, Aspects…, p. 171‑176.
42
88
Politique commerciale internationale des chemins de fer fédéraux
j’appelle la stratégie de la double voie. En dirigeant vers la Suisse des
armes et des troupes, les autorités du Reich auraient mis Berne dans
l’embarras et l’auraient contrainte à prendre des mesures. En effet,
la Convention de La Haye et un respect d’une neutralité également
profitable à l’Allemagne 43 interdisent aux Suisses d’accepter de tels
transports. La stratégie consiste alors à expédier charbon et matières
premières par le territoire helvétique afin d’alléger le trafic des cols
autrichiens et réserver ceux-ci aux transports d’armes et de troupes.
C’est ainsi que pour le trafic du nord au sud des Alpes, la Confédération
est intégrée au dispositif d’approvisionnement allemand de l’Italie 44.
C’est un état de fait, pas forcément une volonté.
Pourtant peu de personnes en Suisse ont, semble-t-il, été conscientes
de cette stratégie et de cette réalité. Beaucoup ont préféré continuer à
croire en la fiction d’une concurrence nécessitant de défendre la place
des liaisons suisses. Peu de gens ont réalisé la coopération ­effective dans
laquelle ils s’étaient lancés avec les autorités ferroviaires a­ llemandes.
Les représentations mentales des acteurs expliquent ainsi en partie
­l’explosion du trafic ferroviaire à travers la Suisse durant la Seconde
Guerre mondiale.
Si les Suisses autorisaient les Allemands à faire transiter des armes et des troupes
par leur territoire, les Alliés n’auraient aucune raison d’épargner la Suisse dans leurs
bombardements.
44
Forster Gilles, Aspects…, p. 198‑199.
43
89
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
comme espaces d’harmonisation et de coordination
des problèmes de transports dans l’entre-deuxguerres et l’après-Seconde Guerre mondiale
Sébastien Gardon, Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse
Abstract : This article focuses on the emergence and evolution of transnational
discussions concerning transport issues held at the international organizations in
Geneva and later in New York. Specifically, it examines the role of technical
committees, first under the League of Nations then the United Nations, as
platforms for the coordination and harmonisation of national transport policies.
Dès ses premiers développements, l’automobile suscite de fortes
interrogations sur les plans économique, social et politique. L’essentiel des débats internationaux s’organise rapidement autour d’une
vision technique du problème du développement automobile (par
exemple à travers les questions de congestion ou d’accidents). Cette
contribution propose de revenir sur les usages politiques d’une telle
technicisation du débat par-delà les frontières nationales. Plus précisément, il s’agit d’étudier l’impact d’une formulation technique de la
question du développement de l’automobile sur le choix des acteurs
autorisés à animer et prendre part au débat.
Notre étude repose sur l’exploitation de sources décrivant
le travail quotidien d’associations, de commissions, de comités
techniques et de groupes de travail liés principalement à la Société
des Nations (SdN), puis à l’Organisation des Nations Unies
(ONU) 1. En sciences sociales, peu de recherches se sont intéressées
Plusieurs cartons d’archives de la SdN (A SdN) et d’archives de l’ONU (A ONU)
ont été consultés à Genève (Suisse), plusieurs cartons d’archives ministérielles (AN)
1
91
Sébastien Gardon
à la place et au rôle des comités et groupes de travail dans l’action
publique que ce soit à l’échelle locale, nationale ou internationale.
Quelques travaux ont analysé le fonctionnement des groupes de
travail de l’ONU 2 ou la place des groupes d’experts européens 3, mais
dans la plupart des études les commissions constituent plutôt une sorte
d’impensé de l’action publique 4. Nous voudrions donc proposer une
contribution à l’analyse du rôle des comités techniques dans un cadre
international.
Au-delà de l’étude du fonctionnement et de l’activité de ces comités
techniques, cette contribution revient sur la naissance et l’évolution
de ces scènes transnationales de discussion des problèmes de transport. Notre objectif est double. Il s’agit d’une part de montrer qui sont
les acteurs et les institutions légitimés à intervenir au sein de ces espaces
transnationaux de discussion des problèmes de transport. D’autre part,
il s’agit de percevoir comment les enjeux nationaux ou politiques se
trouvent médiatisés dans ce cadre par la construction d’une vision
technique des problèmes débattus. Notre présentation suivra un fil
chronologique présentant dans un premier temps l’espace d’échanges et
de débats autour des comités techniques de la SdN, puis dans un second
temps le renouvellement de cet espace à partir des groupes de travail
liés à l’ONU.
ont été consultés au Centre des Archives contemporaines de Fontainebleau (France),
cf. Gardon Sébastien, Gouverner la circulation urbaine : des villes françaises face à
l’automobile (années 1910‑1960), thèse de sciences politiques, IEP de Lyon, 2009,
678 p. Ce travail a été réalisé dans le cadre de l’ANR RESENDEM (coord. P. Griset) :
Les grands réseaux techniques en démocratie, Innovation, usages et groupes impliqués
dans la longue durée (France et Europe, fin xixe‑début du xxie siècle).
2
Voir sur ce point Bernardin Stève, Grafos Harrison, « Making the Automobile Safe
for the World ? A Transnational Perspective on Car Safety Standards, 1958‑1998 »,
Entreprises et Histoire, vol. 2, n° 51, 2008, p. 69‑87 ; et Bernardin Stève, Grafos
Harrison, « Car Safety Standards », in Iriye Akira et Saunier Pierre-Yves (eds.), The
Palgrave Dictionary of Transnational History from the Mid-19th century to the Present
Day, London : Palgrave Macmillan, 2009, p. 120‑122.
3
De Maillard Jacques, Fouilleux Ève, Smith Andy, « Technical or political: the
working groups of the Council of ministers », Journal of European Public Policy,
vol. 12, n° 4, août 2005, p. 609‑623 ; Robert Cécile, « Les groupes d’experts dans le
gouvernement de l’Union européenne. Bilans et perspectives de recherche », Politique
européenne, n° 32, p. 7‑38.
4
Soulignons toutefois les travaux de Jean Orselli (Usages et usagers de la route,
Requiem pour un million de morts (1860‑2010), Paris : L’Harmattan, 2011, 600 p.) et
ceux de Bruno Marnot (Les ingénieurs et le Parlement sous la iiie République, Paris :
CNRS Éditions, 2000, 322 p.).
92
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
Quand la SdN s’occupe de technique :
la Commission consultative
et technique des communications et du transit
et le
Comité permanent de la circulation routière
La SdN est créée en 1919 à la suite du Traité de Versailles. Elle
tient sa première réunion à Londres le 10 janvier 1920 5. Regroupant
au départ 45 États (dont 26 non-européens), elle compte 58 États
membres à la date du 31 décembre 1935 6. Les États-Unis n’en font pas
partie et l’Allemagne est intégrée seulement entre 1926 et 1933. Elle
est composée d’une Assemblée (qui réunit les représentants des États
membres), d’un Conseil (qui réunit les quatre membres permanents :
Royaume-Uni, France, Italie, Japon, puis Allemagne à partir de 1926, et
neuf membres non-permanents), d’un Secrétariat et d’une Cour permanente internationale de justice à La Haye 7.
Contrairement à la place qui lui est faite dans les manuels
d’histoire, l’activité de la SdN s’étend bien au-delà des questions
­
diplomatiques et politiques. Pour comprendre son rôle au cours de
l’entre-deux-guerres, il faut prendre en compte une vision très large
des relations internationales qui resitue plus fidèlement la dynamique
d’échanges autour de l’institution genevoise. La contribution de la
SdN aux débats et discussions techniques et économiques est en effet
apparue rapidement très importante malgré les contraintes propres au
droit international.
« L’extension des tâches techniques de la Société est apparue comme
étant “dans la ligne du Pacte” et comme allant de soi. […] Ces
activités non politiques de la Société des Nations sont naturellement,
elles aussi, subordonnées au principe du respect de la souveraineté
nationale. » 8
Concernant ces activités techniques, face aux États et aux autres
organisations internationales, la SdN joue le rôle d’« un organisme de
consultation et de coordination. Ses progrès et ses succès dépendant,
au premier chef, du désir effectif qu’ont les gouvernements d’utiliser
Sur la création de la SdN, voir Bertrand Maurice, L’ONU, Paris : La Découverte,
1994, p. 16‑19.
6
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations, ses fins, ses moyens, son
œuvre, Genève, 1935, p. 236.
7
Sur le fonctionnement et l’organisation de la SdN (assemblée, conseil et secrétariat),
voir : Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 35‑39.
8
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 74.
5
93
Sébastien Gardon
ses rouages » 9. Dans cette mission, la SdN s’appuie sur le travail réalisé
par d’autres organisations et associations internationales liées ou non à
l’institution genevoise.
« Il va sans dire que toute l’œuvre de coopération internationale
n’est pas concentrée à Genève. Il existe des organisations inter­
nationales indépendantes. » 10
Ainsi dans le champ des transports déjà bien structuré autour
d­ ’associations et d’organisations nationales et internationales, l’« Organi­
sation des communications et du transit a pour principe, inspiré par une
recherche d’efficacité et d’économie de moyens, de ne pas faire doublon
avec ce qui existe déjà » 11. Pour accomplir cette tâche technique, la SdN a
recours à des experts internationaux dont la représentativité et les critères
de sélection ne sont pas sans poser problème.
« La Société a dû nécessairement pouvoir disposer du concours et de
l’avis d’experts en mesure d’étudier les problèmes avec des compé­
tences techniques et selon un point de vue international. […] De
par leurs fonctions habituelles, ils doivent être de préférence en
relations précises et suivies avec les autorités techniques ­nationales,
qui sont elles-mêmes chargées de conseiller leur gouvernement.
[…] aussi, même lorsque les Comités techniques de la Société ne
se composent pas d’experts gouvernementaux […], et que leurs
membres sont nommés à titre personnel […] le choix des personna­
lités appelées à siéger dans les comités qui secondent la Société dans
ses activités de coopération technique est de première importance.
Le soin en incombe au Conseil, qui tient le compte le plus large des
trois sortes de qualifications requises : scientifiques, ­nationales et
­internationales. » 12
Au-delà des membres « permanents » siégeant dans les comités
techniques, plusieurs membres sont appelés à représenter épisodique­
ment telle institution ou tel point de vue. Parmi la multitude de
questions sociales et économiques abordées, la thématique des
transports est l’une des plus développées au sein de l’institution
­
genevoise. Ce champ de discussion s’institutionnalise sous la forme
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 74.
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 74‑77.
11
Laborie Léonard, L’Europe mise en réseaux, La France et la coopération
internationale dans les postes et les télécommunications (années 1850-années 1950),
Bruxelles : Peter Lang, 2010, p. 280.
12
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 82‑84.
9
10
94
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
d’une ­Organisation des communications et du transit (OCT). Jouissant
dans le cadre très large de la SdN d’une autonomie statutaire par rapport
à d’autres organismes similaires (son statut l’autorisait à admettre
les États non-membres de la SdN), l’OCT « possédait une structure
tripartite quasi parfaite » 13 : Commission consultative et technique des
­communications et du transit (à composition non gouvernementale) ;
Conférence générale des communications et du transit (sur le modèle
de la Conférence générale du travail) périodique (et conférences
« partielles » auxquelles n’étaient invités qu’un certain nombre d’États
en vue de questions limitées les intéressant particulièrement) ; Section
des communications et du transit au Secrétariat permanent de la SdN à
Genève 14.
Le projet de création d’une Commission consultative et technique
des communications et du transit est évoqué dès la séance du Conseil
de la SdN le 13 février 1920 à Londres : « Le Conseil a décidé de
demander à la Commission pour l’Étude de la Liberté des Commu­
nications et du Transit de lui soumettre un projet de création d’un
organisme permanent qui traiterait, au sein de la SdN et sous le
contrôle du Conseil, tout ce qui a rapport à ces problèmes. » 15 Elle se
réunit lors des assemblées de la SdN et fonctionne avec un président
et un secrétaire général. Elle est constituée de comités permanents. De
trois au départ 16, ils seront jusqu’à sept au début des années 1930 (voir
tableau page suivante) 17.
L’OCT est « une des organisations techniques dont l’œuvre apparaît
la plus imposante. […] la caractéristique des quinze dernières années
n’est-elle pas le foisonnement et l’accélération des moyens de commu­
nication et de transit soit terrestres, soit maritimes, soit aériens, et
cela non pas seulement sur le plan national […] mais surtout sur le
plan international […] Il s’est donc posé d’emblée à ­l’Organisation
Ghebali Victor-Yves, « Aux origines de l’Ecosoc : l’évolution des commissions
et organisations techniques de la Société des Nations », Annuaire français de droit
international, vol. 18, 1972, p. 487.
14
Laborie Léonard, L’Europe mise en réseaux…, p. 278.
15
Lors de la Conférence générale des communications et du transit, rapport présenté
par le représentant de l’Espagne, M. Quinonen de Léon, et adopté par le Conseil de la
SdN réuni à Rome le 19 mai 1920, cf. A SdN SdN R 1091.
16
La sous-commission des transports par voie ferrée, la sous-commission des transports
par eau et la sous-commission des affaires générales, voir la session tenue à Genève du
25 au 28 juillet 1921 de la Commission consultative et technique des communications
et du transit qui permet l’élaboration de son règlement intérieur, cf. A SdN R 1090.
17
Au 2 juin 1932, voir A SdN R 2579.
13
95
Sébastien Gardon
Tableau 1 : Les comités techniques permanents de la Commission consultative
et technique des communications et du transit de la SdN en 1932
Comité permanent des ports
et de la navigation maritime
Un président
Comité des ports
7 membres
Comités de la
­navigation maritime
7 membres
Comité permanent
de la navigation intérieure
Un président
8 membres
Comité permanent
des transports voie ferrée
Un président
et un bureau
de 6 membres
6 autres membres
3 conseillers
­techniques adjoints
et président
Comité permanent
des questions électriques
Un président
5 membres
4 représentants
Comité permanent
de la circulation routière
Un président
et un secrétaire
10 à 15 membres
Représentations
ponctuelles
d’organismes
et ­d’associations
Comité juridique permanent
Un président et
un vice-président
6 membres
Sous-commission du budget
Un président
6 membres
Sources : A SdN R 2579
d’importants problèmes de communications et de transit qui devaient
et pouvaient être traités en eux-mêmes sous leurs aspects purement
juridiques et techniques, à l’exclusion de toutes considérations
politiques. La Société avait là un vaste champ d’action et elle a su
inscrire de nombreuses et utiles réalisations. » 18
L’OCT participe ainsi à la tenue en 1920 d’une conférence inter­
nationale pour l’amélioration des communications postales et
ferroviaires, télégraphiques et téléphoniques et radiotélégraphiques
­
en Europe 19. Elle organise ensuite à Barcelone, en 1921, une Conférence générale sur la liberté du transit et des communications 20.
Une deuxième, puis une troisième Conférence générale des communications et du transit se tiennent ensuite à Genève en 1923 et 1927 21.
La conférence de 1921 et celle de 1923 se fixent comme objectif de
favoriser toutes « les dispositions nécessaires pour assurer la garantie
et maintien de la liberté des communications et du transit » 22. Il s’agit
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 150.
Laborie Léonard, L’Europe mise en réseaux…, p. 278.
20
A SdN R 1090.
21
A SdN R 1140 et A SdN R 1176.
22
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 150 et 151.
18
19
96
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
de « restaurer les moyens matériels de transports et de garantir la
liberté des échanges dans un contexte de grande désorganisation et de
créations de nouvelles frontières » 23. Au-delà de cette mission importante de réorganisation des échanges après le premier conflit mondial,
l’OCT peut jouer un rôle de médiateur entre États tout comme fournir
un appui technique aux gouverne­ments désireux de développer certains
projets de transports :
« L’Organisation des Communications et du Transit a prêté son
concours à certains gouvernements qui l’ont sollicité. C’est ainsi
que des experts ont été mis à la disposition du Gouvernement
polonais pour certaines questions de navigation intérieure, du
Gouvernement chinois en vue du développement des routes et de
l’aménagement de certains fleuves, et du Gouvernement siamois en
vue de l’amélioration des accès maritimes et des installations du
port de Bangkok. » 24
La SdN devient donc progressivement l’un des interlocuteurs
p­rincipaux des associations et gouvernements sur le thème des
communications et du transit. Jusqu’en 1924, les discussions portent
­principalement sur les modalités d’accord entre nations ou régions
sur les transports maritimes, fluviaux et ferroviaires 25. La route
apparaît véritablement cette même année en tant qu’enjeu avec la
création d’un Comité spécial d’étude de la circulation routière au sein
de la ­Commission consultative et technique des communications et
du transit.
Au milieu des années 1920, la question du transit et des communications passe donc d’un rôle de contrôle des déplacements
­individuels – notamment entre pays – à celui de soutien à la mobilité,
support du développement industriel et économique des nations 26.
Un tel mouvement souligne les motifs d’une institutionnalisation du
thème automobile. Le Comité spécial d’étude de la circulation routière
est en effet créé en 1924 27 pour préparer la Conférence internationale relative à la circulation automobile et routière qui se tient à Paris
Laborie Léonard, L’Europe mise en réseaux…, p. 278.
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 157 et 158.
25
A SdN R 1091.
26
Voir le « Mini-special issue : European infrastructures » (Schot Johan, Anastasiadou
Irene, Badenoch Alexander, Schipper Frank), in The Journal of Transport History,
vol. 28, n° 2, september 2007.
27
Décision du 13 mars 1924 de la Commission consultative et technique des
communications et du transit de la SdN, cf. A SdN R 1131.
23
24
97
Sébastien Gardon
en 1926 28. L’année suivant cette conférence, il est rebaptisé Comité
permanent de la circulation routière 29.
Les membres du comité permanent de la SDN se réunissent annuellement pour formuler des avis et prendre position sur la question de la
circulation routière face aux particularismes juridiques des États. Ces
sessions durent généralement plusieurs jours. Elles réunissent le
président du comité, son secrétaire et la dizaine de membres – élus pour
quatre ans avec un mandat renouvelable – dont les qualités d’expertise
sont internationalement reconnues. Tout comme le Bureau international
du travail à la même époque, le comité permanent suscite rapidement
l’intérêt d’associations internationales en quête de r­ econnaissance.
Au-delà de l’activité quotidienne et de la gestion des dossiers
particuliers réalisées par le secrétariat de la Commission consultative
et technique des communications et du transit, étant donné la
fréquence des sessions du comité (voir tableau 3), l’essentiel de son
travail porte sur la préparation de grandes manifestations et conventions inter­nationales 30. En matière de circulation automobile, la
Tableau 2 : Sessions du Comité permanent de la circulation routière de la SdN
Sessions
Dates
Lieux
1 session du Comité spécial
27 au 31 octobre 1924
Paris
2 session du Comité spécial
9 au 14 mars 1925
Milan
3e session du Comité spécial
1er au 3 mars 1926
Paris
4 session du Comité
­permanent
25 au 28 avril 1927
Vienne
5e session
23 au 26 novembre 1927
Genève
6e session
13 au 17 novembre 1928
Paris
7 session
23 au 31 mai 1930
La Haye
re e
e
e
8 session
29 mai au 1 juin 1933
Genève
9e session
17 au 21 juin 1935
Genève
10 session
1 au 5 novembre 1935
Genève
11e session
5 au 8 juillet 1937
Genève
12e session
25 au 30 avril 1938
Genève
e
e
er
er Sources : A SdN 1131 – 1132 – 2578 – 4291 – 4294 et 4295
Ministère des Affaires étrangères, Conférence internationale relative à la circulation
automobile et routière, Paris : Imprimerie nationale, 1927, 148 p, cf. A SdN R 1132.
29
A SdN R 1131.
30
Qui donne ensuite lieu à l’écriture d’une convention internationale, qui sera
éventuellement ratifiée puis mise en vigueur.
28
98
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
Tableau 3 : Composition du Comité permanent de la circulation routière
de la SdN (1924‑1938)
Président
Stiévenard (Belgique)
puis Nordberg (Finlande)
Secrétariat
M. Romein,
puis Mlle Rasmussen,
puis Mlle Bigard,
puis Mme Lehmann
Secrétariat de la Commission
consultative et technique
des communications
et du t­ransit de la SdN
Haas
puis Metternich
Membres (représentants
des ministères des Transports
nationaux)
Reinhardt (Norvège), Franklin (Angleterre), Mellini
(Italie), Pflug (Allemagne), Schönfeld (Pays-Bas), Bilfeldt
(­Danemark), Walckenaer (France), Grünebaum (Autriche),
Prince Ghika (Roumanie), Roubik (Tchécoslovaquie),
­Rothmud (Suisse), Urgoiti (Espagne), Valsinger (Suède)
Membres
(experts et ­représentants
­indépendants invités)
Amunategui (Paris, France), ingénieur des ponts
et ­chaussées
Chaix (France), Conseil Général du Tourisme
Crespi (Milan, Italie), vice-président de la Fédération
­internationale des Automobiles-Clubs reconnus et président
de l’Automobile-Club de Milan
Delaquis (Berne, Suisse), professeur, chef de la section
de police du département fédéral de Justice et de Police
Représentations ponctuelles d’organisations internationales
Sources : A SdN 1131 – 1132 – 2578 – 4291 – 4294 et 4295
première grande convention internationale avait été signée à Genève
le 11 octobre 1909 (convention relative à la circulation internationale
des véhicules automobiles) bien avant la création de la SdN. Le
comité permanent de la circulation routière avait ensuite été justement institué pour rénover cette première convention et ainsi préparer
la conférence relative à la circulation automobile et routière qui a
été organisée à Paris en 1926 31. Prime donc la volonté d’harmoniser
et de mieux coordonner les réglementations nationales. Le dernier
moment fort de l’entre-deux-guerres se situe autour de la conférence
Remplaçant la convention internationale de 1909 sur la circulation automobile, elle
permet l’édification d’une convention internationale relative à la circulation automobile
qui ne sera ratifiée que le 24 octobre 1929 par la France et vingt autres pays, voir la
lettre du 2 septembre 1925 de Romein (secrétaire du Comité permanent de la circulation
routière de la SdN) à Delaquis (membre du Comité permanent de la circulation routière
de la SdN) et la lettre du 12 mai 1930 de Pflug (membre du Comité permanent de
la circulation routière) au secrétaire du Comité permanent de la circulation routière
(A SdN R 1132 et R 2579).
31
99
Sébastien Gardon
européenne de la circulation routière tenue à Genève et qui s’est
conclue par l’adoption d’une convention inter­nationale sur la signalisation routière du 30 mars 1931 32, ­remplaçant et complétant celle de
Paris de 1926 33.
« En matière de circulation routière – question sur laquelle l’Orga­
nisation travaille depuis de nombreuses années et qui s’impose
à elle plus que jamais en raison du développement continuel du
trafic automobile –, elle a obtenu quelques résultats pratiques
par le fait que sont à présent en vigueur trois conventions ou
arrange­ments d’unification préparés par elle et conclus à Genève
en 1931. […] Le second [de ces 3 instruments] contient un code
international de signaux routiers permettant aux automobilistes
étrangers, ignorants de la langue du pays sur le territoire duquel
ils circulent, d’interpréter correctement tous les signaux qu’ils
rencontrent. » 34
Parallèlement à cet espace transnational 35 de discussion des
problèmes automobiles, il faut également souligner le travail réalisé
par d’autres organisations, associations, réseaux ou experts qui participent également aux échanges techniques favorisés ou non par les
institutions genevoises que ce soit en termes de signalisation, de
réglementation, de construction de liaison à caractère international
et d’autoroutes ou de sécurité routière. L’Association internationale permanente des Congrès de la route (AIPCR), l’Alliance internationale du tourisme (AIT), l’Association internationale des
­Automobiles-Clubs reconnus (AIACR qui devient ensuite la Fédération internationale automobile), puis plus tard l’Union internationale des villes (UIV) et le Bureau i­nternational des autoroutes (créé
en 1931), participent activement à ces d­ iscussions 36. Par contre, l’accès
à la SdN se trouve assez logiquement facilité pour les associations
comme l’AIPCR, l’AIT ou l’AIACR qui ont une tradition d’expertise
a priori proche de l’« inter-étatisme » cher à la SdN. Les représentants
A SdN R 2584 et R 2585.
Ces conventions étant à nouveau complétées et rénovées par celles de Genève
en 1949 et de Vienne en 1968, voir sur ce point Schipper Frank, Driving Europe,
Building Europe on Roads in the twentieth Century, Eindhoven : Aksant Academic
Publischers, 2008.
34
Secrétariat de la Société des Nations, La Société des Nations…, p. 155 et 156.
35
Saunier Pierre-Yves, « Circulation, connexions et espaces transnationaux », Genèses,
n° 57, 2004, p. 110‑126.
36
Voir sur ce point Gardon Sébastien, Goût de bouchons, Lyon, les villes françaises et
l’équation automobile, Paris : Descartes et Cie, 2011, 154 p.
32
33
100
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
des échelons locaux, les villes notamment, sont plus fréquemment
écartés de ces discussions 37.
« Les commissions et les Organisations techniques furent conçues
et fonctionnèrent jusqu’au terme de l’existence de la SdN comme
de simples organes annexes du Conseil et de l’Assemblée. » 38
« Travaillant “sous l’impulsion d’une pléiade de hauts fonction­
naires [elles] réalisèrent au terme d’une expérience de deux
décennies, une œuvre d’une imposante richesse” 39. Ainsi elles
“introduisirent, par leur fonctionnement continu, deux éléments
nouveaux dans les relations internationales : l’universalité et
la promotion de l’expert” 40. Après la Seconde Guerre mondiale,
les différentes méthodes d’action de la SdN ont été adoptées par
l’ONU qui les a développées et “dont la plus notable demeure
aujourd’hui l’assistance technique octroyée sur demande aux
gouvernements”. » 41
Une technicisation des questions de transports
autour des groupes de travail de l’ONU
L’Organisation des Nations Unies (ONU) a été créée en 1945 à la
suite de la Conférence de San Francisco (25 avril au 26 juin 1945) 42.
Le siège se déplace à New York même si certaines activités sont
maintenues à Genève. Les organes principaux de l’ONU sont
­
­l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et
social, le Secrétariat et la Cour internationale de justice. A la différence
de la SdN, l’ONU est également organisée régionalement.
La Commission économique pour l’Europe (CEE) a été créée le
28 mars 1947 pour encourager la coopération entre les États membres 43.
C’est l’une des cinq commissions régionales du Conseil économique
et social des Nations Unies. L’Asie et l’Extrême-Orient (CEAEO,
Voir sur ce point Payre Renaud, Une science communale ? Réseaux réformateurs et
municipalité providence, Paris : CNRS Éditions, 2007, 344 p.
38
Ghebali Victor-Yves, « Aux origines de l’Ecosoc… », p. 484.
39
Ghebali Victor-Yves, « Aux origines de l’Ecosoc… », p. 498.
40
Ghebali Victor-Yves, « Aux origines de l’Ecosoc… », p. 501.
41
Ghebali Victor-Yves, « Aux origines de l’Ecosoc… », p. 511.
42
Sur la création de l’ONU, voir Bertrand Maurice, L’ONU, p. 20‑28.
43
Elle comprend initialement 29 États « européens » dont les États-Unis, en plus
de la Suisse qui participe à titre consultatif. Ultérieurement, le Canada, Israël et les
républiques d’Asie centrale les rejoignent, ce qui correspond à la plupart des pays de
l’hémisphère nord et forme un ensemble de 56 Etats-Membres.
37
101
Sébastien Gardon
28 mars 1947), l’Amérique latine (CEPAL, 25 février 1948) et l’Afrique
(CEA, 29 avril 1958) ont également leur commission économique 44. En
termes de fonctionnement :
« La Commission se réunit chaque année en une session de deux
semaines dont les séances sont publiques. Pendant le reste de
l’année, des comités des sous-comités et des groupes de travail se
réunissent en séances privées pour étudier, sur le plan technique,
les questions que les gouvernements souhaitent voir traiter dans
ce cadre multilatéral. Le travail pratique et quotidien de la
­Commission s’accomplit entièrement dans les comités et autres
organes ­subsidiaires. Ces organes sont […] des corps consultatifs et
administratifs intergouvernementaux. Ils n’ont, bien entendu, aucun
pouvoir supranational mais ils constituent un point de rencontre
où ont lieu des délibérations collectives et où les gouvernements
intéressés prennent des décisions en vue d’harmoniser les différentes
politiques nationales et même dans certains cas de favoriser des
entreprises communes. » 45
Dans la lignée des activités mises en place par la SdN, l’étude de
questions techniques tient donc une place importante au sein de la CEE.
Pour contourner certains problèmes sensibles politiquement ou diplomatiquement, les discussions sont censées se focaliser essentiellement
sur les volets techniques. La mobilisation d’experts internationaux et
compétents sur les points discutés est au centre de cette démarche. En
termes organisationnels, la CEE met également en place des comités
répartis par questions économiques et qui comportent chacun de
manière permanente ou ponctuelle des groupes de travail spécialisés en
fonction des problèmes abordés.
« Les organes subsidiaires de la Commission ont dès le début adopté
une méthode de travail selon laquelle les problèmes les plus impor­
tants sont traités sous leur aspect technique. Cette méthode permet
aux experts gouvernementaux de discuter entre eux les aspects
techniques de chaque problème et de rechercher des accords.
[…] La Commission utilise fréquemment des groupes de travail
spéciaux et de petits groupes d’experts. » 46
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous. La structure et les
activités de l’Organisation des Nations Unies et des institutions qui lui sont rattachées
au cours des années 1945 à 1958, Genève, 1960, p. 280.
45
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 283.
46
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 283.
44
102
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
Tableau 4 : Les organes subsidiaires de la Commission économique
pour l’Europe des Nations Unies
Comité du charbon
Comité de la main-d’œuvre
Comité de l’énergie électrique
Comité de l’acier
Comité de l’habitat
Comité du bois
Comité de l’industrie et des produits de base
Comité pour le développement du commerce
Comité des transports intérieurs
Comité des problèmes agricoles
Sources : Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous. La struc­
ture et les activités de l’Organisation des Nations Unies et des institutions qui lui
sont rattachées au cours des années 1945 à 1958, Genève, 1960, p. 25.
À l’inverse du cadre international proposé a priori par la SdN 47,
la plupart des questions de transport sont donc réglées sur un plan
régional comme la majorité des problèmes économiques. « Confor­
mément à une décision adoptée par le Conseil en mars 1947, un
grand nombre de questions relatives aux transports intérieurs sont
réglées sur le plan régional ». Seuls quelques points qui intéressent
l’ensemble du monde – par exemple les questions relatives aux transports routiers internationaux et aux aspects de la coordination à long
terme des transports intérieurs – sont étudiés par la Commission
des transports et des communications en vertu de plusieurs résolutions adoptées par le Conseil de l’ONU 48. Au-delà des transports
intérieurs, les organisations inter­gouvernementales qui existaient déjà
et qui s’occupaient des questions d’aviation, de postes, de télécommunications et de ­météorologie 49 sont reliées à l’Organisation des
Nations Unies à titre d’institutions spécialisées. À ces institutions
s’est ajoutée l’Organisation intergouvernementale consultative de la
navigation maritime (décision prise en 1948, convention entrée en
vigueur en 1958) 50.
Dès sa création en 1947, la Commission économique pour
l’Europe a institué un Comité des transports intérieurs auquel ont
été transférées les tâches dévolues à l’Office central des transports
Même si les discussions techniques de la SdN s’inscrivaient de fait dans un cadre
très européen voire « vieille Europe » en dehors même du champ de l’intervention
américaine.
48
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 272.
49
Respectivement l’Organisation de l’aviation civile internationale, l’Union
internationale des télécommunications, l’Union postale universelle et l’Organisation
météorologique mondiale.
50
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 272.
47
103
Sébastien Gardon
intérieurs européens qui était une organisation spéciale mise sur
pied par les pays alliés immédiatement après la Seconde Guerre
mondiale 51. Le Comité des transports est le principal organisme inter­
gouvernemental utilisé pour formuler une politique générale des
transports en Europe. « Les ­objectifs de cette politique consistent
essentiellement à organiser les transports de manière à fournir les
services requis aussi économiquement, efficacement, sûrement et
uniformément que possible ; à faciliter le commerce ; et à réduire
le coût des marchandises transportées. » 52 Successivement plusieurs
sous-comités, groupes d’experts, groupes de travail et groupes de
rapporteurs (par groupe de travail) sont organisés au sein du Comité
des transports intérieurs de la CEE.
Parmi les groupes de travail du Comité des transports intérieurs, le
groupe de travail sur la construction des véhicules, plus connu sous
le nom de WP 29, est l’un de ceux qui ont le plus d’incidence économique et diplomatique sur le plan international 53. C’est un véritable
organe de régulation qui définit les règles et normes de construction
(dimension, organes de sécurité…) des véhicules destinés au marché
européen. La plupart des autres groupes de travail sont davantage
des instruments de connaissance au service du secteur des transports
européens (­production de données économiques, statistiques, amélioration des connaissances en matière de droit ou de sécurité), comme
peuvent l’être sur un plan infranational les offices ou observatoires
régionaux de transports liés aux chambres de commerce et d’industrie
en France 54. Par ailleurs, des publications comme le Bulletin annuel de
statistiques de ­transports européens et les Statistiques annuelles des
accidents de la route en Europe sont proposées par le secrétariat du
Comité des transports intérieurs. Elles favorisent l’échange d’informations et de connaissances sur les transports dans le cadre de l’Europe.
Ainsi les activités organisées au sein de la CEE sont tournées essentiellement vers l’échange d’expériences en encourageant la réciprocité
de ces relations et les liens entre pays avec des contextes politiques
différents :
Voir Schot Johan, Schipper Frank, « Experts and European Transport Integration
1945-1958 », Journal of European Public Policy, vol. 18, n° 2, 2011, p. 278‑279.
52
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 298.
53
Voir sur ce point Bernardin Stève, Grafos Harrison, « Making the Automobile… »,
et Bernardin Stève, Grafos Harrison, « Car Safety Standards ».
54
Voir sur ce point Bardet Fabrice, « L’expertise dans le diagnostic des problèmes
publics. Ingénieurs et statistiques des politiques de transport en France », Revue
française de science politique, n° 6, vol. 54, 2004, p. 1005‑1023.
51
104
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
Tableau 5 : Les groupes de travail du Comité des transports intérieurs
de la Commission économique pour l’Europe des Nations Unies en 1967 et 1968
Sous-comités
Groupes d’experts
Groupe de travail de la sécurité de la circulation
Sous-comité
des transports
routiers
Sous-comité
des transports
par chemins de fer
Sous-comité
des transports
par voie navigable
Groupe de travail
(comprenant des groupes de rapporteurs)
Groupe de travail de la construction des véhicules
Groupe d’experts
chargé de l’étude
de certaines
­questions techniques
ferroviaires
Groupe d’experts
Groupe de travail du développement des voies
chargé de l’unifica- navigables
tion des règlements
de police et de
Groupe de travail du droit fluvial
la signalisation en
­navigation intérieure
Groupe de travail des statistiques de transports
Groupe de travail des problèmes douaniers
­intéressant les transports
Groupe de travail du coût des infrastructures
Volet transversal
Groupe d’experts en
documents statistiques
Groupe de travail du transport des denrées
­périssables
Groupe de travail des transports combinés
Groupe de travail des transports de marchandises
dangereuses
Groupe de travail de la coordination des transports
Sources : Archives nationales 19770444 ART 12 et 19770444 ART 17
« En 1952, la Commission a approuvé une résolution reconnaissant
que la productivité du travail peut être accrue grâce à l’échange
d’informations techniques au niveau international. […] elle a
cherché surtout pour résoudre ces problèmes à accroître les contacts
entre les pays de l’Europe orientale et de l’Europe occidentale.
[…] La Commission a recommandé à ses comités d’accorder
[…] une place plus importante à l’échange, dans des conditions
de réciprocité, de renseignements relatifs à l’expérience acquise
105
Sébastien Gardon
en matière de production et d’information d’ordre scientifique,
technique et ­statistique. » 55
Ainsi dès « 1949, les divers comités et sous-comités avaient été créés
par la Commission, et la structure fondamentale de la CCE n’a pas
varié depuis » 56. Dans un cadre cette fois étendu au plan international,
une Conférence des Nations Unies sur les transports routiers et les
transports automobiles s’est tenue en août et septembre 1949 avec pour
objectif de reprendre les deux conventions de 1926 et 1931. La Convention sur la circulation routière est entrée en vigueur le 26 mars 1952.
Au 31 décembre 1958, trente-neuf États avaient ratifié la Convention.
Entre 1950 et 1952, un groupe d’experts a étudié avec la Commission
des transports et des communications un projet de protocole relatif à
un système uniforme de signalisation routière. En raison de la lourdeur
des systèmes déjà existants, ce projet n’a toutefois pas été adopté.
Seules des recommandations ont été préconisées en cas de révision des
systèmes de signalisation des États 57.
Après le second conflit mondial, les discussions entre experts
portent sur des questions de plus en plus techniques et très spécialisées. Il s’agit moins de mettre à l’agenda des autorités locales, nationales et inter­nationales les problèmes de transports que de participer
à la gestion de ce secteur à présent durablement installé dans les
pays industrialisés. Les champs de l’économie des transports 58 et de
la sécurité routière se développent notamment massivement. Sur les
scènes d’échanges transnationales, de nouvelles organisations participent aux discussions aux côtés des historiques Union internationale
des transports publics et AIPCR, comme l’Organisation mondiale du
tourisme et de l­’auto­mobile (OTA), la Fédération routière internationale
(FRI), la Prévention routière internationale (PRI), la Fédération internationale des fonctionnaires supérieurs de police (FIFSP) et l’Organisation de coopération et de développement économique. Enfin dans un
cadre européen toujours, la Conférence européenne des ministres des
Transports est créée en 1953. Elle relève de l’OCDE et son siège se
trouve à Paris. Elle structure durablement le secteur des transports en
Europe en proposant des sessions de travail régulières qui renforcent les
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 285.
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 284.
57
Service de l’information des Nations Unies, L’ONU pour tous…, p. 273.
58
Voir sur ce point Mazoyer Harold, Les calculs de la puissance. Socio-histoire d’une
science de gouvernement : l’économie des transports (1960-1982), thèse de sciences
politiques, IEP de Lyon, 2011, 637 p.
55
56
106
Les comités techniques de la SdN et de l’ONU
c­ onnaissances dans ce domaine. Il faudra attendre la session de Dublin
en 2006 pour voir se créer sur cette base le Forum international des
transports, au-delà des frontières de l’Europe.
Concernant les transports, une dynamique d’échanges se met en
place progressivement dès la fin de la Première Guerre mondiale autour
de la SdN puis de l’ONU. Plusieurs comités et groupes de travail se
développent au sein de ces organisations internationales. Celles-ci
fournissent aux représentants étatiques comme aux acteurs associatifs,
privés et locaux un cadre pour comprendre les enjeux d’harmonisation et de coordination des problèmes de transports. En effet, malgré
des contextes politiques difficiles, les possibilités d’uniformisation en
matière de réglementation et de signalisation de la circulation routière
sont renforcées et encouragées au travers de plusieurs conventions
internationales.
En termes de participation, on est frappé par l’omniprésence des
représentants des États, lors de discussions fortement « inter-étatistes » chères à la SdN et l’ONU. Cependant toutes les discussions
ne se concentrent pas à Genève. D’autres manifestations de plus en
plus techniques et spécialisées, en particulier après la Seconde Guerre
mondiale, se tiennent en dehors des instances genevoises. Si les débats
ouverts par les comités de la SdN permettent surtout de traiter les
questions liées à l’automobile avec des enjeux politiques et diplomatiques forts, après la Seconde Guerre mondiale les échanges s’inscrivent
dans un cadre plus technique et professionnel. Pour ces deux périodes,
ces discussions constituent de formidables occasions d’échanges de
connaissances et d’expériences qui favorisent la compréhension des
problèmes de transport dans un contexte plus large.
107
L’intermodalité rail-route en Europe occidentale
des années 1930 à la fin du xxe siècle
Un défi permanent
Michèle Merger, IHMC/CNRS Paris
Abstract : Combined transport, which emerged in the 1930s, involves two
approaches : unaccompanied transport using loading units (containers, swap
bodies and semi-trailers) or rolling motorways where heavy goods vehicles travel
on special trailers and drivers either do not accompany the load or follow it by
passenger coach. The paper describes the evolution of combined rail-road transport techniques up to the end of the 20th century and, after examining actions
of the European Commission, demonstrates that combined transport growth has
been obstructed by persistent difficulties, stemming especially from the railway
sector.
Les termes « intermodalité » et « transport intermodal » sont entrés
progressivement dans le langage des Européens depuis une quarantaine
d’années. Dans leur acception actuelle, ils correspondent à la définition
qu’en ont donnée la Directive européenne en 1992 et la Conférence
européenne des ministres des Transports en 1996 :
« Le transport intermodal constitue une organisation du transport
de marchandises par le biais d’une chaîne de porte-à-porte, par
un transfert de ces marchandises sans changement de contenant.
Plus précisément encore, le transport combiné se fonde sur une
unité de transport intermodal (UTI) dans laquelle la marchan­
dise est transportée de bout en bout sur les modes les plus appro­
priés : la route seulement en desserte d’extrémité (trajet initial
et terminal), le rail et/ou la voie navigable et/ou le maritime
109
Michèle Merger
à courte distance à condition que le transfert se passe entre les
véhicules des modes de ­transport de manière optimale selon l’iti­
néraire retenu. » 1
Le transport combiné rail/route (TCRR) correspondait alors à deux
grands types de techniques : le TC non accompagné qui procédait à
l’acheminement d’unités de chargement (semi-remorques, caisses
mobiles ; conteneurs) et la route roulante dite aussi autoroute ferroviaire qui assurait le transport des ensembles routiers avec ou sans les
­chauffeurs.
Ces deux systèmes étaient apparus bien avant que ne soit proposée
la définition officielle rappelée précédemment. En Europe occidentale, le premier s’est développé au cours des années 1920, mais il est
resté très limité jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Son usage sur
une plus grande échelle a eu lieu au cours des décennies 1950‑1970.
C’est d’ailleurs durant cette période que les entreprises ferroviaires
ont créé des filiales spécialement chargées de ce type de transport et
que les premières grandes entreprises de transport combiné rail-route
ont vu le jour. Le transport combiné n’a pas tardé à être considéré
comme une technique d’avenir face à l’essor sans précédent du transport routier, c’est la raison pour laquelle il est devenu l’une des préoccupations de la Commission européenne. L’objectif principal qu’ont
prôné avec insistance, à partir des années 1975‑1980, les autorités de
Bruxelles était de réaliser une mobilité durable dite soutenable, c’està-dire au moindre coût pour l’ensemble de la société et favorable à
­l’environnement.
En dépit des encouragements et des aides financières dont il a
bénéficié tant au niveau national qu’européen, le transport combiné
rail­‑route (TCRR) n’a pas connu le succès qu’avaient pronostiqué les
conjectures les plus optimistes de certains consultants européens au
début des années 1980. Confronté à de multiples défis, le TCRR n’a
cessé de progresser jusqu’à la fin du xxe siècle, mais il s’est heurté à
de nombreux obstacles. Notre étude, qui ne saurait être exhaustive face
à l’ampleur des questions que pose ce type de transport, s’attachera
à analyser non seulement l’évolution des différentes techniques de
TCRR depuis les années 1930, mais aussi le rôle joué par la Commission européenne qui s’est montrée favorable à leur d­éveloppement.
Elle tentera de dresser un bilan général concernant l’essor et les
Conférence européenne des ministres des transports (CEMT), Rapport sur la
situation actuelle du transport combiné, Paris : CEMT, 1998, p. 7.
1
110
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
composantes du trafic afin de mettre en valeur les obstacles rencontrés
par le TCRR, « spécialité dont tout le monde disait du bien et qui ne
parve[nait] pas franchement à décoller » 2.
Le foisonnement d’initiatives et de techniques
des années 1930 à la fin des années 1960
Les techniques qui ont été successivement mises au point des
années 1920 jusqu’à la fin des années 1960 étaient très variées et
toutes fondées sur le principe que les unités de transport ou de chargement devaient s’adapter au rail, c’est-à-dire aux infrastructures et aux
wagons ferroviaires. Elles étaient le fruit de recherches menées par les
chemins de fer, les industries de construction de matériel ferroviaire et
les premières grandes entreprises de TC créées sous l’impulsion des
sociétés de transport routier.
Les premières initiatives ferroviaires
Elles sont nées en Grande-Bretagne, en France, en Allemagne et en
Italie : ce sont les réseaux ferroviaires de ces pays qui ont cherché à
organiser un service de porte à porte en utilisant soit des cadres (conteneurs) dont les premiers exemplaires étaient apparus aux États‑Unis
durant la Première Guerre mondiale, soit des caisses ou des semi-remorques de gabarit assez réduit. À la fin des années 1930, les réseaux
britannique et allemand disposaient respectivement de 11 300 et 14 000
conteneurs, mais un peu plus de 1 250 unités seulement étaient recensées
en France. Au lendemain de 1945, cette technique du cadre a continué
à se développer. En France, la SNCF a créé, en 1948, une filiale de
location de conteneurs, la Compagnie nouvelle des cadres (CNC), avec
la participation d’entreprises de groupage. La CNC avait pour tâche
de fournir des conteneurs aux chargeurs et de favoriser l’acheminement groupé de ces caisses d’un volume de chargement de 3 à 18 m3.
Une initiative identique a vu le jour en Italie sous l’impulsion des
Chemins de fer de l’État (Ferrovie dello Stato, FS) : la CEMAT (Costruzione e esercizio di mezzi ausiliari di trasporto) a été fondée à Milan
en 1953, avec la participation de l’Institut national des transports (INT),
une filiale des FS 3, d’entreprises de transport routier et de chargeurs.
Propos tenus par Jean-Claude Berthod lors de l’Assemblée générale de la société
Novatrans en 1993.
3
Fondé en 1928 par les FS, l’INT avait pour mission de transporter les marchandises
vers les centres, urbains ou ruraux, non desservis par le rail.
2
111
Michèle Merger
Ses activités étaient identiques à celles de la CNC puisqu’elle devait
favoriser le transport rail-route au moyen de petits conteneurs.
Quelques années plus tard, en 1967, les réseaux ferroviaires de
onze pays (Belgique, Danemark, Espagne, France, Grande-Bretagne,
Hongrie, Italie, Pays-Bas, RFA, Suède, Suisse) ont créé Intercontainer,
une filiale commune, dans le but de développer le transport combiné
international. Ils montraient ainsi leur volonté de mener une politique
globale, intégrant le chemin de fer dans une stratégie supranationale.
Installée à Bâle et implantée dans de nombreux pays par l’intermédiaire
des réseaux ferroviaires et leurs filiales, cette société coopérative de
droit belge avait pour mission de coordonner les services intermodaux
des chemins de fer et d’assurer à ceux-ci leur propre accès au marché
international. Dans un premier temps, elle s’est consacrée au transport de conteneurs maritimes au départ ou à destination des régions
limitrophes des ports. Les conteneurs maritimes introduits en Europe
occidentale en 1963 4 commençaient alors à être de plus en plus utilisés :
d’une hauteur de 2,44 m (8 pieds), ils pouvaient être acheminés sur
des wagons plats dotés de roues ayant un diamètre de 92 cm. À partir
de 1964, l’ISO a fixé les dimensions de deux grands types de conteneurs 5 : les conteneurs de 20 pieds (longueur 20 pieds soit 6,05 m ;
largeur et hauteur 8 pieds soit 2,44 m) et les conteneurs de 40 pieds
(longueur 40 pieds soit 12,19 m ; largeur 8 pieds et hauteur 2,90 m).
Le premier correspondait à un volume de 30 m3, le second à un volume
de 65 m3.
L’émergence de nouvelles techniques en France
Des techniques ayant recours à d’autres unités de chargement ont
été mises au point et ont connu des succès divers. Dès 1935, la France,
pays pionnier du TCRR, a expérimenté le transport de petites remorques
spéciales sur des wagons plats de conception courante et, à partir
Rappelons que c’est l’entrepreneur américain MacLean qui, en 1956, a eu l’idée de
transporter des conteneurs sur un navire et a ainsi permis le développement de ce type
de transport à travers le monde.
5
L’ISO (International Standards Organization) a été créée à Londres en 1946 par les
délégués de vingt-cinq pays. Elle a pour mission d’unifier les normes appliquées dans
le secteur industriel. Installée à Genève en février 1947, elle s’est intéressée, à partir
des années 1960, à la normalisation des paramètres techniques des conteneurs. Le futur
conteneur ISO devait répondre de manière identique aux exigences des divers modes
de transport. Pour le transport combiné, il ne devait pas être trop lourd, mais offrir une
solidité suffisante pour résister aux sollicitations du transport ferroviaire dont la plus
importante était le tamponnement des wagons dû à la gravité lors des manœuvres à
partir d’une butte de triage.
4
112
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
de 1946‑1947, cette technique s’est développée avant de connaître un
réel succès jusqu’aux années 1965‑1970. Les semi-­remorques – dites
UFR car construites par la Société pour l’Union des transporteurs ferroviaires et routiers – étaient équipées de roues auxiliaires en métal à
l’avant, et de jantes de guidage à l’arrière qui permettaient le roulement
sur des rails dont étaient équipés les wagons. Les wagons à deux essieux
de 12 mètres de long pouvaient transporter deux semi-remorques, ceux
de 10 mètres une seule. Le chargement et le déchargement de ces
unités étaient effectués en marche arrière par des tracteurs routiers, à
partir d’un quai à hauteur ou d’une rampe mobile. Les wagons étaient
acheminés séparément ou regroupés dans des trains classiques de
la SNCF. Seuls quelques trains spéciaux uniquement composés de
wagons UFR ­circulaient entre certaines villes, notamment entre Paris
et Marseille. Ces transports étaient organisés par un Groupement
technique des transporteurs mixtes (GTTM), une association indépendante fondée en 1947 et réunissant des sociétés de t­ransport routier. En
dépit de ses grandes facilités d’utilisation ferroviaire, cette technique
présentait de graves inconvénients : la charge utile (7 à 10 tonnes) des
semi-remorques était assez réduite et celles-ci ne pouvaient pas effectuer de longs parcours routiers, ce qui impliquait une utilisation réservée
uniquement au transport combiné.
L’apparition de la technique « kangourou » en 1959 a permis de
transporter des semi-remorques plus longues et plus hautes : la surface
de chargement du nouveau wagon pouvait être abaissée jusqu’à 35 cm
au-dessus de la surface du rail, et il était ainsi possible de transporter
des semi-remorques dont les roues étaient logées dans un évidement
du wagon, qui constituait une sorte de poche, d’où le nom donné à
ce procédé. Le chargement et le déchargement des semi-remorques,
dont les plus lourdes pouvaient atteindre 29 tonnes, étaient effectués
horizontalement à l’aide d’un tracteur spécial. La Société de traction et
d’exploitation de matériel automobile (STEMA), créée en 1959 avec
la participation de la Fédération nationale des transporteurs routiers
(FNTR), a été chargée d’exploiter cette technique qui s’est développée
progressivement et qui entraînait une modification fondamentale des
rapports entre les transporteurs routiers et la SNCF 6. Sous l’impulsion de
la STEMA, la société Trailstar, dont les principaux actionnaires étaient
La technique kangourou permettait d’utiliser des véhicules routiers ordinaires
susceptibles de retourner à chaque instant à un service purement routier et elle ne
nécessitait plus de liens obligatoirement durables entre la SNCF et les transporteurs
routiers.
6
113
Michèle Merger
des sociétés de transport et des expéditeurs hollandais, a été fondée à
Rotterdam en 1964. La nouvelle entreprise a commencé à assurer des
services de transport par semi-remorques sur des wagons kangourou
entre Rotterdam et la France. Deux ans plus tard, en juillet 1966, afin
d’éviter une concurrence absurde, le GTTM et la STEMA ont fusionné
pour donner naissance à la Société nouvelle des transports combinés
qui, en avril 1967, a pris le nom de Novatrans. Les actionnaires majoritaires restaient les transporteurs routiers mais la SNCF était indirecte­
ment présente par l’intermédiaire de ses deux filiales, la Société de
contrôle et d’exploitation de transports auxiliaires (SCETA) 7 et la
Société d’équipement des grands itinéraires (SEGI) 8.
C’est précisément à partir des années 1966‑1967 que la technique
kangourou a connu un succès grandissant. En accord avec les réseaux
ferroviaires des pays voisins, la France a pu obtenir la création de
liaisons journalières sur des axes stratégiques et l’installation de centres
de transbordement à Bruxelles et à Novare (1966), à Milan (1968), à
Anvers (1970), à Charleroi et à Rome (1971), enfin à Liège (1972). En
outre, d’importantes améliorations techniques ont été mises au point. De
nouveaux wagons dotés de bogies, ayant une charge utile de 33 tonnes,
en service dès 1966 ont permis d’accepter des semi-remorques plus
longues. Quelques années plus tard, Novatrans a introduit en France la
technique du transbordement vertical grâce à l’utilisation de portiques
de forte puissance de levage (40 tonnes) qui ont été mis en service à
partir de 1969 sur les principaux réseaux européens pour la manutention des transconteneurs 9.
Un autre pays pionnier : l’Allemagne
En Allemagne – pays pionnier comme la France –, des techniques
différentes ont été développées. La Deutsche Bahn a d’abord eu
recours à de simples wagons plats, puis à des wagons surbaissés dont
Fondée en 1941, la SCETA résultait de la fusion des filiales routières créées par les
anciens réseaux ferroviaires qui n’avaient pas été dissoutes au moment de la création de
la SNCF en 1937. La SCETA était chargée de différentes missions relatives aux services
routiers de voyageurs et aux services de camionnage à Paris en correspondance avec le
chemin de fer. Cf. Neiertz Nicolas, La coordination des transports en France de 1918
à nos jours, Paris : Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1999,
p. 181.
8
Il s’agissait d’une filiale de location de wagons.
9
La technique des grands conteneurs d’une capacité de charge utile de 10 à 40 tonnes
appelés transconteneurs a été introduite en Europe en 1963 et s’est développée à partir
de 1966.
7
114
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
les premiers exemplaires étaient apparus à la fin des années 1930 pour
transporter des caisses amovibles. Dotés de petites roues, les wagons
surbaissés pouvaient acheminer des semi-remorques standard sans les
adaptations particulières qu’exigeait la technique kangourou. À partir
de 1962, des wagons à plancher mobile pourvus de deux essieux ont
été mis en service : ils permettaient de charger et de décharger horizontalement n’importe quelle semi-remorque à l’aide de n’importe quel
véhicule articulé.
Au cours des années 1950, l’Allemagne a eu recours également à
des semi-remorques routières à bogies à suspension pneumatique,
détachables : elles pouvaient être placées, par chargement latéral, sur
un wagon spécial muni de deux poutres longitudinales sur lesquelles
reposaient deux traverses, l’une coulissante pour recevoir l’arrière de la
caisse, l’autre fixe pour recevoir le pivot de l’attelage. En dépit du fait
que les opérations de transbordement des semi-remorques étaient très
délicates, cette technique a connu un certain succès. Enfin, dès 1954,
la Deutsche Bahn a fait circuler à titre expérimental les premiers
trains d’ensembles routiers transportés sur de simples wagons plats.
­Expérimentée également en France en 1960 puis en Suisse en 1964,
cette technique de route roulante, ou autoroute ferroviaire, a été adoptée
d’une manière régulière en juillet 1969 entre Cologne et Ludwigburg (360 km) par la société Kombiverkehr qui venait d’être créée à
­Francfort par plusieurs entreprises de transport routier et des commissionnaires de transport. Cette jeune société a aussi développé le TCRR
par caisses mobiles. Elle a mis au point une technique de transbordement vertical pour les caisses mobiles de 6 m de long, au moyen de
grues équipées de cordes. Parallèlement, elle s’est spécialisée dans le
transport des caisses mobiles de 7 m de long sur des wagons dotés d’un
châssis porteur de deux essieux et présentant une longueur de chargement, inhabituelle pour l’époque, de 14,60 m.
La création de l’Union internationale rail-route
Durant les années 1960, parallèlement aux initiatives spécifiques
du monde ferroviaire, d’autres entreprises de transport combiné ont été
créées. En mars 1967, Hupac a été fondée à Chiasso par trois entre­
preneurs venus du transport routier (Sandro Bernasconi de Chiasso,
Hans Bertschi de Dürrenäsch 10, Ueli Maeder du canton du Tessin)
Dès 1964, H. Berstchi avait mis en place un service de transport combiné entre
Ludwigshafen et l’Italie pour ses camions-citernes transportant des produits chimiques
pour le compte de l’entreprise allemande BASF.
10
115
Michèle Merger
auxquels se sont associés les Chemins de fer fédéraux suisses et la
société Danzas pour l’Italie et le canton du Tessin 11. Un an plus tard,
les premiers wagons de l’entreprise ont été mis en circulation entre
Bâle et la petite ville de Melide située à la périphérie de Lugano pour
­transporter les semi-remorques et les véhicules routiers des sociétés
fondatrices. En 1969, Hupac a effectué les premiers transports combinés
internationaux entre Cologne et Milan (Rogoredo).
Fondée à Vienne cette année-là, l’entreprise Hucketrans (Ökombi à
partir de 1983) est venue compléter la liste de ces sociétés pionnières
dont la présence constituait une véritable révolution et éveillait la
méfiance des deux mondes concernés. Beaucoup d’employés des
chemins de fer considéraient le transport combiné comme une forme
de concurrence déloyale, et certains transporteurs routiers pensaient
que c’était une trahison de s’allier au rail. En fait, personne ne
pouvait prévoir le devenir des entreprises assurant ce type de transport. Celles-ci ont vite compris que leur intérêt était de s’unir afin de
promouvoir le transport combiné rail-route. Au lendemain des travaux
préparatoires qui ont débuté, sous l’impulsion d’Hucketrans, à Vienne
en novembre 1969, et ont été poursuivis à Paris au printemps suivant,
les entreprises Kombiverkehr, Novatrans, Trailstar, Hupac, Hucketrans
et Ferpac 12 ont créé à Munich en octobre 1970 l’Association internationale de transport par fer de remorques routières 13. Devenue, à partir
de 1971, l’Union internationale des sociétés de transport combiné rail/
route (UIRR), il s’agissait d’une association sans personnalité juridique
qui avait comme objectifs de promouvoir le TC rail-route et de mettre
au point une collaboration internationale non seulement pour définir des
normes relatives à la construction des unités de chargement routières
et des wagons adoptés, mais aussi pour uniformiser l’organisation
commerciale du transport rail-route.
Le nom Hupac a été suggéré par le directeur de Danzas pour l’Italie et le Tessin
Pietro Ris ; il s’agit de l’abréviation du terme allemand « huckepack », qui signifie porter
sur l’épaule.
12
Cette société italienne avait été fondée en 1969 par quelques transporteurs routiers
lombards, notamment par l’entreprise Borghi de Milan. Elle sera reprise par CEMAT
en 1986.
13
La société Aktiebolaget Svenska Godscentraler (ASG) de Stockholm a également
participé à la fondation de l’UIRR.
11
116
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
De nouveaux espoirs, de nouveaux défis,
de nouveaux progrès
Au cours des trois décennies du siècle dernier, les techniques mises
au point par les opérateurs ont cherché à tenir compte des exigences du
rail et de la route : elles devaient non seulement s’adapter aux modifications répétées des dimensions et du poids des unités de chargement,
mais aussi aux infrastructures ferroviaires (tunnels et ponts) qui, sur
les axes transnationaux à travers les Alpes et en direction de l’Europe
méditerranéenne, présentaient des gabarits insuffisants. Encouragés par
la Commission européenne à partir des années 1975‑1976, les opérateurs ont également été à l’origine d’importantes innovations commerciales et organisationnelles, lesquelles ont constitué de véritables
ruptures par rapport au passé.
Le rôle de la Commission européenne
Souhaitant favoriser le développement du transport rail-route qui
demeurait encore trop limité à ses yeux, la Commission de Bruxelles
a, dans un premier temps, cherché à mettre en place un cadre
juridique unitaire. La directive 75/130 fut en effet la première initiative européenne qui invitait les États à développer les différents modes
de transport en fonction de leur complémentarité, mais elle demeurait
très laconique car elle stipulait que chaque État devait libérer les transports combinés de toute restriction quantitative (contingentement) et
administrative (autorisation) avant le 1er octobre 1975. En outre, elle
se montrait favorable à la réduction de la fiscalité sur les transports
routiers utilisés dans les transports combinés internationaux. Trois ans
plus tard, la Commission a créé un Comité consultatif dont la mission
était de veiller à la sauvegarde des intérêts communautaires en matière
d’infrastructures et, par une autre directive, elle a élargi le champ
d’application du transport combiné en y incluant tout transport utilisant
en priorité le chemin de fer pour surmonter un obstacle naturel. L’étape
suivante a été franchie en 1982 : le Conseil des ministres des Transports
a déclaré que le transport combiné relevait de l’intérêt général et qu’il
devait être à la fois libéré de certaines contraintes et stimulé par des
mesures d’encouragement. La directive 82/603 a confirmé cette volonté
car elle prévoyait que les mesures nécessaires pour définir des centres
de transbordement en vue de l’évolution du transport combiné devaient
être fixées avant le 31 décembre 1984.
Cette volonté a été à nouveau affichée deux ans plus tard, mais
c’est surtout à partir de 1991 que l’action communautaire est devenue
117
Michèle Merger
plus décisive, avec notamment les premiers textes fondateurs de la
libéralisation du secteur ferroviaire. Les ministres des Transports des
Douze ont souligné que le transport combiné constituait une solution
de remplacement au transport routier intracommunautaire sur longue
distance, et la directive 91/224 du 27 mars 1991 envisageait non
seulement l’exonération de la tarification obligatoire et la libéralisation du transport routier associé à un autre mode, mais aussi et surtout
l’accès au marché. Cela signifiait que tous les transporteurs établis
dans un État membre et habilités à effectuer des transports internationaux seraient autorisés à assurer les parcours routiers initiaux et
terminaux faisant partie intégrante du transport combiné intracommunautaire. La célèbre directive 91/440 du 29 juillet 1991 qui préconisait
la séparation entre réseau et exploitation des lignes, le droit d’accès
au réseau, s’inscrivait clairement dans la perspective d’une meilleure
performance du rail et répondait aux attentes des opérateurs de TC.
Deux directives complémentaires publiées en 1995 ont fixé les critères
requis pour l’obtention d’un droit d’accès et les règles relatives aux
capacités d’infrastructures.
L’action de Bruxelles ne s’est pas limitée au cadre juridique car,
dès 1970, la Commission a cherché à encourager l’intermodalité en
légalisant les aides publiques visant à faciliter la recherche et le développement de techniques de transport plus économiques. Conformément au
règlement du 10 juin 1982 qui fut mis en vigueur dès le 1er juillet suivant,
ces aides pouvaient également être attribuées pour faire face aux coûts
de mise en exploitation des équipements fixes et mobiles nécessaires
au transbordement. Sous la pression des pays de transit et notamment
de la Suisse, ce régime des aides a été élargi aux coûts d’exploitation
des transports combinés transitant par les pays tiers en 1989, année à
partir de laquelle il a été prorogé tous les trois ans. Enfin, en 1992, la
Commission a lancé le programme PACT 14 (Actions pilotes de transport combiné) pour une durée de cinq ans. Il visait à financer 50 %
des dépenses relatives à des études de faisabilité de projets (faisabilité technique et commerciale) et 30 % des dépenses liées à la mise en
place de ces projets à titre expérimental pour en mesurer la validité.
Il présentait ainsi une triple originalité : il concernait toutes les mesures
liées au démarrage d’actions opérationnelles susceptibles d’améliorer
la compétitivité du transport combiné par rapport à la route, mais
il excluait tout plan d’infrastructure exigeant de lourds investissements ;
PACT est l’acronyme de Pilot Actions of Combined Transport.
14
118
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
il permettait à toute entreprise privée ou publique de soumettre un projet
à la ­Commission ; enfin, toute idée se révélant non rentable devait être
abandonnée. Prolongé jusqu’en décembre 2001, ce programme a financé
167 projets malgré un budget assez modeste (53 millions d’euros).
Enfin, en 1988‑1990, sous la pression notamment de l’UIRR 15, les
autorités de Bruxelles ont fixé leur attention sur deux sujets bien précis :
l’étude d’un réseau européen de transport combiné et l’étude des aspects
techniques et opérationnels visant à définir des normes et standards
européens. S’appuyant sur le rapport publié en septembre 1989 par le
consultant bruxellois A.T. Kearney 16, la Commission a tenté de définir
une série de recommandations relatives à l’amélioration de l’offre sur
30 axes représentant 75 % des grands flux routiers internationaux de
distance supérieure à 500 km ; elle identifiait les besoins d’investissements en infrastructures notamment en matière d’amélioration des
gabarits ferroviaires. Ses recommandations concernaient tous les partenaires de la chaîne du transport combiné puisqu’elles envisageaient
l’accroissement de capacité des chantiers de transbordement et la
polyvalence de leurs équipements, l’augmentation du parc des wagons
spécialisés, la standardisation des gabarits et des profils des conteneurs,
des caisses mobiles et des engins routiers et enfin une gestion administrative moins lourde des opérations ferroviaires.
Des innovations techniques, commerciales
et organisationnelles
Au début des années 1970, le TCRR a bénéficié de la mise au point
de nouveaux wagons poches permettant de transporter à la fois des
semi-remorques et des caisses mobiles. Au moyen d’une grue, et non
plus par traction comme l’exigeait la technique du kangourou, il était
désormais possible de transborder verticalement des semi-remorques de
plus de 30 tonnes de façon rapide. La semi-remorque pouvait prendre
place dans un compartiment « poche » destiné à recevoir ses essieux. La
partie inférieure de cette poche se situait entre les essieux du wagon,
c’est-à-dire à un niveau très bas par rapport à la face supérieure du rail.
L’UIRR créa un Bureau de liaison à Bruxelles en juillet 1988 ; trois ans plus tard, elle
prit la forme d’une Société coopérative et établit son siège à Bruxelles afin d’avoir des
contacts plus fréquents avec la Commission européenne.
16
Ce rapport était aussi le fruit des travaux du cabinet Logitech d’Utrecht et d’une
équipe d’une cinquantaine d’experts, représentant non seulement les entreprises
de transport combiné faisant partie de l’UIRR mais aussi les filiales des réseaux
ferroviaires liées à Intercontainer.
15
119
Michèle Merger
Cela supposait le renforcement de la structure de la remorque afin
d’éviter une éventuelle rupture 17. Le succès indéniable de cette technique
a été renforcé grâce à l’allongement des wagons, celui-ci étant dû également à l’augmentation des dimensions des caisses mobiles et des conteneurs. Pour les premières, les longueurs de chargement sont passées de
12,50 à 14,60 m puis à 16,10 m ; pour les seconds, de 12,40 à 18,40 m.
Leur charge utile a elle aussi augmenté : celle des wagons conteneurs de
60 pieds, introduits par la Deutsch Bahn en 1996, atteignait 70 tonnes ;
celle du nouveau wagon que la société Hupac a mis en service la même
année s’élevait à 68 tonnes. Tous étaient dotés de quatre essieux, caractéristique technique qui s’est généralisée aux dépens des wagons à deux
essieux, progressivement abandonnés au cours des années 1980.
Le gabarit des tunnels transalpins par lesquels transitaient les
convois de transport combiné et la nécessité de répondre à l’utilisation d’unités de chargement de plus en plus hautes ont contraint les
opérateurs à utiliser des wagons très particuliers. Ainsi, dans le tunnel
du Saint-­Gothard les convois de route roulante ne pouvaient transporter que des poids lourds ayant une hauteur d’angle de 3,5 m et,
en 1980, lorsqu’elle a mis en service la route roulante entre Singen
et Milan, l’entreprise Hupac a employé des wagons poches dotés de
petites roues d’un diamètre de 38 cm (contre les 90 voire 100 cm des
roues normales), permettant ainsi d’obtenir un surbaissement de la
plate-forme. Malgré leur coût et une usure assez précoce des roues
qui rendait leur entretien onéreux, ils ont été utilisés pendant plus de
vingt ans 18. De même, le développement des conteneurs ISO mesurant
plus de 2,90 cm de hauteur à partir des années 1990 et l’introduction
en 1997 des caisses mobiles dépassant 3,3 m de hauteur ont contraint
les opérateurs à recourir à des wagons ayant une plate-forme aussi
basse que possible.
L’une des plus importantes innovations d’ordre logistique a lieu au
début des années 1970 avec la mise en exploitation des trains complets
circulant entre un point de départ et un point d’arrivée, sans aucune
recomposition des convois en cours de route. L’absence d’opérations
En France, avec le soutien de la SNCF, Novatrans a présenté, dès le printemps 1970,
un nouveau wagon de ce type sur lequel une semi-remorque a pu être transbordée
verticalement à l’aide d’une grue équipée de pinces de préhension et ayant une
puissance de levage de 33 tonnes.
18
En juin 2002, Hupac a soumis à des essais d’exploitation des wagons dotés d’un
plancher situé, entre les bogies, à 31,6 cm seulement de la partie supérieure du rail,
obtenant ainsi 20 cm supplémentaires pour permettre le transit de poids lourds de 4 m
de hauteur dans le tunnel du Saint-Gothard.
17
120
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
de triage par gravité des wagons susceptibles d’être soumis à des chocs
garantissait une plus grande sécurité pour les unités transportées et une
régularité accrue des convois. Cette innovation a révolutionné le transport du fret ferroviaire effectué traditionnellement par des trains de
ramassage et de distribution et nécessitant plusieurs opérations de triage
des wagons. Elle a rencontré un vif succès puisque, vingt ans plus tard,
les 21 entreprises membres de l’UIRR faisaient circuler en moyenne
chaque année 20 000 trains complets internationaux.
Une autre innovation a été expérimentée avec succès en 1990 par
l’entreprise Hupac : les premiers trains navette dits Shuttle Net ont
circulé entre Cologne et Milan. Il s’agissait d’un système fondé sur
une approche toute nouvelle de l’exploitation du trafic. D’une longueur
comprise entre 500 et 550 m, ces trains comprenaient un nombre fixe
de wagons et circulaient, sans s’arrêter dans des gares intermédiaires et
en fonction d’un horaire fixe, entre deux terminaux où l’opérateur – et
non pas l’entreprise ferroviaire – procédait aux manœuvres de triage
et de transbordement. Le train navette a permis aux entreprises ferroviaires de réduire considérablement leurs coûts et aussi d’améliorer
l’offre de transport là où la demande était importante, ce qui répondait
aux attentes des chargeurs. Comme la précédente, cette innovation a été
adoptée par d’autres entreprises sur les axes situés entre d’une part les
grands ports de l’Europe de l’Ouest (Rotterdam, Amsterdam, Anvers,
Hambourg) et les principaux ports intérieurs allemands (Ludwigshafen,
Duisbourg) ainsi que Bâle, et d’autre part, l’Italie du Nord.
La nécessité de mettre au point des systèmes de réservation concernant non seulement l’aller mais aussi le retour des convois a conduit
très tôt les opérateurs à concevoir des programmes informatiques,
pour obtenir une meilleure planification des capacités de transport
en fonction des clients et faciliter leur travail en tant qu’acheteurs de
capacités de trains complets auprès des entreprises ferroviaires et
en tant que revendeurs à des transitaires et à des entreprises de fret
routier. Au début des années 1990, les liaisons informatiques étaient
le plus souvent b­ilatérales ou limitées aux expéditeurs, aux transporteurs et aux destinataires 19, et c’est sous l’impulsion de l’UIRR
qu’un groupe de travail a été créé pour étudier un projet pilote
d’échange de données. Lancé en 1997 grâce au programme-cadre de
C’était le cas, par exemple, pour le système DISK (Operatives Dispositions) qui
a été mis en service au début des années 1990 dans vingt-huit chantiers intermodaux
allemands.
19
121
Michèle Merger
la Commission européenne et au soutien financier du ministère suisse
de ­
l’Enseignement et des Sciences, le projet CESAR (Cooperative
European System Advanced ­
Information Redistribution) visait une
transmission en régime continu d’informations relatives aux corridors
importants de l’axe européen nord-sud passant par le Saint-Gothard.
Géré par un fournisseur Internet basé à Amsterdam (Cesar Information
Services CIS), il est devenu opérationnel en novembre 2000. Il permet
aux opérateurs Hupac, Cemat et K
­ ombiverkehr de « disposer d’un
instrument de coopération les a­ ssimilant à une entreprise virtuelle » 20.
Il constitue en quelque sorte une véritable « intermodalité dans l’archi­
tecture des systèmes d’information » 21, puisqu’il fournit, d’une manière
permanente, de nombreuses informations logistiques relatives au déroulement du transport, à la suppression éventuelle du train et aux retards
des convois aux différents intervenants dans la chaîne de transport. Il
permet également d’atteindre un degré de collaboration qui ne pouvait
être obtenu a­ uparavant qu’au sein d’une même entreprise 22.
De bons résultats mais de sérieuses difficultés
La connaissance du trafic intermodal européen demeure ­imparfaite :
en effet, les données dont nous disposons sont hétérogènes et
­incomplètes car établies en fonction d’unités de référence différentes
(tonnes/km ; unités de chargement ; nombre d’envois). Cependant, les
statistiques élaborées par l’UIRR permettent de dégager de grandes
tendances :
– le TCRR a fortement augmenté jusqu’à la fin du xxe siècle
Le nombre des envois UIRR est passé de 252 000 en 1975 à 1 883 000
en 1998 ; le taux moyen annuel de croissance a atteint 16 % de 1975
à 1980, 13,5 % de 1980 à 1989 et 10 % de 1989 à 1998. Cette progression n’a été interrompue qu’à trois reprises : en 1974 au lendemain du
premier choc pétrolier, en 1988‑1989 et en 1999 ;
– il s’est de plus en plus internationalisé comme l’atteste le tableau
suivant :
Burkhardt Martin, « Le défi : la coopération et Internet », in Uirr, Rapport
annuel 2010, Bruxelles : UIRR, 2010, p. 7.
21
CEMT, Rapport sur la situation… 1998, p. 10.
22
En 2009, 500 clients d’opérateurs de TC seront raccordés au système CESAR et
chaque jour ouvrable le système CESAR émettra plus de 55 000 rapports sur la situation des unités de chargement, cf. Seidelhman Christoph, 40 ans de transport combiné
rail-route en Europe. Du ferroutage au système de transport international, Bruxelles :
UIRR, 2010, p. 71.
20
122
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
Tableau 1 : Trafic combiné rail-route des entreprises membres de l’UIRR
(en milliards de t/km)
Trafic
Trafic national
international
Trafic total
1985
5
6
11
1990
12
7
19
1995
17,7
7,2
24,9
2000
24,3
8,1
32,4
Source : Rapports annuels de l’UIRR
Alors qu’en 1985 la quote-part de l’international ne représentait
que 45 % du trafic total, en 2000 elle s’élevait à 75 %. C’est surtout à
partir des années 1993‑1994 que le trafic international a connu les plus
forts taux de croissance grâce au développement des trains complets
et des trains navettes. Ce sont les axes nord-sud, Allemagne-Italie,
Belgique-Italie et Allemagne-Autriche qui, à eux seuls, se partageaient
plus de 50 % du trafic, preuve indéniable que le trafic transalpin a
acquis une place prépondérante, le principal axe bénéficiaire de cette
progression étant celui du Saint-Gothard qui devance le Brenner et le
Mont Cenis.
– L’analyse de la répartition des techniques révèle la réduction à
long terme des semi-remorques au profit des conteneurs et des caisses
mobiles. De 1985 à 2000, le pourcentage de chacune de ces techniques
a évolué comme suit :
Tableau 2 : Répartition des techniques de transport combiné rail-route (en %)
Caisses
Semi-remorques
et conteneurs
Route roulante
1985
26
63
11
1990
20
62
18
1995
14
67
19
2000
9
68
23
Depuis le début des années 1990, les caisses mobiles sont devenues
les unités de chargement les plus employées pour le transport combiné
rail-route. Certes, elles sont moins résistantes et moins lourdes que les
conteneurs maritimes standard de 40 pieds de longueur, conçus pour
affronter les tempêtes, le levage par le haut et l’empilage (gerbage),
et utilisés également en transport terrestre, mais elles peuvent contenir
123
Michèle Merger
un poids plus élevé. Offrant une largeur interne de 2,44 m, les plus
longues d’entre elles proposent une capacité de transport supérieure de
25 % par rapport à celle du conteneur de 40 pieds 23.
Le tableau 2 montre que la technique de la route roulante a occupé
une place de plus en plus importante grâce notamment à l’accroissement de ce type de transport sur les axes Allemagne-Italie, Allemagne-­
Autriche. Moins avantageuse sur le plan des coûts que le transport
combiné non accompagné tant pour les chemins de fer que pour les
opérateurs, la route roulante est une technique qui, contrairement au
transport combiné non accompagné, ne nécessite pas une profonde
modification des chaînes logistiques et n’impose pas une gestion
complexe. Elle peut être organisée assez rapidement et permet d’alléger
le transport routier, mal supporté dans les espaces sensibles au premier
rang desquels figurent les vallées alpines. La politique menée par
la Suisse depuis plusieurs décennies 24 nous aide à comprendre une
telle évolution, qui s’est effectuée aux dépens des routes roulantes
­nationales 25, corroborant ainsi l’internationalisation du TCRR.
Un transport confronté à des obstacles persistants
Malgré une progression indéniable, le TCRR ne représentait que
25 % du trafic ferroviaire en Europe à la fin du siècle et, par rapport
à l’ensemble du trafic marchandises (tonnage kilométrique) dans la
Communauté européenne, sa quote-part demeurait inférieure à 9 % 26.
Un tel constat laisse entendre que la collaboration rail-route s’est
heurtée à de réelles difficultés dont les plus importantes concernaient
l’infrastructure et l’offre ferroviaires 27.
En 1996, les 215 000 caisses recensées en Europe représentaient 81 % des unités de
chargement et, en 2002, leur nombre s’élevait à 337 000 unités, ce qui correspondait à
une hausse de plus de 55 %.
24
Nous nous permettons de renvoyer le lecteur à Merger Michèle, « Le report modal
de la route vers le rail du trafic de marchandises dans les Alpes suisses : un modèle à
suivre ? », in Panzera Fabrizio e Romano Roberto (a cura di), Il San Gottardo : dalla
galleria di Favre all’AlpTransit, Quaderni del Bollettino Storico della Svizzera Italiana,
Bellinzone : Salvioni Edizioni, 2009, p. 225‑249.
25
En 1994, l’Allemagne a abandonné la technique de la route roulante pour le trafic
intérieur.
26
De 1990 à 1998, elle est passée de 5 % à 8,6 %. Cf. European Commission,
EU Energy and Transport in Figures Statistical pocketboook 2003, fig. 3.4.18.
27
L’accroissement du trafic rail-route a été entravé par d’autres facteurs Cf. à ce sujet
Merger Michèle, « L’intermodalité des transports de marchandises du xixe au xxe siècle :
l’histoire d’une “mélopée mélancolique?” », in Transports et réseaux : continuités et
ruptures, Paris : Conseil général des Ponts et Chaussées, 2004, p. 33-36.
23
124
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
La conception initiale des réseaux ferroviaires européens dans
un cadre national a entraîné des choix différents et les cheminements
technologiques ont ultérieurement contribué à maintenir et accentuer
les processus de différenciation. Ainsi, le développement du transport combiné rail-route avec l’Espagne a souffert de la différence
­d’écartement des voies ferrées entre le pays et le reste du continent.
L’histoire de l’électrification des réseaux illustre également la divergence des cheminements technologiques et nous aide à comprendre
le problème de l’interopérabilité auquel se sont trouvés confrontés les
opérateurs de transport combiné. La configuration et le manque de
capacité des lignes ferroviaires ont également constitué des obstacles
à la rapidité des convois. La circulation des trains TC en Suisse est
fortement ralentie sur les rampes d’accès aux tunnels. De Frutigen à
Brigue et de Bellinzone à Erstfeld, celles-ci offrent des pentes de 25 à
27 ‰ et un tracé très sinueux. En outre, avant de pénétrer sur le territoire italien, les convois en direction de Chiasso et de Milan doivent
emprunter le tronçon de montagne allant de Bellizone à Lugano qui
présente des pentes de 26 ‰ dans le sens nord-sud et de 21 ‰ dans le
sens sud-nord.
Lorsque les infrastructures ferroviaires ne faisaient pas défaut,
ce sont leurs conditions d’exploitation qui ont freiné l’essor du TC.
Ainsi, les relations entre le continent et la Grande‑Bretagne, pénalisées par l’absence d’un lien fixe jusqu’en 1994, ont été dès le début
entravées par les impératifs de sécurité régissant les opérations de transport dans le tunnel sous la Manche. Ces impératifs ont introduit de
nombreuses contraintes : les déclarations administratives effectuées au
minimum vingt-quatre heures avant tout chargement et les formulaires
qui décrivent, en détail, la composition de celui-ci étaient de nature à
repousser voire à « saboter le transport combiné » 28. Elles ont constitué
une menace permanente au regard de la fiabilité du service : le moindre
retard obligeant le chargeur à reporter de plusieurs heures le contrôle
des chargements, effectué par des officiers habilités à vérifier qu’il n’y
ait pas d’explosif dans l’unité de transport intermodal, cette perte de
temps devenait catastrophique sur un parcours relativement court.
La qualité du service ferroviaire sur certaines relations a été très
souvent source de nombreuses préoccupations. La priorité accordée
CEMT, Transport combiné Audition des organisations et des entreprises de transport
combiné, déclaration du directeur général de Novatrans, Jacques Dumerc, au nom de
l’UIRR, Paris & Bruxelles : CEMT, 1995, p. 60.
28
125
Michèle Merger
systématiquement aux trains de voyageurs, le manque de conducteurs
aux gares frontières entraînaient des retards qui ont toujours constitué
un véritable talon d’Achille pour le trafic combiné. Un autre facteur non
négligeable a eu tendance à éloigner les chargeurs du transport ferroviaire : ce sont les grèves des cheminots. Celles qui ont frappé la SNCF
en 1995, en 1997 et en 1999 ont eu sans aucun doute des conséquences
désastreuses. En outre, les chemins de fer ont offert aux opérateurs
des prix fondés sur les coûts réels du transport qui ne correspondaient
pas à la situation du marché dominé par le transport routier. Une telle
stratégie a continuellement fragilisé la compétitivité des entreprises de
transport combiné.
Plus généralement, le TCRR a eu du mal à s’adapter à un marché
dont l’évolution était très rapide. Depuis une trentaine d’années,
l’économie du monde occidental est caractérisée par une plus grande
spéciali­sation des unités de production, la diminution des stocks et un
système de livraison « juste à temps ». Cela a entraîné une fragmentation
des envois, une plus grande fréquence des flux ; la demande de transport a privilégié et renforcé l’emprise du mode routier. Les chargeurs
dont les attentes se fondaient auparavant sur plusieurs critères (le prix,
les délais, la fiabilité et la réactivité) ont eu tendance à accorder de
plus en plus d’importance au respect des délais et ont ainsi favorisé le
développe­ment des transports routiers.
En dépit des efforts incessants dont elle a fait preuve depuis trente
ans, la Communauté européenne s’est montrée incapable de résoudre
les épineux problèmes économiques et techniques que soulevaient
les grandes orientations et les projets proposés par ses nombreuses
­directives. Le financement des infrastructures, les multiples dispositifs réglementaires, les distorsions de concurrence dues notamment à
la diversité des fiscalités et des conditions de travail dans chacun des
États membres, sont autant d’obstacles auxquels s’est trouvé confronté
le TCRR. En fait, les nombreuses propositions de Bruxelles n’ont
pas été suivies d’effets immédiats ; la libéralisation du rail en est
l’exemple récent le plus frappant 29. Enfin, certaines mesures prises
par la Commission en faveur du transport routier (taxe de roulage des
camions) étaient diamétralement opposées aux déclarations d’intention
en faveur du transport combiné. Le projet de création de réseaux de
En 1997, le président de l’UIRR W. Küpler estimait que la libéralisation du rail
avançait « à petits pas » et deux ans plus tard, il soulignait que chaque écart dans le
processus de libéralisation représentait « un frein au développement du transport
combiné » ; cf. Rapports annuels de 1997 et de 1999 de l’UIRR, p. 1.
29
126
L’intermodalité rail-route en europe occidentale
fret ­transeuropéens confirme parfaitement la permanence de ces jeux de
pouvoir aboutissant à discréditer l’efficacité des instances européennes.
Le manque de cohérence concerne également la politique des transports des gouvernements européens. Même s’ils ont toujours affiché
leur désir de satisfaire les besoins des usagers au moindre coût pour
la collectivité, presque tous ont continué à prendre des décisions
isolées, reflétant avant tout une logique de l’offre dans une optique de
concurrence et une approche encore largement « unimodale » dans les
schémas directeurs, la tarification de l’usage des infrastructures. Les
États ont eu une attitude ambiguë en dispersant leurs interventions en
une multitude de projets et en tentant de s’immiscer dans ceux élaborés
par les pouvoirs régionaux ou locaux dont les objectifs répondaient à
des logiques bien précises, accordant le plus souvent la priorité aux
infrastructures routières.
Quelques remarques conclusives
Le TCRR exige de véritables relations de confiance et un partage
équilibré des responsabilités entre les opérateurs, mais il n’a pas pu
faire table rase en quelques décennies des effets à long terme que les
cloisonnements et les luttes du passé ont laissés dans les mentalités
et les habitudes des acteurs publics ou privés. Victime du fait que « la
hache de guerre entre le rail et la route [n’a pas été] définitivement
enterrée » 30, son essor a été également entravé par la rigidité et la qualité
insuffisante de l’offre ferroviaire. À la fin du xxe siècle, il était légitime
de se poser la question suivante : les prestations ferroviaires et les talents
d’organisation des opérateurs de transport combiné allaient-ils profiter
de la libéralisation du rail pour permettre au rail-route de connaître enfin
la « grande envolée » 31 qui se faisait attendre depuis les années 1980 ?
Boccara Albert, « Euromodal 90… Euromodèle ! », Revue générale des Chemins de
fer, n° 4, 1990, p. 10.
31
Propos tenus par le directeur de l’UIRR Rudy Colle lors de l’audition des organisations
et des entreprises de transport combiné réunies à Paris le 22 novembre 1994 ; CEMT,
Transport combiné Audition des organisations…, p. 40.
30
127
Deuxième partie
Coordination de la mobilité dans un espace national
Second Part
Coordinating national mobility
Social Engineers in Transport Policy
Co-ordination Efforts in Governmental
Commissions in Britain during the Interwar Years
Anette Schlimm, Ludwig-Maximilians-Universität, München
Abstract : The interwar years in Britain were marked by efforts to coordinate transport infrastructure. Various government boards tried to shape a new transport order,
characterized by both competition and virtual monopolies. These boards, as well as
their recommendations, were built on a common rational and static order. Thus both
the institutions and ideas were part of social engineering, a historical phenomenon
apparent in a number of European societies in the first half of the 20th century.
The interwar years were a phase of significant upheaval in transport
economics, politics and policy, not only in Great Britain, but throughout
Europe. Motorized road transport appeared on streets and roads as
well as in transport debates, especially those concerning transport of
goods. The British transport economy underwent a slightly stronger
transformation than other European transport economies, even though
the road hauliers remained for the most part limited to short distance
traffic on the British Isles until the early fifties 1. But with or without
Cf. Aldcroft Derek Howard, British transport since 1914: an economic history,
North Pomfret, Vt.: David & Charles, 1975, 336 p.; Bagwell Philip Sidney, Lyth Peter,
Transport in Britain: From Canal Lock to Gridlock, 1750-2000, London & New
York: Hambledon Press, 2002, 272 p.; Dyos Harold James, Aldcroft Derek Howard,
British Transport. An economic survey from the seventeenth century to the twentieth,
Leicester: Leicester Univ. Press, 1971, 473 p.; Scott Peter, “The Growth of Road
Haulage, 1921-58: an Estimate”, The Journal of Transport History, 3rd Series, no 19,
1998, p. 138-155. Scott estimates that the proportion of road haulage of total road and
1
131
Anette Schlimm
any ­quantitative economic impact, road traffic became a dominant
topic all over Europe between the end of the First World War and the
early 1930s. Whether called the “Road and Rail Transport Problem” 2
as in Great Britain or the “Eisenbahn-­Kraftwagen-Problem” 3 as in the
German Reich – the relation between the hitherto dominant inland
transport form, the railways, and the new and upcoming medium on
four wheels was discussed and debated between transport experts in
all European countries, in transport ministries, parliaments and even in
super-national institutions like the European Chamber of Commerce.
The relationship was regarded as a dangerous form of competition and
a climactic crisis 4. In most cases the debaters tried to find ways to
regulate this competition and transform it into co-operation.
The causes of the transformation of the European transport
economy were manifold, and some of them help us to understand why
there was a European transformation in a highly nationalized branch
of industry. There are of course technical factors – the improvements
in the a­ utomobile industry as well as in road building or fuel supply 5 –
which were present in all countries in Europe, although to varying
degrees. The prosperity gap between western and eastern parts of
Europe as well as between northern and southern regions must be
carefully analysed. But perhaps more important are the non-technical
rail tonnage rose from 6.3 to about 25.1 percent between 1921 and 1932. But these
figures do not tell us anything about the economic significance of the shift from rails to
roads, because there is no reliable statistical data either about the ton mileage or about
the classes of goods, i.e. the losses in rates for the railway companies.
2
Mance Osborne Harry, The Road and Rail Transport Problem, London: Sir Isaac
Pitman, 1940, 166 p.
3
Napp-Zinn Anton Felix, “Verkehrswissenschaftliche Kritik des Eisenbahn-­KraftwagenProblems”, in Napp-Zinn Anton Felix (ed.), Eisenbahn und Kraftwagen. Verhandlungen
auf der von dem Verein zur Wahrung der gemeinsamen wirtschaftlichen Interessen in
Rheinland und Westfalen und dem Institut für Verkehrswissenschaft an der Universität
Köln am 27. Mai 1930 in Düsseldorf veranstalteten ­Verkehrstagung; mit Anschluß einer
verkehrwissenschaftlichen Kritik, Köln: Köln Universitäts-­Buchhandlung Oskar Müller,
1931, p. 146-182.
4
Schlimm Anette, “Handeln im Angesicht der Krise: Zukunftswissen und Expertise deutscher Verkehrswissenschaftler in der ersten Hälfte des 20. Jahrhunderts”, in
Hartmann Heinrich, Vogel Jakob (Hg.), Zukunftswissen. Prognosen in Wirtschaft,
Politik und Gesellschaft seit 1900, Frankfurt am Main: CampusVerlag, 2010, p. 175-194;
Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs. Arbeit an der Moderne – deutsche und
­britische Verkehrsexpertise im 20. Jahrhundert, Bielefeld: transcript, 2011, p. 181-201.
5
For Great Britain cf. Barker Theodor, Gerhold Dorian, The Rise and Rise of Road
Transport, 1700-1990, Cambridge: CUP, 1993, p. 62-63; Dyos Harold James, Aldcroft
Derek Howard, British Transport…, p. 365-371; Scott Peter, “The Growth of Road
Haulage…”, p. 143.
132
Social Engineers in Transport Policy
factors. The new transport industry can be seen as a reaction to new
requirements after the First World War, especially in the manufacturing industry. Because of capital shortages, the storehouse stocks
shrank, and conversely the transport requirements changed. The infrequent transport of huge bulks was replaced by more frequent services
of smaller amounts of freightage 6. This form of transport was better
suited to road haulage than to railway transport. Another cause for the
rise of road transport in the interwar years was the First World War
as well as the de-mobilization. The war made the demand for lorries
rise, and the soldiers learned to drive the new and improved vehicles.
After 1918, the European armies reduced their stock of lorries, and
many former soldiers tried to build up a new life in road haulage. For
Great Britain alone, it is estimated that about 60,000 lorries were sold
by the army at a very low price 7. The First World War served as a
catalyst for the issue of rail and road competition in another regard
as well. In most European countries the transport sector had been
centrally administered during the war. This experience of a centralized
inland transport may have helped to form the idea of transport as an
entity and not just an umbrella for different forms of transport: transport as one object that had to be coordinated 8. This may explain why
transport ministries were founded in most European countries during
the period immediately after the First World War – institutions where
all kinds of transport were to be coordinated and regulated, even if
the political and legal powers of these new institutions differed significantly. The new entity of transport was so quickly naturalized that
the process, in which it was constructed, became invisible immediately. Now, in the perceived crisis of the present, the object transport
seemed to pass by and break apart – a threat which was apparently
caused by the new transport medium, by the motorized road transport.
The new competition was regarded as uneconomic 9 and inefficient,
a dominant ­interpretational pattern in both interwar politics and the
Cf. contemporary discussions: Whyte Hamilton, “Influence of Transport on
­Industrial Development”, The Journal of the Institute of Transport, no 9, 1928,
p. 344-354; Gattie Alfred Warwick, The Great Transport Problem in its Relation to
Labour Unrest. A Paper read before the Royal Automobile Club on 17th April, 1912,
London, [1913], 12 p.; cf. also Vahrenkamp Richard, Die logistische Revolution. Der
Aufstieg der Logistik in der Massenkonsumgesellschaft, Frankfurt am Main: Campus,
2011, 390 p.
7
Scott Peter, “The Growth of Road Haulage…”, p. 142.
8
Cf. Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs…, p. 41-74.
9
Cf. Royal Commission on Transport (ed.), Final Report. The Co-ordination and
Development of Transport, London, 1931, p. 17.
6
133
Anette Schlimm
social sciences 10. The main task for all transport experts and politicians was to create a system of transport where the highest degree
of efficiency could be achieved. Other rivalling values – like liberal
markets, free enterprise, or free choices – were subordinated under
this dominating objective.
These factors were in force in most (central) European countries,
but, of course, the proportions of the factors differed. In all these
countries, various groups of experts, politicians and interest groups
were involved in the diagnosis of the problem as well as the identification of solutions. They contextualized the new situation within
the framework of different cultural patterns, different political, scientific and economic traditions, and different (economic) experiences 11.
This article concentrates mainly on the British coordination issue in
the interwar years. I will reconstruct and analyse the transport experts’
interpretative framework to explain an interesting observation: not only
is the resemblance of the transport debates throughout Europe apparent,
but the resemblance in the diagnoses, descriptions and proposals, on
the one hand, and the social forms of the policy debate on the other
hand, is also noteworthy.
First, I will reconstruct the debate and its protagonists. In the
following step, I will analyse the findings and recommendations and
describe their similarities. Finally, I will explain the specificities of this
historical episode and connect it to the social and cultural history of
British society, a society which has been analysed as a professional
society since 1880 12. I will continue and amend this analysis by suggesting that the British society in inter-war years can be seen as a society
of social engineering just like other European societies.
Hey Kevin, “Transport co-ordination and professionalism in Britain. Forging a new
orthodoxy in the early inter-war years”, The Journal of Transport History, 3rd series,
no 31, 2010, p. 25-41.
11
The varying impact of the Great Depression may also be an important condition
affecting the extent to which co-ordination debates occurred, but it can also be overestimated: in Germany, transport experts even welcomed the Depression to a limited extent,
because they hoped the Depression would limit the “Wildwuchs” (i.e. ­uncontrolled
growth), especially in the area of road haulage. See Beckerath Erwin von, “Kapitalknappheit und Verkehrsmittel”, in Diehl Karl, Beckerath Erwin von, Bonn Moritz
Julius, Lotz Walther, Sering Max, Wiedenfeld Kurt (Hg.), Wirkungen und Ursachen
des hohen Zinsfußes in Deutschland, Jena: Fischer, 1932, p. 285-296.
12
Cf. Perkin Harold, The Rise of Professional Society. England since 1880, London,
New York: Routledge, 1989.
10
134
Social Engineers in Transport Policy
The Task of Co-ordinating the Transport System
in Interwar Britain
During the 1920s, the problems between the two dominant media
of inland transport became increasingly visible. As early as 1925,
when the annual meeting of the Chartered Institute of Transport was
held in London, the topic of road and rail coordination appeared in
the transport professionals’ discourse. David Lamb gave a paper titled
“The ­Co-ordination of Rail and Road Transport” 13, which was widely
discussed. The Railway Gazette attached great importance to the lecture
as well as to the topic:
“We are glad to see that, as a result of the full ventilation of the
subject in the paper and discussion, steps are to be taken by the
Institute of Transport to consider in what way the various ­conflicting
interests can be brought together to render possible co-ordination
between road and rail transport. Obviously, the first stage would
be to attempt the formation of some comprehensive organisation
in the road transport industry, and then, in consultation with all
interested parties, to essay the framing of a scheme which, with
due regard to those concerned, would lead to the most economical
transportation. That is what the public and the traders desire – and
in the long run is a national question on the solution of which much
depends.” 14
In this article, the main topics of the coordination debate were
already presented: the attempt to transform the competition into a form
of coordination, the need of a higher degree of organisation within
the road transport branch, the necessity to form an efficient transport
system, and finally, the emphasis on the public as well as on the nation
as a whole.
Nevertheless, it took three more years before the first step in a
new transport policy was made. In 1928, the Royal Commission on
Transport, presided by the former MP Arthur Griffith-Boscawen,
a then experienced head of investigative committees, was formed.
The Commission’s task was
Lamb David, “The Co-ordination of Rail and Road Transport”, The Journal of the
Institute of Transport, no 6, 1925.
14
Transport Co-ordination (Newspaper clipping from the Railway Gazette, n.d.),
Records of the Chartered Institute of Logistics and Transport (Corby, UK), Congress
Reports I, London Congress 1925.
13
135
Anette Schlimm
“[t]o take into consideration the problems arising out of the growth
of road traffic and, with a view to securing the employment of the
available means of transport in Great Britain […] to the greatest
public advantage, to consider and report what measures, if any,
should be adopted for their better regulation and control, and, so far
as is desirable in the public interest, to promote their co-ordination
and development.” 15
By 1931, three reports – one questioning the security of road
vehicles, one concerned with the licensing of buses, and a general report
on the co-ordination issue – had been published. Only the last one,
“The Co-ordination and Development of Transport”, will be analysed
here 16. Apart from many other proposals, the Commission asked that
a permanent expert council be formed to set out the concrete terms of
co-ordination of haulage on roads and rails. This task was too complex,
the Commission declared, for a Royal Commission, as the body would
need to be completely neutral and unprejudiced. Every decision in this
labyrinthine field of goods transport tended to be judgmental.
“Who is to decide, for example, what rail services are desirable in
the public interest and what amount of coastwise shipping? Or what
goods should in the national interest be sent by rail, road, canal or
ship?” 17
In 1932, in the year following the Royal Commission’s final report,
the Ministry of Transport installed the next commission: the Conference on Road and Rail, well-known as the Salter-Conference and
named after Sir Arthur Salter, economist and international planner from
the League of Nations, who was also the Conference’s president. It
consisted of four representatives from the four railway companies as
well as four ­emissaries from four big road haulage associations. They
were instructed to determine “what would be a fair basis of competition
and division of function between rail and road transport of goods” 18.
The findings of the conference were intended to form the basis for a
new legal order of the haulage industry. And, in fact, the Road and
Rail Traffic Act of 1933 generally followed the recommendations.
A new licensing system was introduced for the road haulage industry.
Terms of Reference, in Royal Commission on Transport (ed.), Final Report.
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report.
17
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 141.
18
Terms of Reference in: Conference on Road and Rail/Ministry of Transport (ed.),
Report of the Conference on Rail and Road Transport, London 1932, p. 4.
15
16
136
Social Engineers in Transport Policy
The well-established hauliers were provided automatically with the
licences for the existing connections, while new hauliers had to prove a
specific requirement by the consumer, a requirement that might not be
met by existing transport connections like the railways. This regulation
was made to avoid duplication of the same service.
The Royal Commission and the Salter Conference constituted
different types of political consultation within the British political
­
system. Royal Commissions were mainly active in the 19th century,
when state action expanded to new fields, especially social policy,
and there was no public administration mandated to collect information about social problems 19. An important feature of these consulting
bodies was their (assumed) neutrality and independence, which meant
that their reports could be used as a basis for governmental action 20.
Transforming Competition into a New
and Stable Order
Both committees, the Royal Commission on Transport and the
Salter Conference, were encountered with the same problem. Both
were assigned to address wasteful competition, a problem that had
been diagnosed by both transport experts and politicians. The main
characteristic of the transport crisis was the fact that it was seen as an
­increasingly serious issue:
“If allowed to continue unchecked or uncontrolled the evil results of
this competition will become even more serious, and will not only
adversely affect the financial stability of those who provide trans­
port facilities but will also hamper the development of trade and the
economic progress of the nation.” 21
This new and dangerous form of competition did not serve the
progress of the industry and the nation as a whole, but rather put the entire
system at risk. This was the main difference between the competition of
Cf. Thompson Francis (ed.), The Cambridge Social History of Britain
1750-1950, vol. 3: Social Agencies and Institutions, Cambridge: CUP, 1990, p. 15;
Rass ­Hans-­Heinrich, “Royal Commissions in Großbritannien”, in Lompe Klaus, Rass
Hans-­Heinrich, Rehfeld Dieter (Hg.), Enquête-Kommissionen und Royal ­Commissions.
Beispiele wissenschaftlicher Politikberatung in der Bundesrepublik Deutschland und
in Groß­­britannien mit einem Beitrag zur Paritätischen Kommission in Österreich,
Göttingen: Vandenhoeck & Ruprecht, 1981, p. 71-177.
20
Cf. Bulmer Martin, “Introduction”, in Bulmer Martin (ed.), Social Research and
Royal Commissions, London: George Allen & Unwin, 1980, p. 1-8; p. 2.
21
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 5.
19
137
Anette Schlimm
the different forms of transport before and after the First World War, the
Royal Commission argued.
Another common characteristic of the boards was that they were
commissioned to safeguard the imperilled efficiency for the entire
­transport sector. Efficiency was a key issue for transport, the Royal
Commission pointed out, not only because of the magnitude of the
economic sector, but especially because of the crucial importance for
the entire national economy.
“Regarded in the narrower sense, solely as an industry, its magnitude
may be illustrated by the fact that […] fully one and a-half million
people, or nearly 8 per cent of the whole employed population, are
directly engaged in one or other of its branches. From this point of
view alone it is obviously of the utmost importance that the trans­
port industry should be maintained by efficient management and
wise administration and the highest possible standard of efficiency,
and that all the available means of transport should be developed to
the fullest economic extent. Taking a wider view and regarding it as
an integral and indispensable component of the national structure,
the importance of adequate, efficient and cheap transport facilities
cannot be overestimated, particularly in a country such as Great
Britain whose trade consists to so great an extent in the importa­
tion of food and raw materials and the exportation of manufactured
goods.” 22
Besides this mainly economic motivation behind the efficiency
issue, there was also another, more general and social cause for the
significance of the transport sector 23. Already in 1909, W. Bolland
had asserted that “[f]rom the national point of view a well-ordered
transit system is a vital necessity” and that “[t]he primary function of
a railway system is social” 24. These truths remained valid during the
interwar years 25, even if the concrete steps to secure this social function
created controversy.
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 4. This “wider view” is a
characteristic feature of the transport experts’ debates in the period between the 1920s
and 1950s. See Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs…, esp. p. 61-70.
23
Cf. Crompton Gerald, “Good Business for the Nation’: The Railway Nationalisation Issue, 1921-1947”, The Journal of Transport History, 3rd series, no 20, 1999,
p. 141-159.
24
Bolland, William, The Railways and the Nation. Problems and Possibilities,
London: T. Fisher Unwin, 1909, p. 7 and 138.
25
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, e.g., p. 15, 17, 45.
