Chapitre 8 Fonctions de plusieurs variables

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Chapitre 8 Fonctions de plusieurs variables
Chapitre 8
Fonctions de plusieurs variables
8.1 Généralités sur les fonctions de plusieurs variables réelles
Définition. Une fonction réelle de n variables réelles est une application d’une
partie de Rn à valeurs dans R.
On note :
Rn
f:
−→
R
(x1 , ..., xn ) 7−→ z = f (x1 , ..., xn )
f est définie en m0 = (x01 , ..., x0n ) ∈ Rn si la valeur f (x01 , ..., x0n ) existe et est un
nombre réel z0 .
On note Df l’ensemble de définition de f .
Exemple. La fonction
f:
R2
−→
(x, y) 7−→
p
R
1 − x2 − y 2
est définie pour les valeurs de x et y telles que x2 + y 2 ≤ 1. Dans un repère orthonormé, Df est le disque fermé de centre 0 et de rayon 1.
8.1.1 Représentation géométrique d’une fonction de deux variables
z
Soit z = f (x, y) une fonction de deux
variables. Soit Oxyz un repère orthonormé de R3 . Quand le point m(x, y)
décrit dans le plan xOy le domaine de
définition de la fonction f , le point M
de coordonnées (x, y, z) = (x, y, f (x, y))
décrit une surface S.
On dit que S a pour équation z = f (x, y).
M(x,y,f(x,y))
S
y
O
x
m (x,y)
Df
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Un voisinage Vm0 d’un point m0 ∈ R2 est une partie de R2 contenant un disque
ou un carré ayant ce point pour centre et non réduit à ce point. Selon la distance
choisie on obtient les voisinages suivants :
m0
|x − x0 | + |y − y0 |
m0
m0
sup(|x − x0 |, |y − y0 |)
p
(x − x0 )2 + (y − y0 )2
8.2 Limite d’une fonction.
Soit Df le domaine de définition de f : R2 → R, m0 (x0 , y0 ) ∈ Df . On dit que f
admet la limite L quand m(x, y) tend vers m0 (x0 , y0 ), si f (x, y) est aussi voisin
que l’on veut de L dès que le point m est dans un voisinage convenable de m0 .
On note
lim
f (x, y) = L ou
lim f (m) = L.
(x,y)→(x0 ,y0 )
Exemple.
m→m0
(1 + x2 y 2 ) sin y
sin y
= lim
= 1.
y→0 y
(x,y)→(0,0)
y
lim
Cette notion de limite se généralise sans difficultés aux espaces de dimensions
supérieures à deux.
8.2.1 Opérations
Les propriétés des limites des fonctions de plusieurs variables sont les mêmes
que celles des limites des fonctions d’une variable pour les sommes, produits,
quotients et composées.
8.3 Fonction continue
Une application f : Rn → R définie sur un voisinage d’un point m0 ∈ Rn est
continue en m0 si lim f (m) = f (m0 ).
m→m0
• Soit D un domaine non vide de Rn . On dit que f est continue sur D, si elle
est continue en tout point de D.
◦ Exemple.
D = R2 (x, y) 7−→ f (x, y) = x + y ; f est continue en tout point de D car
|f (x, y) − f (x0 , y0 )| = |x + y − x0 − y0 | ≤ |x − x0 | + |y − y0 | tend vers 0 dès
que x tend vers x0 et y vers y0 .
68
8.3.1 Applications partielles
Soit
f : (x1 , ..., xn ) ∈ Rn 7−→ z = f (x1 , ..., xn ) ∈ R
une fonction de n variables. Si l’on fixe les n−1 variables x1 , x2 , ..., xi−1 , xi+1 , ..., xn
on peut définir les n applications dites applications partielles :
fi : x ∈ R 7−→ fi (x) = f (x1 , ..., xi−1 , x, xi+1 , ..., xn ) ∈ R
Dans le cas n = 2 f : R2 −→ R on a deux applications partielles
fx : x 7−→ fx (x) = f (x, y) et fy : y 7−→ fy (y) = f (x, y)
Par exemple, si f (x, y) =
x2
xy
+ y2
fx : x 7−→ fx (x) =
x2
xy
.
+ y2
Théorème. Si f : Rn → R est continue en m0 = (x01 , x02 , ..., x0n ), les n applications
partielles fi de R dans R sont continues en x0i .
