La qualité du lait dans les fermes biologiques-Tikofsky 2009

Transcription

La qualité du lait dans les fermes biologiques-Tikofsky 2009
La qualité du lait dans les fermes biologiques
Linda L. Tikofsky, D.M.V.
Quality Milk Production Services
Cornell University
L’agriculture biologique est un système de gestion qui exige l’intégration des pratiques
culturales, biologiques et mécaniques qui favorisent le recyclage des ressources, la promotion de
l’équilibre écologique et la protection de la biodiversité. (National Organic Program, 2002).
L’utilisation d’antibiotiques, d’hormones, de stimulateurs de croissance et de la plupart des
médicaments synthétiques est interdite chez les animaux qui produisent des aliments ou des
fibres. Toutefois, il n’est pas permis de surseoir à ces traitements uniquement pour protéger la
désignation « biologique » de l’animal. La priorité doit être accordée au bien-être de l’animal.
Cependant, si l’animal reçoit une substance interdite, il doit être définitivement exclu de la
production biologique.
Ailleurs dans le monde, les règles régissant la production biologique diffèrent de celles des
États-Unis. L’élevage biologique au sein de l’Union européenne (UE) est régi par le Règlement
1804/99 de l’UE qui a pris effet en 2000. Chacun des États membres de l’UE peut imposer des
règles internes plus sévères. Les règlements sur la production biologique de l’UE stipulent que
les animaux des élevages biologiques doivent disposer d’un espace vital plus vaste, d’un accès
périodique au grand air et recevoir un régime à forte teneur en fourrage, bien qu’une disposition
en vigueur jusqu’en 2008 permette l’apport d’aliments de sources non biologiques jusqu’à
concurrence de 5 %. L’utilisation d’antibiotiques à des fins prophylactiques (p. ex. le traitement
généralisé des vaches taries) est interdite, mais les antibiotiques peuvent servir à traiter les
maladies dans la mesure où les délais d’attente après le traitement sont prolongés (habituellement
du double par rapport aux recommandations sur l’étiquette).
En 2006, le Canada a adopté ses propres normes biologiques (CAN/CGSB-32.310-2006); avant
cela, la plupart des organismes de certification canadiens adoptaient les normes des États-Unis en
matière de production biologique. La norme canadienne est un amalgame des règlements
européens et américains. Les antibiotiques sont permis seulement en cas d’urgence. Le lait doit
être exclu, mais l’animal conserve sa désignation biologique.
La situation en Europe
Tout comme aux États-Unis, une des principales préoccupations des producteurs laitiers,
biologiques ou non, est la mammite bovine. Peu de documents ont été publiés sur la qualité du
lait et la santé du pis dans les élevages laitiers biologiques aux États-Unis. Les renseignements
sont plus abondants dans le contexte de l’Union européenne, mais les normes biologiques de
l’UE sont différentes de celles des États-Unis dans la mesure où l’on permet l’usage restreint
d’antibiotiques associés à une période de retrait prolongé.
Le tableau de l’annexe 1 résume plusieurs études sur la qualité du lait et la santé du pis dans
certaines fermes biologiques européennes. Le comptage des cellules somatiques du lait prélevé
dans le réservoir des exploitations laitières biologiques ne diffère pas énormément de celui des
fermes classiques (ou non biologiques). Bennedsgaard et ses collaborateurs ont évalué la santé
VM 704, L. L. Tikofsky
1
des vaches et la qualité du lait dans des fermes danoises non biologiques, des fermes biologiques
établies de longue date (avant 1990), des fermes biologiques établies depuis un certain temps
(conversion avant 1995) et des fermes récemment converties à l’élevage biologique et ont conclu
que la qualité du lait s’améliorait de façon proportionnelle à la durée de la période de production
biologique du troupeau. Nauta et ses collaborateurs ont regroupé des fermes aux Pays-Bas selon
une classification semblable et évalué la santé et la qualité du lait chez les primipares.
Contrairement aux résultats de l’étude danoise, les génisses primipares des fermes biologiques
établies depuis longtemps avaient une qualité de lait relativement inférieure à celle des fermes de
conversion récente ou en production classique.