22
138
Social Engineers in Transport Policy
In order to build up a new, efficient system of transport, the members
of the two transport boards sought to avoid competition in ­transport:
“No doubt if a state of affairs could be reached whereby every passenger
travelled, and every ounce of goods was consigned, by the most econo­
mical route and form of transport, many of our present transport
difficulties would disappear” 26, as the Royal Commission of Transport envisioned outcome of the negotiations. The ideal of the railway
members of the Salter Conference was a system like a monopoly, but
without its negative impacts. They imagined a d­ e-centralized system
which would nevertheless function like
“a single administration, without divergence of financial interest,
[which] were solely occupied in meeting the needs of the public by
the most convenient and economical arrangement of transport.” 27
So far, the complete unification of transport, which some transport
executives had favoured in the direct aftermath of the First World War,
seemed to be impossible – the liberal thinking was still strong, and the
practical problems even for the amalgamation of the railway companies in the period between the Railways Act in 1921 and the realisation
of the Great Four Railways in 1923 had been too complex. Generally
speaking, the complete transport monopoly remained the railway
experts’ utopia. At the same time, it was the road transport experts’
dystopia. Though they were advocates of a co-ordinated transport
system as well, they, and especially the road hauliers’ representatives in
the Conference on Road and Rail, insisted that the new form of transport needed freedom to expand and develop, for the well-being of the
motor-car industry as well as for the public.
But the different sides found a compromise between monopoly
and freedom. The recommendations of the two boards were similar
in many regards. Both boards first called for the internal rationalisation of every transport medium and/or company. The main section of
the Final Report of the Royal Commission was even dedicated to this
internal rationalisation issue, aiming to secure the highest possible rate
of efficiency. But on the second demand – that a way be found to co-­
ordinate rail and road in practice and every-day operation – the Royal
Commission on Transport gave in. It was not in the position to force
the industry to establish a new order. Instead, the recommendation was
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 141.
Conference on Road and Rail/Ministry of Transport (ed.), Report of the Conference
on Rail and Road Transport, p. 13.
26
27
139
Anette Schlimm
to establish an experts’ council at the Ministry of Transport. According
to the Commission, the whole transport system should be kept under
“constant observation” 28, and the Advisory Council should be given
the duty to “advise the Minister [of Transport] as to the action which
he might usefully take to promote the co-ordination, improvement and
development of transport generally.” 29
These advisors were not to be elected by the industry itself, so that
they would be independent of companies and transport branches. The
Royal Commission recommended a kind of permanent, neutral commission like itself.
However, the Salter Conference was quite a different commission
than the Royal Commission had proposed. Its members were not unprejudiced but biased, because they were representatives of their company.
However, the members of the Conference were obligated to keep in
mind not only their own interests but also all the other interests involved
in the problem of road and rail. While the Royal Commission had
given in to the problem of the co-ordination of road and rail, the Salter
Conference recommended a licensing procedure to avoid the doubling
of transport services 30. The wasteful competition between road and rail
was to be superseded by a fair basis of competition, to safeguard the
(financial) interests of the railway companies, the trade and industry
as a whole and the “general public interest” 31. The new, fairer form of
competition was based on two non-competitive forms of co-ordination:
division of function and co-operation. The new form of competition
was to find its place in between these forms of non-competition. At first
sight a paradox, these concepts of co-operation and competition were in
fact not antagonistic.
The idea behind the division of function was based on the assumption that every form of transport had its special advantages and
disadvantages, which were generally constant. For example, the
­
railways were seen as the best means of transport for heavy ­commodities
and long distances, while the road haulage was able to serve house-to Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 142.
Royal Commission on Transport (ed.), Final Report, p. 142.
30
Cf. Shaw Stephen, Transport. Strategy and Policy, Cambridge/MA: Blackwell, 1993,
p. 107-109.
31
Conference on Road and Rail/Ministry of Transport (ed.), Report of the Conference
on Rail and Road Transport, p. 8. Further on, co-ordination in the sense of the Conference on Road and Rail was not only meant as co-ordination of the two transport media,
but also as “the co-ordination of different forms of transport service with […] the needs
they serve”. Ibid., p. 9.
28
29
140
Social Engineers in Transport Policy
house transport. These fields of activity were to be the fixed basis of
the division of function in transport. The different means of transport
were called to co-operate with other specialised carriers, for example to
secure the distribution of heavy goods from the final rail station to the
customer. The division of function implied new needs and possibilities
for co-operation, so that every transport company could benefit from a
well-regulated transport system 32.
On top of these forms of division and co-operation, transport experts,
the Royal Commission, and the Salter Conference were keen to secure
spheres of competition – fair competition, which implied that all means
of transport would have the same starting conditions, such as a fair share
of highway costs, for example. This fair competition, which was seen
as the most important instrument for securing the progress of transport
for the future, was limited to certain spheres, namely the functional and/
or spatial zones between the fixed fields of activity reserved to only one
of the means of transport 33.
This pattern of a co-ordinated transport system, well-regulated and
divided into spheres of virtual monopolies, of desired co-operation
and of competition, was present in several European countries, including Great Britain and Germany, in the interwar years. The important and unique characteristics of the British model were a gradually
stronger emphasis on competition, a regional system of regulation
instead of the centralised (and more authoritarian) policy in place
in Germany even before 1933, and the stronger position of the road
haulage industry. But the most interesting feature of these ideas
of co-ordination is their resemblance to the institutional patterns of
co-ordinating efforts.
There are several examples of co-operation and division of function which played
an important role in transport experts’ discourse, in the interwar years and beyond.
One of them, a report about the milk collecting transport scheme in Cornwall,
is analysed in my dissertation. Cf. Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs…,
p. 240-243.
33
This coordinated transport system resembles, in some ways, the railway system which
was created by the Railways Act in 1921. More than one hundred railway c­ ompanies
had been amalgamated into four railway companies. Each of them had a topographical
monopoly, but they still had to compete with each other because of the doubling of
main routes. This effect was intended by the planners in the 1920s, but criticized as
wasteful competition in the 1930s, similar to the competition between rail and road. See
Fenelon Kevin Gerard, Transport and Communications, London: Sir Isaac Pitman &
Sons, 1931, p. 32-33.
32
141
Anette Schlimm
Similarities between Discursive
and Institutional Patterns
The resemblances between the commissions themselves and their
recommendations can be addressed through two analytical questions.
First, which forms of demarcation were constitutive for the new order to
be established? Second, how was the new internal order to be realised,
and what would it look like?
First, the importance of the demarcation lines cannot be overestimated, though they may not be apparent at first glance. They were
constitutive for the transport discourse. The first demarcation line
concerned rationality. The pattern of argumentation had to be perceived
as a rational one by the dominant participants of the discourse. The
question of rationality was mainly challenged in the field of necessity
and needs. For example, if a road haulage company applied for a new
transport licence, it had to prove that this new transport possibility was
needed. And this necessity was greatly shaped by the political and/or
social definitions of necessity. Was the new possibility really necessary, or was it perhaps in fact a luxury? The demarcation line between
real and imagined transport necessities was on the whole not as clear
as it was in the German transport debate. However, mainly during
(perceived) crises, there were major attempts to limit transport using
national and economic justifications – especially during the Second
World War, when the Railway Executive Committee asked using
big posters and in newspaper advertisements, “Is your journey really
­necessary?” 34.
But the demarcation between the rational and the irrational was also
made on the institutional level. One finds, for example, the evidence taken
by the Royal Commission on Transport, documented in big blue books.
Everybody was free to bring his or her position in front of the Commission, which had published an appeal in the press in 1928, but it was mainly
the reports given by the big transport companies, economic associations
and scientific consultants which found their way into the official reports.
This had consequences, particularly for marginalised positions like that of
pedestrians. They were not part of the co-ordination efforts, not mentioned
in urban transport debates, and not even subsumed under the entity “transport”. In addition, customers were not taken into account, whereas they
now play quite an important role in transport debates.
Schlimm Anette, Ordnungen des Verkehrs…, p. 298.
34
142
Social Engineers in Transport Policy
The most visible and best-known demarcation line was e­ stablished by
the Salter Conference. It consisted, as reported above, of four representatives of the Big Four, the four railway companies, and four r­ epresentatives
of another Big Four – the four most dominant road haulage companies.
No small or single-person company was represented. The conference
was conscious of this problem, so they promised to also keep in mind
the interests of these small companies. But the recommendations of the
Conference discriminated against the developing c­ompanies – those
which did not yet exist, but would first have to prove that there was a
strong and as yet unsatisfied demand for their new service.
The demarcation lines of the commissions had two main effects.
First, they established an order where only rational and economic transport demands and positions were represented. We can conclude that the
recommendations for a new transport order were made for a special
image of society, that is, a fairly centralised and highly industrialised
one where efficiency and economic rationality were the dominant
values. They were not fit for a highly participation-oriented consumer
society coming into existence during the second half of the twentieth
century. The second effect was that this rational and efficient order
was a static one. It was developed from the existing order, optimised
and then conserved for the future – a future which was seen not as a
completely new period but as an extension of the present.
But what kind of order characterized the recommendations as well
as the institutional practice by transport experts? What other similarities
can be found between the institutional and discursive forms of transport
policy?
In the paragraphs above, I argued that the Royal Commission and the
Salter Conference were two quite different forms of consultancy boards.
While the Royal Commission was to be a neutral forum to collect information, take into account the positions of interested parties and provide
the parliament with some form of recommendation, the Salter Conference was founded as a body of two competing parties – the conflict
was an integral characteristic of the Conference. It consisted of representatives whose task was to support the positions of their companies
and to fight for a good compromise. But there was also an important
commonality – both the institutions are characterised by a position of
neutrality – Arthur Salter, the chairman of the Salter Conference, on the
one hand, the whole Royal Commission on the other –, and a controversial part – the eight representatives in the case of the Salter Conference, the interested parties’ statements collected and carefully archived
in the blue books by the Royal Commission. The neutral position made
it possible to control the conflict and harmonise the different positions in
143
Anette Schlimm
order to facilitate fairness and achieve a satisfying ending. Conflict-laden
communication was canalised and mediated by the neutral position in
order to serve a higher goal: protection of the public and national interest.
This form of mediated conflict is also found on the level of transport
itself. Indeed, the new system of transport consisted of these elements:
conflicting interests, a neutral position which guaranteed order and
fairness, and finally the overriding need for a functioning, economically sound transport sector. The different forms of transport were left
independent: a unified transport system was not built, a transport monopoly
was not formed. The means of transport were to compete with each other,
but there was a mediating level. Institutionally, there were regional transport commissioners to regulate transport, to evaluate the applications for
transport licences and to guarantee a high grade of security in transport.
The transport legislation can be understood as being part of this mediating level as well. Both the transport legislation and the transport commissioners were put in place to establish and secure the system through a
division of function, co-operation and competition in order to guarantee
the technical, economic and social progress of the nation as a whole.
The new transport order imagined and recommended by the ­transport
commissions was a kind of organic, harmonious and co-ordinated order,
where conflict was, to a significant degree, replaced by a system of
co-operation and functional division. The outcome was to be an economically sound, just and efficient transport system. However, transport
experts had to pay a high price for this orderly system, a price they were
not aware of. The orderly transport system was possible because of the
exclusion of supposedly irrational positions, of consumers, pedestrians
or small transport enterprises. But this discrimination was concealed
through the institution of a supposedly independent mediator who
was to guarantee the rationality and impartiality of the ­co-ordination
practice. Thus any interest not regarded as “rational” by this mediator
was excluded, and the status quo was conserved in a system which was
meant to be flexible. Perhaps the failure of this co-ordination scheme
was a result of this lack of flexibility.
Conclusion: A Society of Social Engineering?
The parallels described between the discursive and institutional
forms of co-ordination debates in interwar Britain lead to at least one
conclusion:
The description illustrates how dominant the cultural patterns of
problem solving were in this historical period. Attempts to cope with
144
Social Engineers in Transport Policy
the dynamics in transport were intertwined with social diagnoses about
disorder as well as with forms of social communication and the institutionalisation of expertise. This suggests that the analysis of historical
policies should not lead us to judgements about the adequacy of these
attempts, because they are situated in a specific historical period and
culture and therefore not transferable to other contexts. On the contrary,
we should analyse these policies as constituent parts of a culture which
contribute to the organisation of society.
The implication of this more epistemological position is that we
have the opportunity to analyse these policies, these efforts by different political, social and scientific protagonists, as part of a society
challenged by the dynamics of modernity. The diagnoses, the practices
and the findings of the two transport commissions can be interpreted
as examples of the modes through which a modern society deals with
conflicts and disorder – modes we also find in other European ­societies.
I suggest calling these specific historical modes social ­engineering,
which – following Thomas Etzemüller’s considerations – can be defined
by combining different elements 35:
– The historical actors of social engineering were mainly experts
– whatever this meant in the societies of Great Britain or the German
Reich. In Great Britain in particular, most of these experts were practitioners with a strong regard for higher values like efficiency, public
interest and national progress.
– These actors were diagnosing a crisis, which was triggered by the
dynamics of the modern world: urbanisation, technical progress, class
conflicts, demographic changes, etc. These factors were regarded as
essential for progress, but at the same time they seemed to threaten the
established order which was seen as vital for social cooperation as well
as for the nation as a whole. The actors, or social engineers, had quite
an ambivalent view of modernisation.
– The social engineers made an effort to restrict these modern
dynamics to special zones in between stable regions of order (like transport regions, neighbourhood units, etc.). They tried to develop a new
system where progress and traditional order would be co-ordinated. But
The concept of social engineering, which is used in this article, is presented in
Etzemüller Thomas, “Social Engineering”, Docupedia Zeitgeschichte 2010, 6.2.2012
(https://docupedia.de/zg/Social_engineering?oldid=75535); Etzemüller Thomas (Hg.),
Die Ordnung der Moderne. Social Engineering im 20. Jahrhundert, Bielefeld: tran­script,
2009.
35
145
Anette Schlimm
unlike the vision of society put forward by supporters of modernisation theory, modernity and order were still two different things, even
contradictions sometimes, in the image of society the experts described.
According to the social engineers, it was not possible to build a new
order upon modern dynamics.
The Britain of the interwar years can be seen as a society where this
form of social engineering was quite influential, above all in the social
sciences and in the area of political consultancy, even though the Parliament tended to a mere traditional form of policy. But social engineers
were found throughout the political landscape of Britain (as well as of
Europe) and over twenty or thirty years they defined the ­predominant
perspective on social problems, combining the image of a stable and
harmonious order with limited spaces for dynamic processes. This
was not just a special feature of transport debates, but can be found
in many other social fields (e.g. industrial sociology, demography,
town planning) throughout Europe (Sweden, Germany, the Netherlands, Great Britain) 36, so that the phenomenon of social engineering
helps us to analyse a historical period which was characterised by
strong national policies as well as European similarities. The influence
of social engineers in defining and solving social problems was one of
these similarities, partly because of the experts’ international communication. Thus the existence and practice of social engineering throughout
interwar Europe may be another reason for the similarity of European
transport issues: these problems were defined and handled in similar
ways by similar protagonists.
Etzemüller Thomas, Die Romantik der Rationalität. Alva & Gunnar Myrdal. Social
Engineering in Schweden, Bielefeld: transcript, 2010 ; Kuchenbuch David, Geordnete
Gemeinschaft. Architekten als Sozialingenieure – Deutschland und Schweden im 20.
Jahrhundert, Bielefeld: transcript, 2010 ; Luks Timo, Der Betrieb als Ort der Moderne.
Zur Geschichte von Industriearbeit, Ordnungsdenken und Social Engineering im 20.
Jahrhundert, Bielefeld: transcript, 2010 ; see also the forthcoming examination of the
social engineering connected with the Zuiderzee project in the Netherlands by Liesbeth
van de Grift.
36
146
Competition and Co-ordination of Passenger
and Freight Transport – The Case of Austria
and Switzerland During the First Half
of the 20th Century
Bernd Kreuzer, Johannes Kepler Universität Linz
Abstract : Austria’s Federal transport policy of the 1920s and 1930s was rather
ambivalent and inconsistent as both push and pull factors were used at the same
time: on the one hand, the Railways were given preference to by legal measures
while on the other hand road transport was fostered by large investments in
road building and by abolishing the tax on motor vehicles in use. The Federal
Railways, on the other hand, had to cope with a difficult situation after the fall
of the Habsburg Empire in 1918 and underwent a process of modernization and
rationalization. But in the long run, the railway continually lost market shares to
road transport. Compared to the Swiss case it seems as if in Austria the problem of
co-ordination and competition between road and rail was much less successfully
solved.
Transport in the Habsburg Monarchy
and the impact of 1918
With the defeat of 1918 and the fall of the Habsburg Empire, the
Austrian Railways had to cope with a difficult situation in many
respects. First, the engines, carriages and wagons had to be distributed
among the successor states, but more than a proportionate part of the
administrative staff remained in Austria. Its number was much too high
for the now small country, causing an increasing deficit. Secondly, the
Austrian Railways depended almost entirely upon coal as a source of
147
Bernd Kreuzer
energy because Austria had largely neglected to develop alpine water
power as Switzerland had begun to do. The coal, however, came from
Silesia and Bohemia and now had to be imported from Poland and
Czechoslovakia. But Austria lacked the money to pay for the importing of coal, so the trains often did not run as scheduled – or did not
at all – in the period just after war. Thirdly, the railway network had
some gaps due to the new borders because Austria had had to cede
some important railway nodes to Czechoslovakia, Hungary, Yugoslavia, and Italy 1. Nearly all important railway lines connecting the
former capital with the remotest parts of the empire were now cut off
by the new borders.
Austria-Hungary, like Germany, but to a much lesser extent, was
a key country for European railway transit. Passenger and especially
freight transport between Russia and Italy, between Germany and
the Balkans and, to a lesser extent, between Switzerland and Eastern
and South-Eastern Europe, had to pass through Austria-Hungary.
This strategic position was partly lost after 1918, though the freight
transit corridor from the Adriatic to North-Eastern Europe remained
important. As some of Austria’s formerly most frequented tourism
resorts, the Bohemian spas and the Austrian Riviera on the Adriatic
coast, were now less easily accessible, summer holiday resorts along
the Western railway in Tyrol, in Salzburg and in the Salzkammergut
region saw a remarkable rise in tourism. The main axis of transport
shifted from north-south (Silesia-Bohemia-Vienna-Trieste) to east-west
(Vienna-Linz-Salzburg-Germany/Tyrol and Switzerland). This was not
only due to the new borders, but mainly to the economic situation in
central Europe after 1918.
Despite all these changes, the railway kept its dominant and
overarching position in the transport sector. In fact, until 1918 the
railways had hardly known any competition at all. Suburban, interurban and long-distance passenger transport was nearly exclusively
provided by the railway, whereas in urban areas the tramways occupied
a leading position. Only in rural areas hitherto insufficiently serviced
Mechtler Paul, “Internationale Verflechtung der österreichischen Eisenbahnen
am Anfang der Ersten Republik”, Mitteilungen des Österreichischen Staatsarchivs,
17/18 (1964/65), p. 399-426; Staudacher Peter, “Die österreichischen Eisenbahnen
1918-1938. Problemgeschichte eines Transportsystems”, in Schmid Georg, Lindenbaum
Hans, Staudacher Peter, Bewegung und Beharrung. Transport und Transportsysteme
in Österreich 1918-1938. Eisenbahn, Automobil, Tramway, Vienna: Böhlau, 1994,
p. 15-105, esp. 18 seq.
1
148
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
by the railways did road transport still prevail. If the railways had to
face any competition at all, it did not derive from any mode of transport
within the country, but rather from international sea transport, mainly
in the form of freight transport, of course. Under these circumstances
it becomes clear that reliable and short connections to Austria’s most
important sea harbour, Trieste, always played a crucial role within the
country’s transport economy.
The Habsburg Monarchy was characterised by a severe lack of
internal waterways, as river transport on the Danube, flowing “in the
wrong direction” to the Black Sea, could never be compared to the one
on the Rhine or the Elbe. In 1912, only 2.7 million tons were transported on the Danube, whereas on the Elbe, which could be used by
steam ships only in a very short section, 3.7 million tons were shipped 2.
Nevertheless, the Austrian Danube Steam Navigation Company
(Donau-Dampfschiffahrtsgesellschaft) by far dominated transport on
the Danube. When in 1901 a large infrastructure building programme
(Koerber-Plan) passed Parliament, it comprised not only new railway
lines, but also new internal waterways (Wasserstraßenvorlage) 3. Only
the railways, however, were realised.
Hertz Friedrich, Die Produktionsgrundlagen der österreichischen Industrie vor
und nach dem Kriege, Berlin and Vienna: Verlag für Fachliteratur, 1917, p. 58; cf.
Bachinger Karl, “Das Verkehrswesen”, in Brusatti Alois (Hg.), Die wirtschaftliche
Entwicklung, Vienna: Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, 1973,
p. 311 (Die Habsburgermonarchie 1848-1918, vol. 1).
3
Binder Harald, “Die Wasserstraßenvorlage und die wirtschaftlich-politische Lage
Österreichs im Jahre 1901”, Österreichische Zeitschrift für Geschichtswissenschaften,
3 (1992), no. 1, p. 43-62.
2
149
Bernd Kreuzer
Table 1: Passenger and Freight Transport in Austria (Cisleithania), 1913
Passenger Transport
Passengers
Transported
(in 1,000)
Railways
Approximate
Modal Split
Share (%)
Freight Transport
Freight Tons
Transported
(in 1,000 t)
Approximate
Modal Split
Share (%)
301,915
84
158,818
96,1
53,746
14,9
586
0,4
Internal Waterways
(Danube, Elbe)
2,748
0,8
5,719
3,5
Motorized Public Road
Transport
(Postal and Private
Services)
1,187
0,3
359,596
100,0
165,123
100,0
Urban Transport (including electric, steam and
horse-drawn tramways)
Total
Source: Österreichisches Statistisches Handbuch für die im Reichsrathe
­vertretenen Königreiche und Länder 1913, Vienna: K.K. Statistische Zentralkommission, 1914.
Note: Cisleithania comprised the Alpine countries, Bohemia, Moravia, Silesia,
Galicia, Bucovina, Krain, Istria and Dalmatia, but not Hungary and Croatia.
Growing competition between road and rail
During the 1920s, and still more during the 1930s, this traditional
modal split pattern gradually began to change in favour of road transport, even though the railway managed to keep its leading position. In
general, transport still meant railway transport and, consequently, transport policy still meant railway policy. The transport crisis following the
end of the war was largely a railway crisis.
Very soon after the armistice, the first proposals for modernization and rationalization were made, and in 1922, the League of
Nations, which was supposed to give a huge loan to the Austrian
Federal Government in order to put the Austrian budget back on its
feet, called for far-reaching reforms within the railways: staff reduction, new tariffs, the introduction of business principles, etc. In fact,
in 1923, the Austrian Railways, which had hitherto been part of the
Ministry of Railways, now became a business enterprise, thus separating ministerial administration from management – a measure almost
simultaneously taken by the German government, too. The number of
150
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
staff was radically reduced, from 228,000 in 1919 to 85,000 in 1926 4.
Nevertheless, the railways kept on suffering from high debts and a
general lack of funds for investment, with the State constantly obliged
to cover the deficits.
The interwar period was undoubtedly characterised by the competition between road and rail transport in short-distance transport and by
the governmental struggle to co-ordinate these two transport modes.
Like in many other European countries, questions such as how to
organize and co-ordinate road and rail transport, which transport mode
to invest in, who should pay the social costs of transport, and what
should be the role of the State, continued to be discussed throughout the
interwar period 5. There is a wealth of contemporary literature on these
questions 6.
Apart from that, the rising importance of the aeroplane and of
aviation in general as another emerging competitor in long-distance
travel and transport must not be underestimated. The aeroplane, as the
fastest, the most modern, the most luxurious and, therefore, the most
elitist means of transport, proved to be a formidable competitor, at
least for the luxury long-distance train. When, in 1922, the Compagnie
Franco-Roumaine de Navigation Aérienne opened an air route running
from Prague via Vienna to Belgrade, and then even to Constantinople,
flying was not only faster, but also more prestigious and therefore, far
more attractive to upper-class travellers than taking the Orient Express
train. This aerial competition only affected the very small market
segment of luxury travel, but it drove the wealthiest travellers to opt
for the aeroplane whenever possible and apparently made the luxury
trains unprofitable. The famous Orient Express was consequently
opened to second-class travellers after 1922 in order to gain new
customers 7. Moreover, long-distance trains were speeded up in order to
stay competitive in relation to the aeroplane, and the Austrian Federal
Cf. Metz Ernst, Beamteneinsparung aufgrund der Genfer Protokolle unter beson­
derer Berücksichtigung der Österreichischen Bundesbahnen, PhD thesis, University of
Vienna 2003.
5
Wohl Paul, Albitreccia Antoine, Road and Rail in Forty Countries. Report prepared
for the International Chamber of Commerce, London: Oxford University Press, 1935.
6
Cf. Hanel Georg, Eisenbahn und Automobil in Österreich, Vienna: Manz, 1932 ;
Österreichisches Kuratorium für Wirtschaftlichkeit (Hg.), Eisenbahn und Kraft­
wagen, Vienna: Julius Springer, 1936.
7
Warmuth Heinrich, “Eisenbahn, Automobil und Flugzeug als Konkurrenten in der
Ersten Republik”, in Gutkas Karl, Bruckmüller Ernst (Hg.), Verkehrswege und Eisen­
bahnen, Vienna: Österreichischer Bundesverlag, 1989, p. 135-168; 152.
4
151
Bernd Kreuzer
Railways sought to look after their interests by acquiring capital shares
in the newly founded aviation companies. This strategy would also be
pursued with the bus and haulage companies that were becoming the
new competitors in road transport.
The competition in road transport did not derive, as one might
suppose, from the privately used automobile, but mainly from the bus,
and then later, from the 1930s onwards, from the lorry. The bus had
already proven its reliability before the war. Soon after the turn of the
century, when the building of a network of local railways was at its
height, the first motor post bus line had been inaugurated in 1907 in
today’s Southern Tyrol and Trentino. Because of its success, in the
same year another line was opened in Upper Austria between Linz
and Eferding. This line, however, became partly obsolete when a local
railway was built there, and it was finally reduced to a short section.
Nevertheless, even this reduced service was well frequented and led to
the establishment of new bus lines throughout the country, above all
where there had been long discussions about whether to build a local
railway or not. The first transnational lines were put in service and in
May 1914, five motor buses began the first long-distance package tour
from Vienna to Bozen.
In Vienna, however, the motor bus, for the time being, was
not successful: the privately owned Vienna General Omnibus
Company Ltd., which had a huge stock of horse-drawn omnibuses,
established a motor bus service for just six weeks in 1905. Two
other lines operated by the Municipality of Vienna in 1907 were
soon replaced by tramways. It seems as if the motor bus could not
yet compete with the tramway. Only in 1913 was another – this time
successful – attempt made to introduce motor buses into Vienna’s
urban public transport, involving various bus types already in use in
London, Paris, Berlin and Leipzig.
Aside from this late start in Vienna, motor bus services saw
a remarkable rise before the outbreak of war, hindered only by the
often poor state of roads, which did not allow any heavy motor transport. By 1914, 37 motor bus lines were in service, eleven of them in
Tyrol alone, where the newly built alpine road through the Dolomites
attracted many tourists. In general, the motor buses in rural areas did
not really compete with the railways, but rather complemented them.
Some of these lines were only run in summer because they primarily
served the needs of tourism. This promising early development of the
motor bus was then suddenly interrupted by the outbreak of World
War I.
152
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
During the war, the lorry, too, proved its reliability and fitness.
In the 1920s and 1930s, when the Austrian Railways had to overcome
a deep crisis, the lorry gradually replaced horse-drawn transport and
local railways and represented strong competition for short-­distance
railway transport. Using the higher-speed lorry instead of the horse
meant that easily perishable goods like milk, meat, vegetables, fruits
and flowers could now be more rapidly delivered to even more
distant markets. A transport economist in 1928 judged the lorry to
be competitive with the railway not only in short-distance transport but even up to a distance of 200 km, due to its many advantages 8. In fact, when complaining about their competitors, the Federal
Railways could never say precisely how much transport they really
lost due to this competition. Only in 1930 were the first official
post-World War- I railway statistics published. They contained the
figures for the year 1927, but nothing was to be read there about
competition between road and rail.
If we examine the numbers of passengers and goods transported
by the Austrian Federal Railways from 1927 onwards, we see an
increase in both passenger and freight transport during the short period
of economic recovery – and even prosperity – in the late 1920s. But
as early as 1928/29, the volume of freight transport began to fall off
dramatically due to the world economic crisis. The same then happened
to the volume of passenger transport with a delay of some months. It is
remarkable, however, that the volume of freight transport started to rise
again in 1933 when the economic crisis seemed to have been overcome,
whereas passenger transport kept on decreasing and only recovered
slightly from 1935 onwards. It seems as if freight transport was much
more dependent on macro-economic factors than passenger transport,
and that the latter, on the contrary, suffered more from competition on
the part of the motor bus than from economic recession. The volume
of heavy goods usually transported by the railways – goods such as
wood, fuel, coal, ore, and stones – saw a more significant decrease than
goods that could also be efficiently transported by motor lorries. These
losses in heavy transport may therefore be interpreted as an impact of
the economic crisis.
Teubert Wilhelm, Die Welt im Querschnitt des Verkehrs, Berlin: Kurt Vowinckel,
1928, p. 404.
8
153
Bernd Kreuzer
Table 2: Passenger and Freight Transport in Austria, 1927 and 1936
Passengers
Transported
(in 1,000)
1927
Freight
Tons Transported
(in 1,000 tons)
1936
1927
1936
Railways (Federal and Private Railways)
108,051
63,350
27,806
25,380
Urban Transport: Electric Tramways
690,878
508,162
206
75
1,938
1,668
0,5
1,097
Internal Waterways: Danube
Motorized Public Road
Transport
693
674
Post
1,705
3,048
KÖB
–
5,410
Oberkraft
485
Municipal
Services
Aviation (all companies)
16
41
Sources: Statistisches Handbuch für die Republik Österreich, vol. 9, Vienna
1928. – Statistisches Jahrbuch für Österreich 1938, Vienna 1938. – Amtliche
Eisenbahnstatistik der Republik Österreich für das Jahr 1927, Vienna 1930,
p. 276-277 – Amtliche Eisenbahnstatistik des Bundesstaates Österreich für das
Jahr 1936, Vienna 1938, 55-56.
According to a contemporary expert, the modal split shares in 1932
were as follows: railways 71.2%, motor bus transport 6.9%, motor
transport (without bus transport) 21.3%, river navigation 0.5%, aviation
0.1% 9. If we look at the number of passengers transported, the motor
bus had a share of 11.2%. The average travel distance with the motor
bus was only 7 km, but if we take inter-urban and long-distance transport only, the average travel distance is nearly the same as with the local
railways. Only 2.6% of all registered motor cars in 1932 were motor
buses, but nearly a quarter (24.2%) of all motorised road transport was
provided by buses 10.
According to the official timetables, in 1919, only nine motor bus
lines were in service, but the number rapidly increased, from 23 lines
in 1920 to 76 in 1924, and to nearly 500 in 1932. By far the largest
motor bus network was operated by the Austrian Postal Service, which
had been the pioneer of public motor transport before 1914. In order to
compete with the bus and the lorry, the Federal Railways founded a bus
Zumtobel Walter, Der Kraftfahrlinien-Personen-Verkehr Oesterreich’s, Dornbirn:
Höfle, 1934, annex 2.
10
Zumtobel, Kraftfahrlinien…, p. 12 seq.
9
154
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
company of their own, the Bundesbahn-Kraftwagen-Unternehmung,
in 1933, known under the abbreviation “KÖB” (Kraftwagenbetrieb
der Österreichischen Bundesbahnen). This motor bus company often
operated lines that ran parallel to the railway in order to keep any
other company from competing with her. In 1931 she took over one
of the most powerful competitors, the LOBEG company (Lastwagenund Omnibus-Betriebs-Gesellschaft m.b.H.), which had built up large
regional bus networks, together with her subsidiary companies. Besides
these two big companies under the influence of the state, there were
many small companies that sometimes operated only one or two lines.
Table 3: Motor Vehicles in Use, 1921-1939
Others
Total
Number
of Motor
Vehicles
17,974
18,160
68,138
13,372
19,821
22,409
76,153
2,407
14,088
26,414
24,926
91,015
5,125
2,353
13,746
26,645
26,232
92,242
18,891
5,062
2,324
13,687
27,146
28,244
95,354
1935
21,789
5,021
2,458
13,921
29,066
30,756
103,011
1936
25,149
4,939
2,494
13,599
30,219
34,210
110,610
1937
28,081
4,292
2,392
13,817
58,872
12,131
119,585
1939
59,708
1,395
21,743
105,402
1,229
189,477
Year
Private
Cars
Taxi
Cabs
1921
7,687
1925
8,095
2,932
1930
12,392
4,963
1931
13,499
1932
Motor
Coaches
Lorries
Motor
Cycles
3,234
2,592
6,190
15,963
2,133
12,516
4,914
2,138
17,960
5,220
1933
18,141
1934
Sources: Statistik der Kraftfahrzeuge in Österreich 1930-1937, Vienna 1931-38;
Statistisches Jahrbuch für das Deutsche Reich 1939/40, p. 236.
In 1930 and 1931 motor vehicles were counted on September 30, and from 1932
onwards on December 31; 1939: July 1. Statistical data published before 1930
were judged to be rather imprecise already by contemporaries of the 1930s.
On the other hand, in Upper Austria, the local g­ overnment founded a
motor bus company called “Oberösterreichische ­Kraftwagenverkehrs-AG”
(Oberkraft, 1923) which grew very fast: in 1925, more than 444,000
155
Bernd Kreuzer
passengers were transported in 48 vehicles. By 1930, the Oberkraft was
the leading bus company in Upper Austria, with more than a million
passengers (Post: 252,000, KÖB: 199,000). During the second half
of the 1920s, new motor bus services were inaugurated in many larger
Austrian cities.
The Railways react: the Austrian
and Swiss Federal Railways compared
How did the Austrian Federal Railways (“Österreichische Bundesbahnen”, ÖBB) react? As we have seen above, one strategy consisted in
founding a bus company of their own. On the other hand, the Railways
tried hard to make suburban and short-distance travel more attractive,
especially for commuters, among other things by renewing the rolling
stock and reducing travel times through the use of light railways. Beyond
that, the management sought to keep expenses as low as possible and
to operate as efficiently as possible. Reduced tickets were offered to
tourists, especially during the summer, customs clearance for freight
was speeded up, and special freight tariffs were offered. Following
the example of the American Railways, engineers even thought of
­introducing high-comfort express trains running between Vienna and
Salzburg – Austria’s most frequented railway line – conceived to be
used by wealthy travellers and, above all, by tourists.
As to the infrastructure, which had to be adapted to the new spatial
structures, there was no money to build new railway lines, except for
two secondary lines. The only success was the electrification of a large
part of the network in the western states. These efforts were mainly
driven by the lack of coal. By 1930, the whole network in the west
of Salzburg and the Salzkammergut region was electrified, a total of
835 km, though this success was achieved five years later than planned.
Due to the world economic crisis, works had to be stopped. In Switzerland, on the contrary, electrification works were speeded up because of
the crisis in order to give work to the unemployed. Then, the Tauern
railway line was electrified until 1935.
Let us have a look at the Swiss Federal Railways (“Schweizerische Bundesbahnen”, SBB) and see how they coped with competition
from the road. Like the Austrian Federal Railways, the SBB enjoyed
a de facto monopoly in long-distance transport at the beginning of the
century. The traditional horse-drawn postal service was not reduced by
the railway, but instead saw a remarkable rise because the railways had
caused a general rise of transport volume, and the stage coach could take
156
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
advantage of this by transporting passengers to and from the railway
stations. Nevertheless, stage-coach transport in 1910 only transported
1.9 million passengers, whereas 240 million people used the railways 11.
The Swiss Federal Railways had only emerged at the turn of the
century from the merger of five big railway companies which were
bought up by the Federal State in the years between 1900 and 1909.
Between 1913 and 1948, another four small privately owned companies followed 12. The new company started with high debts from these
purchases, which proved to be a great burden until 1944, when the
Federal State finally released the SBB from a great deal of the debts
and injected fresh capital 13. The existing railway network was dense
and well adapted to national transport needs, but the infrastructure
and, above all, the rolling stock were somewhat neglected. Until the
outbreak of World War I, the SBB managed to renew both the rolling
stock and the infrastructure (stations, workshops).
Although the country was not directly involved in the war, Switzerland also suffered from a severe lack of coal. The SBB were therefore
not capable of maintaining full service during the war, which meant that
public opinion gradually turned against the railways because customers,
politicians and even the railway staff doubted the SBB’s reliability.
Moreover, with the outbreak of war, wealthy tourists from abroad no
longer visited Switzerland, and after 1918, they did not return. This
setback was all the greater because foreign tourists constituted the most
important clientele, even more important than the home market.
Under the pressure of growing dependence on coal imports from
abroad, the electrification of the railway network soon became a key
issue in railway modernization, even though the first attempts and
proposals had already been made since 1901 and the Lötschberg-­
Simplon line had been electrified as early as 1913. In 1918, the SBB’s
Administrative Board decided to adapt the most important lines to
Frey Thomas, “Eine funktionale Bestandsaufnahme der Pferdepost, 1850-1920”,
Traverse. Zeitschrift für Geschichte, 1999/2, p. 89-107; Bretscher Ulrich, Von der
Postkutsche zum Postauto. Geschichte der Reisepost, Schaffhausen: Meier, 1982.
12
Paquier Serge, “Options privée et publique dans le domaine des chemins de
fer suisses des années 1850 à l’entre-deux-guerres”, Schweizerische Zeitschrift für
Geschichte. Revue suisse d’histoire, 56 (2006), p. 22-30.
13
Buchli Felix, Schweizer, steh zu deinen Bahnen! Die Sanierung der Schweizerischen
Bundesbahnen (1920-1945), Nordhausen: T. Bautz, 2006 ; Meyer Hans-Reinhard, “Die
Sanierung der Schweizerischen Bundesbahnen”, in Eidgenössisches Amt für Verkehr
(Hg.), Ein Jahrhundert Schweizer Bahnen 1847-1947, Band 1, Frauenfeld: Huber,
1947, p. 409-417.
11
157
Bernd Kreuzer
electric traction, with the electricity coming from Swiss hydro-power.
55% of the whole network was electrified by 1928, and 77% on the eve
of World War II. This extraordinarily high degree of electrification soon
became a symbol of Swiss economic performance and independence
and was unique in Europe 14. Swiss railway electrification was a model
not only for Austria but also for other countries 15.
In order to compensate for the lack of foreign tourists, the SBB
sought to gain new customers after 1918 by making railway travel
more attractive to the Swiss. From 1924 on, travelling in and through
Switzerland with the SBB was heavily promoted.
At the same time, the Swiss Postal Service decided to switch
from the horse to the motor bus, because the Swiss army gave her
a great number of lorries that were no longer needed after the war.
These lorries were now converted to motor buses (cars alpins). Both
the network and the number of passengers transported by the postal
motor bus service grew very fast. The motor bus replaced other
transport modes but also complemented them 16. Like in Austria,
road ­transport was furthered by improving the road network. This
was largely financed by car owners and the gas taxes (“Benzinzoll”,
“Treibstoff­zoll”) they paid 17.
At first, the SBB did not cope particularly well with growing competition from road freight transport. Attempts to influence the process of
law-making in order to hinder haulage transport did not succeed. Then,
around 1930, there seems to be a paradigm shift within the SBB management, towards co-operation with the haulier companies instead of
confrontation. Following the recommendations of a special committee,
Bairoch Paul, “Les spécificités des chemins de fer suisses, des origines à nos jours”,
Schweizerische Zeitschrift für Geschichte, Revue suisse d’histoire, 39 (1989), p. 35-57.
15
Staudacher Peter, “Die Elektrifizierung der Eisenbahnen in der Schweiz und in
Österreich während der Zwischenkriegszeit”, Blätter für Technikgeschichte, 56 (1995),
p. 71-110.
16
Merki Christoph Maria, “Der Umstieg von der Postkutsche aufs Postauto. Zur
Motorisierung des öffentlichen Überlandverkehrs in der Schweiz”, Vierteljahrschrift für
Sozial- und Wirtschaftsgeschichte 85 (1998), p. 94-112.
17
Merki Christoph Maria, “Der Treibstoffzoll aus historischer Sicht: von der
­Finanzquelle des Bundes zum Motor des Strassenbaus”, in Pfister Christian (Hg.),
Das 1950er Syndrom. Der Weg in die Konsumgesellschaft, Bern/Vienna: Haupt, 1996,
p. 311-332; Pfister Christian, “Finanzierung des Strassenbaus: Das Karussell kommt
in Schwung”, Wege und Geschichte. Les chemins et l’histoire. Strade e storia, 2004/1,
p. 26-30; Ochsenbein Gregor, Strassenbau und Strassenkosten ohne Ende. Eine system­
theoretische Analyse eines sich selbst verstärkenden Prozesses im 20. Jahrhundert,
Lizentiatsarbeit, University of Bern, 1999.
14
158
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
the “Schweizerische Express A.G.” (SESA) was founded in 1926 as
a first step towards a closer co-operation between road and rail. The
SESA helped to gather experience in the new field of combined freight
transport 18. Together with privately owned railway companies, the SBB
offered a door-to-door road-rail haulage service, which allowed them
to maintain a strong position in the parcel service market. In 1934, the
SBB and the road hauliers even came to an agreement as to how rationally divide the freight transport market among them. The draft bill was
approved. It provided for a compulsory concession for any professional
road freight transport and a division of tasks regulated by law. In May
1935, however, when the law was submitted to a referendum, the Swiss
clearly voted against it 19.
Table 4: Passenger and Freight Transport in Switzerland, 1927 and 1936
Passengers
Transported
(in 1,000)
Transport Mode
Railways: Swiss Federal Railways
Urban Transport
Internal Waterways
Electric Tramways
Motor Bus
1927
1936
1927
1936
113,065
106,933
17,867
12,804
203,639
203,222
111
3,315
21,009
138
197
Navigation on
Lakes
Rhine at Basel
Postal Horse
­Carriages
Road Transport
Aviation
Freight Tons
Transported
(in 1,000 t)
76
14
Postal Motor Bus
Service
2,854
5,246
Licenced Motor
Bus Companies
(non-urban traffic)
1,891
3,559
5,600
30,000
740
2,291
21
36
Source: Ritzmann-Blickenstorfer Heiner (Hg.), Historische Statistik der
Schweiz. Statistique historique de la Suisse. Historical Statistics of Switzerland,
Zürich: Chronos, 1996.
Brüschweiler Paul, “Die Ergänzungsdienste der Eisenbahn”, in Eidgenössisches
Amt für Verkehr (Hg.), Ein Jahrhundert Schweizer Bahnen 1847-1947, vol. 4,
­Frauenfeld: Huber, 1955, p. 546-563.
19
Mühlethaler Jan, “Schiene versus Strasse”. Von den Anfängen eines verkehrs­
politischen Grundsatzdiskurses und dessen Leitbilder in der Schweiz (1921-1935),
­Lizentiatsarbeit University of Zurich, 1994.
18
159
Bernd Kreuzer
The Austrian Federal Government reacts
Switching back to Austria, we shall now see which measures the
Austrian Federal Government took. The Federal Government was of
course interested in keeping the Federal Railways competitive, and
sought to do so through legal measures. But we also see a slow shift
from railway to road transport not only in the government’s transport
policy but also in public opinion. Already in January 1925, a meeting
of transport experts from government and business and representatives
of pressure groups had called for higher investments in road building
because, as many of them argued, road haulage had proven a more
efficient, cheaper and faster mode of transport than the railway despite
being much hindered by the poor condition of roads 20.
In fact, in 1928, in order to adapt national roads to the needs of
modern motor car traffic, the Federal Government started a long-term
national road building initiative (“Neuzeitliche Ausgestaltung der
Bundesstraßen”). By the end of 1931, nearly 500 km were completed,
but then the economic crisis nearly brought all work to a stop due to
the resulting lack of funds. It was only in 1934 that the Austro-­Fascist
regime again began paying considerable attention to road building
and road improvement, using the labour of the numerous unemployed
and investing significant funds 21. But these measures focused
above all on the building of tourist roads like the “Großglockner
­Hochalpenstraße” 22.
In 1931 a federal tax on gas (“Benzinsteuer”) and another on motor
vehicles in use that depended on cylinder capacity (“Kraftwagenabgabe”) were introduced which put an end to the confusing variety of
taxes. Previously, each federal state and even major cities had imposed
their own motor vehicle taxes, the amount differing considerably from
state to state. The main reason, however, for introducing these two
taxes was to yield higher revenues for the budget. The introduction of
Schmid Georg, Staudacher Peter, Lindenbaum Hans, “Das Automobil holt auf”, in
Schmid Georg, Staudacher Peter, Lindenbaum Hans, Bewegung und Beharrung. Trans­
port und Transportsysteme in Österreich 1918-1938. Eisenbahn, Automobil, Tramway,
Wien: Böhlau, 1994, p. 173 seq.
21
Kreuzer Bernd, “National Road Networks in the 1930s: The Case of Austria’s
roads”, in Mom Gijs and Tissot Laurent (eds.), Road History. Planning, Building and
Use, Neuchâtel: Alphil, 2007, p. 105 seq.; Rigele Georg, Die Wiener Höhenstraße.
Autos, Landschaft und Politik in den dreißiger Jahren, Vienna: Turia + Kant, 1993,
p. 49.
22
Rigele Georg, Die Großglockner-Hochalpenstraße. Zur Geschichte eines österrei­
chischen Monuments, Vienna: WUV, 1998.
20
160
Competition and Co-ordination of Passenger and Freight Transport
a federal tax on gas was accompanied by the abolition of all remaining
road and bridge tolls. Though the burden of taxation for road transport
thus was considerably raised, bus travel and road haulage still seemed
to be capable of offering their services much more cheaply than the
Railways. The tax on vehicles in use was abolished in 1935 in order to
foster motorization.
In 1933, in order to protect the highly indebted Federal Railways
against growing competition from road transport, the Federal Government, again following the German example, promulgated the so-called
“Road Haulage Act” (“Lastkraftwagenverkehrsordnung”). It was
directed at road haulage and not at motor bus transport because the
Federal Railways thought the lorry to be their most dangerous competitor; in fact, it was the bus. According to this Act, road haulage was,
simply speaking, restricted to short-distance and business-to-business
transport, whereas long-distance transport was reserved for the Federal
Railways. Freight rates were prescribed by the government. Without
any doubt, this law was made in favour of the Federal Railways. But
it was not a law that favoured the railway in general, because privately owned railways were not given preference in the same way. Nevertheless, the law proved a failure: it was largely ignored by hauliers,
could not be enforced and did not have the desired impact of saving the
Federal Railways from competition. In 1937 the Road Haulage Act was
abolished. The idea of co-ordination between road and rail transport by
legal measures had failed.
In Switzerland, however, governmental regulation was more
successful. In August 1940, road transport was regulated by the
“Autotransportordnung” (ATO) which also followed the German model.
This finally proved to be a fair solution because it reduced competition
between road and rail as well as among the haulage companies 23.
Conclusions
Austria’s Federal transport policy of the 1920s and 1930s was
clearly rather ambivalent and inconsistent. One might even say that
there are hardly any signs of a rational federal transport policy. Hardly
Sager Fritz, “Spannungsfelder und Leitbilder in der schweizerischen Schwerverkehrspolitik 1932 bis 1998”, Schweizerische Zeitschrift für Geschichte. Revue suisse
d’histoire, 49 (1999), p. 307-332; Nellen Alfred, Die Regelung des gewerblichen
Strassenverkehrs in der Schweiz von 1920 bis 1960 unter besonderer Berücksichtigung
der Vereinbarung Schiene/Strasse vom Mai 1952, Winterthur: P.G. Keller, 1963.
23
161
Bernd Kreuzer
any consistent strategy can be discerned, as both push and pull factors
were used at the same time: on the one hand, the Railways were given
­preference by legal measures, while on the other hand, road transport
was fostered through large investments and, though later, through
the abolishing of the “Kraftwagenabgabe”. The Federal Government
was well aware of how strange it was that there were two big, stateowned road transport companies competing with each other (the Postal
Service and the “KÖB”, owned by the Federal Railways), but did not
engage very much in merging them; in 1937, a committee was asked to
discuss a merger but nothing happened. The Federal Railways, on the
other hand, tried to compete with the motor bus and the lorry by taking
multiple measures which proved to be at least partially successful.
Nevertheless, in the long run, the railway continually lost market share
to road t­ransport.
162
The Impact of the Great Depression of 1929
on the Hungarian Transportation Sector
Gábor Szalkai, Eötvös Loránd University, Budapest
Abstract : Since the 1920s, there has been an ongoing struggle between road and
rail transport. In the 20th century, technological aspects of road transport were
improved and railways attempted to hinder the sector’s development through
administrative arrangements. As a consequence of the Great Depression, however,
both sectors faced considerable difficulties. Competition intensified, but an agreement eventually led to cooperation. That said, the clear winner was animal traction,
which re-emerged as a mode of transport.
In the case of Hungary, like elsewhere in the “Western” world, the
decade after World War I was one of an evolving struggle between road
and railway transportation. Although the latter was in a strong position,
road transportation had been making significant progress, despite being
hindered not only by its technological backwardness, but also by the
railway itself.
The railway sector’s monopolist contracts did not include references
to motor-driven vehicles, since the latter did not yet exist when the
Hungarian railway network was established. Therefore, the railway
faced a competitor which, while technologically limited, was subject to
no legal restrictions, and this competitor started to take over the railway
market.
The railway system became inflexible, as it had to accomplish its
contractual engagements based on fixed prices, whereas road transporters could haggle on prices and only took on cargoes which they
found profitable. Furthermore, the railway’s position was inauspicious
163
Gábor Szalkai
because the first cost of “standing” railway was 75% of those actually
transporting. Hence, a non-transporting railway produced enormous
­
economic losses 1.
In order to defend its positions, Hungarian State Railways (MÁV)
mobilised the economic and political lobby supporting railways which
had, owing to its historical traditions and its close connection with the
state, “helped” to decide several questions in favour of the railway
sector. As early as 1922, due to the amendment of the Industrial Act,
industrial-scale road transportation became subject to permission, for
the very first time anywhere in the world. Since permissions were
granted for a distance of up to 20-30 km maximum, the monopoly of
the railway on long distance transportation was thereby guaranteed 2.
Owing to the pressure from the railway lobby, further restrictions
were introduced in 1926; state authorities issued permissions for road
transporters, but with additional restraints. Indeed, from that year
onwards, road transportation companies were not allowed to take on
cargoes that could have been transported by rail, except for cases where
the place of departure and the place of destination were both 5 km away
from the nearest railway station. However, the implementation of this
regulation was very difficult to control, so that the railway protection
zone was not efficient.
Nevertheless, yet another restriction was enacted in 1927: road
transportation was rearranged on a sectoral basis, and permissions were
only valid within newly established sectors with a maximum diameter
of 60 km. As a consequence of all these legal proceedings, the number
of those illegally transporting steadily increased 3.
In addition to administrative arrangements, road transportation had
to face infrastructural challenges as well, posed by the need to transform vehicles technologically for the road network.
After World War I, 26,800 km of public road remained in the territory of Hungary. Approximately 60% of this network was professionally
constructed, and the length of hard surface roads only slightly exceeded
Visegrády József, “A vasút és a szabad közlekedési eszközök versenye (The competition between the railway and other modes of transportation)”, Vasúti és Közlekedési
Közlöny, 11th March 1928, p. 168.
2
Lendér Jenő, Magyarország közúti közlekedésének fejlődése (The Development
of Hungary’s Road Tansportation), Budapest: KM Archives, Manuscript No. 1051,
n.d, 13 p.
3
Hegedűs Gyula, Közlekedésgazdaság, közlekedéspolitika (Transportation ­Economics,
Transportation Policy), Győr: Novadat, 1995, 611 p.
1
164
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
1,000 km 4. In 1924, in connection with the expenditure on road modernisation, 50% of the national roads and 30% of the municipal roads
were improved to the pre-war technological level 5.
However, the improvement of the road network accelerated significantly in the second half of the 1920s. The Hungarian government
spent 29% of the huge state loan approved by the League of Nations
in 1924 on the establishment of a modern road network. Between 1925
and 1929, 541 km of road was built 6. By the middle of the 1920s, along
with the growth of the paved road network, the number of motor-driven
vehicles also increased.
Within only a couple of years, their total number increased from
7,000 to nearly 30,000. In 1930, in addition to more than 13,000
automobiles, the number of motorcycles exceeded 10,000, and there
were almost 5,000 lorries in the country. Internationally, however,
Hungary still ranked low on the list (Fig. 1), even though – in contrast
to the majority of the world’s countries – it was already listed among
slightly motorised states (Fig. 2).
Figure 1: Rate of motorised vehicles by country, 1933
Cars per 1,000 capita
200
150
100
50
N
ew US
Ze A
al
an
Ca d
na
A da
us
tra
l
Fr ia
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Br e
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Ju an
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sla
vi
Po a
la
Bu nd
lg
ar
ia
0
Data source: malduri MAléter Jenő, “Az automobilizmus fejlődése és annak
akadályai (The Development of Automobilism and its Difficulties)”, in Magya­
rország Útügyi Évkönyve 1934 (Road Yearbook of Hungary 1934,) Budapest:
Magyar Királyi Kereskedelemügyi Minisztérium, 1935, p. 244-275.
Tóth László, Magyarország közútjainak története (The History of Hungary’s Public
Roads), Győr-Budapest: KHVM, 1995, 165 p.
5
Hegedűs Gyula, Közlekedésgazdaság…, p. 417.
6
Tóth László, Magyarország közútjainak…, p. 58.
4
165
Gábor Szalkai
Figure 2: Modes of transportation in the 1930s
Rail, Car, Horse
Horse, Donkey
Cattle, Buffalo
Camel
Sled dog, Reindeer
On foot
Source: Csinády Gerő, Általános földrajz (General Geography), Budapest:
Magyar Földrajzi Intézet R.T., 1940, 97 p.
The ongoing road construction required significant internal resources
which were in part covered by imposing a tax on motor-driven vehicles,
a tax which was established by the law of “The taxing on vehicles”,
Clause VI of 1928. The revenues generated by the tax were given to the
National Road Development Fund, but later on, private capital was also
incorporated into the modernization process.
Concerning the tax on vehicles, diverse opinions have been
expressed. Some saw it as an opportunity to improve the road network 7;
others, on the contrary, believed this regulation slowed the increase in
the number of automobiles, as the tax was not imposed in accordance
with the vehicles’ actual participation in transportation 8.
The era of the economic crisis
Although the tax was affordable under normal circumstances, the
expansion of the worldwide economic crisis made it a significant burden.
According to data from the period, the amount of annual tax paid for
the same type of vehicle was 867 CHF in Switzerland and 1208 CHF in
Tóth László, Magyarország közútjainak…, p. 64.
Gölniczbányai Elischer Pál, Magyarország Útügyi Évkönyve 1934 (Road Yearbook
of Hungary 1934), Budapest: Magyar Királyi Kereskedelemügyi Minisztérium, 1935,
132 p.
7
8
166
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
Hungary, with the latter considered as one of the highest vehicle taxes
in the world 9. These enormous financial burdens eventually led to the
mass stoppage of use of motor-driven vehicles (Fig. 3).
Figure 3: Change in number of motor-driven vehicles, 1910-1934
Number of vehicles
15000
10000
Cars
Motorcycles
Lorries
5000
0
1910 1912 1914 1916 1918 1920 1922 1924 1926 1928 1930 1932 1934
Data source: Magyarország népessége és gazdasága (Population and Economy
of Hungary), Budapest: KSH, 1996
The road tax, along with high purchase prices and maintenance costs
and a number of other tolls and taxes (such as fuel tax and tolls, luxury
tax, rubber tax on tires, urban pavement tolls, title transfer costs, etc.),
led to a significant decrease in the number of motor-driven vehicles.
Between 1930 and 1933, more than 5,000 automobiles and nearly
2,000 lorries were withdrawn from traffic, altogether reducing the total
number of vehicles by 40%.
Hungarian politicians did not accept the arguments made in the
1920s, according to which motorised vehicles should not be considered
as luxury goods, but rather as productive tools and a great opportunity
to gain economic power. They also did not subscribe to the idea that
the rapid expansion of automobile use could have a significant positive
impact on expansion of related services as well 10.
Breuer B. Armand, “A magyar automobilizmus fejlődésének feltételei (Conditions
of the Development of the Hungarian Automobilism)”, Mérnök- és Építész-Egylet
Közlönye, n° 41-42, 1934, p. 245-248.
10
Streihammer Antal, « Az automobilizmus terjedését befolyásoló tényezőkről (On the
Factors Affecting the Expansion of Automobilism)”, Magyar Mérnök- és Építész-Egylet
Közlönye, n° 41-42, 1925, p. 221-225.
9
167
Gábor Szalkai
However, despite all the above-mentioned difficulties, it was already
proving true that “it is no longer possible to push the automobile back
into the inventor’s brain 11”.
In addition, the fact that more than 10,000 km of railway had been
withdrawn in the USA within 10 years was also an important warning
signal. Such changes made many afraid that the rapid spread of automo­
biles might weaken the position of the country’s largest company, the
Hungarian State Railways (MÁV) 12.
This company, however, owing to its strong technological preparedness, prosperous agricultural exports, legal regulations and the ultimate
trust from the state, was able to keep its strong position until the end of
the 1920s and remain profitable even until 1930. Its share of the transportation sector exceeded 70% (Fig. 4).
Figure 4: Distribution of the volume of carried goods
by modes of transportation, 1927
Horse-cart
15%
Lorry
2%
Ship
10%
Rail
73%
Data source: Pallavicini György, “Parlamenti felszólalás (Parliament speech)”,
in Az országgyűlés képviselőházának 97. ülése, 1932. június 4. szombat (97th
Session of the Parliament’s Chamber of Deputies, 4th June 1932, Saturday),
Budapest: Athenaeum, 1932, p. 175.
Nevertheless, the outbreak of the global economic crisis of 1929
shook the country’s largest company as well. After 1930, as a result of
the decrease in transportation caused by the crisis, MÁV started to show
Visegrády József, “A vasút és az autó problémája (The Problematics of the Railway
and Automobiles)”, Vasúti és Közlekedési Közlöny, 28th September 1930, p. 677-679.
12
Várady Jenő, “Az útvámok szerepe a vasút és a gépkocsi gazdasági versenyében
(The Role of Road Tolls in the Economic Competition Between the Railway and
Automobiles)”, Vasúti és Közlekedési Közlöny, 16th March 1930, p. 210-212.
11
168
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
losses. By 1932, the Hungarian railway’s grain export was reduced to
one-third of the 1929 level. Overseas grain and Romanian and Russian
rye became cheaper, so that Hungary, a predominantly agricultural
country, lost its biggest export market, Western Europe. Only H
­ ungarian
fruits remained exportable; therefore MÁV, in an attempt to save what
could be saved, provided its personnel with specific training about the
proper transportation of fruits 13.
In order to improve the railway company’s financial situation,
several ideas were proposed. One of the issues raised was the temporary closure of supplementary railway lines, constituting 71.9% of the
entire network but only 41.4% of total transportation, and the need to
relocate transport from the railway to public roads. In the case of light
traffic, this would have not only freed the railway from unnecessary
burdens but, at the same time, created an opportunity for the road transportation sector, and expanded its supply area 14.
The state, however, did not want to solve the problem with a decrease
in railway network length but with tariff and ownership changes,
as there were several railway networks in Hungary. Only slightly
more than 3,000 km were under the maintenance of MÁV out of the
7,500 km total network. Around 4,000 km of railway were maintained
by various local companies, and one could only get from these local
lines to state-run railways by paying a “broken tariff”. When the crisis
intensified, these differences became more significant than ever before,
hence state authorities decided to nationalise HÉV lines (Railways of
Local Interest) in 1931.
In order to support the agricultural sector, MÁV implemented a
tariff reform in 1931. Tariffs for passenger transport were raised (with
an increase of up to 12%, depending on distance), while certain agri­
cultural products were listed in a lower transportation category, meaning
that transportation of these goods became cheaper.
In 1932, the “Danube-Sava-Adriatic Railway Company” (the
Hungarian successor of the former Southern Railway Company,
which had been divided among four countries) was also nationalised,
Udvarhelyi Dénes, “A világgazdasági válság hatásai a hazai vasúti közlekedés
helyzetére 1931-32-ben (The Effects of the Global Economic Crisis on the Hungarian
Railway Transportation in 1931-32)”, in Mezei István (ed.), Vasúthistória Évkönyv
(Yearbook of Railway History), Budapest: KÖZDOK, 1990, p. 469-490.
14
Gáll Imre, “Közlekedési hálózatunk fejlesztéséről (On the Development of our
Transportation Network)”, Mérnök- és Építész-Egylet Közlönye, n° 47-48, 1936,
p. 325-333.
13
169
Gábor Szalkai
so that the broken-tariff system was abolished throughout almost
the entire territory of the country. As a result, for certain destinations, railway transportation prices decreased by up to 30%. These
changes were especially beneficial to the transport of livestock and
agri­cultural products from the Great Hungarian Plain to the Adriatic
Sea (Fiume) 15.
In order to preserve competitiveness against road transportation,
house-to-house railway transport was introduced in December 1931. As
the entire road transportation sector was doing well, railway transporters (with the aim to hinder road transportation’s prosperity) organised
house-to-house single-item transport with significant discounts on the
most frequented railway lines, and hired their own transporters 16.
However, at the same time, the railway’s position was weakened
because of the so-called “átkezelés”, a kind of trans-shipment that had
to be done in Budapest, affecting all kinds of cargo transported between
the eastern and western parts of the country. In the case of “átkezelés”,
all freights were stopped for a long time, and then re-despatched
again. Furthermore, MÁV’s efficiency was also negatively affected by
its bureaucratic and highly inflexible structure and the often impolite
behaviour of its personnel 17.
No satisfactory solution was found for road-toll collecting, one of
the most controversial issues of the railway sector, either. Road tolls
were collected at railway stations, before the despatch of goods by rail.
This practice dates back to the approval of the Road Act in 1890, when
– aside from railways – there were no other, modern and long-distance
modes of overland transportation. Therefore, apart from local traffic, all
road users were clients of the railway as well, and traders transported
their goods to market by relying upon both the road and the railway
transportation systems. Hence, it would have been irrational to establish
a separate institution for collecting road tolls; it was more reasonable to
collect them at railway despatch points.
In the current situation, however, collecting road tolls at railway
stations kept traffic on the roads and thus contributed to a decrease in
toll revenues. As a consequence, railway transportation became 5-90%
more expensive. Moreover, if the place of destination had urban status
Udvarhelyi Dénes, “A világgazdasági válság…”, p. 482.
Hegedűs Gyula, Közlekedésgazdaság…, p. 425.
17
Mendlik Béla, “Az autóverseny (The Automobile Competition)”, Vasúti és Közleke­
dési Közlöny, 15th January 1933, p. 43.
15
16
170
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
(urban toll) or a pavement toll had to be paid, this increase sometimes
reached 160% 18.
In addition, although the railway company was responsible for the
collection of the toll, MÁV was allowed to keep only 10% of the revenues.
The majority of the amount was spent on the maintenance of municipally owned roads, so that the railway sector, albeit not intentionally,
“supported” road transportation. Road tolls should have been collected on
the roads, separately from railway, based on road amortisation.
Even the state administration did not have a coherent opinion about
the persistent conflicts between railway and road transportation. Several
contradictory cases from that period are known, some favouring the
railway and others favouring road transportation. In one of his Parliament speeches, Deputy György Pallavicini noted that gendarmeries,
in order to safeguard the railway’s interests, often stopped lorries and
forced drivers to certify that they were transporting their own goods. In
addition, in the case of companies’ automobiles transporting their own
workers from one work site to another, drivers were asked to present
their permissions for passenger transport 19.
According to other reports, policemen did not charge the drivers
because they did not want to ruin small-scale transporters’ businesses,
even though many of them advertised their illegal services in daily
newspapers. Some cases even resulted in an assault against a railway
employee, after accusing a road transporter of illegal transport, was
reportedly beaten up 20.
According to another, quite convincing point of view, the railway
should have offered more competitive services rather than hiding behind
regulations. However the division of labour between modes of transportation should have been seen not as a concurrency struggle but rather
as a form of cooperation that was beneficial to the national economy 21.
Finally, a solution was found through an agreement between MÁV
and MATEOSZ (The National Central Co-operation of Hungarian
Lorry Transporters) in 1933, although MÁV still remained the most
important player in the transportation market 22.
Várady Jenő, “Az útvámok szerepe…”, p. 211.
Pallavicini György, “Parlamenti felszólalás…”, p. 175.
20
Mendlik Béla, “Az autóverseny”, p. 43.
21
Pavláth Jenő, “A közúti gépjárművek okozta verseny befolyása a közforgalmú
vasutakra (The Impact of the Competition Caused by Motorised Road Vehicles on
Public Railways)”, Mérnök- és Építész-Egylet Közlönye, n° 19-20, 1926, p. 107-113.
22
Lendér Jenő, Magyarország…, p. 12.
18
19
171
Gábor Szalkai
With the agreement, MÁV was granted exclusive rights for regional
transportation, but it could only be effected via MATEOSZ. As a result
of this pioneering regulation which aimed to serve their cooperation, the
country was divided into (7, then 6) traffic sectors again, within which
road transportation was not restricted. The new regulatory framework
enabled the railway to gain control over the transport of certain goods
to certain destinations, but also provided road transporters with the
opportunity to transport goods that were unprofitable for the railway.
Furthermore, the new rules specified several types of goods which were
practical to be transported directly by road (food, other perishables)
outside of the boundary as well. Basically, single-item transport between
the capital and the country’s larger cities became the competence of the
railway, but it was also the railway that provided return cargo for lorries
transporting food to Budapest.
The aim of the regulation was to put an end to the devastating price
war which was responsible for the railway’s deficit, while at the same
time legalising road transportation, a sector providing a livelihood
for many people 23. Due to the new system, a relatively balanced and
well-developed form of cooperation was established between the road
and railway transportation sectors by the end of 1933 24.
Animal carriage, the new public enemy
Although the majority of related research focuses on the struggle
between the railway and motor-driven vehicles, the latter had very little
significance in Hungary in the first half of the 20th century, even within
the road transportation sector. According to the results of the traffic
count carried out in 1927-28, the average rate of motorised vehicles
was 12%, out of which the share of lorries was only 3% 25.
In that period, the main road users were still draught carriages
and carts; in 1935, aside from some ten thousand motorised vehicles,
there were 645,000 draught carts and 43,000 passenger horse carriages
in Hungary. Given this enormous potential, and as a specific effect
of the global economic crisis, long-distance animal carriage saw
Gáll Imre, “Közlekedési hálózatunk…”, p. 330.
Merkler József, “A háztól-házig fuvarozás gazdasági és közlekedéspolitikai
jelentősége (The Economic and Political Significance of House-to-House Transport)”,
Vasúti és Közlekedési Közlöny, 15th October 1933, p. 665-666.
25
Szalkai Gábor, A közúti forgalom változása Magyarországon /1869-2006/ (Changes
in Public Road Transportation in Hungary /1869-2006/), Budapest: ELTE, PhD Dissertation, Manuscript, 2008, 174 p.
23
24
172
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
a ­significantly re-emergence in the 1930s, whereas prior to that
– by the 1920s – it only played a considerable role in the transport
of ­
agricultural products, along with intra-urban and short-distance
(regional) transportation. Before the 1930’s, long-distance transportation had only been generated by the economic potential of Budapest,
within a 100 km radius of the capital. However, impoverished smallholders attempted to use their spare capacities, particularly in wintertime. As an example, a transporter from Dunaföldvár effected a 90 km
house-to-house transport to Budapest for 50-60 pengő (the Hungarian
currency between 1927-46, 1 USD = 5,731 pengő /1932/). With a
cargo weight of 15 quintal, it took him 24 hours to get there, and he
only spent 10-12 hours in Budapest before effecting his return journey;
apart from his own food and the forage for the animals, he earned
around 4-6 pengő per day 26.
The rise in animal carriage, taxed only in a few cities and solely
in the form of a pavement toll, was one of the last renewals of a
self-­sufficient and near-natural mode of transportation to evolve
independently from the global market. Owing to low forage prices and
the reproductive ability of draught animals, it was the only remaining
low-budget form of transportation. On the improving road network,
rubber-wheeled carriages had a 3-4 ton carrying capacity, and were able
to travel 60-70 km per day, with an average speed of 8 km/h 27. A typical
group of new carriage transporters consisted of former agricultural
workers left without jobs. Due to the extremely low (8-10 fillér) firstcost price per ton-kilometre (“fillér” was the 1/100 subdivision of pengő),
carriage transporters could get by on relatively small revenues 28.
Between 1931 and 1933, the amount of goods transported to
Budapest by rail decreased by 30% and those transported by ship by
20%, while animal carriage increased by 35% 29. Although long-­distance
carriage transportation started to play a significant role in connecting
the industrial districts in the north-eastern part of the country as well,
Visegrády József, “A vasút és a szabad közlekedési eszközök versenye (The Competition Between Railway and Other Modes of Transportation)”, Vasúti és Közlekedési
Közlöny, 11th March 1928, p. 168.
27
Ertl István, A közlekedés az 1929-1934. évi világgazdasági válságban (The Trans­
portation Sector During the Global Economic Crisis of 1929-1934), Budapest: KM
Archives, Manuscript No. 1029, n.d, 20 p.
28
Gáll Imre, “Közlekedési hálózatunk…”, p. 332.
29
Zelovich Kornél, “A magyar közlekedési politika bírálata (A Review of the Hungarian Transportation Policy)”, Vasúti és Közlekedési Közlöny, 25th November 1934,
p. 854-856.
26
173
Gábor Szalkai
it was mainly its key role in the Great Hungarian Plain which generated
lively debates, even on a parliamentary level 30.
Indeed, in his Parliament speech, Deputy György Pallavicini
­emphasised that the main enemy of the railway were not expanding
motorised vehicles, but animal carriage:
“The traffic of Hungarian State Railways is not being reduced by
automobiles, but by the carriages of smallholders who have become
unemployed due to the current situation. I encourage you to consider
the peculiar fact that goods are still transported to Budapest on
carts and carriages, even from Kecskemét (That’s true! That’s true!
from the left – Ödön Dinich: What is more, it’s done on foot!),
because smallholders are not able to pay for railway transport and
are therefore more likely to travel 99 km to Pest at night and back
the next day, in order to sell their goods in Budapest – unfortunately,
still at very low prices – with lower transportation costs, rather than
sending them by rail” 31.
Besides the railway, motorised road transportation and other economic
sectors were also affected by the growing significance of animal
carriage. For example, according to a paper published in the contemporary journal “Magyar Vaskereskedő” (“Hungarian Iron Trader”), iron
traders of the Hungarian countryside complained about cheap, “illegal”
animal carriage. They argued that the iron material purchased at a lower
price in Budapest was being transported to the countryside “for free”, so
that transporters were “ruining” both local iron traders and the railway
sector. The phenomenon was even described as a nationwide conflict.
As a possible solution, they suggested the legal restriction of animal
carriage, along with the reduction of railway tariffs 32.
However, state authorities did not intervene, even though the expansion of carriage transportation also reduced state revenues due to the
lack of taxes. Moreover, roads were being severely damaged by shod
horses 33. Nevertheless, taking legal action against carriage trans­porters
would have been ethically questionable, as it was the only source of
livelihood for small-scale agricultural producers transporting their
own products to the nearest marketplace, and mostly on unpaved
Ertl István, A közlekedés…, p. 18.
Pallavicini György, “Parlamenti felszólalás…”, p. 175.
32
Pásztor József, “A vasút és a szekér (The Railway and the Horse Cart)”, Magyar
Vaskereskedő, 29th July 1934, p. 9-10.
33
Zelovich Kornél, “A magyar közlekedési…”, p. 855.
30
31
174
The Impact of the Great Depression of 1929 on the Hungarian Transportation Sector
roads. Furthermore, several small towns and homesteads could only be
reached by carriage, and the “sector” also played a significant role in
the supply of major cities with agricultural products; therefore, it would
have been inherently difficult to legally restrict animal carriage.
Another proposed solution was to develop a set of regulations,
according to which carriage transporters would be required to pay
charges, except for those for whom it was the only possible mode of
transportation 34.
However, as authorities saw animal carriage as a temporary phenomenon most likely to be erased by the agricultural evolution, no legal
actions were initiated 35. As a consequence, long-distance carriage transportation maintained its position even after the Great Depression, and
rapidly spread across the entire country by 1935 36.
Animal carriage remained the most significant sector of road transportation even until 1955, and its disappearance became the symbol of
the expansion of a new, global, technocratic world order.
Sz. F., “Szekérfuvarozás, vasút és az államkincstár (The Animal Carriage, Railway
and the Treasury)”, Vasúti és Közlekedési Közlöny, 28th January 1934, p. 52.
35
Gáll Imre, “Közlekedési hálózatunk…”, p. 333.
36
Frisnyák Zsuzsa, “A közúti közlekedés az 1950-es években (Road Transportation
in the 1950s)”, in Hüttl Pál (ed.), A Közlekedési Múzeum Évkönyve XII, 1999-2000
(Annals of the Transport Museum XII, 1999-2000), Budapest: Közlekedési Múzeum,
2001, p. 257-282.
34
175
Struggle of the Systems Freight mobility
from a Transatlantic Perspective, 1920-2000
Gijs Mom, Eindhoven University of Technology
Abstract : This contribution is an attempt to write a cultural history of transport coordination. It focuses on European trucking, taking the Dutch case as an
example. There, as in every other industrializing country between the World Wars,
a struggle raged between two societal systems (heavy industry and railways versus
retail and trucking), which in the Dutch context became especially fierce as the
‘wild truckers’ appeared only to be willing to become ‘domesticated’ after intervention by the transport elite, including a former transport minister.
After the Second World War, when ‘coordination’ became superceded by ‘harmonization’, the trucking interests aligned further with the State when it came to
conquering as large a part of the European trucking market as possible. This took
place within the United Nations’ TIR (Transport Internationaux Routiers) regulatory system, where the Dutch managed to capture a quarter of the market, whereas
its share in the European GNP was only 5%.
In the following pages, I intend to bring the Dutch case into the
framework of the new mobility studies as explained in my introduction
at the start of this volume, emphasizing the freight-hauling part of the
mobility spectrum and focusing upon those elements that can reveal the
essence of the cultural history of coordination, while acknowledging
that a general overview (and a focus on the passenger side of mobility)
has been provided elsewhere 1.
Part of the coordination effort of the national states was driven
by the growing political and economic self-organisation of the road
Mom Gijs and Filarski Ruud, Van transport naar mobiliteit; De mobiliteitsexplosie
(1895-2005), Zutphen: Walburg Pers, 2008; Mom Gijs, “Multiple Mobilities: Road
vs. Rail in the North-Atlantic World”, paper presented at the workshop “Models of
Mobility”, York University, Canada, 23 and 24 March 2012.
1
177
Gijs Mom
interests, particularly the thousands of individual owner-drivers of
trucks. German truckers tried in vain to control their own tariffs through
the founding of the Deukafracht Company in 1933. In France, self-­
organisation of the sector was explicitly proposed to enable the regional
coordinating committees to “exercise control”. The aim here was to
discourage long-distance road haulage. This failed, and so the policy
was intensified during the Vichy regime. A decree of 15 October 1940
made membership in authorized transport groups (such as the Comité
d’Organisation des Transports Routiers – Organisation Committee of
Road Transport) mandatory. Clearing houses (Bureaux de Répartition
du Frêt) were set up, with a pivotal role given to the engineers of the
Ponts et Chaussées, the “servants of the state” 2.
In the Netherlands, individual truckers founded an association in
1922 (the League of Commercial Car Owners in the Netherlands,
Bond van Bedrijfsautohouders in Nederland, BBN) as an instrument
in the battle against those that threatened the existence of individually
owned trucking, such as the railroads, the “engineers” and the transport
experts that supported them, but most of all the central state 3. Among
the founders were the furniture haulers (in many countries, the pioneers
of long-distance road trucking) and the automobile trade. Not related to
any existing political institution, the BBN published a periodical, De
Bedrijfsauto (The Commercial Car), striking for the historian because
of its amateurism in both lay-out and linguistic skills. The BBN soon
included most of the small trucking businesses (5,500 members in 1932,
more than 7,000 ten years later). The erratic growth pattern of the league
can be seen from the annual gain and loss figures: often a thousand new
members per year came in, while 500 others left. The reason for the rapid
growth of the organisation was the pressure to legitimize the truck, in the
face of the destruction of the Dutch roads, which made the editor of De
Bedrijfsauto, looking back a decade or so later, lament that truckers were
“the pariahs (uitgestotenen) of society” 4. For these truckers, the Netherlands were a real wilderness that could only be crossed if one possessed
Borscheid Peter, “Lkw kontra Bahn; Die Modernisierung des Transports durch den
Lastkraftwagen in Deutschland bis 1939”, in Niemann Harry and Hermann Armin
(Hg.), Die Entwicklung der Motorisierung im Deutschen Reich und den Nachfolge­
staaten, Stuttgart: Franz Steiner Verlag, 1995, p. 23-38; here p. 35; Jones Joseph, The
Politics of Transport in Twentieth-Century France, Kingston/Montreal: McGill-Queen’s
University Press, 1984, p. 124-126; Wolkowitsch Maurice, L’économie régionale des
transports dans le Centre et le Centre-Ouest de la France, Paris: SEDES, 1960, p. 198.
3
Mom Gijs and Filarski Ruud, Van transport naar mobiliteit…
4
“Als men zijn oor te luisteren legt”, Bedrijfsauto, 16, 1936, p. 138.
2
178
Struggle of the Systems Freight mobility
courage and inventiveness. Before the law of 1925 which prescribed a
uniform maximum axle load, many provinces and cities had their own
regulations, allowing them to prohibit truck traffic on their roads. Even
after 1925, the country was largely divided between a northern and a
southern part because of the lack of road bridges over the large rivers.
BBN staff managed to arrange the collaboration of individual Waterstaat
engineers who drafted weekly maps with all obstructions indicated, and
these maps were published in the association’s journal. It was also the
BBN (and not the automobile and touring clubs) that published maps
showing all Red Cross emergency posts along the roads.
BBN’s activism is also understandable because it led, unlike any other
expert or policymaker in the country, to the slow but steady emergence
of long-distance trucking, something the central planners were often not
aware of. And if they were, they were convinced this should be discouraged because it was seen as part of the ‘natural’ tasks of the railways.
By the end of 1939 there were 3,000 express trucking services in the
country, performing 15,000 trips per week. Although most of these trips
were shorter than 50 km, the Ministry of Transport estimated after the
Second World War that by 1939, about 7% of all trips were longer than
100 km, and 14 % were between 50 and 100 km. It was therefore a small
minority of truckers who, just like their colleagues in the passenger transport business 5, ventured abroad, gaining a lot of publicity in the trade’s
journals. From the end of the 1920s on, adventurous truckers ventured
into Germany, often driving in convoys of thirty to forty trucks, and
often at night. Bedrijfsauto dedicated long articles to the dare-devils who
drove to Bremen and Hamburg with fruit, or all the way to Czechoslovakia with heavy glass plates, “falsifying all the theories of the so-called
transport economists.” The image of the heroic dare-devils was created
by the sector itself: the “adventure in new regions” necessitated “navigation without a compass”, clear allusions to the country’s 17th-century
Golden Age. Truckers, the journal’s editor wrote, were “sporty lads”
with “good-humoured broad faces, mighty, strong and secure hands,
and trained hard bodies” 6. These images stood in dramatic contrast to
the work done by the trade unions, who depicted the job of truckers
as degrading and harsh, and tried to include the ­regulation of working
hours in the coordination legislation (which happened in 1936). Although
no research exists on this topic, it is possible that we are dealing here
5
6
See Mom Gijs, “Multiple Mobilities…”
“Een afgeluisterd gesprek”, Bedrijfsauto, 18, 1938 [no pagination].
179
Gijs Mom
with two types of truck users: the “proletarian” drivers of large transport
companies, and the small “entrepreneurs” of owner-drivers, who were
often recruited from the same ranks.
In 1936 the luck of the BBN started to turn. That year, trucking in
Germany “was practically made impossible” by German legislation that
made trucking over distances of more than 50 km dependent on licensing, while the French government also took measures against foreign
trucking. In fact, only the route to Belgium stayed open: between the
first months of 1934 and the peak of January 1939, the haulage into
this southern neighbour coordinated by BBN increased from 100 to
1,400 trips. And although international trucking only represented 1.3%
of the Dutch international freight traffic (in tons), the psychological
effect of the importance of this type of freight transport may have
helped the BBN officers to accept that they should try to get some kind
of recognition from the Dutch authorities. Tellingly, in 1936 the league
lost 500 members for the first time in its history 7.
A year later, founder-chair A. J. ten Hope was replaced by engineer
M. Bongaerts. This was a very remarkable manœuver indeed, because
the latter had been a member of the touring club ANWB’s road
commission and minister of Waterstaat, which was responsible for the
road building and car tax laws of the late 1920s; he was also an ardent
proponent of the building of road bridges across the large Dutch rivers.
This happened one month after coordination legislation had been passed
in parliament which had made motor bus traffic dependent on licensing.
At the same time, fear of a “catastrophe” started to spread, fuelled by
news from the neighbouring countries that the railroads were about to
win the battle of the systems and that hopes for a victory of the road
(which seemed to be secured through the coming to power of the Nazi
regime) appeared to be false. It made some within BBN fear a general
prohibition of long-range trucking 8.
After confirmation as chair of BBN, Bongaerts immediately installed
a Committee for Group Formation in Commercial Trucking and asked
Fuchs J. M., “De wettelijke regeling van het autogoederen vervoer in Duitschland”,
Bedrijfsauto, No. 36, 8 September 1938, p. 542; “Het vervoer en de Benelux”, Beroeps­
vervoer, No. 39/40, 1 October 1948, p. 582-583; Jongma Johan W. D., Geschiedenis
van het Nederlandse wegvervoer, Drachten/Leeuwarden: FPB Uitgevers, 1992, p. 174.
8
Diepen Harms, “De nieuwe Voorzitter van den B.B.N., Oud-Minister Ir. M.C.E.
Bongaerts”, Bedrijfsauto, No. 12, 25 March 1937, p. 151-152; “De ontwikkeling van
bruggen en de economische beteekenis van vrachtauto’s; uit een interview met Ir.
M.C.E. Bongaerts”, Bedrijfsauto, No. 24, 25 June 1936, p. 4-11; “Alle lange afstand
transport in gevaar?”, Bedrijfsauto, No. 45, 5 November 1936, p. 656-658.
7
180
Struggle of the Systems Freight mobility
another former Waterstaat minister to be its chair 9. Apparently, leading
BBN officers believed that very high-placed persons were needed so
that the association could follow the example of touring club ANWB,
which meanwhile had managed to move close to the national political
centre, so much so that it was given the epithet of “fifteenth ministry”.
This corporatist move (meant to make the stakeholders themselves
active in their own control through coordination “from below”) was
accompanied by a well-known form of rhetoric which had been labeled
“stick and carrot” by Joseph Jones, scholar of French coordination
: now that road traffic had started to become long-range as well, it
was important, according to the BBN leadership that the sector itself
would make “trucking into a better controllable branch” to prevent
“the government from intervening in the affairs of trucking and inland
navigation” and to make sure that “in case of mobilisation for war, of
dike ruptures (!) or national disasters,” trucking would be performed
on the basis of “free decision” instead of “coercion”. Hence, the idea
was that the fragmentation of the sector should be stopped (Bongaerts
enumerated eighteen organisations in the trucking sector) and that order
(ordening) was necessary 10.
In less than two years, the two former ministers managed to reorganise the entire branch into twelve “groups” built “from the bottom
upwards” and chaired by a well-known figure from each sub-sector.
These groups dealt with regulated trucking (line trucking), trucking for
cattle, minerals, fodder, vegetables and fruit, furniture, fish and other
special transport, and agriculture-industry trucking 11. An internal tariff
discussion followed, resulting in four reports, one of which was an
entire draft law formulated with the help of a distinguished Member of
Parliament. Furthermore, in 1939 the director of the national railroads
was invited to give a keynote speech at the annual BBN congress,
after he had made ATO (the railways’ national bus and truck company)
a member of BBN. On 16 August of that year, the law went through
“En thans de hand… aan den ploeg! De officieele mededeeling van den B.B.N.
omtrent de medewerkers aan den Organisatorischen Opbouw van het beroepsvervoer”,
Bedrijfsauto, No. 43, 28 October 1937, p. 536.
10
H.T., “… een moeilijk grijpbaar geheel… Ir. Bongaerts ontwikkelt verdere
denkbeelden op de Hoofdbestuursvergadering van den BBN”, Bedrijfsauto, No. 40,
7 October 1937, p. 499; Bongaerts M. C. E., “Organisatorische opbouw van het transportwezen”, Bedrijfsauto, No. 19, 13 May 1937, p. 246-248; Jones Joseph, The Politics
of Transport….
11
“Installatie-rede uitgesproken door den algemeen voorzitter van den B.B.N. het
Kamerlid Ir. M.C.E. Bongaerts”, Bedrijfsauto, No. 36, 8 September 1938, p. 534-537.
9
181
Gijs Mom
Parliament without any problems, shortly after a decree was issued
about the working hours of truckers 12.
Now, BBN started to be abandoned by its members on a massive
scale. Commercial truckers founded their own separate association
and were soon followed by the transporters on own account, the latter
representing the internal transport departments of trading and production companies. These two organisations, NOB and EVO respectively,
hardly had time to develop their own policy before the German army
forced them to cooperate with each other soon after the invasion of the
Netherlands in May 1940. They installed a forced membership in the
Autobevrachtingsdienst ABD (Truck Loading Service) which was run
by engineers from Waterstaat. The ABD prescribed tariffs and prohibited trips that were empty at levels of 20% or more of truck loading
weight. The latter measure, a direct attack on the own-account transport
sector, coincided in fact with the opinion of a part of the former BBN
leadership, which during the war was allowed to reorganise the NOB.
The former BBN leaders transformed the NOB into a monopolistic state
organisation run by (a part of) the sector itself, the ideal structure for
a corporatist organisation. The NOB was, in the words of its leaders,
“in the good sense of the word a coercive organisation” (dwangorga­
nisatie) 13. But while the new wartime chair of the collaborating NOB
praised the “leadership principle” of the new transport organisation, the
occupying powers could not (or would not?) suppress the own-account
organisation, which directly after the war became an important force in
the Dutch transport landscape 14.
Postwar freight transport
During the Second World War in many countries an emergency
war regime of transport coordination often introduced new legislation
or reinforced existing regulation which before the war had appeared
impossible to implement. In most countries the war circumstances were
“Inleiding over ʻsamenwerking op het gebied van personenvervoer’, belicht van de
zijde van het railvervoer door Prof. Dr.Ir. J. Goudriaan Jr., Utrecht, President-Directeur
der Nederlandsche Spoorwegen”, Bedrijfsauto, No. 26, 29 June 1939, p. 16-17; “Rijtijdenbesluit”, Bedrijfsauto, No. 23, 8 June 1939, p. 13.
13
“Autobevrachtingsdienst ingesteld; Met ingang van 13 Januari 1941”, Bedrijfsauto,
No. 3, 16 January 1941, p. 45-48; “Is de N.O.B. een oorlogskindje?”, Beroepsver­
voer, No. 12, 22 March 1941, p. 183; “Verslag van de N.O.B.-vergadering gehouden
te Arnhem op 18 November j.l.”, Beroepsvervoer, No. 47, 22 November 1941, p. 753.
14
Nolen J. in Beroepsvervoer, No. 48, 29 November 1941, p. 766-767, In a review of
Behrens J., De organisatie van het Nederlandsche Bedrijfsleven, Den Haag,1941.
12
182
Struggle of the Systems Freight mobility
advantageous for the railways, because their competitors were either
sunk by submarines (water carriers) or suffering from fuel and material
shortages 15. This was especially the case in countries (or parts thereof)
occupied by the German armies, such as Vichy-France and the Netherlands, where factions interested in state intervention took advantage of
the circumstances.
After the war, at the national level, road transport was often quicker
to regain its pre-war strength than the more infrastructure-dependent rail
and inland navigation systems, and it thus gained a crucial ­competitive
advantage. At the international level, however, the European Coal and
Steel Community (ECSC; enabled through the Treaty of Paris of 1951)
put the emphasis nearly fully on the railways, because the road tariffs
were set extremely high 16. That was before the Marshall Plan started to
support road building 17.
Pre-war coordination continued in most countries, although it often
became a pure economic matter of costing rather than an expression
of social policy (such as protecting the jobs of railway workers) 18.
In France, by the end of the 1950s short-distance road traffic was
­liberalized, whereas long-distance transport was subject to an agreement on quotas between the state railways SNCF and the Fédération
­Nationale des Transporteurs Routiers (FNTR), which did not seem to
work. Only during the 1960s did the French railroad’s performance
(in ton-kilometre) get dissociated from general industrial p­roduction
and start to follow agricultural production indexes more closely.
The changes led to a boom in truck purchases, setting France apart from
Germany (just like in the pre-war years: see figure 1) 19.
Hoogenboom Ari and Olive, A History of the ICC; From Panacea to Palliative, New
York: W. W. Norton & Company, 1976, p. 143.
16
Button K. J., Road Haulage Licensing and EC Transport Policy, Aldershot: Gower,
1984, p. 27; Stevens Handley, Transport Policy in the European Union, Houndsmill/
New York: Palgrave McMillan, 2004, p. 92; high tariffs: Mom Gijs and Filarski Ruud,
Van transport…, p. 305.
17
Mom Gijs and Filarski Ruud, Van transport…
18
For an example of such an approach see: Oort C. J., “Costing and rate-setting in the
Netherlands’ railway system”, Bulletin of the Oxford University Institute of Statistics,
No. 1, February 1962, p. 105-112; here p. 105.
19
Darrot Pierre, “La concurrence dans les transports routiers de marchandises
(Deuxième partie)”, Economie et statistique, No 40/41, 1972, p. 17-28; here p. 24;
Renouard Dominique, Les transports de marchandises par fer, route et eau depuis
1850, Paris: Librairie Armand Colin, 1960, p. 77; Neiertz Nicolas, La coordination des
transports en France de 1918 à nos jours, Paris: Comité pour l’histoire économique et
financière, 1999, p. 339-355, 480.
15
183
Gijs Mom
Figure 1: Relative truck fleet size in Germany and France
Trucks per 1000 inhabitants in Germany and France
(Source: Jünemann, 152-154, Tables I-III)
70
60
Trucks per 1,000 inhabitants Germany
50
trucks per 1000 inhabitants France
40
30
20
10
0
1921 1924 1927 1930 1933 1936 1939 1942 1945 1948 1951 1954 1957 1960
Source: Jünemann Elmar, Die Entwicklung des Güterverkehrs auf der Strasse
in Deutschland und Frankreich; Eine vergleichende Analyse, Münster: Vorträge
und Beiträge aus dem Institut für Verkehrswissenschaft an der Universität
Münster, 1964, p. 152-154, Tables I-III.
Initially, such a boom also seemed to be occurring the case in the
UK. The Transport Act of 1947 nationalized not only railways, canals
and airways, but also the long-distance parts of the trucking industry,
and led to enormous growth in own-account trucking, while several
long-distance transporters converted their businesses to short haulage of
less than 25 miles. The British Transport Commission became the largest
employer in the nation (with 900,000 employees in 1951) 20. Ironically,
when the Conservative government (back in power in 1951) started to
denationalize road haulage (through the Transport Act of 1953), this
formed the start of a neo-liberal rule which would have a great influence
Plowden William, The motor car and politics in Britain, Harmondsworth/Ringwood:
Penguin, 1971, p. 428.
20
184
Struggle of the Systems Freight mobility
on developments in Europe as a whole. Without much regulation, the
maximum total weight of trucks rapidly increased to 40 tons 21.
Another factor in the post-war reorganisation of transport was the
Inland Transport Committee of the United Nations Economic Commission for Europe. The UN committee introduced measures such as the TIR
system (Transports Internationaux Routiers) to make border crossings
for trucks easier. When, in 1953, the European Conference of Ministers
of Transport (ECMT) was founded which linked OECD states, a new
buzz word, “harmonization”, replaced pre-war coordination and raised
hopes of a market approach to the transport problem. Indeed, harmonization was meant to standardize transport technically, fiscally, infrastructurally and in relation to pricing between the partners, in preparation for
the establishment of a Europe-wide market 22. All in all, coordination
shifted from restrictive measures to investment in infrastructures, or, as
an analyst of the German transport policy described it, from a “traffic
policy as an instrument of order” to an investment policy governed by
market principles. In 1990, most c­ ountries transported far more freight
over the road than by other modes, with Portugal as an extreme on one
end (91% of all freight transported by road), and Norway at the other
end (with 25%). The European average was then 40% 23.
Cooperation between countries was difficult but steady: as already
stated, most countries started the post-war reconstruction phase by reinstating or continuing pre-war measures, which resulted in strict capacity
control to protect their railways. Most of them introduced long-­distance
trucking quotas, but the Netherlands (and Italy) opted for a more loose
system of capacity regulation, while the UK abandoned its quota system
altogether in 1968. This divergence points to what policymakers have
since called a dilemma between an “Anglo-Saxon philosophy of transport policy” based on market mechanisms and a “Continental philosophy” which saw transport as a public utility. Most histories of European
Bagwell Philip and Lyth Peter, Transport in Britain; From Canal Lock to Gridlock,
London/New York: Hambledon and London, 2002, p. 132-138; Savage Christopher
I., An Economic History of Transport, London: Hutchinson University Library, 1966,
p. 181-192.
22
Button K. J., Road Haulage Licensing and EC Transport Policy, Aldershot: Gower,
1984. p. 26-27; on “harmonization”, p. 44-48. For post-war trucking regulation at the
European level, see: Schipper Frank, Driving Europe: Building Europe on Roads in the
Twentieth Century, Amsterdam: aksant, 2008.
23
Banister David and Berechman Joseph, “Transport Policies and Challenges in
a Unified Europe: Introduction”, in Banister David and Berechman Joseph (eds.),
­Transport in a Unified Europe; Policies and Challenges, Amsterdam/London/New
York/Tokyo: North-Holland, 1993, p. 1-25; here p. 13.
21
185
Gijs Mom
transport policy describe the process as a slow but steady victory of the
Anglo-Saxon approach, safely embedded in national British policy by a
Conservative Party that stayed in power from 1979 to 1997.
In this story, one could say that the Netherlands invited the Trojan
horse of liberalism to the continent to fight against the front of “railway
protectors” represented by Germany, France and Italy. In reality, every
country showed a local mix of liberalized and protective policies,
dependent upon its particular domestic interests, but as a general trend
the expansion of the EEC with Britain in 1973 strengthened the case of
liberalization, whereas the fall of the Wall in 1989 and the subsequent
expansion with new member states re-emphasized public transport’s role
and brought new attention to transport infrastructures. Between 1985 and
1992 a new common transport policy was formulated, a step-by-stepapproach (in the three crucial areas of quota, licensing and tariffs) as
opposed to the grand schemes of the Treaty of Rome. This “patchwork
of such mildly useful mono-modal initiatives as the Council might be
prepared to endorse”, with the Single European Market of 1992 as an
important milestone, had to be fully implemented by every EU member
in 1998. In ‘Brussels’ this process was steered by a surprisingly powerful
group of British civil servants who, together with their equally motivated
colleagues from other countries, managed to set up a policy agenda
of bilateral negotiations for all three transport modes. Meanwhile the
Netherlands (and sometimes Belgium) functioned as an example of a
“middle ground,” showing “that it was perfectly possible to combine a
liberal approach with strong policies of state leadership and intervention
within the market.” Crucial in this process, a former British civil servant
concludes, was the shift towards liberalism of the German government
in 1983 and 1984. Whereas s­upranationalism reigned at the technical,
systemic level, internationalism (inter-­
governmentalism) was more
prominent at the political level 24.
Button K. J., Road Haulage Licensing…, p. 58-59, p. 113; for details on national
coordination policies in haulage licensing see: p. 64-68; Klenke Dietmar, “Freier Stau
für freie Bürger”; Die Geschichte der bundesdeutschen Verkehrspolitik 1949-1994,
Darmstadt: Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1995, p. 145-146, p. 153; Stevens
Handley, Transport Policy…, p. 2-3, p. 23-24, p. 34, p. 49-55, p. 107, p. 223 (quotations: p. 60, p. 204). For the continent, Stevens also distinguishes between a state-led
policy (France) and a corporatist policy (supervised by the state) in Germany and the
Netherlands, for example (p. 23). On the structure of the European Council and
Commission, see p. 66-73. The examples of the Netherlands and Belgium, and two
trajectories: Button Kenneth, “Freight transport”, in Banister David and Berechman
Joseph (eds.), Transport in a Unified Europe…, p. 154 and p. 159.
24
186
Struggle of the Systems Freight mobility
Dutch liberalism on a dirigiste continent
How then did the Dutch government manage to play such a special
role in the story of European transport integration? This cannot be
understood without taking into account the role of the country as a
European transit area, especially regarding the connection between
Rotterdam and the German hinterland, and the culture that was
constructed around that role. German post-war transport policy was an
uneasy mix of truck regulation and passenger car liberalism, the latter
seen as crucial in a Cold War context which imposed ’a double “anti-­
totalitarian” ­demarcation from both national socialism and ­communism.’
During the post-war Allied occupation, the British and American armed
forces forbade the pre-war Reichs-Kraftwagen-Betriebsverband (RKB)
as a coercive cartel, but the law of 1952 nonetheless took over many
pre-war principles of coordination.
German truck transport had expanded enormously between 1948
and 1953, and this led to a transport crisis during the following four
years which was marked by large railway deficits and a very restrictive policy towards trucking. In 1953, traffic minister Hans-Christoph
Seebohm not only increased taxes and prohibited the long-range road
transport of bulk, he even restricted road transport on own account
and lowered the maximum truck weight from 40 to 24 tons in order
to protect the roads. But contrary to the pre-war phase, the trucking
lobby (consisting of the shipping lobbyists, liberal transport economists and a group of Christian Democrats) was now well organized
and played the card of “Europe” whenever it needed to use the liberal
argument. It was backed by the powerful employers’ association BDI
(Bundesverband der Deutschen Industrie, Federal Union of German
Industry) after an internal struggle between the steel industry, backer
of the railways, and the automobile manufacturers, producers of the
very symbol of the economic miracle. In the end, Seebohm had to
give in to “Europe” in terms of the dimensions (16.5 meters instead
of 14 meters in length) and the total weight of trucks (32 instead of
24 tons) allowed. German liberalization started in earnest in 1961
with the “small traffic regulation reform” (Kleine Verkehrsordnungs­
reform) which led to what economists have called Ordoliberalismus,
the German version of neoliberalism 25. For the Dutch trucking sector,
Klenke Dietmar, “Freier Stau für freie Bürger”…, p. 4-5, p. 14-24, p. 29, p. 56-57
(quotation: p. 163); Willeke Rainer, “40 Jahre Verkehrswissenschaft und Verkehrspolitik”, Zeitschrift für Verkehrswissenschaft, No. 66, 1995, p. 167-186 (second ­quotation:
25
187
Gijs Mom
the German developments necessitated careful maneuvering, all the
more so as Dutch truckers soon conquered a large part of the German
long-range trucking market.
After the war, the 15,000 small commercial truckers who were part
of the NOB (Nationale Organisatie voor het Beroepsgoederenvervoer
Wegtransport, National Organisation for Commercial Road Transport)
revived their adventurous pre-war tradition of cross-border trucking,
which illustrated the “typical entrepreneurial spirit” of the Dutch
people with its combination of “courage, reliability and desire for
adventure”. When convoys of trucks were deployed to transport relief
cargo “at full American speed” to support the moderate Czechoslovakian president Beneš against the Communists, reminiscences of the
Dutch Golden Age were reactivated through the creation of the image
of the “hauliers of Europe”. Even the well-known Dutch novelist
Anton Coolen dedicated a “Czech suite” to the national pride 26. The
Dutch trucking sector was characterized during this phase by a special
balance between c­ ommercial and own-account trucking. Right after
the war, the memory of the pre-war “transport chaos” was such that the
own-account ­association EVO (Algemene Verladers en Eigen Vervoer­
ders Organisatie, General Organisation for Shippers and Transporters
on Own Account) openly speculated about the introduction of “nationalization, unification and other such measures”, against a background
of Dutch debate about corporatist “public organisations” (publiekre­
chtelijke organisaties). Later, EVO officials observed the emergence
of the commercial middle class, a “fully new class of vehicle users”,
which caused membership to grow to nearly 40,000. Nevertheless,
commercial truckers managed to conquer a larger part of the domestic
market than their colleagues in other countries. By 1950, only 73%
of the trucks and vans belonged to own-account transporters, whereas
this percentage was 80% in many other European countries (Norway,
UK, Austria) or even higher (France, Belgium, Switzerland, all
p. 170); Kopper Christopher, Handel und Verkehr im 20. Jahrhundert, München:
R. Oldenbourg Verlag, 2002, p. 57. The shift from one type of system to another was
clearly visible in the US when car manufacturers started to use highway rack trucks
instead of trains to transport their products to dealers. Goddard Stephen B., Getting
There; The Epic Struggle between Road and Rail in the American Century, New York:
Harper Collins, 1994, p. 175. Ordoliberalismus: Van der Vaart Joost, “Duitsland zal
hard worden getroffen”, NRC, 8-9 November 2008, p. 16.
26
Jongma Johan W. D., Geschiedenis van het Nederlandse…, p. 73; Dankers Joost and
Verheul Jaap, Twee eeuwen op weg; Van Gend & Loos 1796-1996, Den Haag, 1996,
p. 101; “Strijd om de N.I.W.O.”, Bedrijfsauto, No. 6, 16 March 1946, p. 128.
188
Struggle of the Systems Freight mobility
between 87 and 90%). The Dutch ratio of commercial trucking was
comparable to that in the US, but contrary to that in Japan (18% in
1945) 27.
After a highly regulatory proposal for a coordination law by a
social-democrat minister of transport (Hein Vos) had been rejected
twice by Parliament, a de facto regulation of the sector was set up,
at least as rigorous and based on a quota system of truck licensing.
Excluding the own-account truckers (who remained largely unregulated), the quota system was meticulously supervised by a commission in which the NOB as well as civil servants of the Waterstaat
department of the Transport Ministry played a prominent role. It
introduced a ceiling of 150,000 tons of total capacity for the Dutch
fleet (increased to 160,000 tons in 1957), to be distributed among the
10,000 licence holders. Thus the commission formed a second centre
of power after the national government, and followed a very strict
policy lasting two decades, including a complete interruption of quota
distribution during the recession of 1958. After that year, a period of
“controlled growth” followed, from 250,000 tons in 1961 to no less
than 600,000 tons ten years later. The regulation was successful in
that the industrial index, calculated by national statistics offices, was
followed closely 28.
In the conquest of the foreign transport market, the chair of the
other organisation, EVO, was crucial. Stationed in The Hague, EVO
leader F. E. Spat, employed by Philips, was one of the first lobbyists,
part of an international network related to the International Chamber
of Commerce (ICC) in Paris. He became the first chair of the International Road Transport Union (IRU) in Geneva. Spat founded a
new road transport office, which received a monopoly from the
Dutch government on international road transport, aimed at “preventing unwanted foreign entrepreneurs from entering the country” and
at defending “the freedom of transport on own account (…) which
benefits our harbors and ocean shipping.” When the European
“De hooge prijzen van het beroepsvervoer ”, Bedrijfsauto, No. 4, 18 August 1945,
p. 1-2, here p. 2; statistics in Beroepsvervoer of 9 October 1945, p. 6; 16 February
1951, p. 93; 10 April 1953, p. 283 and 12 March 1965, p. 348; commercial middle
class: Stants C. W., “Met de dag belangrijker: de combinatiewagen”, Bedrijfsvervoer,
No. 5/6, 1 February 1955, p. 150-152.
