Une certification Iso 9001 serait utile pour moderniser le service

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Une certification Iso 9001 serait utile pour moderniser le service
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Une certification Iso 9001 serait utile pour moderniser le service
public belge.
Lucas DUCARME, juriste
Alors que surgissent régulièrement des critiques au sujet des lenteurs administratives, de la prestation
approximative et du sentiment «d'intouchabilité» des acteurs publics, une réflexion concrète sur le
fonctionnement interne des administrations publiques s'impose. On ne peut se satisfaire d'implorer
indéfiniment la bonne gouvernance et l'éthique.
La mise en ½uvre des règles de management de la qualité, objet de la norme Iso 9001, au sein des
administrations publiques belges me semble tout indiquée pour réussir la modernisation et répondre
aux critères de délai-coût-qualité des prestations publiques.
Appliquer la norme Iso 9001:2000 est une réponse précise et tangible aux difficultés. Il est erroné de
croire qu'une transposition dans les organismes publics de ces règles destinées prioritairement au
fonctionnement du secteur privé est difficile. Il faut pour cela tenir compte des particularités propres
aux acteurs et à l'environnement de travail de l'organisation publique, de la culture, des objectifs et
des missions du service public. Comme pour tout organisme visant la certification. Le respect de la
norme 9001 est souhaité et exigé dans l'entreprise privée, la loi du marché l'obligeant à renforcer la
qualité du service pour satisfaire et fidéliser le client. Concurrence oblige. Ce n'est pas parce que
l'administration publique ne connaît pas ce risque et cette dépendance qu'elle doit négliger un
processus d'amélioration qualitatif de ses services.
Cela implique que l'ensemble de la chaîne d'élaboration du service public sera analysé, corrigé,
redéfini, et dès lors en constante évolution. Réussir cette démarche n'est pas une avancée vers une
privatisation. Mais à l'heure du grand débat européen sur la définition et le cadre légalisé des services
publics, seule la concrétisation d'un seuil uniforme de qualité dans le secteur public permettra de
garantir sa viabilité.
L'intérêt du secteur public pour la recherche d'un fonctionnement plus optimal n'est pas neuf. C'est
très en retard que les responsables publics commencent à s'intéresser à «ce qui marche».
Des mesures doivent être prises pour accompagner le mouvement. La qualité et la traçabilité garantes
d'une gestion publique saine, transparente et professionnelle: voilà les objectifs.
S'engager dans une démarche qualité Iso, c'est d'abord instaurer un véritable management. Une
organisation plus transversale, moins hiérarchique, qui assure le principe de subsidiarité dans la prise
de décision et le fonctionnement de l'administration. C'est aussi se fixer des objectifs précis de
résultats, et plus seulement de moyens.
Appliquer la norme Iso 9001: 2000, c'est décider de réfléchir, en concertation avec tous les acteurs
des prestations publiques:
- aux objectifs et missions de l'organisme (le service au citoyen et la définition de ses attentes);
- à son organisation (qui fait quoi?);
-à son fonctionnement (quelles sont les règles à suivre dans la réalisation de la prestation?);
- à son évaluation (quels sont les résultats et quelle est la performance des services rendus?).
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Alors qu'il n'existe pas de cadre légal (hors obligations financières et comptables) relatif au
fonctionnement et au modus operandi du secteur public, une loi relative à la certification répondant
aux principes et exigences de la norme Iso 9001: 2000 ne serait pas du luxe aux côtés des circulaires
ministérielles, chartes, notes de services, etc.
Les freins seront importants et la peur du changement poussera nombre de décideurs publics à
écarter cette piste d'un revers de la main. Beaucoup reconnaîtront qu'il y a «des améliorations à
apporter» mais que les certifications de type Iso, «ils n'y croient pas». Ou encore, qu'elles ne sont pas
adaptées à la prestation publique... Et ils finissent alors toujours par proposer «autre chose» pour être
certains de repousser cette échéance qu'ils savent inévitable mais sont incapables de concevoir. Par
manque d'audace. Or, il en faut, car la norme 9001 provoquerait effectivement plus que des
ajustements: des mutations profondes dans le fonctionnement et l'organisation du service public.
Plus que des orientations, les exigences de cette norme 9001 identifient les mesures à appliquer. Des
mesures éprouvées! Mais les fonctionnaires restent sceptiques, sans pourtant connaître la démarche.
Et combien affirment sans gêne ni complexe qu'ils sont «fonctionnaires»? Par laxisme et manque
d'audace, l'administration publique a aujourd'hui une image désastreuse. «Des planqués, des
fainéants, des gestionnaires sans ambition.»
Une enquête de l'institut de sondage français Ipsos annonçait en mai 2004 que 78% des Français de
moins de 25 ans voulaient devenir fonctionnaires. Certes la France n'est pas la Belgique, mais ne
voilà pas une information en totale contradiction avec le malaise du fonctionnaire? Pas du tout! Cette
enquête a été réalisée suite à l'instauration du CPE (contrat première embauche). La vérité, c'est
qu'une majorité de jeunes ont peur de leur avenir professionnel... et se rabattent dès lors sur la
fonction publique, synonyme de protection et de stabilité. Cette image quelque peu stéréotypée est la
conséquence de diverses réalités.
Avec la fin de l'Etat providence et la prise de conscience d'une responsabilisation des missions et
budgets de l'Etat au niveau international, ce nouveau siècle de l'information et du mouvement impose
de s'adapter et d'évoluer rapidement. Notre secteur public tente de le faire, mais jamais les
démarches engagées n'ont donné de vrais bons résultats. Nous devons, au niveau européen, veiller à
une normalisation et une rationalisation accrues des services publics. Avec une « loi Iso 9001 pour les
administrations publiques», notre pays pourrait montrer l'exemple.
Alors que de nombreux professionnels de la gestion publique jugent vital que les outils de réforme
soient mis en ½uvre, beaucoup concèdent ensuite, dépités, que tout ou presque se joue dans les
mentalités. Selon eux, il faudra au minimum une génération pour arriver au management public! Mais
nous ne pouvons plus attendre. Des textes normatifs doivent être votés pour instaurer la démarche
qualité dans nos administrations publiques. C'est dans ce sens que je propose que l'ensemble des
Parlements du pays votent une proposition de résolution obligeant, après débat, les exécutifs à
imposer ce modèle aux services publics.
Les pouvoirs publics qui obligent des organismes privés à être certifiés et à répondre à des normes
précises ont le devoir de se les appliquer à eux-mêmes!
Il est nécessaire, tous les jours, d'innover, de créer et de remettre en question nos organisations, nos
structures, notre fonctionnement. Pour restaurer l'objectif premier: servir le citoyen. C'est un principe
fondateur de toute vraie démocratie.
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