De nombreuses recherches indiquent que les traitements pour la mammite clinique sont moins
fréquents sur les fermes laitières biologiques par rapport aux exploitations classiques; cependant,
la plupart des études ont évalué les taux de mammite clinique en fonction des traitements
consignés dans les registres par les producteurs laitiers. Un grand nombre de pays européens
exigent que tous les traitements antibiotiques soient consignés dans une base de données
nationale, mais aucun pays, à ce jour, n’exige la consignation des traitements de nature
phytothérapique et homéopathique. Ces derniers traitements prédominent dans les fermes
biologiques (Weller et Cooper, 1996) et la fréquence des mammites cliniques pourrait être
sous-estimée dans les fermes biologiques.
Qualité du lait dans les troupeaux biologiques aux États-Unis
Aucune étude officielle ne s’est penchée sur la qualité du lait dans les fermes laitières
biologiques aux États-Unis, bien que quelques auteurs aient inclus des données limitées
concernant la qualité du lait. Tikofsky et ses collaborateurs, dans le cadre d’une étude sur la
susceptibilité antimicrobienne de Staphylococcus aureus, rapporte que le comptage des cellules
somatiques du lait en vrac dans les fermes biologiques de l’État de New York se chiffrait à
273 000 cellules/ml tandis qu’elle atteignait en moyenne 559 300 cellules/ml dans le lait prélevé
dans le réservoir d’un troupeau en conduite d’élevage classique de taille semblable, visé par
l’étude.
Dans le cadre d’une enquête sur les pratiques de gestion et l’usage d’antibiotiques, Zwald et ses
collaborateurs ont examiné 99 fermes classiques et 32 fermes biologiques, les catégorisant en
fonction de six niveaux de comptage des cellules somatiques. Quatre-vingt-cinq pour cent des
fermes biologiques présentaient un CCS du lait prélevé dans le réservoir inférieur à
400 000 cellules/ml; 53 % avait un CCS du lait prélevé dans le réservoir inférieur à
300 000 cellules/ml.
Niveau de CCS
(cellules/ml)
Fermes classiques
(nombre)
%
<100 000
100 000 – 199 000
200 000 – 299 000
300 000 – 399 999
400 000 – 499 000
1
30
42
18
6
1,0
30,3
42,4
18,2
6,1
VM 704, L. L. Tikofsky
Fermes
biologiques
(nombre)
1
2
14
10
5
%
3,1
6,3
43,8
31,3
15,6
2
> 500 000
2
2,0
0
0
Récemment, une importante ferme laitière privée de l’ouest des États-Unis a analysé le résultat
du CCS du lait prélevé dans le réservoir (n=3 359 échantillons de lait prélevé dans le réservoir)
sur deux ans dans son troupeau de 4 000 vaches holsteins. En moyenne, la numération du lait en
vrac était de 270 525 cellules/ml (intervalle de 100 000 à 964 000 cellules/ml;
médiane =100 000 cellules/ml) (Velez et Melendez, 2006).
Enfin, une étude a comparé la qualité du lait de quatre transformateurs différents de l’État du
Maine sur une période de dix mois. La moyenne du CCS des fermes laitières livrant leur lait à
des transformateurs biologiques était de 283 000 cellules/ml; la moyenne pour les fermes livrant
leur lait aux transformateurs non biologiques était de 207 000 cellules/ml, 313 000 cellules/ml,
322 000 cellules/ml et 416 000 cellules/ml (Kersbergen et Schivera, 2006).
En outre, l’étude précédente comprenait un sondage de 46 fermes biologiques. Soixante-sept
pour cent des producteurs biologiques utilisaient périodiquement le test californien de dépistage
des mammites (CMT) afin d’évaluer la qualité du lait; la majorité de ces producteurs n’utilisaient
pas le CMT lorsqu’ils étaient en production non biologique. Onze pour cent des fermes
participent régulièrement à un programme de comptage des cellules d’une association
d’amélioration des troupeaux laitiers.