On remarquera que la réciproque de ce théorème est fausse, comme le prouve
l’exemple suivant :
xy
∀(x, y) 6= (0, 0) et f (0, 0) = 0. Au point O(0, 0)
Exemple. Soit f (x, y) = 2
x + y2
les deux fonctions partielles fx et fy qui sont égales à 0 sont continues ;
cependant f n’est pas continue en O : si l’on pose y = tx la limite en O est
t
6= f (0, 0) pour (t 6= 0).
1 + t2
8.3.2 Opérations
Si f et g : Rn → R sont continues en m0 (x01 , ..., x0n ), alors ∀λ ∈ R :
f + g, f g, λ f ,
f
g
(si g(m0 ) 6= 0) sont continues en m0 .
◦ De même la composée de fonctions continues est continue.
8.4 Dérivées partielles
Soit f une fonction des deux variables x, y et m0 (x0 , y0 ) ∈ Df .
Supposons l’application partielle fx : x 7−→ f (x, y0 ) définie sur un voisinage de x0
tel que (x0 , y0 ) ∈ Df . Si fx admet une dérivée au point x0 , on dit que cette dérivée
est la dérivée partielle de f par rapport à x au point (x0 , y0 ).
On note fx0 ou
∂f
cette dérivée et l’on a
∂x
fx0 (x0 , y0) =
∂f
f (x, y0 ) − f (x0 , y0 )
(x0 , y0 ) = lim
x→x0
∂x
x − x0
69
De même, la dérivée de la fonction fy est la dérivée partielle de f par rapport à y
au point (x0 , y0 ). On la note
fy0 (x0 , y0 ) =
∂f
f (x0 , y) − f (x0 , y0 )
(x0 , y0) = lim
y→y0
∂y
y − y0
Si fx0 et fy0 existent, on dit que f est dérivable.
8.4.1 Règle pratique
Pour déterminer une dérivée partielle de f , il suffit de dériver l’expression de
f par rapport à la variable considérée, les autres étant considérées comme des
constantes.
Exemple. Soit f (x, y) = x2 y 5. Alors, on a
∂f
(x, y) = 2x y 5,
∂x
∂f
(x, y) = 5x2 y 4,
∂y
∂f
(1, 2) = 64,
∂x
∂f
(1, 2) = 80
∂y
8.4.2 Représentation géométrique
Soit S la surface d’équation z = f (x, y)
et M0 (x0 , y0 , z0 ) le point de S de coordonnées (x0 , y0 , z0 = f (x0 , y0)) dans le
repère Oxyz. La section de la surface
S par le plan y 0O 0 z 0 d’équation x = x0
est une courbe (Cx0 ). Dans ce plan, (Cx0 )
est le graphe de la fonction z = fy (y) =
∂f
f (x0 , y) et fy0 (y0 ) =
(x0 , y0 ) est la pente
∂y
de la tangente à la courbe (Cx0 ) en M0 ,
comme on peut le voir sur la figure cicontre.
z′
z
C x0
O
y0
O′ = x0
y
m0
x
y′
8.4.3 Exemples de calculs
Si f (x, y) = x2 + y 2 alors fx0 (x, y) = 2x et fy0 (x, y) = 2y
Si f (x, y, z) = 3x + y 2 − z 3 alors
fx0 (x, y, z) = 3 , fy0 (x, y, z) = 2y et fz0 (x, y, z) = −3z 2
Si f (x, y) =
2x + y
x2 + y 2
fx0 (x, y) =
70
∀(x, y) ∈ R2 − (0, 0)
−2x2 − 2xy + 2y 2
(x2 + y 2 )2
et
S
M0
fy0 (x, y) =
−y 2 − 4xy + x2
(x2 + y 2 )2
8.4.4 Dérivées successives
On définit ensuite les dérivées partielles d’ordre 2, si elles existent par dérivation
des dérivées premières ; on les note :
fx00i xj =
∂
∂2
(fx0 j ) =
f
∂xi
∂xi ∂xj
Exemple. Pour la fonction (x, y) 7→ f (x, y) = x2 y 5 on a
fx002 (x, y) = 2y 5,
00
fxy
(x, y) = 10xy 4 ,
fy002 (x, y) = 20x2 y 3 ,
00
fyx
(x, y) = 10xy 4,
(3)
fx2 y (x, y) = 10y 4 .