28
Verheij Jac., Wetten Voor Weg en Water (1923-1998); Het experiment van de Wet
Autovervoer Goederen en de Wet Goederenvervoer Binnenscheepvaart en de jaren
erna, Delft: Eburon, 2001, p. 200-238.
27
189
Gijs Mom
countries in 1949 agreed upon an international customs union, they
set up a quota system of international TIR permits, the distribution of
which was given to the IRU 29.
Figure 2: TIR licences per country
180000
Belgium
France
160000
Italy
Number of TIR licenses
140000
Netherlands
120000
Western Germany
100000
all other 17 countries involved in
the IRU system
80000
120000
100000
Number of TIR licenses
60000
80000
60000
40000
20000
40000
0
1952
1954
1956
1958
1960
1962
20000
0
1952
1954
1956
1958
1960
1962
1964
1966
1968
Source: Beroepsvervoer, No. 4, 21 February 1968, p. 310; No. 14, 3 July 1964,
p. 952; No. 8, 14 April 1968, p. 378.
The annual statistics of the TIR release shows the results of the
coordinated efforts of the Dutch government and the trucking branch
in conquering international road haulage (figure 2). In this struggle, the
use of the liberalism argument was striking, although, as we have seen,
the opposite was practised domestically.
Yet Dutch legislation made it relatively easy for a foreign trucker to
enter the Netherlands. This concession was not very painful, because
Camijn Aart, Wegvervoer, een grensverleggende activiteit; 50 jaar Stichting NIWO,
Nationale en Internationale Wegvervoer Organisatie, n.p., 1996, p. 21-35, p. 84-103;
IRU 1948-1998; “Défis d’hier et d’auhourd’hui”; Le transport routier à l’aube du
21e siècle, Genève: n.d., 1998, p. 20.
29
190
Struggle of the Systems Freight mobility
it did not harm the Dutch railway company in any way since its share
in the freight modal split was modest and its first modernization had
been already completed before the war. At the start of the negotiations
between The Six (the first six countries that constituted the EC: Belgium,
France, Germany, Italy, Luxembourg, the Netherlands), the share of
the Netherlands in the international road quota was p­roportionally
set at 19% (whereas the actual share had reached 40%). After the
Dutch government started to “defend the strong Dutch speciality”, the
percentages were corrected. The subsequent years were characterized
by a constant defence of Dutch interests in the many bilateral agreements, including a struggle against the German ministers Seebohm and
Leber. Meanwhile the Dutch share in German road transport decreased
from 60% in 1955 to 40% in 1961. This happened in the context of
a huge expansion of European road freight transport, especially after
the founding of the EEC in 1957, from 800,000 tons in 1953 to four
million tons in 1960, the year in which the truck superseded the train in
border-crossing freight transport (measured in metric tons). In total, all
Dutch modalities combined transported one-third of all the inter­national
traffic in the EEC in 1963, a share which decreased to one quarter ten
years later (when the Dutch share in EEC’s GNP was 5%). It then
stayed at this level until the end of the century 30.
Conclusions
From an overview of the interwar period, it is clear that despite the
belligerent language between railways and (large) trucking companies, only a coalition between the two sectors could result in a coordination of transport, a coordination which was established without
consulting the users (and in several countries also without including
the small truckers). This coordination started much earlier than historiography suggests. Once centralized (and removed from the control
Camijn Aart, Wegvervoer, een grensverleggende activiteit…, p. 41, p. 49, p. 51-55,
p. 69, p. 108-110, p. 127-135; Jongma Johan W. D., Geschiedenis van het N
­ ederlandse…,
p. 176; 19%: “Gevraagd: een andere Europese vervoerpolitiek”, Beroepsvervoer, No.
20, 25 September 1964, p. 1334-1336; “Het internationale wegvervoer staat nog voor
zeer grote problemen”, Bedrijfsvervoer, No. 17, 23 August 1963, p. 965; “Staatssecretaris reageert scherp op plannen Leber”, Beroepsvervoer, No. 20, 6 October 1967,
p. 1392; one-third: Van Haaren, “Enorme groei van goederenvervoer tussen E.E.G.landen”, Beroepsvervoer, No. 23, 18 November 1966, p. 1702-1704; Stevens Handley,
Transport Policy…, p. 47. According to Button K. J., Road Haulage Licensing…,
p. 61, the Dutch share in the early 1980s (probably in tons) was 40%. The Netherlands
did not need permits for Italy (p. 70).
30
191
Gijs Mom
of Parliament), the coordination could be made to fit a general trend
towards a corporatist society, which it helped to strengthen.
But did it work? Most historians agree that coordination may
have benefited the truckers, but does not seem to have benefited the
railways. In Germany, despite the Nazi rhetoric of a radikaler Neuan­
fang (radical new start), coordination policy showed continuity with
the Weimar republic and did not seem to have been advantageous
for trucking, although the trucking on own account did benefit from
the “perfect market regulation” 31. In the UK, coordination does not
seem to have benefited the railways, either, which is not surprising
if we are to believe Chancellor Neville Chamberlain, who declared
in 1933 that taxation was only raised to increase revenue and not to
influence transport organisation. No focus was put on road freight,
one of the declared aims of coordination. For France, too, the verdict
by historians has been that coordination did not result in any financial advantages for the railways, although it did result in long-lasting
disadvantages for road interests 32. Regarding the Netherlands, it was
already proven shortly after the war that in the interwar period, the
train was hardly adversely affected by the passenger car or the truck,
in the case of the truck because it had a mainly regional function 33.
Perhaps, then, it is fair to conclude that trucking did not significantly endanger the railways that were first and foremost hurt by the
passenger car and the bus. Despite this, after the war it was railway
passenger transport that proved to be the most enduring (except in the
United States).
In any case, coordination did not prevent trucking from slowly
becoming long-range. To give just one example from the largest
economy in Europe: although the share of long-range trucks in
Germany in 1989 was only 15%, their performance (in ton-km) was
70% (consisting of 30% international and 40% domestic long-range
trucking) 34. As we have seen, the “wedge function” of trucking on
own account was instrumental in this development, and therefore
merits more research by country than has hitherto been conducted.
The most c­ onvincing evidence (keeping in mind the lack of data on
Rohde Heidi, Transportmodernisierung contra Verkehrsbewirtschaftung; Zur
s­ taatlichen Verkehrspolitik gegenüber dem Lkw in den 30er Jahren, Frankfurt am Main:
Peter Lang, 1999, p. 305, p. 225.
32
Neiertz Nicolas, La coordination des transports en France…, p. 165.
33
Kuiler H. C., Verkeer en vervoer in Nederland; schets eener ontwikkeling sinds
1815, Utrecht: A. Oosthoek’s Uitgevers Mij, 1949, p. 220-221.
34
Verkehr in Zahlen, Ausgabe 1990, Berlin, 1990.
31
192
Struggle of the Systems Freight mobility
actual long-range trucking) is the general increase in freight mobility
between 1890 and 1940 in the USA, which reflects “a lengthening
of the (…) average haul of freight shipment, consequent upon the
denser settlement of the west” 35. Long-distance haulage was only 7%
in the US at the beginning of the 1930s 36. A similar indication can
be found for Germany, where between 1933 and 1938 the number
of trucks increased nearly fivefold on average, but the heaviest class
increased thirteen-fold. One-third of the truck fleet’s performance
(in ton-km) was long-distance in 1937, which represented only a 2%
share in overall freight transport 37. In the UK, long-distance haulage
gained a certain foothold before the war: a commentator of the time
estimated that 20,000 (13.3%) of the 150,000 trucks were making
hauls of 70 miles and beyond, whereas one-third of them performed
medium-distance hauls of between 20 and 70 miles 38. Nevertheless, by
1938 French long-distance trucking in tons was equal to short-distance
trucking (110,000 tons versus 118,000 tons respectively), which shows
that Autobahnen were not necessary to “invite” automobiles to become
long-range vehicles, as some historians had assumed previously 39.
In any case, British recovery from the Depression (in contrast to
France) seems to have had less to do with government action than with
“increased activity in the private sector, notably the new light industry
and housing,” supporting our earlier assumption that the battle of
the systems was in reality a battle between two opposing societies 40.
This conclusion is supported by an earlier scholar of the German and
American railway decline, Glenn Yago: “Transit decline is rooted in
Barger Harold, The Transportation Industries 1889-1946; A Study of Output,
Employment, and Productivity, New York: National Bureau of Economic Research,
1951, p. 2.
36
Childs William R., Trucking and the Public Interest; The Emergence of Federal
Regulation 1914-1940, Knoxville: The University of Tennessee Press, 1985, p. 51.
On the authority of one scholar of the interwar American transport sector at the time,
“a considerable amount of long-distance hauling of a variety of commodities is being
done (…). Occasional hauls up to 2,500 miles are not uncommon”. Moulton Harold G.,
The American Transportation Problem (Prepared for the National Transportation
Committee), Washington D.C.: The Brookings Institution, 1933, p. 523.
37
Rohde Heidi, Transportmodernisierung contra Verkehrsbewirtschaftung…, p. 52,
p. 46.
38
Gibson Thomas, Road Haulage by Motor in Britain; The first forty years, Aldershot/
Burlington/Singapore/Sydney: Ashgate, 2001, p. 235; Plowden William, The motor
car…, p. 384; Hurcomb Cyril, “The co-ordination of transport in Great Britain during
the years 1935-1944”, Journal of the Institute of Transport, May-June 1945, p. 90-105,
here p. 94, estimates: p. 95.
39
Neiertz Nicolas, La coordination des transports en France…, p. 153.
40
Jones Joseph, The Politics of Transport…, p. 104-106.
35
193
Gijs Mom
the internal relations of old and new industrial coalitions” 41. In the end,
the state appeared incapable of controlling the quantitative relationship
between rail and road, mostly because of the buffering role of trucking
on own account, but also because this relationship appeared virtually
impossible to calculate. This difficulty is due not only to the fundamentally different cost structure of the railways and trucking (ad valorem
versus marginal costs) but also to the fact that the statistics are so very
unreliable 42.
To analyse this process further would require not only a transnational approach, but also a move beyond the focus on economic aspects
of costs to include a discourse analysis of the coordination debate,
since there is evidence that quite a lot of this debate was rhetoric.
After all, economists themselves still dispute the role of freight transport in economic development 43. One component of that rhetoric was
(and is, among historians) the sharp dichotomy between a liberal and a
regulatory approach; our analysis shows that “even” in the sanctuaries
of liberalism (the UK and the USA) freight mobility was regulated, so
much so, in fact, that in the end all countries investigated here resembled each other significantly in this respect. Given the common root
of the problem (the rapid expansion of trucking after the First World
War) and the different solutions proposed, this analysis results in the
conclusion that every country seems to devise measures such that in the
end, Western societies do not differ too much from each other. This also
applies to the Netherlands, which appears less exceptional than some
historians have suggested 44. In all these societies (except the US), the
long-distance freight task of the railways appeared to be a myth. It was
the French regional economist Maurice Wolkowitsch who formulated
this view shortly after the war 45. By the end of the century, most railway
Yago Glenn, “Corporate Power and Urban Transportation: A Comparison of Public
Transit’s Decline in the United States and Germany”, in Zeitlin Maurice (ed.), Classes,
Class Conflict, and the State; Empirical Studies in Class Analysis, Cambridge, Ma.:
Wunthrop Publishers, Inc., 1980, p. 320.
42
On the elusive costs of the American trucker, see for instance: Childs William R.,
Trucking and the Public Interest…, p. 178; on unreliable statistics: Walker Gilbert,
Road and Rail; an enquiry into the economics of competition and state control, London:
George Allen and Unwin Limited, 1947, p. 127.
43
Button Kenneth, “Freight…”, p. 143.
44
Especially Jones Joseph, The Politics of Transport…, p. 205-209.
45
“Les formules: le lourd au rail, la petite distance à la route, qu’on emploie toujours
pour parler de la coordination, ne correspondent à aucune réalité”. Wolkowitsch
Maurice, “La bourgeoisie française devant l’évolution des techniques de transport”,
La pensée; revue du rationalisme moderne, Novembre 1951, p. 85.
41
194
Struggle of the Systems Freight mobility
systems functioned (and functioned well) in metropolitan commuter
systems and in intercity corridors, and, where inland navigation was
non-existent, in the transport of very heavy bulk, which since 1970
has grown along with the EU-15’s GDP. The idea that the railways
are for long-range transport is a very persistent myth, as the share of
border-crossing trade in Europe in 1994 was 7% of all the tonnage
transported within the countries, exactly the amount of the long-range
share of truck transport in the USA in the early 1930s 46.
One wonders, then, what exactly the societal function of this
long-distance myth has been, given the fact that “investment in roads
and railways, ports and airports, benefits first and foremost the country
on whose territory the development takes place. Neighboring countries
may not benefit at all; they may even lose out (…).So there was not
much enthusiasm for contributing to the cost of essentially national
facilities through the Community budget. The force of that argument
has declined over the years as the proportion of international traffic
using national roads and railways has grown (and, I would add, it has
been crucial for those small countries that depended, or were thought to
depend, on “transit”, GM), but it is still reflected in the priority which
has been given to the national, as opposed to the international, segments
of the Community’s trans-European road and rail network” 47. The only
decision left to the discretion of these societies, a German analysis of
European integration concluded in 1968, is that of choosing “between a
static and a dynamic basic conception or (…) between a conserving and
an innovating traffic policy” 48. Given the predominance of the neoliberal
stance during the last quarter-century, this has meant that those countries
with the highest emphasis on restrictive control have had to make the
most adjustments. What no government could change, however, was the
remarkable resistance of the trucking sector against concentration: it is
still a highly fragmented sector and as such still reflects its ancestor, the
individually motorized civilian. And yet, European truckers can boast
one transnational feat already: they were the ones, in 2000, to launch
“the first more or less spontaneous ­pan-­European strike” 49.
Stevens Handley, Transport Policy…, p. 16, p. 22.
Stevens Handley, Transport Policy…, p. 171-172.
48
Jürgensen Harald and Aldrup Dieter, Verkehrspolitik im europäischen Integrations­
raum, Baden-Baden: Nomos Verlagsgesellschaft, 1968, p. 55.
49
Stevens Handley, Transport Policy…, p. 1.
46
47
195
Verkehrskoordination im schwachen Staat
Institutionelle Blicke auf die schweizerische
Verkehrspolitik im 20. Jahrhundert
Eine Abstimmungsanalyse
Ueli Haefeli, Universität Bern
Abstract : In the area of transport policy, voting advice from the Federal Council
and the Parliament is largely followed by voters. It is therefore that much more
surprising that the political elite’s guidance was not heeded in any of the 20th
century referendums on transport coordination (there were five proposals put
to the vote between 1935 and 1994). An analysis of speeches related to the five
referendums hints at an institutional explanation: strong federalist impulses
fighting the new powers of the Confederation could partially explain the voting
results. However, more significantly, voters seemed to reject complex and comprehensive proposals because of specific aspects and increasingly weigh personal
inconveniences, real or imagined, against the advantages. Yet, the analysis also
demonstrates that the influence of ballot box results on federal policy should not
be overestimated. The political elite has always found absolutely legitimate ways
of reaching consensus, even after a searing defeat at the ballot box. During the
1930s and 1940s, that meant emergency legal interventions and organising freight
transport much like a cartel. In the 1980s and 1990s, the comprehensive transport
policy was unpacked into tangible projects that were all approved in referendums.
The five referendums on transport coordination did delay things, but in the end
did little to hinder the progress of federal transport policy. When compared internationally, Swiss transport coordination can be considered a model. Switzerland’s
agreement system has made it possible, at least in traffic policy, to flexibly manage
the unexpected resulting from direct democracy and ballot initiatives.
Am Anfang dieses Beitrags stehen zwei bemerkenswerte Beobachtungen: Erstens war die Akzeptanz der schweizerischen ­Verkehrspolitik
197
Ueli Haefeli
an der Urne im Quervergleich zu anderen Politikbereichen in der
Vergangenheit überdurchschnittlich hoch. Eine politikwissenschaftliche
Analyse von 27 eidgenössischen Abstimmungen mit Verkehrsbezug im
Zeitraum von 1977 bis 1998 ergab, dass das Volk in 93 Prozent der
Fälle den Empfehlungen von Bundesrat und Parlament folgte. Die
durchschnittliche Quote für alle Politikbereiche lag dagegen nur bei 71
Prozent 1. Der Blick weiter zurück zeigt, dass das Volk über das gesamte
20. Jahrhundert hinweg nur in fünf verkehrspolitisch relevanten
Urnengängen den Abstimmungsempfehlungen von Bundesrat und
Parlament widersprach 2. Damit sind wir bei der zweiten bemerkenswerten Beobachtung: Aus Sicht der Verkehrskoordination sieht die
Bilanz nämlich völlig anders aus 3. Sämtliche fünf Abstimmungen mit
Dissens zwischen Volksmeinung und politischen Eliten befassten sich
mit Aspekten der Verkehrskoordination. Darüber hinaus gab es keine
weiteren Urnengänge mit einem direkten Bezug zur Verkehrskoordination, Bundesrat und Parlament konnten sich also bei Fragen zur
Verkehrskoordination in keinem einzigen Fall durchsetzen! Diese doch
recht erstaunlichen Beobachtungen sind der Anlass zu den folgenden
Ausführungen. Wie lässt sich erklären, dass bei Fragen der Verkehrskoordination auf der Bundesebene immer wieder gegen die sonst bei
Urnengängen so erfolgreichen politischen Eliten entschieden wurde?
Die Frage gewinnt an Bedeutung, wenn berücksichtigt wird, dass die
schweizerische Verkehrspolitik im internationalen Vergleich bezüglich
wichtiger Aspekte der Verkehrskoordinationen (verkehrsträgerüber-
Vatter Adrian, Sager Fritz, Bühlmann Marc, Maibach Markus, Akzeptanz der schwei­
zerischen Verkehrspolitik bei den Volksabstimmungen und im Vollzug, Bern : Bericht
D 12 des NFP 41, 2000. Überdurchschnittliche Erfolgsquoten zeigen sich auch in kantonalen Vorlagen, welche im Rahmen des vorliegenden Beitrags nicht thematisiert werden.
Trechsel Alexander H., «Volksabstimmungen», in Klöti Ulrich et al., Handbuch
der Schweizer Politik, Zürich: NZZ-Libro, 1999, p. 557-588, zeigt für den Zeitraum
1947-1995 eine durchschnittliche Unterstützung der Behörden von 77 % (p. 567);
deutlich niedriger war die Unterstützung der Behörden in den ersten Jahrzehnten des
Bundesstaates nach 1848 (p. 577).
2
Linder Wolf, Bolliger Christian, Rielle Yvan, Handbuch der eidgenössischen Volks­
abstimmungen 1848-2007, Bern: P. Haupt, 2010, 754 p. Selbstverständlich ist die
Abgrenzung nicht immer ganz leicht, beispielsweise standen die Abstimmungen zum
Strassenverkehrsgesetz von 1927 und 1932 diskursiv im Kontext der Verkehrskoordination, der Aspekt der Verkehrskoordination konnte dann aber typischerweise nicht in die
Vorlage eingebracht werden. Vgl. dazu: Mühlethaler Jan, «Schiene versus Strasse». Von
den Anfängen eines verkehrspolitischen Grundsatzdiskurses und dessen Leitbildern in der
Schweiz, Lizenziatsarbeit an der philosophischen Fakultät I der Universität Zürich, 1994.
3
Vgl. dazu auch: Mollet Thomas, Die Quadratur des Kreises? Schweizer Verkehrsko­
ordinationspolitik zwischen 1935 und 1988, Bern: Historisches Institut, 2005, p. 164.
1
198
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
greifende Abstimmung, Rollenteilung zwischen Schiene und Strasse,
Erreichbarkeit usw.) als überdurchschnittlich erfolgreich gelten kann 4.
Der Beitrag geht von einem Erklärungsansatz aus, welcher die Bedeutung institutioneller Faktoren betont. Als Ausgangshypothese richtet
sich der Blick deshalb weniger auf inhaltliche Aspekte der einzelnen
Vorlagen, sondern vielmehr auf das für die Schweiz charakteristische
Zusammenspiel dreier institutioneller Elemente: erstens der ausgeprägte
Föderalismus, zweitens die grosse Bedeutung von Volksabstimmungen
und drittens die breite Beteiligung der wichtigsten Parteien an der Regierungsbildung im Sinne von dauerhaft etablierten grossen Koalitionen.
Im Folgenden wird zunächst die Verwendung des Begriffs der
Verkehrskoordination dargelegt. Daran schliessen einige Ausführungen
zu institutionellen Aspekten des schweizerischen politischen Systems
an. Im dritten Abschnitt werden die fünf Urnengänge zu Fragen der
Verkehrskoordination vorgestellt. Der Beitrag schliesst – vor dem
Hintergrund der Auswirkungen der Urnengänge auf die schwei­zerische
Verkehrspolitik – mit einer zusammenfassenden Interpretation der
beobachteten Diskursmuster.
Verkehrskoordination: Historische Phase
oder analytische Kategorie?
Verkehrskoordination im Sinne einer effektiven und effizienten
Bereitstellung von Verkehrsinfrastrukturen und Verkehrsdienstleistungen
hat die gesellschaftlichen Akteure im Allgemeinen und die Verkehrspolitik im Besonderen in den letzten Jahrhunderten immer wieder
beschäftigt. Die Verteilung von Mobilitätschancen musste angesichts
der wachsenden Bedeutung des Transports von Menschen und Gütern
zwangsläufig Gegenstand konfliktiver ­Aushandlungsprozesse werden.
Eine wichtige, aber meist nur implizit mitgedachte Voraussetzung der
Diskurse über Verkehrskoordination war dabei die Existenz eines wie
auch immer gearteten Wettbewerbs zwischen den Verkehrsmitteln:
Haefeli Ueli, Verkehrspolitik und urbane Mobilität. Deutsche und Schweizer Städte
im Vergleich 1950-1990, Stuttgart: Steiner-Verlag (Beiträge zur Stadtgeschichte und
Urbanisierungsforschung, Band 8), 2008, Vgl. dazu auch die verschiedenen Beiträge
in der Sondernummer von Transfers, interdisciplinary journal of mobility studies,
Vol. 1 Issue 2, Summer 2011. Und für Deutschland: Sack Detlef, «Governance Failures
in Integrated Transport Policy – On the Mismatch of ‘Co-opetition’ in Multi-Level
Systems», German Policy Studies, vol. 7, 2011, p. 43-70, sowie: ­Schöller-Schwedes
Oliver, «The failure of integrated transport policy in Germany: a historical perspective», Journal of Transport Geography, Vol. 18, 2010, p. 85-96.
4
199
Ueli Haefeli
Sobald die Vorrangstellung eines einzelnen Verkehrsmittels gesellschaftlich breit akzeptiert war, verlor die Frage der K
­ oordination an Brisanz.
Unter Verkehrskoordination im engeren Sinn verstehen die Verkehrshistoriker zurzeit in erster Linie die Debatte um die Rollenverteilung
zwischen Schiene und Strasse, welche mit der sich in den 1920er-Jahren
abzeichnenden Motorisierung des Strassenverkehrs einsetzte und
welche nach dem Zweiten Weltkrieg mit dem Durchbruch zur Massenmotorisierung und dem endgültigen Ende der Vorherrschaft der Schiene
in den 1950er-Jahren mehr oder weniger abgeschlossen wurde. In
diesem Sinne kann Verkehrskoordination als zeitlich klar eingrenzbare
historische Phase verstanden werden.
Obwohl dieser eher eng gefassten Definition die Berechtigung nicht
ganz abgesprochen werden soll, spricht meines Erachtens doch mehr
für ein weiter gefasstes Begriffsverständnis von Verkehrskoordination
als einer zentralen analytischen Kategorie der Verkehrsgeschichte. Zum
Ersten zeigt gerade das zurzeit grosse Interesse an der historischen
Analyse von Verkehrskoordination die ungebrochene Aktualität dieser
Frage. Mit der in den 1960er-Jahren erreichten Autodominanz waren die
Verteilungsfragen im Verkehr offensichtlich keineswegs gelöst. In der
Schweiz zeugen davon beispielsweise die Versuche der 1970er-Jahre,
eine koordinierte Verkehrspolitik im Rahmen der Gesamtverkehrskoordination zu implementieren, oder die vielfältigen Anstrengungen zur
Attraktivitätssteigerung des öffentlichen Personenverkehrs sowie die
Politik zur Verlagerung des Gütertransitverkehrs auf die Schiene. Aus
dieser Perspektive wird klar, dass die Verkehrspolitik trotz der relativen
Langlebigkeit von Verkehrsinfrastrukturen die Mobilitätsoptionen
immer wieder neu verteilen muss.
Darüber hinaus gibt es noch einen zweiten Grund, welcher für ein
weiter gefasstes Verständnis von Verkehrskoordination spricht: Diese
lässt sich nämlich nicht nur auf den intermodalen Wettbewerb beziehen,
sondern betrifft durchaus auch den intramodalen Wettbewerb. Beispiele
für einen solchen intramodalen Wettbewerb sind die Auseinandersetzungen zwischen grossen und kleinen Unternehmen im Güterverkehr
oder die Koordination der verschiedenen Anbieter des Tourismus und des
öffentlichen Verkehrs im Rahmen der ­Tarif- und ­Fahrplangestaltung 5. Aus
dieser Sicht greift Verkehrsko­
ordination zudem über den eigentlichen
Bereich der Verkehrspolitik hinaus und bezieht auch Verhandlungen und
Absprachen zwischen einzelnen Akteuren der Verkehrswirtschaft mit ein.
5
Vgl. dazu den Beitrag von Cédric Humair und Mathieu Narindal in diesem Band.
200
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
Die Schweiz: ein schwacher Zentralstaat, starke
Kantone und direktdemokratische Mechanismen
Die Bedeutung der vertikalen Gewaltenteilung in der Schweiz ist
ausserordentlich hoch. Die Schweiz gilt zusammen mit den USA und
Kanada als einer der drei klassischen föderalistischen Staaten 6. In
Artikel 3 der Bundesverfassung ist eine generelle Subsidiaritätsklausel
festgehalten: «Die Kantone sind souverän, soweit ihre ­Souveränität
nicht durch die Bundesverfassung beschränkt ist; sie üben alle Rechte
aus, die nicht dem Bund übertragen sind». Das parlamentarische
System mit zwei Kammern ähnelt demjenigen der USA. Während
der Nationalrat das Volk repräsentiert, bilden die Kantone die zweite
Kammer, den Ständerat. Damit ist die Bevölkerung der kleinen und
meist ländlich-konservativen Kantone überproportional vertreten.
Weil bei Verfassungsänderungen das Prinzip der doppelten Mehrheit
gilt, können deshalb kleine Kantone oft als Veto-Spieler auftreten
und ihre Interessen überdurchschnittlich gut einbringen. Neben dem
ausgeprägten Föderalismus wird das schweizerische System durch die
Mechanismen der direkten Demokratie charakterisiert. Über Initiativen und Referenden wird in Volksabstimmungen entschieden. Auch
dabei gilt in vielen (aber nicht allen) Fällen das Prinzip der doppelten
Mehrheit an der Urne (Volks- und Ständemehr). Bei der Entscheidungsfindung innerhalb dieses institutionellen Rahmens spielt deshalb
die breite Abstützung der Vorlagen eine im Vergleich zu anderen
politischen Systemen besonders wichtige Rolle. Unter anderem
aus diesem Grund zeigte der schweizerische Bundesstaat früh die
Tendenz, alle wichtigen politischen Strömungen in die Bildung der
Exekutive einzubeziehen. Unter dem Begriff der Konkordanz hat
sich deshalb ein System herausgebildet, in welchem im Sinne einer
permanenten «grossen Koalition» die grossen Parteien gemeinsam die
Regierung bilden 7.
Verkehrspolitik ist in der Schweiz vor diesem Hintergrund als
typische Mehrebenenpolitik zu verstehen. Obwohl eine klare Trennung
der Aufgaben im Rahmen eines föderalistischen Systems an sich denkbar
wäre, kennzeichnet die Zusammenarbeit mehrerer politischer Ebenen
zur Lösung ein und desselben Problems die v­ erkehrspolitische Praxis in
Linder Wolf, Vatter Adrian, «Institutions and Outcomes of Swiss Federalism: The
Role of the Cantons in Swiss Politics», in Lane Jan-Erik (ed.), The Swiss labyrinth:
institutions, outcomes and redesign, London: Frank Cass, 2001, p. 95-122.
7
Zwischen 1959 und 2003 hat sich die parteipolitische Zusammensetzung des Bundesrates sogar überhaupt nicht verändert.
6
201
Ueli Haefeli
weiten Teilen. Dies wird von der Politikwissenschaft als «kooperativer
Föderalismus» oder auch als «Politikverflechtung» bezeichnet. Insgesamt muss zur verkehrspolitischen ­Entscheidungsfindung eine grosse
Zahl von Akteuren herangezogen werden 8.
Gescheiterte Koordination an der Urne
Der Behandlung der fünf Vorlagen im Einzelnen sei hier einführend ein kurzer Überblick über die fünf Vorlagen vorangestellt (vgl.
auch Tabelle 1). Die ersten drei Vorlagen befassten sich zwischen
1935 und 1951 im Zeichen des Aufstiegs des Lastwagens in erster
Linie mit dem Güterverkehr 9. Im Vordergrund stand dabei die Frage
der Koordination zwischen Schiene und Strasse, im Hintergrund ging
es aber auch immer um den Konflikt zwischen grossen und kleinen
Anbietern des Strassentransports. Anders als in vielen anderen
europäischen Staaten oder in den USA wurde damit die Frage des
Personenverkehrs weitgehend ausgeklammert 10. Nach 1951 dauerte
es fast vierzig Jahre bis zur nächsten Abstimmung über eine Frage
der Verkehrskoordination. 1988 bei der Abstimmung über die Koordinierte Verkehrspolitik und auch beim Urnengang zur Alpeninitiative
1994 waren nun sowohl der Güter- als auch der Personenverkehr
Gegenstand der Vorlagen. Bezüglich des Rechtstyps kam fast das
ganze in der Schweiz verfügbare Instrumentarium an Abstimmungsverfahren zum Einsatz: fakultatives und o­ bligatorisches Referendum,
Initiative und Gegenvorschlag. Der Rechtstyp scheint im Gegensatz
zur «normalen» Praxis das Abstimmungsergebnis nicht beeinflusst
zu haben. Beispielsweise haben ­Volksinitiativen in der Regel an der
Urne kaum Chancen, die Alpeninitiative wurde aber angenommen 11.
Schliesslich fällt auf, dass die Urnengänge im Laufe des 20. Jahr­­
hunderts immer knapper ausfielen.
Linder Wolf, Schweizerische Demokratie: Institutionen, Prozesse, Perspektiven,
Bern: P. Haupt, 1999, p. 159.
9
Vgl. zur Geschichte des schweizerischen Güterverkehrs im 20. Jahrhundert: Sager
Fritz, «Spannungsfelder und Leitbilder in der schweizerischen Schwerverkehrspolitik
1932 bis 1998», Schweizerische Zeitschrift für Geschichte, Jg. 49, 1999, p. 307-332.
10
Dies dürfte mit der Rolle der schweizerischen Post als Monopolistin im überlokalen
Personentransport zusammenhängen. Vgl. dazu: Merki Christoph Maria, «Der Umstieg
von der Postkutsche auf das Postauto», Vierteljahresschrift für Sozial- und Wirtschafts­
geschichte, Jg. 85, H. 1, 1998, p. 94-112.
11
Seit der Gründung des Bundesstaates wurden von 159 Volksinitiativen auf Bundesebene nur 15 angenommen. <http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/de/index/themen/17/03/
blank/key/eidg_volksinitiativen.html>, besucht am 27.12.2011.
8
202
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
Tabelle 1: Überblick über die fünf Vorlagen
Jahr
Vorlage
Rechtstyp
Ja-Anteil
Stimmbeteiligung
1935
Verkehrsteilungsgesetz
Fakultatives
Referendum
32,3%
63,2%
1946
Gütertransport­
ordnung
Gegenvorschlag
33,7%
65,2%
1951
Autotransport­
ordnung
Fakultatives
Referendum
44,3%
52,4%
1988
Koordinierte
Verkehrspolitik
Obligatorisches
Referendum
45,5%
41,9%
1994
Alpeninitiative
Initiative
51,9%
40,8%
Quelle: Linder Wolf, Bolliger Christian, Rielle Yvan, Handbuch der eidgenös­
sischen Volksabstimmungen 1848-2007, Bern: P. Haupt, 2010, diverse Seiten.
1935: Verkehrsteilungsgesetz
Am 5. Mai 1935 lehnten die Schweizer Männer (erst ab 1971
durften die Frauen auf nationaler Ebene mitbestimmen), das «Bundesgesetz über die Regelung der Beförderung von Gütern und Tieren mit
Motorfahrzeugen auf öffentlichen Strassen» mit 67,7 Prozent sehr
deutlich ab. Lediglich die Transitkantone Graubünden und Tessin
wollten das Gesetz annehmen. Vor dem Hintergrund der zunehmenden
Konkurrenz durch die Strasse strebten die Vertreter der Eisenbahn seit
den 1920er-Jahren an, den Gütertransport auf der Strasse ebenfalls
einer Konzessionspflicht zu unterstellen 12. Die Bahnen argumentierten
im Sinne der so genannten «Entrahmungsthese», wonach die gesetzlich fixierte Beförderungs- und Tarifpflicht die Bahnen zur Übernahme
auch der unrentablen Transporte zwingen würde, während die Anbieter
auf der Strasse solche Aufträge ablehnen könnten 13. Die Wirtschaftskrise der 1930er-Jahre sowie der Eintritt der SBB als Anbieter in
den Strassengütermarkt mit der 1926 gegründeten «Schweizerischen
Zur Geschichte des Schiene-Strasse-Konflikts in den 1920er-Jahren: Mühlethaler
Jan, «Schiene…»; zur Geschichte der Motorisierung in der Schweiz: Merki Christoph
Maria, Der holprige Siegeszug des Automobils, 1895-1930. Zur Motorisierung des
Strassenverkehrs in Frankreich, Deutschland und der Schweiz, Wien: Böhlau, 2002.
13
Kunz Robert, «Verkehrsteilung», Schweizerische Gesellschaft für Statistik und Volks­
wirtschaft (Hg.): Handbuch der Schweizerischen Volkswirtschaft, Bd. II, p. 463-468,
hier p. 465; Kauer Ernst, Untersuchungen zur Verkehrsteilungsfrage Bahn-Auto in der
Schweiz mit Berücksichtigung ausländischer Verhältnisse, Diss. Bern: Verbands­druckerei
AG, 1939, 168 p., hier p. 100; zur Position der Bahn vgl. auch: Schrafl Anton, «Das
Verkehrsteilungsgesetz vom Standpunkt der Eisenbahnen», Mitteilungen des Kantonal-­
bernischen Handels- & Industrievereins, 11. Jg. Nr. 3, Bern, 1935, p. 73-87.
12
203
Ueli Haefeli
Express AG» (SESA), welche 1929 in die «Automobil-Stückgut-­
Transport-Organisation» (AStO) überging, verschärfte aber auch den
Wettbewerb zwischen den Anbietern auf der Strasse. So waren 1934
plötzlich auch private Spediteure, vor allem die grossen, an einer
gesetzlichen Aufteilung des Marktes interessiert, und die Akteure
konnten sich relativ rasch auf eine gemeinsame Stossrichtung bei der
Gesetzeserarbeitung einigen 14. Auch der Bundesrat wollte im staatsinterventionsfreundlichen Klima dieser Jahre dem «verhängnisvollen
Spiel des ungeregelten Wettbewerbs» ein Ende bereiten 15. Gleichzeitig
argumentierte er aber auch als Bahneigner: «Die Milliardenwerte, die
in den Eisenbahnen […] angelegt sind, dürfen nicht ohne produktive
Verwendung bleiben» 16. Vorgelegt wurde dem Parlament schliesslich
eine Lösung, welche die Transporte über Distanzen bis 10 Kilometern ungeregelt liess, für Strecken von 10 bis 30 Kilometern aber eine
Konzession verlangte und alle längeren Transporte der Bahn überliess.
Nicht reguliert wurde der Werkverkehr, welcher in Artikel 2 des Gesetzesentwurfs definiert wurde als «Beförderung von Gütern und Tieren
mit eigenen Motorfahrzeugen für eigene Bedürfnisse und mit eigenem
Personal». In der Praxis hätte diese Regelung mit einiger Sicherheit
die Umgehung des eigentlichen Zwecks des Gesetzes begünstigt 17.
Die Vorlage passierte die beiden Kammern fast oppositionslos, der
­Nationalrat stimmte ihr mit 82 zu 2 Stimmen zu, der Ständerat mit
25 zu 1 18. Etwas überraschend ergriff nun aber ein Westschweizer
Komitee das Referendum gegen die Vorlage. Obwohl die Bahnen
und die Verbände des Strassengüterverkehrs die Vorlage weiter unterstützten, wandten sich nun mit den Katholisch-­Konservativen, den
Sozialdemokraten und der Bauern-Gewerbe- und Bürgerpartei drei
grosse Parteien gegen das Gesetz, welches ihre Vertreter im Parlament
noch durchgewinkt hatten. Die Neue Zürcher Zeitung sah dementsprechend eine unheilige Allianz am Werk: «Politisch marschieren extrem
Vgl. dazu: 25 Jahre ASPA 1921-1945. Festschrift des Verbandes Schweizerischer
Motorlastwagenbesitzer, Bern 1946, p. 52-55; sowie: Eingabe des Verbandes Schwei­
zerischer Motorlastwagenbesitzer (ASPA) an den Bundesrat vom 30. März 1936, Bern
1936.
15
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung betreffend den Erlass eines
Bundesgesetzes über die Regelung der Beförderung von Gütern mit Motorfahrzeugen
auf öffentlichen Strassen (Vom 23. Januar 1934)», Bundesblatt, 86. Jg., Bd. 1, Bern,
p. 89.
16
«Botschaft…», p. 90.
17
Dies befürchtete beispielsweise auch Nationalrat und SBB-Verwaltungsrat Bratschi
(Mühlethaler Jan, «Schiene…», p. 144).
18
Mühlethaler Jan, «Schiene…», p. 133.
14
204
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
konservative Leute, Fronten und Bünde, die Sozialdemokraten und
die Kommunisten in der gleichen Richtung» 19. Tatsächlich glaubte die
Linke, die Vorlage ruiniere die Eisenbahn, während auf der politisch
rechten Seite eine unzulässige Behinderung des Automobilverkehrs
sowie preistreibende Monopole befürchtet wurden 20. Daneben scheint
es schwierig gewesen zu sein, die Inhalte der Vorlage verständlich
zu kommunizieren: So verwirrte beispielsweise der Begriff Werkverkehr gerade kleine Unternehmen, zu deren Schutz er unter anderem
dienen sollte. Darüber hinaus engagierten sich die befürwortenden
Akteure im Abstimmungskampf nur wenig, beide Seiten hatten bei
der Erarbeitung der Vorlagen Kompromisse machen müssen und
kämpften nun auch gegen eine interne Opposition 21. Eine gemeinsame
schlagkräftige Kampagne der in dieser Frage ausnahmsweise einigen
Kontrahenten SBB und Automobilverbände war angesichts der nach
wie vor tiefen Gräben offensichtlich undenkbar. Dazu kam, dass es
1935 auf dem Höhepunkt der politischen Krise der 1930er-Jahre
vergleichsweise einfach war, eine Vorlage an der Urne zu Fall zu
bringen; zwischen Ende 1931 und 1937 wurde an der Urne nur eine
einzige Vorlage angenommen, acht wurden abgelehnt. Der Politologe Leonhard Neidhart spricht in diesem Zusammenhang von einem
Zusammenbruch der plebiszitären Konfliktregelungsmuster 22.
1946: Gütertransportordnung
Die Situation nach der Ablehnung des Verkehrsteilungsgesetzes wurde 1945 in der Festschrift zum 25-jährigen Bestehen des
«Verbandes Schweizerischer Motorlastwagenbesitzer» (ASPA) 23
wie folgt beschrieben «Die Vorlage hat das typische Schicksal einer
jeden Kompromissformel, die einer Volksabstimmung unterbreitet
werden muss, gefunden: Sie wurde von den extrem eingestellten
Interessenvertretern auf Bahn- und Automobilseite verhältnismässig
leicht zu Fall gebracht. Damit wurde die Frage aufgeworfen, ob sich
überhaupt solch komplizierte, verkehrswirtschaftliche Fragen eignen,
NZZ 28.4.1935, zit. nach Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 177.
Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 178.
21
Mühlethaler Jan, «Schiene…», p. 135.
22
Neidhardt Leonhardt, Plebiszit und pluralitäre Demokratie. Eine Analyse der
Funktion des schweizerischen Gesetzesreferendums, Diss. Bern: Francke Verlag, 1970,
hier p. 221 ff.
23
1979 schlossen sich der Verband Schweizerischer Motorlastwagenbesitzer (ASPA),
welcher 1924 gegründet wurde, und der Treuhandverband des Autotransportgewerbes
(TAG) zur ASTAG zusammen.
19
20
205
Ueli Haefeli
vom Volk entschieden zu werden, oder ob künftig nicht danach
getrachtet werden sollte, nur einige klare Richtlinien aufzustellen, die
vom Volk zu genehmigen sind, unter Vorbehalt der Regelung aller
Einzelheiten im Rahmen besonderer Vereinbarungen zwischen den
hauptinteressierten Parteien» 24. Die Zukunft sollte zeigen, dass auch
dieser Lösungsansatz nicht funktionierte. Vorerst wurde aber trotz
der Ablehnung des Verkehrsteilungsgesetzes, jedoch im Einklang
mit dem Zeitgeist im In- und Ausland, der staatskorporatistische
Weg entschlossen weiter beschritten. 1940 setzte der Bundesrat, wie
so häufig in den 1930er-Jahren, mit dringlichem Bundesrecht und
damit ohne Möglichkeit einer Urnenabstimmung die so genannte
«Autotransportordnung » (ATO) für fünf Jahre in Kraft 25. Die ATO
brachte unter anderem eine Bewilligungspflicht für Güter- und Personentransporte auf der Strasse. Die Inbetriebnahme neuer Lastwagen
wurde dabei vom Nachweis der volkswirtschaftlichen Notwendigkeit abhängig gemacht und damit dem Markt entzogen. Zumindest
während des Zweiten Weltkriegs erwies sich die ATO als tragfähiger
Kompromiss, 1945 wurde sie für weitere fünf Jahre verlängert. Damit
bestimmten dringliches und befristetes ­Bundesrecht und staatskorporatistische Ansätze faktisch die s­chweizerische Verkehrskoordination
der 1940er-Jahre, war doch der Personenverkehr schon vorher weitgehend reglementiert worden war.
Parallel dazu liefen aber die Bemühungen weiter, eine definitive
Verfassungsgrundlage für die Aufteilung des Güterverkehrsmarktes zu
schaffen. Der Druck dazu kam sowohl von der Strassen- als auch von
der Schienenseite. Die ASPA machte in einer Eingabe an den Bundesrat
von 1936 deutlich, dass sie weiterhin an einer Verkehrskoordination
interessiert war, und vermutete, «dass nicht sachliche, sondern eher
politische und teilweise höchst unsachliche Argumente» die Vorlage zu
Fall gebracht hätten 26. Die Interessenvertreter der Bahn gingen einen
etwas anderen Weg: 1935 wurde eine neue Organisation zur Vertretung der Bahninteressen gegründet, und zwar unter dem bezeichnenden
Namen «Schweizerische Liga für eine rationelle Verkehrswirtschaft»
(LITRA). Deren 1938 mit einer sehr hohen Zahl von Unterschriften
25 Jahre ASPA…, p. 55.
Zimmermann Adrian, «‘Zunftordnung’ oder ‘erster Schritt’ […] zur Koordination. Die
Autotransportordnung (ATO)» in Schiedt Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C. (Hg.), Verkehrsgeschichte. Histoire des transports,
Zürich: Chronos, 2010, p. 405-418.
26
«Eingabe…», p. 4.
24
25
206
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
zustande gekommene Initiative für eine neue Gütertransportordnung
verlangte, dass der Güterfernverkehr in erster Linie auf der Schiene
abgewickelt werden sollte. Der Bundesrat stellte der Initiative einen
Gegenvorschlag gegenüber, welcher darauf verzichtete, die Verkehrsteilung schon auf der Verfassungsstufe regeln zu wollen 27. Vielmehr
wurde im Sinne eines reinen Kompetenzartikels der Bundesrat beauftragt, den Verkehr «unter Wahrung der Interessen der Volkswirtschaft
und der Landesverteidigung» gesetzlich zu ordnen. Die Initianten zogen
daraufhin 1945 ihre Initiative zurück und unterstützten den Gegen­
vorschlag des Bundesrats 28.
Im Abstimmungskampf sprachen sich alle grossen Parteien und
Wirtschaftsverbände ebenso wie die SBB für die Vorlage aus 29. Das
Autotransportgewerbe blieb gespalten: Während der 1938 gegründete
Treuhandverband des Autotransportgewerbes (TAG) zustimmte, lehnte
die ASPA ab. Klar gegen die Vorlage votierten die Strassenverkehrsverbände «Touring-Club Schweiz» (TCS) und «Automobilclub der Schweiz»
(ACS) sowie die 1936 gegründete und aufstrebende wirtschaftsliberale
Partei des «Landesrings der Unabhängigen» (LdU). Die Argumente der
Befürworter und Gegner ähnelten denjenigen von 1935 sehr stark: Die
Befürworter argumentierten erneut damit, dass ein Kampf gegen einen
ruinösen Wettbewerb auf der Strasse vonnöten sei. Sie betonten aber auch
in Abgrenzung zu nun nicht mehr zeitgemäßen staatskorporatistischen
Ansätzen, bei der Vorlage handele sich um eine freiheitliche Lösung.
Die Gegnerschaft bezeichnete die Vorlage wiederum als wettbewerbsund autofeindlich und betonte darüber hinaus, dass der Einbezug des
Werkverkehrs eine zusätzliche Gefahr darstelle 30.
Am 10. Februar 1946 wurde die Vorlage ähnlich deutlich verworfen
wie 1935 das Verkehrsteilungsgesetz; einzig der Kanton Graubünden
stimmte ihr zu. Die Kommentatoren erklärten das Volksnein wiederum
damit, dass der eigentliche Inhalt der Vorlage nicht verstanden worden
und angesichts der emotional geführten Debatte um vermeintliche
Einschränkungen des Automobilverkehrs generell in den Hintergrund
getreten sei. Zudem sei das Volk der kriegswirtschaftlich bedingten
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über die Änderung der
Bundesverfassung für den Transport auf der Eisenbahn, der Strasse, zu Wasser und in
der Luft (vom 19. Dezember 1941)», Bundesblatt, 93. Jg., Bern, p. 1120-1139.
28
Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 207-208.
29
Allerdings fassten vor allem in der Westschweiz einzelne Kantone von ihrer Mutterpartei abweichende Parolen (Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…,
p. 207-208).
30
25 Jahre ASPA…, p. 59-60.
27
207
Ueli Haefeli
Einschränkungen müde gewesen 31. Das Vollmachtenregime des
Bundesrats stiess parallel zur abnehmenden militärischen B
­ edrohung
mehr und mehr auf Widerstand, was sich beispielsweise 1949 in
der Annahme der Initiative «Rückkehr zur direkten Demokratie»
zeigt 32. Eine grundsätzlich bahnfeindliche Stimmung lässt sich jedenfalls aus dem Abstimmungsergebnis nicht ableiten, denn 1944 hatte
das Schweizer Volk die finanzielle Sanierung der Bundesbahnen in
einer Referendumsabstimmung noch recht deutlich gutgeheissen.
Sager betont darüber hinaus auch zu Recht das schlechte Image des
­Lastwagens in der B
­ evölkerung 33.
1951: Autotransportordnung
Mit der Ablehnung der Gütertransportordnung verblieb die ATO
als einzige Grundlage für die staatliche Koordination des Güterverkehrs. 1950 wollten der Bundesrat und das Parlament diese aus ihrer
Sicht grundsätzlich erfolgreiche Koordinationsgrundlage deshalb leicht
modifiziert um drei weitere Jahre verlängern 34. Im Umfeld des LdU
wurde jedoch mit dem bekannten Argument der Wettbewerbsfeindlichkeit erfolgreich das Referendum ergriffen. Immer stärker in den
Vordergrund rückte in der Argumentation der Gegner die als kartellistisch bezeichnete Koordination innerhalb des aufstrebenden Strassentransportgewerbes, während der Schiene-Strasse-Konflikt eher etwas in
den Hintergrund rückte. Zehn Jahre nach Inkrafttreten der ATO konnte
das Volk mit dem Referendum das erste Mal zu ihr Stellung nehmen.
Und wieder verweigerte es den geschlossenen politischen Eliten und
den betroffenen Wirtschaftsakteuren beider Lager die Gefolgschaft und
lehnte die ATO am 25. Februar 1951 mit 55,7 Prozent Neinstimmen
relativ klar ab. Immerhin stimmten 6 von 26 Kantonen zu (Basel,
Berchtold Walter, «Die Verkehrspolitik der Schweiz», in Ein Jahrhundert Schweizer
Bahnen 1847-1947: Jubiläumswerk des Eidgenössischen Post- und Eisenbahndepar­
tementes in fünf Bänden unter Mitwirkung der schweizerischen Eisenbahnen und in
Zusammenarbeit mit zahlreichen Fachleuten, Eidgenössisches Amt für Verkehr (Hg.),
Frauenfeld: Huber, 1947-1964, Bd. 1, p. 276-297, hier p. 292.
32
Zimmermann Adrian, «‘Zunftordnung’…», p. 412.
33
Sager, Fritz, «Spannungsfelder…», p. 313.
34
Vgl. dazu: «Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung zum Entwurf
eines Bundesbeschlusses über den Transport von Personen und Sachen mit Motorfahrzeugen auf öffentlichen Strassen (Autotransportordnung) (vom 29. Juli 1949)»,
Bundesblatt, 101. Jg., Bd. 2, H. 31, Bern, p. 212-246, sowie: «Bundesbeschluss über
den Transport von Personen und Sachen mit Motorfahrzeugen auf öffentlichen Strassen
(Autotransportordnung) (vom 23. Juni 1950)», Bundesblatt, 102. Jg., Bd. 2, H. 26,
Bern, p. 292-304.
31
208
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
Graubünden, Tessin, Waadt, Neuenburg und Genf) 35. Zweifellos hat die
in den 1950er-Jahren sehr deutlich zu spürende Abneigung gegenüber
einem regulierenden Staat zu dieser Ablehnung beigetragen 36.
Eine gesetzliche Fundierung der Koordinationsfrage war damit für
längere Zeit gescheitert. Selbstverständlich musste der Staat diesbezüglich aber weiterhin Entscheide fällen. Darauf kann hier nicht im
Einzelnen eingegangen werden, grundsätzlich lässt sich aber festhalten,
dass das Problem nicht durch Regulierung, sondern durch Subventionierung der Bahnen gelöst wurde, während der Strassengütertransport sich
verstärkt dem Wettbewerb ausgesetzt sah. Eine grundsätzliche Lösung
der Koordinationsfrage verlor der Gesetzgeber aber nie ganz aus den
Augen, was sich beispielsweise in den Aktivitäten der 1949 eingesetzten
«Eidgenössischen Kommission für die Koordinierung des Verkehrs»
widerspiegelte 37. Angesichts der einsetzenden ­
Massenmotorisierung
befasste sich der Diskurs um Verkehrskoordination nun mehr und mehr
auch mit dem Personenverkehr 38.
1988: Koordinierte Verkehrspolitik
Die Vorgeschichte der Abstimmung zur Koordinierten Verkehrspolitik reicht bis in die 1960er-Jahre zurück. Die enorme wirtschaftliche
Dynamik der Nachkriegszeit zeigte nun immer mehr auch ihre Schattenseiten, was dazu führte, dass in Abkehr vom regulierungskritischen
Zeitgeist der 1950er-Jahre nun der intervenierende Staat wieder an
Akzeptanz gewann. In Form übergeordneter Gesamtplanungen und unter
vermehrtem Einbezug wissenschaftlicher Expertise sollte nun die zunehmend als überbordend wahrgenommene Entwicklung in die gewünschten
Kanäle gelenkt werden. So auch im Verkehr: 1968 stellte der Bundesrat in
den Legislaturzielen erstmals die Erarbeitung einer «Gesamtverkehrskonzeption» in Aussicht. 1972 rief er dazu eine breit abgestützte K
­ ommission
Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 226-227.
Vgl. dazu: Blanc Jean-Daniel, «Planlos in die Zukunft? Zur Bau- und Siedlungspolitik in den 1950er-Jahren», in Blanc Jean-Daniel, Luchsinger Christine (Hg.),
Achtung: die 50er-Jahre! Annäherungen an eine widersprüchliche Zeit, Zürich:
Chronos, 1994, p. 71-94.
37
Vgl. dazu beispielhaft die «Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung
über den Ausbau der Bern-Lötschberg-Simplon-Bahn (BLS) auf Doppelspur (vom
4. Februar 1976)», Bundesblatt, 128. Jg., Bern, p. 581-625, besonders p. 593.
38
Vertieft mit diesen Themen befassen sich zwei aktuelle Dissertationen: Kirchhofer
André, Stets zu Diensten – gezwungenermassen! Die Schweizer Bahnen und ihre
«Gemeinwirtschaftlichkeit» für Staat, Wirtschaft und Bevölkerung, Basel: Schwabe
Verlag, 2010, 525 p.; Steinmann Jonas, Weichenstellungen. Die Krise der schweizeri­
schen Eisenbahnen und ihre Bewältigung 1944-1982, Bern: Peter Lang, 2010, 365 p.
35
36
209
Ueli Haefeli
ins Leben. Die sehr umfassenden, erst 1977 abgeschlossen Arbeiten
dieser Kommission müssen hier nicht im Einzelnen erläutert werden (vgl.
dazu auch den Beitrag von Sandmeier in diesem Band) 39. Die in vierzig
Thesen veröffentlichten Vorschläge trugen in einer für die Schweiz völlig
neuen Art und Weise den vielfältigen Wechselbeziehungen zwischen der
Verkehrs-, Raum- und Umweltentwicklung Rechnung. Gefordert wurde
eine Stärkung der Bundeskompetenzen im Bereich der Verkehrskoordination und eine teilweise Abkehr von der verkehrsträgerbezogenen
Finanzierung der Verkehrspolitik. Aufgrund kritischer Stimmen in der
Vernehmlassung und im Parlament wurden die Vorschläge der Kommission gerade bezüglich der beiden letztgenannten Bereiche mehrfach
überarbeitet, bis 1986 endlich unter der Bezeichnung «Koordinierte
Verkehrspolitik» eine abstimmungsreife Vorlage verabschiedet werden
konnte 40. Trotz der Unterstützung durch alle grossen Fraktionen gab es
bereits im Parlament abweichende Stimmen aus den grossen Parteien. Vor
allem Volksvertreter aus der Westschweiz warnten vor zu vielen Bundeskompetenzen, welche künftig autofeindliche Interventionen erleichtern
könnten. Im Abstimmungskampf wandten sich denn auch die FDP und die
SVP gegen ihre Bundeshausfraktionen und gaben eine Nein-Parole aus.
Auch die Dachorganisation der Wirtschaft, der Vorort (heute Economiesuisse), und insbesondere der Gewerbeverband und die Verkehrsverbände
(ausser dem umweltnahen «­Verkehrsclub der Schweiz» VCS) plädierten
für ein Nein. Für die Vorlage setzten sich neben den Umweltverbänden
unter anderem die CVP, die SP und die Grünen, aber auch der Bauernverband ein. Am 12. Juni 1988 lehnte das Volk die Vorlage mit 54,5 Prozent
ab. Lediglich die Transitkantone Uri, Tessin und Graubünden sowie beide
Basel stimmten der koordinierten Verkehrspolitik zu. Insgesamt war
die Ablehnung vor allem auf dem Land und in der Westschweiz stark,
während hauptsächlich die Deutschweizer Städte der Vorlage deutlich
zustimmten 41. Zudem ergab die Nachbefragung, dass vor allem die
Automobilisten und die Automobilistinnen die Vorlage abgelehnt hatten 42.
Haefeli Ueli, «Der grosse Plan und seine helvetische Realisierung: die Gesamtverkehrskonzeption 1972-1977 und ihre Wirkung auf die schweizerische Verkehrspolitik»,
Schweizerische Zeitschrift für Geschichte, Vol. 56, 2006, p. 86-95.
40
«Botschaft über die Grundlagen einer koordinierten Verkehrspolitik (Teilrevision der
Bundesverfassung) (vom 20. Dezember 1982)», Bundesblatt, 135. Jg., Bd. 1, H. 11,
Bern, p. 941-1061.
41
Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 455-546.
42
Linder Wolf et al., Detail-Analyse der Volksabstimmung über die Koordinierte
Verkehrspolitik KV. Studie im Auftrag des Stabs für Gesamtverkehrsfragen, EVED,
Bern, Bern: Forschungszentrum für schweizerische Politik, 1988.
39
210
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
Damit war die Idee einer Gesamtverkehrskonzeption auf Bundes­
ebene nach 20-jährigen Vorarbeiten endgültig gescheitert. Trotzdem
prägten die Arbeiten der Kommission für eine Gesamtverkehrskonzep­
tion die schweizerische Verkehrspolitik der 1980er- und 1990er-Jahre
entscheidend. Ein grosser Teil der in den vierzig Kommissionsthesen
enthaltenen Vorschläge sind umgesetzt worden, so beispielsweise
zentrale Projekte wie die «Bahn 2000» mit dem integralen Taktfahrplan oder die «Leistungsabhängige Schwerverkehrsabgabe» (LSVA).
Allerdings musste jedes dieser Projekte im politischen Prozess isoliert
bestehen, eine koordinierte Verkehrspolitik im eigentlichen Sinn blieb
Wunschdenken. Insbesondere gelang es kaum, die in der Gesamtverkehrskonzeption ebenfalls enthaltenen restriktiven Massnahmen zur
Dämpfung des Verkehrswachstums umzusetzen, so beispielsweise die
volle Kosteninternalisierung oder die raumplanerischen Eingriffe 43.
1994: Alpeninitiative
Die «Initiative zum Schutz des Alpengebiets vor dem Transitver­
kehr (Alpeninitiative)» nimmt als fünfte hier vorgestellte Vorlage eine
Sonderstellung ein. Zum ersten und bisher einzigen Mal stimmte das
Schweizer Volk einer Vorlage zur Verkehrskoordination zu und bewies
damit, dass solche Vorlagen an der Urne nicht in jedem Fall chancenlos
sein müssen. 1989 reichte ein Komitee bestehend aus Umweltschutzgruppen der Kantone die Initiative ein, welche verlangte, dass der Bund
das Alpengebiet vor den negativen Auswirkungen des ­Transitverkehrs
zu schützen habe 44. Im Vordergrund stand dabei die Forderung,
den grenzüberschreitenden Güterverkehr in Zukunft auf der Schiene
abzuwickeln. In dieser Festschreibung der Aufgaben im Güterfernverkehr liegt denn auch der verkehrskoordinatorische Kern der Vorlage.
In seiner Botschaft von 1992 empfahl der Bundesrat vor allem auch
aus europapolitischen Motiven die Ablehnung der Initiative. Diese
diskriminiere Ausländer und verstosse gegen das Prinzip der freien
Verkehrsmittelwahl. In der damals instabilen Situation der Schweiz
im Kontext ihrer politischen Situierung in Europa kam dem Bundesrat
die Vorlage offensichtlich besonders ungelegen. Darüber hinaus
sei, so der Bundesrat, bereits eine Reihe von Massnahmen ergriffen
worden, welche dem Anliegen der Initianten ­entgegenkäme 45. Beide
Haefeli Ueli, «Der grosse Plan…», p. 93-95.
Vatter Adrian, Akzeptanz…, p. 18-19.
45
«Botschaft über die Volksinitiative ’zum Schutz des Alpengebietes vor dem Transitverkehr’ (vom 12. Februar 1992)», Bundesblatt, 144. Jg., Bd. 2, H. 13, p. 877-921.
43
44
211
Ueli Haefeli
­arlamentskammern schlossen sich der Meinung des Bundesrates
P
an. Allerdings fällt auf, dass die Entscheide im Vergleich zu anderen
Verkehrsvorlagen recht knapp ausfielen. Im Abstimmungskampf
bestätigte sich, dass die Initiative vor allem die bürgerlichen Parteien
spaltete. Insbesondere ergriff eine ganze Reihe von Kantonalsektionen
der CVP und der FDP die Ja-Parole, entgegen dem Votum der nationalen Dachparteien. Gegen die Vorlage plädierten die Verkehrsverbände
(mit Ausnahme des VCS) und die Arbeitgeberverbände. Für ein Ja
setzten sich die grünen und linken Parteien sowie der LdU, aber auch
die rechtsaussen politisierenden «Schweizer Demokraten» ein. Am
20. Februar 1994 sprachen sich eine knappe Mehrheit von 51,9 Prozent
sowie 16 von 23 Ständen für die Alpeninitiative aus. Die grössten
Mehrheiten fanden sich in den Kantonen entlang der Gotthardachse,
während sich alle mehrheitlich französisch sprechenden Kantone gegen
die Vorlage entschieden 46. Eine Nachbefragung zeigte, dass das Ja zur
Alpeninitiative in erster Linie als umweltpolitisches Ja zu verstehen
war. Verkehrspolitischen Motiven kam demgegenüber eine etwas geringere Bedeutung zu. Eine geringe Rolle spielten europakritische Motive,
aber angesichts des knappen Ausgangs waren sie wohl um das Zünglein
an der Waage 47. Letztlich entscheidend war die negative Einstellung der
Schweiz zum Schwerverkehr auf der Strasse, welche durch das ganze
20. Jahrhundert immer wieder konstatiert worden war 48.
Die Frage, wieso Verkehrskoordination ausgerechnet im Fall
der Alpeninitiative mehrheitsfähig geworden ist, lässt sich vor
diesem Hintergrund recht gut beantworten. Erstens handelte es sich
um keine abstrakt-umfassende, sondern lediglich um eine auf die
Güterverkehrskorridore durch die Alpen beschränkte, sehr konkrete
­
und fassbare Vorlage. Zweitens verlangte sie von den Autofahrern
keine Verhaltensänderung, sondern erleichterte ihnen sogar den
Verkehr auf den Autobahnen – mit viel weniger hinderlichem Schwerverkehr. Drittens nahm die Vorlage wichtige Anliegen ausserhalb der
eigentlichen Verkehrspolitik auf und mobilisierte dadurch zusätzliche
Wählerinnen und Wähler: Zum einen trug sie dem Umweltschutz­
gedanken Rechnung, welchem gerade in Bezug auf den mythisch
Linder Wolf et al., Handbuch Volksabstimmungen…, p. 519-520.
Hardmeier Sibylle, Linder Wolf, «Analyse der eidgenössischen Abstimmungen vom
20. Februar 1994», Hg. [hrsg.] vom Forschungsinstitut der schweizerischen Gesellschaft für praktische Sozialforschung, Büro Bern, und Universität Bern, Institut für
Politikwissenschaft, Vox Analyse Nr. 52, Bern, 1994.
48
Sager Fritz, «Spannungsfelder…», p. 313.
46
47
212
Verkehrskoordination im schwachen Staat Institutionelle Blicke
überhöhten Gotthardpass besondere Popularität zukam. Zum anderen
bediente die Vorlage auch europakritische Kreise, welche im ausländischen Transitverkehr ein gewisses Trittbrettfahrerverhalten zu
erkennen glaubten. Die knappe Annahme der Alpen­
initiative beruht
also auf einer historisch wohl seltenen Konstellation. Immerhin gibt die
­Abstimmungsanalyse Hinweise darauf, wie Anliegen der Verkehrskoordination an der Urne bestehen könnten.
Flexible Demokratie: Hohe Koordinationsleistung
trotz fehlenden Erfolges an der Urne
Die Analyse der Vorlagen zur Verkehrskoordination zeigt zunächst
vor allem eines: Während die politischen Eliten im föderalen Konkordanzsystem nach teilweise langen und harten Auseinandersetzungen
letztlich immer wieder einen für alle Seiten akzeptablen Kompromiss
fanden, hatten diese Verhandlungslösungen beim Stimmvolk als letzter
und höchster Instanz keine Chance. Dies ist umso bedeutsamer, wenn
wir uns nochmals vergegenwärtigen, dass der Grad der Übereinstimmung zwischen Volk und Behörden im Allgemeinen in der Schweizer
Bundespolitik ausserordentlich hoch ist. Verkehrskoordination birgt
demnach eine eminent starke Tendenz zu elitendesavouierendem
Abstimmungsverhalten. Wie lässt sich dies erklären?
Die Rolle des Föderalismus scheint zumindest auf den ersten Blick
nicht unmittelbar zentral zu sein, denn keine einzige der Vorlagen scheiterte ausschliesslich an der Hürde des Ständemehrs. Allerdings spielte der
Föderalismus auf den zweiten Blick durchaus eine wichtige Rolle, weil
die Vorlagen zur Verkehrskoordination immer auch zu neuen Bundeskompetenzen geführt hätten, was, wie die Analyse der verschiedenen
Abstimmungskampagnen zeigt, bei grossen Teilen der B
­evölkerung
föderalistischen Reflexen gegen neue Bundeskompetenzen Vorschub
leistete 49. Entscheidend scheint aber vielmehr die Neigung grosser Teile
des Stimmvolks zu sein, bei komplexen und umfassenden Vorlagen
aufgrund von Einzelaspekten zu entscheiden und dabei reale oder
vermutete persönliche Nachteile gegenüber Vorteilen immer stärker
zu gewichten. Zudem ist aus der Abstimmungsforschung bekannt, dass
kleine, gut organisierte und mit konkreten Nachteilen einer Vorlage
konfrontierte Gruppen immer viel stärker mobilisieren und deshalb an
der Urne überproportional erfolgreich sind. Immer wieder verfangen
hat in diesem Zusammenhang das Argument der Einschränkung der
Vatter Adrian et al., Akzeptanz…, p. 225.
49
213
Ueli Haefeli
individuellen Mobilität 50. Im Gegensatz dazu dürfte eine oft unterstellte
Risiko­aversion als Entscheidungsheuristik weiter Teile der B
­ evölkerung
aufgrund aktueller Forschungsergebnisse keine bedeutsame Rolle
spielen 51.
Der institutionelle Erklärungsansatz erklärt also recht gut, weshalb
Vorlagen zur Verkehrskoordination an der Urne einen schweren Stand
hatten. Die Analyse zeigt aber auch, dass der Einfluss von Urnenentscheiden auf die schweizerische Bundespolitik nicht überschätzt
werden darf. Die politischen Eliten fanden immer wieder (durchaus
legale) Wege, den erzielten Konsens auch nach einer Abstimmungsniederlage in weiten Teilen umzusetzen: in den 1930er- und 1940er-Jahren
mit notrechtlichen Interventionen und einer kartellähnlichen Organisation des Güterverkehrs, in den 1980er- und 1990er-Jahren mit der
Aufschnürung des Pakets «Gesamtverkehrskonzeption» in konkrete
Projekte, welchen dann an der Urne auf Bundesebene stets zugestimmt
wurde. Die fünf Abstimmungen zur Verkehrskoordination haben damit
sicher einiges verzögert, letztlich aber wohl nur wenig verhindert. Die
Koordinationsleistung der schweizerischen Verkehrspolitik kann im
internationalen Vergleich als überdurchschnittlich bezeichnet werden 52.
Das Konkordanzsystem der Schweiz hat zumindest in der Verkehrspolitik gelernt, flexibel mit den Unwägbarkeiten direktdemokratischer
Urnengänge umzugehen.
Vatter Adrian et al., Akzeptanz…, p. 213.
Milic Thomas, Ideologie und Stimmverhalten, Zürich: Rüegger Verlag, 2008, besonders p. 139 f. Vgl. allgemein dazu auch: Kriesi Hanspeter, Direct democratic choice:
the Swiss experience, Lanham: Lexington Books, 2005.
52
Vgl. dazu auch die in Fussnote 4 erwähnte Literatur.
50
51
214
Die Gesamtverkehrskonzeption
Schweiz Systemanalytischer Versuch
einer koordinierten Verkehrspolitik
Stefan Sandmeier, Universität Basel
Abstract : In January 1972, the Swiss Federal Council appointed an expert commission to elaborate a Swiss comprehensive transport policy. The main purpose of the
policy was to coordinate the technical, economic, financial, environmental, social and
political aspects of traffic and transport in Switzerland, thus providing the foundations of a transport policy for the next 25 to 30 years. One goal was to overcome
the policy segmentation along transport modes (rail, road, air transport, shipping)
by coordinating the needs of all transport modes. Another goal was to extend the
reach of future transport policy: in addition to making decisions about new transport
infrastructure and its financing, aspects such as spatial planning, regional policy and
the environmental protection should be taken into account as well.
This article shows that the political demand for transport coordination was not
merely a constraint of the policy planning models, but influenced the choice of
methodology, the results of the planning process and the policy suggestions derived
from it. In order to meet the politicians’ demand for coordination the experts chose
a systems analysis procedure characterized by its interlocking cybernetic planning
and policy models. It provided the experts with a conceptual and methodological
framework for their task. Transport models and simulations could be integrated
into this framework and yielded input values for the system of predefined goals
and indicators. Based on these models and calculations the experts devised two
possible development scenarios. From the scenarios they then derived 40 policy
suggestions presented in the final report.
Ende Januar 1972 beauftragte der schweizerische Bundesrat eine
Expertenkommission, im Rahmen einer «­
Gesamtverkehrskonzeption
215
Stefan Sandmeier
Schweiz» (GVK-CH) Vorschläge für eine zeitgemässe Verkehrspolitik
zu erarbeiten. In ihrem Schlussbericht vom Dezember 1977 p­ räsentierte
die Kommission zwei Entwicklungsszenarien, aus denen vierzig
Politikempfehlungen abgeleitet wurden. Nach dem beinahe zwei
Jahre dauernden Vernehmlassungsverfahren formulierte der Bundesrat
Vorschläge für die notwendigen Verfassungs- und Gesetzesänderungen,
die ab 1982 vom Parlament beraten wurden. Schliesslich kamen die
GVK-Vorschläge Mitte 1988 unter der Bezeichnung «Koordinierte
Verkehrspolitik» (KVP) an die Urne, wo sie von 54,5 Prozent der
Stimmbürger abgelehnt wurden 1. Trotz des Volksneins beeinflusste die
GVK-CH die schweizerische Verkehrspolitik nachhaltig, was mit dem
für die GVK-CH gewählten systemanalytischen Planungsansatz zusammenhängt. Im Zentrum dieses Beitrags stehen deshalb die damals noch
neue Planungsmethodik und die Frage, wie sie die Vorstellung einer
koordinierten Verkehrspolitik veränderte. Ein Blick auf frühere Ansätze
zur Verkehrskoordination, die verkehrspolitische Situation der ausgehenden 1960er-Jahre sowie die Entstehungsgeschichte der GVK-CH
soll helfen, das Koordinationsverständnis der GVK-Planer in seine
historischen und verkehrspolitischen Kontexte einzuordnen.
Frühere Versuche der Verkehrskoordination
Versuche der Politik, koordinierend in das Verhältnis der verschiedenen Verkehrsträger einzugreifen, gab es vor der GVK-CH schon
mehrere. Als Erstes kam 1935 das «Bundesgesetz über die Regelung
der Beförderung von Gütern und Tieren mit Motorfahrzeugen auf
öffentlichen Strassen» («Verkehrsteilungsgesetz») vor das Volk,
1946 der «Bundesbeschluss über den Transport von Personen und
Sachen mit Motorfahrzeugen auf öffentlichen Strassen» («Autotransportordnung») und 1951 dessen Neuauflage 2. Alle drei Vorlagen
waren Ausdruck eines staatsinterventionistischen Verständnisses von
Verkehrskoordination, das den Wettbewerb zwischen Schiene und
Strasse im Gütertransport eingeschränkt und bestimmte Verkehre
je einem der beiden Verkehrsträger fest zugeteilt hätte. Sie fanden
alle die Zustimmung des Parlaments, wurden jedoch von den
Stimmbürgern ablehnt 3. Auch ein auf Freiwilligkeit basierender
Linder Wolf, Bolliger, Christian u. Rielle, Yvan (Hg.), Handbuch der eidgenös­
sischen Volksabstimmungen 1848-2007, Bern: Haupt 2010, p. 455.
2
Linder Wolf, Bolliger Christian u. Rielle Yvan (Hg.), Handbuch…, p. 177 f., 207 f.,
226 f.
3
Siehe dazu Ueli Haefelis Beitrag in diesem Band.
1
216
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
­ oordinationsversuch verlief im Sande. Der Bundesrat hatte 1949
K
eine mit Vertretern von SBB und Strassentransporteuren besetzte
«Eidgenössische Kommission für die Koordinierung des Verkehrs»
eingesetzt. Ihr ursprünglicher Auftrag war die Vorbereitung der
Überführung der Autotransportordnung in ein Verkehrskoordinationsgesetz. Nachdem diese von den Stimmbürgern endgültig versenkt
worden war, regte der Bundesrat an, im Rahmen der Kommission
eine privatrechtliche Vereinbarung zwischen den Bahnen und den
Strassentransporteuren auszuhandeln und so für ein gewisses Mass an
Koordination zu sorgen. Der entsprechende Vertrag trat 1952 in Kraft.
Nachdem das Volumen im Schweizer Güterverkehr aufgrund der
konjunkturellen Entwicklung zwischen 1950 und 1960 stark angestiegen war und die SBB ihre Transportleistung beinahe verdoppeln
konnten, glaubten die SBB-Verantwortlichen, nicht weiter auf die
Regelung angewiesen zu sein und kündigten den Vertrag 1960 4.
Trotz der Skepsis, auf welche die Versuche gestossen waren, durch
Vorschriften die Wahlfreiheit der Verkehrsbenützer einzuschränken,
verschwand das Thema Verkehrskoordination nie für sehr lange von
der politischen Tagesordnung. Verantwortlich für die andauernde
Aktualität des Koordinationsgedankens in der verkehrspolitischen
Debatte war paradoxerweise dieselbe Entwicklung, welche die SBB zur
Aufkündigung des Koordinationsvertrags mit den Strassentransporteuren
verleitet hatte. Der langanhaltende wirtschaftliche Aufschwung, den die
Schweiz nach dem Ende des Zweiten Weltkriegs erlebte, verdoppelte
nicht nur das Gütertransportvolumen der Eisenbahnen, sondern
beschleunigte auch die Massenmotorisierung. Innerhalb von lediglich
zwei Dekaden verachtfachte sich die Anzahl von Personen- und
Lastwagen. 1950 verkehrten noch 188ʹ512 Motorfahrzeuge auf den
Schweizer Strassen, 1970 waren es bereits 1ʹ524ʹ036 5. Die Gemeinden
und Kantone reagierten auf die Engpässe mit einem massiven
Ausbau ihrer Strassennetze, und 1954 begannen auf Bundesebene
Planungsarbeiten für ein schweizerisches Nationalstrassennetz. 1958
wurden die ­verfassungsmässigen und gesetzlichen Grundlagen dafür
Hirter Hans, «Koordinierte Verkehrspolitik. Die Entstehung und Verwirklichung
einer Gesamtkonzeption», in Hablützel Peter, Hirter, Hans, Junker, Beat (Hg.),
Schweizerische Politik in Wissenschaft und Praxis, Festschrift für Prof. Dr. Peter Gilg,
Bern: Forschungszentrum für schweizerische Politik, 1988, p. 162 f.
5
Bundesamt für Statistik (BfS), Strassenfahrzeugbestand nach Fahrzeuggruppe
1910-2011, in http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/de/index/themen/11/03/blank/key/
fahrzeuge_strasse/bestand.html [22.02.2012], sowie Ritzmann-Blickenstorfer Heiner
(Hg.), Historische Statistik der Schweiz, Zürich: Chronos, 1996, p. 779.
4
217
Stefan Sandmeier
geschaffen 6, worauf das Parlament ein Netz von insgesamt 1811
Kilometern Länge festlegte, das auf 760 Kilometern als vierspurige
Autobahn ausgebaut werden sollte 7. Es wurde mit einer Bauzeit
von 20 Jahren gerechnet, die Gesamtkosten wurden anfänglich auf
3,8 Milliarden Franken veranschlagt. Beide Prognosen erwiesen sich
jedoch als viel zu optimistisch. Der von der Planungskommission
für 1980 erwartete Motorfahrzeugbestand, 800ʹ000 Automobile und
200ʹ000 Motorräder, wurde bereits 1965 übertroffen, was den Bundesrat
dazu veranlasste, weitere Teilstrecken zu mehrspurigen Autobahnen
aufzuklassieren. Die dadurch notwendigen Planungsanpassungen
sowie die markante Steigerung der Baukosten führten dazu, dass der
Zeitrahmen für die Realisierung ausgedehnt werden musste, um die
Finanzierung durch den zweckgebundenen Teil der Treibstoffzollgelder
gewährleisten zu können 8. Zudem begann sich anfangs der 1970erJahre zivilgesellschaftlicher Widerstand gegen die Umsetzung der
Nationalstrassenplanung zu regen, da diese als undemokratisch
und zu wenig an den Bedürfnissen von Menschen und Umwelt
orientiert empfunden wurde 9. Trotz dieser Verzögerungen verlief der
Autobahnbau bemerkenswert schnell: Bis zur Mitte der 1970er-Jahre
waren 952 Kilometer fertiggestellt, und 253 Kilometer befanden sich
im Bau 10.
«Bundesbeschluss über das Volksbegehren für die Verbesserung des Strassennetzes», Amtliche Sammlung der Bundesgesetze und Verordnungen der Schweize­
rischen Eidgenossenschaft [AS], Jg. 1958, p. 770 ff.; «Botschaft des Bundesrates an
die Bundesversammlung über das Ergebnis der Volksabstimmung vom 6. Juli 1958»,
Bundesblatt [BBL], Jg. 1958, p. 621-624; «Bundesgesetz über die Nationalstrassen
(vom 08.03.1960)», AS, Jg. 1960, p. 525-540; «Bundesbeschluss über die Verwendung
des für den Strassenbau bestimmten Anteils am Treibstoffzollertrag», BBL, Jg. 1959,
p. 1438-1444. Siehe auch Ackermann Michael, Konzepte und Entscheidungen in der
Planung der schweizerischen Nationalstrassen von 1927 bis 1961, Bern: Peter Lang,
1992, p. 248-257.
7
«Beschluss der Bundesversammlung über die Festlegung des Nationalstrassennetzes
vom 21.06.1960», BBL, Jg. 1960, p. 872-876. «Botschaft des Bundesrates an die
Bundesversammlung über die Festlegung des Nationalstrassennetzes», BBL, Jg. 1960,
p. 617-664. Siehe auch Ackermann, Konzepte und Entscheidungen…, p. 240-245, 264 f.
8
Année Politique, Jg. 4 (1968), Bern, 1969, p. 86 ff.
9
Année Politique, Jg. 8 (1972), Bern, 1973, p. 95. Siehe auch Haefeli Ueli, «Stadt und
Autobahn – eine Neuinterpretation», Schweizerische Zeitschrift für Geschichte [SZG],
Nr. 2, 2001, p. 181-202; Gutknecht Bernard, «Proteste gegen den Nationalstrassenbau
1957-1990: Von punktueller Opposition zu grundsätzlichem Widerstand», in Altermatt
Urs (Hg.), Rechte und linke Fundamentalopposition. Studien zur Schweizer Politik
1965-1990, Basel: Helbing & Lichtenhahn, 1994, p. 62-134.
10
Année Politique, Jg. 11 (1975), Bern, 1976, p. 109, sowie BFS Streckennetz
nach Verkehrsträgern 1950-2010, in http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/de/index/
themen/11/03/blank/key/infrastruktur.html [03.02.2012].
6
218
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
Bereits 1967 hatte Rudolf Gnägi, der Vorsteher des Eidgenössischen
Verkehrs- und Energiewirtschaftsdepartements (EVED), gefordert, ange­
sichts der «in der Verkehrswirtschaft investierten und im Hinblick auf eine
wirtschaftliche Gesamtbetrachtung noch zu investierenden Milliarden­
beträge» müsse die Verkehrspolitik zu umfassenden und «gründlich
studierten Lösungen» geführt werden 11. Ein Blick auf die Auswirkungen
des Autobahnbaus bestätigt seine Einschätzung: Das leistungsfähige neue
Verkehrsinfrastrukturnetz, das alle wichtigen Städte und Regionen des
Landes verband, steigerte die Attraktivität sowohl des motorisierten Individualverkehrs als auch des Gütertransports per Lastwagen. Die Bahnen
bekamen die schnell wachsende Konkurrenz von der Strasse schmerzhaft
zu spüren. Obwohl die konjunkturelle Entwicklung für stetig steigende
Transportvolumina im Güterverkehr sorgte, verringerte sich der Anteil der
Bahnen von 71 Prozent im Jahr 1950 auf 55 Prozent im Jahr 1972 12. Beim
Personenverkehr verlief die Entwicklung sogar noch wesentlich dramatischer: 1960 betrug der Anteil der Eisenbahnen noch rund 30 Prozent und
bis 1972 sank er auf knapp 16 Prozent 13. Die massive Verkehrsverlagerung
von der Schiene auf die Strasse trug dazu bei, die ohnehin angespannte
Finanzlage der Bahnen weiter zu verschlechtern, was bei den SBB ab
1970 zu hohen Defiziten führte. Diese Probleme wurden durch eine strukturelle Verzerrung des Verkehrsmarktes noch akzentuiert. Im Gegensatz
zu den Strassentransporteuren mussten die Bahnen ihre Infrastrukturen
zum grössten Teil selber bezahlen, und ihre Konzessionen waren an die
Erbringung gemeinwirtschaftlicher Leistungen geknüpft, beispielsweise
den Betrieb unrentabler Nebenlinien. Die Kosten, die den SBB und den
Privatbahnen aus den Konzessionsauflagen entstanden, waren durch die
Erträge aus dem Güter- und Personenverkehr nicht voll zu decken und
mussten deshalb vom Bund teilweise abgegolten werden. Allerdings
genügten diese Gelder nicht, sodass die Bahngesellschaften dauernd auf
zusätzliche Subventionen angewiesen blieben 14.
Gnägi Rudolf «Aktuelle Verkehrsprobleme. Referat vor der Statistisch-volkswirtschaftlichen Gesellschaft Basel vom 28. November 1967», Schweizerisches Archiv für
Verkehrswissenschaft und Verkehrspolitik, Nr. 1, 1968, p. 1-16.
12
Berechnet unter Weglassung der Verkehrsträger Wasser, Luft und Pipeline. BFS,
Verkehrsleistungen im Güterverkehr 1950-2010, in http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/
de/index/themen/11/05/blank/key/verkehrsleistungen0/leistungen.html [22.02.2012].
13
Berechnet unter Weglassung des öffentlichen Strassenverkehrs (Trams, Busse etc.)
sowie der Verkehrsträger Wasser und Luft. BFS, Verkehrsleistungen im Personenverkehr 1960-2010, in http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/de/index/themen/11/05/blank/
key/verkehrsleistungen/leistungen.html [22.02.2012].
14
Kirchhofer André, Stets zu Diensten – gezwungenermassen! Die Schweizer Bahnen und
ihre «Gemeinwirtschaftlichkeit» für Staat, Wirtschaft und Bevölkerung, Basel: Schwabe,
11
219
Stefan Sandmeier
Zustimmung und Uneinigkeit
Angesichts dieser Probleme kam der Bundesrat in seinem Bericht
an das Parlament über die Richtlinien für die Regierungspolitik in der
Legislaturperiode 1968-1971 zu dem Schluss, dass die «bedeutsame
Aufgabe, eine Gesamtkonzeption der schweizerischen Verkehrspolitik
zu erarbeiten, […] unabwendbar geworden» sei 15. Die meisten Parlamentarier stimmten dem grundsätzlich zu. Trotzdem blieb die Gesamtverkehrskonzeption noch beinahe vier Jahre lang ein Phantom, das zwar
in der verkehrspolitischen Diskussion allgegenwärtig war, sich aber
trotz aller Absichtserklärungen nicht sichtbar konkretisierte. So einig
sich die politischen Akteure im Grundsatz über die Notwendigkeit und
Dringlichkeit waren, so weit gingen ihre Meinungen über die konkreten
politischen Ziele und Inhalte auseinander 16.
Auch bezüglich der Organisation und der methodischen Ansätze,
die für die Erarbeitung einer Gesamtverkehrskonzeption herangezogen
werden sollten, gab es unterschiedliche Meinungen. Hans-Reinhard
Meyer, seit 1951 Delegierter des EVED für Wirtschaftsfragen sowie
Extraordinarius für Verkehrslehre und Verkehrspolitik an der Universität Bern, vertrat die Meinung, dass das Verkehrswesen «[n]icht nur den
Problemen und der Fachliteratur nach, sondern auch den Lehrstühlen
nach […] den Wirtschaftswissenschaften» zuzuweisen sei 17. Zudem
bestehe «unter den führenden Wirtschaftswissenschaftern der westlichen
Welt Übereinstimmung über die Fragen der Gesamtverkehrspolitik» 18.
In der Gesamtverkehrskonzeption sah er deshalb eine Aufgabe für
Verkehrsökonomen, welche die vorhandenen Probleme einzeln nach
wirtschaftlichen Gesichtspunkten lösen sollten. In diesem Sinne war
Meyer bereits 1966 mit Vorschlägen für ein «Verkehrswirtschaftliches
2010; Steinmann Jonas, Weichenstellungen. Die Krise der schweizerischen Eisen­
bahnen und ihre Bewältigung 1944-1982, Bern: Peter Lang, 2010; Kirchhofer André,
­Steinmann Jonas, «Staatsintervention oder Wettbewerb? Ordnungspolitische Paradigmen
im Schweizer Eisenbahnwesen seit 1852», in Kirchhofer André et al. (Hg.), Nachhaltige
Geschichte. Festschrift für Christian Pfister, Zürich: Chronos, 2009, p. 331-346.
15
«Bericht des Bundesrates an die Bundesversammlung über die Richtlinien für die
Regierungspolitik in der Legislaturperiode 1968-1971 (vom 15. Mai 1968)», BBL,
Jg. 1968, p. 1231.
16
Kaspar, Claude, «Die Bedeutung einer schweizerischen Gesamtverkehrskonzeption», Wirtschaftspolitische Mitteilungen, Nr. 12, 1968, p. 3.
17
Meyer Hans-Reinhard, «Redaktionelle Anmerkung», Schweizerisches Archiv für
Verkehrswissenschaft und Verkehrspolitik, Nr. 2, 1971 p. 157.
18
BAR E8001C § A.90.8, Akten Prof. Meyer 1966-69, Meyer Hans-Reinhard, Zum
Verkehrswissenschaftlichen Gesamtkonzept der Schweiz. Studie zuhanden des Herrn
Departementchefs vom August 1966, p. 1.
220
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
Gesamtkonzept der Schweiz» an den Bundesrat herangetreten 19. Er war
davon überzeugt, dass aufgrund des «theoretischen und praktischen
Wissens über das Verkehrswesen» ein auf die Schweiz zugeschnittenes
«verkehrswirtschaftliches Gesamtkonzept» rasch umgesetzt werden
könne 20. Nachdem der Bundesrat im Mai 1968 seine Legislaturziele
präsentiert hatte, fertigte Meyer eine «Diskussionsgrundlage zur Erarbei­
tung und Verwirklichung eines verkehrswirtschaftlichen Gesamtkonzeptes
der Schweiz» 21 an. Er schlug darin «Einzelmassnahmen einer natio­
nalen Gesamtverkehrskonzeption» vor, die von den betroffenen Departementen und Bundesämtern «Punkt für Punkt» umzusetzen waren. Die
Vorschläge der «Diskussionsgrundlage» sollten zunächst in einer interdepartementalen Verkehrskommission bereinigt und dann einer «Kommis­
sion mit breiter Basis» vorgelegt werden, in der «alle Verkehrsträger,
die Wirtschaftsverbände, die Wissenschaft, die beteiligte Bundesverwal­
tung sowie Fachleute der Orts-, Regional- und Landesplanung» Einsitz
nehmen sollten 22. Der daraus resultierende Massnahmenkatalog hätte
sodann von einem zu «strengster Objektivität» verpflichteten eidgenössischen Verkehrsrat «unter dem Blickwinkel der Gesamtverkehrspolitik,
der allgemeinen Wirtschaftspolitik, der Finanzpolitik, der Konjunkturund Wachstumspolitik sowie der Regional- und Landesplanung» beurteilt
und nach einer «koordinierte[n] Vorbereitung aller Einzelmassnahmen»
dem Bundesrat unterbreitet werden sollen 23.
Zunächst sah es danach aus, als ob die GVK-CH nach Meyers Vorstellungen erarbeitet werden würde. Im September 1969 beauftrage der
Bundesrat das EVED, die Einsetzung der interdepartementalen Verkehrskommission auf Chefbeamten-Ebene vorzubereiten und abzuklären,
wann und in welcher Form die Wirtschaftsverbände und Vertreter
der Wissenschaft an den GVK-Arbeiten beteiligt werden könnten 24.
Der Vorbereitungsprozess verlief jedoch zäh, da inhaltliche Aspekte,
Meyer Hans-Reinhard, Zum Verkehrswissenschaftlichen….
Meyer Hans-Reinhard, Zum Verkehrswissenschaftlichen…, p. 1 f.
21
Meyer Hans-Reinhard, Diskussionsgrundlage zur Erarbeitung und Verwirklichung
eines verkehrswirtschaftlichen Gesamtkonzepts der Schweiz vom August 1969.
22
Meyer Hans-Reinhard, «Verkehrswissenschaftliche Betrachtungen zur schweizerischen Gesamtverkehrskonzeption», Schweizerisches Archiv für Verkehrswissenschaft
und Verkehrspolitik, Nr. 2, 1974, p. 117.
23
Meyer Hans-Reinhard, Diskussionsgrundlage, 1969, p. 44 f., u. Meyer HansReinhard, «Verkehrswissenschaftliche Betrachtungen…», p. 117.
24
Bundesratsbeschluss vom 10.09.1969, zit. nach Vorberatender Ausschuss GVK-CH,
Bericht über die Vorbereitungen zur Einsetzung einer Kommission für die Schweize­
rische Gesamtverkehrskonzeption (GVK-CH), erstattet an den Vorsteher des EVED,
Bern: EDMZ, 1971, p. 4.
19
20
221
Stefan Sandmeier
aber auch die Kompetenzen der einzusetzenden Kommission sowie die
Aufgabenverteilung innerhalb der betroffenen Departemente umstritten
waren 25. Die Uneinigkeiten liessen sich nicht ausräumen, weshalb die
Idee der interdepartementalen Kommission schliesslich fallengelassen
wurde. Deren Aufgabe wurde einer externen Kommission übertragen,
die ursprünglich als «beratende Kommission für Verkehr» das verwaltungsinterne Gremium «als Organ für die Interessenvertretung der
Öffentlichkeit» hätte ergänzen sollen und in etwa Meyers «Kommission
mit breiter Basis» entsprach 26. Bundesrat Roger Bonvin, seit Mitte 1968
Vorsteher des EVED 27, hatte bereits früher versucht, das Verfahren zu
beschleunigen und das Eidgenössische Amt für Verkehr (EAV) 28 veranlasst, unabhängige Abklärungen zu treffen 29. Die Zürcher Planungsund Beratungsfirma Basler & Hofmann (B & H) erhielt daher anfangs
1970 den Auftrag, eine Vorstudie für die Gesamtverkehrskonzeption zu
erstellen, in der Begriffe, Ziele und Inhalte sowie mögliche Methoden
und Vorgehensweisen abgeklärt werden sollten 30. Zusammen mit dem
Entscheid, direkt das externe Expertengremium mit der Ausarbeitung der Gesamtverkehrskonzeption zu betrauen, besiegelte dieser
Auftrag das Ende von Meyers Ambitionen, führend an der GVK-CH
mitzuwirken und seine theoretischen Ideen umzusetzen.
Diese Rolle beanspruchten nun die Verkehrsplaner der ETH Zürich:
Martin Rotach, ordentlicher Professor für Verkehrsingenieurwesen und
Leiter des Instituts für Orts-, Regional- und Landesplanung (ORL),
hatte den bestimmten Wunsch geäussert, sein Institut an der GVK zu
beteiligen und die am ORL erarbeiteten «­Landesplanerischen Leitbil­
der» 31, insbesondere das von Carl Hidber erarbeitete «Teilleitbild
BAR E8001C § A.90.8, 1979/44#677, Mitberichte.
BAR E3212B § 2.107.57-1#1978/25-22, Bericht und Antrag des EVED an den
Gesamtbundesrat betreffend die Kommission für die Schweizerische Gesamtverkehrskommission vom 20.11.1970.
27
Der bisherige EVED-Chef Rudolf Gnägi hatte per 1. Juli 1968 die Leitung des
Militärdepartements übernommen, Bonvin das EVED.
28
Heute Bundesamt für Verkehr (BAV), http://www.bav.admin.ch.
29
BAR E8002 § 17-20, 1971/58-22#277, Brief Meyers an Bundespräsident Ludwig
von Moos vom 31.07.1969. Meyer beklagt sich darin über Bonvins Vorgehen und
beansprucht die Zuständigkeit für die GVK unter Verweis auf das Pflichtenheft des
Delegierten des EVED für Wirtschaftsfragen für sich.
30
Recherchegespräche mit André Allemand vom 06.04.2010 und Samuel Mauch vom
10.01.2011. Allemand und Mauch waren bei Basler & Hofmann an der Ausarbeitung
der Vorstudie beteiligt. Basler & Hofmann, Vorstudie zur Gesamtverkehrskonzeption.
Im Auftrag des Eidgenössischen Amtes für Verkehr, Zürich 1971.
31
Rotach Martin, Ringli Hellmut, Oetterli Jörg et al. (Hg.), Landesplanerische
Leitbilder der Schweiz. Schlussbericht (3 Bde.), Zürich 1971 (Schriftenreihe zur Orts-,
Regional- und Landesplanung, Nr. 10).
25
26
222
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
Verkehr» als Grundlagenmaterial zu verwenden. Am 8. Dezember 1970
verfügte der Bundesrat schliesslich die Einsetzung eines «Vorbe­
ratenden Ausschusses », der den Auftrag hatte, « alle geeigneten
Abklärungen und Vorbereitungen zu treffen, damit das EVED dem
Bundesrat bis Mitte 1971 Antrag auf die Konstituierung der Gesamt­
kommission für die schweizerische Gesamtverkehrskonzeption stellen
kann» 32. Die Leitung des Ausschusses war dem Zuger CVP-Nationalrat Alois Hürlimann übertragen worden. Die weiteren Mitglieder
waren Carl Hidber, Professor an der ETH Zürich, der frühere
TCS-Präsident Fritz Ramseier, Autogewerbeverbandspräsident Robert
Rivier, SBB-Generaldirektor Arnold Schärer sowie EAV-Direktor
Peter Trachsel 33. In zwölf Sitzungen erarbeitete der Ausschuss einen
Bericht, der auf der B & H-Vorstudie sowie den Leitbildarbeiten des
ORL-Instituts basierte. Er schlug darin Zielsetzungen, Inhalte, Organisation, Arbeitsabläufe und Methoden für die GVK-CH vor 34. Gestützt
auf diesen Bericht beschloss der Bundesrat am 19. Januar 1972 die
Einsetzung einer Kommission für die Erarbeitung der schweizerischen Gesamtverkehrskonzeption 35. Der Vorberatende Ausschuss
wurde als Geschäftsleitender Ausschuss in die Kommission eingegliedert. Diese umfasste insgesamt 62 Vertreter von Politik, Verwaltung, Wissenschaft, Wirtschaft und Verkehrsträgern. Ihr wurde zudem
ein von Hidber geleiteter Stab mit 16 wissenschaftlichen Mitarbeitern
und vier Sekretariatsstellen zur Seite gestellt, der die wissenschaftlichen Grundlagen für die Kommissionsarbeit zu erarbeiten und in
Form von «Arbeitsunterlagen» der Kommission vorzulegen hatte 36.
BAR E3212B § 2.107.57-1#1978/25-22, Verfügung des EVED betr. Kommission für
die schweizerische Gesamtverkehrskonzeption vom 08.12.1970.
33
BAR E3212B § 2.107.57-1#1978/25-22, Verfügung des EVED betr. Kommission für
die schweizerische Gesamtverkehrskonzeption vom 08.12.1970.
34
Vorberatender Ausschuss GVK-CH, Bericht über die Vorbereitungen zur Einset­
zung einer Kommission für die Schweizerische Gesamtverkehrskonzeption (GVK-CH).
Der Ausschuss formulierte auch Entwürfe für einen Bundesratsbeschluss und eine
Verfügung des EVED, die sowohl Aufgaben und Zielsetzungen der GVK-CH als
auch die Zusammensetzung der Kommission sowie deren Organisation und Arbeitsabläufe enthielten: BAR E3212B § 2.107.57-1#1978/25-22, Entwurf Bundesratsbeschluss betr. Umschreibung des Auftrages an die Kommission für die schweizerische
Gesamtverkehrskommission (GVK-CH) vom 23.10.1971 und Entwurf Verfügung
EVED über Organisation und Zusammensetzung der Kommission GVK-CH vom
23.10.1971.
35
BRB vom 19.01.1972, jeweils zit. nach der Abschrift in: GVK-CH, ­GVK-Grundlagen.
Arbeitsunterlage Nr. 0, Bern 1972.
36
Siehe Eidgenössische Kommission für die schweizerische Gesamtverkehrsplanung
[GVK-CH], Gesamtverkehrskonzeption Schweiz (GVK-CH). Schlussbericht über die
Arbeiten der Eidgenössischen Kommission für die schweizerische Gesamtverkehr­
32
223
Stefan Sandmeier
Gegensätzliche Auffassungen
von koordinierter Verkehrspolitik
Der Wortlaut des Auftrags, den der Bundesrat der Kommission
erteilte, entsprach zu grossen Teilen dem Entwurf, den der vorberatende
Ausschuss in seinem Schlussbericht formuliert hatte. Dort hiess es, «den
politischen Behörden verschiedene […] gangbare Wege aufzuzeigen»,
wie das «System des privaten und öffentlichen Verkehrs» weiterzuentwickeln sei, so dass es die Verkehrsbedürfnisse der Schweizer
Bevölkerung und Wirtschaft möglichst effizient, wirtschaftlich und
umweltfreundlich befriedigen könne 37. Die GVK-CH sollte dabei «dem
unverfälschten Wettbewerb so viel Spielraum belassen, als ohne Fehlin­
vestitionen einerseits und ohne Vernachlässigung unren­
tabler oder
uninteressanter, aber für die allgemeine Wohlfahrt wichtiger Verkehrs­
bedürfnisse andererseits möglich ist» 38. Diese Aufgabenstellung tönte
zunächst nach einem «klassischen» Ansatz politischer Verkehrskoordination und bildete einen erheblichen Gegensatz zu den Vorstellungen
von Verkehrskoordination, wie sie vom Delegierten des EVED für
Wirtschaftsfragen vertreten wurden.
Hans Reinhard Meyer betonte stets, dass die Fragen der «Zusam­
menarbeit und des Wettbewerbs zwischen den Verkehrsmitteln, der
Verkehrskoordination und der Gesamtverkehrskonzeption […] als
vorwiegend wirtschaftliche Fragen» zu behandeln seien 39. Sein Begriff
von Verkehrskoordination war entsprechend stark von wirtschaftsliberalem Denken und ökonomischen Theorien geprägt. Die herkömmlichen Methoden der Verkehrskoordination, beispielsweise durch
gesetz­
geberische Eingriffe in die Wahl des Transportmittels oder
Subventionierungen, lehnte Meyer entschieden ab. Er sah die
«praktische Lösung der Aufgabenteilung auf die verschiedenen
Verkehrsträger» darin, dass «die Verkehrspolitik die Grundlagen
eines gesunden Wettbewerbs schafft. Massgebend für den Einsatz
der einzelnen Verkehrsträger in einem konkurrenzwirtschaftlichen
Verkehrssystem werden demzufolge ihre komparativen Kostenvor­
teile sein» 40. Meyer erwartete, dass sich eine «natürliche Koordi­
nation der Verkehrsinvestitionen» von selbst ergeben werde, wenn
splanung, erstattet zuhanden des Schweizerischen Bundesrates, Bern: EDMZ, 1977,
p. 346-354.
37
BRB vom 19.01.1972, p. 2.
38
BRB vom 19.01.1972, p. 2.
39
Meyer Hans-Reinhard, «Redaktionelle Anmerkung…», p. 157.
40
Meyer Hans-Reinhard, Diskussionsgrundlage…, p. 7.
224
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
alle Verkehrsmittel für ihre Infrastruktur­­
und Betriebskosten selber
aufkommen müssten: «Denn nur was sie aufgrund ihrer Erträge […]
selbst zu finanzieren vermöchten, würden sie für Verkehrsinvestitionen
verwenden können. Im Rahmen der technischen Bedingungen und der
ökonomischen Rechnung würden sie die verfügbaren Investitionsmittel
jenen Projekten zuführen, wo der grösste Ertrag zu erwarten ist» 41.
Obwohl die nun für die GVK-CH tonangebenden Verkehrs- und
Raumplaner viele von Meyers verkehrswirtschaftlichen Grundsätzen
in ihre Überlegungen miteinbezogen, hatten sie vollkommen anders
geartete Vorstellungen von Verkehrskoordination. Im Unterschied zu
Meyer orientierten sie sich an Planungskonzepten, in denen ökonomische Aspekte nur Teile eines viel komplexeren Ganzen waren. Aus
ihrer Sicht mussten Verkehrsprobleme als Effekte betrachtet werden, die
sich aus den dynamischen Wechselwirkungen zwischen verschiedenen
Einflussgrössen wie Soziodemographie, Siedlungsstruktur, Wirtschaft,
Standortgunst für Industriebetriebe, Regionalpolitik oder Umweltschutz
ergaben. Zweck der Gesamtverkehrskonzeption war, diese teilweise
gegensätzlichen Faktoren gegeneinander abzuwägen und die sich
daraus ergebenden volkswirtschaftlichen Aufwendungen zu koordinieren 42. Diese Auffassung von Verkehrskoordination war sehr viel
weiter gefasst als die in den Ansätzen aus den 1930er- bis 50er-Jahren
oder gemäß Meyers Verkehrskoordination durch den Markt: Sie bedeutete, technische, ökonomische, finanzielle, ökologische, rechtliche,
soziale und politische Aspekte des Verkehrs aufeinander abzustimmen
und in einer ganzheitlichen Verkehrspolitik zusammenzufassen. Dieser
holistische Ansatz war in zweifacher Hinsicht neu: Erstens sollte sich
die zukünftige Schweizer Verkehrspolitik nicht mehr in Einzelmassnahmen erschöpfen, die nur den sektoriellen Bedürfnissen einzelner
Verkehrsträger dienten. Und zweitens sollte durch die Ausrichtung der
GVK-CH an vordefinierten politischen Zielen die etablierte Planungsphilosophie überwunden werden, dass die erwartete Verkehrsnachfrage
durch den Bau neuer Infrastrukturen befriedigt werden müsse – statt
Symptome zu bekämpfen, sollten mit der neuen Verkehrspolitik die
Ursachen der Probleme angegangen werden 43. Im Vordergrund der
Meyer Hans-Reinhard, Diskussionsgrundlage…, p. 28.