Lorsqu’un quartier préoccupant a été décelé, 60 % des fermes pratiquent une traite séparée avec
une trayeuse à quartiers et éliminent le lait. Quatre-vingt-cinq pour cent des fermes en gestion
biologique ont recours à des bains de trayons à base d’iode, avant et après la traite et 90 % se
servent d’essuie-tout individuels.
Gestion de la santé du pis sur les fermes laitières biologiques
Depuis des années, on fait la promotion du plan en dix points du National Mastitis Council pour
aider les producteurs à obtenir et à maintenir une qualité de lait élevée. Cependant, les méthodes
d’élevage biologique aux États-Unis interdisent l’utilisation de traitements antibiotiques pour les
vaches taries ainsi que tout traitement antibiotique en cours de lactation, quelles que soient les
circonstances. Conséquemment, une surveillance intensive de la santé du pis pour permettre le
diagnostic précoce de nouveaux cas de mammite ainsi que l’adaptation proactive de stratégies de
gestions sont essentielles pour les fermes biologiques. On trouve ci-dessous une adaptation du
plan du NMC pour la formation des producteurs.
Huit étapes pour une meilleure santé du pis
1.
FIXER DES OBJECTIFS PROPRES À LA FERME EN MATIÈRE DE SANTÉ DU PIS
Ces objectifs varieront d’une ferme à l’autre, selon les enjeux de chaque exploitation, de
l’organisme de certification et des principes du producteur. Voici des objectifs réalistes et
réalisables pour la majorité des entreprises :
 Streptococcus agalactiae - 0 % et Mycoplasma - 0 %
 Staphylococcus aureus <5 %
VM 704, L. L. Tikofsky
3




Comptage des cellules somatiques du réservoir à lait < 200 000 cellules/ml
Nombre de nouvelles infections chaque mois inférieur à 5 %
Infections chroniques de 5 à7 % ou moins
Mammite clinique de 2 à 3 %
Si un troupeau prévu pour la conversion à la production laitière biologique montre des signes de
mammite contagieuse, tous les efforts devraient être déployés pour diagnostiquer, traiter ou
réformer les animaux infectés avant la conversion. Le Streptococcus agalactiae est une forme de
mammite hautement contagieuse : la présence de seulement quelques vaches atteintes d’une
infection de Streptococcus agalactiae dans un petit troupeau (<30 vaches) peuvent pousser le
comptage CCS du lait prélevé dans le réservoir au-delà de la limite permise par la
réglementation. Comme l’infection au Stre ag répond bien au traitement antibiotique, il est
préférable de l’éliminer avant de commencer la livraison de lait biologique.
Dans les troupeaux biologiques établis, la mammite contagieuse peut créer des problèmes plus
que banals, mais des efforts soutenus et une surveillance constante peuvent en venir à bout.
Les régimes thérapeutiques parallèles donnent habituellement des résultats décevants et sont
souvent peu pratiques pour une grande quantité d’animaux. Voici une suggestion de plan de
gestion :
o Soumettre toutes les vaches en lactation du troupeau à des cultures d’échantillon de lait
composite;
o identifier (à l’aide de bracelets de couleur) toutes les vaches infectées par la mammite
contagieuse (Streptococcus agalactiae, Staphylococcus aureus, Mycoplasma);
o réformer les animaux en lactation plus âgés, ceux dont le CCS est élevé, les vaches non
saillies ou les animaux atteints d’infection clinique;
o stabulation en logettes — regrouper les vaches atteintes de mammite contagieuse dans
des enclos séparés et TOUJOURS traire ce groupe en dernier;
o stabulation entravée/cornadis (carcans) – confiner les vaches atteintes de mammite
contagieuse dans une aire distincte de l’étable et TOUJOURS traire celles-ci en dernier
ou à l’aide d’une unité réservée aux vaches atteintes de mammite contagieuse;
o prévenir la transmission pendant la traite : porter des gants, BIEN appliquer le bain de
trayons (1 % d’iode recommandé), se servir d’essuie-tout à usage unique (pas de
serviettes ou d’éponges communes);
o pratiquer continuellement des cultures de chaque vache tarie et génisse et ségréguer celles
dont le résultat est positif;
o soumettre les vaches au CMT chaque semaine et exclure le lait du réservoir si le résultat
est élevé;
o lutter contre les mouches dans l’étable;
o s’assurer d’inclure dans la ration, à tous les stades de lactation, une quantité suffisante de
sélénium, de vitamine E et des autres oligo-éléments sous une forme biodisponible.