Théorème de Schwarz ( H.Schwarz 1843-1921 ) :
Si f admet dans un voisinage de (x0 , y0 ) des dérivées partielles secondes fx00y et
fy00x continues, elles sont égales sur ce voisinage :
fx00y = fy00x
Notons que le théorème de Schwarz se généralise aux fonctions de plus de deux
variables et aux dérivées d’ordre supérieur à deux ; par exemple :
si f (x, y, z) = x2 + xyz + xyz 3 + z 2
on a
(3)
(3)
fxz 2 (x, y, z) = 6yz = fz 2 x (x, y, z)
8.5 Différentielle de f
L’idée est de remplacer en m0 une fonction ”compliquée” f par une fonction
plus simple qui est une application linéaire translatée en f (m0 ) dite ”application linéaire tangente” et qui soit la meilleure approximation linéaire de f au
voisinage de m0 .
On sait que les applications linéaires de R dans R et de R2 dans R s’écrivent
respectivement
λa : R → R
x 7→ ax
λa,b :
R2
→
R
(x, y) 7→ ax + by
où les coefficients a et b sont réels.
A. Fonction différentiable f : R → R définie et continue sur un voisinage
Vx0 de x0 . f est différentiable en x0 s’il existe une application linéaire λx0 , notée
f 0 (x0 ) : R → R, telle que pour tout h ∈ R avec x0 + h ∈ Vx0 :
f (x0 + h) − f (x0 ) = f 0 (x0 )h + hϕ(h) avec lim ϕ(h) = 0.
h→0
La valeur f 0 (x0 ) qui est unique peut encore s’écrire :
71
f (x0 + h) − f (x0 )
= f 0 (x0 )
h→0
h
lim
On reconnait la dérivée en x0 de f .
Si l’on note dx l’application h ∈ R 7→ dx(h) = h ∈ R la différentielle de f en x0
s’écrit
df (x0 ) = f 0 (x0 ) dx
df
(x0 ) est la dérivée de f en x0 .
où f 0 (x0 ) =
dx
Exemples. f (x) = 2x
df (x) = 2dx ;
f (x) = cos x
df (x) = − sin x dx
Puisque lim hϕ(h) = 0, confondre sur Vx0 la fonction f et son application linéaire
h→0
tangente, revient à confondre f (x) et la partie régulière de degré 1 de son DL1 V (x0 ).
Géométriquement, au voisinage
de x0 , le graphe de f est peu différent de celui
de sa tangente en x0 , f (x0 ) . Autrement dit si l’on pose h = x − x0 , l’équation de
la tangente en M0 à la courbe d’équation f (x) est :
y = y0 + (x − x0 )f 0 (x0 )
B. Fonction différentiable. Soit f : R2 → R définie et continue sur un voisinage
Vm0 du point m0 (x0 , y0).
f est différentiable en m0 (x0 , y0 ), s’il existe une application linaire λm0 : R2 → R
définie par λm0 (h, k) = ah + bk, a, b ∈ R telle que
√
f (x0 + h, y0 + k) − f (x0 , y0 ) = ah + bk + h2 + k 2 ϕ(h, k) avec lim ϕ(h, k) = 0.
h→0
k→0
Pour calculer a et b, écrivons l’équation précédente d’abord avec k = 0 :
f (x0 + h, y0 ) − f (x0 , y0 ) = ah + |h|ϕ(h, 0)
ou encore
fx (x0 + h) − fx (x0 ) = ah + |h|ψ(h).
On reconnaı̂t la différentielle de l’application partielle fx : R −→ R de f par
rapport à la variable x ; on a donc :
a=
∂f
(x0 , y0 ) = fx0 (x0 , y0)
∂x
b=
∂f
(x0 , y0 ) = fy0 (x0 , y0)
∂y
et de même
On appelle différentielle de f en (x0 , y0), l’application linéaire
df :
R2
→
R
(h, k) 7→ df (h, k) = fx0 h + fy0 k.