BRB vom 19.01.1972, p. 3.
43
«In der Verkehrsplanung […] soll nicht mehr dem aus der Vergangenheit abgelei­
teten Trend vorbehaltlos zum Durchbruch verholfen werden, sondern an erster Stelle
steht die Festlegung von Zielen und Massnahmen, welche die Erreichung der Ziele
gewährleisten sollen (zielorientiertes Planen).» GVK-CH, Leitstudie GVK-CH. I. Teil:
Grundlagen, Methodik und bisherige Verkehrspolitik, Bern: EDMZ, 1978, p. 9 f.
41
42
225
Stefan Sandmeier
Planungsbemühungen stand deshalb «nicht die beste Lösung von Einzel­
fragen, sondern die Suche nach zielgerichteten Massnahmen auf allen
Gebieten des Verkehrs, um gesamthaft einen möglichst grossen Beitrag
zur Förderung der Lebensqualität in unserem Lande zu erreichen» 44.
«Ganzheitliche Methode
der Problembewältigung»: Systemanalyse
Sowohl die Vielfalt an Wirkungszusammenhängen, die in der
GVK-CH einzubeziehen waren, als auch die angestrebte politische
Neuausrichtung verlangten «gebieterisch nach einer neuen, ganzheit­
lichen Methode der Problembewältigung» 45, welche die Planer in
der Systemanalyse («Systems Analysis») identifiziert hatten. Die
Methodik war ursprünglich von der RAND Corporation, einem Think
Tank im Dienste der US-Luftwaffe, entwickelt worden mit dem Ziel,
Entscheidungsgrundlagen für die nuklearen Abschreckungsstrategien
gegenüber der Sowjetunion zu erarbeiten 46. Das theoretische Fundament dafür bildeten die Funktionsprinzipien und Steuerungskonzepte
der Allgemeinen Systemtheorie und der Kybernetik. Drei Punkte
waren kennzeichnend für die von RAND praktizierte Systemanalyse:
erstens die holistische Sicht, die darauf abzielte, alle identifizierbaren
Systemelemente in die Analyse einzubeziehen, um die Funktionsweise
des betrachteten Systems so akkurat wie möglich erfassen zu können;
zweitens der Einsatz mathematischer Analyseverfahren und Bewertungsmodelle des Operations Research (OR), um die Leistung
beziehungsweise das Funktionieren eines Systems zu beurteilen; und
drittens die Kombination dieser Ansätze mit ökonomischen, politik-,
sozial- und verhaltenswissenschaftlichen Methoden und Theorien 47.
GVK-CH, Auszug aus dem Schlussbericht über die Arbeiten der Eidgenössi­
schen Kommission für die schweizerische Gesamtverkehrskonzeption. Einleitung und
Übersicht. Schlussfolgerungen aus den Kommissionsarbeiten. Zusammenfassende
Empfehlungen, Bern: EDMZ, 1977, p. 6.
45
GVK-CH, Auszug aus dem Schlussbericht…, p. 5.
46
Siehe z. B. Edwards Paul N. The Closed World. Computers and the Politics of
Discourse in Cold War America, Cambridge (Mass.): MIT Press, 1996 ; Hughes Thomas
P., Hughes Agatha C. (eds.), Systems, Experts, and Computers. The Systems Approach
in Management and Engineering, World War II and After, Cambridge (Mass.): MIT
Press, 2000 ; Brandstetter Thomas, Pias Claus, Vehlken Sebastian (Hg.), Think Tanks.
Die Beratung der Gesellschaft, Zürich: Diaphanes, 2010 ; Pias Claus, «Abschreckung
denken. Herman Kahns Szenarien», in Pias Claus (Hg.), Abwehr. Modelle, Strategien,
Medien, Bielefeld: Transcript, 2009, p. 169-187.
47
Miser Hugh J., «Operations Research and Systems Analysis», Science, Nr. 4452,
1980, p. 139-146; Levien Roger E., «RAND, IIASA, and the Conduct of Systems
44
226
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
Modelle und Computersimulationen dienten der Vorhersage zukünftiger Systemzustände und der Beurteilung möglicher Lösungsvarianten 48. Die Verschmelzung dieser Komponenten schien «Systems
Analysis» zu einem idealen Arbeitsinstrument zu machen für Manager,
öffentliche Verwaltungen und politische Gremien, die Entscheide
für komplexe Problemlagen treffen mussten. Es ist kaum verwunderlich, dass sich ab den frühen 1960er-Jahren auch amerikanische und
britische Städte-, Verkehrs- und Raumplaner angesprochen fühlten und
«Systems Analysis» aufgegriffen 49. In Europa dauerte es bis zum Ende
der 1960er-Jahre, bis sich die «Systems View of Planning» durchzusetzen begann 50.
Die Anwendung systemanalytischer Planungstechniken bei
Verkehrs-, Infrastruktur- und Raumplanungsvorhaben war noch neu.
Hidber, Rotach sowie einige ihrer Mitarbeiter hatten jedoch bereits
bei der Erarbeitung der Landesplanerischen Leitbilder am ORL erste
Erfahrungen damit gesammelt 51. Obwohl sie ihre Vorbilder in den
GVK-Arbeitsunterlagen und -Publikationen nirgends nannten, lehnten
sie ihre GVK-Methodik klar an die Konzepte und Schemata der
«Systems View of Planning» an: «Bei komplexen Problemstellungen
wie einer Gesamtverkehrskonzeption handelt es sich um einen iterativen
Prozess mit Rückkoppelungen. Wie zahlreiche biologische Vorgänge ist
auch das Verkehrssystem einem Regelkreis unterworfen, wo Ursachen
und Wirkungen nicht mehr klar auseinandergehalten werden können,
Analysis», in Hughes Thomas P., Hughes Agatha C. (eds.), Systems, Experts, and
Computers…, p. 434 ff.
48
Findeisen Wladyslaw, Quade Edward S., «The Methodology of Systems Analysis:
An Introduction and Overview», in Miser Hugh J., Quade Edward S. (eds.), Handbook
of Systems Analysis, Vol. I: Overview of Uses, Procedures, Applications, and Practice,
Chichester: Wiley & Sons, 1985, p. 117-149; Hughes Thomas P., Rescuing Prometheus.
Four Monumental Projects That Changed the Modern World, New York: Pantheon
Books, 2000.
49
Forrester Jay W., Urban Dynamics, Cambridge (Mass.): MIT Press, 1969 ; ders.,
«Systems Analysis as a Tool for Urban Planning», in Goland Martin (ed.), The
Engineer and the City, Washington: National Academy of Engineering, 1969, p. 44-53;
McLoughlin J. Brian, Urban and Regional Planning. A Systems Approach, New York:
Praeger, 1969; ders., Control and Urban Planning, London: Faber & Faber, 1973;
Chadwick George A., A Systems View of Planning. Towards a Theory of the Urban
and Regional Planning Process, Oxford: Pergamon, 1971. Siehe auch Faludi Andreas,
Planning Theory, Oxford: Pergamon, 1973, p. 35-39.
50
McLoughlin J. Brian, Urban and Regional Planning…, p. 91.
51
GVK-CH, Systemanalyse. GVK-Arbeitsunterlage Nr. 5, Bern: EDMZ, 1972, p. 6,
sowie Rotach Martin, Ringli Hellmut, Oetterli Jörg et al. (Hg.), Landesplanerische
Leitbilder…
227
Stefan Sandmeier
sondern sich gegenseitig bedingen» 52. Indem sie «die vielschichtigen
Verkehrsprobleme mit modernen wissenschaftlichen Methoden» einer
«möglichst ganzheitlichen Betrachtungsweise» unterwarfen 53, hofften
die GVK-Planer, der Komplexität und wechselseitigen Abhängigkeit
der Verkehrsprobleme Herr zu werden. Entsprechend gliederte ihr
systemanalytisches Vorgehen den Arbeitsprozess in iterativ verschlaufte
Phasen, in deren Verlauf es notwendig war, «Zwischenresultate aus
früheren Arbeitsschritten aufgrund späterer Ergebnisse so lange zu
überarbeiten, bis auf allen Stufen widerspruchsfreie und ausgewogene
Resultate erreicht werden» 54.
In der ersten Phase wurde ein Problemkatalog dahingehend festgelegt
und definiert, was zum Verkehrssystem der Schweiz gehören sollte 55. Aus
dem Auftrag des Bundesrats und den Legislaturzielen von 1968 wurde
eine detaillierte Zusammenstellung der Planungsziele («Zielsystem»)
abgeleitet, die den drei wichtigsten Zielbereichen «Befriedigung der
Verkehrsbedürfnisse», «Wirtschaftlicher Mitteleinsatz» und «Verbes­
serung der Auswirkungen des Verkehrs» zugeordnet wurden. Die
Gewichtung der Ziele erfolgte aufgrund wiederholter Befragungen der
Kommissionsmitglieder, einer repräsentativen Bevölkerungsbefragung
sowie programmatischer Aussagen von Behörden, Parteien, Verbänden
und Organisationen 56. Die zweite Phase bestand darin, aus der Analyse
des Ist-Zustands und von Trendprognosen verschiedene Varianten zu
erarbeiten, in denen jeweils ein Zielbereich besonders stark gewichtet
wurde. Das systemanalytische Verfahren bot den Planern aber nicht nur
die Möglichkeit, den Arbeitsablauf zu gliedern; es stellte ihnen auch
ein methodisches Gerüst zur Verfügung, in das sie konkrete Verkehrsmodelle integrieren konnten, die Werte für das am Anfang definierte
Ziel- und Indikatorensystem lieferten. Diese Werte dienten dazu, den
Grad der Zielerfüllung der Verkehrssystemvarianten zu messen 57. Auf
der Basis ihrer Modellrechnungen destillierten die Planer in der dritten
Phase zwei mögliche Entwicklungsszenarien heraus, die «Schlussvarianten», die ebenfalls auf ihre Erfüllung der im Zielsystem definierten
GVK-CH, Leitstudie…, p. 9.
GVK-CH, Auszug aus dem Schlussbericht…, p. 6.
54
GVK-CH, Leitstudie…, p. 9.
55
GVK-CH, Zusammenstellung von Problemen einer schweizerischen Gesamtver­
kehrskonzeption, GVK-Arbeitsunterlage Nr. 2, Bern: EDMZ, 1973; GVK-CH, System­
abgrenzung, GVK-Arbeitsunterlage Nr. 3, Bern: EMDZ, 1973.
56
GVK-CH, Schlussbericht…, p. 63-71.
57
GVK-CH, Leitstudie…, p. 14.
52
53
228
Die Gesamtverkehrskonzeption Schweiz
Anforderungen hin bewertet wurden 58. Schliesslich leitete die Kommission daraus ihre vierzig Empfehlungen für die zukünftige Verkehrspolitik ab 59. Entsprechend den Gewichtungen der GVK-Ziele legte die
Kommission das Hauptgewicht ihrer Vorschläge auf die Zielbereiche
«wirtschaftlicher Mitteleinsatz» und «Berücksichtigung der direkten
und indirekten Auswirkungen des Verkehrs». Konkret sollten alle
Verkehrsleistungen und -infrastrukturen nach ihrem volkswirtschaftlichen Nutzen beurteilt und ihre Kosten verursachergerecht finanziert
werden. Ausserdem sollten Verkehrsfolgen wie Lärm, Luftverschmutzung, Landverbrauch, (negativ beurteilte) Veränderungen der Bodennutzung und der Siedlungsentwicklung sowie die Notwendigkeit neuer
gesetzlicher Regelungen oder der Finanzbedarf zum Bau und Betrieb
von Infrastrukturen in die zukünftige Verkehrspolitik einbezogen
werden. Trotz dieser verkehrspolitischen Neuorientierung figurierten im
Zielbereich «Befriedigung der Verkehrsbedürfnisse» auch Vorschläge
für neue Infrastrukturen; die «neue ­Eisenbahn-Haupttransversale
(NHT)» war dafür das prominenteste Beispiel.
Fazit
Hans-Reinhard Meyer hatte durchaus recht, wenn er bemerkte,
dass die wissenschaftlichen Prämissen und die Planungsmethodik
der GVK-Planer «ganz anders» seien als jene, die er selber in seiner
Gesprächsgrundlage von 1969 vorgeschlagen hatte 60. Seine Hoffnung,
nach dem – aus seiner Sicht absehbaren – Scheitern der systemanalytischen Planungsbemühungen der GVK-CH mit seinen Ideen doch
noch zum Zug zu kommen, erfüllten sich allerdings nicht. Trotz all
ihrer Mängel und trotz der Abstimmungsniederlage von 1988 waren
die im Rahmen der GVK-CH geleisteten Planungsarbeiten und die
im Schlussbericht enthaltenen Empfehlungen in mehrfacher Weise
wegweisend für spätere Entwicklungen: Erstens trugen die GVKArbeiten nicht unwesentlich dazu bei, systemtheoretisch-­kybernetische
­Planungskonzepte sowie computergestützte Modellierungs- und Simulationsmethoden in der schweizerischen Verkehrs- und Raumplanungspraxis zu verankern. Zweitens fanden diverse GVK-Vorschläge, welche
die GVK-Planer als «System von aufeinander abgestimm­ten Grundsätzen
und Massnahmen» 61 verstanden, ihren Weg in die Verkehrspolitik und
GVK-CH, Schlussbericht…, p. 209-212.
GVK-CH, Schlussbericht…, p. 309-319.
60
Meyer Hans-Reinhard, «Verkehrswissenschaftliche Betrachtungen…», p. 115 f.
61
GVK-CH, Auszug aus dem Schlussbericht…, p. 9.
58
59
229
Stefan Sandmeier
wurden, wenn auch in teilweise modifizierter Form, umgesetzt 62. Und
drittens etablierten die Planer mit ihrem holistischen Systemansatz
ein neuartiges Verständnis von Verkehrskoordination. Anders als die
früheren Versuche politischer Verkehrskoordination zielte die GVK-CH
nicht darauf ab, den Güterverkehr per Gesetz zwischen Strasse und
Schiene aufzuteilen. Die Koordination ergab sich vielmehr aus dem
Einbezug aller Verkehrsträger und Verkehrsarten, durch die Berücksichtigung zahlreicher ausserverkehrlicher Faktoren in der Planung sowie
die Ausrichtung der Verkehrspolitik an entsprechenden Zielsetzungen.
Zwar ist es bis heute nicht gelungen, dieses umfassende Verständnis von
Verkehrskoordination politisch mit letzter Konsequenz umzusetzen. Die
Zeit, in der sich schweizerische Verkehrspolitik in mehr oder weniger
zusammenhangslosen, verkehrsträgerspezifischen Einzelmassnahmen
erschöpfte, war jedoch mit dem Erscheinen des GKV-Schlussberichts
abgelaufen.
Berger Hans-Ulrich et al., Verkehrspolitische Entwicklungspfade in der Schweiz.
Die letzten 50 Jahre, Zürich: Rüeger, 2009 ; Haefeli Ueli, «Der grosse Plan und seine
helvetische Realisierung. Die Gesamtverkehrskonzeption 1972-1977 und ihre Wirkung
auf die schweizerische Verkehrspolitik», in SZG, Nr. 1, 2006, p. 86-95, sowie Walter
Felix (Hg.), 20 Jahre Gesamtverkehrskonzeption – wie weiter?, Bern: EDMZ, 1998,
insbes. die Beiträge von Christian Küng u. Wolf Linder.
62
230
Troisième partie
Coordination de la mobilité dans un espace urbain
Third Part
Coordinating urban mobility
Coordonner transport et urbanisme ?
Doctrines, représentations et pratiques locales
(1960‑2000)
Caroline Gallez, Université Paris-Est, IFSTTAR-LVMT
Abstract : In Europe, the idea that coordinating transport and urban planning is a
necessary condition for setting in motion sustainable urban development has spread
across academic and professional circles. Although this concern is not new, the
objectives underpinning transport and urban planning coordination have changed
profoundly since the late 1960s, as seen in the perspective shift from adapting the
city to the automobile to promoting sustainable cities and mobility. Placing the
analysis of global doctrines along with local views and practices of transport and
urban planning in their historical context makes it possible to question the apparent
consensus about the necessity of coordinating transport and urban planning and to
examine the scope of current changes, both in terms of concepts and local policies.
La coordination entre transport et urbanisme fait partie des préconisations largement reconnues aujourd’hui comme nécessaires à la mise
en œuvre d’un développement urbain durable. Si cette question n’est
pas nouvelle, les objectifs politiques qui la sous-tendent ont sensiblement évolué, notamment au cours des cinquante dernières années. Dans
les années 1960, la vision dominante était marquée par l’hégémonie de
la circulation automobile alors que depuis les années 1990 ce sont les
valeurs d’urbanité, de partage de la voirie ou d’apaisement des circulations qui s’imposent dans la conception ou la requalification des voies
de circulation urbaine 1.
Wachter Serge, La forme et le flux. Figures urbaines et architectures de la mobilité,
Note du Centre de prospective et de veille scientifique, n° 18, Paris : MELT, 2003.
1
233
Caroline Gallez
Le consensus autour de la nécessité de mieux coordonner transport et urbanisme tend cependant à gommer les aspérités des débats
scientifiques et politiques autour des questions du développement
des circulations automobiles ou de leur régulation. Pour dominante
soit-elle, la logique du « tout automobile » qui prévalait dans les
années 1960 soulevait déjà un certain nombre de critiques. Les plus
virulentes, illustrées par les écrits de Mumford 2 ou d’Ivan Illich 3,
dénonçaient les excès et les dérives de cette hégémonie alors qu’une
critique plus « conciliatrice », exprimée entre autres dans le rapport
Buchanan Traffic in Towns, paru en 1963, préconisait une adaptation
mesurée de la ville à l’automobile. De même, la généralisation des
concepts de ville et de mobilité durable qui accompagne la montée
en puissance de la question environnementale depuis les années 1990
suscite un certain nombre de controverses. De nombreux travaux
récents mettent notamment l’accent sur les conséquences potentiellement négatives d’une régulation qui toucherait d’abord les populations les plus fragilisées 4.
La vivacité des débats autour des objectifs politiques associés à
la coordination urbanisme-transport et l’évolution de ces objectifs
au cours des cinquante dernières années appellent à questionner le
­caractère a priori consensuel de cette préconisation en la replaçant dans
une perspective historique. Pour ce faire, nous revenons tout d’abord
sur les doctrines et les outils développés par les urbanistes et les spécialistes des transports, afin d’éclairer l’évolution de la conceptualisation
des interactions entre ville et transport. Puis nous nous intéressons à
l’évolution des représentations et des pratiques locales de la coordination urbanisme-transport en nous appuyant sur les résultats d’une
analyse croisée des trajectoires 5 des politiques de transport et d’urbanisme mises en œuvre dans quatre agglomérations suisses et françaises
Mumford Lewis, The City in History : Its Origins, Its Transformations and Its
Prospects, New York : Harcourt, Brace and World, Inc., 1961.
3
Illich Ivan, Énergie et équité, Paris : Seuil, 1973.
4
Orfeuil Jean-Pierre (éd.), Transports, pauvretés, exclusions. Pouvoir bouger pour
s’en sortir, La Tour d’Aigues : Éditions de l’Aube, 2004 ; Hine Julian, « Travel Demand
Management and Social Exclusion », Mobilities, vol. 2, n° 1, 2007, p. 109‑120.
5
Par trajectoire, nous entendons le parcours constitué par l’évolution des enjeux et des
orientations définis dans les deux champs sectoriels, des dispositifs organisationnels,
procédures et instruments de régulation ainsi que des principaux moyens mis en œuvre,
à différentes échelles spatiales. Les études diachroniques ont été réalisées à partir d’une
analyse documentaire approfondie (documents de planification, documents techniques,
études, travaux universitaires), complétée par une vingtaine d’entretiens semi-directifs
avec des acteurs locaux (élus, techniciens, associatifs) sur chaque site.
2
234
Coordonner transport et urbanisme ?
(Berne, Genève, Strasbourg et Bordeaux) depuis la fin des années 1960 6.
L’analyse des représentations nationales et locales du rapport entre ville
et transport est appréhendée à travers la question de la régulation du
développement urbain et des circulations automobiles. L’évolution des
pratiques locales de la coordination urbanisme-transport est ensuite
abordée par la manière dont les acteurs locaux défendent et confrontent
des intérêts divergents à l’occasion de démarches de planification ou
d’opérations d’aménagement concrètes.
Fabrique et sédimentation des doctrines
et des outils d’analyse
Si la préconisation d’une meilleure coordination entre transport et
urbanisme connaît depuis une quinzaine d’années un nouvel essor du
fait de l’importance croissante de la question environnementale et de
la multiplication des réflexions sur la mise en œuvre du développement
durable, la question de l’articulation entre formes urbaines, développement des réseaux et organisation des circulations est loin d’être nouvelle.
Elle se pose de manière récurrente depuis le développement des réseaux
de transport et a fait l’objet de très nombreux travaux de recherche 7. La
manière de conceptualiser cette question apparaît très marquée par la
segmentation des cultures techniques des deux champs principalement
concernés, celui de l’urbanisme d’un côté et des t­ransports de l’autre.
La résistance de l’urbanisme à la notion de réseau
Selon Dupuy 8, l’urbanisme ne s’est que très sommairement saisi
du concept de réseau. Les quelques rares urbanistes à s’être intéressés
à l’articulation entre formes architecturales et urbaines et développement des réseaux techniques urbains, comme Cerda, Soria y Mata avec
Gallez Caroline, Kaufmann Vincent (éd.), Mythes et pratiques de la coordination
urbanisme-transport, Regards croisés sur les trajectoires de quatre agglomérations
suisses et françaises, Recherches INRETS n° 281, Paris : Lavoisier, 2010. Cette
recherche, cofinancée par le CNRS et l’Ademe, a associé des chercheurs de l’Institut
français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux
(IFSTTAR), de l’Institut d’urbanisme de Paris (IUP) et de l’École polytechnique
fédérale de Lausanne (EPFL).
7
Offner Jean-Marc, Ollivier-Trigalo Marianne, « Introduction », in Commission of
the European Community (éd.) COST 332 Transport and Land Use Policies : Innova­
tions in Institutional Arrangements for Co-ordination, Final Report, European Commission, DG for Energy and Transport, 2000.
8
Dupuy Gabriel, L’urbanisme des réseaux. Théories et méthodes, Paris : Armand Colin,
1991.
6
235
Caroline Gallez
son fameux projet de Cité linéaire de 1886 (Lineal Ciudad), ou, plus
tard, F.R. Wright avec son projet de cité idéale Broadacre City, auraient
vu cette partie de leur réflexion presque ignorée ou tombée dans l’oubli.
S’interrogeant sur les raisons de cette « déconnexion », Dupuy
rappelle que les caractéristiques générales du développement des grands
réseaux techniques urbains, marquées par le poids des technologies
et des capitaux privés, l’importance des logiques de rentabilité et le
rôle des intérêts fonciers qui ont eu tendance à freiner leur diffusion,
expliquent le divorce entre le point de vue des spécialistes des réseaux
et celui des urbanistes, dont l’ambition était d’élaborer une doctrine
orientée vers l’intervention publique et dont la finalité était avant tout
« sociale, globalisante et surtout référée à la forme urbaine et à l’action
sur le bâti ». De leur côté les urbanistes, qui ne pouvaient ignorer
totalement le développement des réseaux, appréhendent cette question
sous un angle essentiellement technologique et peinent à anticiper les
conséquences en termes d’évolution des comportements ou d’usages de
l’espace urbain.
Dans la doctrine et la pratique urbanistiques, le recours généralisé au
zonage, en imposant une « vision aréolaire » de la production urbaine,
constitue, selon Dupuy 9, une autre limite à la prise en compte du réseau et
à l’avènement d’un urbanisme réticulaire. La définition de zones apparaît
pour la première fois en Europe dans les villes allemandes à la fin du
xixe siècle 10. Dans la majorité des pays qui adoptent entre 1870 et 1930
une démarche de plan d’extension visant à gérer l’extension urbaine, le
zonage est progressivement utilisé comme un moyen de planifier et de
fixer l’usage des sols. Dans le contexte d’une forte croissance urbaine liée
à l’industrialisation, la planification par zone vise à limiter les nuisances
en séparant l’industrie du commerce et de l’habitat, à organiser l’extension urbaine, en séparant la ville ancienne de la ville nouvelle. La diffusion du zonage se révèle ensuite étroitement liée au développement des
réseaux de transport. Entre la fin du xixe et le début du xxe siècle, la
volonté des urbanistes de réformer les villes, de les adapter aux exigences
de l’expansion industrielle, d’ouvrir de nouvelles voies se heurte principalement aux intérêts des propriétaires fonciers et immobiliers 11. Dans
Dupuy Gabriel, L’urbanisme des réseaux…, p. 62‑63.
Claude Viviane, « Une solution pratique aux problèmes urbains au début du
xxe siècle : le zonage », Annales des Ponts et Chaussées, n° 93, 2000, p. 23‑29.
11
Gaudin Jean-Pierre, « La genèse de l’urbanisme de plan et la question de la
modernisation politique », Revue française de science politique, vol. 39, n° 3, 1989,
p. 296‑313.
9
10
236
Coordonner transport et urbanisme ?
ce contexte, le recours à l’expropriation par zone, bien que soulevant de
fortes ­oppositions en pratique, apparaît comme une manière de définir les
règles qui légitiment l’intervention publique en s’appuyant sur la défense
d’un intérêt général face aux intérêts particuliers et en imposant une
régulation du marché foncier. Par ailleurs, si le recours au zonage offre
un moyen aux urbanistes de préparer l’extension des réseaux de transport à travers les réserves foncières, à l’inverse, le développement des
réseaux rend possible la pratique du zoning, qui vise à la spécialisation
fonctionnelle et sociale des espaces urbains et à la séparation entre les
quartiers résidentiels, les quartiers industriels, et les quartiers d’affaires et
­commerciaux 12.
La critique de l’urbanisme fonctionnel et du zonage se développe très
tôt, dès les années 1960, en particulier chez certains praticiens de l’urbanisme, chez les militants des luttes sociales et dans le champ de la recherche
urbaine. Alors que le zonage est présenté comme l’outil, voire l’agent
essentiel de la ségrégation urbaine et de la spécialisation fonctionnelle
de l’espace, ses pratiques n’ont pourtant jamais été aussi importantes 13.
À partir des années 1990, le constat de faillite du zonage fonctionnaliste
est cependant de plus en plus partagé dans le champ de l’urbanisme 14. Les
enjeux de régulation des circulations motorisées associés aux préoccupations environnementales semblent condamner définitivement une planification urbaine fondée sur la séparation des fonctions urbaines. Désormais,
l’équilibre, la cohérence et la mixité sociale et fonctionnelle sont érigés
en principes directeurs d’une planification qui considère le projet comme
garant de leur mise en œuvre, avant la règle.
Machine circulatoire et effets structurants des réseaux :
l’approche des spécialistes des transports
Du côté des spécialistes du transport, la conception dominante, particulièrement dans les premières phases du développement des réseaux,
est avant tout circulatoire. Pour les opérateurs et les responsables, les
logiques de gestion, de régulation des flux, de rentabilité l’emportent sur
une approche intégrée et territorialisée des services offerts aux usagers.
Gaudin Jean-Pierre, « Le zoning ou la nuit transfigurée », Culture technique, L’usine
et la ville. 1836‑1986, n° hors-série, 1986, p. 56‑63.
13
Scherrer Franck, « Retour sur un réquisitoire : le zonage en aménagement et ses
effets pervers », Annales des Ponts et Chaussées, n° 93, 2000, p. 16‑22.
14
Melé Patrice, « Introduction. Territoires d’action et qualifications de l’espace », in
Melé Patrice, Larrue Corinne (éd.), Territoires d’action, Paris : L’Harmattan, 2008,
p. 15‑45.
12
237
Caroline Gallez
Le terme de réseau doit d’ailleurs être utilisé avec précaution, puisqu’il
faut attendre la généralisation de la desserte pour que le fonctionnement
en réseau soit perçu comme une réalité : dans un premier temps, c’est la
vision de la ligne qui prévaut 15.
Ainsi la logique d’exploitation des réseaux de transports collectifs
à la fin du xixe siècle dans de nombreuses agglomérations européennes
est celle d’une juxtaposition des lignes urbaines, suburbaines et interurbaines, exploitées par de multiples opérateurs. Le maintien d’une forte
concurrence entre les opérateurs de transport, par ligne et par mode
(ferré et routier), constitue un frein à la construction d’une vision unifiée
et multimodale de l’offre de déplacements urbains et à l’appréhension
du développement du réseau de transport dans ses conséquences à la
fois sociales et territoriales. En France, l’instauration d’un périmètre
urbain en 1949, qui délimite un espace au sein duquel les transporteurs
interurbains ne sont pas autorisés à effectuer de desserte, illustre bien
cette tendance à la segmentation entre les problèmes de gestion des
lignes et les transformations des pratiques de déplacement. Le maintien
de cette barrière protectionniste est apparu de plus en plus problématique à mesure que la logique concurrentielle s’est déplacée d’une
opposition entre lignes urbaines et interurbaines à une opposition entre
voiture individuelle et transports collectifs 16. Néanmoins, les logiques
de gestion et de financement des différents sous-réseaux s’opposent
encore fortement à la formalisation d’une offre de transport intermodale
à l’échelle des régions urbaines.
Dans le domaine du transport routier, l’importance historique de la
lutte contre la congestion atteste du poids de l’approche circulatoire.
Avant même l’essor de la circulation automobile en Europe, l’encombrement des voies urbaines, dû au mélange de véhicules se déplaçant à des vitesses différentes, constituait déjà un problème majeur
dans les grandes villes 17. Ces problèmes récurrents suscitent dans un
premier temps une réglementation des circulations, notamment aux
carrefours, places, et dans les rues étroites. À partir des années 1920,
aux États-Unis, l’augmentation des trafics automobiles requiert des
solutions plus radicales d’adaptation des voies de circulation. La
structuration d’une nouvelle discipline universitaire, appelée science
Dupuy Gabriel, L’urbanisme des réseaux…, p. 38.
Gallez Caroline, « Intercommunalité, transports urbains et pouvoir d’agglomération.
Cinq trajectoires urbaines », Flux, n° 66‑67, octobre 2006-mars 2007, p. 43‑61.
17
Barles Sabine, Guillerme André, « Gestion des congestions : seculum miserabile »,
Annales des Ponts et Chaussées, n° 94, La congestion urbaine, 2000, p. 4‑12.
15
16
238
Coordonner transport et urbanisme ?
du trafic (traffic engineering), répond à la demande des municipalités
mais é­ galement à celle des milieux économiques qui considèrent que
le problème relève de la compétence des sciences appliquées et non
pas des sciences sociales 18. Dans les années 1960, face à l’essor rapide
des circulations et dans un contexte de soutien à l’industrie automobile,
la problématique change de perspective temporelle : d’une recherche
de solutions à court terme, la réflexion technique s’oriente vers la
mise au point d’outils de prévision du trafic, destinés à rationaliser la
construction des infra­
­­
structures routières. Les modèles de prévision
élaborés aux ­États-Unis dans les années 1950 sont importés en Europe
durant la décennie suivante et leur usage se généralise à la plupart des
villes européennes pour la programmation des besoins en infra­structures
routières.
Comme souvent, les termes du problème (répondre à l’augmentation
des circulations automobiles) sont structurés par la solution envisagée
(développer les infrastructures routières) 19. Dans l’optique de facilitation
de la circulation automobile qui représente leur objet premier, la minimisation des temps de déplacement constitue une hypothèse majeure de
la formalisation. Alors que ces modèles sont utilisés pour prévoir le
besoin en infrastructures à un horizon de dix-quinze ans, leur domaine
de validité est celui de la simulation des comportements de déplacement à très court terme. En particulier, les conséquences à moyen ou
long terme du développement des réseaux de transport sur la localisation
des ménages et des entreprises ne sont pas prises en compte. Malgré les
nombreuses critiques dont ces modèles ont fait l’objet, leur usage dans
l’évaluation des infrastructures de transport tend à se pérenniser.
Plusieurs transformations modifient toutefois la conceptualisation
des interactions entre transport et urbanisme à partir des années 1970.
D’une part, la forte augmentation des flux routiers qui se manifeste
dans les agglomérations européennes dès le milieu des années 1970
montre les limites de la logique proroutière, au moment où le premier
choc pétrolier pose la question de la dépendance énergétique et entraîne
un ralentissement – provisoire – du rythme des investissements publics
Lannoy Pierre, « L’automobile comme objet de recherche, Chicago, 1915‑1940 »,
Revue française de sociologie, vol. 44, n° 3, 2003, p. 497‑529.
19
Dupuy souligne les caractéristiques autoprédictives de ces modèles, dont l’utilisation
est avant tout « liée à la nécessité de réaliser dans le long terme un programme
d’investissement routier urbain pour accompagner le développement de l’industrie
automobile » (Dupuy Gabriel, Urbanisme et technique. Chronique d’un mariage de
raison, Paris : Centre de recherche d’urbanisme, 1978).
18
239
Caroline Gallez
pour le développement des infrastructures. Durant cette période,
­l’articulation entre les transports et l’urbanisme est envisagée comme
un moyen de lutter contre l’engorgement du réseau routier aux heures
de pointe 20. D’autre part, dans les années 1980, la généralisation des
préoccupations environnementales impose un changement de perspective plus radical : l’heure n’est plus à l’optimisation du fonctionnement
des réseaux routiers, mais à la régulation de la demande de déplacement
et à la diminution de la dépendance automobile. Dans cette nouvelle
perspective, la coordination entre transport et urbanisme est envisagée,
en rupture avec le modèle précédent, comme une articulation entre
réseaux de transport publics et urbanisme. De nombreux travaux de
recherche sont engagés pour développer un concept de ville structurée
autour des réseaux de transport publics. Aux États-Unis, ce concept a
été formalisé sous les termes de « Transit Metropolis », puis plus tard
de « Transit Oriented Development (TOD) » et popularisé notamment
par les travaux de Robert Cervero 21. Une abondante littérature a été
produite au cours des dernières années dans le champ des transports sur
cette thématique, notamment dans le cadre de projets européens. Cette
figure de la « Transit Metropolis » est considérée comme un nouveau
paradigme du développement urbain durable, qui s’oppose à la ville
émiettée, éclatée, étalée. Dans cette représentation, les réseaux sont
pensés comme des éléments structurants de l’urbanisation.
Les doctrines et leurs traductions
Ce rapide survol des doctrines et des outils utilisés dans la conceptualisation des interactions entre ville et transport permet d’identifier
certaines logiques de continuité des pratiques et une segmentation
des cultures techniques. Quelle référence les politiques nationales
­d’aménagement et de transport et les démarches de planification
locales font-elles à ces doctrines ? La comparaison des trajectoires des
agglomérations de Berne, Genève, Strasbourg et Bordeaux apporte
­
quelques éléments de réponse à cette question.
En première approche, les quatre trajectoires urbaines révèlent une
évolution relativement similaire des idées, des valeurs et des normes
qui sous-tendent les représentations locales en matière d’urbanisme et
Downs A., Stuck in traffic : Coping with peak-hour traffic congestion, Washington,
DC : Brookings Institution and Cambridge, MA : Lincoln Institute of Land Policy, 1992.
21
Cervero Robert, The Transit Metropolis. A Global Inquiry, Washington, DC : Island
Press, 1998.
20
240
Coordonner transport et urbanisme ?
de transports. De la ville automobile à la ville durable, la proximité des
argumentaires qui légitiment l’intervention publique atteste de la force
de doctrines globales, largement diffusées à l’échelle internationale
dans les milieux professionnels. Une analyse plus approfondie révèle
néanmoins des différences idéologiques entre la Suisse et la France,
dont on retrouve des traces plus ou moins marquées à l’échelle locale.
En particulier, les politiques d’aménagement du territoire en Suisse
et en France renvoient à des visions initialement très divergentes du fait
urbain.
En Suisse, la conception de l’aménagement du territoire fut à
­l’origine influencée par des idéologies anti-urbaines, associées aussi
bien à des considérations d’ordre moral – « la ville est mauvaise pour
l’homme » –, qu’à un rejet de la domination politique des villes 22.
L’attitude réservée de la Confédération helvétique à l’égard du fait
urbain peut être interprétée, sur le plan politique, comme une résultante
de l’organisation fédéraliste, fondée sur le strict respect de l’autonomie
cantonale. Sur le plan idéologique, on retrouve par ailleurs l’influence
très nette des doctrines ruralisantes caractéristiques de la première
moitié du xxe siècle 23. Le principe d’autosuffisance alimentaire, instauré
dans les années 1940, perdure après la guerre et contribue à faire de
l’agriculture le secteur privilégié de l’économie. Jusqu’à une période
récente, ni la politique d’aménagement du territoire ni la politique
régionale de soutien aux territoires en difficulté ne prenaient en compte
les espaces urbains. L’utilisation mesurée du sol s’impose durablement
comme un principe directeur de la politique d’aménagement du territoire en Suisse. Jusqu’en 1999, la Confédération doit veiller à conserver
le territoire agricole, mais elle n’a aucune compétence concernant le
territoire urbain 24. Les effets de ce protectionnisme sur la coordination urbanisme-transport varient en fonction des contextes cantonaux,
comme en témoigne l’exemple du canton-ville de Genève.
Eu égard à ses contraintes géographiques et topographiques et à
l’ampleur de la pression urbaine sur son territoire, le canton de Genève
s’est lancé très tôt dans une politique foncière volontariste, bien avant
que la loi fédérale d’aménagement du territoire de 1979 ne fasse de
l’élaboration de plans directeurs cantonaux une obligation légale.
Salomon Cavin Joëlle, La ville, mal aimée. Représentations anti-urbaines et
aménagement du territoire en Suisse : analyse, comparaison, évolution, Lausanne :
Presses polytechniques et universitaires romandes, 2005.
23
Walter François, La Suisse urbaine, 1750‑1950, Carouge & Genève : Zoé, 1994.
24
Salomon Cavin Joëlle, La ville, mal aimée…, p. 82.
22
241
Caroline Gallez
Progressivement, le canton concentre à son échelle les p­rincipales
compétences en matière d’aménagement et d’organisation des déplacements 25. Au sein de ce territoire restreint et densément peuplé, la
priorité a été accordée dès la fin du xixe siècle au développement d’un
réseau de transports collectifs finement maillé. En 1925, le canton
dispose ainsi d’un des réseaux de tramway les plus denses d’Europe.
Presque entièrement démantelé dans les années 1950 pour laisser place
à la voiture, il est remplacé par un réseau de bus, de trolleys et d’autocars également performant. Toutefois, cette stratégie de densification et
de desserte à courte distance ne s’accompagne pas, comme à Berne,
d’une restriction de l’usage de la voiture. Plusieurs raisons expliquent
ce choix. D’une part, il existe une tradition automobile ancienne et
vivante à Genève, comme en témoigne l’activisme des défenseurs de
ce mode, vivement engagés dans les débats autour de la place de la
voiture en ville. D’autre part, l’accessibilité interurbaine de cette place
financière et internationale de premier plan est essentiellement assurée
par le réseau routier et autoroutier, alors que les liaisons ferroviaires,
longtemps jugées non indispensables au fonctionnement cantonal, sont
très peu développées. L’efficacité de ce modèle original de « ville dense
automobile » est aujourd’hui remise en cause par la forte augmentation
des flux de déplacements transfrontaliers, qui causent un engorgement
important des réseaux routiers d’accès à Genève et imposent un changement d’échelle des problématiques d’aménagement et de transport.
En France, la question urbaine est constitutive de la politique
nationale d’aménagement du territoire qui se met en place dans les
années 1960. Ce ne sont pas les contraintes de rareté de l’espace mais
l’équilibre entre les grandes agglomérations urbaines et la redistribution de la croissance économique qui en sont les orientations majeures.
Cette vision relève à la fois de principes malthusiens à l’égard de la
croissance de l’agglomération parisienne et d’une volonté de soutenir
le développement et l’équipement des grandes agglomérations de
province. Les schémas de développement et d’aménagement urbain
(SDAU) des années 1970 et les « villes nouvelles », censées polariser
l’urbanisation périphérique, renvoient à une approche hiérarchique de
l’armature urbaine. La loi d’orientation foncière de 1967 consacre le
recours aux zonages d’intervention (schémas directeurs d’aménagement
et d’urbanisme, plans d’occupation des sols, zones d’aménagement
État de Genève, L’aménagement du territoire à Genève. Institutions et procédures,
Département des travaux publics et de l’énergie, Cahier de l’aménagement n° 3,
Genève, 1994.
25
242
Coordonner transport et urbanisme ?
concerté, zones d’urbanisation prioritaire, etc.) dans le pavage exhaustif
des territoires urbanisés.
Les pratiques de la planification urbaine à Strasbourg et à
Bordeaux attestent de l’impact de ces doctrines d’aménagement.
Les SDAU des deux agglomérations affichent à la fois des objectifs
ambitieux en matière de croissance urbaine et de développement du
réseau routier, tout en soulignant la nécessité de prévenir le risque
de congestion à travers le rapprochement entre zones d’emplois et
d’habitat et de prévoir la mise en circulation de transports collectifs
en site propre dans la ville centre afin de garantir l’accès au centre.
Cependant, des nuances apparaissent dans la traduction locale de ces
doctrines. Alors que la logique proroutière et la référence à l’urbanisme moderniste sont dominantes dans les démarches de planification de l’agglomération bordelaise jusqu’à la fin des années 1980,
l’élaboration des documents de planification et la programmation des
infrastructures de transports dans l’agglomération strasbourgeoise font
référence, dès les années 1970, à deux doctrines a priori antagonistes
de l’aménagement urbain : la première privilégie la logique routière,
alors que la seconde se réfère aux valeurs patrimoniales plus proches
d’une approche culturaliste de l’urbanisme. L’élaboration du dossier
d’agglomération de Strasbourg, en 1975, illustre de manière concrète
la façon dont ces visions se confrontent et cherchent à s’accorder. Le
maire de ­Strasbourg de l’époque, Pierre Pfimlin, fermement opposé
à « l’envahissement automobile » et cherchant à protéger le patrimoine historique de sa ville, saisit l’occasion de cette procédure pour
tenter d’imposer un aménagement piétonnier du centre-ville. Dans sa
démarche, qui s’oppose aux intentions des ingénieurs routiers de l’État
de développer des accès autoroutiers au centre, le maire bénéficie de
l’appui de l’agence d’urbanisme qui assure la médiation entre l’État
et les services municipaux de l’urbanisme. Le savoir-faire technique
routier de l’agence est ainsi mis au service d’un projet d’aménagement qui supprime le transit automobile par le centre, piétonnise une
large zone centrale et prévoit la mise en circulation d’un tramway.
Pour diverses raisons d’ordre politique, les mesures contenues dans le
dossier d’agglomération seront ajournées. Elles préfigurent néanmoins,
pour l’essentiel, le projet de tramway mis en œuvre par l’équipe de
Catherine Trautmann, au début des années 1990.
243
Caroline Gallez
Contingences et raisons politiques :
les réseaux contre les territoires ?
Le développement des réseaux et la diversification des mobilités
remettent en cause les découpages politico-administratifs, soulevant la
question de la dépossession des pouvoirs politiques dont la ­légitimité
est construite sur un territoire borné 26. Comment, dès lors, pour
reprendre une distinction opérée par Dupuy 27, la coordination peut-elle
se construire entre l’urbanisme, dont l’approche reste fondamentalement forgée par une vision aréolaire des territoires, c’est-à-dire définie
par des zones et des frontières, et l’organisation des déplacements, qui
renvoie à une approche réticulaire, dans laquelle les réseaux et les flux
sont constitutifs de l’urbain ?
La trajectoire bernoise atteste de l’importance productive des conflits
d’intérêts entre ces deux visions, tant du point de vue de la formulation des problèmes que de la mise en œuvre de solutions concrètes.
Tout commence en 1972, au moment du rejet en votation populaire
d’un projet autoroutier au centre de Berne, au nom de la défense de
la qualité de vie. Deux places centrales sont alors fermées à la circulation automobile. Durant la première décennie suivant cette décision, la
municipalité de Berne s’efforce d’adapter l’offre de transports collectifs et la régulation du trafic automobile à ces nouvelles contraintes.
Face à l’augmentation des flux pendulaires due à l’étalement urbain,
ces mesures se révèlent toutefois insuffisantes. Prenant conscience du
problème causé par la fuite des habitants du centre vers la périphérie,
les autorités bernoises s’engagent dans une réflexion sur l’articulation des politiques de transport et d’urbanisme. Pour la première fois,
la problématique du rapport entre ville et automobile est inversée : il
n’est plus question d’adapter la ville à l’automobile, mais d’agir sur
le trafic automobile pour l’adapter à la ville. Le principal objectif de
cette stratégie d’ensemble, énoncé dans un rapport pionnier de 1982,
intitulé « Environnement, Ville, Transport », était de maintenir la qualité
de vie et l’attractivité de la ville-centre, afin de contrebalancer l’attrait
qu’exerçaient sur ses habitants les communes périphériques. Le dernier
acte du processus débute avec l’entrée en scène du canton, à la fin des
années 1980. Jusque-là peu intéressées par les enjeux ­d’aménagement
Offner Jean-Marc, « Territorial “deregulation” : local authorities at risk from
technical networks », International Journal of Urban and Regional Research, vol. 24,
n° 1, 2000, p. 165‑181.
27
Dupuy Gabriel, L’urbanisme des réseaux…, p. 13.
26
244
Coordonner transport et urbanisme ?
urbain, les autorités cantonales font le constat du manque d’espaces
constructibles dans les endroits bien desservis par les transports publics,
en particulier par le S-Bahn, dont le réseau est en voie de modernisation.
Le canton de Berne s’engage alors dans la politique dite des « Pôles
de développement économique », qui vise à favoriser le développement de zones d’activités à proximité des nœuds du réseau de S-Bahn.
Cette stratégie marque le début de la coordination entre transport et
urbanisme tant au niveau de l’agglomération bernoise qu’à l’échelle
cantonale, comme en atteste la production de nombreux documents de
planification, d’études, de rapports durant les années 1990.
Le cas des agglomérations transfrontalières présente plusieurs particularités relatives à la problématique de la coordination urbanisme-­
transport. D’une part, les différentiels de salaires, de fiscalité locale et
de coûts du foncier ont un impact direct sur l’ampleur des flux pendulaires, sur l’évolution de l’urbanisation ainsi que la régulation des
déséquilibres de recettes et de dépenses publiques. D’autre part, la
coupure politique et institutionnelle de la frontière complique singulièrement la gestion collective et la coopération des acteurs au sein de
l’espace urbain transfrontalier.
Du point de vue de l’articulation urbanisme-transport, le poids des
logiques économiques apparaît relativement faible dans la construction
d’une coopération transfrontalière entre l’agglomération strasbourgeoise
et le Kreis d’Ortenau, comparativement à ce que l’on observe dans le
cas franco-valdo-genevois. L’arrivée récente du TGV-Est à Strasbourg
renforce les priorités accordées aux projets de connexion interurbaine :
c’est à cette échelle, plus qu’à celle du bassin d’emploi transfrontalier,
que se focalisent les demandes de subvention adressées à l’État, selon
une rhétorique qui entend conforter Strasbourg dans son positionnement
de « carrefour européen », en référence à son rôle de capitale politique
de l’Union européenne.
À Genève, les questions d’aménagement urbain et de déplacements
sont prégnantes dans l’histoire des relations entre les collectivités suisses
et françaises et dans l’accélération récente d’une ouverture transfrontalière en gestation depuis plus de trente ans. Dès la fin des années 1980,
l’accélération de l’étalement urbain s’est accompagnée d’une augmentation des flux pendulaires entre la Suisse et la France, provoquant
l’engorgement des voies routières d’accès à Genève. Le développement
d’un transport collectif lourd entre la Suisse et la France devient alors
une urgence et prend la forme, dans les années 1990, d’un projet de
réseau express régional. L’intervention d’un nouvel acteur sur la scène
locale, la Coordination économique et sociale transfrontalière (CEST),
245
Caroline Gallez
est décisive dans l’amorce de négociations franco-suisses autour de la
mise en place d’une desserte transfrontalière en transports collectifs 28.
Malgré l’efficacité de sa médiation, les négociations entre le canton de
Genève et les communes de l’agglomération annemassienne s’enlisent,
chacune des parties renvoyant à l’autre une fin de non-recevoir à propos
du financement de la ligne. Au début des années 2000, face à l’explosion des flux pendulaires et à la montée en puissance des manifestations
hostiles aux travailleurs transfrontaliers, le canton de Genève a pris
l’initiative d’un projet de ligne ferroviaire reliant Cornavin, Eaux-Vives
et Annemasse (projet CEVA). La relance de ce projet ancien s’explique
par l’opportunité d’une participation financière de la Confédération
helvétique, sur la base d’une convention entre le canton et la Confédération signée en 1912. L’initiative du canton de Genève d’abandonner
le projet de métro au profit d’une ligne ferroviaire a bouleversé le jeu
d’acteurs local, en écartant les communes françaises, non compétentes
en matière de transport ferroviaire, au profit de l’État et de la Région
Rhône-Alpes. Face aux réticences des autorités françaises à participer
au financement de la ligne, le canton de Genève a menacé en 2011
de ne plus abonder le Fonds genevois 29. Bien que les derniers recours
des riverains contre le projet aient été rejetés à la fin de l’année 2011,
l’avenir du projet CEVA comme fer de lance de la politique d’aménagement transfrontalière ne semble pas encore totalement scellé.
Conclusion
En replaçant l’analyse des doctrines globales, des représentations et
des pratiques locales des politiques de transport et d’urbanisme dans
une perspective historique, nous avons pu questionner dans cet article
l’apparent consensus autour de la nécessité de coordonner transport
et urbanisme, en nous interrogeant sur la portée des changements
à l’œuvre.
Assiste-t-on à un véritable changement de paradigme en matière
d’interaction entre ville et transport ? L’analyse des doctrines élaborées
Jouve Bernard, Urbanisme et frontières. Le cas franco-genevois, Paris : L’Harmattan,
1994.
29
Le Fonds genevois a été créé dans les années 1970 à la suite de négociations entre
l’État, les collectivités locales françaises et le canton de Genève. Les communes
françaises de la zone transfrontalière, confrontées à l’afflux de travailleurs trans­
frontaliers résidant en France, réclamaient au canton de Genève une participation au
financement des équipements collectifs. Ce Fonds est abondé par le canton à hauteur de
3,5 % de la masse salariale des travailleurs frontaliers français.
28
246
Coordonner transport et urbanisme ?
dans les champs du transport et de l’urbanisme nous invite à nuancer
cette hypothèse, en soulignant les continuités des approches, des outils
et de leurs usages, continuités qui renvoient également au poids des
cultures techniques. Le recours systématique à la notion de zonage,
quoique fortement critiqué en raison de ses effets ségrégatifs sur l’organisation urbaine et de son incompatibilité avec le concept d’urbanisme
réticulaire, s’explique par son efficacité politique. Jean-Pierre Gaudin 30
rappelle ainsi que le zonage reste un instrument de la gestion concertée
du marché foncier et surtout qu’il organise, dans le temps mais aussi
dans l’espace, le phasage du mouvement d’urbanisation. Dans le champ
des transports, la pérennisation des outils classiques de prévision et
d’évaluation des infrastructures négligeant les conséquences à long
terme du développement des réseaux et la difficulté à appréhender les
contingences territoriales et individuelles de la dépendance automobile
contribuent à « essentialiser » le rapport entre ville et transport, à travers
le concept idéal d’une ville structurée par ses réseaux.
Le détour par les représentations et les pratiques locales offre un
autre regard sur les évolutions politiques de la coordination urbanisme-­
transport. Aux visions idéales et statiques de la cohérence véhiculées
par les doctrines globales s’opposent les réalités des politiques urbaines,
marquées par la diversité des enjeux locaux de l’aménagement et des
transports. Les caractéristiques géographiques et topographiques, tout
comme les dynamiques démographiques, influencent directement
la définition des problèmes politiques et des solutions retenues. De
manière concrète, la coordination entre transport et urbanisme se pose
aux acteurs publics comme un problème de régulation des décalages
permanents entre le développement des réseaux, la croissance urbaine
et l’évolution de l’usage des réseaux. Comme le souligne Scherrer 31,
la désynchronisation des rythmes des acteurs du développement urbain
tient au fait que les infrastructures de ces réseaux, au-delà de la pérennité de leur dispositif matériel, évoluent à travers leurs services et leurs
usages. Selon les contextes locaux, les enjeux d’adaptation de la ville
à l’automobile, de régulation du développement urbain ou des circulations automobiles diffèrent. De même, les politiques de transport
et d’urbanisme sont marquées par le poids des décisions passées, qui
empêche un ajustement immédiat des stratégies locales à une évolution
des orientations stratégiques.
Gaudin Jean-Pierre, « Le zoning ou la nuit transfigurée… », p. 62.
Scherrer Franck, « Désynchroniser, resynchroniser », in Lamizet Bernard (éd.) Les
rythmes urbains, Lyon : Musée Gadagne, 2004, p. 45‑53.
30
31
247
Caroline Gallez
La difficile transformation du paradigme en matière de coordination
urbanisme-transport ne relève donc pas uniquement d’une crise conceptuelle. Elle atteste également de la vivacité des tensions et des conflits
autour de la question de la régulation des mobilités spatiales. Ainsi, la
coexistence de plusieurs registres de légitimité des politiques locales de
transport et d’urbanisme, se référant aux nécessités de la ­compétitivité
métropolitaine, aux contraintes de protection de l’environnement ou
à la lutte contre les inégalités sociales, est-elle la preuve que le débat
sur les objectifs et les moyens de gérer les mobilités spatiales est loin
d’être tranché. La coordination entre transport et urbanisme résulte
de la confrontation de ces points de vue divergents sur l’aménagement urbain, dans le cadre d’un processus adaptatif qui invite à une
­reconstruction permanente de la vision collective.
248
Une capitale sans métro ? – Les échecs du transport
souterrain à Rome, entre enjeux techniques,
choix urbains et concurrences modales
Aurélien Delpirou, Université Paris-Est Créteil
Arnaud Passalacqua, Université Paris Diderot – Paris 7
Abstract : This paper analyses the structural weakness of the underground in Rome
compared to the networks of comparable cities. Beyond traditional arguments, it
points to the idea of competition between various transport systems in order to
shed light on faltering transport planning. Taking the long view, from the beginnings of Roma capital to the 1960s, the paper addresses the inertia of underground
projects, which has led Romans to find other ways of getting about.
L’Italie fait depuis longtemps figure de « mauvais élève » de l’Union
européenne en matière de transports collectifs urbains, dans un contexte
de sous-investissement chronique et d’incitation politique et culturelle
à l’« automobilité ». La capitale semble cristalliser les dysfonctionnements du pays : la Ville éternelle est souvent présentée comme le cas
paradigmatique de l’« anomalie génétique » des villes italiennes, qui
résiderait dans une croissance urbaine désordonnée, opérée sans le
soutien de réseaux modernes de communication.
La médiocrité du réseau métropolitain capitolin constitue sans doute
l’une des manifestations les plus notables de ces dysfonctionnements.
Les deux lignes du métropolitain romain ont été réalisées tardivement
par rapport aux autres grandes capitales européennes : la construction de
la ligne B fut décidée en 1938, afin d’assurer le transport des visiteurs
étrangers vers le site de la future Exposition universelle de 1942, mais
249
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
le premier tronçon ne fut inauguré qu’en 1955, près d’un siècle après
Londres ; désignée comme « réalisation prioritaire » en 1959, la ligne A
ne fut finalement ouverte qu’en 1980, au terme d’innombrables péripéties. Avec deux lignes, 36 kilomètres de réseau et 300 millions de
passagers transportés annuellement, le métro romain est l’un des plus
modestes parmi ceux des grandes métropoles du continent 1. Comment
s’étonner, dans ces conditions, que Rome soit la ville la plus motorisée
d’Europe et que le déséquilibre du partage modal au profit des modes
individuels y prenne une ampleur singulière ? 2
Cette communication souhaite s’interroger sur les causes de cette
« anomalie romaine » à l’aune de la double grille de lecture de la
concurrence et de la coordination. En effet, la chronique des projets
de métropolitain témoigne d’une longue alternance de consensus et
d’oppositions sur certaines questions (maturité de la ville pour la
construction d’un métro, planification des tracés dans une ville riche
en vestiges archéologiques…), mais aussi et surtout d’une coordination
difficile et parfois conflictuelle avec les modes de surface, qu’ils soient
individuels ou collectifs. En se fondant sur une approche à long terme
des processus de planification et de décision, articulée chronologiquement autour de trois périodes charnières dans l’évolution des transports
urbains romains, il s’agira donc de se demander dans quelle mesure les
oppositions et les concurrences modales ont contribué à freiner la réalisation du métro. Quelles furent les incompréhensions ou rivalités entre
des acteurs souvent issus de milieux différents ? Le statut de capitale
a-t-il joué un rôle dans ces blocages, en laissant à l’État une place de
premier plan ou en alimentant des projets démesurés ?
S’affranchir des explications traditionnelles
Le prétexte archéologique
Pour expliquer la modestie du métropolitain romain, la population,
l’administration et la presse capitolines évoquent souvent spontanément
la densité des vestiges enfouis sous le sol de la Ville éternelle. Dans les
années 1970, les péripéties de la réalisation de la ligne A ont ancré
dans l’opinion l’idée qu’« il suffit de tomber sur le moindre fragment
de construction ancienne pour que les travaux soient immédiatement
Paris possède 16 lignes et 250 km, Londres 12 lignes et 380 km, Madrid 11 lignes et
270 km.
2
En 2011, le taux de motorisation atteignait huit voitures pour dix habitants. Voir
ATAC, Carta dei servizi del trasporto pubblico a Roma, Roma : ATAC, 2011.
1
250
Une capitale sans métro ?
stoppés » 3 : de très nombreux restes, d’inégale importance, furent
trouvés pendant le chantier, contribuant à ralentir et à renchérir considérablement le projet 4. Mais s’il est incontestable que les richesses
du sous-sol romain entraînent d’importantes contraintes techniques
(essentiellement pour l’aménagement des stations) et financières, leur
intégration aux projets a été envisagée depuis longtemps 5. Par ailleurs,
d’autres villes à la structure complexe ont su concilier conservation
archéologique et développement du métropolitain : l’exemple athénien
a récemment montré que la planification intégrée et la collaboration
interdisciplinaire permettaient de surmonter les difficultés techniques
les plus ardues.
Le « complexe de Proserpine »
Plusieurs travaux d’histoire sociale 6 ont mis en évidence la diffusion dans les milieux techniques et politiques italiens d’une « culture
de l’automobile » et d’une défiance envers les transports collectifs. De
façon beaucoup plus caricaturale, la presse locale a longtemps relayé
l’idée que les Romains, « peuple de conducteurs », souffraient du
« complexe de Proserpine », c’est-à-dire la « répulsion instinctive des
peuples méditerranéens à descendre sous terre » 7.
« Les Romains considèrent le métro comme une véritable ­profanation
faite à la ville du soleil, des arbres et des fontaines cristallines.
[…] Imaginez les vibrations du monstre alors que vous vous
promenez dans les ruelles tranquilles du Trastevere. » 8
Si les premiers travaux cités sont dignes d’attention et invitent au
débat, il en va différemment des clichés énumérés par la suite. La limite
est parfois mince entre l’approche culturelle et une p­erspective
­culturaliste très répandue, au point d’être devenue un lieu commun.
Mariotti Bianchi Umberto, I trasporti a Roma, Roma : Tascabile, 1995, p. 45.
Federico Fellini en a livré un témoignage fantasmagorique dans une célèbre scène de
Fellini Roma (1972).
5
Ainsi, les études préalables au projet de 1928 (voir plus loin) inclurent d’importantes
campagnes d’exploration du sous-sol, qui permirent de réunir un précieux matériel
scientifique ; les tracés furent définis en accord avec les meilleurs archéologues du
moment et le projet final fut approuvé par la direction des beaux-arts.
6
Voir par exemple Marchesini Daniele, Cuori e motori. Storia della Mille Miglia,
Bologna : Il Mulino, 2001, 288 p. ; Paolini Federico, Storia sociale dell’automobile in
Italia, Roma : Carocci, 2007, 160 p.
7
Citations tirées de Ascarelli Giovanni, Architettura dei trasporti urbani, Appunti per
un’analisi, Roma : Kappa, 1997, p. 39‑40.
8
Gazzetti Gian Luigi, « La metropolitana a Roma », Capitolium, n° 1953‑3, 1953, p. 70.
3
4
251
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
En effet, à Rome, une grande partie de la périphérie est dépendante
de l’automobile, de telle sorte que l’utilisation d’un mode privé est
beaucoup moins un choix qu’une contrainte pour se déplacer. En outre,
la relation entre les Romains et leurs transports est au moins autant
une conséquence qu’une cause des lacunes de l’offre dans la capitale
italienne. Bien souvent, c’est l’offre qui crée la demande : à Madrid,
capitale comme Rome d’un pays méditerranéen longtemps sous-équipé
en infrastructures de transport public urbain, le développement spectaculaire du réseau de métro au cours des deux dernières décennies a
entraîné une évolution s­pectaculaire du partage modal en faveur des
modes collectifs 9.
Rome Capitale : l’introuvable consensus
sur la solution métropolitaine (1870‑1922)
La question de la « maturité » de la ville
Au cours des premières années de Rome Capitale 10, la réflexion
sur le transport urbain souterrain releva d’initiatives individuelles,
souvent issues de membres éminents des cercles d’ingénieurs. Largement inspirés de l’exemple londonien, plusieurs projets de réseau
furent soumis à l’avis de « commissions spéciales » créées ad hoc par la
Commune ou par l’État. Ils furent tous refusés au motif que la ville, qui
était encore en 1870 une cité provinciale de 220 000 habitants restée
à l’écart de l’industrialisation, n’était pas « suffisamment mûre » pour
accueillir un mode de transport lourd et souterrain.
« Le projet présenté n’a pas réellement étudié les besoins à
­satisfaire et reste vague et flou. […] La population et les distances
dans Rome sont encore trop faibles pour justifier les dépenses
engendrées par la traversée souterraine de la ville par des lignes
­métropolitaines. » 11
L’étendue du réseau a plus que doublé dans la capitale espagnole, passant de
115 kilomètres de lignes en 1994 à près de 280 kilomètres en 2008. Au cours de ces
quinze années, le partage modal s’est sensiblement rééquilibré au profit des modes
collectifs.
10
Unifiée depuis 1861, l’Italie n’acheva véritablement son Risorgimento qu’avec
la prise de Rome en septembre 1870 et la décision de faire de la ville la capitale de la
nouvelle monarchie.
11
Archivio storico capitolino, fonds « Strade ferrate », 1884, opuscule n° 15/78, p. 4.
9
252
Une capitale sans métro ?
La concurrence du chemin de fer et du tramway
Dans un deuxième temps, les projets évoluèrent vers des lignes
circulaires, périphériques à l’aire habitée, qui proposaient de contourner
la ville au plus près afin d’assurer une double fonction de desserte
urbaine et de ligne ferrée de ceinture. Mais ce compromis fut lui aussi
jugé insatisfaisant : selon les autorités locales comme nationales, le
métropolitain serait moins efficace que le tramway et moins économique qu’une véritable ligne ferrée de ceinture à l’air libre.
« Les projets présentés, envisagés comme lignes de service urbain
interne, ne peuvent présenter une utilité supérieure aux tramways
et omnibus [à cheval] qui traversent la ville sans interférer avec le
transit. […] Considérés comme tronçons de liaison entre les futures
gares de Rome, ils ne présentent que peu d’intérêt en raison de leur
efficacité limitée. » 12
En réalité, ces projets se heurtèrent à l’indifférence, voire à l’hostilité,
de deux acteurs majeurs des transports à Rome. D’un côté les compagnies de chemins de fer, en proie à de graves difficultés financières – elles
furent finalement nationalisées en 1903 –, n’avaient développé aucune
compétence ou expertise relative aux réseaux souterrains ; aussi la
création d’une ligne ferroviaire de ceinture, sur le modèle viennois ou
parisien, était-elle privilégiée 13. De l’autre la compagnie locale de transport urbain – la SRTO –, en position de monopole, n’avait aucun intérêt à
se lancer dans une entreprise aventureuse, alors que l’exploitation de son
réseau d’omnibus et de tramways lui assurait de confortables bénéfices.
À ce jeu d’acteurs stérile s’ajouta, selon l’historien de l’urbanisme
Italo Insolera, une défiance plus profonde envers le métropolitain. En
effet, au seuil de la grande vague de développement du métro dans
les villes européennes, construire en souterrain n’était pas perçu par
la classe dirigeante italienne et romaine comme un gage de modernité
technique ; au contraire, « enfouir les lignes sous terre aurait été ressenti
comme un échec, un renoncement à une certaine image de la ville » 14.
Aussi la construction d’un métro ne fut-elle jamais envisagée comme un
élément possible dans l’œuvre de modernisation de la nouvelle ­capitale.
Archivio storico capitolino, fonds « Strade ferrate », 1888, opuscule n° 15/81, p. 9.
Voir sur ce point Guzzanti Corrado, « I trasporti urbani », Unione romana ingegneri e
architetti, La terza Roma, Lo sviluppo urbanistico edilizio e tecnico di Roma Capitale,
Roma : Palombi, 1971, p. 227‑232.
14
Entretien avec Italo Insolera, 10 janvier 2007. Voir aussi Insolera Italo, Roma
moderna, un secolo di storia urbanistica, Torino : Einaudi, 1962, rééd. 1993.
12
13
253
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
Les ambiguïtés de la période fasciste :
une entrée paradoxale dans le club
des
« métro-poles » (1922‑1950)
La conversion au métro : une conjonction de facteurs
Le basculement idéologique intervint au milieu des années 1920 :
le 29 décembre 1924, alors que la solution métropolitaine semblait
définitivement enterrée, un avis du Conseil supérieur des travaux
publics relançait les études.
« Il n’y a absolument aucun doute sur le fait qu’une capitale moderne
ayant la dimension et la force expansive de Rome ait besoin de ce
moyen de communication [le métropolitain]. […] Il paraît donc
opportun d’étudier un plan organique de métro, qui tienne compte
du développement démographique et édilitaire de la ville et de
l’urgence de mettre en œuvre des communications rapides entre le
centre et la périphérie. » 15
De fait, l’élan démographique et urbain des années 1920 avait
engendré un changement d’échelle de l’organisme urbain, qui atteignait
800 000 habitants en 1926 et s’étendait désormais jusqu’à six kilomètres
du Capitole. Ces évolutions entraînèrent une différenciation croissante
entre le centre historique, dense et riche en équipements publics, et des
périphéries résidentielles à la croissance mal encadrée. Aussi la nécessité
d’apporter des réponses aux nouveaux besoins de mobilité de la population romaine, notamment par la mise en service de moyens de transport collectif adaptés, contribua-t-elle à poser en des termes nouveaux
la question du métropolitain. En attestent les recommandations quelque
peu incantatoires du comité technique interministériel qui fut chargé
en 1926 de définir les caractéristiques constructives d’un nouveau métro.
« Il convient d’adapter les moyens de communication à la forme et la
maturité de la ville : après la ville pédestre (un kilomètre de rayon et
environ 60 000 habitants) et la ville des tramways (trois kilomètres de
rayon et environ 600 000 habitants) est arrivé le temps de la ville des
métros (six kilomètres de rayon et environ un million d’habitants). » 16
La relance du métro fut également l’une des expressions des
ambitions fascistes pour la capitale. En effet, la rhétorique fasciste
Extrait du rapport cité in Capitolium n° 1926‑6, 1926, p. 370.
Comitato tecnico interministeriale per una metropolitana, Progetto di metropoli­
tana per la città di Roma, Roma, 1928, p. 2.
15
16
254
Une capitale sans métro ?
avait fait de Rome la vitrine non seulement de l’urbanisme « officiel »,
mais aussi de la modernité du régime 17. En construisant un métropolitain, la capitale italienne donnerait un témoignage de la vitalité
technique et industrielle du pays, tout en s’alignant sur les standards
européens. Le rapport du Conseil supérieur multipliait d’ailleurs les
références à Londres, à Paris, mais aussi à Madrid, qui était alors
en plein développement. En cet entre-deux-guerres marqué par une
intense circulation des idées et des modèles, le métropolitain s’était
enfin imposé en Italie comme le mode symbolisant la modernité
technique et urbaine.
Le caractère autoritaire du régime permit, en outre, de limiter voire
d’annihiler les oppositions locales au métro : alors que la compagnie de
transport urbain fut nationalisée, la Commune de Rome fut transformée
en « gouvernorat » placé sous la tutelle directe du ­gouvernement. Cette
nationalisation de la question du métro fut parachevée par l’émergence d’un nouvel acteur fort : le Conseil supérieur des travaux publics.
Dominée par les ingénieurs des grandes écoles italiennes et dotée d’une
véritable capacité d’expertise, cette structure devint sous le fascisme
l’organe principal de contrôle et de validation des projets dans les
champs technique et urbanistique.
Enfin, la réhabilitation du métro fut liée à l’affirmation
d’une ­discipline urbanistique alors naissante. En 1916, le jeune
Marcello Piacentini fut le premier urbaniste à présenter un projet
de métro inséré dans le cadre d’un programme global d’aménagement de Rome. Il s’agissait d’un réseau de dix kilomètres de lignes
radiales ménageant des liaisons directes entre les grands équipements
du centre, les gares, les parcs et les quartiers les plus importants de
la périphérie. Une différenciation claire était établie entre linee di
circonvallazione, qui « se développent autour du périmètre urbanisé
d’une ville et relient entre elles les principales gares du réseau ferro­
viaire » et linee metropolitane, considérées comme des « moyens de
desserte rapide de la périphérie depuis le centre » 18. En 1918, le
projet de son collègue et concurrent Gustavo Giovannoni témoigna
d’une prise en compte encore plus fine des liens entre métropolitain
et aménagement urbain : le métro y était présenté à la fois comme
un instrument de décongestion et de sauvegarde du centre historique
Voir Cederna Antonio, Mussolini urbanista. Lo sventramento di Roma negli anni del
consenso, Roma & Bari : Laterza, 1979.
18
Piacentini Marcello, Sulla conservazione della bellezza di Roma e sullo sviluppo
della città moderna, Roma : Aternum, 1916.
17
255
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
de Rome et comme un moyen de connecter au centre les nouveaux
quartiers résidentiels appelés à se développer en périphérie 19. Les
réflexions se poursuivirent de façon informelle, notamment dans
le cadre de l’Exposition générale sur les plans régulateurs de Rome
de 1926, qui présenta des projets réalisés par les meilleurs représentants de l’urbanisme romain de l’entre-deux-guerres. Les tracés de
métropolitain constituaient désormais un élément central des dessins
des plans, au service de la transformation urbaine.
C’est dans ce contexte qu’un décret royal du 18 août 1926 institua
un comité technique interministériel, chargé de planifier un véritable
réseau métropolitain. Le projet définitif fut remis au gouvernement
en 1928 (carte 1). La solution du métro semblait donc s’imposer au
moment où la ville s’affirmait comme la vitrine du régime et atteignait la dimension physique et fonctionnelle d’une métropole. Les
travaux devaient commencer en 1932 et s’étaler sur une décennie.
Mais en janvier 1931, la mise en œuvre fut reportée par le ministère
des Travaux publics à une « époque non définie ». Si l’historiographie
n’a pas encore éclairci les causes de ce nouveau revirement, il semble
toutefois plausible qu’il soit en partie lié à la dynamique nouvelle qui
toucha alors les réseaux de surface, qui captèrent en effet l’attention à
l’heure où leur exploitation était unifiée au sein de l’ATAG en 1927.
Le redéploiement du réseau de surface : le détournement
de l’attention portée aux projets de métro
La période fasciste vit effectivement la circulation automobile
s’intensifier au cœur de Rome, alors que ce nouveau moyen de déplacement était encore un bien de luxe. À partir du milieu des années 1920,
les tramways furent décrits comme le principal obstacle à la fluidité
du trafic dans les zones les plus centrales. La critique la plus célèbre
demeure celle de Benito Mussolini lui-même, qui demanda dès 1925
que le gouverneur de Rome « débarrasse les rues monumentales de
Rome de la sotte contamination des tramways » 20.
Giovannoni Gustavo, Le questioni edilizie romane attinenti al Piano delle comunica­
zioni cittadine, Roma : Tipografia dell’Unione, 1918.
20
Chiapparo Maria Rosa, « Le mythe de la Terza Roma ou l’immense théâtre de la
Rome fasciste », Nuovo Rinascimento [article mis en ligne le 19 septembre 2011],
p. 21‑22.
19
256
Une capitale sans métro ?
Carte 1 : Projet définitif de métropolitain de 1928
Source : Comitato tecnico interministeriale per una metropolitana, Progetto di
metropolitana per la città di Roma, Roma, 1928
257
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
Néanmoins, le Duce s’était empressé d’ajouter que l’édile devrait
« doter les nouveaux quartiers qui naîtraient en anneaux autour de la
ville ancienne de moyens de communication ultra-modernes ». De fait,
c’est une puissante modernisation des réseaux de surface qui s’opéra
en janvier 1930 : si les tramways disparaissent alors de la zone centrale
délimitée par les murailles auréliennes, ils sont redéployés au service de
la desserte des périphéries en croissance, le long de vingt-quatre radiales
venant se connecter à deux nouvelles lignes circulaires concentriques.
Le centre reste desservi par un mode à la modernité assumée : l’autobus.
Hiérarchisation, modernisation et adaptation au territoire : l’innovation
se trouve bien en surface.
Le régime fit d’ailleurs entrer ces systèmes de surface, notamment
ceux à propulsion électrique, dans son jeu d’autocélébration, en raison
de la situation énergétique catastrophique de l’Italie fasciste ; isolée sur
la scène internationale après son intervention en Éthiopie en 1935‑1936.
Ainsi, le tramway bénéficia d’une innovation technique de tout premier
plan : la mise au point d’une rame articulée, issue en 1940 de la collaboration entre l’ATAG et la Stanga. Mais, surtout, les rues de Rome furent
progressivement parcourues par des centaines de trolleybus. À l’image
de ce que connut Londres à la même époque, la capitale italienne
s’appuya sur ce nouveau système pour assurer un service de surface
fiable, rapide et de capacité satisfaisante 21. À partir de janvier 1937,
FIAT fournit ainsi des trolleybus pour desservir les nouveaux lieux les
plus prestigieux de la capitale, à l’instar du complexe sportif et culturel
du Foro Italico et des espaces devant accueillir l’Exposition universelle
de 1942 (EUR), véritable vitrine que le régime espérait présenter au
monde.
Ainsi est-il possible de considérer que l’entre-deux-guerres – notamment les années 1930 – fut marqué par un intérêt certain porté aux
transports de surface. Les plans les concernant aboutirent rapidement, les matériels furent modernisés et les réseaux redéployés.
De telles évolutions furent d’ailleurs constatées dans d’autres agglomérations européennes comme Paris ou Londres. Les modes de
surface – thermiques ou électriques – bénéficiaient d’une modernité
encore assurée, alors que l’automobile individuelle demeurait un objet
socialement élitiste. La dynamique démographique spécifique de Rome
vint ajouter à ce tableau la rapidité de l’expansion de son urbanisation,
Voir Taylor Hugh, London Trolleybuses, a class album, Harrow : Capital Transport,
2006.
21
258
Une capitale sans métro ?
que les modes de surface semblaient seuls capables de suivre, avec
toutefois un certain décalage. Après la Seconde Guerre mondiale, les
dynamiques du métro et, surtout, de l’automobile vinrent bousculer cet
équilibre.
Temps long du métro et enlisement du réseau
de surface (1950‑1970)
Finalement, le métro
En 1955, Rome inaugura sa première ligne de métro. Cette ligne,
dont le parcours se faisait alternativement en surface et souterrain,
reliait la gare de Termini au quartier où aurait dû se dérouler l’Exposition universelle, dont le projet avait été abandonné en raison du conflit
mondial. Elle s’appuyait dans son parcours aérien sur une partie du
tracé de la ligne ferroviaire reliant Rome au Lido d’Ostie. Il s’agissait
ainsi pleinement de l’héritage d’un projet fasciste, dont les premiers
tunnels avaient été percés au début des années 1940. Sa reprise par
l’Italie républicaine ne s’était d’ailleurs pas opérée sans de nombreuses
réticences. Surtout, cette première ligne de métro était issue d’un projet
événementiel. Que l’exposition elle-même n’ait pas eu lieu n’empêcha
pas le quartier de l’EUR d’accueillir progressivement des institutions publiques importantes, des activités tertiaires et du logement. La
desserte de ce quartier neuf était donc assurée depuis le centre-ville
et la gare. Mais l’accumulation des embouteillages sur la via Cristoforo Colombo, l’axe routier principal desservant l’EUR, témoigna
rapidement du décalage entre les besoins de mobilité et la nouvelle
infrastructure ferrée. Conçue pour desservir un lieu de prestige, elle
était incapable de répondre à la demande de déplacements des populations parties s’installer en périphérie, notamment à l’est de la ville, où
les constructions illégales (borgate abusive) sans lien avec les réseaux
de transport public se multipliaient.
Le parallèle avec Paris est ici saisissant. Le projet de métro parisien
a également connu des difficultés et controverses multiples pendant un
demi-siècle avant d’aboutir, l’Exposition universelle de 1900 jouant le
rôle de catalyseur. Mais si l’infrastructure fut ouverte pour coïncider
avec l’événement, elle n’était pas fondamentalement conçue pour
desservir les sites de l’exposition, d’ailleurs multiples. Il s’agissait
bien du début d’un réseau qui se développa rapidement au cours des
années suivantes. En revanche, à Rome, si l’événement a joué le rôle
de cata­­lyseur, il a également défini les zones à desservir, au risque de
­provoquer un décalage avec l’urbanisation et la dynamique de réseau.
259
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
En 1962, les pouvoirs publics confièrent donc au Plan régulateur
général (PRG) la mission d’organiser le développement de l’agglomération, notamment à partir de l’idée d’un axe structurant nouveau
s’étendant à l’est de la capitale. Les mobilités associées à la structure
fonctionnelle et zonale définie par le PRG reposaient avant tout sur
l’automobile, mais aussi sur de puissantes lignes de métro à construire.
Las, la mise en œuvre du plan se heurta à de multiples difficultés,
laissant ainsi la voie libre à l’abusivismo.
La réalisation de la seconde ligne témoigna de ces difficultés
et des lenteurs d’avancement des projets, dans un contexte économique pourtant florissant. Inscrite à l’agenda en 1959, cette nouvelle
infrastructure vit ses travaux débuter en 1964. Mais le chantier s’avéra
complexe, notamment du fait du choix technique d’avoir recours à des
tranchées ouvertes, à l’origine de gigantesques problèmes de circulation. L’inauguration de cet axe ouest/sud-est n’eut finalement lieu qu’en
1980.
La démocratisation de l’automobile et le repli des modes
collectifs de surface
L’évolution la plus spectaculaire de la mobilité romaine d’aprèsguerre ne se joua donc pas véritablement dans le champ des transports collectifs, mais concerna l’automobile individuelle. En effet, la
décennie 1955‑1965 vit les taux de motorisation romains progresser
rapidement, au fur et à mesure que l’agglomération s’étendait et que
sa démographie s’accroissait. Cette démocratisation trouva dans le
contexte italien une expression spécifique, en lien avec le triomphe
des petits véhicules produits par le constructeur national FIAT, dont
le modèle vedette, la FIAT 500 (1957), s’imposa comme une icône du
mode de vie italien.
Du point de vue des transports collectifs, cette motorisation de masse
se traduisit par une désaffection de la clientèle et un certain discrédit
d’une part, par une pression nouvelle sur la chaussée de l’autre. La
faiblesse de l’offre ferroviaire romaine eu effectivement comme corollaire la grande sensibilité des transports collectifs aux conditions de
circulation sur une voirie rapidement perçue comme trop exiguë pour
assurer la fluidité des différents trafics. Ainsi, la compagnie municipale
ATAC, qui avait remplacé l’ATAG, lança au cours des années 1950 une
politique de déplacement de ses installations fixes en vue de dégager au
mieux l’espace circulatoire.
Contrainte par des finances qui l’empêchaient de suivre l’urbanisation galopante par l’extension des services existants, l’ATAC pratiqua
260
Une capitale sans métro ?
un jeu de substitution des modes de transport de surface, si bien qu’elle
fit évoluer son offre à parc pratiquement inchangé – et donc vieillissant.
Alors que les tramways furent remis en cause du fait de l’espace qu’ils
occupaient dans les zones les plus centrales – même s’ils avaient quitté
le cœur de Rome depuis 1930 –, l’ATAC choisit de leur substituer des
autobus et de les redéployer en périphérie. Le jeu se compliqua sur
certaines lignes lorsque le trolleybus intervint dans ces substitutions.
Alors que s’ouvrait un métro incapable de répondre à l’ampleur des
besoins de déplacement d’une ville en croissance rapide, les transports
de surface tentèrent ainsi d’assurer une offre minimale, qui cherchait à
rallier des pôles d’urbanisation déconnectés les uns des autres. Aussi
la coordination qui se construisit s’opéra-t-elle sous de multiples
contraintes : finances délicates, extension de l’urbanisation, congestion, vieillissement du parc, etc. Cette pression permanente conduisit à
redistribuer les cartes au sein du monde des transports de surface. Alors
que tramways, trolleybus et autobus avaient trouvé leur pertinence pour
la desserte d’une ville encore faiblement motorisée avant la guerre,
la solution du site propre – d’abord conçue comme étant celle du
métro – s’imposa comme une voie de salut pour les transports publics.
La modernité, qui fut celle de l’autobus et du trolleybus de l’entredeux-guerres, sembla donc s’effacer au profit de la nouvelle venue :
l’automobile. C’est de nouveau un événement international, qui cette
fois se déroula comme prévu, qui marqua alors l’histoire de la mobilité
romaine : les Jeux olympiques de 1960.
Les Jeux olympiques de 1960 et la construction
d’une Rome moderne
Conçus comme le symbole du retour sur la scène mondiale d’une
Italie nouvelle débarrassée du fascisme, les Jeux olympiques furent
l’occasion pour la métropole italienne d’intégrer pleinement le système
automobile en son sein. Donnant lieu à des réaménagements d’ampleur
dans la ville, l’événement vit se multiplier les réalisations en faveur de
la fluidité du trafic routier. Les principales figures de cette intervention,
déterminée par l’idéologie de la séparation des flux, furent les passages
souterrains permettant d’éviter au maximum les carrefours. L’autre
transformation liée à la politique circulatoire alors mise en œuvre fut
la suppression des marciatram, ces espaces réservés à la circulation des
tramways le long de la voirie. Leur démantèlement, engagé ponctuellement jusqu’alors, devint un objectif au début de l’année 1960. L’espace
ainsi libéré fut généralement ouvert à la circulation automobile, même
si certains marciatram furent longuement laissés à l’abandon.
261
Aurélien Delpirou, Arnaud Passalacqua
Les tramways virent donc leur territoire se réduire : leur substitution par des autobus et trolleybus fut inscrite dans un plan de l’ATAC
de 1959 visant à assouplir et fluidifier au mieux un espace de circulation devenu le visage que Rome voulait présenter au monde lors des
Jeux olympiques. De nombreuses lignes furent donc transformées, la
mutation la plus emblématique étant sans doute le remplacement partiel
des tramways sur la ligne circulaire empruntant les quais du Tibre, du
fait de leur mise en sens unique en août 1960, juste avant l’ouverture
des Jeux. Grand vainqueur du nouveau jeu modal, dans un contexte
morose pour les transports publics, l’autobus remplaça le plus souvent
le tramway ou le trolleybus… quitte à ce que l’ATAC loue des véhicules
sur une durée pouvant être de plusieurs années, notamment auprès des
constructeurs italiens.
Ainsi, face à ces réalisations en faveur de l’automobile, les véritables
projets de transport public apparaissent modestes : une nouvelle ligne
de métro fut tardivement lancée en 1959, tandis que les réseaux de
surface furent plutôt réduits que véritablement promus. Il fallut attendre
la fin de la décennie 1960 pour que s’impose l’idée que le site propre
pourrait également être un moyen de préserver une offre de transport
de surface de qualité. Après l’élection d’une municipalité dans laquelle
la démocratie chrétienne partageait le pouvoir avec les socialistes,
les premiers couloirs d’autobus furent ouverts en 1968, avant que les
grands axes romains (Tiburtina, Nomentana, Prenestina, etc.) en soient
finalement équipés au début des années 1970.
Conclusion
Finalement, les tensions entre le métro et les modes de surface
romains, individuels comme collectifs, contribuent à expliquer les
carences du réseau souterrain desservant actuellement la capitale
italienne. Loin d’être le résultat d’une politique de coordination, le
métro romain résulte plutôt d’avancées par à-coups, au gré des changements de regard sur l’un ou l’autre des systèmes de transport. Au-delà
des explications traditionnellement avancées, ce sont bien les difficultés
d’émergence d’un consensus, les ambiguïtés fascistes et l’avènement
d’une urbanisation incontrôlée qui sont successivement à l’origine de
la faiblesse romaine en la matière. Le rôle des transports collectifs de
surface, concurrents plutôt qu’alliés sur les trois périodes considérées
ici, explique également la lenteur des réalisations souterraines.
Aujourd’hui, après un programme volontariste de création et de
rénovation des infrastructures ferroviaires romaines – la Cura del ferro
262
Une capitale sans métro ?
(1993‑2008) –, l’agglomération doit toujours faire face à un lourd déficit
de desserte en transports ferrés. La troisième ligne du métro, dont les
travaux ont été engagés à la suite d’un financement obtenu à la fin des
années 1990, devrait être probablement inaugurée dans les prochaines
années. Quant au réseau de tramway, sa relance, par la création de la
ligne 8 en 1998, s’est essoufflée.
D’une façon générale et pour dépasser le contexte romain, cette
histoire des transports urbains de la capitale italienne pose la question
des terrains où se portent les notions de concurrence et de coordination.
En effet, s’il y a bien un jeu de tensions entre transports collectifs de
surface et métro, et entre transports collectifs et automobiles, les enjeux
ne s’y limitent pas. Tout d’abord, au sein de chaque système – métro,
transports de surface et automobile –, la différence entre la planification
et sa mise en œuvre est sensible. La nécessaire longue durée de la mise
en œuvre des projets – liée à des difficultés techniques, à leur poids
financier ou à des blocages institutionnels – conduit à un décalage entre
la réalisation et la planification, alors que l’urbanisation n’a elle-même
pas directement suivi les lignes préalablement définies. La coordination
doit donc se comprendre comme opérant entre des projets de papier qui
suivent leur propre cheminement.
Ensuite, il semble qu’entre concurrence et coordination il existe une
voie médiane, qui serait celle de l’hybridation. Le cas romain l’illustre à
partir des substitutions entre modes de surface : un système peut prendre
la place d’un autre. D’autres villes et d’autres époques montrent également comment des systèmes hybrides parviennent à capter les qualités
du mode dominant : le site propre n’est-il pas une forme d’adaptation de
ce qui fait la force du métro à la surface ?
Enfin, la bataille que se livrent les modes de transport se joue dans
un contexte urbain qui ouvre la voie à une autre coordination, celle de
ces systèmes avec la ville elle-même. C’est probablement sur ce plan
que Rome présente un visage extrêmement particulier : elle donne le
sentiment d’une ville dont la coordination avec les transports collectifs
est régulièrement manquée, malgré les discussions nombreuses portant
sur la mobilité romaine.
263
Quatrième partie
Coordination de la mobilité,
conflits et groupes de pression
Fourth Part
Coordination of mobility, conflicts and lobbies
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder:
Wohin gehört das Fahrrad?
Wulfhard Stahl, World Trade Institute (Universität Bern)
Abstract : Hermann Ortloff (1829-1920) and Eduard Bertz (1853-1931) represent
opposite positions regarding the status of bicycles circa 1900. Ortloff, an estab­
lished lawyer, stated his case in detail in his book Das Fahrrad im öffentlichen
Verkehr (The Bicycle in Public Traffic; 1899) and argued that the newly introduced
means of transportation should be allotted as little public space as possible. Bertz, a
writer and philosopher who was in favour of as much public space and freedom for
cyclists as possible, touched on the legal aspects in his Philosophie des Fahrrads
(Philosophy of the Bicycles; 1900). He nonetheless conceded that for cyclists’ vital
interests, certain rules and regulations were necessary. Juxtaposing both sides as
“conservative” or “progressive” may define the opposition between them, but does
not reflect the content. Although Ortloff’s views provoked a harsh reaction from
Bertz, they were less idealistic and turned out to be more relevant in day-to-day life
than Bertz’s who backed the new invention based on its promise.
Schon vor 1918 hatte die Koordination des Verkehrs eine Geschichte
– sie reichte, bezogen auf das Fahrrad, zurück bis ungefähr in die Mitte
der 1890er-Jahre. In diesen Jahren gewann mit dem Aufkommen des
Fahrrads als Massenverkehrsmittel das Problem an Schärfe, wie die
einzelnen Verkehrsteilnehmer sich auf der Strasse verhalten sollten.
Zwei Autoren seien im Folgenden vorgestellt, die auf anregend
unterschiedliche Weise zum Fahrradwesen im öffentlichen Raum
Stellung bezogen haben. Auf der einen Seite steht Hermann Ortloff
(1829-1920), Landgerichtsrat, ausserordentlicher Professor des Kriminalrechts, Verfasser gewichtiger, umfangreicher Rechtstexte, eine heute
267
Wulfhard Stahl
eher vergessene Koryphäe der Jurisprudenz des 19. Jahrhunderts 1; auf
der anderen Seite Eduard Bertz (1853-1931), Romancier, Philosoph,
Kritiker, gelegentlich erwähnt in Büchern über das nervöse Wilhelminische Zeitalter und zur Fahrradgeschichte 2. Berührung miteinander
hatten sie nur auf dem Papier, im Streit um die Verkehrswegerechte des
Fahrrads.
Ortloff ist der streng, konsequent und normativ argumentierende
Jurist, seiner Tradition verpflichtet, sich rundum absichernd, als könne
er haftbar gemacht werden für seine Herleitungen und Gesetzesentwürfe, denen er ein ganzes Buch widmet: Das Radfahren im öffentlichen
Verkehr 3. Bertz hingegen eignet ein gewisser Freigeist, er argumentiert appellativ und bleibt insofern kursorisch, als er die genannte
Problematik nur in zwei Kapiteln seiner Philosophie des Fahrrads
anschneidet 4. Es ist demnach ein ungleiches Paar, das uns hier begegnet
und dessen Positionen wir, aus historischer Distanz, zu Teilen nur zur
Kenntnis nehmen können.
Hermann Ortloff publizierte zwischen 1857 und 1905 mindestens zwanzig grössere
Arbeiten, darunter Titel wie Die Enzyklopädie der Rechtswissenschaft in ihrer gegen­
wärtigen Bedeutung (1857), Der fiskalische Strafprozeß (1859), Der Verkehr mit
Nahrungs- und Genußmitteln (1882) und Reform des Studiums der Rechts- und Staats­
wissenschaften (1887).
2
Eduard Bertz’ Œuvre ist schmal: Er verfasste drei Romane und – auf englisch – eine
Jugenderzählung, neben dem Fahrradbuch zwei weitere philosophische Abhandlungen
sowie drei grössere Arbeiten über den Dichter Walt Whitman. Biographische und bibliographische Details siehe in Stahl Wulfhard, «‘Denker Ihrer Art hat Deutschland mehr
als jemals nötig.’ – Eduard Bertz (1853-1931). Eine Spurenlese», Aus dem Antiquariat
NF 6, 2008, Nr. 3, p. 155-161.
3
Jena: Hermann Costenoble, 1899, VII + 224 p. Ein Vorläufer zu diesem Buch war
Ortloffs Artikel «Polizeiliche Regelung des Radfahrens», Zeitschrift für die gesamte
Staatswissenschaft, 1897, p. 437-472. – Als ergänzende Lektüre sei empfohlen
­Schumacher Johannes, «Das Recht des Radfahrers», in Lessing Hans-Erhard (Hg.),
Fahrradkultur 1: Der Höhepunkt um 1900, Reinbek bei Hamburg: Rowohlt Taschenbuch Verlag 1982, p. 475-538.
4
Die Erstausgabe mit 254 Seiten erschien 1900 im Verlag von Carl Reißner, Dresden
und Leipzig, und wurde nachgewiesen elfmal rezensiert; 1984 besorgte Reinhard
Kuballe, Osnabrück, einen photomechanischen Nachdruck von 50 Exemplaren; 1997
gab der Verfasser eine Neuausgabe heraus, erweitert um vier weitere Aufsätze von
Bertz zum Fahrradwesen sowie um ein Namenregister samt Nachwort (Paderborn:
Snayder Verlag, 265 p.); 2012 erschien eine vom Verfasser in Anmerkungen, Register
und Nachwort gründlich überarbeitete Ausgabe (Hildesheim/Zürich/New York: Georg
Olms, 306 p.). – Auszüge brachten BZ-Magazin [Freiburg i. B.], 8./9. Sep. 1984, p. 2;
Die Zeit [Hamburg], 15. Juni 1990, Nr. 25, p. 73; Wochenpost [Berlin], 15. Juli 1993,
Nr. 29, p. 34-35; Universitas. Orientieren! Wissen! Handeln!, Nr. 792, Juni 2012
(Schwerpunkt Mobilität), p. 57-73; Badische Zeitung [Freiburg i. B.], 11. August 2012,
Magazin, p. III.
1
268
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder: Wohin gehört das Fahrrad?
Ortloff ist der von Bertz am häufigsten genannte Autor und avanciert
damit zu dessen Lieblingsgegner bei der Klärung der Frage, wo und
wie sich RadfahrerInnen am besten bewegen sollten. Sein Buch sei
daher im Folgenden kurz skizziert.
In Teil I beschreibt Ortloff die herrschenden Verhältnisse im
Fahrradwesen. Dieser mit «Allgemeine Betrachtungen» überschriebene
Abschnitt ist in sieben Artikel unterteilt, die uns einen Einblick in seine
Wahrnehmung und Wertung gestatten.
Den Sieg, den das Fahrrad «über alle Fuhrwerke» errungen hat und
der sogar ein «internationaler» zu werden verspricht, räumt Ortloff in
Artikel I «Das Radfahren eine Verkehrsmacht» unumwunden ein. Er
anerkennt zudem die Vorteile des Fahrrads, das seinen Platz im Alltagsleben erobert hat, «als ein leicht handliches und zugleich elegantes
Fuhrwerk». Fürchtet er sich aber nicht auch ein wenig davor? Er
bedauert «die armseligen Fussgänger, denen es nicht vergönnt ist, sich
der dahin sausenden Flug- und Rollmaschine bedienen zu können» 5,
und bei den Radfahrern konstatiert er ein «unangemessenes Selbst­
bewusstsein, das oft nahe an Selbstüberschätzung grenzt» 6, ebenso
das «Machtbewusstsein einer Überlegenheit des Radfahrers, so lange
dieser auf dem Rade sitzt» 7. Diese Einschätzungen gleich am Anfang
seines Buches machen es der Diktion wegen nicht gerade leicht, sich
mit Ortloff anzufreunden.
«Eine Ausscheidung der Unvernünftigen und eine Fügung der
Vernünftigen in die allgemeine Verkehrsordnung ist durchaus zu verlan­
gen» 8 – dies das Fazit des mit «Die Radfahrerklassen» überschriebenen
Artikels II. Von denen gibt es zwei: die «Geschäfts- oder Berufsfahrer»
bilden die Hauptklasse 9 ; die «Sportfahrer, denen das Rad […] zum
Wohlbefinden, zur Erholung, zur Unterhaltung, zum nervenkitzelnden
Vergnügen dient – oft nur als ein vornehmes Spielzeug und Parade­
mittel» 10, sind die andere Klasse, unterteilbar noch in ernstzunehmende
Rennbahnwettfahrer und touristisch orientierte Radler versus solche,
die der «Bummelei» 11 frönen und sich durch Rücksichtslosigkeit und
Feigheit auszeichnen.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 8.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 8.
7
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 9.
8
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 18.
9
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 10.
10
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 11.
11
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 11.
5
6
269
Wulfhard Stahl
«Die Gefährlichkeit des Radfahrens für den Fahrer», so der Titel
von Artikel III, und damit die Notwendigkeit einer Ordnung liegt nach
Ortloff im Fahrrad selbst begründet: Zwei Räder, die auf nur punktgrossen Flächen Verbindung zum Erdboden haben, sorgen nicht eben
für Stabilität (von Wind- und Wegeverhältnissen ganz abgesehen);
«Rasanz oder Trieb- und Flugkraft der Maschine» 12 verleiten zu hoher
Geschwindigkeit, die wiederum nicht allen Fahrern zuträglich ist –
folglich soll die polizeiliche Fahrerlaubnis von einem ärztlichen Zeugnis
abhängig gemacht werden. Ortloff rekurriert in seiner Argumentation auf den Stand medizinischer Erkenntnisse, wie sie pro und contra
Radfahren seinerzeit von deutschen, englischen und französischen
Ärzten massenhaft publiziert wurden und auf die er in extenso verweist.
Fragen nach der charakterlichen Eignung zum Benutzen eines Fahrrads
(Übertreibung versus Selbstbeherrschung und Masshaltung sind Stichwörter der Diskussion) und grundsätzliche kulturelle wie auch sozialpolitische Erwägungen fallen dabei in eins. «Die Lust [am Radfahren]
überwiegt» 13 – medizinische Argumente prallen da genauso wirkungslos
ab wie ins Feld geführte ästhetische Überlegungen: so seien die Strampelbewegungen beim Radfahren, von hinten gesehen, schon beim Mann
unschön, bei der Frau sogar doppelt. Das Neue des Massenphänomens
Fahrrad, noch dazu, wenn es für das probate Mittel gegen die Nervosität
des Zeitalters gehalten wird, überwiegt und verführt dazu, real nachvollziehbare Gefährdungen zu negieren. Ortloffs mitunter kühl sezierender
Blick auf die Radlerszene mag nicht gerade sympathisch sein, sich
betulich anhören – und zu der Frage führen, inwieweit seine Sorge um
das körperliche Wohl der RadlerInnen eine aufrichtige ist. Sein Appell
an die Eigen- und an die gesellschaftliche Verantwortung kommt oft
genug im Gewand einer spitzfindigen, boshaften Bemerkung daher 14.
Das widerspricht nicht seinem fachlich hohen Informationsstand, wie
die zitierte Literatur und die Fülle an Beispielen belegen, erlaubt aber
Skepsis gegenüber seinen Beobachtungen und scheinbaren Sicherheiten,
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 21.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 32.
14
So heisst es z.B. bei Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 38, Fussnote: «Dem
scharfen Beobachter kann es nicht entgehen, wie sich bei vielen Fahrern beiderlei
Geschlechts dieses auf Unnahbarkeit und Nichterreichbarkeit sich stützende Selbst­
bewusstsein gerade im Strassenverkehr auf den Gesichtern bemerkbar macht. Ein an
brutale Herrschsucht erinnernder Zug macht auf vielen Gesichtern, selbst der Fahre­
rinnen vom emanzipierten Schlage, sich erkennbar als Verräter der Psyche, zumal bei
Gesellschaftsfahrten, wenn der Korporationsgeist dem einzelnen zu Kopfe steigt. Auf
die Frauenseele wirkt der Radfahrersport sicher n icht vorteilhaft.»
12
13
270
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder: Wohin gehört das Fahrrad?
wenn er z.B. behauptet, die «zur Manie werdende Radlerlust» habe dazu
geführt, «dass sie gar manche Stunde und Tage zu ihrer Befriedigung
erfordert, die sonst der Arbeit gehörten» 15. Demnach werde schlicht
«weit weniger gearbeitet […] Hier läge ein volkswirtschaftlicher Grund
vor, das Sportfahren in engere Grenzen zu bannen, was besonders für
eine polizeiliche Beschränkung des Sportbetriebes im öffentlichen
Verkehr und für eine starke Heranziehung der Sportfahrer [im Gegen­
satz zu den Berufs- und Geschäftsfahrern] zur Besteuerung spräche» 16.
Wenn Ortloff darüber zu einer Radfahrerordnung gelangt, deren
Vorschriften nur als eine Erfahrungen verarbeitende Nachschrift zu
verstehen sind, so ehrt ihn das, trotz seines paternalistisch-überheblich
vorgetragenen Anliegens. Dass seine Vorsicht und Voraussicht dem
neugewonnenen Freiheitsgefühl beim Radfahren, der «griserie allègre
de la vitesse» 17, entgegensteht, ist die Kehrseite der Medaille.
In Artikel IV erfahren wir, wie sich «Die Gemeingefährlichkeit des
Radfahrens im öffentlichen Verkehr» darstellt. Was Ortloff dazu anhand
einer Vielzahl in- und ausländischer Polizeiberichte und Zeitungsmeldungen über Regelverstösse, Karambolagen und schwere Unfälle
eindrücklich belegen kann, beweist den erschreckend niedrigen Stand
der «Cyklisation» [= Cycle plus Zivilisation], der ja angeblich so positiv
mit der Einführung des Fahrrads einhergegangen sei. Dessen rasante
Zunahme beispielsweise allein in Berlin um fünfzig Prozent innerhalb
eines Jahres (von 33’000 Fahrrädern im Jahr 1896 auf 50’000 1897)
macht eine Häufung von Konflikten zwischen den Verkehrsteilnehmern
geradezu zwangsläufig; die Strassenverhältnisse (Sandpisten, Kopfsteinpflaster) tragen ein Übriges zur Unfallstatistik bei. Die Zeit für Leute
wie Ortloff scheint damit gekommen zu sein – die Zeit ist reif für eine
Radfahrerordnung, und wenn es auch noch keine internationale sein
kann, dann zumindest eine interterritoriale, das heisst eine das Deutsche
Reich umfassende.
Artikel V macht «Radfahrer-Abgaben» zum Thema. Auch von
Gebühren und Steuern ist die Rede 18. Letztere treffen Ortloffs Anliegen
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 38.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 39-40.
17
Zola Emile, Paris [dritter Band der Romantrilogie Trois Villes] (1898), 4. Buch,
3. Kapitel (hier nach Edition presentée, établie et annotée par Jacques Noiray, Editions
Gallimard, 2010, p. 451 [= folio classique 3735]).
18
Vgl. dazu Ortloff Hermann, «Vorschläge neuer Reichssteuern», Finanz-Archiv.
Zeitschrift für das gesamte Finanzwesen, 1902, 2. Bd, p. 220-247 [besonders ab p. 224:
Abschnitt II: Eine Reichssteuer der Rad- und Automobilfahrer]. Siehe auch H
­ ochenegg
Adolf W. K., Radfahrsteuer oder nicht? Leipzig: Werner 1898, 53 p.
15
16
271
Wulfhard Stahl
am besten: steuern nämlich möchte er den Strassenverkehr, der zunehmend gefährlicher werde und deshalb «besondere Sicherheitsmassre­
geln» 19 nötig mache. «[D]ie Behördenthätigkeit für Feststellung der
zum Gebrauch erforderlichen Fähigkeit», eine «Erlaubniserteilung» 20
also, solle demzufolge mit einer Gebühr abgegolten werden; gleiches
beträfe die jährlich durchzuführende Radkontrolle. Die Sportfahrer,
die nach Ortloff den grössten Teil aller Radfahrer ausmachen und
den öffentlichen Verkehr am stärksten behindern, könnten mit einer
Vergnügungssteuer belegt werden. Verkehrssicherheit hat Priorität;
ihr gilt auch der Gedanke, ob nicht «eine Personalsteuer einzurichten
wäre, die sich als Gebrauchssteuer für einen dem Fahrer vorteilhaften
Gebrauch eines Verkehr- oder Sportmittels, dem übrigen öffentlichen
Verkehr gegenüber aber als eine Entschädigung für die Einbusse an
der bisherigen Verkehrssicherheit und als Schutzmittel gegen eine noch
weitere Ausbreitung des Fahrsports» rechtfertigen liesse 21. Andere
Länder kennen ähnliche Steuer(ungs)systeme – Ortloff, der Frankreich,
Holland, Italien, Belgien nennt (Russland kann noch ergänzt werden),
argumentiert also vor einem abgesicherten Hintergrund 22.