2.
METTRE EN OEUVRE UN PLAN PERMETTANT LA SURVEILLANCE PÉRIODIQUE DE LA SANTÉ DU
PIS
VM 704, L. L. Tikofsky
4
La méthode la plus facile consiste en un comptage des cellules périodique dans le cadre d’un
programme d’une association d’amélioration des troupeaux laitiers, mais il est également
possible d’atteindre les objectifs en utilisant une tasse filtre, l’observation visuelle et le CMT.
Il faut évaluer la santé du pis de tous les animaux en lactation une fois par mois. Les vaches qui
obtiennent un CCS élevé lors de deux évaluations consécutives du contrôle laitier ou de deux
CMT mensuels consécutifs devraient être soumis à une culture pour qu’elles soient traites en
dernier, surveillées et soumises à un traitement parallèle ou encore réformé. Les cas de mammite
clinique devraient également être soumis à une culture afin de pouvoir intervenir dans le milieu.
Il est conseillé de rencontrer deux fois par année votre agent de certification, votre vétérinaire et
votre nutritionniste pour évaluer le programme actuel de lutte contre la mammite et de réévaluer
les objectifs en matière de santé du pis.
3. MÉTHODES PRESCRITES POUR LA TRAITE
Il importe d’établir une bonne méthode de traite que tous les préposés appliqueront d’une traite à
l’autre. Les vaches recherchent la constance et l’utilisation d’une méthode uniforme aura pour
effet de réduire la tension et d’améliorer l’éjection du lait et la vidange du pis. Les composantes
d’une bonne méthode de traite sont les suivantes :
Lavage du pis/bain de trayons avant la traite : Les trayons doivent être lavés ou baignés
au préalable, puis nettoyés et asséchés avant la pose des unités. Un essuie-tout jetable doit
être utilisé pour chaque vache. N’utilisez pas le même essuie-tout d’une vache à l’autre
pour éviter de propager la mammite.
Premiers jets : L’élimination de 3 à 4 jets de lait de chaque trayon avant la traite aide à
stimuler le réflexe d’éjection du lait. Les vaches évacueront le lait plus rapidement et le
temps d’utilisation de la trayeuse sera diminué, réduisant ainsi au minimum les
dommages causés à l’extrémité du pis. La prise des premiers jets permet également
d’effectuer un contrôle de la mammite clinique plus rapidement tout en éliminant le lait
de l’extrémité du trayon qui contient une concentration plus élevée de bactéries et de
cellules somatiques. Les premiers jets devraient être recueillis dans une tasse filtre ou
envoyés au dalot pour éviter de contaminer la litière et les mains.
Gants : Il faut porter des gants (en nitrile ou en latex) pendant la traite pour réduire le
risque de contamination. Il est plus facile de désinfecter les mains gantées que la peau
nue en passant d’une vache à l’autre ou lorsqu’elles sont contaminées par le lait ou le
fumier.
Ordre de la traite : Les vaches atteintes de mammite contagieuse devraient être
identifiées en permanence (avec un bracelet) et être traites en dernier ou avec une unité
réservée à cette fin, à chaque traite.
Surtraite/égouttage en fin de traite : Il n’est pas nécessaire d’évacuer le lait du pis de la
vache jusqu’à la dernière goutte. Le fait de laisser en place les unités lorsque
l’écoulement du lait est faible ou de tirer sur les unités risque d’endommager l’extrémité
des trayons : on risquerait d’éliminer la kératine qui se forme à l’extrémité du trayon et
qui a certaines propriétés antibactériennes naturelles. En outre, la traite excessive peut
entraîner l’éversion du sphincter du trayon et la formation de tissus cicatriciels qui
peuvent engendrer de nombreux problèmes. Le sphincter du trayon et sa capacité de se
VM 704, L. L. Tikofsky
5
refermer entre les traites et la première ligne de défense contre la mammite et il importe
que l’extrémité du trayon reste saine. Les cicatrices à l’extrémité des trayons risquent
d’être colonisées par S. aureus et d’augmenter le risque de mammite.