72
En particulier, si l’on note
dx : R2 → R
dy : R2 → R
l’application linéaire (h, k) 7→ dx(h, k) = h et
l’application linéaire (h, k) 7→ dy(h, k) = k, on a
df (h, k) = fx0 dx(h, k) + fy0 dy(h, k) = (fx0 dx + fy0 dy)(h, k) ∀(x, y) ∈ Df
ou encore
df = fx0 dx + fy0 dy
Exemple. La fonction f : (x, y) 7−→ x sin y + y 2 est différentiable sur R2 , car c’est
une fonction composée de fonctions qui le sont et sadifférentielle est :
df = (sin y)dx + (x cos y + 2y)dy
et en particulier au point (1, π/2) :
df(1,π/2) = dx + πdy
−−−−→
◦ Le gradient. Utilisé en physique, on note grad f m0 le vecteur de R2 dont les
composantes sont (fx0 , fy0 ) ; la relation précédente s’écrit alors au point m0 comme
le produit scalaire :
−−−−→
−→
−→
df( m0 ) = grad f m0 · dm si l’on note dm = (dx, dy).
◦ Rappelons que f est dérivable en m0 si ses dérivées partielles existent en m0 .
Théorème. Si f est différentiable, elle est continue et admet des dérivées premières. La
réciproque est vraie si les dérivées premières fx0 et fy0 sont continues.
Une fonction différentiable est donc dérivable.
Exemple. Soit la fonction (x, y) 7−→ f (x, y) = 0 si xy 6= 0 et 1 si xy = 0. Les
dérivées partielles en (0, 0) existent et sont nulles : f est dérivable. Mais f n’est
pas continue en (0, 0) donc pas différentiable.
◦ La notation différentielle est particulièrement bien adaptée aux calculs des formules de dérivation des fonctions composées dont elle donne l’apparence d’une
évidence. Examinons le cas n = 2 :
• Soit f : (x, y) 7−→ f (x, y) une fonction définie dans un voisinage V (m0 ) de m0 .
1. Supposons x et y fonctions de la variable t ∈ I. Supposons aussi fx0 , fy0 , x0 et y 0
sont continues ; alors :
F : t 7−→ F (t) = f (x(t), y(t)) est différentiable et
dF = F 0 dt = fx0 dx + fy0 dy = fx0 x0 dt + fy0 y 0dt = (fx0 x0 + fy0 y 0)dt d’où
F 0 (t) = fx0 x0 + fy0 y 0.
2. Supposons maintenant x et y fonctions des variables (u, v) :
F (u, v) = f (x, y) avec x et y fonctions différentiables des variables u et v.
Ecrivons les différentielles de f et F :
73
dF = Fu0 du + Fv0 dv = fx0 dx + fy0 dy
= fx0 (x0u du + x0v dv) + fy0 (yu0 du + yv0 dv) = (fx0 x0u + fy0 y 0)du + (fx0 x0v + fy0 yv0 )dv
Par identification on obtient les formules que l’on retiendra :
Fu0 = fx0 x0u + fy0 yu0
et Fv0 = fx0 x0v + fy0 yv0
En particulier, en coordonnées polaires x = r cos θ et y = r sin θ :
Fr0 = cos θ fx0 + sin θ fy0
Fθ0 = −r sin θ fx0 + r cos θ fy0 .
Exemple. Soit f définie sur R2 par f (x, y) = xy . Posons F (r, θ) = f (r cos θ , r sin θ).
On a
F (r, θ) = r 2 sin θ cos θ),
fx0 (x, y) = y = r sin θ et fy0 (x, y) = x = r cos θ
d’où :
Fr0 = cos θ r sin θ + sin θ r cos θ = r sin 2θ
et
Fθ0 = −r sin θ r sin θ + r cos θ r cos θ = r 2 cos 2θ.
D’autre part
F (r, θ) = xy = 21 r 2 sin 2θ et l’on vérifie bien
Fr0 = r sin 2θ et Fθ0 = r 2 cos 2θ.
8.5.1 Représentation géométrique de la différentielle.
Posons d’abord h = x − x0 et k = y − y0 ; comme le terme complémentaire
√
h2 + k 2 ϕ(h, k) tend vers 0 quand (h, k) tend vers 0, dire que f est différentiable
en m0 = (x0 , y0 ), signifie qu’en ce point, f (x, y) est peu différent de sa partie
linéaire donc de son développement de Taylor de degré un au voisinage du point
m0 = (x0 , y0 ) :
f (x, y) ≈ f (x0 , y0 ) + (x − x0 )fx0 (x0 , y0 ) + (y − y0 )fy0 (x0 , y0 ).