Um «Selbsterziehung zum ordnungsgemässen Fahren» geht es in
Artikel VI. Diese sei von «Grundregeln der Vernunft und der dieser
entsprechenden Gesetzgebung» 23 geleitet und setze zudem ein Rechtsbewusstsein der Verkehrsteilnehmer für die Einhaltung der Strassenordnung voraus – dies aus eigenem Sicherheitsinteresse wie dem anderer. Je
stärker der gute Wille, je fester der Charakter, «desto weniger bedarf es
einer Einwirkung zwingender Ordnungsregeln auf Wollen und Handeln»
der Lenker 24. Die Berechtigung zur Strassennutzung ist durch Verpflichtungen begrenzt: Die Eigenarten des Fahrrads – G
­ eräuschlosigkeit
dank der Luftreifen, Schnelligkeit – gemahnen zu b­ esonderer Vorsicht
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 61.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 62.
21
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 64.
22
Vgl. Harbulot Maurice, «Das Budget Frankreichs für das Jahr 1893 und die
Rechnung von 1891», Abschnitt II.1. «Die Velocipedsteuer», Finanz-Archiv. Zeitschrift
für das gesamte Finanzwesen, 1893, 1. Bd., p. 216-217; Mühling C., «Das italienische
Gesetz über die Velocipedsteuer. Vom 22. Juli 1897», Finanz-Archiv. Zeitschrift für das
gesamte Finanzwesen, 1898, 1. Bd., p. 477-481; Sodoffsky Gustav, «Russisches Gesetz
vom 20. Januar 1903 [a. St.] über die Einführung einer Steuer von den Velocipeden
und Automobilen zu Gunsten der Städte», Finanz-Archiv. Zeitschrift für das gesamte
Finanzwesen, 1903, 2. Bd., p. 383-401. Siehe auch «Die Fahrradsteuer in Frankreich»,
Statistische Korrespondenz, 1899, Nr. 4, 28. Januar 1899, p. 2.
23
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 80.
24
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 80.
19
20
272
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder: Wohin gehört das Fahrrad?
und Rücksichtnahme, um ein Gefühl der Unsicherheit vor allem bei
Fussgängern zu vermeiden. Es geht schlicht um «die Gewinnung eines
Radfahrercharakters» 25, der sich durch Selbstbeherrschung und Selbstbeschränkung auszeichnet und sich damit wohltuend abgrenzt von
deutschen Rüpeln, französischen pédards, englischen scorchers. Als
erzieherisch hilfreich haben sich in dieser Hinsicht Vereine erwiesen.
Ihren Statuten gemäss sorgen sie für die Erhaltung der Disziplin ihrer
radelnden Mitglieder und helfen ihnen unter anderem dabei, «eine Ehre
darin zu suchen, gegen Fahrvorschriften nicht zu verstossen» 26 – es ist
dies eine «Selbstpolizeiübung» 27 oder, besser, Selbstverwaltung, die zur
«gegenseitigen Eingewöhnung» aller Verkehrsteilnehmer, zum «gegen­
seitigen Ineinanderfinden» 28 und damit zum Frieden auf der Strasse
massgeblich beiträgt. Als Eldorado der Radfahrer, so das Berliner
Tageblatt, könne diesbezüglich Dänemark gelten.
Abschliessend erwägt Artikel VII «Eine allgemeine Radfahrer-­
Ordnung». Erstrebenswert ist eine solche, orientiert am Weltpostverein, «als internationale, ja sogar als Welt- oder Erdfahrordnung» 29,
doch Ortloff ist Realist genug, um sich auf das nächstliegende Ziel zu
konzentrieren, «eine einheitlich gleiche Fahrordnung» für das Deutsche
Reich 30, die an die Erfahrungen in Städten und Provinzen anknüpfen
könnte. Einen Aspekt betont Ortloff besonders: «Angesichts des inter­
nationalen Fahrtourismus und des täglichen Grenzverkehrs mit dem
Fahrrade erscheint es […] geboten, eine einheitlich gleichmässige
Fahrordnung im Deutschen Reiche zu haben, in der auch für Ausländer
das Legitimations- und Zollwesen geregelt werden soll.» 31
Die «Sicherung des öffentlichen Verkehrs gegen Störungen» 32 bleibt
das Hauptanliegen, das alle Gedanken, Argumente und Beispiele Ortloffs
bestimmt, zu der aber eingestandenermassen Folgendes in Konflikt
steht: «Das Streben nach Befreiung von polizeilichen Beschränkungen
geht psychologisch erklärbar aus der Natur der Bewegungsfreiheit und
Flugkraft des Fahrrades hervor, deren sich jeder Fahrer gar bald bewusst
wird, sobald er das Rad beherrschen gelernt hat.» 33
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 83.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 85.
27
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 85.
28
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 86.
29
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 94.
30
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 94.
31
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 99.
32
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 95.
33
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 96.
25
26
273
Wulfhard Stahl
Danach folgt der «Entwurf einer Deutschen allgemeinen
­ adfahrer-Ordnung mit Erläuterungen». Er macht mit 111 eng gesetzten
R
Seiten den Teil II des Buches aus. In 33 Paragraphen, mit Erläuterungen
und unzähligen Beispielen aus dem In- und Ausland untermauert, geht es
detailliert um «Allgemeine Bestimmungen für den Fahrrad-­Gebrauch»,
«Die einzelnen Fahrradvorschriften» und «Besondere Bestimmungen
für den Fahrzeug-Gebrauch in öffentlichen Diensten».
Wie nimmt sich dagegen nun Bertz aus? Er hat es schwer, in seiner
Philosophie des Fahrrads einen inhaltlich vergleichbaren Schwerpunkt zu setzen, allein schon des Aufbaus und des grossen Umfangs
seines Buches wegen. Er kennt Ortloffs Werk und geht in zwei der zehn
Kapitel (Kap. 9: «Die Feinde des Fahrrads»; Kap. 10: «Ein werdendes
Recht») ausführlich darauf ein, aber anerkennt er es auch? Es drängt
sich der Eindruck auf, dass der unterschiedlichen Sichtweise auf das
Thema ein klassischer Generationenkonflikt zugrunde liegt. So sagt
Bertz zum Beispiel: «Ortloff und Leo 34, die beiden typischen Vertreter
des Vorurteils gegen den Radsport, sind alte, alte Männer, und so haben
sie Anspruch auf unsere Nachsicht. Wir hoffen auf die Jugend.» 35 – Er
selbst ist da 47, Ortloff 71 Jahre alt. Zudem wendet er gegen Ortloff
ein: «Nur eine völlig kritiklose, unwissenschaftliche, von der Leiden­
schaft getrübte Betrachtungsweise kann den Vorwurf der Gemeinge­
fährlichkeit erheben.» 36
Man mag einiges gegen Ortloffs redundante Argumentation
vorbringen, ihm gar Verwaltungsmanie unterstellen, doch gerade in
punkto Gemeingefährlichkeit geht Bertz’ Gegenvorwurf nicht auf, sagt
er doch nur wenige Zeilen vorher: «Gefährlich kann das Rad unter
Umständen sein, wenn es von Stümpern oder Flegeln vorschriftswidrig
gehetzt wird.» 37
Und weiter: «Dieser Übelstand könnte leicht abgewendet werden,
wenn Eltern, Lehrer, Meister sich’s angelegen sein ließen, ihre
­Pflichtbefohlenen in den Regeln des öffentlichen Verkehrs zu unter­
weisen, ehe sie ihnen das Radfahren gestatten.» 38
D.i. Leo Richard, ein Arzt, dessen Broschüre Das weibliche Radeln. Eine wohlmei­
nende, populär-medicinische Besprechung für Eltern, Erzieher etc. 1899 erschien.
35
Bertz Eduard, Philosophie des Fahrrads. Erweiterte Neuausgabe, hg. von Wulfhard
Stahl, Hildesheim/Zürich/New York: Georg Olms, 2012, p. 187.
36
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 177.
37
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 177.
38
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 178.
34
274
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder: Wohin gehört das Fahrrad?
Bertz, der mit der Philosophie des Fahrrads auch ein Erziehungstraktat verfasst hat 39, stimmt somit nolens volens dem Ortloffschen
Plädoyer zu, durch Vorschriften und Fahrerlaubnisse die Gefährdung vor allem der Fussgänger als schwächste Verkehrsteilnehmer
zu mindern. Deren Recht auf Sicherheit und Unversehrtheit ist für
Bertz unumstritten, gleichwohl nimmt er sie in die Pflicht zu erhöhter
Aufmerksamkeit und zu Wohlverhalten auf der Strasse. Wir sehen
ihn quasi auf dem hohen Ross – oder hier besser: Rad – sitzen, wenn
er feststellt: «Die Radfahrer unserer Zeit sind noch immer Pioniere.
Sie erkämpfen der kommenden Generation die Anerkennung, die
ihr gewiß ist, sobald die Erkenntnis durchdringt, daß das Recht
des Fahrrads mit dem wohlverstandenen Interesse der Gesamtheit
zusammenfällt.» 40
Das Fahrrad kommt mit Bertz’ Worten als «Friedensstörer in die
Welt» 41, denn es mischt alte, liebgewonnene Verhältnisse auf und repräsentiert die fortgeschrittene Entwicklung. Was kann da anregender,
befreiender, beflügelnder sein als der «fröhliche Rausch der Schnel­
ligkeit» 42 ? Genau hier setzt Bertz an, wenn er die psychologische und
die kulturelle Bedeutung des Radfahrens betont und sich gegen die
von Ortloff angeblich intendierte Bevormundung und Einengung der
neugewonnenen Bewegungsfreiheit verwahrt. Letzterer hinterlässt den
Eindruck, als sei er bei aller fachlichen Aufgeklärtheit schlicht überrumpelt vom Zeitgeist, von den freigesetzten Energien auch des Marktes,
die sich im Fahrrad manifestieren, und befürworte deshalb Restriktionen; Bertz dagegen ist die grundsätzliche, wenn auch nicht unkritische
Begeisterung über das neue Massenverkehrsmittel anzumerken. Bei
ihm frönen die Leute ihrer Bewegungslust, wenn sie ihre Maschinen
«tummeln». Seine eigenen Tagebucheintragungen von einer Radtour
sind sinnlich und decken sich mit zeitgenössischen Berichten über
Siehe Stahl Wulfhard, «Philosophy of the Bicycle – An Educational Treatise of
1900», in Ritchie Andrew, Sanderson Gary (Hg.), Cycle History. Proceedings of the
International Cycling History Conference, Paris, France, May 2011. Cheltenham:
Cycle History (Publishing) Ltd, 2012, p. 241-245.
40
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 169.
41
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 176.
42
Siehe auch Fussnote 17. In der Ausgabe Leipzig: Verlag Sammlung Dieterich 1991
(Übersetzung Irmgard Nickel), p. 378, heisst es im Zusammenhang: «Da überkam sie
infolge der Geschwindigkeit eine fröhliche Trunkenheit, das berauschende Gefühl des
Gleichgewichts, während man in blitzartigem Tempo dahinfährt, so daß man fast außer
Atem gerät.» Bertz zitiert nach der ersten deutschen Übersetzung (von A.[dele] Berger),
in neun Teilen erschienen in: Aus fremden Zungen. Halbmonatsschrift für die moderne
Roman- und Novellenliteratur des Auslands, 1898, Bd. 1.
39
275
Wulfhard Stahl
Fahrradausflüge. Kleinlich mutet vor diesem Hintergrund seine Attacke
auf Ortloffs Buchmotto an – dessen «Allen zum Heil!» lautete demnach
besser «Allen Nichtradlern zum Heil, den Radfahrern aber zum
Unheil!», denn das entspräche der hinlänglich bewiesenen Haltung des
Autors. Polemisch erfrischend hingegen lesen sich Bertz’ Gedanken,
in Erwiderung auf Ortloff, zur «Benutzung der Chausseebankette»,
technisch korrekt: «Materialienbankette». Diesen Sandstreifen zu
befahren sei des Rades «Naturrecht, vorausgesetzt, daß ihm nicht noch
bessere, eigene Wege zur Verfügung stehen.» 43
Der Grundkonflikt mit den Fussgängern, die sich als «berechtigte
Besitzer der Bankette» gesehen hatten und denen es gelungen war,
mithilfe der Presse und des Gesetzgebers die Radfahrer auf die Chaussee
zurückzudrängen, ist somit skizziert. Ortloff wiederum hatte in seinen
aus Verordnungen einzelner deutscher Länder gespeisten Ausführungen
konstatiert: «Alle Bürgersteige, Bankette, Promenaden- und Fusswege,
inner- und ausserhalb von Ortschaften sind vom Be- und Durchfahren
ausgeschlossen.» 44
Bertz Eduard, Philosophie…, p. 198 bzw. 199.
Ortloff Hermann, Das Radfahren…, p. 170. § 18 seines «Entwurfes», der Bertz’
Unmut erregte, lautet vollständig: «Nur die für Fuhrwerke bestimmte Fahrbahn
(Fahrdamm, Strassenweg) darf befahren werden; ebenso ist ein Fahrrad nur auf dieser
an der Hand zu führen. Alle Bürgersteige, Bankette, Promenaden- und Fusswege, innerund ausserhalb von Ortschaften sind vom Be- und Durchfahren ausgeschlossen. Das
Aufsteigen auf Fahrräder und das Absteigen davon darf nur auf der Fahrbahn erfolgen;
aus und nach den Grundstücken sind Fahrräder quer über dazwischenlaufende Fussgän­
gerwege zu führen. Etwa für das Radfahren besonders hergerichtete Fahrbahnen oder
dazu besonders überlassene Wege sind von Radfahrern allein zu benutzen und auch
Fussgängern verboten, ausser bei einem notwendigen Überschreiten derselben.
Das Befahren von Rinnsteinen (Gossen) längs der Bürgersteige ist untersagt. Auch
muss das nicht abgegrenzte Bankett der Landstrassen in einer Breite von mindestens
zwei Metern von seinem Rand her frei vom Fahren gelassen werden.»
Es folgen elfeinhalb dicht gesetzte Seiten mit Erläuterungen. – Einen Vorläufer zu
Ortloffs «Entwurf» können wir entdecken in einer «Polizei-Verordnung betreffs Velocipedfahrens in Berlin» vom 24. März 1884. Dessen § 1 nennt knapp vierzig Strassen im
Stadtzentrum, die zu befahren verboten ist; § 2 legt das Mindestalter für das Radfahren
auf 16 Jahre fest und untersagt «Wettfahrten, Umkreisen von Fuhrwerken und ähnliche
Handlungen, welche geeignet sind, den Verkehr zu stören oder Pferde scheu zu
machen»; § 3 bestimmt: «Uebertretungen vorstehender Bestimmungen werden mit
Geldbusse von drei bis dreissig Mark, im Falle des Unvermögens mit verhältnismässiger Haft bestraft.» (laut Abbildung bei Maes Jochen, Fahrradsucht, Köln: DuMont,
1989, p. 181).
43
44
276
Eduard Bertz contra Hermann Ortloff – oder: Wohin gehört das Fahrrad?
Wird damit der «Radfahrerkrieg» heraufbeschworen,
von dem Bertz spricht?
Beide Autoren, so viel kann zusammenfassend und mit wohlwollender Distanz festgehalten werden, ergänzen einander. Wohin das
Fahrrad gehört, ist klar: auf gute, gesicherte Wege und in verantwortungsbewusst lenkende geschulte Hände. Für das Erste zu sorgen ist
eine öffentliche, behördliche Aufgabe, für das Zweite, eine private,
persönliche. Ortloffs Sicht auf die Dinge ist, allein wegen ihrer
­juristischen Detailversessenheit und Regulierungswut, Zumutung und
lohnende Auseinandersetzung zugleich; die von Bertz ist nicht frei von
Idealismus, dafür weniger erdenschwer, ausgesprochen wohltuend –
und zuversichtlich: «Das Alte stürzt, es ändert sich die Zeit» 45.
Abschliessend sei eine kurze Bemerkung zum heutigen Verhalten
zweirädriger Verkehrsteilnehmer gestattet: Das Chaos abgestellter
beziehungsweise schlicht deponierter Fahrräder am Berner Hauptbahnhof, Ausgang West, nicht erst im Jahr 2013, lassen den Verfasser
nur enttäuscht oder wütend zu Ortloff flüchten oder aber mit Bertz
hoffen auf weniger egoistische, rücksichtsvolle «Pioniere […] der
kommenden Generation».
Schiller Friedrich, Wilhelm Tell, IV, 2, Vers 2425, zitiert in Bertz Eduard,
­Philosophie…, p. 203.
45
277
Road Safety and Class Conflict in Britain,
1926-1935 1
Peter Cox, University of Chester
Abstract : Increasing conflict over the use of road space in Britain during the 1930s
can be seen in the rapid growth of casualty figures. In particular, concerns were raised
over the rising number of cyclists’ deaths as part of the overall numbers. Reports and
comments in Parliament, coroners’ reports and newspapers placing responsibility for
road safety on non-motorised road users led to considerable reaction from cycle users
and, ultimately, to the formation of a vociferous campaign group uniting previously
disparate factions and interests from cycle users, sporting clubs and industry.
Drawing on contemporary sources, in particular on the coverage of the conflict by
the Cyclists’ Touring Club, and on parliamentary debate surrounding the 1930 and
1934 Road Traffic Acts, this paper examines the discursive production of cyclists as
a previously invisible body of road users. It considers the complexities of the conflict
over road safety and the location of responsibility for road safety in terms of class,
representation, power and status of the groups of actors in relation to the governance
of road space. The arguments over legitimacy and safety produced by the conflicting interests of different road user groups articulated in this period continue to have
significant bearing on transport policy and practice today. This is especially the case
given recent renewed interest in promoting cycling as a sustainable mode of urban
mobility and the often vociferous debate between advocates of separate infrastructure
and supporters of integrated road use.
A reworked version of this paper is published as Cox Peter, “’A denial of our boasted
civilisation’: Cyclists and Conflicts over Road Use in Britain, 1926-1935”, Transfers 2
(3), 2012, p. 4-30.
1
279
Peter Cox
Increasing physical conflict over the use of road space in Britain
during the late 1920s and early 1930s is attested by the rapid growth
of casualty figures (see Table 1). In particular, concerns were raised
over the rising number and proportion of pedestrian and cyclists’
deaths and injuries as part of the overall casualty figures. Reports and
comments in Parliament, coroners’ reports and newspapers all sought to
place responsibility for road safety on non-motorised road users – the
victims – and led to considerable reaction from cycle users and pedestrians and, ultimately, to the formation of a vociferous campaign group
uniting previously disparate factions and interests from groups of cycle
users, sporting clubs and industry. The title quotation of this paper is
but one response to the suggestion that cyclists’ safety would best be
served by removing them from the highways onto segregated paths.
The arguments over legitimacy and safety produced by the conflicting interests of different road user groups articulated in this period
continue to have significant bearing on transport policy and practice
today – especially given recent renewed interest in promoting cycling
as a sustainable mode of urban mobility – and on the relation of the
cycle user to other mobility practices, together with the often vociferous
debate between advocates of separate infrastructures and supporters of
integrated road use.
Drawing on contemporary sources, in particular on the coverage of
the conflict by the Cyclists’ Touring Club (CTC), and on parliamentary
sources, this chapter examines the discursive production of cyclists as a
previously invisible body of road transport users and the way that they
emerge as a sectoral community with agency, focusing on the period
from 1926, when detailed transport accident data was first compiled,
to 1939. Further, it considers the complexities of the conflict over road
safety and the location of responsibility for road safety in terms of class,
representation, power and status of the groups of actors in relation to the
governance of road space. These considerations are discussed within the
framework of the pressure for cycle users to be given separate spaces
and paths within mobility systems and with regard to the appropriate
location of responsibility for mobility safety, especially as represented
in the historic debates as to whether cyclists should be required to carry
rear lights.
The paper proceeds using a loosely chronological frame, combining
input from recorded discussions in Hansard and from the monthly CTC
Gazette. Broader discussion of the implications of the history is held in
the concluding sections.
280
Road Safety and Class Conflict in Britain
The cyclist, the law and the road in Britain
– early years
In 1877, during discussion of the “Locomotives on Common Roads
Bill”, appears perhaps the earliest entry of the bicycle in UK parliamentary annals. Its advent was not an auspicious one, the issue being
raised by one Colonel Chaplin who opined that, “bicycles were really
more dangerous than locomotives” 2. Although it was considered that
the rapidity of technological change in all forms of road transport made
legislative restrictions of any kind unfeasible, the tenor of the discussion
was established for considerable years to come. The following year,
in the “Highways and Locomotives Amendment Act 1878”, bicycles
became subject to regulation only inasmuch as they were required to
carry a bell and, after dark, “a clear light” in order to give notice of
approach to any other road user (i.e. a front light) 3.
During the subsequent decade, as bicycles and tricycles were seen
to move from a status as “toys, and comparatively little used”, to being
conceived as more practical vehicles, authority was granted to Corporations (Local Authorities) to deal with them under their powers “to
control nuisances” through local by-laws 4. However, this resulted in a
bewildering variety of inconsistent legislation between districts. In order
to clarify matters and to provide uniform regulation, and after considerable lobbying through the representations by the Cyclists’ Touring
Club (hereafter CTC; founded 1878 though initially planned in 1876),
an amendment was passed whereby, “bicycles, tricycles, velocipedes,
and other similar machines, are hereby declared to be carriages within
the meaning of this Act and the Highway Acts” 5. This legally enshrined
the right of the bicycle to the highway, subject to the requirements of
all vehicles to carry a lamp after dark and to give sufficient warning of
approach, by bell or whistle, to any other road user. Proposals to tax
or register bicycles were not adopted. This definition of the bicycle as
a carriage – with the same and equal right to use the road as any other
vehicle – was to become hereafter the fundamental basis of both legislation and argument over the status and place of the bicycle on British
roads; an argument with important consequences in later years.
Chaplin HC Deb 20 June 1877 vol 235 c39. All Parliamentary debates are referenced
in standard Hansard notation (HC = House of Commons or HL = House of Lords, Deb
= Debates; Date; Volume; Location).
3
See HC Deb 09 July 1878 vol 241 cc1078-8.
4
Dorington HC Deb 17 July 1888 vol 328 cc1546-94
5
Dorington HC Deb 17 July 1888 vol 328 cc1546-94.
2
281
Peter Cox
In the 1890s, as the technology of the “ordinary” (high wheeler)
bicycle was displaced by the innovation of the “safety” (diamond
frame), bicycles appear in the parliamentary record repeatedly
associated with “recklessness” and as “a menace”, accompanied by
calls for further regulation and registration 6. Even advances in technology were interpreted as potential threats – the pneumatic tyre being
decried by Lord Churchill for its capacity to allow the bicycle to “come
silently and stealthily upon one” 7.
Despite the apprehension of members of both Houses, registration
of bicycles was repeatedly deemed impracticable. Growing problems
linked to motor vehicle use came under scrutiny in the 1913 Select
Committee on Motor Traffic, but their deliberations failed to result in
legislation. The general laissez-faire policy towards all road use continued until the introduction of lighting regulations during the First World
War, under the auspices of the Defence of the Realm Act (DORA),
which mandated the carrying of a rear light by cyclists. This ruling was
maintained until annulment in August 1920. The rescinding of the legislative requirement for rear lights was not without controversy, however.
Just as the portrayal of cyclists as a reckless peril dominated discussion
in the 1890s, so the issue of rear lighting came to dominate through the
1920s and beyond, framing an entire set of debates around road use,
safety and responsibility.
Initial advocacy for the carrying of a rear light was framed in
terms of “recommendations made by coroners that rear lights on
bicycles are essential as a protection for the cyclist » 8. Interventions
by several Chief Constables, in the form of the issuing of posters,
“calling upon pedal-cyclists to carry rear lamps or reflectors on
their bicycles”, prompted reaction by both the CTC and the National
Cyclists’ Union (NCU) 9. Representing touring and racing cyclists
respectively, these bodies were quick to respond to the imposition of
rear lights with a number of objections. The first ground was that of
practicality. The technology available for lighting during this period
was neither reliable nor universal. Carbide (acetylene gas) lamps and
electric (battery) lamps appeared side by side in trade catalogues,
HC Deb 06 May 1892 vol 4 cc275-6; HC Deb 02 May 1893 vol 11 cc1725-6; HC
Deb 28 May 1894 vol 24 cc1409-10; HC Deb 24 July 1894 vol 27 cc796-7; HC Deb 18
February 1896 vol 37 cc564-5; HC Deb 24 February 1896 vol 37 cc946-7.
7
Churchill HC Deb 28 May 1894 vol 24 cc1409-10.
8
Holbrook HC Deb 01 May 1923 vol 163 c1163.
9
Thomson HC Deb 25 June 1925 vol 185 cc1687-8.
6
282
Road Safety and Class Conflict in Britain
making the previous generations of oil lamps obsolescent. Yet neither
technology was yet fully reliable, and, being rear facing, would not
be visible to the user when in use. If the continued functioning of
lights could not be reasonably guaranteed, it could not reasonably be
expected that the cyclists should be liable and reliant on them for
legal protection.
The second ground for questioning the requirement was much
more fundamental. If the cyclist was expected to carry a rear light for
their own protection, then the whole element of responsibility for road
safety was being transferred from those posing the risk to their potential victims. Rear lamps could only indicate the presence of a cyclist to
another – presumably faster and more powerful – road user: i.e. a motor
vehicle. Instead of the negotiated interaction on the principle that steam
gives way to sail, compulsory carriage of rear lights indicated accession
to the principle of “might is right”. Further, while the lighted cyclist
might be more visible, the risk was that pedestrians and other road users
not covered by the legislation would become even more vulnerable to
the motorist. Compulsory lighting for all vehicles in order to see ahead
(and therefore be able to take responsibility for their interaction with
other road users) had been supported by the CTC from its early days,
and had been behind earlier attempts to legislate in this area, and so the
position was consistent 10.
The issues at stake were not simply those of principle on the roads.
What was becoming clear, even within the pages of the historically
relatively genteel and conservative CTC Gazette, was that there existed
a rapidly growing class divide between different sectors of the travelling
public. The arguments were vividly framed in an article from January
1926, describing the negative impacts of car use under the title of “This
Motoring Age”:
“This last-but-one locomotive invention would have been generally
inoffensive, and useful enough, on a road system devised for its
energies. Instead of that… monied interests and ‘the spirit of the age’
have successfully backed the monsters against… all other opposi­
tions: and thus things are as they are with us. We are killed by our
thousands a year primarily because our rulers (pledged to foster the
general well-being) lacked imagination and foresight and welcomed
a new industry with the one-sided, blind enthusiasm of the wealthy
See Plowden William, The Motor Car and Politics in Britain 1896-1970, London:
The Bodley Head, 1971, p. 233 ff for a valuable overview of developing legislation.
10
283
Peter Cox
class concerned in its development. Doubtless they meant well for
the community as a whole, but what a pity they knew no better.” 11
In its foundation, the CTC had been a middle class, bourgeois society
formed to assist its members in the expanding tourism market, but by
the latter part of the 1920s, although many core members remained
from the earlier generation, the profound social changes of the period
had clearly not left the club unaffected.
The General Strike as a mobility conflict
Conflicts over class, mobility and the roads came into stark conflict
during the events of the general strike of May 1926. Safeguarding transport provision against disruption had been seen as a key problem area
for successive post-war governments seeking to manage an increasingly organised and self-determining labour force. Union membership
had almost doubled during the period of the First World War, with a
total membership of just over 8 million by the time the Representation of the People Act of 1918 came into effect in the elections of
December that year. Government defence against union militancy was
initiated after the vulnerabilities revealed by the transport strikes of
1911 and consolidated legislatively under the provisions of the Defence
of the Realm Act (DORA). Following the railway strikes of 1919, the
inter-departmental Governmental organization established to deal with
increasing industrial militancy was renamed as the Supply and Transport Committee – ­reflecting its antagonism to the “triple alliance” of
union interests represented by the combined strength of railwaymen,
transport (especially dockers’) and miners’ unions 12. The committee
was empowered by the Emergency Powers Act of 1920 (ch. 55 10 and
11 Geo 5), effectively the peacetime extension of the wartime DORA
regulations, enabling it to plan for the maintenance of “the essentials of
life”, defined as the “distribution of food, water, fuel… light… [and]…
the means of locomotion”. As Maguire indicates, “If railway workers
were involved in a dispute, the only way to move vital supplies within
the country would be by road. Consequently, the Haulage Committees
Edwardes C., “This Motoring Age”, CTC Gazette, vol XLV No 1, Jan 1926, p. 4-5.
All references to the CTC Gazette are hereafter referred to simply as Gazette; year;
page, except where specific headline or article title is provided.
12
See Desmarais Ralph H., “The British Government’s Strikebreaking organization
and Black Friday”, Journal of Contemporary History 6 (2), 1971, p. 112-117; Maguire
Richard, “Reassessing the British Government’s Emergency Organisation on ‘Red
Friday’, 31 July 1925”, Contemporary British History 18 (1), 2004, p. 1-24.
11
284
Road Safety and Class Conflict in Britain
were the veritable core of the organization” 13. The Ministry of Transport during this period, “was preoccupied with railroad problems
and dominated by men with railroad backgrounds”; thus the roads,
road haulage and private motoring came to epitomise an alternative
to railways and tramways, whilst being untainted by the increasingly
proletarian image and association of the bicycle 14.
It should be noted that the then Home Secretary, William JoynsonHicks, overseeing the preparations of the Supply and Transport Committee,
was – perhaps unsurprisingly – also a founder member of the Automobile Association, its chairman from 1908-1923, and a strong advocate of
the rights and privileges of motorists, both inside and outside of parliament. He had been proposing legislation on the compulsory carriage of
rear lights by cyclists since 1922 15. The motorist at this point in time
was not simply another class of road user but typified “the prosperous
upper-middle professional class” of which Joynson-Hicks was himself
an archetypal example 16. Promotion of the rights of the private motorist,
alongside private enterprise motor haulage, represented not only a means
of bypassing, or even subverting, the power of the railways over the transport sector, but also a means to avoid problems of growing unionisation.
Even large road haulage firms’ depots did not present unified workplaces
in which large numbers of workers shared the same space – factors conducive to large scale unionisation and workers’ militancy. Impedances to the
motorist, in whatever form, thus emerged as not simply an inconvenience,
but part of a much greater threat of class conflict – a challenge to the right
of the ruling class to rule. Concern over physical mobility was mirrored
by fears of social mobility and class mobilisation. In consequence, state
power was organised to reinforce class power.
During the strike, with public transport paralysed, motor transport
was seen as the means by which the country could be kept mobile 17.
Maguire Richard, “Reassessing the British Government’s Emergency Organisation…”, p. 7.
14
Dunn James A., “The Importance of Being Earmarked: Transport Policy and
Highway Finance in Great Britain and the United States”, Comparative Studies in
Society and History 20 (1), 1978, p. 29-53, p. 36.
15
Plowden William, The Motor Car…, p. 241.
16
Clayton Huw, “The Life and Career of Sir William Joynson-Hicks, 1865-1932:
A Reassessment”, Journal of Historical Biography 8, 2010, p. 1-38, p. 13. For a more
extensive discussion see O’Connell Sean, The Car In British Society: Class, gender
and motoring 1896-1939 Manchester: Manchester University Press, 1998, 208 p.
17
See e.g. Mason A., “The government and the general strike, 1926”, International
Review of Social History 14 (1), 1969, p. 1-21; Farman, Christopher, The General
Strike, May 1926, London: Panther, 1974.
13
285
Peter Cox
Not only did this lead to some of the first instances of widespread severe
congestion and traffic jams but also, emphasising their privileged status,
legal action against motorists was suspended during the strike: no action
was to be taken against any infringement of the law by motorists, the use
of unlicensed vehicles was temporarily permitted, and speed limits and
other restrictions were set aside. Moreover, it later became apparent that
magistrates – unpaid and in a position to make pronouncements reliant
on opinion rather than law despite their de jure obligations – were setting
aside summonses issued prior to the strike 18. Yet it also became apparent
that the bicycle was the most numerous means of transport on the roads.
As the Gazette’s senior columnist John Urry, wrote (clearly trying to
pursue a non-political line): “Would it not be safe to say that there were
more bicycles on the road during May than in any other month since the
game began… the bicycle is not only a vehicle of pleasure and utility,
but… an absolute necessity when traffic trouble comes along since it is
the only vehicle that is independent of any other thing than the human
power of its rider.” 19 The independence, indeed the degree of autonomy
enabled by the bicycle, was clearly visible.
From Social Club to Campaigning Body
– the transformation of the CTC
Prior to strike, the beginning of 1926 had seen a notable growth of
press portrayals of the cyclist as a danger and a nuisance on the road.
These complaints were not confined to the motoring press but appeared
with increasing frequency in national and regional newspapers as well.
The CTC Gazette responded by introducing a monthly feature entitled
“Scissors and Paste”, consisting of a compendium of cuttings and
reports pertaining to cyclists, and the professed attitudes to or perceptions of cyclists portrayed in these, together with short comment. The
rationale, and the strength of feeling provoked by press comment
and reaction to it, is revealed in the words of the Gazette’s February
­editorial:
“Any person who reads a newspaper, of whatever kind, will be able
to understand that the biggest rear light offensive yet organised is
in progress. After many disappointments, the motoring interests, in
anticipation of a new road bill in the next session of parliament,
have released a veritable deluge of propaganda, and this is being
Gazette, 1926, p. 192 and 364.
Urry John, “Notes of a Nomad: The Bicycle Triumphant”, Gazette, 1926, p. 207.
18
19
286
Road Safety and Class Conflict in Britain
poured in torrents over the gullible populace by the agitators acting
on behalf of the wealthy and powerful motoring associations… no
argument is too stupid, no action too mean, no trick too shabby in
this disgraceful attempt to make the cyclist’s position on the road at
night intolerable… every rear light fallacy should be nailed down as
soon as it appears in print…. a new edition of the club’s rear light
booklet has been printed for distribution to the press, the public and
parliament.” 20
“Scissors and Paste” took up at least a page, frequently more, in
each edition of the Gazette throughout this period of conflict over road
rights and safety, ending in October 1935, when it was replaced by a
more occasional “Pickings from the Press” column.
Simultaneously, the CTC introduced third-party insurance cover
for its members, while it continued to pursue negotiations for compensation for members suffering injury or damage from other road using
parties (there being no legal necessity for motorists to carry third-party
insurance). Reports of compensation resulting from the actions of
the Rights and Privileges Committee were presented regularly in the
Gazette, again usually taking a page or more of space in a litany of
accident listings suffered by members through no fault of their own.
It can be seen that the CTC – in its journal at least – was dramatically
transforming from a genteel, middle class club to a campaigning body.
As a representative body the CTC had something of a dilemma. For
its founding membership, the club served a particularly upper-middle
class function, facilitating travel at the height of a modern fashion 21.
Through the first decade of the 20th century, while cycle ownership
remained financially out of the reach of the masses, CTC membership
can be seen as largely representative (in social and political terms) of
bicycle riders in the UK in general 22. As cycle use spread and the bicycle
became “democratised” into a vehicle of mass use, so CTC members
“Editorial”, Gazette, Feb 1926, p. 35.
Compare Westaway Jonathan, “The German Community in Manchester, MiddleClass Culture and the Development of Mountaineering in Britain, c. 1850-1914”,
English Historical Review, cxxiv 508, 2009, on the social position of mountaineering
clubs.
22
Pinkerton John, “Who Put the Working Man on A Bicycle?”, in Oddy Nicholas, van
der Plas, Rob (eds.), Cycle History 8 Proceedings of the 8th International Cycle History
Conference, Glasgow, San Francisco: Van der Plas Publications, 1998, p. 101-106; Cox
Peter, “The co-construction of cycle use: reconsidering mass use of the bicycle”, Paper
delivered at “Re/Cycling Histories: Users and the Paths to Sustainability in Everyday
Life”, Rachel Carson Center, Munich, 27-29 May 2010.
20
21
287
Peter Cox
became less and less synonymous with the wider ridership. This gap can
be witnessed simply in terms of membership: as cycle ownership and
use increased after 1906, so simultaneously CTC membership stagnated
and declined. It was only with the rising conflicts of the latter 1920s
that membership once more rose, and it only matched pre-1906 levels
in 1933 23. Rounded membership figures compiled from the Gazette
indicate the changes in membership from 7,000 members in 1918 to
25,000 in 1928, reaching 30,000 in 1933 and 36,000 during 1937. Yet
even by 1925, Cyclists’ numbers were perhaps as many as 5 million and
possibly as many as 10 million by the mid-1930s 24. CTC membership
offered few clear benefits to the growing numbers of working class
cyclists until it started campaigning on the wider issues of rights for all
road users.
Contrasts may be drawn with the AA (Automobile ­
Association)
founded in 1905. Its primary function in its early years was to
establish patrols and warnings for motorists to avoid police speed
traps, to which was subsequently added the provision of mechanical
assistance to members. The continued threat of police persecution of
motorists maintained the AA’s universal appeal of practical protection and legal representation for all motorists as the years passed, until
the final abolition of the limit. Consequently, AA membership shows
a steady post-World War I growth, from 36,000 at the Armistice in
1918 to 100,000 in February 1920; 150,000 in October of the same
year; 200,000 in 1924; and 300,000 in 1926. At the same time, there
were only 1,300,000 privately owned vehicles licensed, in other words
there was an AA member for about 1 in 4 motor vehicles. In 1933, the
500,000th AA member was enrolled and in 1936 the number had risen
by a further 100,000, also reflecting the rapid expansion of motorists’
numbers 25. Although membership calculations are not compatible, the
scale of the difference is clear.
While the explicit foci of concern for the CTC were the issues of
accident numbers and the compulsory carrying of lights, both issues
involved the rights and responsibilities of road users. Overwhelmingly
Gazette, 1933, p. 301.
Kenworthy Commander Hon. Joseph, “Rear reflectors on cycles”, HC Deb 02 March
1926 vol 192 cc1249-5; Banfield, “Accidents (Pedal cyclists)”, HC Deb 28 February
1935 vol 298 cc1281-2. A similar figure is calculated from sales volumes and vehicle
lifespan in Camm F. J., Every Cyclist’s Handbook, London: Newnes, 1936, p. 1-10.
25
Kier, David “The Early Years” in Kier, David, Morgan, Bryan (eds.), Golden Mile­
stone: 50 years of the AA, London: The Automobile Association, 1955, p. 19-88.
23
24
288
Road Safety and Class Conflict in Britain
the victim in the majority of road casualty figures, the cyclist, was
being charged with responsibility for being a victim of others’ illegal
and dangerous behaviours. In Coroners’ reports, the standard verdict
applied to any cyclist killed on the roads, even if wheeling a bicycle,
was accidental death, with no censure of culpability on those causing
the accident. However, as mentioned previously, the problem was not
simply an issue of the relationship between individual users of different types of vehicle, but was compounded by complexities of class and
privilege and of their respective cultural representations. As a letter in
Car and Golf in Spring 1926 reported:
“[t]his question of rear lights is complicated by a political issue. The
cyclist is commonly supposed to be a poor man, a man of the working
classes, a Trade Unionist in other words, and to compel him to carry
a red lamp would not increase the popularity of any ­government, it
would not bring any additional revenue to the treasury, and it might
possibly be used by the Trade Unions and other political bodies as
a club with which to belabour any government that introduces such
legislation.” 26
The difference between motorist and cyclist was more than one
of means of locomotion. It clearly had class dimensions, as private
motoring in the 1920s remained firmly an activity largely limited to
those not simply with wealth, but with access to the social privileges
with which wealth was associated. Indeed, this dispute provides a classic
example of what Ralph Miliband would later describe as the exercise of
class power in an ideological struggle, with the dominant class acting
“to maintain and defend its predominance in ‘civil ­society’” 27.
In addition to the calls for compulsory lighting, the issue of
segregation and cycle paths prompted vociferous discussion in the
­
Gazette before the year was out. The editorial stance was typified by
observations made by “Robin Hood” in his regular Comment column:
“Those of us who oppose the construction of cycle paths alongside
English country roads firmly believe that any such paths would be
inferior in quality to the roads, and would generally be neglected, on
the ground that ‘anything will do for push-bikes’; that the presence
of such paths would imply – or would be held by motorists to imply
Cited in “Scissors and Paste”, Gazette, June 1926, p. 194.
Miliband Ralph, Marxism and Politics, Oxford: Oxford University Press, 1977,
p. 55.
26
27
289
Peter Cox
– that cyclists were banished from the carriage-way; that coroners,
judges and jacks-in-office everywhere would be inclined to censure
a cyclist who was involved in an accident on the road when a path
has been provided for him; and that in the end we should forfeit the
rights that were won for us by the pioneers of the pastime in days
gone by. All these fears may be groundless, but they will not be easily
removed. The advocates of cycle paths, with few exceptions, are the
most violent enemies of cyclists, which in itself is ­significant.” 28
These fears of cycle paths need to be understood in their historical
context: one often obscured today by differing national experiences
and subsequent histories. That significant numbers of British roads
were constructed with macadamed surfaces (that is, graded with equal
diameter stones), coupled with the early organisation of cyclists in
Britain and their triumphant campaigns for asphalting, had ensured the
ubiquity of quality surfaced roads eminently suitable for cyclists’ use.
With cyclists’ rights to use the roads enshrined in the 1888 legislation,
the 1890s were remembered by some as halcyon days for riding 29. The
30-year gap between the late 1890s and the late 1920s meant that those
who had such riding experiences in their most formative young adult
years were also those now in their late 50s and 60s, risen in status and
attaining the place of elders within cycling organisations. Any attempt to
suggest that cyclists ought not, for any reason, to continue to use these
roads was to take away existing rights and privileges. On the jubilee of
the first planning of the club in 1876, GK Chesterton’s comments on the
enclosure of the commons were invoked as a parallel to the dangers of
giving ground on the issues of rights. “Let us, as cyclists, heed lest our
liberties be filched in a similar manner. We must not stand in the way of
progress. The motor is here to stay, but might ought not to be allowed to
pose as right, to usurp the freedom of the roads.” 30
The Accident Problem and Parliamentary responses
The scale of the road accident problem can be gauged from the figures
for London in 1926, where 47,089 casualties were reported, of which
1,003 were fatalities. Of these latter only 29 were held to be caused
by cyclists, 38 by horse-drawn traffic and the rest by motor vehicles 31.
“Robin Hood”, Gazette, October 1926, p. 332.
Gazette, 1926, p. 301.
30
Cited in Gazette, December 1926, p. 413.
31
Gazette, 1927, p. 216.
28
29
290
Road Safety and Class Conflict in Britain
This was at a time when there were only 1,729,000 motor vehicle
licences and 2,132,900 driving licences issued nationally 32. At this point,
the holding of driving licenses was not subject to any consideration
of capability or fitness to drive, their issue merely indicating payment
of the requisite fee, not competence. Unusually for legislation, a draft of
a new Road Bill was announced and circulated to interested parties in
March 1927, including among its provisions a proposal that applicants
should sign a disclaimer as to any disability that would prevent driving.
Regulations for the compulsory use of rear reflectors on bicycles
were withdrawn from the draft Bill (which was not introduced into
Parliament) and brought to the House instead in a separate Road Transport Lighting Bill, which mandated the carrying of a red rear light for
all motor vehicles and either a rear lamp or a reflector for bicycles, and
which came into force on April 2nd 1928, although a list of certified and
tested models was not issued until the 28th of the month 33. The separation of lighting from other issues and the use of a draft bill enabled
considerable consultation to go on in private, and the Vehicle Lighting
Act of 1927 was seen retrospectively by the CTC as “not a party
measure but an honest attempt to solve a series of difficult problems
and put an end to a long controversy” 34.
Behind the scenes, however, considerable negotiations had taken
place and, since the bill in its final form conceded the cyclists’ right to
carry a reflector rather than a light, it was the motorists’ lobby that felt
betrayed 35. Ceding to the reflector allowed the cyclists’ lobby to demonstrate its willingness to compromise while still ensuring the onus on the
motorist to have adequate lighting and to drive within the capacity of
the lighting to illuminate the road ahead: in other words, to uphold a
principle of co-operative co-existence without retreating from its basic
principles. The passage of the bill was facilitated by considerable input
in debate in the House of Commons from the CTC-supporting Colonel
Wedgewood 36. Wedgwood’s other notable contribution to the debate
was that he couched cyclists’ identity in class terms, noting that those
most likely to suffer prosecution would be those workers who relied
on the bicycle as their transport to and from work. He also pointed out
that the situation in Britain could not be compared to the USA since
Gazette, 1927, p. 293.
See HC Deb 01 April 1927 vol 204 cc1577-62.
34
“An Ex-Minister’s Criticism”, Gazette, June 1932, p. 166.
35
Plowden William, The Motor Car…, p. 243.
36
See “Road Transport Lighting Bill”, HC Deb 01 April 1927 vol 204 cc1577-623.
32
33
291
Peter Cox
the bicycle was not used as a means of mass transport there, having
already been intimidated from the roads. His implication that this could
also be the future in Britain was clear.
Following [the?] publication of the findings of the Royal Commission on Transport in July 1929, a new Road Traffic Bill was introduced
at the end of 1929. Its proposals included raising the license age from
14 to 16 for motor cycles and requiring that all drivers should make a
declaration on application of their fitness to drive. Third-party insurance
was to be made compulsory for vehicle owners. Most importantly of
all, the abolition of the 20 mph speed limit, the highest-profile provision of the Bill, recognised the significant advances in technology made
since 1903. That a 20 mph limit had remained on the statute books was
the basis of continued complaints by motorists, not only for its obsolescence (and general non-observance) but also due to the potentially
capricious policing that could (and frequently did) result at any point.
The Bill imposed a limit of 30 mph in some urban areas and upon
certain classes of heavy vehicles, including coaches and buses. The infrequently used charge of Dangerous Driving was joined by a new offence
of Careless Driving, and there were to be restrictions on the hours of
driving allowed (5 hours continuously, or 10 in any 24-hour period)
by all but private motorists. Further duty of care was put on motorists,
now compelled to stop after any accident involving a person, vehicle or
animal, thus in theory eliminating the problem of hit-and-run drivers.
A final recommendation called for a Code of directions for road
users, indicating both relevant regulations by law and by common
practice (or recommendation). The “Highway Code” was first published
in April 1931, and this peculiar genesis accounts for its “semi-legal”
status. It is clear that the intention and desire behind the 1930 Road
Traffic Act was to promote more harmonious co-existence on the roads,
with the code acting almost as a guide to appropriate etiquette. Factors
not taken into account were the imbalances of power inherent in, and
exercised by, different sectors of the travelling public. Not only did the
interests of motorists conflict with the safety of other road users, but
motorists as a body and as a social class – given that some 70% of
them were of an upper social class – had unequal and disproportionate
representation and support within the institutional life of the country 37.
Those empowered to oversee and enact legislation, those passing
The spread of motor car use among the lower middle classes was a phenomenon of
the late 1930s – see O’Connell Sean, The Car in British Society…, 1998.
37
292
Road Safety and Class Conflict in Britain
judgment in courts of all kinds, the medical establishment and other
professions were all the principal users of motor vehicles, and read
the consequences of social interaction from a position of significant
privilege. The CTC, not yet in a fully oppositional frame of organisation, responded to these measures with broad approval, anticipating
that “the Bill is certain to make for increased safety for all classes
on the roads” 38. While the Bill passed through its readings without
overmuch contention, Plowden notes the degree to which its discussion
in committee became dominated by “the theme of the motor car as a
symbol of privilege” 39. Through the rest of the decade, the debates over
rights and privileges on the roads could not but be read through the
issue of class conflict, however well-disguised.
Cycle paths: segregation and safety
At the same time as the Road Traffic Bill was under discussion,
the Minister of Transport convened a separate Conference on Street
Accidents (Jan 14 & 15, 1930), which, despite objections from the
vice-president and secretary of the CTC, passed resolutions recommending both the carriage of red lights by cyclists and the institution
of special paths for cycles 40. This provided the impetus for increased
circulation, in the following months, of letters to newspapers urging
the provision of separate paths for cyclists and their removal from
the roads as the means to greater road safety. In a similar vein, the
“Scissors and Paste” columns throughout 1930 note the persistence
of calls for taxation on cyclists. The increasingly exasperated and
sarcastic comments appended to the excerpts reiterated the cyclists’
right to the road, and pointed out that the conditions and licensing attached to motor vehicle use on the public highway indicated
that these users were there on sufferance. This fundamental position
became increasingly i­mportant in the CTC’s negotiation and campaigning for cyclists’ rights.
An additional factor that framed growing CTC opposition to the
separation of cyclists from other users was the historic role played by
cyclists in the formation of the Roads Improvement Association. That
road conditions were such as to allow good progress and steady speeds
by all users was largely due to the continued lobbying of the RIA.
“The Road Traffic Bill”, Gazette, Jan 1930, p. 14.
Plowden William, The Motor Car…, p. 261.
40
Gazette, 1930, p. 42, 57.
38
39
293
Peter Cox
Despite the recent actions of the RIA in “improving” roads to facilitate
the faster passage of motor vehicles – and thus increasing the risk to
cyclists and other road users – CTC needed to maintain its support for
integrated traffic, governed by a code of civility and mutual respect.
The RIA, as a part creation of the CTC was one obvious means to
ensure this latter outcome. While fine in principle, CTC support for the
RIA became increasingly problematic as numbers of motor vehicles and
accidents rose through the 1930s. Ultimately, the increasingly clearly
defined identity of the RIA as a pro-motoring lobby group was the
reason for the withdrawal of CTC support.
Until the 1930s, questions of conflict over road space and whether
cyclists should be placed on separate paths remained academic.
Cyclists’ status as vehicular traffic meant that they (cyclists) were
legally part of the traffic flow – indeed they remained the most
numerous vehicles on the road by a considerable margin. One cannot
overstate the degree to which cycle paths were understood as a threat
because they removed the right of cyclists to use roads. This largely
theoretical argument was transformed, however, as local authorities
took steps to incorporate cycle paths in the intended construction
of trunk roads. CTC had argued that the conflict between classes of
vehicles might be better resolved, not by forcing cyclists from the
existing historic highway system, but, where necessary, by building
new roads for motor traffic. The fear that cyclists would be forced into
using inferior roads would thus be alleviated, and the desire for faster
motoring facilitated. These arguments did not come to a head until late
1934 upon the opening of a cycle path alongside Western Avenue, in
North London. By this time, changing parliamentary legislation and
debate might easily have been interpreted as a form of betrayal of
earlier aspirations for co-operation.
The cycle path issue had increasingly become framed in terms of
a safety debate in light of the rapidly rising casualty rates among all
classes of road users, and through the vociferous lobbying of the Pedestrians Association, chaired by Lord Cecil. Just as the CTC looked with
horror upon the courts’ preference to side with motorists in exonerating their accidents while blaming victims, the Pedestrians Association
similarly presented numerous examples in its newsletter where pedestrians were accused of being a danger to both motorists and cyclists 41.
The most significant move to alter the growing situation of direct
Plowden William, The Motor Car…, p. 267 ff.
41
294
Road Safety and Class Conflict in Britain
conflict was the Road Traffic (Compensation for Accidents) Bill resulting from proposals in 1932 by the Pedestrians Association, backed
by the CTC, introduced into the House of Lords by Conservative peer
Lord Danesfort 42.
The Bill as proposed would have placed the onus of proving negligence for a road traffic accident on the motorist rather than on the
victim. Thus a duty of care would have been introduced into the roads
as a means of regulating interaction and behaviours. Although it was
given a second reading, passed through the committee stage and even
passed a third reading in the Lords, dragging through parliamentary
procedure until June 1934, it was not given a Commons reading 43. Lord
Danesfort proposed its reintroduction in the next session of Parliament
but it remained unsupported and had no prospect of becoming law
(especially given Danesfort’s death in July 1935 and the presence of the
notably anti-cyclist Hore-Belisha as Transport Minister). The decision
not to proceed marked a rigidifying of the power and class asymmetries at work on the roads. If the capacity to co-operate without coercion
depends on participants having relatively equal power, then the decision
to block the bill can be interpreted as the moment in which the inequalities of power were formally institutionalised.
Some indication of the public concern over the impact of cars on
public safety during this period may be garnered from the way in
which even the bold enthusiast for the motor car, Rudyard Kipling, was
moved to write: “When men grew shy of hunting stag/ For fear the Law
might try ’em,/ The Car put up an average bag/ Of twenty dead per
diem./ Then every road was made a rink/ For Coroners to sit on;/ And
so began, in skid and stink,/ The real blood-sport of Britain!” 44
The rising casualty rates through the early 1930s were cited as a
failure of the abolition of the speed limit under the 1930 legislation. As
Lord Danesfort had noted, of the nearly 20,000 convicted of dangerous
driving since the Act, only 8 had received any punishment other than a
fine 45. Consequently, speed limits were the primary subject of debate in
the introduction of the 1934 Road Traffic Act, alongside the introduction
of a driving test and the provision of pedestrian crossings. Speed limits
HL Deb 04 May 1932 vol 84 c290; HL Deb 04 May 1932 vol 84 cc290-1;HL Deb
02 June 1932 vol 84 cc543-83.
43
HL Deb 14 June 1934 vol 92 cc1133-4; HL Deb 21 June 1934 vol 93 c130.
44
Kipling Rudyard, Fox-hunting, (1933) in The Collected Poems of Rudyard Kipling,
London: Wordsworth 194, p 843.
45
Gazette, 1932, p. 217.
42
295
Peter Cox
produced volumes of discussion in Parliament and in committee and a
limit of 30 mph came into force on 18th March 1935. The consistent
lobbying from the CTC resulted in little legislation directly concerned
with cyclists, only the introduction of a compulsory 12-inch white patch
on the rear mudguard being a requirement brought into force almost
without warning in October 46. That the overall position of the Ministry
of Transport continued to regard cyclists as responsible for their own
safety, and to be merely a nuisance to the motorist is demonstrated by
comments from Leslie Hore-Belisha, the newly appointed Minister of
Transport (29 June 1934), that “cyclists are the most dangerous people
on the roads today”, and Viscountess Astor’s plea in Parliament about
“whether some system could be devised to prohibit pedal cycling in
very crowded areas” 47. Hore-Belisha’s position in regard to cyclists’
opposition to increased regulation, both with respect to lighting and to
restriction on segregated paths, is best summed up by his description
of them as acting “like a lot of hysterical prima donnas” 48. When the
composition of the Transport Advisory Committee was discussed in
May 1935, Hore-Belisha was challenged as to whether, since cyclists
represented the most numerous road users in the country, they ought
to have more than one representative on the committee. His reply was
simply that “I think the views of cyclists can be well expressed by the
present representative” 49.
Meanwhile, antagonism between cyclists and motoring interests
increased. The language used became more intemperate, with “Scissors
and Paste” noting an accusation in the Birmingham Mail that “cyclists
are the parasites of the road” and with the CTC being described in the
Motor as “Guardians of the Poor” because of their actions on behalf of
cyclists 50. Of note as a regular author of letters singling out cyclists as
an undesirable presence on the roads was Sir Malcolm Campbell, and
among newspapers the Daily Express was seen to provide the greatest
volume of derogatory comment 51.
Gazette, 1934, p. 372.
Hore-Belisha Leslie, cited in Gazette, 1934, p. 302; Astor, “Transport (Pedal
Cycles)”, HC Deb 23 April 1934 vol 288 cc1383-4.
48
Hore-Belisha Leslie, “Cyclists (Regulations)”, HC Deb 07 November 1934 vol 293
cc1027-8.
49
HC Deb 01 May 1935 vol 301 cc353-5.
50
Gazette, 1932, p. 87; Gazette, 1932, p. 88.
51
“Scissors and Paste”, Gazette, 1933, p. 13.
46
47
296
Road Safety and Class Conflict in Britain
The campaign against segregated cycle paths
The issue of cycle paths was explicitly linked to the previous
changes in practice that had been imposed upon riders, or proposed
as being the means by which cyclists could best be protected from
harm. Taken together, these ways of treating the issue meant that the
burden of responsibility for risk was transferred from those creating the
danger to those upon whom danger was being imposed. Consequently,
the CTC, newly empowered as its membership reached 30,000 – at its
highest since 1906 – began to organise a series of public “protest”
meetings from the end of 1933. The campaign commenced with a joint
meeting with the Pedestrians Association at Friend’s House, London,
on November 22nd, 1933. The rationale was explained as follows:
“For months past the motoring interests, conscious of the rising
public feeling against the daily butchery, have been seeking to divert
attention to the alleged iniquities of cyclists, and have scattered
their propaganda broadcast through professional publicity agents.
Cyclists, they urge, should be more severely disciplined. They should
be compelled to carry rear lamps, to ride in single file at the extreme
edge of the road, to pay a tax and carry a number plate, to keep off
the ‘motor roads’ altogether – all new roads constructed at the public
expense are now motor roads – and generally be kept in their place.
Well we have had enough of this. We are now going to carry the
war into the enemy’s camp, and we shall not cease until something
is done to make British roads safe for law-abiding British citizens.” 52
Similarly powerful prose was employed in the Quarterly News Letter
of the Pedestrians Association. All the calls for pedestrians and cyclists
to act for their own protection were labelled a distraction and diversion from the real problem of aggressive and dangerous driving. Why,
pondered the Pedestrians Association, is this not the issue brought before
the public: “Is it because the Government considers that it is more
important to pander to the selfish lust of speed of a few than to discharge
its primary duty of safeguarding the lives of all citizens?” 53 The formation of the National Safety First Association (later to become RoSPA in
1941) could have gone some way to begin to address these issues, but
failed to confront this central argument, not least because of its financial
backing by, and dependence upon, motoring interests. O’Connell makes
“Editorial”, Gazette, November 1933, p. 366.
Cited in Gazette, 1933, p. 371.
52
53
297
Peter Cox
a convincing case that the NSFA was one of the principal means by
which discourses of road safety were framed around the normalisation
of the motor car and the marginalisation of other road users 54.
Although the 1934 Road Traffic Act at the end of the year gave
the safety issue some consideration, and although the government did
not attempt to make rear lights for cyclists compulsory, parliamentary debate on pedestrians and cyclists remained focused on means
by which they should be segregated to leave the roads clear for motor
traffic, not on constraints upon motor traffic to ensure its passage with
due regard to all other users of the highway. In opposing segregated
paths in particular, CTC saw its task as preventing an imminent attempt
“to strangle pleasure cycling in this country, so that a road monopoly
may be established by the motoring interests…. we shall be confined
to special paths upon which cycling for pleasure will be out of the
question, and subjected to all kinds of restrictive legislation aiming
at our gradual extinction” 55. Individual local groups opposed particular proposals, and watch committees were formed in the Midlands to
contact County officials and to provide deputations to official bodies to
argue for the rights of cyclists on the highway 56. The whole campaign
amounted, in the Club’s words, to “A New Crusade” 57. Notably, support
from the bicycle trade was also forthcoming, most immediately from
Sir Edward F. Crane, founder and chair of the Hercules Cycle company,
whose actions in cutting the purchase price of cycles over the previous
30 years had been instrumental in making the bicycle a form of mass
transport in Britain 58. Crane specifically identified the difference
between “Continental” and UK practice as hinging on the origination
of the paths. Those on the Continent reflected cyclists’ desires for a
solution to poorly paved roads. In the UK cyclists organised through
the Roads Improvement Association to ensure smooth road surfacing
for general use 59. P. J. Hannon of BSA was another highly visible
supporter, and BSA printed and distributed 50,000 copies of an open
letter to the Minister on the subject 60.
O’Connell, Sean, The Car In British Society…, p. 112-149.
Gazette, Feb 1935, p. 42.
56
Gazette, Feb 1936, p. 64.
57
“A New Crusade”, Gazette, 1935, p. 82 ff.
58
Pinkerton John, “Who Put the Working Man…”
59
Gazette, 1935, p. 83; see also Gazette, 1936, p. 132.
60
Gazette, 1935, p. 132. For extensive discussion of the relation of the cycle trade to
political action during this period, see Millward Andrew, “A ‘considerable strain upon
the resources of the hospitals’. A Discussion of the politics of cycling promotion in the
54
55
298
Road Safety and Class Conflict in Britain
Further meetings were held around the country, attracting significant
numbers. Over 2,000 were present on 23rd Feb. at Birmingham Town
Hall, where the platform featured a number of key representatives from
the cycle trade and was chaired by Major H. R. Watling, director of
the Cycle and Motorcycle Manufacturers Union 61. In Liverpool, Picton
Hall had been booked for a meeting on 28th Feb., and even the use
of St George’s Hall as an overflow venue was unable to accommodate the more than 3,000 in attendance, where the CTC joined the
NCU (Liverpool Centre) and the Liverpool Time Trials Association to
form a Merseyside Cyclists’ Protest Committee 62. Interestingly, at this
gathering, it was proposed that if segregation of road users was to be
enacted, it should be fast motor traffic that was segregated and only
allowed on specially constructed routes. Other meetings took place
across the country in almost every district 63. A summary of the whole
position of the CTC in relation to the cycle paths debate was presented
(as evidence) by the Club Secretary G. Herbert Stancer to the Road
Accidents Parliamentary Group at the House of Commons on February
28th. The CTC’s arguments were also summarised for a wider public in
leaflets such as “The Perils of the Cycle Path” (1935).
The Gazette editorial from January 1935 described a recent motoring
lobbyist’s wish that existing roads be “fenced off like railways and
reserved for cars and commercial vehicles”, and cited the view expressed
by the Daily Telegraph that this path would “reduce accidents”.
Pertinently the Gazette posed the question of what exactly “reducing
accidents” might mean in this context – did it mean preventing cyclists
killing one another, or was it a pretext for other concerns? The framing
of the road safety debate in this manner was to have dramatic long-term
consequences for policy in the UK and remained at the heart of road
safety as defined by the NSFA (later RoSPA). Once this discourse is
taken into account, one logical inference is that a simplistic desire to
lower accident rates might be best met by simply eliminating a class
of vehicle: the bicycle (or the pedestrian) since this would inevitably
reduce accident rates.
These fears over segregated paths surfaced at the CTC annual general
meeting in 1935, where a number of significant points were raised.
interwar period”, Paper presented to Cycling and Politics symposium, University of
Lancaster, 16 September 2010.
61
Gazette, 1935, p. 96.
62
Gazette, 1935, p. 144.
63
Gazette 1935, p.132, 145 f, 186-189.
299
Peter Cox
First, that comparison between the UK and continental practices where
cycle paths were more common are not viable, as both road conditions
and cycling practices are dissimilar. Second, and the key argument
deployed, is that the recommendation of separate paths represented a
retreat from the legal status of cycles as road vehicles. “[T]o segregate
one section of the community is to trifle with a state of affairs which
is a denial of our boasted civilisation.” 64 Ensuing reported comments
reiterate the view of cycle paths as a means to transfer responsibility for
accidents from perpetrators – principally motorists – to their victims:
cyclists. “It was the person who did the most killing who formed the
major problem of the roads. To suggest that because cyclists were being
killed they should be pushed off the road was as absurd as to say in
the case of railway accidents that as people had obviously been killed
because they were travelling on the railway, this method of travelling
should be forbidden in future.” 65
Whilst the practical opposition engendered appears to have significantly changed the climate for the introduction of cycle paths in this
period, the broader implications of the discourses mobilised remained.
What is highly significant about these events is the degree to which
they marked the progression of the CTC from an historically genteel,
bourgeois touring club, representing the interests of a relatively wealthy
sector of the population, to a campaigning organisation, understanding
its task as the representation not only of its membership (relatively
small in relation to the millions of quotidian bicycle users), but also
of the wider interests of this newer mass of users. Yet this role also
had explicit class conflict dimensions as well. Among motorists, the
bicycle was overwhelmingly understood to be the transport of the poor
– or at least of the working classes. Given the simultaneous issues of
mass unemployment and the social concern over economic inequalities, the association of bicycles with the working class made them a
potentially explosive political issue as well. Although Joynson-Hicks’
anti-­socialism no longer guided the Home Office after 1929, those same
concerns continued to dominate the governance of dissent: governmental priorities were to protect the interests of those represented by
the traditional political elites.
In the end it was not the arguments that overcame the government
desire to remove cyclists from the highway, but the sheer impracticality
Robinson W. M., reported in Gazette, 1935, p. 68.
Gazette, 1935, p. 12.
64
65
300
Road Safety and Class Conflict in Britain
of doing so, as eloquently argued by CTC’s Frank J. Urry in his
dissenting view on the Alness Committee at the end of the decade.
F. J. Urry was the son of John Urry, and had taken over the Gazette’s
“Notes from a Nomad” column upon his father’s death. The committee
itself clearly saw segregation as a universal panacea and recommended
the removal of cyclists from the highway wherever possible. As The
Commercial Motor put it, “The case for the fair-minded motor driver
has been put forward admirable. There is little need to read between
the lines to appreciate that the Committee is fully aware how the good
driver is constantly "nursing" the careless pedestrian and, often, the
cyclist” 66. Only the events of the Second World War were to intervene.
Again, it was wartime emergency legislation that finally brought in
compulsory rear lighting, and this was made permanent by the Road
Transport Lighting (Cycles) Act of 1945. It wholeheartedly endorsed
the recommendations of the Alness Committee, brought in early, despite
considerable unease at the lack of proper representation of cyclists 67.
Domestic road accident figures roughly stabilised through the 1930s,
only to rise rapidly after the imposition of wartime blackout restrictions, and reaching an all-time high in 1941 (see Table 1). This pattern
is indicative of the fundamental problem of road safety, the failure of
motor vehicle users to drive within the limits of their capacity to see
and respond. That so many of the casualties were pedestrians demonstrates the problem of visibility and lack thereof. In principle, the CTC’s
arguments over reflectors and rear lights were absolutely correct.
Conclusions
Re-examining the debates over rear lights and cycle paths allows us
to move from a simple consideration of the artefacts concerned toward
and examination of the political processes at work in shaping the
discursive production of different classes of mobile subjects 68. While
both light and path debates were ostensibly framed around concerns
for the safety of cyclists, they succeeded in depicting the cyclist – the
largest category of vehicular road users – as a “problem”, and as deviant
when measured against the “norm” of motor car travel. Although public
aspirations for change were expressed in the language of co-operation,
The Commercial Motor, April 14 1939, p. 30.
HC Deb 02 February 1945 vol 407 cc1794-85.
68
See Bonham Jennifer, “Transport: disciplining the body that travels”, in Böhm
Stephan, Land C., Jones C., Paterson M. (eds.), Against Automobility, Blackwell:
London, 2006, p. 57-74
66
67
301
Peter Cox
the reality of the asymmetry of power – social, political and physical –
resulted in further marginalisation of the victims of road safety.
This same asymmetry can be further illustrated in the calls for
behavioural change put forward as solutions, which almost exclusively
called upon cyclists and pedestrians to become “more responsible”
for their own safety and “not to put themselves at risk”, rather than
confronting the potential abuses of power by those posing the risk. That
these abuses were exacerbated by pre-existing social and structural
inequalities is both partial explanation and compounding factor in the
debate. Co-operation is only possible where mutual respect and parity
of access to power exists between parties: imbalances of power tend
towards creating coercive outcomes.
The issue of safety for cyclists (and pedestrians) is still the source
of lively debate among policy makers and cyclists (and pedestrians)
themselves 69. A deeper understanding of the problems involved and the
deeply emotional responses that are often generated, to the puzzlement
of policy makers, can be gained from understanding the issue not as
one of safety but as one of threat. The imposition of regulations and
restrictions, however much couched in the rhetoric of protection,
appears as threat to those in marginal power positions in society,
regardless of their numeric strength. As Mikael Colville-Andersen,
creator of the Copenhagenize and Cycle Chic blogs (a supporter of
segregated provision in the current context) has written, “Producing
behavioural campaigns focused on cyclists only serves to continue the
marginalisation of cycling… [and] serves no good purpose if you don’t
point the fingers at the other traffic users at the same time. Behavioural
campaigns aimed at everyone remove this focus on cyclists and also
serve to place the bicycle on an equal footing in the public psyche” 70.
From the outside, if judged solely on what they appear to be
concerned with – refusal of rear lights and cycle paths – the campaigns
of the 1930s appear almost absurd. Only by understanding the actors
involved and their social positions do the campaigns against supposed
safety provisions become intelligible.
See e.g. Pooley Colin (et al.), Understanding walking and cycling: Summary of
key findings and recommendations, EPSRC grant EP/G00045X/1, 2011, (http://www.
lec.lancs.ac.uk/research/society_and_environment/walking_and_cycling.php), and the
published media and online debate that this report generated.
70
Colville-Andersen M., Behavioural Challenges for Urban Cycling, Copenhagenize.
com (Posting date 11/11 2009).
69
302
Road Safety and Class Conflict in Britain
Table 1: UK Reported Road Accident Statistics 1926-1945
Deaths
Other casualties (to nearest 1000)
1926
4,886
134,000
1927
5,329
149,000
1928
6,138
165,000
1929
6,669
171,000
1930
7,304
178,000
1931
6,691
202,000
1932
6,667
206,000
1933
7,202
216,000
1934
7,343
232,000
1935
6,502
222,000
1936
6,561
228,000
1937
6,633
226,000
1938
6,648
227,000
1939
8,272
–
1940
8,609
–
1941
9,169
–
1942
6,926
141,000
1943
5,796
117,000
1944
6,416
124,000
1945
5,256
101,000
Source: Keep Matthew, Rutherford Tom, Reported Road Accident Statistics,
SN/SG/2198 3, House of Commons Library, Social and General Statistics
section, October 2011.
303
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée
à la coordination rail-route en Suisse (1918-1945)
Autour de la structuration du lobby routier
Olivier Perroux, Université de Genève
Gérard Duc, Université de Genève
Abstract : The debate around transport coordination emerged in the interwar
period, when the road industry became a credible rival of rail transport. During
this period, Wagner’s law – according to which public spending and areas of State
intervention grow continuously over time – was clearly proven. Trends in public
spending, which might encourage more intensive economic intervention by the
State at a time when the transport industry was in need of coordination, imply that
conditions were ripe for strong State intervention in transport.
Thus transport coordination instantly highlights the interactions between three
actors of very diverse origins and interests: the State, which had spent great sums
to finance the railway industry, defenders of rail transport, and a multitude of
motley associations defending road transport. The latter were able to organise even
more easily because the State, through an array of transport coordination projects,
first attempted to take control of road transport, as it had done with the railways at
the end of the 19th century.
In the end, the failure of all attempts at road-rail coordination immediately
following the war and the denial of greater legislative powers for the central
government in this field appear to contradict Wagner’s theory. However, in the face
of a growing road lobby, the federal authorities did want greater legislation. From
the moment the Confederation was forced to abandon strict regulation of road
traffic and compulsory coordination with rail transport, full collaboration between
the federal authorities and road lobbies to develop road infrastructure – the other
aspect of State intervention – was successful.
305
Olivier Perroux, Gérard Duc
En Suisse comme ailleurs, la période de l’entre-deux-guerres voit
émerger le débat sur la coordination des transports 1. Dans cette contribution, nous nous proposons d’observer la question de la coordination et de l’émergence des lobbies routiers sous le prisme de la loi de
Wagner sur les dépenses publiques 2. Cette théorie économique, émanant
d’un économiste allemand et datant de la fin du xixe siècle, stipule
que les dépenses publiques tendent à croître plus vite que le produit
intérieur. Au fil des ans, l’État investit de plus en plus de secteurs de
l’économie, notamment sous la pression des besoins de confort de sa
population. Bien que les travaux qui ont initié cette théorie datent du
début des années 1870 et concernent l’État allemand, cette loi a souvent
été reprise, au point de devenir une référence de l’histoire économique 3.
Précédant de plusieurs décennies la création des États providence, elle
doit surtout sa force à une vérification empirique de son énoncé, auquel
la Suisse n’échappe pas.
Parmi les nombreuses études autour de la question de l’augmentation des dépenses publiques, celle des économistes anglais Peacock et
Wiseman joue un rôle clé dans la popularisation de la loi de Wagner 4. En
étudiant le cas de l’Angleterre des années 1951 à 1955, ces deux auteurs
confirment la loi de Wagner et la diffusent dans le monde anglo-saxon
en la complétant. Ils démontrent qu’il existe un écart important entre les
attentes de la population relatives aux dépenses publiques et le niveau de
tolérance de la fiscalité, moteur de l’action publique. Par conséquent, les
gouvernements ne peuvent ignorer les demandes faites par leur population concernant les différentes prestations publiques, en particulier
lorsque la collecte des recettes est en augmentation à taux fiscal constant.
Selon ces deux économistes, la tendance d’un État à suivre le
modèle de Wagner n’est pas linéaire dans le temps. L’État augmente
son intervention en période de crise en élargissant la structure fiscale
Notamment Kirchhofer André, Stets zu Diensten – gezwungenermassen ! Die
Schweizer Bahnen und ihre « Gemeinwirtschaftlichkeit » für Staat, Wirtschaft und
Bevölkerung, Basel : Schwabe, 2010, p. 240-264 ; Sager Fritz, « Spannugsfelder und
Leitbilder in der schweizerischen Schwerverkehrspolitik 1932 bis 1998 », Revue suisse
d’histoire, n° 3, 1999, p. 307-332 ; voir également la contribution de Haefeli Ueli dans
cet ouvrage.
2
Du nom de son auteur, Wagner Adolph, qui la décrit pour la première fois dans son
Lehrbuch der politischen Ökonomie, Düsseldorf : Verl. Wirtschaft und Finanzen, 1876.
L’ouvrage connaît depuis cette date de nombreuses rééditions et traductions.
3
À commencer par Rendu André, La loi de Wagner et l’accroissement des dépenses
dans les budgets modernes, Paris : A. Rousseau, 1910.
4
Peacock Alan, Wiseman Jack, The growth of public expenditure in the United
Kingdom, Princeton : Princeton University Press, 1961.
1
306
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
afin de générer davantage de fonds pour répondre à l’augmentation
des dépenses, par exemple militaires lors d’une guerre. Or, à la fin de
la période de crise, les nouveaux taux d’imposition et les structures
fiscales sont maintenus, tandis que les dépenses militaires décroissent,
ce qui ouvre la voie à de nouveaux domaines pour l’action publique.
Il résulte de l’étude de Peacock et Wiseman un effet de cliquet : les
dépenses publiques demeurent bloquées à un niveau supérieur à celui
qui était le leur avant la crise.
Graphique 1 : Évolution des dépenses de la Confédération (1913‑1959)
Milliers de frs
1400
1200
1000
Dépenses (Frs de 1914)
800
600
400
1959
1957
1955
1953
1951
1949
1947
1945
1943
1941
1939
1937
1935
1933
1931
1929
1927
1925
1923
1921
1919
1917
1915
0
1913
200
Source : Ritzmann-Blickenstorfer Heiner (éd.), Siegenthaler Hansjörg (dir.),
Statistique historique de la Suisse, Zurich : Chronos, 1996, p. 952.
Dans le cas helvétique, l’effet de cliquet lié à la Seconde Guerre
mondiale, une crise incontestable du xxe siècle, est flagrant, comme
le montre le graphique 1. Les accélérations liées aux deux guerres
mondiales sont visibles, et la décroissance de la fin du conflit,
307
Olivier Perroux, Gérard Duc
p­ rovoquée par un dégonflement des dépenses militaires, n’entraîne
pas un retour à la situation antérieure, mais à un niveau supérieur de
dépenses.
L’évolution du niveau des dépenses publiques, favorisant potentiellement une intervention plus intensive de l’État dans la vie économique,
au moment même où le secteur des transports se trouve confronté à
un besoin de coordination par l’émergence de l’automobilisme, joue
un rôle central. Il y a, pendant cette période, des conditions favorables
à une intervention législative de l’État dans le secteur des transports
routiers.
Aux origines du protectionnisme ferroviaire
Selon Wagner, l’augmentation des dépenses se compose de deux
éléments différents, soit les investissements et les nouvelles demandes
de consommation. Dans le cas des dépenses liées aux transports, on
note que ces deux natures jouent un rôle : au xixe siècle, les investissements d’infrastructures ferroviaires furent lourds 5. Leur importance est
par ailleurs une des raisons qui poussèrent les États à passer par des
concessions octroyées à des compagnies privées, seul système susceptible de fournir les capitaux nécessaires à la construction des premières
lignes de chemin de fer.
Autant que pour le rail, les dépenses d’investissement en faveur de
la route participent pour une part très importante aux coûts générés par
le secteur des transports. À ce sujet, l’historien sera très sensible à la
chronologie différente qui affecte rail et route concernant ce type de
dépenses. En Suisse, mais également ailleurs en Europe, l’État investit
massivement dès la fin du xixe siècle dans l’industrie du rail. Quand
l’industrie de la route naît, au tournant du siècle, l’engagement de l’État
en matière de politique des transports est presque exclusivement associé
au chemin de fer.
La problématique de l’augmentation des demandes de consommation en matière de transports, qui concerne très directement l’histoire
des lobbies, est moins abordée par les historiens, du moins sous l’angle
Sur l’importance des investissements ferroviaires au xixe siècle, cf. notamment Beck
Bernhard, Lange Wellen wirtschaftlichen Wachstums in der Schweiz, 1814-1913. Eine
Untersuchung der Hochbauinvestitionen und ihrer Bestimmungsgründe, Bern & Stuttgart : P. Haupt, 1983 ; Schwarz Jutta, Bruttoanlageinvestitionen in der Schweiz von
1850 bis 1914. Eine empirische Untersuchung zur Kapitalbildung, Bern & Stuttgart :
P. Haupt, 1981.
5
308
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
d’une histoire économique de l’action publique. Or, l’action des lobbies
est essentielle à cerner pour comprendre le développement de ces
nouvelles exigences de consommation. Appliquées au chemin de fer,
les demandes d’amélioration des dessertes, de modification des tarifs,
d’augmentation des cadences, voire simplement du confort du matériel
roulant, sont à placer dans cette problématique. Pendant l’entre-deuxguerres, les nouvelles demandes, émanant des lobbies – routiers comme
ferroviaires –, concernent également l’intervention de l’État, que ce soit
par la promulgation d’actes législatifs réglant la concurrence rail-route
ou permettant d’ordonner le secteur du transport routier, ou pour l’amélioration des routes.
Le lien très fort qui se construit en Suisse entre pouvoir fédéral et
secteur ferroviaire résulte notamment d’un concours de circonstances.
La Suisse, en tant qu’État fédéral, naît en deux étapes. En 1848, après
l’adoption de la première Constitution, alors que le chemin de fer
effleure encore à peine le paysage helvétique, et en 1874, au moment
de l’approbation en votation populaire d’une nouvelle Constitution qui
renforce les prérogatives de la Confédération 6. À cette date, les chemins
de fer, développés depuis 1852 sur la base d’une loi octroyant de larges
compétences aux cantons, ne sont plus caractérisés par des lignes
éparses mais forment un réseau déjà solidaire qui se dessine au niveau
de l’ensemble du pays. Le rail rejoint ainsi la politique de construction
d’une unité nationale qui fait défaut avant 1874. Le 23 décembre 1872,
quelques mois après l’échec en votation populaire d’un premier projet
de révision de la Constitution fédérale, une nouvelle loi sur les chemins
de fer, qui donne à Berne la primauté en matière d’octroi de concessions ferroviaires, est adoptée 7.
La Suisse n’est pas un État centralisé et le pouvoir confédéral se
limite à l’union de forces éparses, à l’origine peu importantes. Il appartient à ces forces de rendre cohérent un ensemble fait de clivages.
L’un des fondements de ce pouvoir va être de lancer le principe de
la « ­
solidarité confédérale », soit le rassemblement de régions différentes, parfois rurales et très excentrées voire inaccessibles, à des
Voir Schweizer Rainer J., « Die Totalrevision der Bundesverfassung von 1872 und
1874 : Erfahrungen im Blick auf die laufende Verfassungsrevision », in Zen-Ruffinen
Piermarco, Auer Andreas (éd.), De la constitution. Études en l’honneur du professeur
Jean-François Aubert, Bâle & Francfort : Helbing & Lichtenhahn, 1996, p. 101‑114.
7
Duc Gérard, Les tarifs marchandises des chemins de fer suisses (1850-1913).
Stratégie des compagnies ferroviaires, nécessité de l’économie nationale et évolution
du rôle régulateur de l’État, Berne : Peter Lang, 2010, p. 159-169.
6
309
Olivier Perroux, Gérard Duc
centres urbains et industriels qui concentrent une bonne part de l’activité économique et politique 8. En reliant les régions entre elles, en les
plaçant sur un certain pied d’égalité, en servant également d’épine
dorsale au service postal, les chemins de fer apparaissent comme un
instrument utile à l’unification identitaire du pays 9. Les premières tentatives de la Confédération de reprendre en main les chemins de fer sont
un échec. Dès les dernières années du siècle cependant, avant même le
rachat des compagnies privées, la Confédération, afin de développer le
rail également dans une vision d’unification du pays et d’amélioration
des dessertes, investit des sommes considérables comme le montre le
graphique 2 10. Le rachat, accepté en votation populaire en 1898, œuvre
gigantesque de 1,3 milliard de francs – soit près de 50 % du PIB helvétique de 1900 –, scelle définitivement l’union – quelque peu contrainte
par les sommes colossales en jeu – des autorités suisses de la première
moitié du xxe siècle aux chemins de fer 11.
Comme on l’a dit, Adolf Wagner n’explique pas uniquement la
croissance des dépenses publiques par les coûts d’investissement
et leurs prévisibles explosions. Selon lui, les nouveaux besoins de
consommation des populations des États démocratiques provoquent
tout autant l’augmentation des dépenses publiques. Appliqué au secteur
des transports, cela concerne très directement l’histoire de la mobilité
et la nature de l’évolution de celle-ci. La demande de mobilité toujours
plus forte, sur des distances toujours plus grandes et dans un univers
toujours plus confortable est en cause. Il s’agit là de dépenses qu’il est
cependant plus difficile de chiffrer.
Au sujet de cette notion très helvétique, voir notamment Bernhard Roberto, Isler
Ruth, Zwischen Selbstverwirklichung und Solidarität, 1995-1996, Aarau & Frankfurt
a.M : Verl. Sauerländer, 1995.
9
Voir à ce sujet Berchtold Walter, « La politique suisse des transports » in ibidem,
p. 297‑318.
10
Le Compromis du Gothard de 1878 inaugure cette politique. L’intervention finan­
cière de la Confédération s’oriente ensuite en direction du rachat d’actions des
compagnies, politique inaugurée par le conseiller fédéral Emil Welti (1825‑1899) dans
les années 1880. Cf. Strebel Heinrich, Die Diskussion um den Rückkauf der schweize­
rischen Privatbahnen durch den Bund 1852-1898, Zurich : Diss. Phil. I, 1980.
11
Duc Gérard, Les tarifs marchandises…, p. 298.
8
310
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
Graphique 2 : Évolution du réseau ferré et des dépenses ferroviaires
de la Confédération (1872-1913)
6000
5
4.5
5000
4
3.5
4000
investissements (mio de frs)
3
Voies ferrées (Km)
2.5
3000
2
2000
1.5
1
1000
0.5
12
10
19
08
19
06
19
04
19
02
19
00
19
98
19
96
18
94
18
92
18
90
18
88
18
86
18
84
18
82
18
80
18
78
18
76
18
18
18
18
74
0
72
0
Source : Ritzmann-Blickenstorfer Heiner (éd.), Siegenthaler Hansjörg (dir.),
Statistique historique…, p. 769, p. 946.
La dualité du secteur routier
durant l’entre-deux-guerres : entre monopole
fédéral et absence de la Confédération
La focale que nous avons mise sur la période de l’entre-deux-guerres
est liée à l’émergence, durant cette même période, de l’automobilisme
comme alternative valable au rail 12. Sans un secteur routier solide, en
l’occurrence qui dépasse le cadre de simple curiosité ou d’objet d’amusement pour une élite dispendieuse qui a les moyens de s’offrir une
technologie balbutiante, la question de la coordination n’a aucune raison
d’être. Au niveau du secteur routier, deux problématiques, en partie
complémentaires mais nécessitant des interventions législatives souvent
Sur la croissance du secteur routier, cf. Merki Christoph Maria, Der holprige
Siegeszug des Automobils, 1895-1930 : zur Motorisierung des Strassenverkehrs in
Frankreich, Deutschland und der Schweiz, Wien : Böhlau, 2002.
12
311
Olivier Perroux, Gérard Duc
distinctes, sont à différencier. La première concerne l’organisation d’un
transport de fret et de personnes par la route, pendant du transport ferroviaire. En raison de la probable concurrence qu’un tel service ferait au
rail, la question d’une étatisation du transport routier – à défaut d’une
coordination légalement imposée – se pose en Suisse, mais également
dans tous les pays européens 13. La seconde problématique a davantage
trait aux répartitions entre échelons administratifs différents des charges
financières pesant sur l’amélioration ou la création de l’infrastructure
routière, ainsi que sur l’édification des lois et règlements. À ces deux
niveaux, des lobbies interviennent, développent des solutions propres à
remplir leurs objectifs et parviennent à imposer leurs vues d’autant plus
efficacement qu’ils sont bien représentés au sein de l’hémicycle fédéral.
Graphique 3 : Nombre de voyageurs empruntant les diligences
de la Poste suisse (1850‑1950)
2000000
1800000
1600000
1400000
1200000
1000000
800000
600000
400000
1950
1945
1940
1935
1930
1925
1920
1915
1910
1905
1900
1895
1890
1885
1880
1875
1870
1865
1860
1850
0
1855
200000
Source : Merki Christoph Maria, « Der Umstieg von der Postkutsche aufs
Postauto. Zur Motorisierung des öffentlichen Überlandverkehrs in der
Schweiz », Vierteljahrschrift für Sozial- und Wirtschafts­geschichte, n° 85, 1998,
p. 95.
Pendant tout le xixe siècle, le transport public routier par excellence
est la diligence, incluse dès la moitié du siècle au sein du monopole
établi par la Poste fédérale. Le graphique 3 montre une claire ­évolution
La Chambre de commerce international définit le monopole des deux moyens de
transport comme une solution envisageable. Cf. Journal de Genève, 12 mai 1933.
13
312
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
du nombre de passagers des diligences postales pendant toute la seconde
moitié du siècle. Les deux grands creux sont de nature conjoncturelle,
alors que la chute, liée d’abord à la Première Guerre mondiale, provient
également de l’émergence de l’automobile, qui se traduit en l’occurrence par une mécanisation du service des postes.
Au début du xxe siècle, alors même que la Confédération investit
massivement dans le rail, l’automobilisme émerge. En toute logique,
l’État fédéral tarde à tenir compte de cette industrie concurrente du rail,
ce qui a pour conséquence de laisser la route dans un désert législatif.
À la volonté manifeste de ne pas investir dans un domaine qui pourrait
à terme remettre en question la prédominance du rail s’ajoutent deux
raisons. La première est que les innovations liées à la route apparaissent
d’abord comme des curiosités expérimentales. Légiférer pour organiser
un futur qu’on ne connaît pas a toujours été une douce utopie. De
plus, les premières automobiles ne sont pas destinées à parcourir de
grandes distances. Or, le domaine d’intervention de la Confédération,
par principe, relève de tous les aspects intercantonaux, comme ce fut le
cas pour le chemin de fer, dans un premier temps abandonné à l’appréciation des cantons. Ainsi la Confédération ne reprend en main le rail
qu’à partir de la loi fédérale de 1872 sur la construction et l’exploitation des chemins de fer, tandis que les lignes ferroviaires traversent les
frontières cantonales et que la décision d’abandonner le rail aux cantons
est source de conflits depuis une vingtaine d’années.
Tandis que le chemin de fer relève du domaine de la Confédération,
la route va peu à peu s’organiser sous la supervision des pouvoirs cantonaux, dans l’indifférence du pouvoir fédéral, à l’exception des quelques
voies de transit et des stratégiques routes des cols alpins 14. La principale
conséquence de cette apparente distorsion au sein même de l’État fédéral
est de donner un liant aux associations de défense de la route. Dans un
premier temps, la répartition entre un rail « confédéral » et un secteur
routier « cantonalisé » paraît opportune, sinon logique. Lorsqu’éclate la
Première Guerre mondiale, le réseau ferroviaire du pays a atteint un
palier dans son extension géographique (graphique 4), tandis que le
secteur routier n’en est encore qu’à ses balbutiements 15. Toutefois, la
Première Guerre mondiale, ­conformément à la loi de Wagner, entraîne
Merki Christoph Maria, « Der Treibstoffzoll aus historischer Sicht : von der Finanzquelle des Bundes zum Motor des Strassenbaus », in Pfister Christian (Hg.), Das
1950er Syndrom. Der Weg in die Konsumgeslleschaft, Bern : Haupt, p. 326‑327.
15
Il n’existe par exemple pas de lignes de dépenses « construction de route » dans les
tableaux « finances de la confédération » des statistiques historiques.
14
313
Olivier Perroux, Gérard Duc
une augmentation des dépenses fédérales (graphique 1) et va marquer
une nouvelle étape dans l’engagement – presque involontaire – de la
Confédération envers la route. En 1918, le gouvernement suisse réforme
des camions militaires en les léguant au service postal de transports de
voyageurs. Celui-ci, attaché exclusivement à la diligence, avait bien
tenté un essai avec des camions avant 1914, mais n’avait pas trouvé
l’expérience concluante.
Graphique 4 : Évolution du réseau ferré et du nombre de véhicules
automobiles privés (1854-1954)
250000
6000
5000
200000
Réseau ferré (Km)
Véhicules
4000
150000
3000
100000
2000
50000
0
1854
1857
1860
1863
1866
1869
1872
1875
1878
1881
1884
1887
1890
1893
1896
1899
1902
1905
1908
1911
1914
1917
1920
1923
1926
1929
1932
1935
1938
1941
1944
1947
1950
1953
1000
0
Source : Ritzmann-Blickenstorfer Heiner (éd.), Siegenthaler Hansjörg (dir.),
Statistique historique…, p. 769.
L’amélioration des routes, visible depuis le début du siècle notamment grâce au goudron et à l’asphalte, s’accélère au sortir de la guerre 16
alors que l’on note, dans les années 1920, une première augmentation du nombre de véhicules automobiles privés en circulation, peu
comparable cependant avec la croissance qui interviendra durant les
Notamment Schiedt Hans-Ulrich, « Die Entwicklung der Strasseninfrastruktur in der
Schweiz zwischen 1740 und 1910 », Jahrbuch für Wirtschaftsgeschichte, n° 1, 2007,
p. 39‑54 ; Schiedt Hans-Ulrich, « Der Ausbau der Hauptstrassen in der ersten Hälfte des
20. Jahrhundert », Les chemins et l’histoire, no 1, 2004, p. 12‑23.
16
314
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
Trente Glorieuses (graphique 4). En 1924, face à la croissance de la
mécanisation du transport routier, la Confédération intervient une
première fois dans la politique routière afin d’assurer le maintien de son
monopole dans le service de transport de personnes 17. Durant cet entredeux-guerres où sont échafaudées les premières solutions en matière
de coordination des transports, elle a théoriquement deux options pour
mener cette intervention qui ne peut que la placer dans une situation
délicate vis-à-vis du rail, dont le monopole est de plus en plus remis
en question. Soit la route rejoint le rail dans le giron de l’État, ce qui
signifie une très coûteuse étatisation de la route, dont la loi de 1924 sur
le service des postes est dans une certaine mesure la première étape, soit
la Confédération se désinvestit de tout ou partie du rail dans lequel elle
a engagé des sommes considérables depuis une quarantaine d’années.
Conformément à la loi de Wagner, la Confédération ne peut que difficilement abandonner ses lourds investissements ferroviaires, d’autant
que le défi énergétique posé par une guerre mondiale qui a étranglé la
Suisse enclavée au milieu des belligérants pousse dès l’après-guerre à
l’électrification du réseau ferroviaire, qui augmente encore les investissements consentis au rail d’environ 25 % 18. Après la loi de 1924 sur le
transport des personnes par route, la Confédération va tenter de limiter
les effets du transport de fret par route sur « les milliards investis dans
les entreprises ferroviaires et dans les entreprises qui en vivent directe­
ment ou indirectement » 19. En 1934, elle cherche à donner force de loi à
un projet de convention de partage du trafic intervenu en mai 1933 entre
les transporteurs routiers – secoués par les effets de la crise – et les
administrations de chemins de fer, dont les CFF, aux déficits devenus
récurrents dès le début des années 1930.
Cette première tentative d’organisation globale de la coordination
rail-route concernant le transport de marchandises passe facilement la
rampe du Parlement, mais se heurte à un référendum populaire soutenu
à la fois par l’aile la plus libérale des partis de droite qui craint, à
l’image du conseiller aux États valaisan Raymond Evéquoz, « une étape
« Loi fédérale sur le service des postes (2 octobre 1924) », FF, vol. 3, 1924,
p. 495‑519.
18
Cette estimation a été faite en 1930. Voir Saitzew Manuel, Mission et régime des
chemins de fer dans l’économie nationale : contribution à l’étude du problème de la
concurrence entre le chemin de fer et l’automobile, Berne : Librairie-Édition, 1932,
p. 11.
19
« Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale à l’appui d’un projet de
loi réglant le transport de marchandises sur la voie publique au moyen de véhicules
automobiles (du 23 janvier 1934) », Feuille fédérale (FF), vol. 1, 1934, p. 89‑90.
17
315
Olivier Perroux, Gérard Duc
menant à la nationalisation de tous les transports » 20 et par une frange
des socialistes, estimant au contraire que le projet ne va pas assez loin
dans la voie de l’étatisation du transport considéré comme un service
public. En mai 1935, une majorité du peuple suisse balaie la loi à plus
de 67 % 21.
Vivement contestées par le lobby de la route, les tentatives de
coordination entre la route et le rail se muent dès cet instant en opération de sauvetage des CFF, dont la situation avait été dramatiquement
établie par le chef du Département fédéral des postes et des chemins de
fer, Marcel Pilet-Golaz (1889‑1958), lors de la campagne référendaire
de 1934‑1935 : dette de 3 milliards de francs ; déficit de 50 millions
en 1934, soit une perte de 6 000 francs par heure 22. La distorsion entre
le rail soutenu à bout de bras par l’État et la route ne manque pas de
soulever, dans l’entre-deux-guerres déjà, la critique des défenseurs d’un
marché des transports soumis aux règles du marché. Citant un quotidien
français, le Journal de Genève, qui s’était en son temps opposé de toutes
ses forces à l’étatisation des compagnies ferroviaires suisses, explique
en ces termes, en août 1935, la distorsion provoquée par l’intrusion de
l’État dans le marché des transports :
« Autant on fit jadis disparaître brutalement les voituriers, autant le
rail menacé cherche actuellement à détruire le transport auto dont
les services sont plus rapides, plus sûrs et moins coûteux. Pourquoi
cette guerre ? Parce que le rail est service public et par-dessus le
marché souvent propriété de l’État. Les défenseurs du rail agitent le
spectre de la ruine des pays propriétaires de chemin de fer ! » 23
La seconde moitié des années 1930 voit ainsi se multiplier les
projets législatifs poursuivant le même objectif de défense du rail :
arrêté sur l’assainissement des CFF (novembre 1936), arrêté sur le
transport routier (juin 1937), arrêté sur le règlement des auto-camions
(juin 1937), et finalement initiative populaire sur le transport marchandises lancée par la Ligue suisse pour l’organisation rationnelle du trafic
(Litra), le lobby du rail tout juste créé. Cette initiative sera retirée en
faveur d’un contre-projet du Conseil fédéral, qui propose l’ajout d’un
article 23 ter à la Constitution, stipulant que « le trafic par chemin de
Journal de Genève, 7 juin 1934 (Coordination des transports au sein du Conseil des
États).
21
Voir la contribution de Haefeli Ueli dans cet ouvrage.
22
Journal de Genève, 20 décembre 1934.
23
Journal de Genève, 5 août 1935.
20
316
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
fer et les transports motorisés par route, par eau et par air, doivent être
réglés par la Confédération en vue d’assurer une collaboration ration­
nelle des différents modes de transports, dans l’intérêt de l’économie
publique et de la défense nationale » 24. Cet article sera rejeté par deux
tiers de la population votante en février 1946. La notion de coordination qui domine les discours pendant ces vains efforts de construction
législative se heurte au déséquilibre flagrant qui sépare la route du rail.
Un élu fédéral a beau clamer en 1944 qu’« une coordination rationnelle
[des transports] est la condition même de l’assainissement des chemins
de fer » 25, la route refuse une intégration par la nécessité de sauver son
concurrent public.
La structuration d’un lobby routier
en mesure d’imposer ses solutions
Dès le début du xxe siècle, alors que le transport routier gagne en
efficience, le positionnement des routes dans le domaine de compétence
des cantons a comme conséquence de multiplier les difficultés pour
tout déplacement dans plusieurs cantons. L’automobiliste se trouve
en effet confronté à plusieurs législations routières différentes, parfois
contradictoires, bien qu’un début d’uniformisation soit rendu possible
par l’intermédiaire de concordats intercantonaux. Ceux-ci concernent
les règles de circulation, mais pas encore les sanctions, ce qui irrite
les associations européennes d’automobilistes qui préconisent à leurs
membres d’éviter le territoire helvétique 26. À partir des années 1920,
les exigences d’une centralisation législative et d’une redistribution
d’une partie des taxes douanières sur les carburants pour la construction des routes vont stimuler les activités des associations de défense
de la route.
Un premier tissu associatif lié à la route et unissant aussi bien les
automobilistes que les cyclistes se crée autour de la demande faite à
la Confédération d’intervenir pour organiser la route. Au sein même
de ces associations, dont le Touring Club Suisse (TCS), ces débats ne
sont pas sans causer des remous. À l’origine, le TCS n’est pas destiné à
défendre les intérêts des automobilistes, mais de la mobilité en général.
Cité in Journal de Genève, 22 novembre 1943.
Cité in Neuvième rapport de l’office national de recherches et d’études pour le
développement et la rationalisation de la circulation routière, Via Vita, sur son activité
en l’an 1944, p. 47.
26
Journal de Genève, 15 avril 1906.
24
25
317
Olivier Perroux, Gérard Duc
L’essentiel de ses membres se déplace à pied, en train ou à bicyclette,
les automobilistes étant une catégorie qui n’existe même pas lors de
sa création en 1896. L’énergie dépensée par cette association sur les
problèmes de législation du secteur routier engendre des tensions
internes, qui manquent de déboucher sur une scission. À côté du TCS,
un grand rival, cette fois attaché à la seule défense des milieux de
l’automobile est fondé en 1898 : l’Automobile Club Suisse (ACS). À la
fin des années 1920, la Ligue pour la circulation routière, toute jeune
association faîtière des intérêts routiers, lance une initiative populaire
englobant la centralisation de la législation et l’utilisation des taxes
douanières sur les carburants. Son rejet, par une majorité des cantons et
du peuple en mai 1929, s’explique en partie par la décision du Conseil
fédéral, une année auparavant, de verser une partie de ces taxes aux
cantons afin d’améliorer les routes 27.
Les débats qui se durcissent au cours des années 1930 sur la coordination des transports ont notamment pour conséquence de structurer les
deux camps. Les positions se figent, alors qu’aucune solution ne semble
acceptable de part et d’autre. Au sein de la Litra, organisation fondée
en 1936 et disposant de puissants relais au sein de l’Assemblée fédérale
via plusieurs de ses membres qui y siègent, s’opposent les défenseurs
de la route, dont les gains, obtenus dans les débats publics sur la coordination rail-route et sur l’affectation des taxes douanières sur les carburants, ont permis d’émerger sur le plan politique à un point tel que la
même année le député lucernois et membre du Conseil d’administration
des CFF Heinrich Walter déclare à la tribune du Conseil national : « Die
Automobilverbände sind eine Macht geworden. […] eine Macht […],
gegen die nur schwer aufzukommen ist. » 28
Le développement des structures liées à la défense de la route s’est
fait en premier lieu sur le plan local, et cela dès la fin du xixe siècle,
comme nous l’avons vu pour le TCS ou l’ACS. Les campagnes
politiques de l’entre-deux-guerres vont cependant pousser ces organisations à se fédérer. Ce mouvement se produit autour de quelques associations faîtières, comme la Ligue pour la circulation routière ou Via Vita,
faîtière formée au milieu des années 1930 lors du mouvement de résistance à l’augmentation des tarifs douaniers sur les carburants. En liant les
fédérations routières suisses aux associations économiques transversales,
Via Vita acquiert un statut de « référent ». Le ­gouvernement du canton de
Merki Christoph Maria, « Der Treibstoffzoll… », p. 319.
Cité par Merki Christoph Maria, « Der Treibstoffzoll… », p. 321.
27
28
318
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
Genève, berceau du TCS, la traite comme tel dès sa création 29. Le temps
est venu pour ce lobby de compter ses appuis au sein du parlement 30.
Conformément à la loi de Wagner, complétée par Peacock et
Wiseman, la perspective d’un nouveau conflit mondial et le déclenchement de ce dernier provoquent une accélération de l’intervention
de l’État. Dès 1937, la Confédération lance de larges programmes de
réarmement, gourmands en argent public, qui vont durer douze ans. Le
reflux des dépenses publiques entre la fin du conflit et 1949 s’opère,
mais les dépenses demeurent fixées bien au-dessus du seuil qui était
la norme avant 1937 (graphique 1). Pour vérifier l’application de cette
théorie au domaine des transports, encore faut-il que la Confédération
tente, dans cet intervalle, d’y étendre une nouvelle fois son champ
d’action, notamment dans le secteur routier.
Cette intervention se produit effectivement durant la forte croissance
de dépenses publiques liées à la Seconde Guerre mondiale. En 1936,
l’Association suisse des propriétaires d’auto-camions (ASPA/1921),
échaudée par les effets de la crise et la croissance anarchique du
secteur, demande au Conseil fédéral d’instaurer une législation sur les
transports automobiles. On se situe bien dans un processus d’augmentation des exigences face à l’État central de la part d’un lobby, celui des
transporteurs routiers, qui s’organise en un puissant cartel en 1938, en
fondant la Fédération suisse de l’industrie des transports automobiles
ou Treuhandverband für das Autotransportgewerbe (TAG), réunissant
à terme une quinzaine d’associations liées au transport routier 31. Nul
doute que le Conseil fédéral voit là la possibilité de régler durablement
le désormais lancinant « problème des transports et [de] la concurrence
Voir lettre du conseiller d’État Albert Picot du 18 janvier 1943, Archives d’État de
Genève (AEG), cote rail-route 1322, 13/3 1942.
30
Mémoire de Via Vita adressé aux membres du parlement au sujet du message du
19 décembre 1941 concernant une modification de la constitution par une disposition
sur les transports par chemin de fer, par route, par eau et par air, [traduction],
24 février 1942, AEG, fonds transports ; Lettre de Via Vita « aux membres de la
commission du Conseil National chargée de l’examen du message et du projet
concernant la modification de la Constitution par une disposition sur les transports
par chemin de fer, par eau, par route et par air (19 décembre 1941) », du 18 mai 1942,
AEG, fonds transports.
31
Zimmermann Adrian, « ’Zunftordnung’oder’ erster Schritt (…) zur Koordination
der beiden hauptsächlichen Verkehrsträger’? Die Autotransportordnung (ATO) », in
Schiedt Hans-Ulrich, Tissot Laurent, Merki Christoph Maria, Schwinges Rainer C.