Le bain de trayons après la traite : Le choix et l’application d’un bain de trayons après la
traite sont de première importance pour les troupeaux atteints de mammite contagieuse.
Si par mégarde la vache est traite après une vache infectée, les bactéries contagieuses
sont déposées sur la pellicule de lait à la surface du trayon. Là, elles se multiplient et
remontent dans l’extrémité du trayon pour déclencher une infection. Le fait de plonger les
deux tiers ou plus de chaque trayon dans un liquide de bain de trayons après la traite
permet de tuer les bactéries avant qu’elles n’aient la possibilité de se multiplier et de se
disperser sur la pellicule de lait. Les bains de trayon devraient contenir un minimum de
10 % de produits adoucissants pour la peau afin d’assurer la santé du pis et de prévenir
l’irritation et l’apparition de fissures.
4. ENTRETIEN PÉRIODIQUE DE L’ÉQUIPEMENT DE TRAITE
Le système de traite mécanique devrait être évalué par une personne qualifiée au moins deux fois
par année et soumis à un essai dynamique pendant qu’il est en marche. Les fluctuations de
pression négative attribuables au glissement des manchons, à l’engorgement, à une réserve
inadéquate de puissance de succion et au mauvais fonctionnement des régulateurs risquent de
faire remonter les bactéries dans l’extrémité du trayon pendant la traite et d’augmenter le risque
de mammite.
Les manchons de caoutchouc devraient être remplacés après avoir servi à traire 1 200 vaches ou
à tous les 60 jours, selon la première occurrence. Le caoutchouc qui sert plus longtemps se
détériore et se couvre de fissures et de plis microscopiques qui retiennent les bactéries, même
après le cycle de lavage (voir la figure ci-dessous). Les autres pièces en caoutchouc (tuyaux,
tubes, joints d’étanchéité) devraient être inspectées périodiquement et remplacées selon l’usure.
A.
B.
A. Surface d’un nouveau manchon en caoutchouc
B. Surface d’un manchon après la traite de 1 200 vaches (avec la permission de dc engineering uk)
VM 704, L. L. Tikofsky
6
5. ÉVALUATION DE LA GESTION DES VACHES TARIES
Même si le traitement antibiotique des vaches taries n’est pas permis en fonction d’une
production laitière biologique, cette période est néanmoins propice à l’amélioration de la santé
du pis et au renouvellement des tissus de lactation. L’apport en énergie devrait être diminué une
semaine avant le tarissement pour permettre une réduction de la production. Au moment du
tarissement, le pis devrait être évacué une dernière fois et l’extrémité des trayons soumis à un
bain après la traite, deux fois par jour pendant deux semaines après le tarissement. Le bouchon
de kératine met environ deux semaines à sceller l’extrémité du trayon et à prévenir l’apparition
de nouvelles infections pendant la période de tarissement. Jusqu’à ce que ces bouchons soient
formés, nous devons veiller à désinfecter l’extrémité des trayons et à éviter la contamination en
assurant à la vache un environnement propre et sec. À mesure que la vache se tarit, les sécrétions
mammaires qui tuent les bactéries se transforment (augmentation de la lactoferrine et de l’alphalactoglobuline, augmentation du niveau d’anticorps) et aide à régler les infections existantes.
En outre, la nutrition de la vache tarie joue un rôle important, en particulier lorsqu’elle approche
de la période de mise bas. Pendant cette période, les concentrations de sélénium et de vitamine E
prennent de l’importance pour aider le système immunitaire et reproducteur et assurer la
naissance d’un veau vigoureux. Le Conseil national des recherches recommande d’administrer
par tête par jour, 0,3 ppm de sélénium et au moins 1 500 UI de vitamine E. Pour assurer une
bonne santé du pis, on recommande des suppléments de sélénium et de vitamine E tout au long
de la lactation.