Géométriquement, au voisinage de M0 (x0 , y0 , z0 ) la surface
S = {(x, y, z) | z = f (x, y) ; (x, y) ∈ Df }
diffère peu de son plan tangent en M0 qui a donc pour équation :
z = z0 + (x − x0 )fx0 (x0 , y0 ) + (y − y0 )fy0 (x0 , y0 )
Ce plan est engendré par les vecteurs
−−−→ −−−→ ∂ M0 M
∂ M0 M
0
0
= 1, 0, fx et Tx0 =
= 0, 1, fy
Ty0 =
∂x
∂y
dérivés du vecteur
−−−→
M0 M = (x − x0 , y − y0 , f (x, y) − z0 ) par rapport aux variables x et y. Ces
vecteurs sont tangents en M0 aux courbes coordonnées Cx0 et Cy0 comme on l’a
vu en 8.4.2.
74
z′
z
Ty0
M0
Cy0
Tx0
S
Cx0
O
y0
O′ = x0
y
m0
x
y′
Exemple. Soit f : R2 → R définie par f (x, y) = x2 + y 2 − 2xy. Au point (1,0) sa
différentielle est
∂f
∂f
df =
(1, 0) dx +
(1, 0) dy = 2 dx − 2 dy
∂x
∂y
L’équation du plan tangent en (1, 0, 1) à la surface S définie par f s’écrit donc
z − 1 = 2(x − 1) − 2(y − 0) ou encore z = 2x − 2y − 1.
Conclusion : Au voisinage de M0 on pourra confondre la surface S et son plan
tangent et en conséquence, pour les valeurs voisines de (1, 0) par exemple (0.99 , 0.025)
calculer f (0.99 , 0.025) à l’aide de l’expression plus simple 2x − 2y − 1 :
f (0.99, 0.025) ≈ 1 + 2(−0.01) − 2(0.025) = 0.93.
8.6 Application du calcul différentiel au calcul des valeurs
approchées des fonctions
Exemples. 1o Soit un rectangle de hauteur h et de base b. Son aire est mesurée
par la fonction S = f (b, h) = bh. Si la base b varie de db et si la hauteur h varie de
dh, calculons la variation algébrique d’aire δS à l’aide de la différentielle
∂f
∂f
db +
dh = h db + b dh.
∂b
∂h
On peut interpréter sur la figure ci-après dS comme la somme des aires des rectangles hachurés. dS est bien ainsi la partie principale de δS ; le terme complémentaire
db dh mesure l’aire grisée du petit rectangle, négligeable par rapport à dS car
d’ordre 2. Remarquer l’abus de notation db au lieu de δb et dh au lieu de δh.
δS ≈ dS =
b
db
h
dh
75
Exemple de valeurs. b, db, h, dh en mètre, dS, db dh, δS en m2 .
b
db
h
dh
10
0, 1
2 0, 01
dS
db · dh
δS
0, 3
0, 001
0, 301
11 0, 02 3 0, 02 0, 28 0, 0004 0, 2804
15
0, 1
6
0, 1
2, 1
0, 01
2, 11
2o Soit un cylindre de h = 10 m de haut et de r = 5 m de rayon. On augmente h
de 10 cm et l’on diminue r de 1 cm. Calculons la variation de volume :
V = πr 2 h = f (r, h)
∂V
∂V
dV =
dr +
dh
∂r
∂h
= 2π rh dr + π r 2 dh
dh
r
dr
h
En mètre dr = −0.01 m ; dh = 0.1 m, d’où δV ≈ 4.71 m3 .
Remarque. L’accroissement exact δV est égal à dV diminué du volume d’un cylindre creux de hauteur dh et d’épaisseur dr, soit environ 2π r dh dr ≈ 0, 031m3
négligeable par rapport à δV .
8.6.1 Calcul d’erreur
Soit a le résultat de la mesure de la grandeur A. Si α est la valeur exacte de A,
la différence δa = a − α est appelée erreur absolue de la mesure ; elle résulte de
causes diverses : erreurs systématiques ou accidentelles. L’erreur absolue sur a
n’étant pas connue, on doit se contenter d’en rechercher une limite supérieure ∆a
appelée incertitude absolue telle que |δa| ≤ ∆a ; on a donc : a − ∆a ≤ α ≤ a + ∆a
ou encore α = a ± ∆a.
On se rend mieux compte de l’approximation d’une mesure en comparant l’erreur à la grandeur mesurée. On appelle erreur relative le rapport δa/α de l’erreur
absolue à la valeur exacte ; δa et α n’étant pas connues, on doit, là encore, se
contenter d’une limite supérieure appelée incertitude relative que l’on calcule en
remplaçant δa par ∆a et en prenant pour α la valeur approchée a.