(Hg.), Verkehrsgeschichte. Histoire des transports, Zurich : Chronos, 2010, p. 409. La
fusion de la TAG et de l’ASPA en 1979 donne l’ASTAG, lobby actuel des transporteurs
routiers.
29
319
Olivier Perroux, Gérard Duc
des moyens de communication ». Comme il le reconnaît lui-même en
ouverture du message du 18 juin 1937 concernant un arrêté sur les
transports sur la voie publique de personnes et de choses au moyen
de véhicules automobiles, cet acte « doit permettre […] de faire les
expériences dont on aura besoin pour élaborer plus tard une législa­
tion à caractère durable » 32. En 1938, cet arrêté, popularisé sous le nom
de « Statut des transports automobiles » (STA), est frappé de la clause
d’urgence par un Conseil fédéral échaudé par les échecs passés. Il entre
en vigueur le 15 août 1940. Outil au service de l’organisation du transport routier, il exige notamment l’obtention d’une concession pour se
livrer au transport professionnel et donne au Conseil fédéral le droit de
définir les principes réglant les tarifs de transport, en consultation avec
les entreprises concernées – entendez la TAG. Le régime des pleins
pouvoirs offre à l’exécutif une marge de manœuvre nouvelle en matière
de régulation de l’économie, que reflète l’arrêté fédéral STA.
La Seconde Guerre mondiale et les restrictions qu’elle impose ont
comme effet de structurer durablement le lobby de la route, mouvement
né quelques années auparavant. Via Vita, désormais principale fédération nationale de défense des intérêts routiers 33, double le nombre de ses
membres entre 1939 et 1941 34. Début 1944, regroupant alors trente-six
associations et quatorze entreprises et particuliers, elle absorbe la Ligue
pour la circulation routière et forme la Fédération routière suisse (FRS).
La nouveauté de la FRS est qu’elle va unir les associations de défense
des transporteurs routiers et celles actives dans la mobilité individuelle
privée. Si les réquisitions privent les acteurs de la route d’une partie
de leurs véhicules ou de pièces essentielles comme les pneumatiques,
l’industrie routière se trouve cependant au cœur de l’effort de guerre. Un
argument de poids que Via Vita utilise aussi bien pour justifier l’importance vitale du secteur routier sur l’économie du pays que pour s’opposer
à toute intrusion trop abusive de ce secteur par le pouvoir public 35.
« Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale relatif à un arrêté fédéral
concernant le transport sur la voie publique de personnes et de choses au moyen de
véhicules automobiles (Statut des transports automobiles) du 29 juillet 1949 », in FF,
vol. 2, 1949, p. 105.
33
Neuvième rapport de l’office national de recherches et d’études pour le développement
et la rationalisation de la circulation routière, Via Vita, sur son activité en l’an 1944,
p. 2.
34
Neuvième rapport de l’office national de recherches et d’études pour le développement
et la rationalisation de la circulation routière, Via Vita, sur son activité en l’an 1941,
p. 1.
35
Mémoire de Via Vita adressé aux membres du parlement…, 24 février 1942.
32
320
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
Au lendemain du conflit, le Conseil fédéral tente d’asseoir définitivement sa prédominance législative dans le domaine des transports. Pourtant, sa politique est une première fois sanctionnée par la
population helvétique qui rejette massivement 36, comme nous l’avons
mentionné, l’article 23 ter, contre-projet proposé à l’initiative de 1936 de
la Litra. Mais le seul fait que le gouvernement suisse ait voulu modifier la
Constitution, soit l’acte législatif le plus important, confirme dès l’avantguerre une tentative claire d’étendre à la route le champ de compétences
de la Confédération, au moment où les dépenses publiques amorcent une
nouvelle croissance. Même si en temps de guerre, conformément à la
théorie de Peacock et Wiseman, le gouvernement parvient plus facilement
à faire adhérer la population à ses demandes, le projet d’article 23 ter
suscite des réticences. À tel point que le gouvernement, qui malgré les
pleins pouvoirs a besoin d’un vote populaire pour tout changement constitutionnel, tarde à soumettre l’article à l’arbitrage des urnes. Dans le rejet
de l’article constitutionnel, la mobilisation des organisations de défense
de la route a été unanime et déterminante. Via Vita s’y oppose ouvertement dès la mise en consultation en 1941, déclarant « qu’il n’y a aucune
urgence à résoudre le problème de la coordination des transports » 37.
Seul demeure l’arrêté fédéral STA, prolongé par le gouvernement en 1945 pour une durée de cinq ans. À la fin de la décennie, à
la demande notamment d’acteurs du transport routier membres de la
TAG 38, le Conseil fédéral propose de transformer cet arrêté en loi 39.
La proposition reçoit l’assentiment de tous les partis du pays et d’une
grande majorité des défenseurs de la route qui voient d’un bon œil
cette organisation de la concurrence. La contestation vient cette fois
du conseiller national et fondateur de la Migros Gottlieb Duttweiler
(1888-1962) et de son parti, l’Alliance des indépendants, qui lancent
un référendum, s’opposant notamment au corporatisme que défend
le projet de loi 40. Selon les termes du conseiller fédéral Josef Escher
Par 570 869 non et 288 672 oui. Un seul canton, les Grisons, l’accepte du bout
des lèvres. Lors d’une modification constitutionnelle, la double majorité du peuple et
des cantons est nécessaire. Voir Journal de Genève, 11 février 1946.
37
Neuvième rapport de l’office national…, Via Vita, sur son activité en l’an 1941, p. 66.
38
Notamment la Société suisse des concessionnaires d’autos-taxis demande lors de son
Assemblée générale de 1949 que le STA soit transformé en loi. Journal de Genève, du
18 février 1949.
39
Les débats ont lieu en novembre 1949 (Conseil des États) et en mars 1950 (Conseil
national).
40
Sur la campagne contre la loi, cf. Zimmermann Adrian, « ‘Zunftordnung’… »,
p. 413‑414.
36
321
Olivier Perroux, Gérard Duc
(1885‑1954), fraîchement nommé à la tête du Département des postes et
des chemins de fer durant la campagne référendaire, la loi est « ein erster
Schritt auf dem Wege zur Koordination der beiden hauptsächlichsten
Verkehrsträger – Schiene und Strasse » 41. Le 25 février 1951, alors que
les référendaires ont peiné à rassembler les signatures, le projet de loi
est nettement refusé par la population votante 42. Ce vote marque l’aboutissement des mesures que tentent de prendre les autorités en matière
de transports pendant le gonflement des dépenses publiques liées à la
Seconde Guerre mondiale.
En guise de conclusion :
les limites de l’interprétation
La démocratie semi-directe helvétique explique en grande partie
l’échec final de toute tentative de coordination rail-route et donc d’une
extension du pouvoir législatif de l’État en la matière. Cet élément
semble contredire la théorie établie par Wiseman et Peacock. Toutefois, le mouvement vers une extension législative existe bien du côté
des autorités fédérales durant les deux cliquets liés à l’augmentation des
dépenses dues aux deux conflits mondiaux. Mais plus peut-être qu’ailleurs, en raison notamment des outils de démocratie directe (référendum
et initiative), le rôle et la montée en puissance des lobbies doivent être
pris en considération.
Au sortir de la guerre, le lobby routier (regroupé autour des faîtières
TAG, ASPA, FRS) a atteint une taille suffisante non seulement pour
écarter toute solution ne le satisfaisant pas mais également pour imposer
son propre cadre. En mai 1955, alors que la coordination rail-route est
enterrée depuis longtemps, les associations liées à la route lancent la
campagne de signatures en faveur de l’amélioration du réseau routier,
exigeant qu’au minimum 60 % des taxes douanières sur les carburants
y soient consacrées, moyennant notamment un meilleur partage des
tâches entre cantons et Confédération 43. L’exigence n’est pas nouvelle,
datant déjà de l’entre-deux-guerres. Face au contre-projet d’article
Der Eisenbahner, n° 3, 1951, p. 2. Cité par Zimmermann Adrian, « ’Zunftordnung’… », p. 408.
42
Par 399 614 non contre 318 121 oui. Seuls les cantons de Genève, Neuchâtel, Vaud,
Tessin, Grisons et Bâle‑Ville acceptent le projet. Journal de Genève, 26 février 1951.
43
Cf. notamment Merki Christoph Maria, « Der Treibstoffzoll… », p. 315 ; Bassand
Pierre, Burnier Thérèse, Meyer Pierre, Stüssi Robert, Veuve Léopold, Politique
des routes nationales. Acteurs et mise en œuvre, Lausanne : Presses polytechniques
romandes, 1986, p. 33‑34.
41
322
La théorie de Wisemann et Peacock confrontée à la coordination rail-route en Suisse
constitutionnel du Conseil fédéral, l’initiative qui, en quelques mois,
avait été signée par plus de 200 000 citoyens est retirée par le lobby
routier. Début juillet 1958, près de 60 % des votants acceptent l’article
constitutionnel du gouvernement, première étape vers la construction
du réseau de routes nationales (autoroutes), plus gros projet de l’histoire
de la Confédération.
Dans ce cas précis, la théorie de Wiseman et Peacock se vérifie
empiriquement : l’État central, profitant de l’élargissement de sa structure fiscale provoquée par les deux crises majeures de la première
moitié du xxe siècle, augmente son intervention dans le secteur routier,
auparavant quasi exclusivement du domaine des cantons. Dès le début
des années 1950, la révision du régime des finances fédérales permet
de reverser aux cantons la moitié des droits d’entrée des carburants en
échange d’une fixation par la Confédération du réseau des routes principales. La politique des routes nationales est lancée dès ce moment-là.
À une intervention financière de la Confédération qui demeure élevée
après la Seconde Guerre mondiale (graphique 1), s’ajoutent une
demande d’infrastructures routières particulièrement forte – efficacement relayée par les lobbies associés à la route – et des recettes en
augmentation constante – entre 1945 et 1961, les taxes douanières
sur les carburants qui seront destinées à financer les routes nationales
passent de 3 à 378 millions de francs par an grâce à l’essor de l’automobilisme 44. Les éléments mis en évidence par Wiseman et Peacock
pour expliquer l’intervention croissante de la force publique au lendemain d’une crise – nouvelles demandes émanant de la population
et croissance des recettes à taux fiscal constant – apparaissent dans
ce cas précis.
Merki Christoph Maria, « Der Treibstoffzoll… », p. 315.
44
323
Cinquième partie
Coordonner infrastructures de transport
et aménagement du territoire
Fifth Part
Coordinating transport infrastructure
and land-use planing
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
Ein Verkehrsprojekt zwischen Kirchturm
und Gemeinwohl
Philipp Hertzog, Technische Universität Darmstadt
Abstract : In the 1970s, the Deutsche Bahn was planning the first high-speed traffic
links for speeds of 250 km/h or above. It was a matter of making high-impact
decisions about infrastructure given that the railway network had barely evolved
since the 19th century. As a result, the expectations from rail transport policy were
high, especially on the part of the regions which expected windfalls and new links.
This paper examines the planning of routes and, more specifically, the decision-making process around linking cities to the planned high-speed network. The case
study looks at the debate about Göttingen, Lower Saxony, where local participants voiced their requirements in respect of national planning, in comparison to
French planning, where similar discussions arose regarding connecting Dijon to
the high-speed network. The most influential opponents to local interests were each
country’s national railways. Their interest in the best financial option conflicted with
land-use planning: peripheral areas were promoted in the case of Göttingen, while
Dijon was seen as an integral part of the decentralising policy underway in France.
A detailed analysis of the German approach, requests for route changes, and the
attention given to opponents of the project reveal that a culture of consensus was
less prevalent in French planning. The technocratic image of a decision emanating
from Paris held true for railway planning in the 1970s, despite a few small concessions. However, although both countries began planning simultaneously, there was
a 10-year gap between the inauguration of high-speed links by the Deutsche Bahn
and the implementation of French projects.
In den 1970er-Jahren plante die Deutsche Bundesbahn (DB) die ersten
Neubaustrecken für ihren zukünftigen H
­ ochgeschwindigkeitsverkehr
mit 250 km/h und mehr. Es galt, weitreichende Entscheidungen über
327
Philipp Hertzog
Infrastrukturen zu treffen, nachdem sich das Schienennetz seit dem
19. Jahrhundert nicht mehr wesentlich verändert hatte. Entsprechend
gross waren die Erwartungen der Politik an die Bahn, insbesondere dort,
wo auf regionaler Ebene die Hoffnung bestand, von den neuen Strecken
wirtschaftlich zu profitieren. Der vorliegende Beitrag befasst sich mit der
Planung dieser Trassen und, im Speziellen, mit den Entscheidungsprozessen darüber, welche Städte an das kommende Hochgeschwindigkeitsnetz angebunden wurden – und welche eben nicht 1. Im Rahmen einer
Fallstudie werden hier die Debatten um das niedersächsische Göttingen
untersucht, da die Stadt in ersten Planungen der Bahn nicht für einen
Anschluss vorgesehen war; schlaglichtartig wird ein vergleichender
Blick auf die französische Planung geworfen, wo es ähnliche Diskussionen um eine mögliche Anbindung der Stadt Dijon gab 2.
Am Beispiel der Stadt Göttingen ist herauszuarbeiten, wie die
vielfältigen lokalen Akteure argumentierten und mit welchen Einflussund Handlungsmöglichkeiten sie ihre Interessen auf lokaler Ebene
artikulierten, gegenüber nationalen Instanzen um politisches Gehör
kämpften und welche Durchsetzungschancen sie dabei hatten. Im
Unterschied zu anderen Studien, die sich zumeist auf Proteste gegen
technische Grossprojekte und den Neubau von Verkehrswegen konzentrieren 3, wird hier der Kampf für Infrastrukturen untersucht. Mit der
Forderung, an die neue Strecke angeschlossen zu werden, verbanden die
betroffenen Städte die Hoffnung auf wirtschaftliche Vorteile, während
Neben Zeitzeugen, Hobbyhistorikern und Eisenbahnfreunden haben sich wissenschaftlich vor allem zwei verkehrshistorische Studien mit der Neubaustreckenplanung
befasst, vgl. Zeller Thomas, Straße, Bahn, Panorama. Verkehrswege und Landschafts­
veränderung in Deutschland von 1930 bis 1990, Frankfurt a. M.: Campus, 2002;
Zeilinger Stefan, Wettfahrt auf der Schiene. Die Entwicklung von Hochgeschwindig­
keitszügen im europäischen Vergleich, Frankfurt a. M.: Campus, 2003.
2
Im Rahmen dieses Aufsatzes liegt der Schwerpunkt auf der Fallstudie zu Göttingen;
für den ausführlichen Vergleich mit Dijon sei ein Hinweis auf das laufende Dissertationsprojekt gestattet, aus dem dieser Aufsatz hervorgegangen ist (Arbeitstitel:
«Infra-Strukturen der Demokratie? – Akteure und Entscheidungsprozesse der ­politischen
Planung französischer und bundesdeutscher Verkehrsprojekte in den ‘langen’ 1970er
Jahren», Cotutelle an der Technischen Universität Darmstadt und der Université Paris
1 Panthéon-Sorbonne). Für erste Überlegungen zum Forschungsansatz vgl. Engels
Jens Ivo, Hertzog Philipp, «Die Macht der Ingenieure. Zum Wandel ihres politischen
Selbstverständnisses in den 1970er Jahren», Revue d’Allemagne et des pays de langue
allemande, no 43, 2011, p. 19-38.
3
Vgl. zu den Neubaustrecken beispielsweise die akribische sozialwissenschaftliche Auseinandersetzung mit den Protesten gegen die Trasse Mannheim-Stuttgart
von Hagstotz Werner, Betroffenheit und kollektives Handeln im ländlichen Raum.
Empirisch-theoretische Studie über Bürgerinitiativen im Konflikt um Planung und Bau
der Neubaustrecke Mannheim–Stuttgart, Frankfurt a. M.: Haag und Herchen, 1981.
1
328
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
sie für den gegensätzlichen Fall nicht nur eigene Nachteile befürchteten, sondern vor allem, relativ in Konkurrenz mit anderen Städten
oder Regione, «abgehängt» zu werden. Während bei Protestierern vom
Sankt-Florians-Prinzip oder vom «NIMBY-Effekt» gesprochen wird 4,
riskierten die regionalen Fürsprecher eines eigenen Anschlusses den
Vorwurf, übergeordnete Gemeinwohlinteressen im Interesse lokaler
«Kirchturmpolitik» 5 zu gefährden. Natürlich hatten regionale Akteure
jedes Interesse, einen solchen Eindruck zu vermeiden und im Gegenteil
zu betonen, dass ihr Interesse mit übergeordneten raumordnerischen
Interessen im Einklang stehe.
Aus historischer Sicht stellt sich die Frage, was zeitgenössisch als
«übergeordnetes Interesse» angesehen wurde, denn auch das Begriffsverständnis von «Gemeinwohl» und dessen Abwägung gegenüber
individuellen Interessen stellt keine überzeitliche Konstante dar. Ebenso
wie bei Protesten der Schaden einer kleinen Gruppe (Lärm, Umweltveränderung) gegen das allgemeine Interesse eines effizienten Schienennetzes abzuwägen war, galt es auch für die Entscheidung, welche
Städte an ein neues Verkehrsmittel angebunden werden, zu definieren,
ob es eher als «Gemeinwohl» angesehen wurde, möglichst schnell von
einer Metropole zur anderen zu kommen, oder aber, möglichst viele
Menschen auch aus mittelgroßen Städten direkt an einem Verkehrsnetz
teilhaben zu lassen. Die Rahmenbegriffe des vorliegenden Tagungsbandes – «Koordination» und «Konkurrenz» – sind in diesem Beitrag
somit nicht auf unterschiedliche Verkehrsträger zu beziehen, sondern
als politische Aufgabe zu verstehen, nationale, regionale und lokale
Interessen miteinander in Einklang zu bringen.
Insbesondere die Vertreter der Bahnunternehmen bilden im gewählten
Fallbeispiel eine hochinteressante Akteursgruppe, die politische,
technische und wirtschaftliche Fragen ebenso berücksich­
tigen musste
wie Forderungen der Öffentlichkeit, als diese in den eigentlich eher im
Hintergrund agierenden Planern zunehmend eine machtvolle Gruppe
von Entscheidern entdeckte 6. Die Debatten im Zuge der genannten
«Heiliger Sankt Florian, verschon’ mein Haus, zünd’ andere an» und «not in my
backyard», jeweils als Unterstellung oder Vorwurf gemeint, partikulare Befindlichkeiten zu Lasten anderer Interessen oder gegenüber dem Gemeinwohl in ungerechtfertigter Weise hervorzuheben und gegebenenfalls einzuklagen (dabei aber selbst gern von
neuen Infrastrukturen zu profitieren).
5
Die wörtliche Übersetzung «politique de clocher» wird im Französischen analog
verwendet.
6
Vgl. dazu meine Analyse der Politisierung technischer Planungsexperten um 1980:
Hertzog Philipp, Grenzen der Machbarkeit: Ein neuer Pragmatismus ­politisch-­technischer
Planung um 1980, Archiv für Sozialgeschichte, Nr. 52, 2012, p. 379-401.
4
329
Philipp Hertzog
­erkehrsplanungsprozesse lassen mit diesem Zugang Rückschlüsse
V
sowohl auf die zeitgenössische Vorstellung von demokratischer
Entscheidungslegitimation als auch auf herrschende Leitideen der
Raumstrukturierung zu. Das Raumverständnis in der Bundesrepublik, das
durch föderale Strukturen und zeitgenössisch die Teilung Deutschlands
geprägt war, verdient hier besondere Aufmerksamkeit in Abgrenzung zum
stärker zentralisierten Planen in Frankreich. Bei aller Uneinigkeit über die
genaue Streckenführung war sich die DB mit lokalen Akteuren einig, dass
die Entscheidung über einen Neubau in diesem Umfang und mit derartigen
ökonomischen Konsequenzen ein Jahrhundertprojekt war, «technisches
Neuland», das eine «sorgfältige Prüfung» der Varianten erforderte 7.
Ausgangssituation ohne Neubaustrecken
Beide Bahnunternehmen, Bundesbahn und SNCF, planten ab
den späten 1960er-Jahren neue Strecken, wobei sich entgegen erster
ambitionierter Ideen und Utopien in beiden Ländern schnell die
Erkenntnis durchsetzte, dass die Neubauten vor allem die überlasteten alten Streckenabschnitte entlasten müssten. Entsprechend wurde
die erste Schnellstrecke in Frankreich für die Verbindung der beiden
grössten Ballungsräume Paris und Lyon geplant, in Deutschland für
die wichtigste Nord-Süd-Strecke im Abschnitt zwischen Hannover und
Würzburg 8. Dabei sah die SNCF vor, möglichst nah an der geraden
Ideallinie zu bleiben, eine Anbindung von Dijon hätte einen Umweg
bedeutet, den die Planer nicht in Kauf nehmen wollten. Die Bundesbahn legte sich zunächst ebenfalls auf eine Streckenführung ohne
Umweg fest: Zwischen Hannover und Kassel sollte diese überwiegend
durchs Wesertal führen, was vorübergehend in der dort angrenzenden
Kleinstadt Holzminden zu unerwarteten Hoffnungen auf einen neuen
­Schnellverkehrshalt führte, Göttingen hingegen die wichtigsten Fernverkehrsverbindungen gekostet hätte. Im klassischen Streckennetz waren
sowohl Göttingen als auch Dijon im Vergleich zu anderen Städten
ihrer Grössenordnung sehr gut versorgt: Die ­
südniedersächsische
­Universitätsstadt war vollwertig an die Nord-Süd-Hauptstrecke ange­
bunden und damit im Vergleich zum benachbarten und deutlich
«‘Niemand wird überfahren’. Bahn: Raumordnungsverfahren vor Planfeststellung»,
Göttinger Allgemeine (GA), 09.09.1972.
8
Zudem ging es in der ersten Planungsphase der DB um die deutlich kürzere Strecke
Mannheim-Stuttgart; insgesamt wurden somit etwa 425 Kilometer Neubaustrecke
geplant und gebaut (Eröffnung 1991), die erste französische Strecke ist ebenfalls gut
400 km lang (Eröffnung 1981).
7
330
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
grösseren Kassel, das nur von Regionalzügen bedient wurde, sogar
überversorgt 9. Hierbei darf allerdings nicht vergessen werden, dass
Göttingen durch die innerdeutsche Grenzziehung seine zuvor zentrale
Lage verloren hatte. Dijon hatte sich historisch zu einem wichtigen
Drehkreuz zwischen Paris und dem gesamten Südosten Frankreichs
entwickelt 10. Für die Hauptstadt der Bourgogne hatte die französische
Bahngesellschaft SNCF angesichts der zahlreichen vor Ort ansässigen
Eisenbahner auch arbeitsmarktpolitische Relevanz. Somit verbanden
Lokalpolitiker mit der Entscheidung über eine zukünftige Anbindung
von Dijon an das modernisierte Streckennetz neben den verkehrlichen
Konsequenzen den Erhalt von zahlreichen Arbeitsplätzen, was kommunalpolitisch sicher ein mindestens ebenso grosses Mobilisierungspotenzial hatte. Der Eisenbahn schrieb die lokale Handelskammer eine fast
schon kulturell identitätsstiftende Bedeutung zu: « Le rôle et l’impor­
tance actuels [de la ville de Dijon] se définissent essentiellement par
sa place dans le réseau des chemins de fer. » 11 Zur Untermauerung der
Argumente wurde an eine historische Parallele erinnert: Bereits 1844
habe es eines speziellen Gesetzes bedurft, um den Konstrukteuren
der damaligen Strecke von Paris nach Lyon den Umweg über Dijon
vorzuschreiben, was zur weiteren Entwicklung der Stadt nachhaltig
positiv beigetragen habe 12. Auch in einer Göttinger Zeitschrift findet
sich der Hinweis eines lokalhistorischen Experten, dass Mitte des 19.
Jahrhunderts bereits ein ähnlicher Streit um den Anschluss der Stadt an
die südhannöversche Eisenbahn geführt worden sei 13.
Lokale Institutionen und ihre Interaktionspartner
Nach Bekanntwerden der konkreten Bundesbahnpläne (im Frühjahr
1972) wurde in Göttingen schnell offizieller Protest aus der Stadtverwaltung laut. Es war allerdings der zuständige Regionalverband der
Industrie- und Handelskammer (IHK), der als erste Institution bei der
Göttingen wurde im seinerzeit höchstwertigen Fernverkehr (Intercity-A-Netz) durch
zwei von bundesweit vier Linien bedient (Hamburg-Basel/Bremen-München).
10
TEE-Halt unter anderem für die prestigeträchtigen Fernzüge «Mistral» (Paris-Nizza),
«Rhodanien» (Paris-Marseille), «Lyonnais» (Paris-Lyon) sowie «Cisalpin» (Paris-­
Mailand).
11
Chambre de Commerce et d’industrie de Dijon (CCI Dijon), Extrait du registre des
délibérations, Réunion du 6 mars 1972 [verschickt an DATAR], Archives Nationales,
Centre des Archives Contemporaines (CAC, Fontainebleau), versement 840299-8.
12
Vgl. ibid.
13
Vgl. Meinhardt Günther, Der Streit der Eisenbahntrassierung im Jahre 1848/49.
Schon einmal war Göttingen in grösster Sorge, Göttinger Monatsblätter, Mai 1974,
p. 5-6.
9
331
Philipp Hertzog
niedersächsischen Landesregierung eine Alternativplanung anregte.
Neben Stadt und IHK fand sich bald eine breite Allianz aus Nachbargemeinden und -städten, Gewerkschaft und Universität zusammen
– natürlich war auch der Fremdenverkehrsverein «in großer Sorge» 14.
Gemeinsam gründeten sie ein Jahr nach den ersten öffentlichen Diskussionen eine Interessengemeinschaft, die in der Presse schnell als «IG
Trasse» bekannt wurde 15. Obwohl das nordhessische Kassel auch als
Konkurrent um den besten Bahnanschluss anzusehen war, zeigten sich
der Göttinger Oberstadtdirektor Ernst Busch und Kassels Oberbürgermeister Karl Branner demonstrativ darin einig, gemeinsam für einen
Halt in beiden Städten zu kämpfen, wenn nötig nicht nur bei den Landesregierungen in Hannover und Wiesbaden, sondern auch in Bonn 16.
Schliesslich wäre «niemandem gedient, wenn eine Stadt die andere
abhänge» 17. Während der Protest gegen den Neubau von Infrastrukturen zumeist von Bürgerinitiativen ausgeht, kann man angesichts der
institutionell bestens vernetzten Gruppe bei der «IG Trasse» und ihrem
Umfeld wohl eher von einer «Bürgermeisterinitiative» sprechen.
Konflikt mit den Bahnplanern
Die Planer der Bahnunternehmen waren interessiert an der
technisch und wirtschaftlich effizientesten Streckenvariante und
daher kaum bereit, eine solche Ideallinie auf Grund politischer
­Betrachtungen zur Regionalförderung oder für die Interessen einzelner
Städte aufzugeben. Damit standen sie für die wichtigste Gegenposition zu den Interessen der betroffenen Städte, deren Anschluss aus
ihrer Sicht einen Umweg darstellen und eine teurere Strecke ­erfordern
würde. Da die Verantwortlichen der Göttinger Verwaltung schnell
«Busch trifft sich mit Lauritzen», Göttinger Tageblatt (GT), 29.03.1973.
Mitglieder waren unter anderem der Landkreis Göttingen sowie umliegende Städte
und Kreise, Kreishandwerkerschaften, Ortsverbände des Deutschen Gewerkschaftsbundes, die Universität Göttingen, führende regionale Industrieunternehmen sowie zwei
Vize-Präsidenten der IHK (vgl. «Mitgliederverzeichnis der Interessengemeinschaft
Bundesbahn Nord-Süd-Strecke», o. D. [1973], Stadtarchiv Göttingen (StA Gö), C5
Dez. I Nr. 39); hierbei ist zu bemerken, dass die IHK Hannover-Hildesheim aus «überregionaler Rücksichtnahme» nicht offiziell Mitglied wurde, ihren lokalen Mitgliedern ihr
Engagement aber zugestanden (vgl. «Keine Benachteiligung ­Südniedersachsens», GT,
21.03.1973). Zu vermerken ist auch die Unterstützung durch die Stadt Salzgitter, die
selbst von keiner der beiden Varianten profitieren konnte und im Interesse der gesamten
Region Südostniedersachsen für die Streckenführung über Göttingen argumentierte
(vgl. «Neuer ‘Bundesgenosse’», GA, 05.04.1973).
16
Vgl. «Gemeinsamer Kampf um neue Trasse», GT, 08.11.1972; «Schnellstraße nach
Kassel», GT, 04.01.1973.
17
Zitat Ernst Busch in «Busch will mit Branner sprechen», GA, 11.08.1972.
14
15
332
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
merkten, dass die DB für allein politische Argumente wenig empfänglich war, setzten sie auf die Überzeugungskraft der Wissenschaft und
forderten, ein gemeinsames Gutachten in Auftrag zu geben. Als die DB
sich weigerte, die Expertise ihrer hauseigenen Planer derart in Zweifel
zu ziehen, sprach die Göttinger Presse von einem Eklat 18. Allerdings
hatte bereits umgehend nach Verbreitung der ersten Planungen das
niedersächsische Innenministerium von der Bundesbahn gefordert,
eine Streckenführung über Göttingen zu prüfen 19. Es muss Spekulation bleiben, ob ein im Januar 1974 von der Bahn grossflächig
verteiltes Hochglanz-Faltblatt absichtlich oder versehentlich eine
Streckenskizze enthielt, die deutlich westlich an Göttingen vorbeilief
und somit suggerierte, die von der Bahn favorisierte Trassenführung
wäre bereits beschlossene Sache 20.
Trotz der gegensätzlichen Positionen und der prinzipiellen Ansicht
der Bahner, dass die Planung in erster Linie Sache ihrer Experten
wäre, kam es bei verschiedenen Gelegenheiten zum Dialog. Führende
Vertreter der Stadtverwaltung wurden bei der Zentralen Transportleitung (ZTL) in Mainz vorstellig, wo die Koordination der Neubauplanungen zusammenlief; ihren Hinweis auf die besondere Problematik
angesichts der Zonenrandlage nahm die Bahn zwar zur Kenntnis, doch
sei eine Rücksichtnahme darauf mit dem Verkehrskonzept der Bahn
nicht vereinbar 21. Ebenfalls vor allem symbolischen Wert hatte wohl
die Reise des Oberstadtdirektors, der zwar beim Bundesbahnpräsidenten einen Termin bekam und bei ihm Gehör fand, anschliessend
aber ohne Zusagen nach Hause fuhr. Konkreter war da schon eine
Podiumsdiskussion vor Ort, die 1973 in einem Göttinger Tagungshotel
stattfand; hochrangige Bahnplaner stellten sich der Diskussion mit der
«IG Trasse». Das vehemente Eintreten für eine Streckenführung über
Göttingen veranlasste den DB-Chefplaner immerhin zu der überraschten
Anmerkung, er sei bisher nur gewohnt, auf Versammlungen von
Interessengemeinschaften zu sprechen, deren Ziele gegen die Trassen
gerichtet sind 22.
Der Dialog mit der Bundesbahn verdeutlichte, dass in der Sache
keine Einigkeit zu erzielen war, die Angelegenheit also auf politischer
Vgl. «Eine neue Initiative der CDU nach dem Gutachten-Eklat», GT, 27.09.1973.
Vgl. «Göttingen bemüht sich um Haltepunkt», GA, 15.06.1972.
20
Hier abgedruckt im DB-Kundenmagazin «Die schöne Welt», Januar 1973.
21
Vgl. «Göttingen bemüht sich um Haltepunkt», GA, 15.06.1972.
22
Vgl. «Niederschrift über die Mitgliederversammlung der Interessengemeinschaft
Bundesbahn Nord-Süd-Strecke», 16.11.1973, StA Gö, C5 Dez. I Nr. 39, p. 10.
18
19
333
Philipp Hertzog
Ebene weiterverhandelt werden musste. Es solle nicht der Eindruck
entstehen, die Stadt Göttingen und die Bundesbahn stünden «in einem
Krieg um die Trassenführung» 23, betonte Wilhelm Linkerhägner von
der ZTL. Die letzte Entscheidung, das wusste auch die Bahn, lag natürlich beim Bundesverkehrsministerium, auch wenn dieses sich lange
Zeit bedeckt hielt. Bemerkenswert ist, wie die Bahn 1976 nach der
Entscheidung des Verkehrsministers pro Göttingen umschwenkte und
die de facto politische Niederlage einfach als Planungsänderung präsentierte und plötzlich technische und betriebswirtschaftliche Gründe fand,
nunmehr nur noch Varianten über Göttingen zu prüfen 24.
Forderungen an die Bundesebene
Das nächstliegende und immer wieder angewandte Mittel waren
Bundestagsanfragen einzelner Göttinger Abgeordneter an den
Bundesverkehrsminister, die aber als Antwort meist nur a­llgemeine
Wohlwollensbezeugungen erhielten sowie den Hinweis, es würden
verschiedene Lösungen und Varianten «in baulicher und verkehrlicher
Hinsicht» 25 geprüft. Selbstverständlich suchten auch die Verantwortlichen der Stadtverwaltung den direkten Kontakt nach Bonn; mehrmals
wurden Besuche des Verkehrsministers 26 in Göttingen anberaumt,
jedoch ebenso regelmässig wie kurzfristig wieder abgesagt. Stattdessen
kam im Sommer 1973 der Staatssekretär (Karl Wittrock), jedoch nur
um mitzuteilen, die gesamte Entscheidungsprozedur befinde sich
noch in einem für den Verkehrsminister verhältnismässig frühen
Stadium 27. Die Verkehrspolitiker in Bonn und bei der Landesregierung
in Hannover, so versicherte Wittrock, seien sich aber der Bedeutung
des Knotenpunktes Göttingen bewusst, die Entscheidung über die
Trassenführung wurde in dieser Bekundung gar zur «Jahrtausen­
­
dentscheidung» 28. Die umfangreichen, fast schon aufdringlichen
Bemühungen der Stadt um Gehör beim ­Verkehrsminister zeigen sich
auf bezeichnende Weise an den Umständen der wenigen Treffen,
die dann tatsächlich vor Ort in Südniedersachsen zu Stande kamen:
«Kein Kampf zwischen Stadt und Bahn um Trassenverlauf», GT, 27./28.01.1973.
Vgl. «Bundesbahn lässt alten Plan fallen. Nur noch Varianten über Göttingen», GT,
26.08.1976.
25
Vgl. «Neue Trasse an Göttingen vorbei», GT, 28.06.1972.
26
In der Anfangsphase der Auseinandersetzungen Lauritz Lauritzen, ab Mai 1974 Kurt
Gscheidle (beide SPD).
27
Vgl. «Entscheidung über Trasse wird von Politikern in Hannover getroffen», GT,
20.03.1973.
28
Ibid.
23
24
334
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
Einmal besuchte der Oberstadtdirektor 29 den Minister in dessen
Kur im Harz, ein anderes Mal holte er ihn «auf dem Weg zu einem
Privatbesuch» am späten Samstagabend am Bahnhof ab, wo sich der
Minister laut Zeitungsnotiz «zu den Chancen Göttingens, an die neue
Trasse angebunden zu werden» äusserte 30.
Trotz dieser intensiven Kontaktsuche bekam die Stadt lange Zeit
widersprüchliche Aussagen aus Bonn zu hören. So hiess es Anfang
März 1973 aus dem Bundesverkehrsministerium, dass «kaum ein
Zweifel» 31 daran bestünde, dass die Strecke nicht über Göttingen
führen werde; einige Wochen später wurde dann publik, der Bundesverkehrsminister überlasse die Entscheidung der «politischen Ebene
des Landes Niedersachsen» 32, neige aber eindeutig zu einer Trasse über
Göttingen 33. Typisch waren auch nichtssagende Kurzmeldungen wie im
März 1975: «Während einer Sitzung der Niedersächsischen Landesre­
gierung in Bonn hat Bundesverkehrsminister Kurt Gscheidle noch keine
Stellungnahme zur Linienführung der geplanten Bundesbahntrasse […]
geben können.» 34
Bewegung gab es erst ab April 1975, als eine Lokalzeitung titelte:
«Bundesverkehrsminister für eine Trasse über Göttingen» 35; es ist
typisch für den von Ängsten, Hoffnungen und Gerüchten geprägten
Diskussionsverlauf, dass auch diese Information nicht offiziell aus
dem Bundesministerium kam, sondern auf einer Interpretation des
niedersächsischen Landwirtschaftsministers beruhte, der seinerseits
dem SPD-Unterbezirk von einem Treffen mit Gscheidle berichtet hatte.
In diesem Fall stellte sich die Annahme als endgültig zutreffend heraus,
wobei die offizielle Entscheidung über die Streckenführung letztlich
erst im Juni 1976 fiel. Vor allem die raumplanerische Argumentation
der niedersächsischen Landesregierung hatte letztendlich die Bonner
Verkehrspolitiker überzeugt 36.
Seinerzeit nach der Norddeutschen Ratsverfassung hauptamtlicher Leiter der Stadtverwaltung, im Unterschied zu einem Oberbürgermeister mit repräsentativen Aufgaben.
30
GT, 26.04.1973, 15.10.1973.
31
«Staatssekretär Haar: Nicht über Göttingen», GT, 07.03.1973.
32
«Entscheidung über Trasse wird von Politikern in Hannover getroffen», GT,
20.03.1973.
33
Vgl. «Trasse der DB an Göttingen anbinden», GA, 26.04.1973.
34
«DB-Trasse: Gscheidle konnte keine Stellungnahme abgeben», GT, 14.03.1975.
35
«Bundesverkehrsminister für eine Trasse über Göttingen», GT, 09.04.1975.
36
Vgl. «Ohne Alternative und von der Sache her begründet», GT, 02.06.1976.
29
335
Philipp Hertzog
Unterstützung durch die Landesregierung
Die Repräsentanten der Stadt Göttingen setzten grosse Hoffnungen
auf die Landesregierung in Hannover, die mit grösserem Gewicht
gegenüber der Bahn und dem Bundesverkehrsministerium auftreten
konnte als eine einzelne Kommune. Auch die oppositionelle CDU
– tatsächlich war die Union im Untersuchungszeitraum sowohl im
Bundestag als auch im niedersächsischen Landtag und im Göttinger
Stadtrat minoritär – formulierte deutliche Erwartungen an das
Landeskabinett, wobei in manchen zugespitzten Aussagen ein rabiates
Rechtsstaatsverständnis zum Ausdruck kam: «Ein niedersächsischer
Innenminister kann im Raumordnungsverfahren so lange Widerstand
leisten, bis der Bund es satt hat und uns die Trasse durch das Leinetal
[über Göttingen] lässt. Man muss das offen bekennen und das werde
ich in der nächsten Woche auch im Landtag auf den Tisch legen.» 37
Die Tatsache, dass auf allen in die Streckenentscheidung involvierten Ebenen die SPD in Regierungsverantwortung war, liess ihre
Kritiker allerdings auch mutmassen, dass der Stadtrat aus «Parteiloya­
lität» 38 die offene Auseinandersetzung scheue.
Göttingen konnte als südniedersächsisches Oberzentrum durchaus auf
die prinzipielle Unterstützung der Landesregierung hoffen, die sich in der
Konferenz der Verkehrsminister und auch gegenüber der DB eher für eine
Strecke über Göttingen aussprach 39. Das Wirtschaftsministerium gab ein
eigenes Gutachten an der (damals «Technischen») Universität Hannover
in Auftrag 40, um der Bahn nicht nur politisch, sondern auch sachlich
fundiert widersprechen zu können. Später beauftragte die Staatskanzlei
ein Essener Consultingbüro, das im Sommer 1974 sein Gutachten
vorlegte und sich klar für eine Strecke über Göttingen aussprach 41.
Damit hatte die Landesregierung eine Legitimation in der Hand, sich
aus vorrangig raumordnerischen Gründen offiziell für die Variante über
Göttingen einzusetzen; vorher waren die Repräsentanten mit eindeutigen
Positionen vorsichtig gewesen, da das ebenfalls im eigenen B
­ undesland
Heinz Müller, Abgeordneter aus Bovenden bei Göttingen, Landtagspräsident
1974-1982 (zuvor Vizepräsident), zitiert nach GT, 11.03.1974.
38
«Aufwachen Göttinger Bürger! Wir haben die falschen Männer in Bonn und
Hannover!», GT, 10./11.03.1973.
39
Vgl. «Göttingen kann noch hoffen», GA, 06.01.1973.
40
Vgl. «Geradezu ein Schildbürgerstreich» [Gastbeitrag von Landwirtschaftsminister
Klaus Peter Bruns], GT, 26.01.1973.
41
Vgl. Jansen Georg-Dietrich, Schmidt Jürgen, Regionalwirtschaftliche Untersuchung
zur Trassenführung der Neubaustrecke Hannover-Kassel, Essen: Planco Consulting
GmbH, ca. 1975.
37
336
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
liegende Holzminden nicht verprellt werden sollte. An der Diskussion
um einen möglichen Halt in Holzminden lässt sich ablesen, welche
Blüten die föderale Konkurrenz angrenzender Bundesländer mitunter
treiben kann: Das Land Nordrhein-Westfalen (NRW), so kolportierte das
Göttinger Tageblatt, mache der Bundesbahn günstige Angebote, da es
grosses Interesse an einer Aufwertung seiner östlichen Landesteile rund
um Höxter habe 42. Diesen Gerüchten widersprach der NRW-Wirtschaftsminister mit dem Hinweis, dass in dieser ländlichen Gegend ohnehin kein
Schnellzughalt zu erwarten wäre und im Gegenteil der Weserraum besser
ohne Neubaustrecke als Erholungsgebiet erhalten bleiben solle 43.
Engagierte Lokalpresse
Die jahrelangen Diskussionen zwischen Stadt, Land, Bund und
Bahn garantierten der Lokalpresse nicht nur ein dauerhaft aktuelles
und schlagzeilenträchtiges Thema; indem die ortsansässigen Zeitungen
«auf den Zug aufsprangen», wurden sie selbst zu Akteuren, die voller
Lokalpatriotismus einhellig für die Streckenvariante über Göttingen
warben. Sobald die Planungen 1972 bekannt geworden waren,
überschlugen sich die Zeitungsmeldungen. Fortan wurde mit jeder
vermeintlichen Vorentscheidung in die eine oder andere Richtung sofort
gross aufgemacht 44. In den Überschriften fällt dabei eine zugespitzte,
teilweise martialische Rhetorik auf, wenn es etwa hiess «Südnieder­
sachsen fest geschlossen» oder «Politiker an die Front». Mitte März
1973 wirbelte ein Artikel viel Staub auf, der unter dem provokanten
Titel «Aufwachen, Göttinger Bürger! Wir haben die falschen Männer in
Bonn und ­Hannover!» 45 erschien. Der Text kulminierte in einer Aufforderung zur öffentlichen Rebellion – was im Bemühen für Infrastrukturen gemeinhin ein weniger verwendetes Mittel als im Kampf gegen
Infrastrukturen sein dürfte: «Eigentlich müsste die Göttinger Bevöl­
kerung derart massiv werden, dass dem Herrn Verkehrsminister
Lauritzen bei seinem Besuch […] in Göttingen der Schrecken in die
Glieder fährt. Man sollte Straßensperren errichten!» 46
Vgl. «Aufwachen Göttinger Bürger! Wir haben die falschen Männer in Bonn und
Hannover!», GT, 10./11.03.1973.
43
Vgl. «Minister will Trasse prüfen», GA, 23.03.1973.
44
So hiess es am 05.01.73 in der GA: «Seibert gibt Göttingen keine Chance mehr»
(Seibert war Vorsitzender der Gewerkschaft der Eisenbahner); am nächsten Tag schrieb
dieselbe Zeitung: «Göttingen kann noch hoffen» und berief sich dabei auf das niedersächsische Verkehrsministerium.
45
GT, 10./11.03.1973.
46
Ibid.; der besagte Besuch des Ministers fiel übrigens aus – freilich nicht wegen dieses
Artikels.
42
337
Philipp Hertzog
Das Göttinger Tageblatt machte sich hier zum Sprachrohr einer
wahren Pressekampagne, die wenige Tage später mit einer Unter­
schriftenaktion fortgesetzt wurde. Redakteure verteilten in der
­Inne­n­stadt ein «Extrablatt, mit dem die Bürger aufgefordert wurden,
um die Trasse zu kämpfen»; es gehe «um die Lebenschancen und die
Zukunft für jeden Einzelnen»; wenn die künftige Strecke nicht über
Göttingen führe, «herrscht hier in zehn Jahren Totenstille» 47. Es blieb
unklar, was die Redaktion mit den gesammelten Unterschriften machte,
wen diese überzeugen sollten und ob sie jemals an die Entscheidungsträger abgeschickt wurden. Ähnlich folgenlos blieb die Ankündigung der CDU-Opposition im Stadtrat, eine Bürgerabstimmung zu den
Trassenvarianten zu initiieren. Wenn die Lokalzeitung die Bürger zum
«Kämpfen» auffordern musste, mag das als Zeichen dafür gewertet
werden, dass das Thema die lokale Öffentlichkeit weniger interessierte, als es die publizierte Meinung vermuten liesse. Von Seiten der
Göttinger Bevölkerung ist jedenfalls kein organisiertes bürgerschaftliches Engagement für die Neubaustrecke überliefert, abgesehen von
gelegentlichen Leserbriefen – wobei bemerkenswert ist, dass diese
mitunter ausgewogener waren als die journalistische Berichterstattung.
Wichtigstes Argument: Raumordnung
Um von vornherein den Eindruck einer «Kirchturmpolitik» zu
vermeiden, argumentierten die Befürworter eines Haltes in Göttingen
mit dessen übergreifender Bedeutung; immer wieder wurde hier insbesondere die Zonenrandlage im geteilten Deutschland angeführt. Wegen
ihrer zudem «fehlenden Verkehrsverbindungen zum Westen» weise
die Stadt «erhebliche Strukturschwächen in verkehrlicher Hinsicht
mit den daraus resultierenden Folgen» auf 48. Zur Stützung dieser
­überregionalen Argumentation bat die IG Trasse den Bundestagsverkehrsausschuss und den Bundesverkehrsminister zu prüfen, «inwieweit
das erhebliche finanzielle Engagement des Bundes bei der Bundesbahn
auch eine Berücksichtigung strukturpolitischer und ostpolitischer Ziele
der Bundesregierung erwarten läßt» 49.
Insbesondere die grenznahe Lage zur DDR sollte hier offensichtlich als übergreifendes Interesse unterstrichen werden. Auch bei der
GT, 17./18.03.1973.
«Entwurf einer von der Interessengemeinschaft ‘Bundesbahn Nord-Süd-Strecke’ in
der Sitzung vom 20. März 1973 zu verabschiedenden Resolution», StA Gö, C5 Dez. I
Nr. 39.
49
Ibid.
47
48
338
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
Opposition fand sich eine Spitze auf die Neue Ostpolitik der Regierung
Brandt mit dem Hinweis, diese müsse sich auch am westdeutschen
Engagement für die Grenzregion messen lassen: Es gehe «nicht nur
um die optimalste (sic) Trasse und um regionale Entwicklungspolitik,
sondern auch um die Glaubwürdigkeit unserer derzeitigen regierung­
samtlichen Politik» 50, erklärte die Göttinger CDU. Freilich darf die
tatsächliche Bedeutung einer neuen grenznahen Infrastruktur für
die vorsichtige Öffnung gegenüber der DDR zumindest bezweifelt
werden 51. Auf die rhetorische Wirkung dieses politisch gewichtigen
Themas setzte allerdings auch der bereits zitierte Landtagsabgeordnete Müller: «Es geht ja nicht darum, ob man in Göttingen mehr oder
weniger bequem einen der Superzüge besteigen kann», behauptete er,
aber «eine Schnellstrecke, die an Göttingen vorbeiführt, würde den
ganzen Zonenrandraum […] in eine zusätzliche und die Wirtschaft
schädigende Isolation führen. […] Hier geht es um den Anschluss
eines wirtschaftlich bedeutenden Raumes an eine Verkehrsader der
Zukunft». Er schloss seine Ausführungen mit einem mahnenden
Plädoyer: «Die Entscheidungen dieser Monate sind maßgeblich für das
Göttinger Verkehrsnetz der achtziger Jahre. Es heißt also aufpassen
und Forderungen stellen für ein Gebiet, das wohl leider auch dann
noch ‘Zonenrandgebiet’ heißen wird.» 52
Als die niedersächsische Landesregierung im Frühjahr 1975 ihren
endgültigen Beschluss für eine Strecke über Göttingen fasste, war die
spezielle Förderung des Zonenrandgebietes allerdings nur ein Teilargument in der übergeordneten Begründung, nur diese Variante entspreche
den Zielen der Raumordnung und der regionalen Wirtschaftsförderung 53.
Vergleichender Blick auf Dijon
Die niedersächsische Argumentation mit der Raumordnung und
dem Hinweis, die Streckenführung könne nicht allein nach «wirtschaft­
lichen und betriebstechnischen Gesichtspunkten» 54 entschieden werden,
entsprach fast wörtlich jenem der 1963 gegründeten französischen
Erklärung der CDU im GT, 12.03.1973.
Hier dürften allenfalls die Transitverbindungen zwischen der Bundesrepublik und
Berlin eine wichtige Rolle gespielt haben, nicht aber, ob die Nord-Süd-Neubaustrecke
30 km weiter westlich oder östlich geplant wurde.
52
«Maßgeblich für die achtziger Jahre», Gastbeitrag von Heinz Müller, Landtagsabgeordneter, in: GT, 28.01.1973.
53
Vgl. «Landesregierung entscheidet sich für Trasse über Göttingen», GT, 17.04.1975.
54
«Entwurf…» der «IG Trasse» vom 20. März 1973 (wie Anm. 48).
50
51
339
Philipp Hertzog
Raumplanungsbehörde DATAR (Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale): « Les décisions concernant un grand
équipement de transport, tel que la ligne TGV Paris-Lyon ne relèvent pas
uniquement de critères économiques; elles doivent aussi tenir compte
des orientations à long terme de l’aménagement du territoire. » 55 Eine
direkte Strecke, die der SNCF zwar die grösste Rentabilität verspreche,
aber den «espace intermédiaire» ausgrenze, drohe schliesslich, «l’effet
centralisateur du schéma ferroviaire du xixe siècle» 56 noch zu verstärken.
Auch die in dieser Frage naturgemäss sehr engagierte Handels­
kammer von Dijon betonte, dass eine direkte Strecke zwischen den
beiden grössten Agglomerationen des Landes jeder Idee einer Dezentralisierung und der Aufwertung sogenannter «métropoles d’équilibre»
wider­spräche; die Kammer wandte sich an die DATAR, die sie prinzipiell auf ihrer Seite wusste. In der Tat war die Schaffung und Stärkung
von «métropoles d’équilibre», von regionalen Wirtschaftszentren,
eine ausdrückliche Priorität der DATAR. Am Seitenrand eines Schreibens der Handelskammer Dijon – « le projet de turbotrain, tel qu’il est
actuellement envisagé, semble être parti de l’idée simpliste que la ligne
droite est le plus court chemin d’un point à un autre, sans se poser le
problème de l’effet d’une nouvelle infrastructure sur l’aménagement de
territoire » 57 – notierte der Empfänger bei der DATAR : « C’est vrai ».
Das ebenfalls in der DATAR erörterte Argument, durch einen
direkten Hochgeschwindigkeitsanschluss werde Dijon (oder auch Lyon)
quasi zu einem Vorort von Paris degradiert und verliere gerade durch
den Anschluss sein eigenständiges Potential als Hauptstadt des Burgund,
blieb minoritär 58. Auf Drängen der DATAR wurde eine «étude complé­
mentaire» zum Streckenverlauf angefertigt, letztlich konnte sie sich aber
gegenüber SNCF und dem Transportministerium nicht durchsetzen;
dieses berichtete zum Abschluss lapidar, DATAR und SNCF hätten sich
darauf geeinigt, dass der SNCF-Vorschlag für den geringsten Preis die
meisten Vorteile biete. Der Umgang mit den DATAR-Vorschlägen lässt
darauf schliessen, dass die Ziele der Raumplanung (obwohl als eigene
Behörde beim Premierminister angesiedelt) letztlich in der französischen Regierung als nicht ausschlaggebend angesehen wurden 59.
DATAR, le chargé de mission: Note à l’attention de M. le Ministre, Objet: Transports
terrestres à grande vitesse sur l’axe Paris-Sud Est, 5 avril 1974, p. 8, CAC 840299-10.
56
Ibid.
57
CCI Dijon: Réunion du 6 mars 1972 (wie Anm. 11).
58
Vgl. DATAR, Transports terrestres… (wie Anm. 55).
59
Es wäre näher zu untersuchen, ob diese Entscheidung Ausdruck eines ­grundsätzlichen
Machtgefälles darstellt, und zwar zwischen der an «Grandes Écoles» (Polytechnique,
55
340
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
Anders als in Göttingen, wo die Stadt sich zügig in die Planungen
einmischte, sind die verantwortlichen Politiker in Dijon erst aktiv
geworden, als die Planungen der SNCF bereits fast abgeschlossen
waren 60. Dabei ist kaum zu vermuten, dass die Pläne für dieses nationale
Grossprojekt am Bürgermeister Robert Poujade unbemerkt vorbeigegangen sind, schliesslich war er gleichzeitig in Paris Umweltminister; er
muss also seine Gründe gehabt haben, warum er sich in seiner Doppelrolle
zunächst still verhielt 61. Der wichtigste Träger des Protestes gegen eine
an Dijon vorbeiführende Strecke blieb somit die Lokalpresse; sie wurde
maßgeblich durch die aktive Öffentlichkeitsarbeit einer durch junge
Unternehmer bereits 1970 gegründeten Vereinigung mit Argumenten
und Artikeln versorgt. Eher anekdotische Bedeutung kommt wohl dem
unter dem Dach dieser Association d’études des liaisons rapides inter­
régionales sehr umtriebigen pensionierten Ingenieur Frédéric Rodot
zu, der seine ganz eigene Vision einer Schnellverkehrsverbindung nach
Dijon entwickelt hatte 62. Nach seiner Ansicht, die er in einer durchaus
professionell anmutenden Ausarbeitung präsentierte, sollte das Aérotrain-­
Projekt 63 Paris über Troyes und Dijon mit Lyon verbinden.
Zusammenfassung
Die Fallstudie zu den Bemühungen der Stadt Göttingen hat
aufgezeigt, wie lokale Akteure sich dafür eingesetzt haben, Planungen
der Bahn von bundesweiter Bedeutung in ihrem Sinne abzuändern.
Die 1991 eröffnete Neubaustrecke wurde in der etwas längeren Variante
über Göttingen gebaut, anders als in den ursprünglichen Planungen
der Bundesbahn vorgesehen. Die Unterstützung der niedersächsischen
Landesregierung war im föderalen Entscheidungsverfahren hilfreich,
wobei die in der Bundesrepublik auf Länderebene verantwortete
Raumordnung 64 entscheidenden Einfluss hatte. Auch in Frankreich
Ponts et Chaussées) ausgebildeten, politiknahen französischen Ingenieurselite einerseits
und der überwiegend von Geographen geprägten DATAR andererseits.
60
So lautete zumindest die Kritik der Zeitung Le Progrès aus Lyon, 13.11.1973.
61
Unter dem Titel «Ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Protection de la nature et de l’Environnement» war Poujade ab 1971 das erste Kabinettsmitglied überhaupt in diesem neugegründeten Ressort.
62
Vgl. Rodot Frédéric, Le problème de la future ligne rapide Paris-Lyon à la portée de
tous les Francais, CAC 840299-8.
63
Eine letztlich nie in Betrieb genommene Idee eines Luftkissenzuges, vgl. Guigueno
Vincent, «Building a High-Speed Society: France and the Aérotrain, 1962-1974»,
Technology and Culture, No 49, 2008, p. 21-40.
64
Nach dem nationalsozialistischen Missbrauch der zentral organisierten Raumplanung
als Legitimationswissenschaft der territorialen Expansionspläne war die Verantwor341
Philipp Hertzog
argumentierte Dijon vor allem damit, seine Anbindung stünde im
Einklang mit den offiziellen Zielen einer raumplanerischen Politik der
Dezentralisierung; trotz aller Willensbekundungen zur Förderung regionaler Grossstädte blieben die Neubaustrecken jedoch der traditionellen
Ausrichtung auf Paris verhaftet. Dijon verlor im Personenverkehr seine
einstige Position als Eisenbahn-Drehkreuz und erhielt lediglich eine
Abzweigung der neuen Hochgeschwindigkeitsstrecke.
Durch das gezielte Vorbeifahren auch an mittelgrossen Städten
hat der TGV den früheren innerfranzösischen Luftverkehr weitgehend obsolet werden lassen; gleichzeitig wurde eine flächendeckende
Anbindung vernachlässigt, wie sie das eher kleinräumige ICE-Netz
um den Preis erhöhter Reisezeiten zwischen Metropolen bietet.
Freilich begünstigen auch die unterschiedlichen Siedlungsstrukturen
in Frankreich und Deutschland eine jeweils andere Dichte an Schnellzughalten, doch hiesse es die politischen Gestaltungsmöglichkeiten
ausblenden, sähe man die geographischen Ausgangsbedingungen
als einzige Erklärung für Unterschiede in der deutschen und französischen Planung an. Deutsche Planungsingenieure blickten mitunter
neidisch über die Grenze und forderten, nach französischem Vorbild
weniger ausführlich auf Projektgegner einzugehen – schliesslich sei
Frankreich trotz effizienterer, vielleicht technokratischer Planungsstrukturen w
­ eiterhin unbestritten eine Demokratie 65. Dabei übersahen sie
­allerdings, dass die Abwägung zwischen «Kirchturm» und Gemeinwohl
in der ­
Verkehrsplanung vor allem eine Frage der gesellschaftspolitischen Prioritätensetzung darstellte sowie vom zeitgenössischen
und ­
traditionsgebundenen Demokratieverständnis abhing, inwieweit
Interessen einer Minderheit positiv als «individuell» oder negativ als
«partikular» konnotiert waren. Die deutsche Herangehensweise, nicht
nur Wünsche zur veränderten Trassenführung eingehend zu prüfen,
sondern auch den Projektgegnern – insbesondere Bürgerinitiativen –
ausgiebig Gehör einzuräumen, lässt im Rückblick eine Konsenskultur
erkennen, auf die bei den französischen Projekten weniger Wert gelegt
wurde. Das geläufige technokratische Bild einer von Paris aus per
Dekret entscheidenden Verwaltung wurde bei der Bahnplanung der
tung für dieses Politikfeld bewusst auf die einzelnen Bundesländer aufgeteilt worden,
vgl. Leendertz Ariane, Ordnung schaffen. Deutsche Raumplanung im 20. Jahrhundert,
Göttingen: Wallstein, 2008.
65
Vgl. Rossberg Ralf Roman, « Im Schneckentempo zur modernen Bahn. Statt
technischer Probleme juristische Hürden – Teures bundesdeutsches Planungsrecht »,
VDI-Nachrichten, 21.05.1982.
342
Lokaler Einfluss auf nationale Planungen
1970er-Jahre bestätigt, trotz mancher zweitrangiger Zugeständnisse an
einzelne Kommunen. Umgekehrt brauchte die Bundesbahn von den
etwa zeitgleich begonnenen ersten Überlegungen bis zur Eröffnung der
Strecke etwa zehn Jahre länger.
Angesichts dieser ambivalenten Bewertung sollte die hier historisch in den Mittelpunkt gestellte Entscheidung zu Gunsten der
Stadt Göttingen nicht vereinfachend als «Erfolgsgeschichte» oder
«Geschichte eines Siegers» verstanden werden. Sie zeigt den subjektiven Erfolg einer lokalen Bewegung im bundesdeutschen Planungsprozess grossangelegter Infrastrukturprojekte. Eine Entscheidung darüber,
ob der französische Fernverkehr unter der relativen Abkopplung von
Dijon leidet 66 und der deutsche Fernverkehr von der ungebrochen guten
Anbindung der Stadt Göttingen profitiert, ist nicht Aufgabe des Historikers. Einen unbestreitbaren Mehrwert bringt der ICE-Halt in Göttingen
allerdings, den jeder deutsche Fernverkehrskunde der Bahn wohl bestätigen dürfte: Die Universitätsstadt Göttingen hat sich zu einem zentralen
Stützpunkt der im Bahn-Deutsch sogenannten «mobilen Brezelverkäufer» entwickelt, die dort stets mit frischen Backwaren einsteigen.
Durch die erste nicht auf Paris zulaufende («province-province») Hochgeschwindigkeitsstrecke «Rhin-Rhône» dürfte sich in Zukunft die Situation für Dijon deutlich
bessern. Ein erstes Teilstück wurde im Dezember 2011 eröffnet.
66
343
Priorités nationales et maillons transfrontaliers
dans les réseaux de transports autour de
l’aire métropolitaine de
Lille (1950-1980)
Pierre Tilly, Université catholique de Louvain
Abstract : Transport infrastructure is far from neutral ; it constitutes a major
factor in shaping town and country planning. The evolution of this issue between
the 1950s and 80s in the cross-border area of Lille is the central concern of this
paper. It provides a telling example of a scale change resulting from the reaction of
government and socio-economic actors to European challenges in the area of transport. Since the 1980s, these challenges have undermined historically entrenched
national practices to dispel the notion of “transport as a bastion of nationalism”.
Enjeux de plus en plus importants dans le cadre des échanges frontaliers franco-belges qui se tissent autour de la future métropole lilloise,
les transports et les voies de communication vont représenter des
domaines clés dans la logique d’aménagement du territoire national et
dans les projets de mise en œuvre des réseaux transeuropéens de transports évoqués dans les années 1960. Des problèmes très concrets comme
les relations routières entre Calais et Ostende, la création d’une ligne
d’autobus entre deux villes frontalières, Mons et Maubeuge, ou encore
l’amélioration des relations ferroviaires vont laisser la vedette par la
suite à des dossiers « poids lourds » comme le tunnel sous la Manche
et l’ouverture aux réseaux de transports européens. Le développement
des transports, complexe sur le plan technique et sensible sur le plan
politique, se révélera en tous les cas fédérateur d’acteurs par le biais d’un
processus d’apprentissage commun. Il réunit des ­représentants politiques
et socio-économiques (chambres de commerce, syndicats, organisations
345
Pierre Tilly
professionnelles, ­entrepreneurs) autour de quelques groupes fondateurs
durant cette période de l’après-guerre jusqu’aux années 1980. L’objectif
poursuivi est de favoriser l’intégration de la région, alors en pleine
conversion industrielle, dans un espace européen en profonde reconfiguration. Avec en toile de fond, une période charnière constituée par
les années 1960 qui marque le début d’une coopération transfrontalière
institutionnelle entre le Nord-Pas-de-Calais et la Wallonie. Un essor qui
s’est poursuivi par la suite avec l’intégration d’autres régions comme la
Flandre, le Kent et la Région de Bruxelles-Capitale. L’infléchissement
des flux économiques lié au tunnel sous la Manche, l’insertion de la
région dans l’Europe du Nord-Ouest ont obligé les acteurs à prendre
acte de la géographie et à faire de Lille un point d’éclatement, sinon de
convergence, de relations de toute nature.
Tout en prenant la mesure des enjeux des transports et des infra­
structures et en les replaçant dans leur contexte national et général,
thème central de notre première partie, nous nous proposons dans une
seconde partie d’analyser quels furent les fruits et les résultats des
multiples contacts, études, concertations, manifestations publiques ou
semi-publiques menés par ces acteurs durant la période de référence
choisie. Nous les envisagerons à l’aune tant des fondements que des
résultats concrets de cette dynamique historique (diagnostic « partagé »,
recherche d’un consensus sur une planification stratégique, gestion des
déséquilibres et des divergences d’intérêts, autour de l’aménagement
du territoire frontalier, reconversion industrielle). Ce processus qui
débouche inévitablement sur des échecs comme sur des succès connaît
des moments d’élargissement et des freins qui seront identifiés. Il s’inscrit bien dans l’émergence contemporaine d’espaces d’action transfrontaliers, voire d’éventuels territoires transfrontaliers, sujet qui sera
abordé également.
Il est temps à présent d’inscrire ce processus dans un contexte
historique non sans avoir situé, à l’aide d’une carte de l’INSEE basée
sur des données de 2004, les dynamiques en matière de transports et
d’infrastructures autour des grandes m
­ étropoles de la région.
346
Source : Infrastructures : TéléAtlas (2005) ; Réseau hydraulique :
EUROSTAT-GISCO ; Occupation du sol : Corine Land Cover-AEE (2000) ;
Population : City Population (2004‑2005)
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
347
Pierre Tilly
Des politiques de conversion et d’aménagement
contre la désindustrialisation
Le contexte est marqué pour la région du Nord comme pour la
Wallonie, côté belge, par la poursuite de la désindustrialisation et la
fin de l’exploitation minière qui commencent à faire sentir leurs effets
à partir des années 1960 1. Entre 1962 et 1968, une politique d’aménagement et de conversion voit le jour dans le Nord-Pas-de-Calais
avec, à partir de 1965‑1966, le lancement d’une politique nationale
dite des métropoles d’équilibre qui aboutit au choix de Lille-RoubaixTourcoing concernant la région du Nord et à la création de l’OREAM,
un organisme chargé d’élaborer le schéma d’aménagement de l’aire
métropolitaine 2. En 1966, les Communautés urbaines sont mises sur
pied et le schéma régional qui se donne pour objectif le réaménagement de toutes les structures matérielles et humaines s’inscrit dans
une aire centrale associant métropole et Pays minier. Le couplage
entre la façade maritime et l’intérieur par un puissant faisceau de
communications est envisagé sur une échelle inédite qui permettrait
de relier Dunkerque à la Rhénanie par le développement de lignes
électriques, d’oléoducs, d’un canal à grand gabarit raccordé au
réseau belge, d’autoroutes. Bref, un véritable maillage avec des axes
faisant la jonction vers le bassin parisien et l’Europe du Nord-Ouest 3.
L’heure de la régionalisation a-t-elle sonné ? Il faut plutôt parler de
décentralisation à l’époque. Le 19 novembre 1973, le président de
la Chambre de commerce et d’industrie de Lille/Roubaix/Tourcoing
évoque devant Olivier Guichard, ministre de l’Aménagement du territoire et de l­’Équipement, la n­ écessité de réaliser un axe structurant
sur le plan autoroutier ainsi que l­’amélioration de la desserte ferroviaire de la métropole Nord. Il plaide aussi pour une décentralisation
tertiaire au profit de cette même métropole, d’un ou de deux services
parisiens de haut niveau comme l’Institut de recherche et de transports ou la Direction des transports terrestres. Mais la crise économique de 1973‑1974 va balayer le bel ensemble imaginé. À la fin des
Voir notamment Dard Olivier, Eck Jean-François (dir.), Aménageurs, territoires
et entreprises en Europe du Nord-Ouest au second xxe siècle, Site de Metz : Centre
régional universitaire lorrain d’histoire, n° 38, 2010, p. 87.
2
Hilaire Yves-Marie (dir.), Histoire du Nord Pas-de-Calais de 1900 à nos jours,
Toulouse : Privat, 1982, p. 430. Voir également Eck Jean-François, « L’aménagement
du Nord-Pas-de-Calais entre vision patronale et programmes technocratiques, des
années 1950 aux années 1970 », in Aménageurs, territoires…, p. 61‑82.
3
Hilaire Yves-Marie, Histoire du Nord…, p. 434.
1
348
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
années 1970, le bilan de l’aménagement du territoire dans la région
reste plus que mitigé 4.
Comme le relève un atlas transfrontalier récent, « dans le domaine
des voies de communication, une fois la frontière gommée, apparaissent
des situations étonnantes que l’on ne peut comprendre qu’à la lumière
de l’Histoire » 5. L’absence de continuité de certains grands axes routiers
coexiste avec des voies ferrées en cul-de-sac, à l’image de la ligne
ferroviaire Quiévrain-Blanc-Misseron entre la Belgique et la France.
On peut y ajouter des canaux qui n’ont pas nécessairement le même
gabarit. Ou encore des ports comme Dunkerque, Anvers, et dans une
moindre mesure, Ostende qui se livrent à une concurrence séculaire,
et des axes parallèles qui se dressent de part et d’autre de la frontière,
donnant l’impression de s’ignorer.
Le TGV, une opportunité majeure pour le territoire
Dès les années 1960, une ligne à grande vitesse internationale est
étudiée pour des relations entre Paris, la Belgique et la Grande-Bretagne. Mais le 20 janvier 1975, le gouvernement britannique décide
d’abandonner ce projet d’envergure, sous prétexte d’un renchérissement de la ligne projetée entre Londres et le tunnel sous la Manche à
travers le Kent. Une consultation des États membres de la Communauté européenne sur ce projet porté par les gouvernements britannique
et français, réalisée en février 1974, montre de fortes préoccupations
au sein des autres pays partenaires sur les implications de la réalisation du tunnel sur le trafic intracommunautaire 6. Des inquiétudes qui
se focalisent notamment sur de possibles discriminations vis-à-vis de
certaines catégories de transport. Or, le principe de non-discrimination inscrit dans le traité de Rome était, qui plus est, appuyé par une
convention de novembre 1973 introduisant une clause de sauvegarde
afin de se prémunir contre une intervention discriminatoire de la part
d’un ou de plusieurs gouvernements. Plus fondamentalement encore,
ce projet – s’il venait à se réaliser – modifierait de manière structurelle
les grands courants de trafic entre la Grande-Bretagne et le continent.
Eck Jean-François, « L’aménagement du Nord… », p. 82.
Atlas transfrontalier. Tome 9 : Insee (Institut national de la statistique et des études
économiques), Paris, 2009, p. 18. (Voir http://insee.fr/fr/regions/nord-pas-de-calais/
default.asp?page=themes/ouvrages/atlas/ATLF_accueil.htm).
6
Archives historiques des Communautés européennes (AHCE), BAC 5/1981, n° 65.
Résultats de la consultation en matière d’investissements d’infrastructures de transport.
Projet de tunnel sous la Manche, 25 février 1974.
4
5
349
Pierre Tilly
Il fallait à tout le moins, de l’avis de la France et de la Grande-­Bretagne,
faire preuve de progressivité en fonction des besoins dans l’aménagement des infrastructures des voies d’accès ainsi que sur la nécessité de
se placer dans un cadre de prévisions raisonnables. En clair, l’application des trains à grande vitesse et les techniques non conventionnelles
de guidage sur les grands axes d’accès n’étaient pas à l’ordre du jour
pour le gouvernement français. Quant aux Belges, les projets français ne
répondaient pas à leurs attentes en fonction de l’évolution de la construction des autoroutes en cours dans leur pays. Et comme tout était décidément lié, la délégation allemande soulignait que certaines prises de
position sur la relation frontière belge-Aachen-Frankfurt étaient subordonnées aux décisions belges. Des Allemands qui ­insistaient par ailleurs
sur l’importance, dans le domaine des transports de marchandises, des
réflexions sur la possibilité de transporter par trains directs les véhicules
routiers utilitaires au-delà du tunnel grâce à l’équipement approprié
des voies d’accès. Une réflexion d’ensemble, mieux une concertation
entre États membres, sur le réseau à grande vitesse en relation avec le
tunnel s’imposait dans la mesure où des problèmes d’adaptation et de
coordination des programmes nationaux se posaient. La Commission
européenne, tout en les mettant en exergue, s’engage alors à prendre des
initiatives pour assurer un développement harmonieux des liaisons dans
la Communauté, un objectif reconnu par le Conseil 7. Les initiatives de
la Commission se feront attendre d’autant plus que l’abandon du projet
de tunnel sous la Manche fait échouer le dispositif prévu ; la SNCF se
réorientera vers la desserte Paris-Lyon et le projet de LGV Sud-Est sera
finalement le premier réalisé en France en 1981 8.
En France, aucun grand projet d’infrastructure ferrée d’une telle
ampleur n’a vu le jour depuis les années 1930. L’occasion offerte par le
projet TGV représente donc une opportunité majeure de revoir l’organisation spatiale du territoire du Nord-Pas-de Calais et de faciliter sa
promotion au plan international. Les motivations économiques sont loin
d’être secondaires. Les (grandes) entreprises sont sensibles aux potentialités offertes par une mise en service du tunnel sous la Manche et de
Voir entre autres à ce sujet : Patel Kiran Klaus, Schot Johan, « Twisted paths to
European Integration : Comparing Agriculture and Transport Policies in a Transnational
Perspective », in Contemporary European History, 20 (4), 2011, p. 383‑403.
8
Beltran Alain, « SNCF and the Development of High Speed Trains, 1950-1981 :
Economic Rationale and Technological Choices », in Whitelegg J., Hulten, S.,
Flink T. (eds.), High Speed Trains : fast tracks to the future, Leading Edge Press :
Hawes, Yorkshire, 1993, p. 30‑37. Voir également le site de l’Association pour l’histoire
des chemins de fer (http://www.ahicf.com/) qui propose une abondante bibliographie.
7
350
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
la ligne à grande vitesse Londres-Bruxelles dont le tracé reste à déterminer. La dimension européenne dans le dossier des transports s’impose
comme un élément incontournable. Pour preuve, B. Le Cour Grandmaison, du Département aménagement transports chez Engins Matra,
en charge d’une série d’études et de recherches dans le nord de la
France confiées par l’OREAM, la Chambre régionale de commerce et
la communauté urbaine de Lille, prend contact avec de Castelbajac de
la Direction générale transports de la Commission européenne 9.
Le tunnel sous la Manche devient réalité
Les voies de communication ont attisé durant des siècles les rivalités
étatiques que traduisent des différences techniques, administratives et
fiscales. Le train perd résolument du terrain face à la route après 1945
laquelle assure en 1970 environ 50 % des échanges de marchandises entre
les États membres de la Communauté européenne 10. C’est l’ensemble
du réseau qui subit une transformation profonde avec des voies qui
sont déclassées, des gares fermées, des milliers d’emplois perdus et des
frontières qui s’ouvrent de plus en plus avec la construction européenne.
Lors du sommet franco-britannique du 10 septembre 1981, l’idée d’un
lien fixe sous la Manche refait surface, et le projet est remis sur les rails.
Dans le même temps, un lien ferroviaire entre Paris, le nord de la France,
l’Angleterre et la Belgique est reconsidéré. En juillet 1984, un rapport
estime qu’une ligne nouvelle à grande vitesse entre Paris, Bruxelles et
Cologne serait financièrement viable, sous condition d’un financement
partiel apporté par la Communauté économique européenne. En 1986,
une liaison vers Amsterdam est ajoutée. Par le traité de Canterbury, le
29 juillet 1987, la construction du tunnel sous la Manche est officialisée,
avec un financement exclusivement privé. La création du TGV Nord est
en conséquence initiée. Par ailleurs, le projet complémentaire d’interconnexion des LGV en Île-de-France est décidé le 9 octobre de la même
année. En novembre 1989, le Conseil des ministres des Transports
européens réuni à La Haye décide du calendrier de réalisation en trois
étapes. C’est en novembre 1994 que le premier Eurostar effectuera le
trajet Paris-Londres en passant par le tunnel sous la Manche. Le trajet
depuis Bruxelles via Lille suivra trois ans plus tard.
AHCE, BAC 5/1981, n° 65. Lettre de B. Le Cour Grandmaison à de Calstelbajac du
6 juin 1974.
10
Dumoulin Michel, La Commission européenne (1958‑1972). Histoire et mémoires
d’une institution, Luxembourg : Office des publications officielles des Communautés
européennes, 2007, p. 458.
9
351
Pierre Tilly
Les problèmes d’harmonisation
sur l’espace franco-belge
Entre ports et fleuves, un hinterland à développer
Ces grands projets d’infrastructure européens vont être à présent
replacés dans une dimension transfrontalière, celle de la constitution
d’une grande aire métropolitaine autour de Lille au sein de laquelle les
nouvelles infrastructures TGV représentent une importance capitale en
termes de développement et de croissance régionale.
Du côté institutionnel, la planification matérielle, celle des grandes
infrastructures par exemple, retient essentiellement les énergies et
anime les discours dans l’après-Seconde Guerre mondiale. Un volet des
discussions, dès les années 1950, touche à la question des transports
qui constitue un point central et permanent des échanges frontaliers au
cours de cette période. Il est ainsi question des relations routières entre
les deux pays, de la création de lignes d’autobus entre villes frontalières et de l’amélioration des relations ferroviaires même si le train
ne constitue pas la priorité à l’époque. Dans les années 1960, l’un des
projets porteurs vise à la constitution d’un nœud autoroutier européen.
À l’heure de la reconversion, la réorganisation de l’espace s’impose
dans l’esprit des décideurs politiques, afin de favoriser, voire de créer,
une alternance nécessaire entre espaces urbains et espaces ruraux et
d’assurer une complémentarité plus grande entre les principales zones
urbaines, au sein d’un véritable réseau de villes.
La réflexion et la recherche de solutions dans ce domaine ne peuvent
a priori faire l’économie d’une approche transfrontalière, d’autant que
la construction européenne a débuté. Celle-ci se révèle pourtant difficile
à réaliser sur des bases structurelles. Jusqu’au milieu des années 1960,
du fait de l’exploitation charbonnière et de l’activité sidérurgique,
les deux points principaux d’insertion de l’expansion régionale du
Nord-Pas-de-Calais sont Valenciennes et Dunkerque. Ils sont à mettre
en relation côté belge avec la gare de Saint-Ghislain dans les bassins
miniers du Borinage et du Centre, et surtout avec le port d’Anvers.
L’une des pièces maîtresses de l’Administration des transports en
France est constituée par l’aménagement au gabarit international de la
liaison par eau Dunkerque-Valenciennes, nommée la grande voie, et plus
largement de la connexion des voies fluviales entre les réseaux belge et
français. Il s’agit là d’un problème à caractère régional urgent du fait de
la conversion/reconversion des anciennes régions minières tant du côté
français que belge. Avec trois fleuves de dimension européenne (Rhin,
Meuse et Escaut) et des ports qui le sont tout autant, le transport des
352
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
voyageurs et davantage encore le trafic de marchandises constituent un
enjeu majeur, avec la voie d’eau qui représente un atout de poids pour
cette partie de l’Europe du Nord-Ouest. Cela étant, la construction de
canaux censée renforcer cette attractivité est fait surtout l’objet d’une
compétition, avec en point de mire la lutte « féroce » entre Rotterdam,
Anvers et Dunkerque 11.
La mise à gabarit, essentielle pour le développe­ment régional, a
longtemps constitué une pierre d’achoppement en raison des retards
pris dans la modernisation de canaux. Ceux-ci n’ont d’ailleurs pas
qu’une valeur économique ou commerciale du fait de leur rôle, au
même titre que les autres voies de communication, dans le maillage de
l’espace territorial avec des caractéristiques sociales, militaires et culturelles structurant un espace original à bien des égards. Pour prendre un
exemple, le bassin du Borinage en Belgique, qui est traversé depuis les
années 1950 par un canal à 1350 tonnes, ne peut en tirer pleinement
profit en raison du non-aménagement de la zone du Haut Escaut et de
l’absence de modernisation du canal du Centre à l’Est.
Le projet d’autoroute Dunkerque-Lille doit par ailleurs faciliter la
desserte industrielle des usines du port et la liaison indispensable d’un
centre urbain en développement avec la capitale régionale. Quant
au réseau primaire formé par les lignes de chemin de fer, il doit être
organisé et concentré autour de Lille avec un axe nord en direction de
Courtrai, un axe est en direction de Tournai et un axe sud en direction
d’Arras 12. La concertation nécessaire entre acteurs de part et d’autre
de la frontière doit porter également sur la commutation des modes
de transport, les facilités de transbordement, la correspondance des
horaires, le titre de transport unique.
Ouverture et intégration à l’Europe du Nord-Ouest
Comment les acteurs politiques, économiques et sociaux ont-ils
accompagné ou non l’ouverture et l’intégration à l’Europe du
Nord-Ouest au début de la construction européenne ? Quelle place
et quel rôle ont pris l’aménagement du territoire et le développement des transports dans le cadre régional et transfrontalier ? Deux
Atlas transfrontalier…, p. 20. La construction du Canal Seine-Nord Europe prévue à
l’horizon 2013 permettra d’ouvrir aux « grands gabarits » la liaison entre tous les ports
maritimes, mais aussi les ports intérieurs comme Bruxelles.
12
Régions frontalières et aménagement du territoire. Dossier d’étude. Conférence
européenne des ministres responsables de l’aménagement du territoire, 2e session de la
Grande Motte, 25 au 27 septembre 1973, p. 57.
11
353
Pierre Tilly
questions essentielles, face auxquelles, comme le souligne le recteur de
­l’Académie de Lille, lors d’une conférence européenne en 1970 :
« Les deux départements français et les deux provinces belges
“bénéficient d’un profond atavisme” qu’il faut considérer comme
“un atout majeur devant favoriser toute réflexion menée en
commun” sur le plan de la concertation “supra-frontalière”. La
région du Nord-Ouest, excentrique dans le territoire national
français, est en réalité placée à un carrefour essentiel de l’Europe
du Nord-Ouest, pour autant que des infrastructures ferroviaires et
autoroutières modernes et internationales soient créées. Ceci étant,
cette valorisation de la situation géographique de la région fronta­
lière n’a aucun sens en l’absence d’activités économiques nouvelles
[…] et d’une réflexion internationale ayant pour thème l’aménage­
ment du territoire autour de ces grands axes. » 13
Afin d’ancrer la région du Nord dans la politique spatiale du
développement industriel français au sein de l’Europe, les décideurs
régionaux se battent pour que les grandes infrastructures de transport
international soient intégrées dans leurs tracés et réalisées de manière
à servir au mieux la compétition avec le Benelux et la conversion des
bassins miniers et sidérurgiques. La création d’un aéroport international
de nature transfrontalière à Lesquin, à l’image de celui de MulhouseBâle, est ainsi envisagée pour renforcer le rôle de plaque tournante de
la métropole. Dans ce but, il faut en améliorer sensiblement l’accessibilité à partir de la Belgique, comme il s’agit de permettre aux Français
de rejoindre aisément l’aéroport de Bruxelles. L’idée d’un statut inter­
national du type Genève-Cointrin est évoquée, l’objectif étant à tout le
moins d’assurer de plus grandes facilités aux usagers belges. L’ouverture
des autoroutes Gand-Courtrai-Lille et Mons-Tournai-Lille est censée
en ce sens améliorer l’accessibilité de l’aéroport de Lesquin à partir
de la Belgique, tout en facilitant l’accès à l’aéroport international de
« Aire métropolitaine, aménagement franco-belge », rapport présenté par Guy Debeyre,
au nom du groupe d’étude n° 3, Conférence des régions de l’Europe du Nord-Ouest,
4e journée d’étude, Maastricht, février 1970, p. 110‑113. Guy Debeyre est alors président
du Comité d’études régionales économiques et sociales (CERES) à Lille. Ce groupe
de travail est composé de personnalités qui joueront par la suite un rôle politique
majeur comme Norbert Gadenne, directeur de l’intercommunale belge SIDEHO, ou
Michel Delebarre, un géographe qui était le secrétaire général adjoint du CERES
depuis 1968. Directeur de cabinet de Pierre Mauroy en 1982, Michel Delebarre accède à
des fonctions ministérielles deux ans plus tard, comme ministre du Travail, de l’Emploi
et de la Formation professionnelle.
13
354
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
Bruxelles, Lesquin étant bien positionné pour toutes les ­agglomérations
proches de la frontière tant qu’il peut assurer des connexions autres que
sur l’espace aérien français.
En ce début des années 1970, la réalisation à nouveau envisagée
d’un tunnel sous la Manche, de même que le rapprochement probable
de la Grande-Bretagne et du Marché commun peuvent également
contribuer à infléchir les courants économiques majeurs. La direction
est-ouest redevient dès lors un grand axe d’échanges, dont les effets sur
le développement vont être aiguillonnés par la nécessité de convertir
rapidement l’économie des vieilles régions minières traversées. Mais
cela engendre invariablement des tensions entre régions et villes
concurrentes. Cette nouvelle direction des flux reliant ­l’Angleterre à la
Rhénanie va en effet à l’encontre des intérêts flamands ou ­néerlandais
qui, d’Ostende à Amsterdam, ont monopolisé ces trafics depuis
plusieurs siècles. En revanche, elle offre à la région du Nord et à la
Wallonie une chance de sortir de leur situation quelque peu marginale
dans les espaces nationaux français et belge, entre le pôle parisien et le
pôle Bruxelles-Anvers.
Un grand projet : une aire métropolitaine
à vocation frontalière
Les premiers mois d’activité d’un nouvel organisme d’aménagement du territoire régional, l’OREAM-Nord installé à Lille, contribuent à modifier une perception des problèmes d’aménagement tournée
vers l’intérieur afin de les inscrire dans une vision plus européenne. Il
en résulte la publication, à la fin de 1967, d’un Livre blanc. Il vise à
répondre à deux questions jugées alors essentielles : pourquoi la région
Nord-Pas-de-Calais doit-elle rester une grande région française ?
Comment peut-elle y parvenir ?
Le principe d’aménagement proposé par le Livre blanc consiste à
organiser la région dans l’optique d’un grand carrefour européen et
notamment à faire de ses principales zones de peuplement des points
privilégiés de convergence et d’alimentation des flux économiques qui
irrigueront l’Europe du Nord-Ouest. Tels qu’ils sont élaborés par les
autorités belges et françaises, les choix opérés ne constituent pourtant
pas un modèle de concertation ; ils rentrent même parfois en contradiction les uns avec les autres. Ainsi, pour s’intégrer au réseau européen,
il faut assurer la fluidité des accès vers Paris, Londres et le Sud-Ouest
français au départ de Lille grâce au TGV et des flux de trafics de
personnes et de marchandises vers l’Angleterre et l’Allemagne via le
tunnel trans-Manche. Mais il faut aussi contribuer au développement
355
Pierre Tilly
du réseau de communications interne à la zone transfrontalière pour
vitaliser les futurs échanges de coopération.
Le travail n’est pas mince en matière d’infrastructures, car les
États ont longtemps poursuivi des politiques de protection plutôt que
d’ouverture de leurs frontières. À partir d’un réseau urbain diversifié,
trois grandes zones font l’objet d’un découpage considéré comme
naturel en fonction du tracé des grands axes internationaux : le littoral,
l’aire urbaine centrale et le Hainaut-Cambrésis. La Chambre de
commerce et d’industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing penche en faveur
d’un réseau urbain hiérarchisé autour de l’agglomération métropolitaine et de villes-relais. Elle ne cache pas sa crainte de voir le tronçon
littoral du Nord tomber, à l’aube de l’an 2000, dans l’orbite de Londres,
Anvers et Rotterdam, l’aire urbaine centrale subir l’attraction de la
couronne parisienne et le Hainaut-Cambrésis se rattacher à l’hinterland
de Bruxelles 14. Autrement dit, le Nord serait bien une région carrefour,
mais un carrefour de décisions venues de centres extérieurs à lui. La
Chambre préconise donc de centraliser l’aménagement autour de la
métropole lilloise tout en déplorant l’inexistence en France de pouvoirs
régionaux comme en Belgique ou aux Pays-Bas. Les critiques ne
s’arrêtent pas là portant aussi sur l’obsolescence d’une partie de l’appareil productif, l’absence d’une politique vigoureuse de formation des
hommes et le déficit des équipements urbains.
Des solutions concertées entre les représentants des deux pays
s’imposent. Le 14 mai 1968, une rencontre à la préfecture du Nord
met en présence des dirigeants politiques de la Flandre occidentale, du
Hainaut, du Nord et du Pas-de-Calais pour un examen en commun des
problèmes de coordination pour la réalisation des trois grands itinéraires autoroutiers en cours d’exécution entre la région du Nord et la
Belgique. Une politique d’aménagement du territoire à l’échelle transfrontalière est-elle envisageable ? Un an après cette réunion, une note de
la Mission économique régionale évoquant les problèmes franco-belges
et leurs implications dans la région du Nord en montre crûment les
limites 15. Selon elle, ce n’est qu’en apparence que la Belgique semble ne
pas avoir établi de politique d’aménagement du territoire à long terme,
même si Anvers possède sa stratégie dans la compétition internationale
Tilly Pierre, « L’aménagement du territoire et le développement industriel dans
une perspective transfrontalière. Le cas franco-belge (1950‑1975) » in Aménageurs,
territoires…, p. 150‑151.
15
Archives Départementales du Nord (ADN), fonds CERES, 80 J 219, note
confidentielle, juillet 1969.
14
356
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
entre les ports de la mer du Nord. L’État belge paraît répondre au jour
le jour aux problèmes posés par la disparité des croissances flamande
et wallonne. En fait, le développement de fonctions de commandement
international et d’unification nationale de plus en plus assumées par
Bruxelles d’une part, la recherche d’un contrepoids à la domination trop
exclusive des ports néerlandais d’autre part, conduisent à l’affirmation
spontanée de la capitale belge comme pôle majeur de développement
de l’ensemble Bruxelles-Anvers. Cette tendance attire naturellement,
grâce à sa proximité et son dynamisme, la main-d’œuvre des régions
wallonnes en difficulté, de Mons à Charleroi. Elle se traduit par l’établissement d’un axe nord-sud, du Hainaut à la Zélande en passant par
Bruxelles. À tout le moins, cette situation ne peut être à l’avantage du
Nord.
« L’affirmation par les Belges d’un axe nord-sud prépondérant irait
à l’encontre de la priorité que nous donnons à nos propres liaisons
nord-sud et tendrait naturellement à empêcher une solidarité accrue
entre la région du Nord ou la Wallonie et le reste de la France – mais
pas seulement en direction de Paris. Notre préoccupation doit être de
pousser ces axes vers le sud, et notamment vers le sillon rhodanien par
la Champagne, alors que les Belges s’intéressent surtout aux liaisons
vers Bruxelles et le nord. » 16
Quant à la Chambre de commerce et d’industrie de Lille-­RoubaixTourcoing, les comparaisons auxquelles se livre le Livre blanc de
l’OREAM-Nord entre la situation régionale et les pays voisins
lui paraissent trompeuses 17. Tout d’abord, dans le cas de la région
parisienne et de la Randstadt hollandaise, elle estime que le rapprochement avec la métropole lilloise omet un élément essentiel, à savoir
que ces « grands ensembles urbains polynucléaires » s’appuient sur
d’authentiques villes-capitales auprès desquelles Lille fait encore piètre
figure. Le parallèle avec la Ruhr est jugé plus pertinent, encore qu’il
néglige le rôle privilégié de Düsseldorf, dû tant à sa fonction ancienne
de ville résidentielle des grands industriels de la Ruhr qu’à son élévation
depuis la Seconde Guerre mondiale au rang de capitale de la Rhénanie
du Nord-Westphalie, avec une bourse et un aéroport international qui se
situent à la deuxième place en Allemagne. Pour la Chambre de LilleRoubaix-Tourcoing, la région doit passer de la défensive à une attitude
offensive. Son complexe portuaire, mieux placé que les ports belges ou
ADN, fonds CERES, 80 J 219, note confidentielle, juillet 1969.
ADN, fonds CERES, 80J246, note de Decoster à Debeyre, 7 mai 1968.
16
17
357
Pierre Tilly
néerlandais pour accueillir les navires de gros tonnage, doit affirmer
une vocation résolument européenne et desservir un hinterland débordant largement la région pour englober aussi bien les espaces français
voisins, jusqu’à la Lorraine, qu’une partie du Benelux et de la Rhénanie,
et même le sud-est de l’Angleterre grâce au tunnel sous la Manche.
« C’est aussi le rôle des liaisons est-ouest d’étendre cet hinter­
land des ports du Nord. La chance de la région est de pouvoir se
saisir des liaisons internationales, détournées à son profit grâce
au tunnel sous la Manche et au rapprochement probable de la
Grande-Bretagne du Marché Commun, pour réaliser du même coup
ses structures internes (axe est-ouest) et ses liaisons externes vers
la Rhénanie, la Lorraine et le sillon rhodanien. Cette vocation de la
région du nord dans la politique spatiale de développement indus­
triel français au sein de l’Europe exige seulement que les grandes
infrastructures de transport international, de toute façon néces­
saires, soient infléchies dans leur tracé et réalisées dans le temps, de
telle sorte qu’elles servent au mieux la compétition avec le Benelux
et la conversion des bassins miniers et sidérurgiques. » 18
Au début des années 1970, le développement des relations internes
de la région résulte presque exclusivement d’une amélioration du
réseau routier. La croissance et le renforcement du réseau ferroviaire
se faisaient attendre alors que cette offre pouvait permettre de favoriser
des transferts notables de voyageurs de la route vers le rail. Celui-ci
semble néanmoins à nouveau porteur d’avenir. L’augmentation du
coût de l’énergie est présentée comme un facteur déterminant d’une
dynamique régionale dans les prochaines décennies. Le projet de TGV
est censé pouvoir y contribuer dans le cadre d’une politique nouvelle
en matière de transports en commun initiée par les trains rapides de
première classe Trans-Europ-Express reliant les principales villes
d’Europe occidentale, équipés de voitures climatisées de grand confort,
et poursuivie par la véritable révolution technologique que constituent
les trains à grande vitesse 19. Le projet de TGV « Paris-Nord » s’inscrit
dans un plan directeur visant à la constitution d’un réseau ferroviaire
européen inter-villes. Les plus grandes agglomérations de l’Europe du
Nord-Ouest sont concernées par le projet : Paris, Londres, Bruxelles,
ADN, fonds CERES, 80J219, note confidentielle, juillet 1969.
« Le secrétariat d’État aux transports aux écoutes de la Chambre de commerce »,
in Informations, Chambre de commerce et d’industrie de Lille/Roubaix/Tourcoing,
n° 17, avril 1974, p. 2.
18
19
358
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
Amsterdam, Rotterdam, Cologne et Francfort. Pour Lille, il s’agit de
s’inscrire dans l’axe futur Bruxelles-Londres envisagé pour 1985. Le but
est non seulement d’assurer des liaisons rapides et de rétrécir l’espace,
mais aussi de créer des liaisons fréquentes, cadencées entre ces grandes
agglomérations, et dans le cas de Lille avec le littoral, Dunkerque en
particulier. Dans un rayon de quatre cents kilomètres, les durées des
trajets de centre-ville à centre-ville ne dépasseraient pas celles du transport aérien, jouant ainsi un peu le rôle de l’avion aux États-Unis pour
l’Europe de l’Ouest. Une perspective qui se trouverait très certainement renforcée par l’augmentation durable du prix de l’énergie. Mais si
cent millions d’habitants sont concernés par ce nouveau réseau appelé
à leur assurer un confort, une sécurité et une régularité sur des bases
nouvelles, des négociations complexes entre les trois réseaux de chemin
de fer intéressés (France, Belgique, Allemagne) s’imposent. L’espoir est
d’infléchir au profit de la région les puissants courants commerciaux
qui traversent l’Europe du Nord‑Ouest à l’aide d’un puissant réseau
d’infrastructures prenant appui sur le littoral comme pôle de croissance
et se raccordant, à partir de là et à travers la région, aux réseaux de pays
voisins : autoroutes-canal à grand gabarit, réseau télé-informatique,
lignes de transport d’énergie et réseau ferré à grande vitesse.
Trois problèmes se posent plus particulièrement :
1°Le nombre et la situation des points d’arrêt régionaux,
2°Le nombre de trains internationaux qui s’arrêteront effectivement,
3°Le rabattement du trafic régional sur ces points d’arrêt.
Mais côté français, l’ambition majeure demeure l’amélioration des
relations avec Paris. Il s’agit aussi de savoir si ce réseau TGV peut
favoriser le renforcement des fonctions urbaines autour du tertiaire de
haut niveau dont la région Nord espère bien profiter en envisageant
l’organisation d’un réseau de villes autour de la métropole lilloise afin
que les agglomérations ne vivent pas en autarcie. Arras serait appelé à
jouer pour les relations avec la capitale le rôle que jouera Lille vis-à-vis
de l’Europe du Nord-Ouest. Le plan de développement envisagé
cherche à résoudre les problèmes spécifiques de chaque agglomération et à éviter que la réalisation de dessertes régionales n’entraîne des
distorsions locales d’accessibilité. Cette nouvelle organisation est considérée comme étant de nature, par resserrement de l’espace, à modifier
sensiblement la taille des bassins de main-d’œuvre et d’emploi. En cela,
le plan de transport comporte un enjeu social, en faveur d’une mobilité
accrue des hommes et des femmes susceptible d’appuyer la cohésion
régionale et la diffusion de la croissance.
359
Pierre Tilly
Comme nous l’avons vu, le réseau ferroviaire a longtemps présenté
des carences croissantes dans l’après-guerre avec la fermeture de voies
estimées trop peu rentables et la création de « culs-de-sac » comme la
ligne Tournai-Douai ou Mons-Valenciennes. Le retard d’électrification entre les deux pays a mis du temps à être résorbé entre logique de
concurrence et de coopération. Et pourtant l’électrification de la ligne
Amsterdam-Bruxelles-Paris suscitait de grands espoirs en 1970 comme
outil de désenclavement du Hainaut belge pour s’inscrire dans les grands
courants des transports européens à moyennes et longues distances.
Quant à la création d’une ligne TGV sur le terrain wallon, elle fit l’objet
d’oppositions qui ont fait place aujourd’hui à de profondes interrogations sur sa rentabilité et sa survie alors que celle menant à Londres au
départ de Bruxelles en passant par Lille représente un grand succès.
En guise de conclusion, ce cheminement entre enjeux nationaux,
régionaux et transfrontaliers montre combien les infrastructures de
transport sont loin d’être neutres ; elles constituent un élément essentiel
de toute politique d’aménagement territorial. Selon les choix faits, elles
peuvent être source de développement ou de désertification. Envisagées sous un angle transfrontalier, elles s’inscrivent dans une autre
logique. Les transports se heurtent, quelles que soient leurs formes,
à une frontière « filtrante ». Il reste que Lille s’est affirmée comme
métropole-pivot, renforcée dans ce rôle par le tunnel sous la Manche,
le développement du trafic aérien et des lignes ferroviaires à grande
vitesse.
Cette évolution du secteur des transports à l’image du trafic fluvial, a
révélé d’autres effets de frontière correspondant à des perceptions différentes des transports fluviaux en France et en Belgique où la dimension
européenne chère aux Belges cohabitait tant bien que mal avec la vision
plus territoriale côté français 20. L’exception confirmant cette règle d’un
choix difficile entre préférence nationale et enjeux européens, de plus en
plus importants avec le marché unique, fut les infrastructures routières.
En effet, elles offraient la vision d’une frontière perméable au point
qu’aujourd’hui le transport par camion doit, pour répondre aux objectifs
du développement durable, s’inscrire dans une logique d’inter-modalité
qui est devenue un courant dominant dans le secteur des transports.
Au bout du compte, les réseaux de communication de toute nature
ont de plus en plus pris la fonction de « compléments » des comptoirs
Contrairement à la Belgique, la France a associé plus étroitement les régions à
l’organisation des transports.
20
360
Priorités nationales et maillons transfrontaliers dans les réseaux de transports
installés le long des rivages de la mer du Nord 21. Les priorités nationales
ont longtemps conduit à privilégier l’aménagement des espaces nationaux face au maillage transfrontalier et européen. Le rôle des pouvoirs
locaux, des lobbys patronaux et des syndicats fut à cet égard décisif
jusqu’aux années 1980 comme la concurrence entre les modes de transport. La logique effective de desserte et d’aménagement du territoire
sur une base nationale tranche avec des projets de nature européenne
qui restent au stade des discours jusqu’à la fin des années 1970. Cela
étant, une décennie plus tard, l’espace et l’horizon d’action de la
puissance publique vont prendre une nouvelle dimension. Transformer
des zones de séparation en zones d’union devient, avec la perspective 1992 ouverte par l’Acte unique européen de 1986, un projet particulièrement mobilisateur pour les zones frontalières et un signal fort
pour des espaces à la recherche d’une nouvelle dynamique économique
et sociale. Cette nouvelle étape du projet européen, incarnée notamment
par le Livre blanc de Delors qui prévoit le lancement d’un projet de
Schéma Directeur de lignes à grande vitesse, contribue en matière de
transport à remettre en question des logiques nationales profondément
ancrées dans l’histoire et de s’inscrire résolument contre « les trans­
ports, bastion des nationalismes » 22.
Atlas transfrontalier…, p. 20.
Dumoulin Michel, La Commission européenne…, p. 458.
21
22
361
Die Schaffung einer eidgenössischen
Flugplatzkonzeption, 1935-1956
Sandro Fehr, Universität Bern
Abstract : The dawn of air travel in the early 1920s was also dependent on
adequate infrastructure. Prior to World War II, the construction of airfields in
Switzerland was not coordinated and took place in a competitive environment with
no federal intervention. Contrary to the initial phase of railway development, it
was not private companies who competed against each other to build air transport infrastructure, but cities and cantons. Through the promotion and financing
of airfields that generally operated at a loss, cities and cantons wished to become
involved in air travel which, at the time, held the promise of economic profit and
prestige. These general conditions explain why the airfields of the three biggest
economic and population centres in Switzerland also became the country’s most
prominent centres of air travel.
Towards the end of the interwar period, the federal administration attempted to end
regional competition and push for coordination. During World War II, the idea of
a Swiss airfield policy to prepare the country for the air traffic expected after the
war was put forward. The confirmation of the former Geneva-Basel-Zurich triangle
of airfields conflicted with the plan for a central Swiss airport in Bern-Utzenstorf.
Nevertheless, in 1945, the federal government decided to build an intercontinental
airport in Zurich and continental airports in Geneva and Basel. The endorsement
of the triangle of airfields upgraded the interwar status quo to the rank of Swiss
policy. In 1956, the special status of Zurich was lifted, enabling a standard categorisation of the airport triangle which holds to this day.
Die Planung und der Betrieb von Verkehrssystemen standen schon
immer im Spannungsfeld unterschiedlichster Vorstellungen und Interessen, wie beispielsweise denen der Prinzipien von Konkurrenz und
Koordination. Verkehrskoordination kann zum einen auf der Ebene des
363
Sandro Fehr
Gesamtverkehrssystems erfolgen, wobei verschiedene Verkehrs- und
Transportarten strukturiert, organisiert und komplementär aufeinander
bezogen werden. Zum anderen finden Koordination und Konkurrenz
aber auch auf der Ebene der Teilsysteme der einzelnen Verkehrsträger
statt, wie etwa im Schienen-, im Strassen- oder im Luftverkehr.
Am Beispiel des Schienenverkehrs lässt sich zeigen, dass in der
Schweiz bereits unmittelbar nach der Gründung des Bundesstaates
Diskussionen über den ordnungspolitischen Rahmen dieses neuen
Verkehrsträgers entbrannten. Die eidgenössischen Räte entschieden
1852, den «Bau und den Betrieb von Eisenbahnen […] den Kantonen
bzw. der Privattätigkeit» zu überlassen. Da der Einfluss der Kantone
auf die Vergabe von Konzessionen beschränkt blieb, führte der eidgenössische Grundsatzentscheid letztlich zu einer von privatem Wettbewerb geprägten Phase der Konkurrenz – ohne nennenswerte staatliche
Koordination 1. Wie sich herausstellte, verweigerten sich die privaten
Akteure aber auch einer gegenseitigen Koordination, was nicht nur zu
einem «Tarifwirrwarr» führte, sondern auch netzübergreifende Transporte erschwerte oder sogar unmöglich machte. Diese Missstände
trugen dazu bei, dass der Bund 1872 eine neue Ära des staatlichen
Interventionismus und der Koordination einläutete, die 1898 sogar im
Ende der privatwirtschaftlichen Epoche und der Gründung der Schweizerischen Bundesbahnen gipfelte 2.