Un environnement propre et confortable contribue à la prévention de nouvelles infections
environnementales et à éviter les blessures aux trayons. Lorsque les vaches sont logées à
l’intérieur pendant l’hiver, les stalles devraient être curées fréquemment et garnies d’une litière
propre et sèche, en quantité suffisante. En général, en été, le pâturage est préférable pour les
vaches taries en prenant soin de clôturer les zones humides autour des étangs et des ruisseaux
pour éviter qu’elles ne se transforment en des aires de repos boueuses.
6. METTRE EN PLACE DE LIGNES DIRECTRICES POUR LA BIOSÉCURITÉ ET LA RÉFORME
La venue de nouveaux animaux dans un troupeau établi risque d’introduire nombre de maladies
(la diarrhée virale des bovins (BVD) et la paratuberculose) en plus de la mammite.
Un investissement modeste au départ pour s’assurer de la bonne santé des vaches introduites
dans votre troupeau peut vous économiser des milliers de dollars en lutte contre la maladie.
Comme il en a été question auparavant, il importe de mettre en culture de nombreux échantillons
du réservoir à lait, tant pour le contrôle de la mammite habituelle que pour les Mycoplasma.
Si cela n’est pas possible, les nouvelles arrivantes devraient être traites séparément et les
échantillons de lait mis en culture aussi rapidement que possible après leur intégration à la ferme.
Bien qu’en général l’on considère l’arrivée des génisses comme sécuritaire, ces dernières
peuvent également être porteuses d’infection et la ségrégation ainsi que les protocoles de
contrôle sont justifiés.
À mesure que l’on identifie les vaches porteuses de mammite contagieuse, il importe d’utiliser
des méthodes de réforme stratégiques pour réduire progressivement l’incidence de maladie dans
VM 704, L. L. Tikofsky
7
votre troupeau. Trayez ces vaches séparément. Placez les vaches atteintes de mammite
contagieuse sur la liste des animaux exclus de la reproduction. Réformez dès que possible les
vaches qui présentent constamment un comptage de cellules élevé. Les vaches dont le pis
présente une abondance de cicatrices et d’abcès devraient être réformées aussi rapidement que
possible. Dans les troupeaux à forte prévalence de vaches porteuses de Staphylococcus aureus,
où il importe de réduire rapidement le comptage de cellules dans le lait prélevé du réservoir, les
quartiers infectés devraient être identifiés par mise sous culture et taris pour éviter que le lait ne
soit ajouté au réservoir ou ne contamine l’approvisionnement en aliment.
7. ENVIRONNEMENT
Un environnement propre, sec et confortable est essentiel à la lutte efficace contre la mammite.
Des stalles de la bonne taille, bien entretenues et bien approvisionnées en litière permettront
d’éviter les lésions aux trayons qui peuvent provoquer une mammite de type S. aureus.
Les vaches atteintes de mammite contagieuse devraient être ségréguées dans une section de
l’étable, de manière à ce que le lait infecté qui pourrait couler sur la litière ne se transforme pas
en source de problèmes éventuels pour les vaches saines. Comme il est reconnu que les mouches
peuvent propager la mammite, tout particulièrement S. aureus et A. pyogenes, la lutte efficace
contre les mouches est essentielle à la prévention de la mammite.
8. LES JEUNES ANIMAUX ET LES SUJETS DE REMPLACEMENT
Les animaux de remplacement représentent l’avenir du troupeau et sont des éléments clés dans le
maintien d’un comptage de cellules somatiques bas du lait prélevé dans le réservoir dans les
troupeaux qui luttent contre la mammite contagieuse. En gardant ce groupe exempt de
contamination et en santé, l’avenir financier de la ferme est assuré.