Exemple. α = 2.001 ± 0.001 m donc ∆a/α ≈ ∆a/a ≈ 0.001/2 = 5.10−4
L’incertitude relative caractérise la précision de la mesure.
Dans l’exemple précédent, la précision est de 5 dix-millièmes.
On cherche maintenant à calculer l’erreur sur une grandeur X dépendant de plusieurs paramètres A, B, C indépendants les uns des autres :
X = f (A, B, C).
76
On ne connaı̂t en réalité que des valeurs approchées a, b, c et les incertitudes
absolues : ∆a, ∆b, ∆c sur ces valeurs ; une valeur approchée de X est donc
x = f (a, b, c).
A partir de la différentielle de f en (a, b, c)
dx = fa0 da + fb0 db + fc0 dc
soit en valeur absolue
|dx| ≤ |fa0 | |da| + |fb0 | |db| + |fc0 | |dc| ≤ |fa0 | ∆a + |fb0 | ∆b + |fc0 | ∆c
on obtient l’incertitude absolue sur x
∆x = |fa0 | ∆a + |fb0 | ∆b + |fc0 | ∆c,
puis l’incertitude relative sur x
∆x
∆a
∆b
∆c
= |fa0 |
+ |fb0 |
+ |fc0 |
.
|x|
|x|
|x|
|x|
p
Exemple. Connaissant la formule T = 2π `/g donnant la période du pendule
simple, on peut calculer l’accélération de la pesanteur
g = γ(`, T ) = 4π 2 `/T 2 dont la différentielle est :
dg =
∂γ
4π 2
8π 2 `
∂γ
d` +
dT = 2 d` − 3 dT
∂`
∂T
T
T
d’où l’incertitude absolue
4π 2
∆g = 2
T
2`
∆` + ∆T
T
et l’incertitude relative
∆`
∆T
∆g
=
+2
g
`
T
−4
avec ` = 1 m, ∆` = 5.10 m, T = 2 s, ∆T = 0.01 s, on obtient
∆g
= 0.0105 = 1.05 %
g
et
g = π 2 = 9.87 ms−2 ,
ce qui donne une incertitude absolue de ∆g = 0.10 et g = 9.87 ± 0.1 ms−2 .
Remarque. On trouve assez fréquemment en Physique des fonctions positives à
variables séparables f (a, b, c) = ϕ1 (a)ϕ2 (b)ϕ3 (c).
La fonction logarithme permet alors de simplifier le calcul de l’incertitude relative
ln f = ln ϕ1 + ln ϕ2 + ln ϕ3 , d’où en différentiant
dϕ1 dϕ2 dϕ3
df
=
+
+
f
ϕ1
ϕ2
ϕ3
et si ϕ1 , ϕ2 , ϕ3 > 0, alors on a
∆f
∆ϕ1 ∆ϕ2 ∆ϕ3
=
+
+
.
f
ϕ1
ϕ2
ϕ3
77
8.7 Formes différentielles
Soit U un ouvert de R2 , A et B deux fonctions de U dans R. L’expression
ω = Adx + Bdy
s’appelle une forme différentielle sur U.
Définition. Une forme différentielle ω sur U qui est la différentielle d’une fonction f (i.e ω = df ) est une forme différentielle exacte sur U et f est une primitive
de ω.
Exemple. La forme différentielle ω = xdx + ydy est exacte sur U = R2 et
1
f : (x, y) 7−→ f (c, y) = (x2 + y 2 ) est une primitive de ω.
2
◦ Les formes différentielles ne sont donc pas toujours exactes ; si c’est le cas,
∂f
∂f
A=
et B =
et si de plus A et B sont continûment dérivables (on dit de
∂x
∂y
∂A
∂B
classe C 1 ), on a d’après le théorème de Schwarz
=
.
∂y
∂x
Définition. Si A et B sont C 1 sur U et si
∂A
∂B
=
, on dit que la forme différentielle
∂y
∂x
ω = Adx + Bdy est fermée sur U.
Une forme différentielle de classe C 1 exacte sur U est donc fermée sur U. Qu’en
est-il de la réciproque ?