Wie im 19. Jahrhundert schon für die neuen Eisenbahnen musste in
der Schweiz ab den frühen 1920er-Jahren auch für den einsetzenden
Luftverkehr eine geeignete Infrastruktur geschaffen werden. Dazu
waren zunächst entsprechend ausgebaute und ausgerüstete Flugplätze
erforderlich. Im vorliegenden Artikel wird aufgezeigt, unter welchen
ordnungspolitischen Rahmenbedingungen sich die Luftfahrtinfrastruktur in der Schweiz entwickelte. Im Zentrum stehen dabei die ab der
zweiten Hälfte der 1930er-Jahre verstärkt einsetzenden ­Koordinationsund Interventionsbestrebungen auf bundesstaatlicher Ebene und die
in diesem Kontext entstandene eidgenössische Flugplatzkonzeption.
Zur Beantwortung der Fragestellung wird zuerst die Entwicklung der
Luftfahrtinfrastruktur in der Zwischenkriegszeit behandelt. Danach
Schweizerisches Bundesarchiv (Hg.), Netze. Verkehr – Telekommunikation – Verkehr,
Bern: Schweizerisches Bundesarchiv, 1997, p. 37, 38, 45.
2
Kirchhofer André, Steinmann Jonas, «Staatsintervention oder Wettbewerb?
Ordnungspolitische Paradigmen im Schweizer Eisenbahnwesen seit 1852», in Kirchhofer André, Krämer Daniel, Merki Christoph Maria (Hg.), Nachhaltige Geschichte.
Festschrift für Christian Pfister, Zürich: Chronos, 2009, p. 333-337.
1
364
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
wird vertieft auf die Entstehung der Flugplatzkonzeption gegen Ende
des Zweiten Weltkriegs und deren Erweiterung in den 1950er-Jahren
eingegangen, wobei auch den Diskussionen um die Flughafenstandorte
die nötige Beachtung geschenkt wird.
Das Flugplatzdreieck Zürich-Basel-Genf
in der Zwischenkriegszeit
Vor dem Ersten Weltkrieg existierte in der Schweiz noch kein Luftverkehr. Wer sich in eines der frühen Tragflächenflugzeuge, Luftschiffe
oder in den Korb eines Gasballons setzte, tat dies aus Abenteuerlust und
Vergnügen sowie vereinzelt auch aus wissenschaftlichen oder militärischen Gründen. Die kommerzielle Nutzung der Fluggeräte beschränkte
sich im Wesentlichen auf Rundflüge und Flugtage, an denen sie den
faszinierten Zuschauermassen von wagemutigen Piloten gegen Entgelt
präsentiert wurden 3. Als Start- und Landeflächen dienten den Tragflächenflugzeugen geeignete Wiesen, wie etwa städtische Allmenden. Da
sich mit der damaligen Luftfahrt nur wenig Geld verdienen liess, waren
Flugplätze kaum zu finanzieren. Die Existenz der wenigen permanenten
Anlagen – etwa in Dübendorf, Avenches und Collex-Bossy – war daher
alles andere als gesichert. So befand sich der Flugplatz Dübendorf im
Jahr 1914 beispielsweise bereits in Liquidation, als ihn die im selben
Jahr gegründete schweizerische Luftwaffe übernahm und dadurch vor
der Auflösung bewahrte 4.
Nach dem Ersten Weltkrieg wurden auch in der Schweiz Fluggesellschaften gegründet, die ihre Foto-, Rund- und Reiseflüge zunächst lediglich auf Anfrage anboten und auf staatliche Subventionen angewiesen
waren. Die ersten, nach einem Flugplan betriebenen Fluglinien
wurden in der Schweiz im Jahr 1922 eröffnet 5. Der damit entstandene
Luftverkehr führte auch zu einem Bedeutungswandel der Flugplätze.
Waren sie früher primär Start-, Lande- und Abstellplätze für Kampf-,
Akrobatik- und Sportflugzeuge, entwickelten sie sich nun immer mehr
zu Verkehrsknotenpunkten mit Abfertigungsgebäuden und Hangars.
Gegen Ende der Zwischenkriegszeit bestanden mit Zürich-Dübendorf,
Merki Christoph Maria, Verkehrsgeschichte und Mobilität, Stuttgart: Verlag Eugen
Ulmer, 2008, p. 61, 67.
4
Tilgenkamp Erich, Schweizer Luftfahrt, Bd. 2, Schwerer als die Luft, Zürich:
Aero-Verlag, 1942, p. 123-129.
5
Isler Arnold, Dollfus Walter, Der dritte Weg. Ein Beitrag zur Entwicklungsge­
schichte der Zivilluftfahrt mit besonderer Berücksichtigung der Schweiz, Oerlikon:
Verlag Schweizer Aero-Revue, 1933, p. 34, 36, 38-40.
3
365
Sandro Fehr
Basel-Birsfelden, Genf-Cointrin, Bern-Belpmoos, Lausanne-La Blécherette, St. Gallen-Altenrhein und La Chaux-de-Fonds-Les Eplatures
insgesamt sieben Zollflugplätze für Landflugzeuge, die auch im internationalen Luftverkehr angeflogen wurden 6. Ein Vergleich der Verkehrsleistungen zeigt jedoch, dass die Standorte Zürich, Basel und Genf
bereits in der Zwischenkriegszeit erheblich höhere Passagierzahlen als
die übrigen Flugplätze hatten. Die mit Abstand höchsten Zahlen wies
1938 mit 30’108 Personen der Flugplatz Zürich-Dübendorf auf, dem
Basel-Birsfelden mit 14’319 und Genf-Cointrin mit 8’555 Personen
folgten. Die übrigen Zollflugplätze beförderten mit Werten zwischen
4’275 (Bern-Belpmoos) und 115 Personen (La Chaux-de-Fonds-Les
Eplatures) pro Jahr deutlich weniger Passagiere. Im Frachtbereich lagen
1938 Genf mit 148 Tonnen an erster, Zürich mit 116 Tonnen an zweiter
und Basel mit 65 Tonnen an dritter Stelle. Das Frachtaufkommen der
übrigen Flugplätze ist im Vergleich vernachlässigbar. Im Flugpostbereich
war Basel-Birsfelden mit 14’857 Sendungen der mit Abstand wichtigste
Flugplatz der Schweiz. Ihm folgten mit 6’466 Briefen Zürich-Dübendorf und mit 882 Sendungen Genf-Cointrin 7. Es kann somit festgestellt werden, dass das noch heute bestehende Flugplatzdreieck der
wichtigsten und grössten Standorte Zürich, Basel und Genf bereits in der
Zwischenkriegszeit existierte – wenn auch mit dem Unterschied, dass
Genf damals an dritter und nicht wie heute an zweiter Stelle lag.
Doch unter welchen ordnungspolitischen Rahmenbedingungen
hatte sich diese Flugplatzstruktur der Schweiz in der Zwischenkriegszeit herausgebildet? Dazu ist zunächst festzuhalten, dass die damaligen
Verkehrsflugplätze betriebswirtschaftlich allesamt stark defizitär waren 8.
Gleichzeitig wurden sie aber als der volkswirtschaftlichen Entwicklung förderlich erachtet und waren darüber hinaus auch mit Prestige
verbunden. Zwischen den Regionen entwickelte sich daher schon früh
ein Wettbewerb um Anschlüsse an den Luftverkehr, der unter anderem
über die Etablierung und Subventionierung von Flugplätzen ausgetragen wurde. Obschon sich verschiedentlich auch Private beteiligten,
waren es in erster Linie die Städte, Gemeinden und Kantone, die den
Bau und den Unterhalt der teuren und defizitären Anlagen finanzierten
Schweizerische Verkehrszentrale, Aero-Club der Schweiz, Touring Club der
Schweiz (Hg.), Schweizer Flugführer, Zürich: Neue Zürcher Zeitung, 1939, p. 10.
7
Dollfus Walter, «Grundlagen und Vorschläge für ein Gesamtausbauprogramm der
schweizerischen Zivilflugplätze», Landes-, Regional- & Ortsplanung, Nr. 2, 1942,
p. 24, 28, 30.
8
Siehe beispielsweise Lüde Walter, «Förderung des Zivilluftverkehrs durch Kanton
und Stadt Zürich», Zürcher Statistische Nachrichten, Nr. 3, 1944, p. 364.
6
366
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
und die dadurch zu den mit Abstand wichtigsten Akteuren wurden. Der
Bund hingegen sprach den Flugplätzen weder namhafte Beträge zu,
noch koordinierte er ihre Entwicklung. Stattdessen beschränkte er sich
darauf, die Anlagen bei der Erfüllung der Vorschriften zu konzessionieren 9. Da sich die Kantone und Städte auch gegenseitig kaum koordinierten, blieb die Entstehung des schweizerischen Flugplatznetzes der
Konkurrenz staatlicher Körperschaften überlassen. Die Verkehrsflugplätze entstanden daher grundsätzlich dort, wo die entsprechenden
Ressourcen verfügbar waren. Dies führte dazu, dass sich die wirtschaftlich stärksten und bevölkerungsreichsten Zentren, nämlich Zürich,
Basel und Genf, auch als Zentren des Luftverkehrs etablierten.
Das eidgenössische Flugplatzprogramm
Mitte der 1930er-Jahre setzten in der Bundesverwaltung Bestrebungen zur Einnahme einer aktiveren Rolle ein. Das Ziel bestand
darin, von den bislang dominanten lokalen und regionalen Perspektiven zugunsten einer nationalen Perspektive abzurücken. Der Phase
der Konkurrenz sollte eine Phase bundesstaatlicher Koordination
folgen. Erste entsprechende Hinweise finden sich im Exposé des
Direktors des Eidgenössischen Luftamts vom 15. Juli 1935, in dem
dieser explizit forderte: «Unnötige Konkurrenzkämpfe und Überorga­
nisationen auf Grund übertriebener lokaler Prestigebetonung müssen
vermieden werden». Stattdessen sei im sogenannten «Grundsystem
[…] eine Konzentration auf ein Minimum von Plätzen und Linien»
anzustreben 10.
Die Gründe für diese Konzentrationsbemühungen des Luftamts
waren gemäss einem zwei Jahre später erschienenen Exposé primär die
rasante technische Entwicklung der Luftfahrt und die damit verbundenen
Anforderungen an die Flugplätze. Hinsichtlich der weiteren Entwicklung wurde mit dem baldigen Aufkommen eines mit «Riesen-Schnellflugzeugen» betriebenen «Grossdistanzverkehrs» gerechnet, der auch
auf entsprechende «Grossflugplätze» angewiesen sei. Damit auch die
Schweiz an diesem prognostizierten neuen Luftverkehr partizipieren
könne, müsse daher «zum mindesten in unserem Lande ein Platz
vorhanden sein, welcher weitere Möglichkeiten in sich schliesst. […]
Dollfus Walter, «Grundlagen und Vorschläge…», p. 20-21.
Schweizerisches Bundesarchiv (BAR) E 8150 (A) 1968/67, Bd. 266, Exposé des
Direktors des Eidgenössischen Luftamts über die allgemeine Situation im Luftverkehr
und Ausblick auf die zukünftige Organisation der schweizerischen Luftfahrt, 15. Juli
1935, p. 8.
9
10
367
Sandro Fehr
Wir brauchen also eine Überklasse von Flugplätzen (mindestens in
einem Exemplar), die wir mit Grossflugplatz für den internationalen
Verkehr […] bezeichnen». Dabei diente dem Eidgenössischen Luftamt
explizit der deutsche Flughafen und nationalsozialistische Prestigebau
Berlin-Tempelhof als Vorbild. Der Standort des zukünftigen schweizerischen Grossflughafens blieb 1937 zwar noch offen, doch zog das
Luftamt bereits auch Gebiete ausserhalb des bestehenden Flugplatzdreiecks Zürich-Basel-Genf in Erwägung 11.
Spätestens seit 1938 bestand im Luftamt ein «eidgenössisches
Ausbauprogramm für Zivilflugplätze», das finanziell auf der Unterstützung ausgewählter Flugplatzprojekte durch Arbeitsbeschaffungskredite
basierte 12. Über die genaue Ausgestaltung der zukünftigen Flugplatzstruktur der Schweiz bestand zwar nach wie vor keine Einigkeit. Wie
interne Akten zeigen, wurden im Luftamt aber auch Planungsvarianten in Erwägung gezogen, mit denen das etablierte ­Flugplatzdreieck
­Zürich-Basel-Genf vollständig überwunden worden wäre. Eine dieser
Varianten von 1941 sah vor, in der «Gegend zwischen Kirchberg –
Utzenstorf – Koppigen – Ersigen – Kirchberg» einen «schweizerischen
Grossflughafen» für die «kommenden Grossflugzeuge» zu errichten.
Dieser Zentralflughafen hätte von den Passagieren aus den Schweizer
Städten per Eisenbahn mittels «speziellen ­Schnelltriebwagen» erreicht
werden können, in denen die Abfertigung während der Fahrt erfolgt
wäre. Zu den übrigen Flugplätzen wurde festgehalten: «Von den beste­
henden schweizerischen Flugplätzen entspricht keiner den Anfor­
derungen». Selbst zum Standort Zürich wurde vermerkt: «Solange
Dübendorf zugleich Militärflugplatz ist, kommt [auch] er für den
unbeschränkten internationalen Luftverkehr nicht in Frage. Die
anderen Plätze wie Altenrhein, Basel, Bern und Genf besitzen aus
geographischen Gründen absolut keine Chancen» 13.
Am 24. April 1942 umriss der Delegierte für Zivilluftfahrt des
­Eidgenössischen Post- und Eisenbahndepartements im Rahmen einer
Konferenz mit Vertretern von Kantonen, Gemeinden und Flugplatz­
betreibern erstmals offiziell die «Grundsätze des Flugplatzprogramms».
Dabei lehnte er die Zusammenlegung aller Schweizer Flugplätze in
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 5, Exposé des Eidgenössischen Luftamts über die
Standardisierung der Flugplätze, 23. Mai 1937, p. 1-4.
12
BAR E 8150 (A) 1968/67, Bd. 266, Exposé des Direktors des Eidgenössischen
Luftamts über die allgemeine Lage im Luftverkehr, 12. Dezember 1938, p. 2-3.
13
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Huggler Hans, Flugplatz- und Luftverkehrs­
probleme der Schweiz, 30. Juni 1941, p. 1-2.
11
368
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
einem einzigen Zentralflughafen ab. Stattdessen sollten in der Schweiz
sowohl ein einzelner Grossflughafen für den interkontinentalen Luftverkehr als auch eine Zahl von Stadtflughäfen für den kontinentalen
Luftverkehr gebaut werden. Vorschläge für Standorte und Flughafenprojekte konnten beim Luftamt eingereicht werden, das diese in der
Folge einem Entscheidungsverfahren zuführte 14.
Der Variantenstreit
Die Koordinations- und Interventionsbestrebungen der Bundesbehörden und die damit verbundene Möglichkeit eines neuartigen
Zentralflughafens, der auch abseits des etablierten Flugplatzdreiecks liegen durfte, entfachten die Hoffnungen diverser kleinerer
Flugplatzstandorte – allen voran diejenigen der Bundesstadt Bern.
Diese hatte schon vor der Flugplatzkonferenz von 1942 erste Abklärungen über die Möglichkeit der Errichtung eines neuen Flughafens
in die Wege geleitet 15. Die Untersuchungen konzentrierten sich schon
bald auf die Ebene bei Utzenstorf, die bereits in internen Studien des
­Eidgenössischen Luftamts empfohlen worden war. Am 2. November
1943 reichten der Kanton, die Stadt und die Flugplatzgenossenschaft
Bern beim Chef des Eidgenössischen Post- und Eisenbahndepartements umfangreiche Unterlagen für ein Projekt eines schweizerischen
Zentralflughafens in Utzenstorf ein 16. Dieses sah nichts Geringeres
als vier Hartbelagpisten von bis zu 2’800 Metern Länge und diverse
Hochbauten vor, wie beispielsweise ein grosses Aufnahmegebäude, ein
Restaurant, ein Hotel, einen viergleisigen Kopfbahnhof, einen Güterbahnhof, Busperrons, einen Kontrollturm, Flugzeughallen und eine
Werfthalle (siehe Abbildung 1) 17. Damit bewarb sich Bern direkt um den
vom Luftamt ­vorgesehenen schweizerischen ­Interkontinentalflughafen.
Staatsarchiv des Kantons Bern (StABE) BB 10, 3.214, Protokoll der Konferenz
betreffend das Ausbauprogramm der Flugplätze, 24. April 1942, p. 2-5.
15
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Schreiben der Flugplatz-Genossenschaft Bern an
das Eidgenössische Luftamt, 9. Juli 1941.
16
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Schreiben des Aktionskomitees für den Schweizeri­
schen Grossflugplatz Utzenstorf an das Eidgenössische Luftamt, 9. Dezember 1943, p. 1.
17
Flugplatzgenossenschaft Bern, Der Schweizerische Grossflughafen Mittelland. Das
Flughafenprojekt Bern-Utzenstorf, Bern: Flugplatz-Genossenschaft, 1945, p. 9, 12,
14. Siehe auch Bratschi Simon, Berner Flughafenprojekte 1942-2003. Bewertungs­
wandel einer Verkehrsinfrastrukturanlage, Bern: Unveröffentlichte Lizentiatsarbeit,
2003; Bratschi Simon, «Wunschtraum und Wirklichkeit. Berner Flughafenprojekte
vom Zweiten Weltkrieg bis heute», Berner Zeitschrift für Geschichte und Heimatkunde,
2005, p. 1-39.
14
369
Sandro Fehr
Abbildung 1: Skizze des abgelehnten Projekts des schweizerischen Zentral­
flughafens Bern-Utzenstorf.
Blick vom Rollfeld auf Hotel, Restaurant, Aufnahmegebäude und Kontrollturm
(von links nach rechts). Hans Brechbühler und Max Jenni Architekten, Bern,
20. Juni 1943. Quelle: Staatsarchiv Bern, BB X 923.
Die ­
Unterlagen enthielten zwar auch eine Projektvariante für einen
Kontinentalflughafen Bern-Utzenstorf. Wie nicht nur das Luftamt
vermutete, sondern auch die Berner Behörden selber zugaben, bestand
diese Projektvariante jedoch nur pro forma, da der Standort Utzenstorf
für einen reinen Stadtflughafen nicht geeignet war 18.
Neben Bern kam auch in anderen Regionen die Hoffnung auf, das
Flugplatzdreieck mit dem Zentralflughafenkonzept überwinden und selber
zu einem Luftverkehrszentrum aufsteigen zu können. In Luzern bestand
etwa die Idee, den Grossflughafen im Wauwilermoos zu errichten 19.
Nachdem sich dieser Standort als ungeeignet herausgestellt hatte, wurde
Cham vorgeschlagen, aber letztlich ebenfalls verworfen 20. Zu erwähnen ist
auch die Idee des Luftfahrtpioniers Martin Hug, in St. Gallen-Altenrhein
am Bodensee nichts Geringeres als einen europäischen Zentralflughafen
für interkontinental verkehrende Grosswasserflugzeuge zu errichten 21.
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Interner Bericht zum Subventionsbegehren für
die Projektierung eines neuen Stadtflugplatzes Bern und eines Zentralflugplatzes der
Schweiz in der Gegend von Utzenstorf – Kirchberg– Koppigen, 2. Oktober 1942, p. 1;
StABE BB 10, 3.214, Schreiben des Abteilungschefs der Eisenbahn-Direktion an den
Bau- und Eisenbahndirektor des Kantons Bern, 25. April 1945, p. 1.
19
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Schreiben von Ludwig Friedrich Meyer an Fritz
Marbach, 19. August 1941, p. 2.
20
BAR E 8001 (B) 1000/1132, Bd. 8, Étude du service de la sécurité aérienne de l’office
aérien fédéral sur le choix d’un aéroport intercontinental suisse, 22. März 1943, p. 10.
21
Hug Martin, «Zur Frage eines schweizerischen Zentralflughafens», Neue Zürcher
Zeitung, Abendausgabe 04.08.1942, p. 5; Hug Martin, «Ein europäischer Zentralflughafen für Land- und Wasserflugzeuge am Bodensee», Rorschacher Neujahrsblatt, 1944,
p. 15-24.
18
370
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
Während Bern die Konkurrenz Luzerns oder St. Gallens nicht zu
fürchten brauchte, standen ihm mit den Vertretern des etablierten Flugplatzdreiecks auch ernstzunehmende Widersacher gegenüber. Insbesondere
Genf und Zürich betrachteten den Zentralflughafen als Bedrohung ihrer
Interessen. Die beiden Kantonsregierungen beschlossen daher, ihre gegenseitigen Ressentiments vorübergehend in den Hintergrund treten zu lassen
und stattdessen gemeinsam gegen das Projekt Bern-Utzenstorf vorzugehen 22. Daneben verfolgten sie aber auch ihre jeweils eigenen Strategien.
Die Zürcher Vorgehensweise bestand darin, den ursprünglich vorgesehenen, beschränkten Ausbau des bestehenden Flugplatzes in Dübendorf
aufzugeben und Bern-Utzenstorf stattdessen mit dem Projekt eines Interkontinentalflughafens im zürcherischen Kloten direkt zu konkurrenzieren.
Als der Zürcher Regierungsrat das Projekt Zürich-Kloten am 31. Juli 1944
beim Bundesrat einreichte, betonte er, dass es dem Utzenstorfer Projekt
«weit überlegen» sei. Er beantragte daher, «dass der Flughafen Kloten
als schweizerischer Hauptflughafen zu gelten [habe] und dass er für die
Aufnahme des interkontinentalen Verkehrs vorzusehen sei» 23.
Der Kanton Genf verfolgte währenddessen eine gänzlich andere
Strategie: Er wartete die Festlegung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption und die damit verbundenen Kreditzusagen gar nicht erst
ab, sondern nutzte die kriegsbedingte Einstellung der Zivilluftfahrt
dafür, den Flugplatz Genf-Cointrin in Eigenregie und auf eigene
Kosten stark auszubauen. Der Grosse Rat des Kantons Genf bewilligte
die erforderlichen Mittel im Umfang von fünf Millionen Franken am
7. Mai 1941, worauf fünf Monate später bereits die Bauarbeiten aufgenommen wurden 24. Als das Projekt Bern-Utzenstorf Ende 1943 bei den
Bundesbehörden eingereicht wurde, war die Piste in Genf-Cointrin
bereits auf einer Länge von rund einem Kilometer betoniert 25. Die
geplante ­Pistenlänge wurde allerdings noch während der Bauarbeiten
auf 1’200 Meter erweitert, wofür der Kanton zusätzliche vier Millionen
22
Staatsarchiv des Kantons Zürich (StAZ) Z 37.313, Schreiben des Conseiller d’État
du Commerce et de l’Industrie des Kantons Genf an Regierungsrat Corrodi, 30. April
1942; StAZ Z 37.313, Schreiben des Direktors der öffentlichen Bauten an Staatsrat
Picot, 6. Mai 1942.
23
StAZ V V 1.21, Aus dem Protokoll des Regierungsrates des Kantons Zürich vom
31. Juli 1944, p. 9-10.
24
Archives d’Etat de Genève (AEG) 1986 va 9.88.247, Arrêté législatif ouvrant au
Conseil d’Etat un crédit de Fr. 5.960.000.- pour financer les travaux d’agrandissement
de l’Aéroport de Cointrin, de regroupement des policliniques et divers travaux
intéressant les abords de l’Aéroport du 7 mai 1941.
25
Lescaze Bernard, L’envol d’une ville. Une histoire de l’aéroport de Genève, Genève:
Slatkine, 2009, p. 116.
371
Sandro Fehr
Franken zusprach 26. Im November 1944 war die Piste schliesslich so
weit fertiggestellt, dass sie zweckgemäss benutzt werden konnte 27. Die
Bundesbehörden befürworteten das Genfer Vorgehen zwar grundsätzlich und unterstützten es auch mit rund 310’000 Franken 28. Dennoch
fand es faktisch ausserhalb des eidgenössischen Flugplatzprogramms
statt und zielte primär darauf ab, Tatsachen zu schaffen, welche die
anderen Akteure nur zur Kenntnis nehmen konnten.
Der Status quo wird zur Konzeption erhoben
Das Eidgenössische Luftamt und der Delegierte für Zivilluftfahrt führten ihre Arbeit an der eidgenössischen Flugplatzkonzeption
während der gesamten Kriegszeit fort. Wie interne Akten zeigen, kam es
dabei bereits vor der offiziellen Einreichung aller in Frage kommenden
Flughafenprojekte zu weitreichenden Grundsatzbeschlüssen. Als
entscheidend sollte sich insbesondere die bereits 1941 erstmals
geäusserte Meinung des Delegierten für Zivilluftfahrt, Eduard Amstutz,
herausstellen, den Ausbau der Stadtflughäfen zeitlich vor dem Bau
des Interkontinentalflughafens vorzunehmen 29. Wohl auch unter dem
Eindruck des in Genf-Cointrin bereits im Entstehen begriffenen Kontinentalflughafens wurde die Priorisierung des Ausbaus der Stadtflughäfen anschliessend auch zur offiziellen Doktrin der Bundesbehörden.
Am 3. Mai 1944 – also noch vor der Einreichung der Zürcher Projektunterlagen – schrieb Amstutz, die erste und dringlichste Notwendigkeit
im Ausbauprogramm der Flugplätze sei nach wie vor der Ausbau von
mindestens zwei Flugplätzen – am besten von Zürich und Genf – zu
Stadtflughäfen. Diese Stadtflughäfen sollten die Träger des europäischen Luftverkehrs sein, der immer der Hauptanteil des s­ chweizerischen
Luftverkehrs bleiben werde. Im Gegensatz zu diesen Stadtflughäfen sei
der «interkontinentale Flughafen Schweiz» ein Projekt auf lange Sicht,
das sich über zehn Jahre nach Kriegsende hinaus erstrecken werde 30.
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über den Ausbau des Flughafens Genf-Cointrin vom 20. August 1948», Bundesblatt, Nr. 34, 1948, p. 1251-1252.
27
Lescaze Bernard, L’envol…, p. 119.
28
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über den Ausbau der
Zivilflugplätze vom 13. Februar 1945», Bundesblatt, Nr. 4, 1945, p. 186.
29
Gsell Robert, «Flugbetriebsanforderungen an Verkehrs-Grossflughäfen», Landes-,
Regional- & Ortsplanung, Nr. 2, 1941, p. 2.
30
BAR E 8001 (B) 1000/1132, Bd. 80, Bericht des Delegierten für zivile Luftfahrt über
den Stand der Voraussetzungen für die Errichtung eines interkontinentalen Flughafens
Schweiz, 3. Mai 1944, p. 1-4.
26
372
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
Dieser Entschluss entpuppte sich letztlich als wegweisend, weil mit
Zürich-Kloten ein Projekt vorgezogen werden sollte, das die Errichtung eines Flughafens vorsah, der nebst dem kontinentalen auch für
den interkontinentalen Luftverkehr hätte benutzt werden können.
Angesichts der absehbaren Realisierung dieses in unmittelbarer Nähe
des wichtigsten Wirtschaftszentrums und Verkehrsknotenpunkts der
Schweiz gelegenen Interkontinentalflughafens wurde der Sinn eines
zusätzlichen Interkontinentalflughafens im abgelegenen Utzenstorf
immer stärker in Zweifel gezogen. Auch der Vorsteher des Eidgenössischen Post- und Eisenbahndepartements Enrico Celio sprach sich
bereits am 5. Dezember 1944 gegenüber seinen Bundesratskollegen
deutlich zugunsten von Zürich-Kloten aus: «Wir sind der Auffassung,
dass Zürich als ­bedeutendstes Industrie- und Handelszentrum über eine
moderne ­Flughafenanlage verfügen muss, welche auch die Möglich­
keit zu einem späteren Ausbau zum interkontinentalen Flughafen bietet.
Aus diesen Gründen beantragen wir, dem Projekt Kloten den Vorzug
zu geben und seine Realisierung nach den gegebenen Möglichkeiten zu
fördern.» 31
Das Projekt Bern-Utzenstorf war zu jenem Zeitpunkt aber nicht nur
in der Bundesverwaltung weitgehend fallengelassen worden, sondern
entpuppte sich auch politisch als chancenlos. Dies insbesondere daher,
weil nebst den Standorten des bestehenden Flugplatzdreiecks auch die
ganze Ostschweiz, die Mehrheit der Zentralschweizer Kantone, der
Aargau und das Tessin gegen Bern-Utzenstorf und für Zürich-Kloten
Position bezogen 32. Selbst im Kanton Bern war das Projekt aufgrund
des hohen Bedarfs an Wald und fruchtbarem Kulturland umstritten.
Die Utzenstorfer Bauern gründeten sogar ein Aktionskomitee gegen
den Flughafen und führten Protestveranstaltungen durch, die auf ein
beträchtliches Medienecho stiessen 33.
Es erstaunte daher nicht, dass sich der Gesamtbundesrat in seiner
Botschaft vom 13. Februar 1945 ebenfalls für die Errichtung eines
Interkontinentalflughafens in Zürich-Kloten aussprach. Als Begründung
BAR E 8001 (B) 1000/1132, Bd. 80, Schreiben des Vorstehers des Eidgenössischen
Post- und Eisenbahndepartements an den Bundesrat, 5. Dezember 1944, p. 2.
32
BAR E 8150 (A) 1968/67, Bd. 6, Eingabe der Kantone Graubünden, Glarus, Appen­
zell Ausserrhoden, Appenzell Innerrhoden, St. Gallen, Schaffhausen, Thurgau, Aargau,
Zug, Obwalden, Nidwalden, Uri und Tessin an den hohen Schweizerischen Bundesrat
betreffend Flughafen Kloten bei Zürich, 5. Januar 1945.
33
BAR E 8150 (A) 1968/68, Bd. 42, Resolution der Protestversammlung vom
14. Februar 1943. Siehe auch Stalder Fabienne, Widerstand gegen die Berner Flugha­
fenprojekte 1943-1972, Fribourg: Unpublizierte Lizentiatsarbeit, 2005, p. 25-26.
31
373
Sandro Fehr
führte er einerseits die «flugtechnische Eignung», andererseits aber auch
das «zu erwartende Verkehrsvolumen» an. Zürich habe «als wichtigstes
Industrie- und Handelszentrum der Schweiz» auch «im bisherigen
schweizerischen Luftverkehr die weitaus grössten Leistungen» aufgewiesen. Und es lägen «keine Anhaltspunkte dafür vor, dass dies in
Zukunft anders sein sollte» 34. Dem Konzept eines Zentralflughafens
erteile der Bundesrat eine deutliche Absage: «Man wird keinem Basler,
der nach Paris, und keinem Zürcher, der nach München fliegen möchte,
zumuten dürfen, nun vorerst noch mit der Eisenbahn in das grosse Moos
oder nach irgendeinem andern Ort im Landesinnern zu fahren». Stattdessen bekräftigte er auch die Stellung der beiden übrigen Standorte
des Flugplatzdreiecks. Genf und Basel hätten aufgrund ihrer Zugehörigkeit zu den «bisherigen Hauptstützpunkten des schweizerischen
Luftverkehrs […] Anspruch […] auf die Flughäfen für den kontinen­
talen Verkehr (Stadtflughäfen)». Damit sprach sich der Bundesrat für
eine weitgehende Aufrechterhaltung des Status quo aus. Eine Neuerung
bestand allenfalls darin, dass er Bern aufgrund seiner Bedeutung als
Bundesstadt – zusätzlich zum Flugplatzdreieck – ebenfalls das Recht
einräumen wollte, einen Kontinentalflughafen zu errichten, während er
anderen ambitionierten Projekten, wie etwa Lausanne-Ecublens, diesen
Status verwehrte. Wie sich später jedoch zeigte, machte Bern von dieser
Möglichkeit keinen Gebrauch. Neben der Skizzierung der zukünftigen
eidgenössischen Flugplatzkonzeption sah der Bundesrat auch eine
finanzielle Unterstützung der entsprechenden Projekte bis zu 30 Prozent
der Baukosten vor. Die in Genf-Cointrin bereits ausgeführten Bauarbeiten sollten auf der Grundlage eines separaten Erlasses rückwirkend
unterstützt werden 35.
Die bundesrätliche Flugplatzvorlage wurde vom National- und vom
Ständerat beziehungsweise von deren vorberatenden Kommissionen nur
noch marginal geändert. So erhöhten sie beispielsweise die maximale
Beteiligung an den Baukosten von 30 auf 35 Prozent beim Interkontinentalflughafen und von 25 auf 30 Prozent bei Regionalflugplätzen. Die
Unterstützung der Kontinentalflughäfen wurde bei 30 Prozent belassen.
Im Gegensatz zum bundesrätlichen Vorschlag verzichtete das Parlament
auch darauf, die Bundesbeschlüsse für dringlich zu erklären, wodurch
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über den Ausbau der
Zivilflugplätze vom 13. Februar 1945», Bundesblatt, Nr. 4, 1945, p. 175.
35
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über den Ausbau der
Zivilflugplätze vom 13. Februar 1945», Bundesblatt, Nr. 4, 1945, p. 175-176, 184,
192-193.
34
374
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
sie dem Referendum unterworfen wurden. Da von dieser Möglichkeit nicht Gebrauch gemacht wurde, traten die Bundesbeschlüsse vom
21. Juni 1945 «über die Gewährung eines Bundesbeitrags für den
Ausbau des Flughafens Genf-Cointrin» sowie vom 22. Juni 1945 «über
den Ausbau der Zivilflugplätze» schliesslich in Kraft 36. Der Status quo
der Zwischenkriegszeit wurde damit endgültig zur offiziellen eidgenössischen Konzeption erhoben. Ein gewisser Unterschied zur ­Situation
von 1938 bestand 1945 noch darin, dass Zürich in einer höheren Flughafenklasse eingeteilt war als Basel und Genf – eine Unterscheidung, die
allerdings schon bald aufgegeben werden sollte.
Als die Schweiz am 1. Oktober 1945 in Genf-Cointrin zum ersten
Mal überhaupt von einem amerikanischen Interkontinentalflugzeug
des Typs DC-4 angeflogen wurde, hatten die Bauarbeiten in ZürichKloten noch nicht einmal begonnen 37. Auch der erstmalige Anschluss
der Schweiz an den interkontinentalen Luftverkehr durch die Fluglinie
Kairo – New York der amerikanischen Fluggesellschaft TWA am
8. April 1946 erfolgte nicht in Zürich, sondern in Genf. Die Rhonestadt
wurde damit faktisch und entgegen ihrer Klassifizierung zum ersten
Interkontinentalflughafen der Schweiz 38. Dies war vom Bundesrat aber
durchaus so vorgesehen, schrieb er in seiner Botschaft von 1945 doch,
dass Genf gewissermassen als Übergangslösung bis zur Inbetriebnahme
Klotens «auch für die Aufnahme von Flugzeugen in Betracht [käme],
die voraussichtlich im Weltluftverkehr der ersten Nachkriegsjahre zu
erwarten sind» 39. Genf-Cointrin erlangte aufgrund seines Vorsprungs
jedoch nicht nur ein vorübergehendes Monopol für Interkontinentalflüge, sondern wies in den Jahren 1947 und 1948 mit Passagierzahlen
von 153’461 und 166’322 Personen sogar eine höhere Verkehrsleistung
auf als der Standort Zürich (Dübendorf und Kloten) mit 119’709 beziehungsweise 132’668 Personen (siehe Abbildung 2) 40.
«Bundesbeschluss über die Gewährung eines Bundesbeitrages für den Ausbau des
Flughafens Genf-Cointrin vom 21. Juni 1945», Amtliche Sammlung der Bundesgesetze
und Verordnungen, 1945, p. 395-397; «Bundesbeschluss über den Ausbau der Zivilflugplätze vom 22. Juni 1945», Bundesblatt, Nr. 14, 1945, p. 790-792.
37
Dollfus Walter, «Das erste interkontinentale Verkehrsflugzeug in der Schweiz»,
Aero-Revue, Nr. 11, 1945, p. 338.
38
Swissair Schweizerische Luftverkehr-Aktiengesellschaft, Bericht über das
20. Geschäftsjahr vom 1. Januar bis 31. Dezember 1945, Zürich: Swissair, 1946, p. 8.
39
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über den Ausbau der
Zivilflugplätze vom 13. Februar 1945», Bundesblatt, Nr. 4, 1945, p. 178.
40
Eidgenössisches Luftamt, Jahresstatistik 1947, Bern: Eidgenössisches Luftamt,
1948, p. 3; Eidgenössisches Luftamt, Jahresstatistik 1948, Bern: Eidgenössisches
Luftamt, 1949, p. 3.
36
375
Sandro Fehr
Abbildung 2: Passagierzahlen der Schweizer Flughäfen im gewerbsmässigen
Luftverkehr, 1946-1956.
900 000
800 000
Zürich
700 000
Genf
600 000
Basel
500 000
Übrige Flugplätze
400 000
300 000
200 000
100 000
0
1946
1947
1948
1949
1950
1951
1952
1953
1954
1955
1956
Im ersten vollen Betriebsjahr 1949 setzte sich der Flughafen ZürichKloten aber bereits wieder an die Spitze des Flughafendreiecks und
behielt diese Position bis heute bei 41. Das nach dem Zweiten Weltkrieg
weltweit einsetzende exponentielle Wachstum des Luftverkehrs betraf
in der Schweiz aber nicht nur Zürich, dessen Passagierzahlen sich bis
im Jahr 1956 auf 781’732 Personen versechsfachten und das damit
54 Prozent des schweizerischen Luftverkehrs trug. Vielmehr fand auch
in Genf eine beträchtliche Zunahme bis auf 529’784 Personen statt, was
einem Anteil von 37 Prozent des gesamten Luftverkehrs der Schweiz
entsprach. Demgegenüber wurde Basel 1956 mit 113’060 Personen
beziehungsweise 8 Prozent des Verkehrs deutlich auf den dritten Rang
verwiesen. Alle übrigen Flugplätze der Schweiz wiesen zusammen
ein Passagieraufkommen von nur 14’170 Personen oder knapp einem
Prozent des Gesamtverkehrs auf 42.
Da Genf nicht nur ein mit Zürich vergleichbares Wachstum der
Verkehrsleistung aufwies, sondern weiterhin auch im interkontinentalen Luftverkehr angeflogen wurde, stellte sich der Bundesrat 1956 die
Frage, «ob die Sonderstellung, die der Bundesbeschluss vom 22. Juni
Eidgenössisches Luftamt, Jahresstatistik 1949, Bern: Eidgenössisches Luftamt,
1950, p. 3.
42
Eidgenössisches Luftamt, Schweizerische Luftverkehrsstatistik 1956, Bern: Eidgenössisches Luftamt, 1957, p. 3.
41
376
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
1945 dem Flughafen Zürich einräumte, materiell heute noch gerechtfer­
tigt ist». Dabei stellte er fest, «dass sich der Überseeverkehr durchaus
nicht auf den hierfür vorgesehenen Flughafen konzentrierte, sondern
im Gegenteil während einer gewissen Zeit in Genf sogar etwas stärker
vertreten war als in Zürich». Der Bundesrat kam daher zum Schluss,
«dass es nicht der föderalistischen Struktur unseres Landes entspräche,
wenn weiterhin an der durch die Tatsachen widerlegten Fiktion festge­
halten werde, es bestehe nur ein schweizerischer Flughafen für die
Aufnahme des direkten interkontinentalen Luftverkehrs». Er schlug
vor, den Bundesbeschluss dahingehend zu ändern, dass im Falle einer
entsprechenden Entwicklung des Luftverkehrs grundsätzlich auch Genf,
Basel und Bern zu Interkontinentalflughäfen ernannt werden sollten 43.
Der National- und der Ständerat stimmten dieser leichten Anpassung
der eidgenössischen Flugplatzkonzeption von 1945 am 14. Dezember
1956 zu und erachteten Genf-Cointrin im Bundesbeschluss vom
30. September 1957 über dessen weiteren Ausbau zum ersten Mal als
Interkontinentalflughafen 44.
Nachdem sich die Basler Stimmbürgerinnen und Stimmbürger 1976
zugunsten einer Pistenverlängerung in Basel-Mülhausen ausgesprochen
hatten, klassifizierten die eidgenössischen Räte 1977 schliesslich auch
den letzten Standort des Flughafendreiecks als Interkontinentalflughafen 45. Seither blieben Zürich, Genf und Basel in der ü­ bergeordneten
Flugplatzkategorie der «Landesflughäfen», wodurch das seit der
Zwischenkriegszeit bestehende Flughafendreieck nicht mehr nur in den
Luftverkehrsstatistiken, sondern auch in der offiziellen Systematik klar
ersichtlich ist 46.
«Botschaft des Bundesrates an die Bundesversammlung über die Änderung des
Bundesbeschlusses über den Ausbau der Zivilflugplätze vom 14. Juli 1956», Bundes­
blatt, Nr. 30, 1956, p. 1582-1585.
44
«Bundesbeschluss über die Änderung des Bundesbeschlusses über den Ausbau der
Zivilflugplätze vom 14. Dezember 1956», Bundesblatt, Nr. 52, 1956, p. 1016-1017;
«Bundesbeschluss über die Gewährung eines Bundesbeitrages an die Baukosten der
vierten Ausbaustufe des Flughafens Genf vom 30. September 1957», Bundesblatt,
Nr. 41, 1957, p. 669-671.
45
«Botschaft über einen Bundesbeitrag an die Pistenverlängerung auf dem Flughafen
Basel-Mülhausen vom 26. Januar 1977», Bundesblatt, Nr. 8, 1977, p. 653-673; Peyer
Peter F., Vom Sternenfeld zum EuroAirport Basel-Mulhouse-Freiburg, Basel: Christoph
Merian Verlag, 1996, p. 80-83.
46
Bundesamt für Zivilluftfahrt; Bundesamt für Statistik, Swiss Civil Aviation 2010,
Neuchâtel: Bundesamt für Statistik, 2011, p. 2.
43
377
Sandro Fehr
Fazit
Der Aufbau der Infrastruktur für den in der Schweiz ab den
1920er-Jahren einsetzenden Luftverkehr war in der Zwischenkriegszeit – wie schon in den Anfängen des Schienenverkehrs – von einem
Klima der Konkurrenz geprägt und erfolgte in weitgehender Abwesenheit bundesstaatlicher Koordination. Anders als bei der Herausbildung
des Schienennetzes konkurrierten beim Bau der Flugplätze jedoch
nicht private Unternehmen, sondern vielmehr Städte und Kantone.
Sie ­initiierten und finanzierten die betriebswirtschaftlich durchwegs
defizitären Anlagen, weil sie sich von einem Anschluss ihrer Region an
den Luftverkehr einen volkswirtschaftlichen Nutzen und einen Prestigegewinn versprachen. Unter diesen Rahmenbedingungen entstand in der
Schweiz eine Vielzahl von Flugplätzen, von denen sich Zürich-Dübendorf, Basel-Birsfelden und Genf-Cointrin aufgrund ihrer hohen
Verkehrsleistung und ihres Ausbaustandes jedoch schon bald deutlich
abhoben. Die drei wirtschaftlich stärksten und bevölkerungsreichsten
Zentren der Schweiz konnten sich während der Zwischenkriegszeit
somit auch als Zentren des Luftverkehrs etablieren.
In der Bundesverwaltung setzten Mitte der 1930er-Jahre Bestrebungen nach einer vermehrten bundesstaatlichen Koordination und Intervention ein, die sich explizit gegen die regionalen «Konkurrenzkämpfe»
und «Überorganisationen» richteten. Stattdessen sollte hinsichtlich des
erwarteten neuartigen interkontinentalen Luftverkehrs eine nationale
Perspektive eingenommen, eine «Konzentration» der Luftfahrtinfrastruktur vorgenommen und ein Grossflughafen errichtet werden. Aus
diesem Grund initiierte das Luftamt ein eidgenössisches Flugplatzprogramm, in dessen Rahmen es verschiedene Flughafenprojekte evaluierte
und eine eidgenössische Flugplatzkonzeption e­ ntwickelte.
In diesem Zusammenhang brach in der ersten Hälfte der 1940erJahre ein Variantenstreit um die zukünftige Flugplatzstruktur der
Schweiz aus. Während die etablierten Standorte des Flugplatzdreiecks Zürich-Basel-Genf die bisherigen Verhältnisse bewahren
wollten, versuchten andere Flugplatzstandorte diese zu ihren Gunsten
zu überwinden. Dabei tat sich insbesondere Bern mit dem Projekt
eines schweizerischen Zentralflughafens in Utzenstorf hervor. Dieses
wurde von Zürich jedoch sogleich mit einem eigenen Grossprojekt
eines kombinierten kontinentalen und interkontinentalen Flughafens
in Kloten konkurrenziert. Genf zog es währenddessen vor, mit dem
selbständig initiierten und finanzierten Ausbau seines Flugplatzes in
Cointrin Tatsachen zu schaffen.
378
Die Schaffung einer eidgenössischen Flugplatzkonzeption, 1935-1956
Im Jahr 1945 entschieden sich der Bundesrat und das eidgenössische Parlament schliesslich gegen einen Zentralflughafen in Utzenstorf
und für einen Interkontinentalflughafen in Zürich, wo sich auch schon
bisher der grösste und wichtigste Flugplatz der Schweiz befunden
hatte. In Genf und Basel sahen die eidgenössischen Räte den Bau von
Kontinentalflughäfen vor. Mit dieser Bestätigung des Flugplatzdreiecks
wurde der Status quo der Zwischenkriegszeit faktisch zur eidgenössischen Konzeption erhoben. Das Parlament gestand 1945 zwar auch
der Bundesstadt Bern zumindest den Bau eines Kontinentalflughafens
zu, doch wurde dieser letztlich nicht verwirklicht. Die Aufhebung der
Sonderstellung Zürich-Klotens durch die eidgenössischen Räte im
Jahr 1956 ermöglichte schliesslich auch die einheitliche Klassifizierung des Flughafendreiecks in den Jahren 1957 beziehungsweise 1977,
die unter der Bezeichnung «Landesflughäfen» bis heute fortbesteht.
Ab­
schlies­
send kann festgestellt werden, dass die im Kontext regionaler ­Konkurrenz entstandene Flugplatzstruktur der Schweiz auch unter
zunehmender bundesstaatlicher Koordination und Intervention grundsätzlich erhalten blieb. Das im Konzept der Pfadabhängigkeit beschriebene Beharrungsvermögen einmal geschaffener Strukturen hat sich
somit auch in diesem Zusammenhang durchgesetzt.
379
Sixième partie
Coordonner mobilité et tourisme
Sixth Part
Coordinating mobility and tourism
Les mobilités touristiques dans la verticalité
des territoires de montagne
Les différentes logiques spatiales d’accès
aux stations touristiques d’altitude
Xavier Bernier, Université de Savoie Bourget-du-lac
Abstract : This paper aims to study the accessibility of mountain resorts and its
evolution from the end of the 19th century to the present day. It sets out three
main models to explain vertical dynamics, specifically in the Alps. Depending on
political choices and new infrastructure, these dynamics shifted from downstream
to upstream and vice versa.
L’accessibilité des territoires de montagne
est liée à des dialectiques régulièrement redéfinies
d’ouverture et de fermeture
Le xxe siècle a vu se développer, selon des modèles variés et sous
des formes multiples, des stations touristiques d’altitude 1. Dans les
Alpes en particulier 2, l’organisation de leur accessibilité a été dès
leur origine, et reste jusqu’à nos jours, un des défis majeurs posés
aux ­différents acteurs. Ce travail se propose d’identifier les diverses
logiques spatiales qui ont structuré cette accessibilité dans la v­ erticalité
Debarbieux Bernard, Tourisme et montagne, Paris : Economica, 1995.
Guichonnet Paul, Histoire et civilisations des Alpes- T1 : Destin humain, T2 : Destin
historique, Toulouse & Lausanne : Privat-Payot, 1980.
1
2
383
Xavier Bernier
des territoires montagnards. L’accessibilité routière s’est ainsi tantôt
fondée sur l’appropriation de réseaux existants (mis en place par
d’autres acteurs des territoires montagnards comme ceux des services
des Eaux et Forêts, du secteur hydro-électrique type EDF en France ou
ENEL en Italie ou bien encore ceux rassemblés en associations type
Automobile Club ou Touring Club), tantôt développée grâce à des
infrastructures créées spécifiquement. Le système des transports et
de la mobilité touristiques s’est construit selon des logiques modales
parfois très cloisonnées, parfois très concurrentielles. Ici, c’est le mode
ferroviaire qui a servi de pivot principal avec le développement de
réseaux par accumulation. Là, c’est le transport aérien (comment ne pas
évoquer ici l’épopée de la compagnie Air Alpes en France ou la place
des opérateurs privés en Suisse ?) qui a joué un rôle déterminant avec,
par exemple, les liens opérés entre les altiports et les aéroports régionaux, nationaux ou internationaux 3. Dans une période plus récente, la
promotion de l’intermodalité a permis, avec plus ou moins de succès,
des formes nouvelles de coordination entre plusieurs opérateurs notamment. Les touristes eux-mêmes ont développé des stratégies de mobilité
parfois originales. Les formes d’organisation sectorielle qui en résultent
doivent être étudiées à différentes échelles spatio-temporelles.
Cet article s’attachera à démontrer, grâce à une méthodologie fondée
sur la modélisation, une lecture typologique des divers systèmes spatiopolitiques qui résultent des trajectoires territoriales identifiées. Si des
dynamiques contradictoires semblent perceptibles (liées à la fois à un
accès généralisé et à une montée en gamme souvent significative de
l’offre touristique), les représentations tendent à jouer un rôle croissant,
tant auprès des acteurs du secteur (qui mettent en avant des mobilités
alternatives ou douces pour poursuivre leur activité) 4, que des touristes,
soucieux de s’inscrire dans des mobilités dites « durables ». Ce n’est
pas le moindre des paradoxes que d’observer comment ces ­stratégies
produisent parfois, dans un contexte de concurrence exacerbée, des
formes de recloisonnement et de réactivation des corporatismes.
Elles sont en tout cas souvent à l’origine de nouvelles discontinuités
spatiales 5. Des exemples choisis dans les Alpes françaises, suisses,
autrichiennes et italiennes serviront à développer cette réflexion.
Bernier Xavier, « Regional airports and the accessibility of mountain areas : networks,
importance and contribution to development », International Journal of Sustainable
Development and Planning, WIT vol. 5, n° 2, 2010, p. 130‑140.
4
Paillard Sylvie, Mermoud Françoise, Lieutier Gilbert (éd.), Circulations douces :
organiser les déplacements dans les sites touristiques, Paris : AFIT éditions, 2000.
5
Gay Jean-Christophe, Les discontinuités spatiales, Paris : Economica, 1995 ;
Grasland Claude, François J.-C., entretien avec Roger Brunet, « La discontinuité en
3
384
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
Si les Alpes n’ont jamais été à proprement parler une barrière, elles
ont été animées par une dialectique d’ouverture et de fermeture qui
s’exprime en particulier dans la verticalité de l’espace montagne. Sa
mise en tourisme s’est d’abord bâtie sur un système hérité, dominé par
les fonds de vallée et les périphéries. Différentes formes de conquête
des hauts ont ensuite coïncidé avec les grandes étapes de la mise en
tourisme. Mais depuis le début des années 2000, on semble s’orienter
sur certains versants vers un système de mobilités contenues où les
dynamiques spatiales s’inversent pour privilégier à nouveau une
dynamique d’aval.
Un système hérité dominé par les fonds de vallée
et les périphéries
Pour appréhender les enjeux historiques de l’accès touristique, il
faut à n’en pas douter prendre en considération le système de mobilités
dont héritent les territoires montagnards au début de leur mise en
tourisme. Il s’articule autour de quelques lignes de force bien décrites
par ailleurs 6. Le xixe siècle correspond, en particulier dans les Alpes, à
plusieurs basculements, démographiques, socio-économiques, et finalement spatiaux. Le pic démographique se situe ainsi dans la plupart des
massifs alpins aux alentours de 1850‑1860, période à partir de laquelle
les hauts vont commencer à se dépeupler au bénéfice des fonds de vallée
(où se développe une industrialisation fixée en partie par les ressources
hydro-électriques) et des périphéries montagnardes 7. La seconde moitié
du siècle voit aussi les mobilités alpines profondément r­estructurées
par le développement ferroviaire 8. De grandes infrastructures de
géographie : origines et problèmes de recherche », L’espace géographique, 1997/4,
p. 297‑308.
6
Bernier Xavier, « Dynamiques des réseaux de transports et recompositions régionales
en zone de montagne : éléments de réflexion à travers les pays de Savoie », Cahiers du
CIRTAI, Le Havre, 2002, p. 40‑50 ; Debarbieux Bernard, « La traversée des Alpes, une
histoire d’échelles et d’intérêts, d’épousailles et de divorces », Revue de Géographie
Alpine, n° 90, n° 3, 2002, p. 11‑24 ; Fontana Jean-Louis, La Route des Grandes
Alpes, Paris : Gallimard, 1999 ; Schnekenburger Gudrun, Über die Alpen, Stuttgart :
Herausgegeben vom Archäologischen Landesmuseum Baden-Württenberg anlässlich
der Austellung “Über die Alpen–Menschen–Wege–Waren”, 2002.
7
Bätzing Werner, « Les Alpes : entre déclin et croissance démographique », in Broggi
Mario F. et Tödter Ulf (éd.), 1er rapport sur l’état des Alpes, Aix-en-Provence : Édisud,
1998.
8
Sutton Kevin, Les nouvelles traversées alpines : entre cospatialités de systèmes
nationaux et recherche d’interspatialités, une géopolitique circulatoire, thèse de
doctorat en géographie, Université de Savoie, 2011, 577 p.
385
Xavier Bernier
f­ranchissement voient le jour tandis que des percements tunneliers ou
des pénétrantes intravalléennes autorisent désormais un accès beaucoup
plus rapide depuis les métropoles régionales ou continentales. Le tunnel
ferroviaire du Fréjus (inauguré en 1871), longtemps le plus long du
monde avant l’ouverture de celui du Saint-Gothard en 1882, rapproche
par exemple Saint-Jean-de-Maurienne de Paris, désormais à seize
heures de train. Dans le même temps, un « front ferroviaire » progresse
à l’intérieur des vallées. Quelques grandes dates initient des processus
cumulatifs très rapides dans la mise en tourisme des premières stations.
L’exploitation par machines à vapeur permet par exemple d’atteindre
Zermatt dès 1891. La gare de Chamonix Mont-Blanc est quant à elle
mise en service en 1901 avec l’inauguration du dernier tronçon depuis
Saint-Gervais. Et la ligne de l’Albula (Thusis-Saint-Moritz) est ouverte
peu après (1er juillet 1903).
Ce basculement modal se traduit dans l’espace par un glissement des
itinéraires et des infrastructures vers les fonds de vallées. La figure 1
rend compte de cette situation proto-touristique. Là où le franchissement s’était généralisé par des cheminements à mi-versants, polarisés
par les lignes de crête ou les cols (dont la praticabilité annuelle était peu
remise en question), le nouveau système de mobilités (que l’on pourrait
qualifier de « moderne ») se concentre dans les axes valléens. Il privilégie désormais quelques points de passage et renforce les nodalités
métropolitaines. Ce n’est pas le moindre des paradoxes de cette modernisation des transports qui se prolongera dans les Alpes au xxe siècle
avec le développement des réseaux routiers et autoroutiers. Du point
de vue des logiques circulatoires intramassifs, ce double processus
d’extériorisation et de valléisation s’accompagnera aussi progressivement d’un « effet tunnel » (caractéristique des espaces traversés mais
pas toujours desservis) de plus en plus prégnant.
C’est dans ce contexte que se produit l’essor du tourisme dans la
seconde moitié du xixe et au début du xxe siècle. Les premières stations
(dites de « première génération » d’après le modèle de Rémy Knafou) 9,
comme Chamonix, s’inscrivent pleinement dans cette logique. La
gare, terminus d’un voyage en train lui-même déjà partie intégrante
de la mise en tourisme, est un des piliers de cette géographie proto-­
touristique. Elle est installée au pied des versants et ouverte sur un
panorama montagnard souvent structuré par des sommets redécouverts
Knafou Rémy, Les stations intégrées de sports d’hiver : l’aménagement de la
montagne à la française, Paris : Masson, 1978, 319 p.
9
386
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
ou inventés comme objets touristiques. L’invention du Mont-Blanc 10
ou du Cervin doit ainsi beaucoup à l’amélioration de l’accessibilité de
Chamonix et de Zermatt. « On assiste à la création de nouveaux lieux
touristiques situés en bordure du vide et de la verticalité de la haute
montagne » 11. Les campagnes d’affiches qui accompagnent cette étape
en disent long sur les processus cumulatifs à l’œuvre. Ces affiches
mettent en scène autant le touriste que les moyens de sa mobilité 12.
Qu’elles véhiculent le message du PLM (Paris-Lyon-Marseille), de
compagnies comme BVZ (Brig–Visp-Zermatt Bahn) ou FO (Furka–
Oberalp Bahn) bientôt fusionnées dans la MGB (Matterhorn-Gothard
Bahn), ou fassent la promotion par exemple de la Route des Grandes
Alpes 13, elles célèbrent les transports modernes dans le cheminement
vers les lieux touristiques. Les premiers touristes, issus d’une élite
socio-économique, y sont fréquemment représentés dans des postures
contemplatives. On les voit, curistes, excursionnistes, circuler autour de
la gare, à proximité des premiers hôtels de luxe, avec parfois en arrièreplan les premiers aménagements d’une station thermale. La montagne
offre ici un cadre qui sert de décor avant de devenir peu à peu le terrain
de nouvelles pratiques touristiques. L’alpinisme reste une pratique
encore confidentielle qui participe malgré tout au spectacle proposé
aux touristes. La gare constitue ainsi un pôle majeur de ces premières
stations touristiques, à la fois porte et vitrine pour les mobilités locales.
L’architecture, les infrastructures et au-delà les paysages touristiques
s’organisent en fonction de l’horizontalité des fonds de vallée ou
des plateaux (comme ceux de Davos ou Crans Montana) 14 et de la
­verticalité des versants.
Joutard Philippe, L’invention du Mont-Blanc, Paris : Gallimard, 2001.
Sacareau Isabelle, La montagne, une approche géographique, Paris : Belin, 2003,
p. 215.
12
Sutton Kevin, « Traverser les Alpes par les affiches », in Fumey Gilles et al. (éd.),
Mobilités contemporaines. Approches géoculturelles des transports, Paris : Ellipses,
2009, p. 191‑203 ; Ballu Yves, Les Alpes à l’affiche, Grenoble : Glénat, 1998 ;
Favre Thierry, Le train s’affiche, Paris : Éditions de La Vie du Rail, 2005 ; Elsasser
Kilian (Hg.), Der Direkete Weg in den Süden, Zürich : AS Verlag, 2007.
13
Martin Jean-Pierre, La traversée des Alpes : cols, routes et tunnels, Grenoble :
Éditions Le Dauphiné Libéré, 2000, 51 p.
14
Voir encore Sacareau Isabelle, La montagne….
10
11
387
Xavier Bernier
Figure 1 : Un système de mobilités proto-touristique
388
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
Figure 2 : Un processus d’intériorisation lié aux différentes étapes
de la mise en tourisme
389
Xavier Bernier
Les différentes formes de conquête des hauts
en liaison avec les grandes étapes
de la mise en tourisme
Très vite va pourtant s’engager une conquête des hauts tandis que
se développent de nouvelles pratiques et que progressent de nouvelles
infrastructures. Ce rebasculement de l’aval vers l’amont va s’exprimer
sur le temps long du xxe siècle. La figure 2 donne une vision modélisée
de cette conquête de la verticalité liée à la mise en tourisme.
Les chemins de fer de montagne 15 sont un des premiers instruments
de cette progression vers des espaces d’altitude. C’est le cas de la ligne
métrique de Saint-Gervais à Vallorcine, avec ses déclivités exceptionnelles, qui voit le jour en 1901. Le Tramway du Mont-Blanc (TMB),
après une première section ouverte en 1909, atteint quelques années
plus tard (1912) sa gare d’arrivée au Nid d’Aigle, à 2372 m d’altitude,
devenant le plus haut train à crémaillère d’Europe… La même année
est aussi inauguré le train du Montenvers. Les lignes à crémaillère
permettent aux ingénieurs et à leurs commanditaires de rivaliser pour
réaliser des prouesses techniques et partir à l’assaut de pentes parfois
très raides. Si la ligne du Rigi fonctionne depuis 1873, le chemin de
fer Aix-les-Bains–Le Revard 16 depuis 1892 – soit la même année que
le Rothorn –, celles de la Jungfrau et du Gornergrat sont quant à elles
inaugurées en 1898. L’année suivante, la ligne du Pilate devient la
plus pentue du monde (48 %). C’est peu dire que toutes ces installations frappent les esprits et suffisent parfois à elles seules à attirer les
touristes. Elles marquent à des degrés divers une première marche vers
la touristification des hauteurs, abordées d’abord pour leurs panoramas
sur les glaciers, les cascades, les précipices…
L’épopée des téléphériques 17 va permettre de changer d’échelle. Les
transports par câble offrent en effet de multiples opportunités dans la
conquête de la verticalité et accélèrent l’inscription du tourisme dans
une autre dimension. L’idéalisation d’une certaine forme de modernité
et la course aux innovations techniques lancée par les ingénieurs et les
politiques conduisent à la diffusion rapide des téléphériques dans les
Alpes. Considéré comme le premier du massif, celui de Grindelwald se
hisse à partir de 1908 sur les pentes du Wetterhorn. Les Français ne sont
Espinasse Isabelle, Trains des Alpes, trains de montagne, Seyssinet : Libris, 2002.
Fouger François, Le chemin de fer à crémaillère Aix-les-Bains–Le Revard, Aix-lesBains : Édition par l’auteur, 2000.
17
Bardiau Philippe, L’épopée des téléphériques, Seyssinet : Libris, 2003.
15
16
390
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
pas en reste avec le premier tronçon du téléphérique des Glaciers en 1924
et l’appareil du Brévent, en deux tronçons (1928‑1932), ou encore celui
de Serre-Chevalier inauguré en 1941 (!). C’est toujours à Chamonix que
l’équipement le plus emblématique voit le jour, à travers un chantier
étalé sur plus de quatre décennies (entre 1910 et 1955) : le téléphérique
de l’Aiguille du Midi, à l’assaut du pic de 3776 m. Durant cette période,
il faudrait aussi faire l’inventaire de tous les projets avortés, par exemple
dans les Écrins… Disons-le tout net : ces premiers téléphériques
reflètent des pratiques encore largement contemplatives. Ils permettent
certes aux randonneurs et aux alpinistes de gagner parfois du temps
dans l’ascension des sommets. Mais ces premières installations ne s’inscrivent pas vraiment dans la révolution touristique qui s’annonce : celle
du ski. Déjà pointent pourtant les stations dites de « deuxième génération » 18, avec des défis spécifiques dans leur accessibilité. Elles sont
un terrain d’expérimentation technique privilégié pour les premières
remontées mécaniques. Le Grenoblois Pomagalski se distingue en 1935
avec les premiers téléskis à sellette et à perches débrayables au Col de
Porte et à l’Alpe d’Huez. Des techniques moins élaborées permettent
d’équiper les pentes de Megève (1933) et des Houches (1936). C’est
d’ailleurs toujours à Megève que sera mis en service en 1933 le premier
téléphérique dédié à la pratique du ski sur les pentes de Rochebrune.
Mais au-delà de ces innovations multiples, l’accessibilité de ces stations
touristiques passe d’abord par la voie routière. Avant d’être rendue
célèbre par le Tour de France cycliste (première arrivée en altitude
dans l’histoire de la Grande Boucle avec la victoire de l’Italien Fausto
Coppi en 1952), la montée de l’Alpe d’Huez, en vingt et un virages
étalés sur quatorze kilomètres, avec une pente moyenne de 8 % (jusqu’à
12 %), a d’abord eu une fonction d’accès pour la station créée dans
les années 1930. Christophe Gauchon 19 rappelle volontiers le caractère
non rationnel, voire anarchique, de la mise en place de cette accessibilité routière, avec parfois l’absence de parkings automobiles. À l’Alpe
d’Huez, aux Deux-Alpes et à Chamrousse (France), à Breuil-Cervinia
(Val d’Aoste-Italie) ou à Saint-­
Christoph-Am-Arlberg (Autriche), la
route est tracée à la va-vite, construite ou recalibrée dans des délais très
courts. Les hameaux t­raditionnels, situés à mi-pente, trouvent ainsi un
prolongement en altitude (au-delà de 1600‑1800 m), dans les alpages.
Gauchon Christophe, « Le tourisme dans les Alpes : pratiques, aménagement et
protection », in Bordessoule Éric (éd.), Les montagnes, Nantes : Éditions du Temps,
2002, p. 153‑182.
19
Gauchon Christophe, « Le tourisme… », p. 153‑182.
18
391
Xavier Bernier
Cette conquête très rapide des hauts s’accommode souvent d’un grand
désordre infrastructurel et a­ rchitectural 20.
Les « stations de troisième génération » (un modèle que l’on
retrouve en particulier dans les Alpes françaises) sont l’expression
d’une politique beaucoup plus volontariste qui va bien sûr trouver un
prolongement du point de vue de l’accessibilité aux stations 21. Dans
le contexte du Plan Neige (ensemble de mesures adoptées par l’État
français à partir de 1958 pour développer de façon systématique des
stations intégrées, le plus souvent avec l’aide d’un promoteur), l’aménagement passe par des infrastructures routières performantes et par
la construction systématique de parkings pour le stationnement des
véhicules des touristes. L’accès à la Tarentaise (qui continue à proposer
d’importants défis saisonniers aujourd’hui) et à ses stations est un
réservoir d’exemples édifiants. La Plagne, Tignes, les Arcs ont, dès
leur conception, été des stations dépendantes de leur facilité d’accès.
C’est dans ce contexte historique, mais pas seulement en France
cette fois-ci, que se développe également l’aviation de montagne 22.
Elle va aussi participer à ce processus de projection en altitude 23
à travers en particulier l’épopée de compagnies aériennes comme
Air Alpes. Un certain nombre d’infrastructures spécifiques ont pu
voir le jour comme les altiports (mot inventé suite au premier atterrissage sur la piste sommaire de Méribel en 1962 et qui caractérise
une installation, dotée ou non de tour de contrôle, utilisant la pente de
la piste pour les atterrissages et les décollages). Ceux-ci fonctionnent
encore aujourd’hui à Megève en Haute-Savoie, Courchevel et Méribel
en Savoie ou l’Alpe d’Huez en Isère. Ce type d’installation est bien
plus rare dans les autres pays alpins que la France. Mais qu’il s’agisse
de Chamois ­Valtournanche dans le Val d’Aoste (Italie) ou de Croix de
Cœur Verbier dans le Valais (Suisse), ces infrastructures ne desservent
pas de grandes stations. Il faut plutôt souligner ici le rôle d’aéroports
régionaux ou locaux.
Wozniak M., « L’architecture dans l’aventure des sports d’hiver. Stations de
Tarentaise 1945‑2000 », Mémoires et Documents, L’Histoire en Savoie, Chambéry :
Société savoisienne d’histoire et d’archéologie, Fondation pour l’action culturelle
internationale en montagne, 2006.
21
Hélion Christian, « Transports par câbles et sports d’hiver : approche g­ éographique
de la dynamique territoriale du tourisme et des loisirs en espace montagnard »,
­Collection EDYTEM, Transport et tourisme, Chambéry : EDYTEM, n° 4, 2006,
p. 105‑114.
22
Bernier Xavier, « Regional airports…», p. 130‑140.
23
Pinto Anthony, La grande aventure de l’aviation dans les Alpes, de 1784 à nos jours,
Presse de Deux-Ponts : Éditions 3D Vision, 2008.
20
392
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
Vers un système de mobilités contenues
où les dynamiques spatiales s’inversent
La plupart de ces plates-formes aéroportuaires sont situées à des
altitudes inférieures et participent à un accès privilégié par le bas. Nous
sommes ici dans un modèle où les dynamiques spatiales s’inversent à
nouveau, ce que cherche à montrer de façon synthétique la figure 3.
En Suisse, des aéroports comme Sion ou Lugano par exemple servent
de point d’arrivée pour des lignes aériennes à finalité essentiellement
touristique. C’est encore plus net pour l’aérodrome de Samedan, le plus
haut d’Europe avec ses 1707 m d’altitude et porte quasi directe avec
la station huppée de Saint-Moritz. Citons aussi la petite plate-forme de
Saanen en liaison avec la station de Gstaad. Au-delà de ces infrastructures proches, certains aéroports, que l’on pourrait appeler « de plaine »
ou péri-montagnards, accentuent encore cette tendance. Dans les Alpes
du Nord et pour l’accessibilité aux territoires montagnards, l’aéroport
de Genève Cointrin tend de plus en plus à fonctionner comme une
plate-forme régionale majeure et à concurrencer les aéroports régionaux
français voisins. À un niveau moindre, mais toujours en Suisse, l’aéroport de Zurich est une porte vers les stations touristiques d’altitude
qui fonctionne d’autant mieux que les liens avec les gares ferroviaires
(réseaux des CFF) et routières (desservies par treize lignes r­égionales
de bus et plus de six cents liaisons) sont efficaces. En France, d’autres
aéroports « de plaine » jouent un rôle comparable et croissant dans
l’accessibilité aux stations. C’est le cas en particulier de Grenoble
et de Chambéry. Dans les deux cas, les Jeux olympiques (en 1968
et 1992) ont eu un effet levier indéniable dans l’évolution du trafic des
­plates-formes.
Les sociétés sont nombreuses depuis les aéroports régionaux à
proposer de l’avion-taxi ou du taxi-hélico. Des services de bus et de
taxis, mais aussi de voitures luxueuses avec chauffeur, permettent
ensuite de gagner les stations. Nombre de plates-formes de vallée
disposent aussi de terminaux dédiés à l’aviation d’affaires. Conçu ici
du point de vue fonctionnel comme une sorte de « téléphérique » ou
d’« ascenseur » pour un accès le plus rapide possible aux stations d’altitude, ce service est notamment offert par Helijet basé à l’aéroport de
Chambéry, Air Zermatt dans la station suisse éponyme ou Air Glaciers
qui propose des transports en avion ou en hélicoptère depuis l’aéroport
déjà évoqué de Sion (Suisse). Les flux peuvent se révéler significatifs
avec six mille passagers qui, chaque hiver, transitent à Courchevel
par voie aérienne et une moyenne annuelle de quinze mille mouvements de vols pour les altiports de l’Alpe d’Huez, Megève et Méribel.
393
Xavier Bernier
Ces chiffres recoupent en fait aussi d’autres mouvements comme ceux
liés aux nombreux circuits de balade en avion, autour du massif du
Mont-Blanc notamment. On s’inscrit davantage ici dans une logique
d’aviation sportive ou de loisirs, dont les usagers sont fédérés en
associations (AFPM, Association française des pilotes de montagne
et EMP European Moutain Pilot). C’est également le point de départ
d’une autre activité, autorisée en Suisse et en Italie, mais interdite en
France : l’héliski ou le ski héliporté. La Loi Montagne de 1985 interdit
en effet en France les déposes de skieurs hors altiports, hélistations et
hélisurfaces à une altitude supérieure à 1500 m. Avec cette restriction
qui s’ajoute à celle relative aux espaces protégés, on les voit donc se
développer aux limites des frontières… D’une manière générale, le
développement d’espaces protégés en altitude, type parcs nationaux
(Parc national suisse, Parcs nationaux de la Vanoise, des Écrins ou du
Mercantour en France, Parc national du Grand Paradis en Italie…) a
considérablement contribué à freiner la dynamique d’urbanisation
des mondes d’en-haut 24. Il s’inscrit au contraire dans un processus de
« sanctuarisation » par rapport à l’expansion des stations touristiques,
réduisant là encore l’espace mis en tourisme vers l’aval et vers les
périphéries (voir figure 3).
La dynamique des réseaux renforce elle aussi cette dynamique
spatiale. Depuis un certain nombre d’années, on voit notamment se
développer le modèle de domaines skiables interconnectés 25, parfois
par-delà les frontières nationales comme pour les Portes du Soleil
(France/Suisse) ou pour la Voie lactée (France/Italie). Si l’accessibilité
aux pistes de ski est le plus souvent guidée par la recherche de niveaux
élevés de connectivité et de connexité 26 aux réseaux de remontées
mécaniques, l’accessibilité routière aux différents pôles du domaine
touristique pose problème dans beaucoup de cas 27. Des accès multiples,
situés plus bas en altitude et parfois depuis des vallées voisines,
Bernier Xavier, « Transports, parcs nationaux et parcs naturels régionaux dans les
Alpes françaises : les interactions entre les objectifs de l’accessibilité, de la protection et
de l’aménagement », Revue de Géographie Alpine, T91, n° 2, 2003, p. 27‑40.
25
Marnezy Alain, Gauchon Christophe, « Les domaines skiables reliés dans les Alpes
françaises », Collection EDYTEM, Transport et tourisme, Chambéry : EDYTEM, n° 4,
2006, p. 115‑124.
26
Pumain Denise, Saint-Julien Thérèse, L’analyse spatiale – Localisation dans
l’espace, Armand Colin : Paris, 2004.
27
Bernier Xavier, « Transports et montagne : quelle spécificité pour les systèmes
nodaux ? Proposition d’un modèle synthétique illustré à travers l’itinéraire transalpin
Grenoble-Bourg d’Oisans-Briançon-Suse », Les Cahiers Scientifiques du Transport,
n° 48, 2005, p. 81‑97.
24
394
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
Figure 3 : Un système de mobilités contenues
395
Xavier Bernier
sont désormais proposés aux touristes. À titre d’exemple, la station
d’Orelle joue cette carte à plein pour accéder aux pistes des Trois Vallées
en Tarentaise. Dans le même temps, la modernisation des infrastructures dans les fonds de vallée engendre des processus cumulatifs 28 qui
accentuent encore ce glissement des portes touristiques vers les bas.
Les réseaux routier et autoroutier ont ainsi été considérablement modernisés depuis le début des années 1980 29, avec par exemple en France la
mise à deux fois deux voies de la route nationale 90 jusqu’à Moûtiers,
le raccordement A6-Genève par Nantua, l’autoroute de Maurienne, la
modernisation de la route de la vallée de la Romanche, etc. Il faut aussi
rappeler l’arrivée du TGV en gare de Bourg-Saint-Maurice, directement reliée à la station des Arcs grâce à un funiculaire. Et on voit bien
poindre là un certain nombre de paradoxes lié à l’accélération 30 des
mobilités. Celle-ci tend ainsi à renforcer le rôle des nœuds situés en
pieds de versants, érigés en points de rupture de charge dans le fonctionnement de l’intermodalité. Mieux, certaines stations touristiques jouent
carrément la carte d’un accès extériorisé, c’est-à-dire interdit aux
véhicules à partir de portes parfois éloignées de la station elle-même. Si
la station française d’Avoriaz fait ainsi la part belle aux circulations
douces dans son « centre », la station suisse de RiederAlp sur les bords
du glacier d’Aletsch (un des premiers sites alpins classés au Patrimoine
naturel mondial de l’UNESCO) opte pour la fermeture totale. Les
voitures sont interdites d’accès à la station, que l’on rejoint donc grâce
aux remontées mécaniques situées plus en aval… Le binôme transports/station fonctionne ici selon des logiques nouvelles et les acteurs
regardent plus « vers le bas » dans la gestion de l’accessibilité. On
s’oriente clairement vers des mobilités contenues et maîtrisées
depuis l’aval.
Conclusion : Les cycles d’accessibilité touristique
définis par le rapport à la verticalité
D’un massif à l’autre et d’un pays à l’autre, la diversité des situations est telle qu’il paraît difficile de séquencer de façon systématique
et dans des phases temporelles bien bornées ces différents cycles de
l’accessibilité aux stations touristiques alpines. La montagne mérite
Offner Jean-Marc, 1993, « Les effets structurants du transport : mythe politique,
mystification scientifique », L’Espace géographique, n° 3, 1993, p. 233‑242.
29
Gauchon Christophe, « Le tourisme… », p. 153‑182.
30
Rosa Hartmut, Accélération, une critique sociale du temps, Paris : La Découverte,
2010.
28
396
Les mobilités touristiques dans la verticalité des territoires de montagne
en tout cas d’être interrogée 31 dans la spécificité du cadre offert par la
verticalité. Les trois modèles spatiaux proposés ici – un système hérité
polarisé par les fonds de vallées et les périphéries/les différentes formes
de conquête des hauts en liaison avec les grandes étapes de la mise en
tourisme/un système de mobilités contenues où les dynamiques spatiales
s’inversent pour une maîtrise qui s’opère à nouveau depuis l’aval – se
sont exprimés avec plus ou moins de force en fonction des régions et
du cadre politique proposé par l’aménagement 32. Selon les échelles,
ils se sont chevauchés et se chevauchent encore dans le temps et dans
l’espace. Ils sont en tout cas successivement polarisés par les hauts et
par les bas, avec des dynamiques que l’on pourrait qualifier de coulissantes et alternatives. Cette oscillation dans le rapport à la verticalité
place les différents types de stations touristiques au cœur d’un dispositif
territorial dont le fonctionnement engendre des formes de cospatialité 33
complexes et une redéfinition des lieux. On a malgré tout pu déceler
dans ce travail des types de linéarités propres à l’espace alpin. Dans
ce contexte, l’histoire des transports et de la mobilité met au jour des
dynamiques actorielles entre concurrence et coordination. Depuis la
fin du xixe siècle et jusqu’à aujourd’hui 34, la question de l’accessibilité,
sans cesse redéfinie dans ses expressions et ses modalités, est en tout
cas au cœur du système spatial.
Debarbieux Bernard, « La montagne : un objet de recherche ? », Revue de Géogra­
phie Alpine, 89, n° 2, 2001, 131 p. ; Debarbieux Bernard, « Quelle spécificité montagnarde ? », Revue de Géographie Alpine, 127, n° 1‑2‑3, 1989.
32
Guérin Jean-Pierre, L’aménagement de la montagne, politiques, discours et produc­
tion d’espaces, Gap : Ophrys, 1984.
33
Lévy Jacques et Lussault Michel, Dictionnaire de la géographie et de l’espace des
sociétés, Paris : Belin, 2003.
34
Torricelli Gian Paolo et Scheurer Thomas, 2000, « Les transports et la mobilité, une
menace et un défi pour les Alpes du xxie siècle », Programme national de recherche 41,
Transports et environnement, Actes T4, EDMZ, 5e Journée de la Recherche alpine,
Berne, 2000.
31
397
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und
Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
Márta Jusztin, Budapest Business School
Abstract : During the interwar period, modes of transport were one of the main
contributing factors to the expansion of tourism in Hungary. The development of
transport modes impacted not only the possibilities for travel, but also travel habits.
Transport contributed to making a hitherto marginal social phenomenon into an
industrial sector. Less attention is paid to the influence of tourism on transport,
yet variegated interaction occurs between the two. That said, during the interwar
period, transport modes undoubtedly provided the strongest push and set off a significant expansion of tourism. That interaction reflects a general model: the expansion of tourism was above all launched by the era’s new mode of communication,
railways, and only afterwards by the car and nascent air travel. Another element
of transport-tourism cooperation was the involvement of transport companies in
tourism development activities, which produced a considerable rise in traffic.
Der Verkehr wird und wurde als einer der Haupteinflussfaktoren
des Tourismus betrachtet. Seine Entwicklung veränderte nicht nur die
Reisemöglichkeiten, sondern auch die Reisegewohnheiten. Er verhalf
einer ursprünglich kleinen gesellschaftlichen Erscheinung zum Aufstieg
zu einem Industriezweig. Die Rolle des Verkehrs ist in diesem Prozess
kaum zu überschätzen. Wenig Augenmerk wird jedoch dem Einfluss
geschenkt, der in die umgekehrte Richtung vom Tourismus auf den
Verkehr ausgeht.
Verkehr und Tourismus sind beides komplexe Phänomene, teilweise
mit eigenen Funktionen, teilweise aber auch mit f­ unktionalen Überschneidungen. Es ist das Ziel der vorliegenden Studie, für die Zwischenkriegszeit
die Grundzüge des Zusammenwirkens zwischen Verkehr und Tourismus
anhand von touristischen Quellen nachzuzeichnen.
399
Márta Jusztin
Die primäre Rolle der Verkehrsbetriebe war die Förderung der
Mobilität. Durch die Entwicklung des Verkehrsnetzes konnten neu
erschlossene, weit entfernte Gebiete zu touristischen Destinationen
werden. Die Verkehrsunternehmen unterstützten die Produktentwicklung
durch verschiedene Massnahmen, etwa mit Fahrkartenermässigungen
oder mit Sonderzügen. Eine weitere Ebene der Kooperation entstand
dadurch, dass die Reise selbst zu einem Angebot wurde, sei es auf
den Schienen, in der Luft, auf dem Wasser oder auf der Strasse. Die
Verkehrsbetriebe und Verkehrsorganisationen beteiligten sich aber
auch an der Marketingarbeit der Tourismusbranche, indem sie finanzund ressourcenarmen Tourismusorganisationen und Dienstleistern ihre
eigene Marketinginfrastruktur zur Verfügung stellten.
Der zunehmende Tourismus steigerte die Zahl der Reisenden,
generierte dadurch Einkommen und ermöglichte den Verkehrsbetrieben eine touristische Profilerweiterung. Im Kontext von Verkehr
und Tourismus liegt die Betonung auf dem Einfluss des Verkehrs, aber
auch der Tourismus eröffnete seinem wichtigsten Verbündeten positive
wirtschaftliche Möglichkeiten.
Wechselwirkungen
Die Titelseite eines Tourismus-Prospektes aus der Zwischenkriegszeit zeigt das berühmte Budapester Stadtbild mit der Burg, mit den
Budaer Hügeln, der Donau, den Brücken und mit Pest an der anderen
Seite des Flusses. Im Zentrum der Botschaft dieser Zeichnung steht
aber in diesem Fall nicht die Einmaligkeit des Budapester Panoramas,
sondern eine viel praktischere Information. Das Bild wird von einem
Zug dominiert, der gerade in die Hauptstadt Ungarns einfährt. Am
Himmel fliegt ein Flugzeug, auf der Donau fährt ein Schiff. Die
Verkehrsmittel auf dem Bild sollen veranschaulichen: Budapest ist
leicht, schnell und bequem zu erreichen. Gute, schnelle und einfache
Erreichbarkeit ist eine Voraussetzung für die touristische Entwicklung
einer Stadt, ja einer Region, und der Verkehr spielt dabei immer eine
entscheidende Rolle. Die Geburt des modernen Massentourismus in der
ersten Hälfte des 20. Jahrhunderts war eng mit dem Verkehr und im
Speziellen mit der Dampfeisenbahn als Verkehrsmittel verbunden 1.
Die Revolution der Verkehrsmittel veränderte nicht nur die Reisemöglichkeiten, sondern auch die Reisegewohnheiten grundlegend.
Hachtmann Rüdiger, Tourimusgeschichte, Göttingen : Vanderhoeck & Ruprecht, 2007,
p. 71-74.
1
400
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
Der Ausbau der Verkehrsinfrastruktur erweiterte die räumlichen
Grenzen der Mobilität. Immer mehr Menschen konnten für damalige
Verhältnisse schnell und bequem befördert werden. Eine Reihe von
Beispielen beweist, dass Städte und Regionen dank der grossen Zahl
der dorthin reisenden Touristen aufblühten. Dabei stellt sich die Frage,
ob diese Wirkung der verbesserten Verkehrsmittel auf den angewachsenen Tourismus unidirektional erfolgte oder ob man nicht eher von
einer Wechselwirkung zwischen Verkehr und Tourismus reden müsste.
Diese Fragestellung wird anhand des Beispiels von Ungarn in den
Zwischenkriegsjahren untersucht.
Die Anfänge
Das knappe halbe Jahrhundert zwischen dem österreichisch-­ungarischen
Ausgleich im Jahr 1867 und dem Ausbruch des Ersten Weltkrieges zählte
zu den erfolgreichsten Wirtschaftsperioden der ungarischen Geschichte.
Die Motoren des Aufschwungs waren das moderne Finanz- und Bankwesen
sowie der Ausbau der Infrastruktur und hier vor allem der Eisenbahnbau.
Zwischen 1846 und 1867 wurden insgesamt 2285 Kilometer Bahnlinien
gebaut, bis 1890 waren es dann 11’000 Kilometer und bis 1913 schliesslich
22’000 Kilometer 2. Diese bemerkenswerte Entwicklung hatte wiederum in
erster Linie wirtschaftliche Folgen. Bald nach dem Ausgleich wurde die
Hauptstadt mit den wichtigen grossen Getreide-, Viehzucht- und Bergwerk­
regionen verbunden. Am Vorabend des Ersten Weltkriegs war schliesslich
das ganze Land mit Bahnlinien vernetzt.
Obwohl der Erreichbarkeit der potenziellen touristischen Attraktionen bei der Planung des Eisenbahnnetzes kein Augenmerk geschenkt
worden war, zeigten sich trotzdem bald die Effekte der Verkehrsentwicklung. Eine Strecke der Südbahn verlief parallel zum Südufer des
Plattensees. Die gute Erreichbarkeit lenkte dabei die Aufmerksamkeit
auch auf die kleinen, unbedeutenden Siedlungen am See, die bald
zu beliebten Urlaubsorten der Budapester Bürger wurden. Und in
­Oberungarn wurde ein bis dahin kleiner, unbedeutender Kurort, Bártfafürdő, durch die Eisenbahnlinie bekannt und beliebt 3.
Die spontane Auswirkung des Verkehrs auf den frühen Tourismus lief fast
parallel zu einer bewussten, gewollten K
­ ooperation. Diese ­Zusammenarbeit
Romsics Ignác, Magyarország története a XX. században (Die Geschichte Ungarns im
XXsten Jahrhundert), Budapest: Osiris Kiadó, 1999, p. 25.
3
Kósa László, Fürdőélet a Monarchiában (Badeleben in der Monarchie), Budapest:
Holnap Kiadó, 1999, p. 92-100.
2
401
Márta Jusztin
zwischen der Königlich Ungarischen Staatsbahn (im weiteren MÁV) und
der kleinen, aber agilen Fremdenverkehrsbranche erfolgte auf mehreren
Linien.
Die touristischen Vereine, wie beispielsweise der ungarische Karpatenverein, kämpften um Fahrkartenermässigungen. Das Ziel dieser
Bestrebungen war es, einerseits Wochenendausflüge für die Mitglieder
billiger und dadurch auch populärer zu machen und andererseits die
der Eisenbahnlinie nahe liegenden Ausflugsorte in den Touristenverkehr miteinzubeziehen. Im Monatsheft des Karpatenvereins wurden
die Mitglieder über den Fahrplan, über neue Haltestellen und über alle
sonstigen Neuigkeiten des Verkehrsangebots informiert. Der Karpatenverein erkämpfte ausserdem verschiedene Ermässigungen und billigere
Gruppenfahrkarten.
Eine andere Form der Zusammenarbeit von Hotels, der katholischen Gemeinde von Pest und der MÁV war die Organisation von
Reisegruppen in einem bestimmten Programm (heute würde man wohl
«Event» sagen). Im August 1873 fuhr der erste Sonderzug aus Wien
in Budapest ein. Die Gäste reisten an, um den festlichen Veranstaltungen zu Ehren des Staatsgründers Stephan des Heiligen beizuwohnen.
32 Jahre nach Thomas Cooks erster organisierter Reise erschien die
erste organisierte Reisegruppe auch in Budapest.
Nach den beiden ersten Stufen einer sich eher zufällig ergebenden
Nutzung einerseits und der bewussten Planung andererseits ergriff die
MÁV schliesslich die Initiative, um den Tourismus zu organisieren.
1884 wurde innerhalb der königlich-ungarischen Staatsbahnen ein
Fahrkartenbüro als eine Abteilung gegründet, deren Aufgaben über den
Fahrkartenverkauf hinausgingen. Dazu zählten die Organisation von
Stadtbesichtigungen vor allem für Besucher Budapests, Ausflüge in die
Hohe Tatra und Fahrten in die Kurorte. Mit diesen Dienstleistungen
übernahm die Verkehrsgesellschaft Aufgabenbereiche des Tourismus.
Dieses Büro war der Rechtsvorgänger des ersten ungarischen Reisebüros, des legendären IBUSZ.
Zwei grosse Veranstaltungen prägten diese Periode: Die Landes­aus­
s­tellung in Budapest im Jahre 1885 sowie die Budapester Millenniums­
ausstellung im Jahre 1896, die anlässlich des 1000-jährigen Jubiläums
der Landnahme veranstaltet wurde. Beide Ausstellungen wurden von
einem Organisationskomitee organisiert. Das neue Büro wurde mit der
Aufgabe des Besuchermanagements beauftragt. Die Besucherzahlen
lassen Ausmass und Erfolg der Arbeit erahnen: 1’759’368 Gäste
besuchten die Landesaustellung, die Millenniumsausstellung zog über
5 Millionen Besucher an.
402
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
Diese und zahlreiche andere Beispiele belegen eine schon in der
Pionierzeit der Eisenbahn bestehende Wechselwirkung zwischen
Verkehr und Tourismus, deren Intensität auf Seiten der Verkehrsmittel
auch auf der Monopolstellung der Bahn beruhte. Der Strassenverkehr
war von wesentlich geringerer Bedeutung im frühen Tourismus.
Tourismuspolitik nach dem Ersten Weltkrieg
Der Friedensvertrag von Trianon im Jahre 1920 führte zu einer
starken wirtschaftlichen Behinderung des aussenpolitisch isolierten
Landes, das nun ausserdem ein ausgesprochen negatives internationales
Image hatte. Auch der Tourismus blieb von den Folgen dieses Friedens
nicht verschont: Das Land verlor durch die Grenziehung im Trianon
zwei Drittel seiner Fläche und, abgesehen von Budapest und vom Platt
ensee, bisher wichtige touristische Attraktionen.
Nach den Zerstörungen des Ersten Weltkrieges und aufgrund der
allgemeinen Not zu Beginn der 1920er-Jahre war der Tourismus in
Europa wie gelähmt. In der zweiten Hälfte des Jahrzehnts folgte eine
gewisse wirtschaftliche Erholung, die es ermöglichte, wieder auf Reisen
zu gehen und Urlaub zu machen. Die Zielorte blieben für die Ungarn
die gleichen wie in der Vorkriegszeit: die Hohe Tatra und die Badeund Kurorte, die sich nun jedoch im Ausland befanden. Weil weiterhin
die altbewährten Urlaubsorte bereist wurden, flossen beträchtliche
Summen aus dem Land, was die ohnehin negative Handelsbilanz noch
mehr belastete. Dies aber stand in krassem Gegensatz zur allgemein
verbreiteten Ansicht über die positive Rolle des Tourismus, wie sie ihm
von Wirtschaftsfachleuten und von Politikern zugeschrieben wurde.
Die Volkswirte betrachteten ihn als wichtigen Wirtschaftsfaktor, der
Einkommen für den Staat und für die bereisten Gemeinden generiert
und neue Arbeitsplätze schafft. Für die Politiker war der Tourismus auch
ein Mittel zur Völkerverständigung, sogar zur Friedensförderung – ganz
im Sinne von Lord Derby, der in der Einleitung des Veranstaltungskatalogs von England und Irland im Jahre 1935 schrieb: “I have always
felt that the real safeguard for peace is the personal touch between the
peoples of countries” 4. Solche Ansichten prägten auch die ungarische
Tourismuspolitik.
Es wurden keine geringeren Ziele gesetzt als die Veränderung der
alten Reisegewohnheiten, der Ersatz verloren gegangener Attraktionen
Lord Derby, Coming Events in Great Britain and Ireland, London: Travel and
­Industrial Development Association of Great Britain and Ireland, 1935, p. 1.
4
403
Márta Jusztin
durch die Entwicklung neuer Tourismusangebote für Reisende aus
reiche(re)n westeuropäischen Ländern, die Generierung entsprechender
Deviseneinnahmen und die Schaffung eines neuen positiven Image für
Ungarn.
Eine Schlüsselrolle bei der Verwirklichung dieser kühnen Pläne
spielte der Ausbau der touristischen Infrastruktur, deren wesentlicher Bestandteil der Verkehr war. Auf der grossen internationalen
Tourismuskonferenz im Jahre 1928 bezeichnete der Oberbürgermeister
von Budapest den Verkehr – Eisenbahn, Schifffahrt, Flugverkehr und
die lokalen Verkehrsmittel – als einen der Urheber des Erfolgs bei der
Entwicklung des Tourismus, noch vor Hotellerie und Gastgewerbe 5.
Kontaktebenen zwischen Verkehr und Tourismus
Förderung der Mobilität
1. Der Schienenverkehr
Basis der Mobilität blieb auch im Tourismus der Zwischenkriegszeit
die Eisenbahn. Das Eisenbahnnetz des Landes war auch nach dem
Frieden von Trianon im europäischen Vergleich immer noch durch­
schnittlich entwickelt, und ein weiterer Schienenausbau schien nicht
nötig. Stattdessen rückte die technische Entwicklung in den Vordergrund.
Als Ergebnis solcher Neuerungen konnte die Strecke von Wien nach
Budapest in drei Stunden gefahren werden. Der durch die gute Erreichbarkeit generierte Reiseverkehr war auch für die MÁV von Bedeutung. Die Staatsbahnen spielten in der Folge wiederum eine Hauptrolle
in der Förderung des Fremdenverkehrs. Sie legten dabei Wert auf die
enge Zusammenarbeit mit dem 1916 gegründeten hauptstädtischen
Fremdenverkehrsamt. Wie der Generaldirektor der MÁV bei einem
Fremdenverkehrkurs in seinem Vortrag betonte, stehe die Eisenbahn
direkt und indirekt mit ihrem ganzen Betrieb, mit der Einrichtung und
Bequemlichkeit der Waggons, mit dem Fahrplan und mit dem Personal
im Dienste des Tourismus. Es gab für gezielte Tourismusförderung
mehrere Möglichkeiten, wie ­
Fahrkartenvergünstigungen, Sonderzüge
und Rundreisehefte. Am verbreitetsten waren die v­erschiedenen
Fahrkar­
tenvergünstigungen, von denen die Leitung der MÁV und
die touristis­
chen Dienstleister sich eine Steigerung der Anzahl von
Fahrgästen und Besuchern, die Belebung ­
weitabgelegener Regionen
Zilahy Dezső, «Budapest im internationalen Fremdenverkehr», in Fremdenverkehr,
Juli 1928, p. 7.
5
404
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
und die ­Bekämpfung der Saisonalität erhofften. 6 Zu den Begünstigten
gehörten ungarische Staatsbürger sowie Ausländer, Gruppen oder
Einzelreisende.
Eine bevorzugte Aktion war, dass Österreicher oder auch Ausländer,
die in den frühen 1920er-Jahren an einem in Wien organisierten
Kongress teilgenommen hatten, eine 33-prozentige Fahrpreisermässigung auf den Linien der königlich-ungarischen Staatsbahn erhielten,
damit sie auch Budapest besuchen konnten. Auf diese Weise sollte
Budapest vermehrt in den internationalen Fremdenverkehr einbezogen
werden, was in den 1920er-Jahren wegen der politischen Isolation des
Landes keine einfache Aufgabe war. Mit Rückgriff auf die Konzepte
des 19. Jahrhunderts wurden Besucher zu grossen Veranstaltungen, wie
beispielsweise der landwirtschaftlichen Ausstellung, der Budapester
Internationalen Messe oder der Heiligen-St.-Stephans-Woche mit einer
Ermässigung von 33 bis 50 Prozent gelockt.
Einige Formen der Fahrkartenvergünstigungen trugen sogar zur
Förderung von verschiedenen neuen Tourismusformen bei. Eine solche
neue Freizeitbeschäftigung war die sogenannte Weekend-­
Bewegung
gegen Ende der 1920er-Jahre. Es war das Ziel des ungarischen
Weekend-Landesvereins, Wochenendausflüge und Wochenendaufent­
halte im Land anzubieten. Die Mitglieder des Vereins erhielten eine
Fahrpreisermässigung zwischen 25 und 30 Prozent.
Eine saisonal abhängige Ermässigung von 33 bis 65 Prozent erhielten
Reisende mit dem Zielort Plattensee, bald danach auch für Reisen zum
Velencer See. Durch die Förderung dieser attraktiven Destinationen
wollte man die Ungarn von ihren althergebrachten, nunmehr ausländischen Ferienorten abbringen.
Die Förderung des Heilbadtourismus durch eine Fahrkartenermässigung hatte einige aus heutiger Sicht seltsam anmutende Bedingungen.
Die Aufenthaltsdauer war auf ein Minimum von zehn Tagen festgelegt,
was im Vergleich zu den Kuraufenthalten im 19. Jahrhundert wirklich
kein langer Zeitraum war. Ebenso war eine Mindeststrecke von
100 Kilometern vorgeschrieben, was im tourismuspolitischen Bestreben
begründet war, das Interesse der Reisenden auf die Provinz zu lenken.
Ähnlichen Zielen dienten die sogenannten Rundreisehefte. Mit
diesen billigen Fahrkarten konnten verschiedene von den Staatsbahnen
angegebene Reiserouten bereist werden. Die meisten Hefte wurden für
Hallósy István, «Lehetséges-e Budapesten téli saison?», (Ist eine Wintersaison in
Budapest möglich?), in A Szálloda (Das Hotel), n° 2, 1938, p. 4-7.
6
405
Márta Jusztin
Ost- und Südungarn angeboten, für strukturschwache Regionen also,
die touristisch noch kaum oder überhaupt nicht erschlossen waren.
Diese Vergünstigungen sollten der starken Konzentration des Tourismus
auf Budapest entgegenwirken. Dabei hatte man nicht zuletzt die bisher
geringe Auslastung der Züge und die Rentabilität dieser Strecken
im Auge.
Eine andere Form der Vergünstigung stellten die verschiedenen
Sonderzüge dar. Am verbreitetsten waren die sogenannten Groschenzüge. Die Reisen wurden immer zu einer von der MÁV bestimmten
Veranstaltung (Theateraufführung, Weinlese, Sportprogramm) organisiert. Sie fanden nur an Sonntagen und mit einer Teilnehmerzahl von
mindestens 500 Leuten statt. Mit weniger Fahrgästen war die Reise
für die Staatseisenbahn nicht rentabel. Am Anfang verkehrten die
Züge zwischen Hauptstadt und Kleinstädten auf dem Lande, bald
auch umgekehrt und am Ende der 1930er-Jahre zwischen Kleinstadt
und Kleinstadt. Für die «Groschentage» weisen die Statistiken in den
bereisten Gebieten hohe Umsätze der lokalen Märkte, der Restaurants
und der kleinen Läden nach 7. In einigen Fällen war das ungarische
Reisebüro IBUSZ Mitorganisator des Programms, am häufigsten bei
den Reisen zu den berühmten Freilichtspielen auf dem Domplatz in
Szeged in Südungarn. Der erste «Groschenzug» fuhr am 27. März 1932
nach Szeged, der letzte am 9. November 1942 nach Kolozsvár (Klausenburg). Die Aktion war für alle Beteiligten von Nutzen: Sie sicherte
Extraeinnahmen für die Staatsbahnen und förderte den Inlandtourismus
sowie die Kenntnisse der Gäste über die ungarischen Regionen.
Ein weiteres Tourismusangebot stellten die «Kulturzüge» dar. Sie
förderten die Kulturprogramme auf dem Lande. Diese Züge wurden
auf Anforderung der Organisatoren eines Programms bereitgestellt.
Sie waren weniger verbreitet als die «Groschenzüge», die meisten
Ausflüge wurden nach Mezőkövesd in Ostungarn, in die Hochburg der
ungarischen Volkskunst organisiert.
Es wurde auch das Angebot der «Austauschzüge» kreiert. Diese
galten als eine Notlösung in der Weltwirtschaftskrise, während der
der Ausreisetourismus in fast allen Ländern Europas durch strenge
Devisensperren behindert wurde. Damit doch wieder Auslandsreisen
gemacht werden konnten, wurde ein Kompensationssystem ausgearbeitet. Jede ins Ausland reisende ungarische Gruppe hatte im bereisten
Fészl József, «Az idegenforgalomról általában (Über den Fremdenverkehr im
­Allgemeinen)», Városok Lapja, n° 9, 1933, p. 112-116.
7
406
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
Land ihre Partnergruppe. Der Devisenbedarf der ungarischen Gruppe
wurde durch die nach Ungarn einreisende ausländische Gruppe gedeckt.
«Kommt zu uns, damit wir zu Euch fahren können!», hiess es in der
Werbung 8. Das Angebot hatte jedoch nur einen sehr beschränkten
Erfolg; lediglich mit Italien gelang diese Art von Zusammenarbeit.
Das Ergebnis einer engen Kooperation zwischen der MÁV und dem
ungarischen Reisebüro IBUSZ war schliesslich das Pauschalangebot
«Kommen Sie für 3 Tage nach Budapest». Diese Aktion verband eine
Fahrkartenermässigung mit einem dreitägigen Aufenthalt in der Hauptstadt. Mit den billigen Preisen erhofften sich die Dienstleister, Hoteliers
und Restaurantbesitzer die Förderung des Einreisetourismus aus westlichen Ländern, vor allem aus Österreich und hier speziell aus Wien. Später
wurde die Aktion mit dem Slogan «Eine fröhliche Woche in Ungarn»
auf acht Tage ausgedehnt. Die Touristen erhielten eine gültige Fahrkarte
für die ungarische Staatsbahn und für die Schifffahrtsgesellschaften. Das
Angebot umfasste auch Gutscheine, die von Hotels von guter Qualität
und Restaurants in Budapest und auch auf dem Land akzeptiert wurden.
2. Der Strassenverkehr
Auch in der Zwischenkriegszeit dominierte der Schienenverkehr.
Der Grund dafür war vor allem die miserable Qualität der Landstrassen.
In den 1920er-Jahren waren sie in einem so schlechten Zustand, dass
es zwischen Behörden und Tourismusfachleuten sehr oft zu heftigen
Auseinandersetzungen kam. Letztere bangten um den Erfolg grosser
Veranstaltungen und behaupteten beispielsweise, Budapest sei vom
Westen auf der Landstrasse gar nicht zu erreichen. In einer Besprechung
der Budapester Stadtbehörde kritisierten sie die Lage scharf: «Hat der
Herr Bürgermeister Kenntnis davon, dass die ungarischen Landstrassen
sich in so schlechtem Zustand befinden, dass auf diesen keine Automo­
bile verkehren können? Hat der Herr Bürgermeister Kenntnis davon,
dass Reisende aus Italien, aus Frankreich, aus Deutschland alle auf
der von Wien nach Budapest führenden Landstrasse in die Hauptstadt
anreisen wollen? Die Tatsache, dass diese Landstrasse seit anderthalb
Jahren gesperrt ist, fügt der Hauptstadt immensen Schaden zu» 9. Es ist
Klaudy József, Az európai legelső nemzeti utazási iroda története, a MÁV hivatalos
menetjegyirodájának negyven éve (Die Geschichte des ersten nationalen Reisebüros in
Europa, die vierzig Jahre des offiziellen Fahrkartenbüros der MÁV), Budapest: IBUSZ,
1943, p. 76.
9
Budapest Törvényhatórási Bizottságának jegyzőkönyve (Protokoll des Magistrats
der Hauptstadt Budapest), 1932 Budapesti Fővárosi Levéltár, (Budapester Stadtarchiv),
1061, p. 454.
8
407
Márta Jusztin
nicht erstaunlich, dass der Bau von Landstrassen auf allen Ebenen und
bei allen Gelegenheiten zum Thema wurde, und jeder fertiggestellte
Landstrassenabschnitt als Erhöhung des touristischen Potenzials galt.