La mammite contagieuse peut se propager aux jeunes animaux de deux façons lorsque les veaux
reçoivent du lait entier. Les bactéries Staphylococcus aureus et Streptococcus agalactiae dans le
lait peuvent vivre dans les amygdales et d’autres tissus immunitaires de la bouche pendant une
période pouvant atteindre deux semaines après le sevrage. Si les veaux sont logés ensemble
pendant cette période et pratiquent l’allaitement croisé, les bactéries de la mammite contagieuse
peuvent être introduites dans le pis juvénile et éventuellement, la génisse peut mettre bas avec la
mammite contagieuse. En outre, si l’on permet aux veaux d’errer dans l’étable, ils peuvent téter
une vache atteinte de mammite contagieuse puis une vache non infectée, propageant ainsi la
maladie. Même dans les troupeaux qui ne présentent pas de problème d’allaitement croisé, les
mouches qui se nourrissent dans les seaux de lait, puis sur la peau et les poils peuvent également
propager la bactérie de la mammite contagieuse au pis juvénile. Encore une fois, la lutte contre
les mouches est importante.
Les troupeaux éprouvant des problèmes de mammite contagieuse et où l’on donne à boire le lait
non commercialisable devraient adopter un certain nombre de mesures préventives. Les veaux
devraient être séparés pendant qu’ils se nourrissent au lait et pour deux semaines après le
sevrage. La meilleure façon de faire est de placer les veaux dans des logettes niches, mais on
peut aussi obtenir le même résultat en les attachant à distance l’un de l’autre. Assurer une bonne
répression des mouches pendant les mois d’été. Si possible, pasteuriser le lait avant de le donner
VM 704, L. L. Tikofsky
8
aux veaux. Même si cela ne stérilise pas le lait, la méthode peut réduire radicalement le nombre
d’organismes infectieux. Dans les troupeaux atteints d’un problème manifeste de mammite
contagieuse, soumettre les génisses primipares à une culture à mesure qu’elles mettent bas. Cela
vous permet de repérer tôt les vaches infectées et de les ségréguer. Les méthodes thérapeutiques
parallèles qui portent sur le renforcement du système immunitaire peuvent être plus efficaces si
elles sont mises en pratique tôt.
VM 704, L. L. Tikofsky
9
Références
Bennedsgaard, T.W., S.M. Thamsborg, M. Vaarst et C. Enevoldsen. 2003. « Eleven years of
organic production in Denmark: herd health and production related to time of conversion and
compared to conventional production », Livestock Prod Sci. 80: 121-131.
Busato, A., P. Traschel, M. Schallibaum et J. W. Blum. 2000. « Udder health and risk factors for
subclinical mastitis in organic dairy farms in Switzerland », Prev Vet Med. 44: 205-220.
Ellis, K.A., G. T. Innocent, M. Mihm, P. Cripps, W. G. McLean, C. V. Howard et D. GroveWhite. 2007. « Dairy cow cleanliness and milk quality on organic and conventional farms in the
UK », J Dairy Res. (publication électronique avant l’édition papier): 1-9.
Hamilton, C., I. Hansson, T. Ekman, U. Emmanuelson et K Forslund. 2002. « Health of cows,
calves and youngstock on 26 organic dairy herds in Sweden », Vet Rec. 150: 503-508.
Hardeng, F. et V. L. Edge. 2001. « Mastitis, ketosis, and milk fever in 31 organic and 93
conventional Norwegian dairy herds », J. Dairy Sci. 84: 2673-2679.
Hoerning, B., C. Simantke et E. Aubel. 2005. Investigations on dairy welfare and performance
on German organic farms. Communication présentée dans le cadre du congrès scientifique
international sur l’agriculture biologique Researching Sustainable Systems à Adelaide, en
Australie. (http://orgprints.org/4371/)
Hovi, M. et S. Roderick. 2000. « Mastitis and mastitis control strategies in organic milk », Cattle
Pract. 8: 259-264.
Kersbergen, R. et D. Schivera. 2005. « Organic Dairy Farming and Milk Quality », Hoard’s
Dairyman.
Nauta, W.J., T. Baars et H. Bovenhuis. 2006. « Converting to organic dairy farming:
Consequences for production, somatic cell scores and calving interval of first parity Holstein
cows », Livestock Prod Sci. 99: 185-195.