Le théorème suivant dû à H.P OINCAR É (1854-1912) donne une condition suffisante de réciprocité :
Théorème de Poincaré. Soit U un ouvert de R2 et ω = Adx + Bdy une forme
différentielle de classe C 1 sur U. Si U est étoilé et si ω est fermée sur U, alors ω est
exacte sur U.
Définition. Soit A un point de U ; on dit que U est étoilé par rapport à A si le
segment [AM] appartient à U ∀M ∈ U.
On dit que U est étoilé si et seulement s’il existe A ∈ U tel que U soit étoilé par
rapport à A.
Les boules de Rn , les pavés de Rn , les domaines d’une seule pièce et sans trou
(on dit simplement connexe) du plan R2 sont étoilés.
◦ Exemple de calcul.
Soit la forme différentielle ω = (3x2 + 2y)dx + (2x + 2y)dy sur U = R2 étoilé
par rapport au point O(0,0) :
78
A(x, y) = 3x2 + 2y, B(x, y) = 2x + 2y et A et B sont des fonctions continues,
dérivables et à dérivées continues i.e. C 1 sur R2 .
On vérifie bien la condition d’égalité des dérivées croisées : A0y = 2 = Bx0 sur R2 ,
du théorème de Poincaré : puisque ω est fermée elle est exacte sur R2 .
Intégrons ω c’est-à-dire cherchons f de classe C 2 sur R2 telle que df = ω ; on a
d’abord :
A=
∂f
= 3x2 + 2y
∂x
que l’on intégre par rapport à x : f (x, y) = x3 + 2xy + ϕ(y) où la fonction ϕ est
C 1 et constante par rapport à x ; dérivons par rapport à y et identifions à B :
∂f
= 2x + ϕ0 (y) = 2x + 2y d’où ϕ0 (y) = 2y et ϕ(y) = y 2 + K
∂y
(K ∈ R).
Finalement :
f (x, y) = x3 + 2xy + y 2 + K
(K ∈ R).
• Le théorème de Poincaré, qui s’étend à la dimension trois ou plus est fréquemment
utilisé en physique.
Par exemple, le champ de pesanteur (P, Q, R) ”dérive” d’un potentiel scalaire ;
les conditions d’égalité des dérivées croisées sur ω = P dx + Qdy + Rdz s’écrivent
∂Q
∂P
=
∂y
∂x
∂R
∂Q
=
∂z
∂y
et
∂R
∂P
=
∂x
∂z
On dit que le ”rotationnel” du champ (P, Q, R) est nul.
79
Exercices
8.1. Déterminer le domaine de définition de chacune des fonctions de R2 dans R
définies par :
xy
2
x + y2
x2 + y 2
c. f3 (x, y) = 2
x − y2
a. f1 (x, y) =
b. f2 (x, y) =
x2 + y 2
x
d. f4 (x, y) = ln
x2
y
+ y2 − 1
8.2. Déterminer le domaine de définition de la fonction f : R2 → R définie par
f (x, y) =
sin x − sin y
x−y
et trouver une fonction g égale à f sur Df qui soit continue sur R2 .
p
8.3. Soit la fonction f : R2 → R ; (x, y) 7→ f (x, y) = ln 3 x2 y − y 2.
(a) Déterminer le domaine D de dérivabilité de f et le représenter graphiquement.
(b) Calculer les dérivées partielles et la différentielle de f sur D.
8.4. Pour chacune des fonctions suivantes, calculer fx0 , fy0 et df .
a. f1 (x, y) = Arc tan(x2 y)
r
x
b. f2 (x, y) = xy +
y
8.5. Les formes différentielles suivantes sont-elles exactes ? Si oui les intégrer sur
le domaine convenable :
x dy − y dx
.
a. ω =
y2
b. cos(xy 2 )dx + 2 cos(xy)dy.
8.6. Soit la surface S de E3 d’équation z = x2 − y. Déterminer deux vecteurs
tangents à S non colinéaires en (1, 1, 0) ainsi qu’une équation du plan tangent en
ce point.
8.7. La mesure de deux côtés d’un triangle est 150 m et 200 m à 0,2 m près ; l’angle
intérieur est de 60◦ ± 1◦ . Quelle est l’erreur maximum possible sur le calcul de
l’aire du triangle ?
8.8. Soit x(r, θ) = e2r cos θ et y(r, θ) = e3r sin θ.
∂r ∂r ∂θ
∂θ
Calculer
,
,
et
.