Von der neuen Autostrasse zwischen Budapest und Wien, die in Ungarn
für eine der grossartigsten Autostrassen in Europa gehalten wurde,
erhofften sich die Tourismuspolitiker den Anstieg der Besucherzahlen
aus der ehemaligen Kaiserstadt als Folge der nun schnelleren und
bequemeren Anbindung.
Im Jahr 1935, in der Aufschwungsphase des ungarischen Tourismus,
wurde die moderne Strecke von Budapest nach Szeged dem Verkehr
übergeben. Das südliche Zentrum der Tiefebene konnte jetzt auch mit
Autos leichter erreicht werden. Eine neue Landstrasse wurde zudem
um den Plattensee, dem zweitwichtigsten Zielort des ungarischen
Tourismus, gebaut. Dies ermöglichte – wie der Ausbau der Südbahnlinie im 19. Jahrhundert – die schnelle und bequeme Erreichbarkeit
der sich schnell entwickelnden, vor allem auf dem Nordufer des Sees
gelegenen Urlaubsorte.
Mit der 1937 fertiggestellten neuen Landstrasse zwischen Budapest
und Hortobágy zeitigte der Motorfahrzeugverkehr eine direkte Wirkung
auf die touristische Programmgestaltung. Sie verkürzte den Weg
zwischen der Hauptstadt und der Puszta um 97 Kilometer. Die geringere Fahrzeit ermöglichte eine Erweiterung des Tourismusangebots.
Nach dem Besuch von Hortobágy hatten die Gäste noch Zeit für eine
kurze Besichtigung von Eger oder Mezőkövesd. Die nun mögliche
Einschaltung der berühmten historischen Kleinstadt respektive der
Hochburg der ungarischen Volkskunst war ein wichtiger Schritt in der
touristischen Produktentwicklung in den 1930er-Jahren 10.
Die Entwicklung des Motorfahrzeugbestands ging jedoch in Ungarn
vergleichsweise langsam voran. Der Motorisierungsgrad von 14 europäischen Ländern lag 1938 bei einem Durchschnittswert von 5.7, während
Ungarn nur den Indexwert von 0.5 aufwies. Auf 1000 Einwohner
kamen in Ungarn 2 Automobile, in der Tschechoslowakei 5, in den
­nordeuropäischen Ländern 20 bis 30, in den am meisten entwickelten
westeuropäischen Ländern sogar 40 Automobile auf 1000 Einwohner 11.
Die geringe Zahl der Automobile mag erklären, dass im Rahmen
des organisierten Tourismus den Reisegewohnheiten der privaten
Ungarischer Fremdenverkehrskurier, n°9, 1937, p. 7.
Romsics Ignác, Magyarország története a XX. században (Die Geschichte Ungarns
im XXsten Jahrhundert), Budapest: Osiris Kiadó, 1999, p. 170.
10
11
408
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
­ utobesitzer noch wenig Aufmerksamkeit geschenkt wurde. Es gab
A
kaum 15’000 Privatautos im ganzen Land, mehr als die Hälfte davon
war in der Hauptstadt konzentriert. Das Auto blieb hauptsächlich ein
städtisches Verkehrsmittel 12. Über Veranstaltungen wie die internationalen Sterntouren berichtete die touristische Fachpresse, vor allem
wenn der ungarische Automobilclub daran beteiligt war.
Anders verhielt es sich mit den Autobussen. Der Ausbau der
Landstras­­sen förderte den Autobusverkehr und den sich darauf stützenden
Tourismus. In Analogie zu den erfolgreichen «Groschenzügen»
organisierte eine private Autobusgesellschaft Ausflüge zu einem
niedrigeren Preis. Der erste Ausflug führte ins nahe bei Budapest liegende
Esztergom im Donauknie. Bald darauf führten die Tagesausflüge auch in
neu erschlossene Regionen, wie das Mátra- oder das Börzsönygebirge,
welche die verlorenen Kurorte in der Tatra ersetzen sollten 13.
Auch das grösste Reisebüro IBUSZ entwickelte neue Produkte,
indem es mit Autobussen Ausflüge organisierte. Diese Initiativen
erreichten allerdings nicht die Beliebtheit der «Groschenzüge». Es war
im Wesentlichen ein Nischenmarkt: Rentable Autobusfahrten wurden
zu Destinationen organisiert, die mit der Bahn nicht oder nur schwer
erreicht werden konnten.
3. Der Flugverkehr
Die grösste Sensation der 1896 stattfindenden Millenniumsausstellung in Budapest war ein befestigter Heissluftballon. Abenteuerlustige
konnten mit diesem einige Meter in die Höhe aufsteigen. Das Erlebnis
war die besondere Perspektive, die Sicht von oben auf die Landschaft.
Im Jahr 1919 organisierte das englische Reisebüro «Thomas Cook»
einen Aussichtsflug über London 14.
Von einem Flugverkehr kann jedoch noch nicht die Rede sein.
Die Flüge wurden teilweise privat, teilweise von neu gegründeten
Aeroclubs organisiert 15. In Ungarn rückte dieses neue Phänomen
in den 1930er-Jahren ins Blickfeld der touristischen Fachleute. In der
zweiten Hälfte des Jahrzehntes wurde dann auch Budapest an den
Gyáni Gábor, Hétköznapi élet Horthy Miklós korában (Alltagsleben in der Epoche
von Miklós Horthy), Budapest: Corvina, 2006, p. 59.
13
«Nyaraljunk itthon! (Machen wir zu Hause Urlaub!)», Turisták Lapja (Touristen­
blatt), n° 6, 1932, p. 180-183.
14
Pirie Gordon, «Incidental tourism: British Imperial air travel in the 30s», Journal of
Tourism History, n°, 2009, p. 50.
15
Pirie Gordon, «Incidental…», p. 52.
12
409
Márta Jusztin
i­nternationalen Flugverkehr angeschlossen. Einige wenige begeisterte
Privatflugzeugbesitzer wollten nun auch hier die im Fliegen verborgenen Möglichkeiten für den Tourismus ausschöpfen. Im Jahre 1936
wurde im ungarischen Landesamt für Tourismus eine Abteilung für
Luftverkehr mit der Aufgabe gegründet, die ungarischen Städte in
den Luftverkehr einzubeziehen und den Flugtourismus zu fördern.
Die Wichtigkeit der kleinen, aber sehr agilen Abteilung (es arbeiteten insgesamt drei Personen dort) zeigte sich in ihrem Budget. Im
Gründungsjahr verfügte sie über 3000.- Pengő, im nächsten Jahr wurde
es auf die beträchtliche Summe von 14’000.- Pengő erhöht. Der Grund
dafür lag einerseits im gesellschaftlichen Gewicht der vornehmen,
einflussreichen Protagonisten des Aerotourismus. Andererseits aber
dienten diese Ziele auch wirtschaftlichen und aussenpolitischen Interessen des Landes. Man ging davon aus, dass die Zahl der Privatflugzeugbesitzer in Europa stark zunehme, und dass diese wohlhabenden,
zur Aristokratie und zur Oberschicht gehörenden Leute bereit seien,
für interessante Programme von hoher Qualität grössere Summen zu
bezahlen. Wichtiger als die finanziellen Ziele war jedoch ihr politischer Einfluss im Ausland. Man hoffte, dass die vornehmen Gäste
nach ihrer Heimkehr die Fürsprecher Ungarns (und seiner Politik)
würden und dadurch das Land ein besseres Image bekäme. Das erklärt,
dass die Flugabteilung und das ungarische Landesamt für Tourismus
diese lukrativen Programme mit grösster Sorgfalt organisierten. Sie
legten grossen Wert darauf, dass die ausländischen, nach Budapest
anfliegenden Flugtouristen mit ihren Fliegern auch die schönen,
typischen Städte Ungarns besuchen konnten, die zu diesem Zweck mit
Flugplätzen erschlossen werden mussten. Die Mitglieder der Abteilung untersuchten die geografischen Gegebenheiten für den Ausbau
von Flugplätzen. Zudem sollten sie die Bürgermeister der betroffenen
Städte von der Wichtigkeit des Flugverkehrs und des Flugtourismus
überzeugen; die Städte sollten freie Grundstücke für Flugplätze zur
Verfügung stellen. Als Ergebnis dieser Organisationsarbeit konnten
Privatflugzeuge bald in den touristischen Orten, etwa am Plattensee, in
Debrecen, an der Hortobágy und der berühmten Puszta in Ostungarn,
oder in für den Fremdenverkehr noch wenig erschlossenen Städten der
ungerischenTiefebene wie etwa Kalocsa landen.
Als grösster Erfolg galt die Eröffnung des modernen Flughafens
Budaörs bei Budapest im Jahre 1937. Die modernen Einrichtungen
ermöglichten nun auch die Landung bei Nacht und Nebel. Das komfortable Empfangsgebäude erfüllte alle Bedürfnisse. Es gab hier auch ein
410
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
Tourismusbüro, wo man Zimmer reservieren und Stadtrundfahrten oder
Ausflüge buchen konnte. Eine direkte Busverbindung zur Stadtmitte
erleichterte die Fahrt in die H
­ auptstadt 16.
Der Verkehr als Programm
Die Wechselwirkung zwischen Verkehr und Tourismus zeigt
sich vielleicht am deutlichsten in den Tourismusprogrammen und
ihrer Entwicklung. Die quantitative und qualitative Entwicklung des
Fuhrparks und des Verkehrsnetzes ermöglichte die Herausbildung von
neuen Angebotselementen. Über die primäre Rolle des Verkehrs hinaus
wurde dieser teilweise oder vollständig zum Programm. Beispiele dafür
gab es von der Eisenbahn bis zur Schifffahrt.
Die enorme Bedeutung der Eisenbahn bestand nicht nur im gleichzeitigen Transport vieler Menschen über weite Strecken und in der
Bequemlichkeit der Reise; neu waren auch das Geschwindigkeitserlebnis und die veränderte Raumwahrnehmung 17. Das primäre Reiseerlebnis konnte durch komfortable, luxuriöse Einrichtungen, wie
beispielsweise Speise- und Schlafwagen, gesteigert werden, wie es
etwa das Beispiel des berühmten Orient-Express zeigt.
Es gab aber auch weniger aufwändige Ideen, das Reiseerlebnis in
Ungarn eindrucksvoller zu gestalten. Die berühmte Bugac-Puszta der
1930er-Jahre war durch eine kleine Schmalspurbahn mit der naheliegenden Stadt Kecskemét verbunden. In erster Linie diente sie dem
Transport von landwirtschaftlichen Produkten von Bugac, wobei ein
Waggon für die Beförderung von Touristen bereitgestellt wurde. Auf
Wunsch konnte zusätzlich ein Speisewagen angehängt werden. In
diesem fuhr eine Zigeunerkapelle mit, die für die romantische «Pusztastimmung» sorgte. Die Abenteuerlustigen unter den Reisenden durften
sogar auf der kleinen Dampflok fahren. Am Ende der Reise wurden sie
mit einer Urkunde ausgezeichnet und zum Ehrenlokführer ernannt.
Auf der Strasse erschloss nach dem Ersten Weltkrieg der Autobusverkehr die Mittelgebirge von Ostungarn für den Tourismus. Er ermöglichte in den 1930er-Jahren die Organisation von Tagesausflügen. Und
in den Städten führten Taxis sowie kleinere und grössere Autobusse zu
einer Neugestaltung der Besichtigungen. Im ersten ungarischen Reisebüro IBUSZ konnte jeder Tourist eine geführte Stadtrundfahrt buchen.
Budapester Fremdenzeitung, n°8, 1937, p. 23.
Hachtmann Rüdiger, Tourismusgeschichte, Göttingen: Vanderhoeck & Ruprecht,
2007, p. 71-74.
16
17
411
Márta Jusztin
Das neue Programm wurde zuerst 1925 als Test angeboten. Das
IBUSZ hatte zuerst nur einen einzigen kleinen Renault-Autobus mit 14
Plätzen, und es galt schon als Erfolg, wenn die Hälfte davon ausgebucht
war. Schon in den nächsten drei Jahren beschaffte sich das Reisebüro
aber weitere Autobusse, einen mit 16, zwei weitere mit 25 und einen
mit sogar 30 Plätzen, was darauf hinweist, dass die Stadtrundfahrten
schnell ein beliebtes, rentables Programm wurden.
Vom Erfolg des IBUSZ angeregt, erschien nun auch die grösste
Taxigesellschaft von Budapest, die Budapester Autotaxi und Automobilverkehr AG, mit einem Angebot auf dem touristischen Markt, indem
sie Stadtrundfahrten und halbtägige Ausflüge in der Nähe von Budapest
anbot. Der Marktvorteil der Taxigesellschaft gegenüber dem IBUSZ
und dessen Autobussen war, dass sie mit ihren Taxis sowohl kleine
Gruppen von fünf Personen als auch grössere Gruppen mit mehreren
Autotaxis bedienen konnten. Im günstigen Wirtschaftsklima nach der
Grossen Depression konnte dieser neue, sich als rentabel erweisende
Geschäftszweig dann noch ausgedehnt werden. Die Firma schaffte sich
grosse Luxus-Autobusse an und begann, auch In- und Auslandsreisen
für grössere Gruppen zu organisieren. Gleichzeitig wurden die besten
Autobusfahrer weitergebildet: Sie lernten Fremdsprachen (Deutsch,
Englisch, Französisch, Italienisch) und erwarben geografische
Kenntnisse. Sie fuhren die neuen Autobusse mit ungarischen Touristen
ins Ausland oder machten Tagesausflüge mit ausländischen Gästen
in Ungarn 18. Für das Management der Taxigesellschaft war die neue
Dienstleistung im Budapester Tourismusangebot die Möglichkeit, das
Unternehmen im Konkurrenzkampf mit den anderen Taxigesellschaften
zu stabilisieren.
Anfangs der 1930er-Jahre trat mit der ungarischen Binnenund Seefahrts-Aktiengesellschaft schliesslich noch ein weiteres
Verkehrsunternehmen mit einem besonderen touristischen Angebot
auf. Die Tagesausflüge auf der Donau gingen noch auf die Jahrhundertwende zurück. Ab Juni 1932 konnten die Touristen die besondere
Schönheit von Budapest, das in der touristischen Werbung «Königin
der Donau», oder «Perle der Donau» genannt wurde, in einer
zweistündigen Kreuzfahrt geniessen. Auf dem elegantesten Schiff
wurde während der Kreuzfahrt ein Menü serviert. Dieses Angebot
Autotaxi Budapesti Automobil Közlekedési Rt. Igazgatósága 1943 (Hg.) (Direktorat
der Budapester Autotaxi und Automobilverkehrsdirektorat (Hg.)), A harmincéves
Szürke­taxi 1913-1943 (Dreissig Jahre alt ist das Graue Taxi Budapest).
18
412
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
wurde ein exklusives, neuartiges und unter den ausländischen Gästen
sehr beliebtes Abendprogramm und eine der Hauptattraktionen im
sommerlichen Budapest.
Die Rolle des Verkehrs in der Tourismuswerbung
«Wir erleben das Zeitalter der Propaganda!» 19 betonte Oszkár
Bársony, der legendäre Generaldirektor des IBUSZ im Jahr 1934.
Landwirtschaftliche und industrielle Produkte, sogar das politische
Leben bedürften der Werbung; sie sei auch ein unentbehrliches Mittel,
um den Tourismus zu fördern. Der frühe Einsatz von Werbung im
Tourismus hatte über rein geschäftliche Funktionen hinaus und im
Einklang mit den Bestrebungen der offiziellen Aussenpolitik eine
weitere Zielsetzung, die in der Formung eines positiven Ungarnbildes
im Ausland bestand.
Für die Werbung standen jedoch über die ganze Periode hinweg nur
knappe finanzielle Ressourcen zur Verfügung. Zudem war die Herstellung von Werbematerialien wie Katalogen, Plakaten, Werbefotos und
Filmen über Ungarn sehr kostspielig. Sämtliche Jahresberichte des
hauptstädtischen Fremdenverkehrsamtes erwähnten das knappe Werbebudget. Dabei hatte die Organisation nicht nur den Tourismus der
Hauptstadt, sondern den des ganzen Landes zu vertreten. Auch hier
bot eine enge Zusammenarbeit zwischen der Tourismusbranche und
den verschiedenen Verkehrsunternehmen und -organisationen einen
Ausweg 20.
Selbstverständlich sorgte das grösste ungarische Reisebüro IBUSZ
für die Vermarktung seiner Programme. Durch seine eigenen Filialen
in Westeuropa und in den USA und durch seine Zusammenarbeit mit
grossen Reiseunternehmen wie dem Thomas-Cook-Büro und der
American Express Company gelangten nicht nur Reisekataloge und
Reiseprospekte der IBUSZ in die Welt; es wurde auch Werbung für
ungarische Veranstaltungen, für Messen, Festivals, Festwochen oder
Sportereignisse gemacht.
An der Werbung beteiligten sich zudem Verkehrsunternehmen und
-organisationen, allen voran die MÁV. Sie hatte Fahrkartenbüros in fast
allen grossen westeuropäischen Städten und in den grössten Städten
Bársony Oszkár, Utazás és idegenforgalom – tegnap – ma és holnap (Reise und
Tourismus – gestern – heute und morgen), Budapest: Magyar Cobden Szövetség, 1934,
p. 23.
20
«Idegenforgalmi kérdések a főváros parlamentje előtt (Tourismusfragen vor dem
Parlament der Hauptstadt)», A Szálloda [Das Hotel], n° 1, 1938, p. 1.
19
413
Márta Jusztin
der Vereinigten Staaten. Dort standen den Besuchern Reisekataloge
von IBUSZ sowie Prospekte und Veranstaltungskalender des hauptstädtischen Fremdenverkehrsamtes zur Verfügung, dessen Wände mit
Plakaten von Ungarn geschmückt wurden und dessen Angestellte über
Einzelheiten Auskunft geben konnten.
Die Fahrgäste fanden Werbematerialien in ungarischer und deutscher
Sprache über die Sehenswürdigkeiten von Ungarn sowie über Kulturund Sportereignisse entlang der MÁV-Strecken. Die Effektivität dieser
Aktion war jedoch umstritten. Umso mehr wusste das ständig finanziell notleidende touristische Landesamt das Angebot des ungarischen
Aeroverbandes zu schätzen. Dieser besass eine Namensliste mit Adressen
ausländischer Privatflugzeugbesitzer und Mitgliedern von Aeroclubs, die
er dem touristischen Landesamt zur Verfügung stellte. Die Liste enthielt
die Angaben von Personen aus Frankreich (707 Personen), aus England
(750), aus Belgien (42), aus der Schweiz (36), aus den Niederlanden
(29), aus Österreich (20) und aus Deutschland (14). Damit verfügte das
Landesamt über ungefähr 5’400 Adressen, an die es sein Werbematerial
in viel effektiverer Weise per Post versenden konnte.
Fazit
Zwischen Verkehr und Tourismus bestand in der Zwischenkriegszeit
eine komplexe, vielfältige und keineswegs lineare, sich nur auf die
Mobilität konzentrierende Beziehung. Dabei gingen die grösseren
Impulse in diesem Zeitraum zweifellos vom Verkehr aus, der im
Tourismus eine grosse Entwicklung auslöste.
Diese Wechselwirkung weist ein Grundmuster auf. Zunächst
einmal initiierte und bestimmte der Verkehr die Entwicklung des
Tourismus allein durch die neue Art der Mobilität. Das Eisenbahnnetz ermöglichte die Erschliessung von neuen Gebieten und trug zur
Herausbildung von neuen Angeboten bei. Die während der ganzen
Periode hindurch wichtigste Verkehrsgesellschaft, die Königlich
Ungarischen Staatsbahnen, förderten den Tourismus durch verschiedene
­Fahrkartenermässigungen sowie durch die Bereitstellung und Organisation von Sonderzügen. Diese Aktionen wiederum generierten für die
MÁV neue Einnahmen.
Eine weitere Ebene der Kooperation zwischen dem Verkehr und
dem Tourismus war die Beteiligung der Verkehrsunternehmen an
Organisationsarbeiten im Tourismus. Schon im 19. Jahrhundert hatte
die Staatseisenbahngesellschaft eine Abteilung für die Abwicklung von
touristischen Aufgaben gegründet, die auch in der Zwischenkriegszeit
414
Wechselwirkungen zwischen Verkehr und Tourismus in den Zwischenkriegsjahren in Ungarn
bestehen blieb. Die MÁV etwa war in allen touristischen Gremien
vertreten. Dabei wurde die Tatsache ausgenutzt, dass die Reise mit
einem modernen Verkehrsmittel an und für sich einen Erlebniswert
hatte. Um zusätzliche Attraktionen erweitert wurden Reisen dann als
Programm angeboten, sei es auf der Schiene, auf der Strasse oder auf
dem Wasser. Die grössten Verkehrsunternehmen und Verkehrsvereine
beteiligten sich am touristischen Marketing und stellten ihre internationalen Netzwerke in den Dienst der Tourismuswerbung. Durch
ihre eigenen Werbematerialien entlasteten sie die kleinen Budgets der
Tourismusorganisationen.
Der Verkehr war damit ein wichtiger, treibender Faktor des
modernen ungarischen Tourismus in den Zwischenkriegsjahren. Die
Investitionen im Verkehr und das Erscheinen von Verkehrsunternehmen
auf dem touristischen Markt generierten Einkommen und schufen
Arbeitsplätze. Die Interessen der beiden Wirtschaftszweige über­­
schnitten und überlagerten sich auf vielfältige Weise; von der resultierenden Synergiewirkung profitierten alle Beteiligten.
415
L’encouragement de la mobilité touristique
durant l’entre‑deux‑guerres – Entre efforts
de coordination et freins concurrentiels
Cédric Humair, Université de Lausanne
Mathieu Narindal, Université de Neuchâtel
Abstract : Encouraging tourist traffic was a central challenge for hotels and transport firms in the interwar years. During this period of crisis, they sought to increase
profits by attracting a greater number of travellers. What measures were taken to
that end, how the various bodies in the tourism sector interacted, what the results
were of the cooperation set up to encourage mobility, and what role the principle of
supply coordination played are all questions this paper seeks to answer.
Le 9 février 1922, Adolf Angst, directeur de l’hôtel Schweizerhof
à Saint-Moritz, prononce un discours dans le cadre de l’Assemblée
des délégués de la Société suisse des hôteliers. Évoquant la crise que
traverse alors l’hôtellerie helvétique, il souligne que la compétitivité de
la branche dépend étroitement de facteurs liés à la mobilité :
« Im Grossen und Ganzen sind die Klagen nicht gegen die Hotel­
lerie gerichtet, sondern nur gegen das, was drum und dran ist, und
die Italiener treffen wohl das Richtige, wenn sie in ihrer klaren und so
konzisen Sprache sagen, jedesmal, wenn von der Schweiz die Rede ist :
Non è il prezzo di pensione, o l’albergo che incute il terrore, è la strada
che uccide ! und lassen wie so manche Europäer unser herrliches Land
links liegen, weil sie ohne weiteres herausfühlen, dass sie nicht vom
Hotel, sondern von aller Kleinigkeiten, den Extras, der Strasse, der
Bahn usw. ausgebeutet werden. » 1
1
Angst Adolf, « Zur Reduktion der Hotelpreise », Revue suisse des hôtels, 9 mars 1922.
417
Cédric Humair, Mathieu Narindal
Le problème des hôteliers est qu’ils ne maîtrisent pas la qualité de
l’offre de transport, dont dépend largement leur capacité concurrentielle ; ils sont donc contraints de collaborer avec les prestataires de
services et les collectivités publiques, qui seuls peuvent modifier les
conditions-cadre de la mobilité touristique.
L’objectif de la présente contribution est d’étudier la façon dont
les différents acteurs du système touristique suisse ont encouragé la
mobilité afin de soutenir la demande. À partir des années 1880, cet
effort est progressivement pris en charge par des organismes collectifs – souvent des associations – qui entretiennent des relations non
seulement entre eux, mais également avec le champ étatique. Un
véritable réseau de coopération est instauré, qui a notamment pour but
de mieux coordonner l’offre et de l’adapter aux besoins des touristes.
La combinaison plus efficace des différentes composantes du système
de transport (horaires, billets communs) est au centre des préoccupations. Par la suite, la création de produits intégrant transport, hébergement et divertissement (voyages à forfait) devient également un
enjeu central.
Si l’élaboration de mesures visant à renforcer l’attractivité de l’offre
de mobilité sur territoire suisse s’avère primordiale pour résister à la
concurrence de l’étranger, elle se heurte aux divergences d’intérêts des
différents acteurs, qui ont parfois beaucoup de peine à s’entendre. Nous
analyserons ce phénomène complexe en nous focalisant sur l’action de
la coopérative Hotelplan, fondée en 1935. Cette agence de voyages,
dont le concept de vacances accorde une importance toute particulière à
la mobilité, cherche à dynamiser le réseau de coopération en place ; elle
doit toutefois faire face à de fortes résistances.
Tourisme et mobilité : enjeux et acteurs
L’importance de la mobilité dans le domaine du tourisme a déjà été
largement traitée dans l’historiographie suisse 2. Les synergies entre
transport et tourisme, en particulier, ont fait l’objet de nombreuses
études de cas ainsi que d’analyses plus théoriques 3. Il suffit donc ici de
souligner les principales fonctions assumées par le transport passager
Tissot Laurent, « D’une Suisse aimée à la Suisse aimante. Tourisme, transport et
mobilité dans l’historiographie économique de la Suisse aux xixe et xxe siècles »,
Traverse, n° 1, 2010, p. 156‑170.
3
Tissot Laurent, « Développement des transports et tourisme : quelles relations ? »,
Revue suisse d’histoire, n° 1, 2006, p. 31-37 ; Bertho Lavenir Catherine,
« Développement des transports et transformations du tourisme. Du bateau à vapeur à
2
418
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
dans le système touristique 4. Premièrement, il détermine l’accessibilité
des lieux de villégiature, remplissant par là même un objectif essentiel :
faire venir le touriste. Deuxièmement, le transport contribue au confort
du touriste et à la qualité de son séjour en lui permettant de se déplacer
sans peine à proximité du lieu d’hébergement. Troisièmement, le transport est un élément essentiel du système de divertissement ; il permet au
touriste d’effectuer des excursions et de pratiquer des activités sportives,
ce qui agrémente son séjour et tend à le prolonger. Enfin, les technologies du transport peuvent avoir une fonction publicitaire. Exerçant une
certaine fascination sur la clientèle, les innovations techniques sont
utilisées comme argument de vente. Les milieux hôteliers ont donc
un intérêt fondamental à améliorer l’offre de transport. Les démarches
qu’ils effectuent dans ce sens ont trois visées principales : baisser le prix
de la mobilité des touristes, augmenter l’efficacité du transport (vitesse,
correspondances, intermodalité) et améliorer sa qualité (confort des
véhicules, trains de nuit, wagons-­restaurants, revêtement des routes).
De leur côté, les entreprises de transport ont également intérêt à voir
augmenter le flux de touristes, qui tend à accroître la rentabilité de
leurs infrastructures. Selon Paul Bairoch, le tourisme contribue grandement à placer les chemins de fer suisses en tête des réseaux nationaux
à fort transport passager ; il estime qu’en 1913, 19 % des usagers sont
des touristes étrangers 5. Cette dépendance est encore plus aiguë pour
certaines compagnies de navigation et de chemins de fer de montagne,
qui vivent essentiellement, voire exclusivement, de la clientèle
­touristique.
Bien que les acteurs de l’hôtellerie et du transport aient en principe
intérêt à coopérer, leurs relations ne sont pas dénuées de contradictions. L’essor de nouvelles formes de mobilité peut tout aussi bien
favoriser certains hôteliers que leur nuire, suivant qu’il touche leur
région ou une zone concurrente. Un autre risque est que l’excès de
mobilité tue le séjour : certaines offres de transport peuvent inciter les
touristes à passer leur temps dans les trains et les autocars, sans plus
l’automobile : évolution d’un “système socio-technique” (xixe-xxe siècles) », Traverse,
n° 1, 2008, p. 79‑93.
4
Humair Cédric, « The hotel industry and its importance in the technical and economic
development of a region : the Lake Geneva case (1852-1914) », Journal of Tourism
History, n° 3, 2011, p. 237‑265 (ici 245‑252) ; Humair Cédric, « Ville, tourisme et
transport : la Compagnie du chemin de fer Lausanne-Ouchy (1869‑1914) », Entreprises
et Histoire, n° 47 (Le tourisme), juin 2007, p. 11‑25.
5
Bairoch Paul, « Les spécificités des chemins de fer suisses des origines à nos jours »,
Revue suisse d’histoire, vol. 39, 1989, p. 35‑57 (ici 50).
419
Cédric Humair, Mathieu Narindal
s’arrêter pour dormir et consommer. Quant aux compagnies de transport, elles doivent parfois s’opposer aux revendications des hôteliers,
afin de ne pas péjorer leur propre rentabilité. De fait, la baisse des
tarifs risque d’engendrer des pertes supérieures aux gains provoqués
par une augmentation du nombre de passagers ; quant aux investissements nécessaires à l’amélioration de l’efficacité et de la qualité du
transport, ils peuvent causer des frais supérieurs à la hausse desrecettes.
Après avoir analysé les enjeux liés à l’encouragement de la mobilité
touristique, voyons quels sont les acteurs collectifs concernés par cette
problématique. À l’image d’autres secteurs de l’économie suisse, les
milieux de l’hôtellerie et du transport commencent à s’organiser au
sein d’associations privées d’envergure nationale durant les dernières
décennies du xixe siècle 6. L’Association des chemins de fer suisses
(1860‑1909), qui regroupe les grandes compagnies ferroviaires privées,
est la première à voir le jour, bientôt suivie de l’Union des chemins
de fer secondaires suisses (UCSS 1889), qui devient l’Union des entreprises suisses de transport (UEST) en 1925, et de l’Union des funiculaires suisses (UFS 1900). Les milieux de l’automobile leur emboîtent
rapidement le pas avec le Touring Club Suisse (TCS 1898) et l’Automobile Club Suisse (ACS 1900), de même que le transport sur eau
avec l’Association des entreprises suisses de navigation (AESN 1898).
Fondée en 1882, l’organisation nationale des hôteliers est réformée
en 1891 et inscrite sous le nom de Société suisse des hôteliers (SSH)
au registre du commerce. Quant à l’Union suisse des sociétés de
développement (USSD 1893), elle joue le rôle d’association faîtière des
sociétés de développement locales et régionales, aussi appelées Kurou Verkehrsvereine en Suisse alémanique. De par la faiblesse de ses
capacités financières et organisationnelles, cette association reste toutefois un acteur marginal du champ analysé.
Malgré la création d’associations à caractère national, la coopération en matière de mobilité touristique reste longtemps cloisonnée à
l’échelle régionale. L’influence qu’exercent les milieux touristiques sur
le processus décisionnel des grandes compagnies ferroviaires privées est
très limitée. L’Association des intérêts de Genève, ancêtre de Genève
Tourisme, s’en plaint amèrement :
Pour un aperçu des acteurs collectifs du tourisme, Gölden Hubert, Strukturwand­
lungen des schweizerischen Fremdenverkehrs 1890‑1935, Zurich : Girsberger, 1939,
p. 308‑334.
6
420
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
Réseau de coopération actif dans le champ de la mobilité touristique
durant les années 1930
1) Les organismes suivants sont membres de l’Association nationale suisse
pour le développement du tourisme (ANDT) en 1939 : Office fédéral des transports, SSH, FST, AESN, CFF, UEST, PTT, ACS, TCS.
2) Les organismes suivants sont membres de la Fédération suisse du tourisme
(FST) en 1938 : SSH, ONST, AESN, CFF, UEST, PTT, ACS, TCS, ASPA.
« Transports. Le plus ingrat de tous les chapitres de notre activité.
Car malgré toutes nos peines et nos démarches, nous n’obtenons
rien. Chacune de nos requêtes demandant une amélioration pour
le service des trains, soit au PLM [Paris-Lyon-Méditerranée], soit
au J-S [Jura-Simplon], est suivie d’un refus ou d’une explication
nous prouvant clair comme le jour que tout va pour le mieux dans
le meilleur des mondes. Bienheureux sommes-nous encore lorsqu’on
répond à une lettre. C’est la lutte du pot de terre contre le pot de fer
et il n’y a rien à espérer. » 7
Archives de Genève Tourisme, Rapports du comité à l’assemblée générale, livre 2‑18
(1887‑1903), 2 février 1903, p. 31.
7
421
Cédric Humair, Mathieu Narindal
La création des Chemins de fer fédéraux (CFF 1902) modifie
quelque peu la donne. Certes, la régie fédérale est très puissante, mais
sa dimension politique l’oblige à être à l’écoute du reste de l’économie,
dans un esprit de service public. Ainsi, en 1910, est créée la Conférence
commerciale des entreprises de transport suisses (CCETS), qui regroupe
les acteurs du transport, les usagers et l’administration fédérale 8. Bien
que la SSH ne soit pas directement représentée dans cette organisation,
elle y obtient un siège via l’Union suisse du commerce et de l’industrie,
dont elle est membre depuis 1892 9. Par ailleurs, le poids de l’hôtellerie
au sein du réseau de coopération est renforcé par le boom touristique
de la Belle Époque et la montée en puissance de la SSH, qui représente 62 % de l’offre de lits en 1905 10 et dispose d’un organe de presse
propre, la Revue suisse des hôtels. Avant le premier conflit mondial, le
bilan de l’action des milieux touristiques demeure toutefois modeste.
Les succès les plus probants sont enregistrés dans le domaine des tarifs
spéciaux accordés par les compagnies ferroviaires 11.
Un réseau de coopération sous tension :
crise de l’entre-deux-guerres et montée
de la concurrence internationale
Durant l’entre-deux-guerres, le réseau de coopération qui unit les
acteurs de l’hôtellerie et des transports est mis sous tension par la violente
crise que traverse alors le tourisme suisse 12. La situation est d’autant
plus préoccupante que la concurrence étrangère ne cesse de se renforcer.
Les États voisins – Autriche, Allemagne et Italie – instaurent des
mesures protectionnistes destinées à retenir les touristes indigènes sur le
territoire national. Par ailleurs, ils cherchent à attirer les touristes étrangers – notamment les Suisses – par des mesures de dumping : en 1935,
Riniker Hans, Entstehung und volkswirtschaftliche Bedeutung der Schweizerischen
Eisenbahnverbände, Wallisellen : H. Albrecht, 1930, p. 149‑155.
9
Oskar Hauser (1867‑1935), président de la SSH de 1909 à 1915, membre de la
Chambre suisse du commerce (USCI) de 1912 à 1935, est délégué de l’USCI à la
CCETS de 1910 à 1922.
10
Senn Henri-Georges, La Suisse et le tourisme, Lausanne : Payot, 1918, p. 80.
11
Branger Conrad, Tarifmassnahmen der Schweizer Bahnen zur Förderung des
Fremdenverkehrs, Berne : Stämpfli, 1949, p. 27‑29.
12
Pour une analyse de l’évolution conjoncturelle du tourisme suisse, Humair Cédric,
« Introduction », in Humair Cédric, Tissot Laurent (dir.), Le tourisme suisse et son
rayonnement international. « Switzerland, the playground of the world », Lausanne :
Antipodes, 2011, p. 17‑24, p. 52‑54. Sur la crise des années 1930, Schumacher
Beatrice, « Krise im Reiseland par excellence : zum Umgang mit Krisen von Hotellerie
und Fremdenverkehr in der Schweiz », Traverse, n° 1, 1997, p. 81‑96.
8
422
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
les groupes de touristes étrangers de plus de vingt-cinq personnes se
rendant en Italie en chemin de fer bénéficient par exemple d’un rabais
de 70 % sur le prix du trajet en territoire transalpin 13.
Confrontés à cette situation, les milieux du tourisme s’efforcent
d’améliorer l’efficacité de leur action en renforçant leur organisation.
En 1917, l’Association nationale pour le développement du tourisme
(ANDT) voit le jour, qui dynamise la propagande touristique en créant
l’Office national suisse du tourisme (ONST). Dès la réorganisation de
la CCETS, en 1920, un membre de l’ONST y représente le tourisme.
En 1930, un groupe parlementaire interpartis est créé sous la dénomination « Transport, tourisme et hôtellerie » (TTH) 14 ; il permet de peser
sur les décisions des autorités politiques et des régies. En 1932, un
pas supplémentaire est franchi avec la constitution d’une organisation faîtière, la Fédération suisse du tourisme (FST). Tous les acteurs
essentiels du champ y sont représentés ; la voix du tourisme s’en trouve
unifiée et renforcée 15.
La politique de crise que mènent les milieux hôteliers, en étroite
collaboration avec l’État central, poursuit quatre objectifs : limiter
l’offre, faciliter le crédit, intensifier la promotion touristique et encourager la mobilité des personnes 16. En 1915 déjà, le marché hôtelier est
régulé par la Confédération, qui limite la construction de nouveaux
établissements de séjour. Ce cadre légal permet à la SSH, réorganisée
en 1919, de constituer un cartel de prix efficace, dont la stratégie est
de maintenir l’hôtellerie suisse dans un créneau de haute qualité 17.
Afin d’éviter les faillites, la Confédération adopte plusieurs dispositions légales qui allègent les obligations des hôteliers vis-à-vis de
leurs ­créanciers. En 1921, elle fournit la moitié du capital nécessaire
à la création de la Société fiduciaire suisse pour l’hôtellerie, qui a pour
but d’aider les entreprises en difficulté à assainir leur dette et financer
Archives fédérales suisses (AFS), E7170A 1000/1069, dossier 818 : Massnahmen
anderer Länder zugunsten ihrer notleidenden Hotelindustrie, document intitulé
« Massnahmen zur Förderung des Fremdenverkehrs in andern Ländern » (du
12 février 1935).
14
Gnägi Rudolf, « Fremdenverkehr, Parlament und Parlamentarische Gruppe für
Verkehr, Tourismus und Hotellerie », Annuaire des autorités, administrations et entre­
prises fédérales, 1961, p. 149‑161.
15
Dasen Hans, Entstehung und Entwicklung der gesamtwirtschaftlichen Zusammen­
schlüsse im schweizerischen Fremdenverkehr, Berne : Stämpfli, 1948.
16
Narindal Mathieu, La Société suisse des hôteliers face aux défis touristiques de
l’Entre-deux-guerres, mémoire de master (non publié), Université de Lausanne, 2012.
17
Felix Karl, Preisabreden im schweizerischen Hotelgewerbe, Bâle : SSH, 1934.
13
423
Cédric Humair, Mathieu Narindal
leurs investissements 18. La Confédération intervient également dans le
domaine de la publicité 19 : l’action de l’ONST, créé en 1917, est massivement soutenue par l’État. Sur le plan de la mobilité, les milieux
touristiques s’engagent tout d’abord en faveur du démantèlement des
formalités administratives instaurées par une police des étrangers
obnubilée par la lutte contre la menace bolchevique et la surpopulation
étrangère (Überfremdung) 20. Dans un deuxième temps, ils prient l’État
d’agir contre les mesures protectionnistes prises à l’étranger, en particulier la réglementation de la circulation des devises. Enfin, les efforts
visant à une amélioration de l’offre de transport sont intensifiés.
Les milieux touristiques obtiennent la réintroduction d’offres
favorables au tourisme que les CFF avaient supprimées pendant la
guerre, puis la mise en place de nouvelles mesures 21. La plus importante
d’entre elles est le rabais de 10 % sur les tarifs appliqués aux touristes
étrangers, qui est introduit durant l’hiver 1931/32. La remise est ensuite
portée à 30 % en 1933 grâce au soutien financier de la Confédération qui prend en charge la moitié des coûts de l’opération 22. Signalons encore l’introduction d’abonnements généraux de durée limitée
et de rabais sur les billets collectifs favorisant les tours organisés. Le
tourisme automobile est aussi encouragé. La principale démarche vise
à maintenir le prix de l’essence à un niveau plus bas que dans les pays
concurrents. L’arrêté du 28 juin 1935 23, qui octroie aux touristes étrangers une remise de 6 cts/l (jusqu’à 300 litres), compense le relèvement des droits de douane sur les carburants pour moteurs décrété le
25 juin. Par ailleurs, les milieux automobilistes et touristiques s’allient
pour exiger l’amélioration des routes alpines. Déposée en 1934 avec
147 830 signatures, l’initiative des Alpes est retirée au profit de l’arrêté
du 5 avril 1935, qui permet de débloquer dans ce but un subside annuel
de 6,5 millions de francs durant la période 1935‑1947 24.
Seiler Franz, « Das Hotelhilfsinstitut des Bundes und seine Tätigkeit », in Festgabe
für Bundesrat Dr. h.c. Edmund Schulthess, Zurich : Polygraphischer Verlag, 1938,
p. 337‑363.
19
Gölden Hubert, Strukturwandlungen…, p. 324‑334.
20
Gast Uriel, Von der Kontrolle zur Abwehr. Die eidgenössische Fremdenpolizei im
Spannungsfeld von Politik und Wirtschaft 1915-1933, Zurich : Chronos, 1997.
21
Plusieurs de ces mesures sont discutées au sein de la CCETS, dont les procèsverbaux permettent d’analyser les divergences d’intérêts des différents acteurs ; AFS,
E8100B/1973/154, dossiers 135, 137 et 138, Kommerzielle Konferenz, Protokolle.
22
Branger Conrad, Tarifmassnahmen…, p. 122‑142.
23
Recueil officiel des lois et ordonnances de la Confédération suisse, t. 51, Berne :
K.-J. Wyss, 1935, p. 505‑506.
24
Sigg Oswald Georg, Die eidgenössischen Volksinitiativen 1892-1939, Einsiedeln :
Benziger, 1978, p. 173‑175.
18
424
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
Tout en renforçant la volonté des différents acteurs de coopérer
pour contrer la concurrence étrangère, la situation de crise exacerbe les
tensions internes. Le « gâteau » que représentent les revenus du tourisme
se rétrécissant, chacun veut en garder une « tranche » aussi grande que
possible. Dans ce contexte, la croissance de la mobilité touristique
routière pose problème. Évaluée à 1 % en 1912 25, la proportion des
touristes arrivés sur leur lieu de séjour en véhicules à moteur serait de
15 % en 1925 et de 35 % en 1935 26. L’autocar représente un marché en
pleine croissance pour lequel luttent la régie fédérale des postes (PTT
1849) et le secteur privé, représenté par l’Association suisse des propriétaires d’auto-camions (ASPA 1921) et l’Association suisse des propriétaires d’autocars (1938). Voyant leur part du trafic passager diminuer,
les chemins de fer cherchent à rendre leur offre plus attractive, mais
aussi à obtenir une régulation de la concurrence rail/route. Il s’ensuit
un débat scientifique et politique musclé sur la nécessité d’organiser et
de réglementer la concurrence entre les deux types de transport 27. La
loi sur le partage du trafic, allant dans ce sens, est toutefois refusée en
référendum, le 5 mai 1935.
En avril de la même année, le champ de la mobilité touristique
est bouleversé et dynamisé par l’entrée en scène d’un nouvel acteur.
Gottlieb Duttweiler 28, fondateur de la Migros, première chaîne suisse
de distribution de produits alimentaires, informe le grand public de
son intention de révolutionner le secteur du tourisme 29. Prenant le
­contre-pied de la SSH, il propose d’améliorer la rentabilité de l’hôtellerie en augmentant les taux de fréquentation, ce qui nécessite non
seulement une baisse des prix hôteliers, mais aussi des coûts du transport. Cette logique de massification du tourisme va de pair avec une
Schärli Arthur, Höhepunkt des schweizerischen Tourismus in der Zeit der « Belle
Époque » unter besonderer Berücksichtigung des Berner Oberlandes, Berne, etc. : Peter
Lang, 1984, p. 40.
26
Gölden Hubert, Strukturwandlungen…, p. 39.
27
Piguet Alfred, La concurrence de la route et du rail en Suisse, Morges : Imprimerie
E. Maibach-Ramuz, 1928, 157 p. ; Schweiger Georges, Le chemin de fer et l’automobile
en Suisse, Genève : Librairie Prior, 1932, 191 p.
28
Gottlieb Duttweiler (1888-1962) bouscule le monde économique et politique
suisse. Il révolutionne le commerce de détail par de nouvelles formes de vente et de
gestion, devenant l’épouvantail des petits commerçants. Adversaire déclaré des grandes
associations économiques et des cartels, il entre en politique pour s’opposer à leur
action économique. Élu en 1935 au Conseil national, il fonde en 1936 son propre parti,
le Landesring der Unabhängigen. Jost Hans Ulrich, « Gottlieb Duttweiler : un itinéraire
politique », in Jost Hans Ulrich, À tire d’ailes, Lausanne : Antipodes, 2005, p. 357‑365.
29
Schumacher Beatrice, Ferien. Interpretationen und Popularisierung eines Bedürf­
nisses. Schweiz 1890‑1950, Vienne : Böhlau, 2002, p. 233‑282.
25
425
Cédric Humair, Mathieu Narindal
nouvelle conception des vacances, centrée sur la multiplication des
activités de loisir et l’accroissement de la mobilité des touristes. De fait,
la stratégie touristique d’Hotelplan, la coopérative créée pour mettre
en œuvre les idées de Duttweiler, consiste à améliorer et à coordonner
l’offre de transport, tout en la combinant avec une offre d’hébergement
et de divertissement.
L’abonnement général régional d’Hotelplan :
un exemple de coordination réussie
Hotelplan propose un système de vacances à forfait bon marché
comprenant trajet en train, hébergement, excursions et accès à des
activités de loisir. Il est prévu que les vacanciers voyagent ensemble
jusqu’à leur lieu de séjour de façon à bénéficier de rabais de groupe.
En revanche, les touristes ont la possibilité de descendre dans l’hôtel
de leur choix, pourvu qu’il figure au catalogue d’Hotelplan, et d’utiliser à leur guise les moyens de transport compris dans le forfait. La
réalisation du projet, qui intègre dans une offre unique l’hébergement et les différentes formes de mobilité touristique, requiert tant
la participation des hôteliers que celle des compagnies de transport.
Duttweiler s’emploie à obtenir des premiers, auxquels il offre des
garanties financières 30, qu’ils réduisent leurs tarifs en sa faveur. Alors
que les dirigeants de la SSH, issus de la grande hôtellerie, perçoivent
Hotelplan comme une menace, les petits et moyens hôtels sont plutôt
séduits. Parallèlement, Duttweiler demande aux entreprises de transport de s’associer à sa démarche en créant des abonnements généraux
à l’échelle régionale.
Au cours du mois de mai 1935, Hotelplan parvient à conclure un
premier accord avec plusieurs hôteliers et entreprises de transport du
Tessin. Début juin, les premiers clients font leur arrivée à Lugano 31. Le
forfait de base, qui coûte 65 francs, comprend un billet de troisième
classe aller-retour Zurich-Lugano, sept nuitées dans une pension ainsi
que l’abonnement général régional 32. Celui-ci permet d’emprunter
durant les jours ouvrables les bateaux à vapeur du lac de Lugano, les
chemins de fer locaux de Lugano-Tesserete, de Lugano-Dino et de
À l’origine, Duttweiler garantit aux propriétaires d’établissements de séjour sous
contrat avec Hotelplan un taux de fréquentation de 85 %.
31
Schumacher Beatrice, « “Genuss im Überfluss”. Entwürfe von ‘Massentourismus’ in
der Schweiz 1935 bis 1948 », Voyage. Jahrbuch für Reise- & Tourismusforschung, n° 1,
1997, p. 120‑133 (ici 122).
32
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 864 : [Hotelplan] Allgemeines (1935‑1938),
circulaire du 12 juin 1935 relative à l’arrangement Lugano.
30
426
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
Lugano-Ponte-Tresa, ainsi que les chemins de fer de montagne du
Monte Brè et du Monte San Salvatore ; il donne aussi accès à la plage
d’Agno. Pour 4,50 francs supplémentaires, le vacancier peut séjourner
dans un hôtel plus confortable, entrer au Kursaal ou au cinéma et
assister à des spectacles de variétés.
Prises de court par la décision des compagnies tessinoises, les
deuxième et troisième sections de l’UEST 33 décident de laisser à leurs
membres la liberté de proposer une telle offre dans d’autres régions et
d’en définir les modalités. Afin d’éviter que les différents pôles touristiques ne se livrent une concurrence dommageable, elles édictent
néanmoins une série de directives à respecter 34. Parmi celles-ci, il est
spécifié que le forfait ne doit en principe pas comprendre de déplacements en véhicule automobile. Si elle joue le jeu d’Hotelplan, l’UEST
fait donc en sorte de ne pas encourager la concurrence que la route
fait au rail et au bateau. La coordination voulue par Duttweiler n’est
acceptée que parce qu’elle sert l’association dans son combat contre
l’automobile.
Dès la mi-juin, Hotelplan offre également des séjours en Suisse
centrale. Le 4 juillet 1935, Duttweiler parvient à une entente avec la
SSH ; il s’engage à s’aligner sur les prix minima de l’association
lorsqu’il établit un contrat avec l’un de ses membres. Cet essor ébranle
l’industrie touristique ; il inquiète en particulier les grandes agences
de voyages étrangères, qui demandent des comptes à leurs partenaires
suisses. À l’occasion d’une réunion tenue le 12 juillet, sous l’égide de
la FST, leurs représentants se plaignent que l’action de Duttweiler a
torpillé leurs campagnes publicitaires et menacent de se détourner de
la Suisse 35. Les voyagistes peuvent alors constater que leur aversion
envers Hotelplan est partagée par leurs interlocuteurs. Aux yeux des
dirigeants de la SSH, le gentlemen’s agreement conclu avec Duttweiler
n’évitera pas un avilissement général des prix néfaste à l’hôtellerie.
« Duttweilers Aktion sollte nicht Hotel-Plan, sondern Hotel-Ruinplan
heissen », lance un de ses représentants. Quant au délégué de l’UEST,
L’UEST est divisée en trois sections : la première comprend les tramways, la
deuxième les chemins de fer à voie étroite et les funiculaires, et la troisième les chemins
de fer à voie normale ; l’association est dirigée par un « Conseil de l’Union », composé
d’un président, d’un vice-président et de représentants des trois sections. Bibliothèque
nationale suisse (BN), V Schweiz 3128, Verband schweizer. Transportanstalten
(dorénavant VST), 104e Conférence, 27 mai 1935, p. 18.
34
VST, 104e Conférence, 27 mai 1935, annexe n° 3.
35
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 855 : [Fremdenverkehr] Allgemeines (1933‑1938),
Protokoll der Besprechung der Vertreter der ausländischen Reisebüros mit den schweizerischen Verkehrsinteressenten vom 12. Juli 1935.
33
427
Cédric Humair, Mathieu Narindal
il laisse entendre que l’organisation n’a autorisé que de mauvais gré la
vente d’abonnements régionaux. De manière significative, le communiqué officiel de la réunion appelle l’ensemble des acteurs touristiques à
revoir leur collaboration avec Hotelplan 36.
Dans le courant de l’été 1935, l’offre de la coopérative s’élargit
encore à certaines localités de l’Oberland bernois et de l’Arc lémanique ;
en tout, 52 648 forfaits sont vendus, qui représentent 3,1 % du total
annuel des nuitées passées en Suisse 37. Quoique la SSH dénigre l’opération, la qualifiant de « fiasco » 38, elle est contrainte d’adapter sa politique
cartellaire en permettant un rabais de 10 % sur ses prix minima 39. En
décembre 1935, c’est au tour de l’UEST de dresser le bilan du premier
exercice d’Hotelplan. Selon Jakob Ammann, président de la commission des tarifs, celui-ci est plutôt positif :
« Alles in Betracht gezogen, darf festgestellt werden, dass der mit
dem Hotelplan gemachte Versuch für die an den regionalen General­
abonnementen beteiligten Verwaltungen keinen Verlust, sondern eine
Mehreinnahme gebracht hat. » 40
Ce constat pousse l’UEST à accepter la reconduction de l’offre. En
janvier 1936, après avoir pris soin de consulter les voyagistes, l’association fixe, de concert avec l’AESN, l’UFS, les CFF et la Rhätische
Bahn, les nouvelles consignes à respecter lors de l’élaboration des
abonnements régionaux 41. L’UEST maintient les mesures protégeant
les lignes de chemins de fer et de navigation à vapeur de la concurrence des véhicules automobiles – en particulier de celle des cars
postaux. En 1936, les pôles touristiques de Lugano, de Locarno, du lac
des Quatre-Cantons, du Nord-Est de la Suisse, de l’Oberland bernois
et de la Riviera lémanique proposent des abonnements généraux
­régionaux 42.
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 855…, Resolution (s.d.).
Schumacher Beatrice, « “Genuss im Überfluss”…», p. 128.
38
BN, V Schweiz 1521, Schweizer Hotelier-Verein, Vierundfünfzigster Geschäftsbe­
richt (1935), Bâle : Hans Boehm, 1936, p. 11.
39
« L’Assemblée extraordinaire des délégués du 19 septembre 1935 à Berne », Revue
suisse des hôtels, 26 septembre 1935.
40
VST, 105e Conférence, 19 décembre 1935, p. 26.
41
VST, 105e Conférence, annexe n° 2.
42
VST, 105e Conférence, 16 avril 1936, p. 33.
36
37
428
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
Efforts de coordination et freins concurrentiels :
le « Passepartout » de Gottlieb Duttweiler
L’apparition d’Hotelplan conduit les acteurs traditionnels du tourisme
helvétique à considérer avec une attention accrue la possibilité d’intensifier le trafic touristique en coordonnant plus efficacement l’offre de
transport et d’hébergement. Dès la saison d’hiver 1935‑1936, l’ONST
propose ainsi sa propre gamme de vacances à forfait. Quelque 400
établissements affiliés à la SSH prennent part à cette action 43, qui
est considérée comme un succès par l’ANDT 44. Par ailleurs, l’ONST
souhaite intéresser les touristes automobiles à ses offres combinées
en instaurant un système de bons pour des repas d’hôtels 45. Hotelplan
conserve toutefois l’initiative en développant un nouveau projet très
ambitieux de coordination de la mobilité.
Au printemps 1936, Gottlieb Duttweiler suggère à l’UEST la
création d’un titre de transport permettant d’utiliser du lundi au samedi
l’ensemble des lignes de bateaux à vapeur et de chemins de fer secondaires de Suisse – voies étroites, crémaillères, funiculaires –, à l’exception de certains tronçons particulièrement coûteux 46. Le prix de ce
« Passepartout », destiné à constituer un argument publicitaire choc,
serait très modique (7 francs pour les touristes étrangers et 10 à 12 francs
pour les habitants du pays) ; seuls les touristes séjournant au moins une
semaine en Suisse y auraient droit. Duttweiler se dit prêt à couvrir les
pertes éventuelles des compagnies de transport jusqu’à hauteur d’un
million de francs, à condition que les autres acteurs du système touristique s’associent à l’action. Il exige ainsi des hôteliers qu’ils appliquent
leurs prix minima aux touristes munis de l’abonnement ; les compagnies exploitant les lignes d’accès – CFF, Berne-Loetschberg-Simplon
(BLS), Rhätische Bahn, Montreux-Oberland Bernois, etc. – devraient
leur consentir un rabais.
« Auszug aus dem Protokoll der Verhandlungen des Zentralvorstandes S.H.V.
vom 12./13. November 1935, im Hotel Metropol, Bern », Revue suisse des hôtels,
21 novembre 1935.
44
Schweizerisches Wirtschaftsarchiv (SWA), Bv L IX 1, Schweiz. Verkehrszentrale.
Jahresberichte – 1939 : Nationale Vereinigung zur Förderung des Reiseverkehrs,
Achtzehnter Jahresbericht für den Zeitraum vom 1. Januar bis 31. Dezember 1935, p. 9.
45
« L’Assemblée extraordinaire des délégués du 19 septembre 1935 à Berne », Revue
suisse des hôtels, 26 septembre 1935.
46
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 869 : Passepartout-Projekt Duttweiler (1936), lettre
de la Coopérative Hotelplan à l’UEST du 4 mars 1936.
43
429
Cédric Humair, Mathieu Narindal
Le 6 mars 1936, la commission tarifaire de l’UEST se penche sur le
projet de Duttweiler 47. L’impact publicitaire qu’aurait le Passepartout
est reconnu. Cependant, selon les experts, son introduction ne saurait
faire gonfler le flux de touristes étrangers. Quant au prix projeté, il est
considéré comme insuffisant. La décision de dire non à l’abonnement
général repose toutefois sur d’autres considérations. L’UEST estime
en effet que la nouvelle offre favoriserait la route aux dépens du rail :
désireux de profiter le plus possible du Passepartout, un voyageur
­préférerait l’automobile, gage de rapidité et de flexibilité, aux chemins
de fer de plaine pour gagner les lignes de montagne. Afin de légitimer
son veto à l’encouragement du tourisme automobile, la commission
invoque l’intérêt général :
« Verbilligtes Benzin, verbilligte Hotelpreise, Gratisbenutzung der
mit ungezählten Millionen […] ausgebauten Strassen und nun dazu
noch Bergbahnfahrpreise, die kaum die Mitläuferkosten decken ! Das
ist gewiss verlockend für den ausländischen Automobilisten. Aber was
fällt dann noch für die schweizerische Volkswirtschaft ab ? » 48
La SSH réagit elle aussi de manière mitigée au projet de Passe­partout.
« Grundsätzlich kann Ihr Projekt von uns nur begrüsst werden », écrit
à Duttweiler le directeur de l’association. Marquant sa solidarité avec
l’UEST, la SSH affiche toutefois son opposition au barème de prix :
« Mit den Transportanstalten sind wir indessen der Ansicht, dass unsere
Bahn- und Schiffahrtsunternehmungen keine Ausverkaufspolitik treiben
können. » 49 À sa publication dans la Revue suisse des hôtels, cette prise
de position est précédée d’un billet critiquant l’attitude individualiste de
Duttweiler et le manque de précision de son projet.
L’opposition à son abonnement général ne décourage pas Gottlieb
Duttweiler, qui obtient de le défendre au sein de l’UEST 50. À cette
occasion, le nouveau titre de transport est rejeté par trente-huit voix
et une abstention ; il est cependant décidé de nommer une commission
chargée d’étudier la réalisation d’un tel abonnement. Mettant à profit
ce sursis, Gottlieb Duttweiler apporte plusieurs modifications à son
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 869…, lettre de l’UEST à la Coopérative Hotelplan
du 13 mars 1936.
48
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 869…, lettre de l’UEST à la Coopérative Hotelplan
du 13 mars 1936.
49
« Zum neuen Vorschlag Duttweiler », Revue suisse des hôtels, 19 mars 1936. C’est
sous ce titre qu’est reproduite la lettre, datée du 13 mars, envoyée par Max Riesen,
directeur du Bureau central de la SSH, à Gottlieb Duttweiler.
50
VST, 105e Conférence, 20 mars 1936, p. 31‑33.
47
430
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
projet durant l’été 1936. En guise de concession, l’homme d’affaires
zurichois élève le prix d’achat du forfait ; il prévoit également une participation financière de l’État. Afin de valoriser certaines régions et de
protéger les réseaux de plaine, Duttweiler intègre de nouvelles lignes
touristiques – y compris certains parcours d’autobus postaux – ainsi que
des tronçons desservis par les CFF et le BLS. Le Passepartout révisé
n’en est pas moins mal accueilli par l’UEST. D’après Jakob Ammann,
il est encore bien trop profitable aux automobilistes. Le président de la
commission des tarifs suggère trois corrections susceptibles de rendre
l’abonnement acceptable : porter le prix à 30 francs pour les indigènes
et à 20 pour les étrangers, accroître la contribution financière de la
Confédération et obliger tout acheteur d’un Passepartout à conclure un
abonnement demi-tarif sur les lignes non touristiques 51. Tout en limitant
les risques financiers des compagnies de transport, les propositions
d’Ammann feraient payer aux automobilistes des prestations dont ils
n’ont nullement besoin. Autrement dit, la route financerait le rail. Ce
contre-projet n’est toutefois pas retenu par la commission d’études de
l’UEST qui, dans son rapport du 11 décembre 1936, conclut à un refus
du Passepartout 52. La dévaluation du franc suisse du 26 septembre 1936,
qui a fait naître l’espoir d’une relance du tourisme suisse, conforte
cette attitude de fermeture dictée par des considérations financières et
­concurrentielles.
Le 17 décembre 1936, alors que le Conseil national débat du déblocage de 30 millions de francs pour lutter contre le chômage, Gottlieb
Duttweiler tente une dernière démarche. Fraîchement élu au sein
de l’institution parlementaire, le promoteur touristique propose un
amendement autorisant la Confédération à se servir de cette somme
pour encourager la mobilité 53. Le Zurichois espère bien sûr que l’État
finance en partie le Passepartout, dont il explique les tenants et aboutissants à ses pairs. Le conseiller fédéral Hermann Obrecht refuse toutefois de soutenir un projet que les principaux acteurs du tourisme ne
défendent pas. Ses arguments font mouche : malgré les récriminations
de Duttweiler, l’amendement est repoussé. Le 23 décembre 1936,
suivant les recommandations de sa commission d’études, l’UEST refuse
VST, 106e Conférence, 10 septembre 1936, p. 25‑29.
AFS, E7170A 1000/1069, dossier 869…, Vorschlag des Herrn Nationalrat Duttweiler
auf Schaffung eines schweizerischen Passepartout für Bergbahnen und Schiffe. Exposé
der von den Transportunternehmungen eingesetzten Kommission zur Prüfung dieses
Vorschlages, 11 décembre 1936.
53
Bulletin sténographique de l’Assemblée fédérale, Conseil national, 1936,
p. 1456‑1460.
51
52
431
Cédric Humair, Mathieu Narindal
à son tour ­l’introduction du Passepartout 54. La SSH, dont la direction
est toujours aussi hostile au fondateur d’Hotelplan, est loin de déplorer
cette décision. En janvier 1937, un article de la Revue suisse des hôtels,
qui revient sur le projet d’abonnement, en fait le procès 55.
Motivés par des considérations concurrentielles, les acteurs établis
du réseau de coopération parviennent donc cette fois à entraver la
dynamique de coordination de la mobilité touristique impulsée par
Duttweiler. Suite à cet échec, la coopérative Hotelplan rentre dans le
rang. Elle entame un processus d’intégration au sein du système touristique en place et devient rapidement une agence de voyages comme
une autre 56.
Encourager la mobilité touristique :
succès et limites du réseau de coopération suisse
Le fait que le succès d’une destination touristique tienne pour une
grande part à l’existence d’une offre de mobilité attractive a donc
poussé les différents acteurs suisses du transport et de l’hébergement à
collaborer, en dépit d’intérêts parfois contradictoires. À partir de 1880,
des acteurs collectifs prennent en charge les efforts d’amélioration
de l’offre de transport et son adaptation aux besoins du tourisme. La
mobilité touristique entre ainsi dans l’ère du capitalisme organisé 57 :
un véritable réseau de coopération, reliant les associations, les régies
fédérales et le champ étatique, est progressivement établi.
Dans un premier temps, les résultats obtenus sont modestes. Cependant, sous l’effet de la crise de l’entre-deux-guerres, l’organisation
des milieux touristiques se renforce et les relations entre les acteurs
du réseau s’intensifient. Grâce à l’intervention toujours plus massive
de la Confédération, l’offre de transport est améliorée en termes de
coût, d’efficacité et de qualité. Dans ce contexte, la dynamique visant
à coordonner les différents types de mobilité et à intégrer les offres
de transport et d’hébergement reçoit une forte impulsion et débouche
sur quelques résultats notables, parmi lesquels la mise en place
d’abonnements généraux régionaux. Toutefois, en l’absence d’une
­
VST, 107e Conférence, 23 décembre 1936, p. 24‑29.
Dr. E. S., « Der “Passepartout” des Herrn Duttweiler », Revue suisse des hôtels,
7 janvier 1937.
56
Schumacher Beatrice, Ferien…, p. 280‑282.
57
Sur le concept de capitalisme organisé, Winkler Heinrich (éd.), Organisierter
Kapitalismus. Voraussetzungen und Anfänge, Göttingen : Vandenhoeck und Ruprecht,
1974.
54
55
432
L’encouragement de la mobilité touristique durant l’entre‑deux‑guerres
direction autoritaire du champ touristique par l’État – en cela la Suisse
se distingue de certains pays voisins concurrents (Allemagne, Italie,
Autriche) –, la coordination de la mobilité se révèle difficile à gérer.
D’une part, la volonté des acteurs à coopérer se heurte à des limites
liées aux tensions concurrentielles qui les opposent. D’autre part, les
associations établies du tourisme suisse tardent à prendre en compte la
nécessité d’adapter les conditions de mobilité au phénomène de massification du tourisme qui caractérise l’entre-deux-guerres. Porteuse d’une
vision commerciale innovante, la coopérative Hotelplan en fait les frais.
L’échec du Passepartout, projet séduisant d’offre multimodale qui aurait
constitué un atout de promotion susceptible de relancer le tourisme
helvétique à l’étranger, symbolise les limites du système de coopération
suisse en matière de mobilité touristique.
433
Résistances à l’utilisation des transports
Discours et actions des milieux protestants en Suisse
romande de la fin du xixe siècle aux années 1960
Valérie Lathion, Université de Genève
Abstract : This paper considers Swiss Protestant circles which, concerned about
rest and the sanctification of the Sunday, resisted the democratisation of transport. It examines their 19th century anti-leisure trains discourse and the case of
the Yverdon-Sainte-Croix railway that suspended all trains on Sundays until 1919.
Their condemnations were echoed during the 1950s and ’60s through the fear
caused by the Sunday exodus brought on by the spread of cars.
Alors que la question de la coordination des transports suppose une
acceptation tacite du concept de la mobilité, il n’est pas inopportun
d’étudier les discours et les réalisations de ceux qui contestent en partie
le principe de la mobilité pour tous et dans toutes les situations, et
qui récusent certaines conséquences de différentes manifestations de
la démocratisation des transports. Celle-ci n’a en effet pas manqué de
susciter des réticences chez ceux qui ont porté un regard critique sur
leur utilisation massive et sans limites. Ces résistances se rencontrent
notamment dans les milieux protestants soucieux de philanthropie.
Nous désirons dans un premier temps mettre en lumière en Suisse la
pratique des trains de plaisir et billets à prix réduit à la fin du xixe siècle
comme exemple d’une première démocratisation des transports, ainsi
que nous interroger sur l’argumentation de ceux qui la condamnent,
sachant qu’ils se sont autant adressés aux compagnies ferroviaires
pour dénoncer les conséquences de leurs pratiques commerciales sur la
435
Valérie Lathion
c­ lientèle et le sort des employés qu’aux autorités et surtout aux usagers
afin de les sensibiliser, préfigurant ainsi les mouvements de responsabilisation des consommateurs. Nous examinerons ensuite l’aventure particulière de la ligne ferroviaire Yverdon-Sainte-Croix entre 1853 et 1919
dont le fondateur imposa l’arrêt des trains le dimanche pour des motifs
religieux, moraux et philanthropiques. Enfin, nous tenterons d’établir
un parallèle avec les interrogations suscitées par la démocratisation de
la voiture au début de la seconde moitié du xxe siècle. Nous espérons
ainsi pouvoir contribuer à analyser une facette de l’impact social de
l’évolution des transports, quelques changements induits par l’accès
généralisé à la mobilité et les résistances que sa démocratisation et son
succès ont provoquées.
Trains de plaisir et billets à prix réduit
À la fin du xixe siècle, la démocratisation des transports se manifeste
notamment à travers les trains de plaisir et les billets à prix réduit qui
attirent les foules le dimanche en Suisse, comme ailleurs en Europe,
mais qui provoquent aussi l’ire des chrétiens qui tentent de protéger
le jour du Seigneur comme jour de repos pour tous les employés. Par
trains de plaisir, nous entendons alors les trains spéciaux transportant
le dimanche et les jours de fête les usagers vers des lieux typiques
d’excursions et de villégiature, ou vers de grandes fêtes publiques 1.
Les excursions dominicales sont aussi favorisées par les billets à prix
réduit, introduits par les compagnies ferroviaires afin d’augmenter le
trafic des voyageurs. Durant la dernière décennie du siècle, les compagnies suisses se livrent une guerre sans merci et certaines d’entre elles,
comme la compagnie Jura-Simplon, proposent des remises jusqu’à
50 % pour un billet valable uniquement le dimanche.
C’est parmi les milieux protestants de la tendance évangélique que se
manifestent de vives critiques contre ces pratiques qui témoignent autant
de stratégies commerciales de la part des compagnies concurrentes,
que d’une volonté de faire partager au plus grand nombre les joies des
excursions dominicales hors de portée pédestre. Ces critiques s’insèrent
dans l’action menée en Suisse et à l’étranger par un réseau associatif
en faveur du repos et de l’observation du dimanche qui a été fondé
en 1861 à Genève avec la Société pour la sanctification du dimanche.
Sur la pratique populaire des trains de plaisir, cf. Tissot Laurent, Naissance d’une
industrie touristique. Les Anglais et la Suisse au xixe siècle, Lausanne : Payot, 2000,
p. 198.
1
436
Résistances à l’utilisation des transports
Cette association, dont les racines proviennent des foisonnants milieux
protestants du Réveil, a poursuivi son action au niveau international avec
la Fédération internationale pour l’observation du dimanche créée aussi
à Genève en 1876 2. Ce mouvement associatif a, dès ses origines, mené
une action que l’on peut qualifier aujourd’hui de lobbyiste pour arriver à
ses fins, c’est-à-dire à réglementer le repos dominical afin que tous aient
la possibilité de se reposer et de sanctifier le jour du Seigneur. Voulant
ainsi réglementer le trafic des marchandises et celui des voyageurs, il a
fait pression sur la Confédération afin de garantir, dès 1872, à tous les
fonctionnaires et employés travaillant dans les chemins de fer et autres
entreprises de transport exploitées ou concédées par la Confédération
(bateaux à vapeur, postes, etc.) au moins un dimanche libre sur trois.
Le but premier de cette association étant religieux, son idéal est
que le dimanche soit consacré au Seigneur, et de ce fait que tout transport non urgent soit évité ce jour-ci. Dans un de ses tracts réimprimé
année après année où elle présente ses objectifs, les abus à combattre et
édicte des conseils, elle s’élève contre « les excursions lointaines et les
voyages du Dimanche que la conscience n’autorise pas à ranger dans
les cas de charité et d’urgente nécessité » 3.
Malgré cet idéal, elle s’est d’abord concentrée sur le transport des
marchandises qu’elle a réussi à limiter, puis a pris le parti d’adopter une
vision pragmatique centrée sur le droit au repos des employés en préconisant un système de tournus entre eux. Cette action pragmatique qui a
porté ses fruits ne l’a cependant pas empêchée d’avoir un discours virulent
sur l’usage des transports et sur leurs utilisateurs, comme en témoignent
ses critiques contre la démocratisation des transports par le biais des
trains de plaisir et des billets à prix réduit 4. Cependant, que ce soit par la
Sur ce mouvement associatif, voir Lathion Valérie, Un dimanche pour Dieu ou pour
l’homme ? Une croisade philanthropique et religieuse pour la défense du dimanche
chrétien. Modèles et pratiques aux xixe et début du xxe siècles, thèse de doctorat,
Genève : Université de Genève (L. 642), 2007. Cette contribution repose d’ailleurs sur
les recherches entreprises pour ma thèse de doctorat. Sur le thème du dimanche et du
repos hebdomadaire dans une perspective française et européenne, cf. Beck Robert,
Histoire du dimanche. De 1700 à nos jours, Paris : Éditions de l’Atelier (Les Éditions
Ouvrières), 1997, ainsi que Beck Robert et Brejon de Lavergnée Matthieu (dir.),
« Combats autour du repos hebdomadaire (xixe-xxe siècle) », dossier spécial d’Histoire,
Économie & Société, n° 3, 2009, p. 1‑122.
3
Fédération pour l’observation du dimanche (ci-après FIPOD), Abus à combattre
– Conseils pratiques, [Genève] : [FIPOD], [dès 1876], p. 1.
4
Bibliothèque de Genève (ci-après BGE), Département des manuscrits (ci-après
Dpt man.), fonds Alexandre Lombard (ci-après fonds AL), en particulier les cartons 23,
26 et 28.
2
437
Valérie Lathion
r­econnaissance de l’emploi d’un transport le dimanche dans certains cas
ou par l’adoption d’un mode d’action pragmatique, ce réseau associatif ne
compte pas parmi ses rangs les plus extrémistes sur ces questions, ceux
qui refusent tout transport le jour du Seigneur même s’il n’implique pas
le travail d’autrui. Les membres du mouvement dominical furent ainsi
contraints d’entrer en polémique avec les sabbatistes qui s’appuyaient
sur une interprétation littérale du Décalogue et refusaient toute liberté
néotestamentaire, afin de se démarquer de cette position jugée extrémiste 5. En revanche, ils admiraient l’Écosse qui prohibait complètement
les transports publics le dimanche et apparaissait ainsi comme un éden
perdu, mais aussi comme un idéal inaccessible, un modèle que l’on doit
se résoudre à ne pas pouvoir copier en raison de la différence de ce que
l’on appelle alors les « mœurs » de l’opinion publique.
Dans le discours proposé par les milieux évangéliques, la condamnation de l’usage des transports publics le jour du Seigneur est avant tout
religieuse et morale. Les excursions en train ne devraient pas avoir lieu
le dimanche puisque ce dernier doit être consacré à la religion et passé
en famille, en des lieux où l’on peut se rendre à pied. Il existe ainsi
une riche littérature édifiante proposant des modèles d’emploi du temps
du « bon dimanche chrétien » 6 dont le déroulement s’ordonne autour
d’activités religieuses, familiales et philanthropiques, et dont l’aprèsmidi est consacré à une promenade à pied 7. A contrario, les trains de
plaisir et autres trains supplémentaires sont présentés comme des aiguillons au « goût déjà exagéré des fêtes et des déplacements superflus du
dimanche », comme « un mauvais exemple donné et une atteinte aux
bonnes mœurs de notre peuple » 8.
Cette pratique produirait la démoralisation du peuple en favorisant de nombreux vices, sachant que les fêtes publiques de tout genre,
y compris les fêtes fédérales des différentes sociétés et associations,
tombent également sous le coup de l’anathème 9.
Sur la position des sabbatistes, cf. Lathion Valérie, Un dimanche pour Dieu ou pour
l’homme ?…, p. 333‑342.
6
Terme communément employé dans les écrits du réseau de la Société pour
l’observation du dimanche (ci-après SPOD).
7
Cf. par exemple, [Lemaître Susanne], Le dimanche de la famille. Aux enfants et aux
parents, Genève : Société genevoise pour la sanctification du dimanche et Bonnant,
1872.
8
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 26, lettre du comité central de la Société suisse
pour l’observation du dimanche aux membres du conseil d’administration du chemin de
fer à voie étroite Landquart – Davos du 29 août 1893.
9
BGE, Dpt man., fonds AL, cartons 7, 8 et 9.
5
438
Résistances à l’utilisation des transports
Parallèlement à ce discours, le cynisme des compagnies de transports
qui proposent à des fins commerciales des billets à prix réduit au mépris
des valeurs chrétiennes est aussi dénoncé 10, alors même que certains
membres du réseau dominical ou leurs familles ont personnellement
des intérêts financiers dans ces compagnies, comme son fondateur, le
banquier Alexandre Lombard (1810‑1887). Une activité de lobbying est
menée autant auprès des compagnies qu’auprès des autorités fédérales
afin de tenter de faire interdire ces pratiques. Alors que ce lobbying avait
fonctionné pour obtenir la garantie d’un repos hebdomadaire pour les
employés, les pressions exercées semblent n’avoir guère été entendues
tant que les compagnies furent indépendantes. C’est avec l’étatisation
des compagnies que la direction des tout jeunes Chemins de fer fédéraux
décide en 1902 de ne plus autoriser l’organisation de trains de plaisir à
taxe réduite, ainsi que les billets du dimanche à prix réduit.
À côté des arguments moralistes, d’autres sont aussi utilisés,
mettant en exergue les mauvaises conditions de travail subies par les
employés surchargés – en particulier lorsque la surcharge est due au
succès des billets à prix réduit et des trains spéciaux – et dénaturant
la loi sur le repos hebdomadaire, ainsi que le risque élevé, dans ces
circonstances, d’accidents. L’accent est ainsi mis sur la sensibilisation – voire plutôt la culpabilisation – des usagers envers le personnel
et les risques ­d’accident. De nombreux articles de journaux dénoncent
en parallèle l’esclavage des employés de chemins de fer et l’abus de
plaisir de ceux qui bénéficient de leur repos dominical. La sécurité des
voyageurs est ainsi mise en cause par la fatigue des travailleurs, si bien
que les premiers sont présentés comme les véritables responsables des
accidents. La condamnation prend là aussi des accents moralistes :
« Le peuple est malade de la contagion du tumulte et des fêtes, et des
deux côtés ce ne sera que l’augmentation de catastrophes épouvan­
tables qui amènera à l’expérience et à la raison. » 11
Les accidents de chemin de fer sont ainsi perçus et présentés comme
des punitions divines. Parmi les plus spectaculaires, certains ont justement eu lieu le dimanche, tel l’accident du pont de Münchenstein
Cf. par exemple, l’Ami du foyer, 13 octobre 1893.
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 28, traduction faite par la SPOD d’un article de
l’Allgemeine Schweizer Zeitung du dimanche 23 août 1891. Cet article fait suite à
un accident ayant eu lieu en août 1891 à Zollikofen (près de Berne), deux mois après
la catastrophe de Münschenstein qui émut fortement la population suisse. L’accident de
Zollikofen se produisit certes un lundi, mais fut dû à un train spécial affrété pour la fête
de Berne.
10
11
439
Valérie Lathion
(près de Bâle) qui se produisit le dimanche 14 juin 1891 et qui émut
fortement l’opinion publique. Ce pont, construit par Gustave Eiffel, se
rompit lors du passage d’un train bondé en raison d’une fête de chant,
causant 73 morts et 171 blessés 12.
En fin de compte, la sensibilisation des usagers a dépassé le discours
purement moraliste puisqu’elle préfigure les mouvements de responsabilisation des consommateurs dont les premiers, telles les ligues sociales
d’acheteurs, agissent dans le sillage des actions menées par ceux qui
protègent le dimanche 13.
L’ensemble de ce réquisitoire contre l’emploi des transports le
dimanche s’accompagne finalement d’un désaveu du principe même
de la mobilité pour tous durant les jours de repos légal. La vogue des
excursions est présentée par ses détracteurs comme une fuite effrénée
des individus qui préféreraient s’étourdir loin de chez eux plutôt que
de profiter de leur repos hebdomadaire pour se ressourcer spirituellement dans leur propre famille et communauté 14. De nombreuses voix
s’élèvent cependant pour justifier le droit de chaque famille de se
promener le dimanche même en empruntant des transports publics, et
pour se réjouir de la démocratisation des voyages, du reste possible
seulement le dimanche, seul jour de repos pour la majorité de la population. Le conseil d’administration du Journal de Genève, par exemple,
refuse en 1890 d’insérer dans ses colonnes la lettre de protestation
de la Société suisse pour l’observation du dimanche à la Compagnie
du Jura-Simplon à propos des billets dominicaux à demi-prix pour ne
pas s’associer à une démarche tendant à supprimer, « pour une partie
notable de la population qui goûte ce jour-là l’innocent plaisir d’une
promenade en famille », les facilités qu’une compagnie ferroviaire
consent à lui accorder 15.
Les pourfendeurs des excursions dominicales en transports publics
restent d’ailleurs prisonniers d’une conception élitiste des voyages
puisqu’ils se gardent bien de réclamer l’abolition totale des billets à
prix réduit, mais demandent simplement aux compagnies que les billets
Cf. notamment la brochure publiée directement après l’accident : Catastrophe de
chemins de fer de Mönchenstein [sic] près de Bâle. Dimanche, le 14 juin 1891, Bâle :
Thiele, [1891].
13
Chessel Marie-Emmanuelle, « Aux origines de la consommation engagée : la Ligue
sociale d’acheteurs (1902-1914) », Vingtième siècle. Revue d’histoire, n° 77, janviermars 2003, p. 95‑108.
14
BGE, Dpt man., fonds AL, cartons 7, 8 et 9.
15
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 28, lettre de Marc Debut (direction du Journal de
Genève) à la SPOD du 18 juin 1890.
12
440
Résistances à l’utilisation des transports
soient valables du samedi au lundi suivant, ce qui les rend inaccessibles aux employés n’ayant qu’un seul jour de repos hebdomadaire,
et sert toujours, par ailleurs, les intérêts des compagnies. Leur réprobation envers l’utilisation des transports publics le dimanche par tout
un chacun est souvent émaillée, à demi-mot, d’un jugement négatif
sur le goût pour les excursions de plaisance du peuple qui devrait se
contenter des voyages utilitaires et indispensables. En d’autres mots, si
une personne n’a pas d’autre loisir que le dimanche, et qu’en plus son
revenu est modeste, alors elle devrait, selon eux, se résoudre à ne pas
entreprendre, en train ou en bateau, des excursions lointaines souvent
onéreuses malgré les prix réduit.
Chemin de fer Yverdon-Sainte-Croix
L’idéal d’une suspension des transports en chemin de fer le
dimanche qui sous-tend le discours des milieux protestants se réalise
en Suisse romande par le biais de la ligne Yverdon-Sainte-Croix, deux
localités du Nord vaudois. En novembre 1893, cette ligne de chemin
de fer longue de vingt-quatre kilomètres est inaugurée dans la liesse 16.
Elle a été entièrement financée – et donc offerte aux communes et à la
population – par le riche philanthrope William Barbey sous la condition
expresse que l’exploitation soit entièrement suspendue le dimanche.
Ingénieur et botaniste, William Barbey (1842‑1914) mena une vaste
activité philanthropique de nature évangélique, notamment contre
l’alcoolisme, et occupa un siège libéral au Grand Conseil vaudois où
il s’opposa à toute intervention de l’État, proposa la suppression des
élections le dimanche et tenta de faire interdire le trafic automobile ce
même jour 17. On pourrait donc croire que cette entreprise offre entière
satisfaction à ceux qui résistent à l’utilisation dominicale des transports,
mais en vérité, la situation est plus complexe.
Au xixe siècle, c’est vers l’Écosse qui prohibe le trafic public
le dimanche que se tournent les regards admiratifs de ceux qui se
soucient de repos dominical. Mais les défenseurs du dimanche chrétien
sur le continent savent que ce modèle est utopique en Suisse et que
sa recherche, même partielle, donnerait une image excessivement
Le Nouvelliste vaudois, 18 novembre 1893, 20 novembre 1893 et 21 novembre 1893.
Cf. aussi Gazette de Lausanne et journal suisse, 18 novembre 1893.
17
Pour une brève biographie de William Barbey, cf. Tissot Laurent, « Barbey,
William », in Dictionnaire historique de la Suisse, article publié en ligne en 2004, URL :
http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F28777.php. Cf. aussi « William Barbey », Gazette
de Lausanne et journal suisse, 19 novembre 1914, p. 1.
16
441
Valérie Lathion
réactionnaire à leur action. L’entreprise de la ligne Yverdon-SainteCroix est donc celle d’un homme seul, croyant fermement en son projet
et dont la fortune lui permet de réaliser son idéal. Il est d’autant plus
seul qu’il détient la quasi-totalité des actions, ayant subi la méfiance des
milieux financiers, même celle de certaines banques genevoises protestantes intimement liées aux défenseurs dominicaux. En effet, « tous les
banquiers genevois ont refusé de recevoir des souscriptions à Y.S.C en
tête Lombard Odier et Cie !!! » 18
Barbey se plaint aussi que la bourse de Genève l’a « boycotté » 19.
Finalement, les domiciles de souscription sont sis dans plusieurs
localités suisses (dont, quand même, Genève via la Banque fédérale
et deux banques privées 20), ainsi qu’à Paris, New York et au Havre 21.
L’émission des actions ne semble pas avoir rencontré un vif succès.
Les milieux bancaires et les investisseurs n’ont donc pas suivi
Barbey, même par idéal, dans une entreprise dont les gains financiers
n’étaient pas la priorité puisque la principale manne des chemins de
fer provient, à cette époque, du produit des billets vendus le dimanche.
De « modestes dividendes » ont pu toutefois être versés, mais après de
« longues années » 22. Si, en revanche, les communes concernées ont
approuvé le projet et si la Confédération lui a concédé la ligne en transformant sa condition en une clause d’une durée de vingt-cinq ans, c’est
avant tout en raison de l’absence de subventions publiques demandées
par Barbey.
En dehors des communes concernées, les critiques sont toutefois vives, même parmi certains milieux religieux, tels ceux qui
défendent une conception plus libérale de la manière de passer le
jour du Seigneur 23. Cette querelle théologique risquant de ranimer
des controverses stériles entre tendances protestantes rivales reste
cependant confinée dans des milieux étroits. Quant à la Société pour
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, lettre de William Barbey à [Élie Deluz,
secrétaire des comités genevois, suisse et international de la Société/Fédération pour
l’observation du dimanche] du 27 mars 1891. Rappelons que le fondateur du réseau
associatif dominical est le banquier Alexandre Lombard, mort quatre ans plus tôt. Deux
de ses fils et l’un de ses neveux font aussi partie des différentes associations du réseau.
19
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, lettre de William Barbey à [Élie Deluz] du
30 mars 1891.
20
Ed. Fatio & Cie et Ch. Galland & Cie.
21
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, prospectus d’émissions d’actions de la ligne
Yverdon-Sainte-Croix.
22
« William Barbey », Patrie suisse, n° 553, 1914, p. 264.
23
Comme exemple de ce point de vue, cf. Astié Jean-Frédéric, « Questions morales.
Chemin de fer vaudois Yverdon-Sainte-Croix », Évangile et Liberté, 2 janvier 1891.
18
442
Résistances à l’utilisation des transports
l­’observation du dimanche, dont Barbey attendait a priori le soutien
inconditionnel, elle encourage dans un premier temps ce projet 24, puis
émet des réserves sur ses conséquences réelles en matière de transports
et de leur coordination, ainsi que leurs répercussions sur les employés,
tout en souhaitant la réussite de l’entreprise 25. En effet, plutôt que de
la suppression totale du trafic ferroviaire le dimanche, les membres du
comité sont plutôt partisans d’une réduction considérable du trafic des
voyageurs afin d’éviter que se mette en place tout un service spécial de
transports, notamment pour la poste et pour les « cas pressants ou de
charité » 26, au détriment du personnel. Un service de fourgon est d’ailleurs mis en place matin et soir. L’intérêt des employés est donc au
cœur du débat puisque William Barbey a toujours motivé la clause de
suspension dominicale au nom du repos et du bien-être des travailleurs
afin qu’il n’y ait plus d’« esclaves chez nous », en plus de considérations morales et religieuses pour la « sauvegarde de la population » 27.
Son fils Camille, qui exploite la ligne après la défection de la Compagnie Jura-Simplon qui s’en est occupée durant trois ans (1893‑1896),
se plaint du reste de ce manque de soutien et maintient que le trafic
le dimanche n’aurait guère rapporté d’argent en raison des coûts du
personnel remplaçant 28.
Au début des années 1890, réduire l’accès aux transports,
contraindre la mobilité des usagers, résister à l’utilisation massive
des transports semble, en dépit des polémiques, plausible même si
la motivation première est idéologique (religieuse et morale). Vingtcinq ans plus tard, au moment du renouvellement de la clause, celle-ci
apparaît pour beaucoup comme une persistance d’une époque révolue,
celle de l’avant-guerre, associée à un homme désormais mort. Bien
que d’un point de vue purement financier l’entreprise n’ait pas été
compromise par la privation de la manne financière des excursions
dominicales, l’expérience n’a pas suscité des émules et est désormais
remise en question. L’exclusion forcée des trains de cette compagnie
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, lettre du comité central de la SPOD à
William Barbey du 6 novembre 1890.
25
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, lettre du comité central de la SPOD
à William Barbey du 5 janvier 1891.
26
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 25, lettre du comité central de la SPOD à
William Barbey du 5 janvier 1891.
27
« Inauguration de l’Yverdon-Ste-Croix », Gazette de Lausanne et journal suisse,
18 novembre 1893, p. 1.
28
BGE, Dpt man., fonds AL, carton 56, lettre de Camille Barbey, ingénieur, à
Émile Deluz, secrétaire de la FIPOD, du 14 juillet 1896.
24
443
Valérie Lathion
pour une partie de la population n’est plus tolérée, même par la presse
religieuse qui évoque « ce gênant mode de vie » 29. En un quart de
siècle, le débat a aussi évolué parmi les partisans de la sanctification du
dimanche qui ne contestent plus systématiquement le désir de passer
son jour de repos hebdomadaire, le jour du Seigneur, loin des villes.
En effet, l’emploi du dimanche chrétien a bénéficié du renouvellement du discours pastoral du début du siècle qui, au lieu de condamner
les délassements hebdomadaires, les loisirs naissants, préfère les
encadrer 30. Par ailleurs, l’exploitation d’une compagnie de chemin de
fer le dimanche ne paraît pour quiconque comme un obstacle au repos
dominical. Personne ne conteste désormais l’efficacité des systèmes
de tournus afin que chaque employé bénéficie du repos prescrit par la
loi. C’est ainsi que la clause est finalement supprimée par l’assemblée
générale des actionnaires de la Compagnie et que le dimanche 27 avril
1919 des trains circulent pour la première fois le jour du Seigneur
entre Yverdon et Sainte-Croix.
L’exode du week-end
L’évolution que nous pouvons constater dans le cadre de l’aventure de la ligne Yverdon-Sainte-Croix à propos du droit pour tous
de se promener en train n’importe quel jour de repos, d’élargir son
horizon, s’intensifie avec la progression des transports et de la mobilité
au xxe siècle. Dans les années 1950‑1960, un écho des condamnations
envers les trains de plaisir et les excursions dominicales se retrouve
dans les craintes et doutes qu’éprouvent les chrétiens devant ce qui
est alors appelé l’exode du week-end. En effet, la démocratisation
des transports, et en particulier de la voiture, a introduit des pratiques
migratoires hebdomadaires qui suscitent la méfiance de certains
chrétiens, mais en invitent aussi d’autres à réfléchir sur la pratique
religieuse et sur le rythme cultuel traditionnel, en prenant en compte
le fait que le dimanche est désormais « dilué dans la fin de semaine » 31.
La question de la mobilité facilitée s’insère, pour les chrétiens, dans
celle de la sécularisation de la société qu’ils constatent dans un premier
29
Expression citée autant dans le Journal religieux du 2 septembre 1916 que dans la
Semaine religieuse du 10 mai 1919.
30
Lathion Valérie, Un dimanche pour Dieu ou pour l’homme ?…, p. 563‑569. Le terme
délassement est alors utilisé selon une dichotomie moraliste d’après laquelle les « bons »
et « sains » délassements du dimanche s’opposent aux « mauvais » délassements.
31
Rémond René, « Un chapitre inachevé (1958-1990) », in Le Goff Jacques, Rémond
René (dir.), Histoire de la France religieuse. Tome 4. Société sécularisée et renouveaux
religieux (xxe siècle), Paris : Seuil, 1992, p. 371‑372.
444
Résistances à l’utilisation des transports
temps et qui les invite ensuite à se remettre en cause 32. Les autorités
ecclésiastiques doivent ainsi faire face à une érosion de la fréquentation
cultuelle, manifestation conjointe de la sécularisation de la société et de
l’un de ses effets, l’exode du week-end.
La réflexion menée sur ce qu’implique la fuite hebdomadaire des
villes, par le rail et surtout par la route, invite à réfléchir sur le concept
de la mobilité, en particulier dans une optique existentielle où une
critique latente pointe, notamment dans la presse religieuse. Différentes
expressions alors utilisées, telles que les « évadés du dimanche » 33, en
sont les témoins manifestes. La « banalisation du dimanche » 34 au sein
du week-end déplace la perspective de la semaine puisque celui-ci
devient dès lors, et surtout grâce à la mobilité, son acmé. Les chrétiens
convaincus et leurs autorités ont également conscience que l’Église
doit impérativement s’adapter pour éviter d’être prise de court face à
ces transformations. Plusieurs enquêtes sont menées en Suisse romande,
en particulier une sur la semaine de cinq jours et sur la manière des
familles de passer les week-ends, dont les résultats sont publiés dans le
journal la Vie protestante au début de 1962 35. L’article oscille entre une
critique comme l’exprime son titre (« Les évadés du dimanche »), une
crainte devant un phénomène qui risque de miner la pratique religieuse,
une résignation devant une nouvelle manière de vivre, mais aussi une
certaine tendresse, exprimée par des dessins bon enfant, devant cette
« nouvelle mentalité », ainsi qu’une volonté de s’adapter aux mutations
de la société 36. C’est finalement ce dernier point qui l’emporte pour les
Sur la sécularisation dans le monde protestant romand, cf. Campiche Roland
J., Dubach Alfred, Bovay Claude et al., Croire en Suisse(s). Analyse des résultats
de l’enquête menée en 1988‑1989 sur la religion des Suisses, Lausanne : L’Âge
d’homme, 1992 et Campiche Roland J., Les deux visages de la religion. Fascination
et désenchantement, Genève : Labor et Fides, 2004. Pour élargir la question au niveau
européen, cf. Rémond René, Religion et société en Europe. La sécularisation aux xixe et
xxe siècles, Paris : Seuil, 1998.
33
Selon le titre d’un article publié dans la Vie protestante du 12 janvier 1962 (« Les
évadés du dimanche. Une grande enquête sociologique dans l’Église de Genève »),
p. 3. Le verbe « évader » est déjà utilisé dans les années 1950 pour les migrations
hebdomadaires. Voir par exemple, Vie protestante, 30 septembre 1955.
34
Rémond René, « Un chapitre inachevé… », p. 372.
35
Comme autres exemples d’enquête, cf. notamment, Perret Edmond, La pratique du
culte à Genève. Enquête sociologique, Genève : Bulletin du Centre protestant, 1963,
103 p., ainsi que Redalié Raymond, « En vue de la séance des Conseils de l’Église :
la paroisse à l’heure du monde. Rapport général tiré des réponses des paroisses »,
Mémorial des séances du Consistoire de l’Église nationale protestante de Genève, 1967
(supplément).
36
« Les évadés du dimanche. Une grande enquête sociologique dans l’Église de
Genève », La Vie protestante, 21 janvier 1962, p. 3.
32
445
Valérie Lathion
autorités religieuses puisque, selon elles, il ressort de cette enquête que
« ce qu’il faut chercher résolument, c’est trouver les moyens de rencon­
trer les hommes là où ils se trouvent » 37.
Un des moyens d’action serait alors d’inviter les citadins séjournant à la campagne à y fréquenter les cultes et de signaler dans toutes
les localités les horaires des services religieux 38, d’où les panneaux de
signalisation à l’entrée des localités. Ce souci de rejoindre les fidèles
dans leurs déplacements s’exprime déjà dans les résultats initiaux,
puisque suite à cette enquête, le journal La Vie protestante publie durant
plusieurs semaines de grands articles présentant la liste et les horaires
des cultes de Genève et ceux de paroisses vaudoises, valaisannes et
françaises 39.
L’adaptation des chrétiens à la mobilité dominicale a été progressive
puisqu’elle a commencé, comme nous l’avons vu, au début du xxe siècle,
s’intensifie avec l’essor des loisirs et se réalise dans la « civilisation des
loisirs » 40 de l’après-guerre. Les vives résistances envers l’usage du
train le dimanche s’aplanissent avec celui de la voiture le week-end,
sans pour autant faire l’économie d’une réflexion qui témoigne d’une
grande interrogation devant de nouvelles pratiques qui sont le reflet
d’un mouvement de sécularisation et surtout d’individualisation de
la société.
Conclusion
À la fin du xixe siècle, la démocratisation des transports reflétée
par le large succès des excursions et des trains de plaisir suscite la
méfiance de la part des réformateurs sociaux qui se montrent récalcitrants à l’utilisation des chemins de fer dans le cadre des loisirs
naissants. Ces résistances témoignent en quelque sorte d’un déni des
nouvelles pratiques populaires. Dans les années 1950‑1960, le recours,
le week-end, à la voiture pour sortir des villes, s’en évader, témoigne
aussi d’une nouvelle démocratisation des transports et invite les milieux
chrétiens à réfléchir sur la question de la mobilité sans en condamner
pour autant son principe. L’évolution des manières d’appréhender les
Mémorial des séances du Consistoire de l’Église nationale protestante de Genève,
séance du 8 février 1963.
38
Mémorial des séances du Consistoire de l’Église nationale protestante de Genève,
séance du 8 février 1963.
39
La Vie protestante, 21 janvier 1962 et numéros suivants.
40
Terme communément employé pour la société postérieure à la Seconde Guerre
mondiale, cf. par exemple, Rémond René, « Un chapitre inachevé… », p. 371.
37
446
Résistances à l’utilisation des transports
pratiques liées à la mobilité le dimanche connaît son époque charnière
au tournant du siècle, comme nous le montre l’expérience particulière
de la ligne Yverdon-Sainte-Croix entre le moment où la clause restrictive est acceptée et celui où plus personne ne souhaite son maintien.
Enfin, notre étude sur certaines résistances à l’utilisation des transports que sa démocratisation et son succès ont provoquées nous invite
aussi à nous interroger sur la notion de hiérarchisation des transports,
hiérarchisation qui, dans ce cadre historique, a été fixée en fonction de
la nature du transport (le trafic des marchandises de première nécessité étant toléré le dimanche, au contraire des autres, et surtout du trafic
des voyageurs entrepris pour leur propre délassement) mais aussi de
la notion du travail d’autrui (utiliser son propre moyen de locomotion
est moins « condamnable » que faire travailler autrui le dimanche).
Ne pourrions-nous pas entendre un lointain écho de cette perspective historique dans une certaine hiérarchisation que nous rencontrons
aujourd’hui en matière de modes de transports, envisagés cette fois sous
l’angle environnemental ?
447
Éditeurs – Editors
Gérard Duc : Historien, docteur ès sciences économiques et sociales
de l’Université de Genève (2008). Après des séjours scientifiques à
l’IDHE de l’Université de Paris Ouest Nanterre-La Défense (2006) et
au Seminar für Wirtschafts- und Sozialgeschichte de l’Université de
Cologne (2006-2007), il est depuis 2012 maître-assistant à la Maison
de l’histoire de l’Université de Genève. Il collabore au projet FNS sur
l’histoire des transports et de la mobilité en Suisse et dans les agglomérations de Genève et Bâle (1918 à nos jours). Il a publié sa thèse en
2010 : Les tarifs marchandises des chemins de fer suisses (1850-1913).
Stratégie des compagnies ferroviaires, nécessités de l’économie natio­
nale et évolution du rôle régulateur de l’Etat, Berne : Peter Lang, 2010,
456 p.
Olivier Perroux : Docteur ès sciences économiques et sociales
(mention histoire économique) de l’Université de Genève en 2003.
Publiée en 2006 aux Éditions Slatkine, sa thèse est consacrée aux élites
bourgeoises de Genève entre 1814 et 1914. Il a ensuite occupé de 2003
à 2006 un poste de maître-assistant FNS en histoire des populations.
Il a rejoint la Maison de l’histoire en 2009. D’abord adjoint scientifique
jusqu’en 2012, il travaille depuis cette date sur un projet en histoire des
transports et de la mobilité financé par le FNS.
Hans-Ulrich Schiedt, Dr., Leiter der Abteilung Forschung
von ViaStoria, Zentrum für Verkehrsgeschichte, Universität Bern ;
Generalsekretär der Schweizerischen Gesellschaft für Wirtschafts­
und Sozial­
geschichte ; Redaktor der historischen Zeitschrift Traverse.
­Hauptzusammenhang der wissenschaftlichen Tätigkeit ist das Forschungsund Publikationsprogramm «Verkehrsgeschichte Schweiz».
449
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt, François Walter (éd.)
François Walter : Professeur honoraire depuis 2013, il a été professeur ordinaire au Département d’histoire générale de la Faculté des
lettres de l’Université de Genève entre 1986 et 2012 ; il a fait ses études
à l’Université de Fribourg où il a obtenu un doctorat ès lettres en 1981.
Avant d’être nommé professeur à Genève, il a successivement été chargé
de cours à la Faculté des sciences de l’Université de Fribourg, puis
maître-assistant à l’Institut de géographie de cette même université. Il a
été professeur invité de nombreuses institutions suisses et étrangères.
Dans le cadre de ses recherches sur les processus d’urbani­sation de la
Suisse et les rapports au territoire, il a étudié le rôle des transports sur la
longue durée. Les recherches qu’il entreprend depuis plusieurs années
l’orientent vers des problématiques liées tant à ­l’histoire du paysage et
de l’environnement, qu’à la production des identités sociales.
450
Auteurs – Authors
Xavier Bernier : Maître de conférences en géographie et agrégé
de l’Université, Xavier Bernier étudie les transports en territoires de
montagne. Ses recherches l’ont mené sur des terrains variés (Niger,
Ethiopie, Népal, Liban, Amérique du Nord, Alpes). Il s’intéresse en
particulier à l’analyse spatiale, aux représentations et aux pratiques
liées à la mobilité, et aux approches géographiques de la distance.
Peter Cox : Senior Lecturer in Sociology at the University of
Chester. Prior to re-entering academia, he ran his own cycle business
and was involved in a range of campaigning and community organising projects. Since completing his doctoral thesis (2002) his research
work has specialised in the area of social change and sustainable transport, especially the vital contribution of cycling and its importance for
social justice. He is author of Moving People: Sustainable Transport
Development (Zed Books, 2010 [also as In Bewegung: Ist nachhal­
tiger Personentransport möglich? WBG, 2012]) and was a founder
member of the Cycling and Society Research Group, co-editing (with
Dave Horton and Paul Rosen) Cycling and Society (Ashgate 2007) as
an outcome of this group’s work.
Aurélien Delpirou : Maître de conférences en urbanisme et aménagement à l’Institut d’urbanisme de Paris (Université Paris-Est Créteil
Val-de-Marne). Ses travaux portent sur les politiques de développement
urbain durable dans les métropoles européennes. Dernières publications
sur le thème : « La “thérapie du chemin de fer” à Rome: les impasses
de l’articulation entre urbanisme et transport », L’Espace géogra­
phique, n°2011-4, 2011, p. 352-366 ; « Transport et urbanisme à Rome :
451
Gérard Duc, Olivier Perroux, Hans-Ulrich Schiedt, François Walter (éd.)
le mariage de la carpe et du lapin ? », Métropolitiques.eu [article mis en
ligne le 19/09/2011].
Sandro Fehr studierte an der Universität Bern Geschichte und
Politikwissenschaft. Anschliessend war er als Doktorand im Nationalfondsprojekt «Geschichte der Schweizer Luftfahrt» an der Abteilung
für Wirtschafts-, Sozial- und Umweltgeschichte des Historischen Instituts der Universität Bern tätig, wo er 2012 mit einer Arbeit über die
Entstehung und Entwicklung der zivilen Luftfahrtinfrastruktur in der
Schweiz promovierte.
Gilles Forster : Après des études d’histoire économique et sociale
à l’Université de Genève, Gilles Forster a collaboré entre 1998 et 2002
aux travaux de la Commission indépendante d’experts Suisse – Seconde
Guerre mondiale (CIE – Commission Bergier) et a rédigé l’étude sur
le transit ferroviaire à travers la Confédération. Assistant à l’Université de Genève de 2002 à 2007, il est docteur en histoire contemporaine
de l’Université de Bâle (2004). Gilles Forster travaille aujourd’hui à la
Haute école d’art et de design (HEAD-Genève).
Caroline Gallez : Chercheuse au Laboratoire Ville Mobilité Transport de l’Institut français de sciences et technologies des transports, de
l’aménagement et des résea