Roesch, M., M. G. Doherr, W. Schären, M. Schällibaum et J.W. Blum. 2006. « Subclinical
mastitis in dairy cows in Swiss organic and conventional production systems », J. Dairy Res.
74:86-92.
Tikofsky, L. L., J. W. Barlow, C. Santisteban et Y. H. Schukken. 2003. « A comparison of
antimicrobial susceptibility patterns for Staphylococcus aureus in organic and conventional dairy
herds », Microb Drug Resist. 9 Suppl 1: S39-45.
Toledo, P., A. Andren et L. Björck. 2002. « Composition of raw milk from sustainable
production systems », Int Dairy J. 12:75-80.
VM 704, L. L. Tikofsky
10
Velez, J. S. et P. Melendez. 2006. Bulk tank linear score somatic cell count dynamics in an
organic dairy farm in Colorado from 2004 to 2005. Proc 1st IFOAM Intl Conf Animals in
Organic Prod., St. Paul, MN. 200-202.
Weller, R.F. et P. J. Bowling. 2000. « Health status of dairy farms in organic farming », Vet Rec.
146: 80-81.
Weller, R.F. and A. Cooper. 1996. « Health status of dairy herds converting from conventional to
organic dairy farming », Vet Rec. 139:141-142.
Zwald. A.G., P. L. Ruegg, J. B. Kaneene, L. D. Warnick, S. J. Wells, C. Fossler et L. W. Halbert.
2004. « Management practices and reported antimicrobial usage on conventional and organic
dairy farms. », J Dairy Sci. 87: 191-201.
VM 704, L. L. Tikofsky
11
Annexe 1 : Résumé des études européennes sur la qualité du lait dans les fermes laitières
ANNÉE
1995
NOMBRE DE TROUPEAUX
BIOLOGIQUE
NON BIOLOGIQUE
11
1997
152
1998
26
1998
NOMBRE DE VACHES
BIO
NON BIO
10
1907
LAIT RÉSERVOIR CELL./ML
MAMMITE CLINIQUE
BIO
NON BIO
BIO
NON BIO
Année 1 :
Année 1 :
270 700
0,40/AC
Année
Année 2 :
2 : 0,46/AC
299 000
86 000
0,09/AC
Données nationales
250 000
135 000
167 000
0,35/AC
0,37/AC
84 000
0,36/AC (global)
0,37/AC
(lactation)
0,28/AC (taries)
0,49/AC (global)
0,54/AC
(lactation)
0,09/AC (taries)
Prévalence élevée de
mammite subclinique dans
les fermes alpines; nombre
de traitements pour la
mammite équivalent aux
fermes non biologiques
Aucune preuve indiquant
que les vaches issues de
troupeaux biologiques sont
plus susceptibles à la
maladie
La fréquence des
traitements pour la mammite
clinique était la même pour
les troupeaux biologiques et
non biologiques
1999
16
2000
31
2001
31
93
264 000
246 000
moins élevée
plus élevée
Moins de traitements pour la
mammite que les fermes
non biologiques
2001
29 bio longue date (LD)
35 bio certain temps
(CT)
18 nouvellement bio
(NB)
99
270 000 (LB)
320 000 (CT)
330 000 (NB)
310 000
0,33/ AC (LD)
0,50/AC (CT)
0,46/AC (NB)
,58/AC
Plus le troupeau est en
production biologique depuis
longtemps, meilleur est le
comptage des cellules.
2002
325 nouvellement bio
(NB)
42 bio de longue
date (LD)
(échantillons
vaches) 70794
(NB) 2 639 (LD)
(échantillons
vaches)
63 000
VM 704, L. L. Tikofsky
7
0,15/AC
CONCLUSIONS
Petit : 175 000 Petit : 205 000
Grand :
Grand :
198 000
186 000
966
19 107 (NB)
2 639 (LD)
115 058
Plus le troupeau est en régie
bio depuis longtemps, plus
le comptage de cellules
sommatiques est élevé.
12