∂x ∂y ∂x
∂y
80
8.9. On veut résoudre l’équation
∂z
∂z
−
= 2.
∂x ∂y
(E)
Pour ce faire, on effectue le changement de variables :
u = x − y ; v = x + y et l’on pose Z(u, v) = z(x(u, v), y(u, v)).
∂Z
= 1 ; en déduire les solutions de (E).
Montrer que
∂u
∂2f
∂2f
8.10. Pour f (x, y) = e cos y calculer ∆f =
+ 2.
∂x2
∂y
x
p
8.11. Soit f (x, y) = 1/ x2 + y 2 + z 2 . Montrer que ∆f = 0.
8.12. (Extrait DeugB A)
Soit f : R3 → R la fonction définie par f (x, y, z) = xy 2 z/3.
(a) Calculer df (x, y, z), puis ∆f /f .
(b) En déduire l’incertitude ∆z/z en fonction de ∆f /f , ∆x/x et ∆y/y.
Application : Un cône de révolution a un volume V = 1789 ± 2 cm3 et pour rayon
r = 10 ± 0, 05 cm. Sachant que le volume du cône est proportionnel à l’aire de sa
base et à sa hauteur et que
π = 3, 14 ± 0, 01, calculer l’incertitude relative ∆h/h sur la mesure de la hauteur
du cône. Donner un encadrement de h.
8.13. (Extrait DeugB A)
(a) Soit la fonction f de R3 dans R définie par l’équation
f (x, y, z) =
z−x
.
y−x
(i) Déterminer le domaine de définition de f et le représenter dans un repère
orthonormé.
(ii) Calculer la différentielle de f en (x, y, z).
(b) Pour calculer la densité D d’un liquide L, on pèse successivement un flacon
vide, puis rempli d’eau et enfin rempli du liquide L. On obtient les mesures
suivantes en grammes et dans l’ordre :
x = 12.5 ± 0.1
y = 17.5 ± 0.1
z = 16.3 ± 0.1
Donner un encadrement de la valeur de D.
81
8.14. (Extrait SV105)
a. Soit la fonction f : R2 → R définie par :
x2
f (x, y) =
y
a 1. Déterminer le domaine de définition Df de f et le représenter graphiquement.
a 2. Calculer la différentielle de f .
b. La puissance dissipée dans une résistance électrique est P = E 2 /R avec
E = 220 ± 5 V et R = 8 ± 0.2 Ω
Déterminer à l’aide du calcul différentiel un encadrement de la valeur de P .
Si E décroit de 5V et R de 0.2Ω, quelle est l’incidence sur P ?
8.15. (Extrait SV105)
a. Soit la fonction f : R3 → R définie par :
x3
f (x, y, z) = K 2
(K ∈ R)
yz
a 1. Déterminer le domaine de définition Df de f .
a 2. Calculer la différentielle de f .
∆f
a 3. Calculer l’incertitude relative
.
|f |
b. D’après la troisième loi de Képler la période T et le demi-grand axe de mesure
a de l’orbite d’une planète autour du Soleil de masse M sont reliés par la relation
4π 2
T2
=
.
a3
GM
Déterminer la masse M du Soleil, puis l’incertitude relative et l’incertitude absolue sur M.
c. Application numérique :
On donne T = 365.25636567 ± 10−8 Jours, a = (1.4960 ± 0.0003)1011 m et G =
(6.673 ± 0.005)10−11 m3 kg −1 s−2 . Donner un encadrement de la valeur de M.
G est une constante universelle qui s’exprime en fonction du mètre, du kilogramme et de la seconde.
8.16. (Extrait SV105)
Soit la fonction f de R3 dans R définie par
p
f (x, y, z) = (x3 ) y 2 + z 2 .
a. Déterminer le domaine de définition Df de f .
b. Lorsqu’elles sont définies, calculer les dérivées partielles ainsi que la différentielle
df (x, y, z) de f au point (x, y, z).
c. On donne a = 2 ± 0.1,
b = 3 ± 0.1,
c = 4 ± 0.1.
Calculer f (2, 3, 4) ainsi que df (2, 3, 4). En déduire un encadrement de f (a, b, c).
d. A l’aide de la différentielle df (2, 3, 4) calculer la valeur approximative
√
qu’elle donne du nombre :
(1.983 ) 3.012 + 3.972 .
◦ • ◦ • ◦ • ◦
82