1 Université Paris V – Cochin - Hôtel-Dieu Diplôme

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1 Université Paris V – Cochin - Hôtel-Dieu Diplôme
Université Paris V – Cochin - Hôtel-Dieu
Diplôme Universitaire de Formateur à l'Enseignement de la
Médecine sur Simulateur
Projet pédagogique de formation à la Médecine de Catastrophe par la simulation au
SAMU 77
Centre Hospitalier Marc Jacquet Melun
Mémoire du Diplôme Universitaire de
VERNET Jean-Pierre (PH SAMU 77-SMUR Melun - Centre Hospitalier Marc Jacquet)
Et de GUICHARD Agnès (IADE SAMU-SMUR 77 - Centre Hospitalier Marc Jacquet)
Année Universitaire 2015-2016
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Mémoire DU Formateur { l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur
Vernet / Guichard
SOMMAIRE
I - INTRODUCTION
p3
II - MEDECINE DE CATASTROPHE
1 Création et évolution du concept de Médecine de Catastrophe
p3
2 Enseignement de la Médecine de Catastrophe
p4
III - LA SIMULATION
1 La simulation en dehors de la santé
p6
2 La simulation en santé
a) Définition
b) Historique
c) État des lieux dans et hors nos frontières
d) HAS et DPC
p6
p6
p6
p7
p8
3 Les différentes techniques en simulation
p8
IV - LA SIMULATION EN MEDECINE DE CATASTROPHE
1 Exercice avec simulation en grandeur réelle
p 10
2 La simulation virtuelle
a) Historique
b) Innovation en Médecine de Catastrophe
c) Conception d'un serious game
p 14
p 14
p 14
p 16
V - NOTRE PROJET
p 17
VI - CONCLUSION
p 18
VII - REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
p 19
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Mémoire DU Formateur { l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur
Vernet / Guichard
I - INTRODUCTION
C'est une réalité dans de nombreux domaines et l'enseignement médical en particulier. « Jamais la
première fois sur un patient » est un concept qui gagne chaque jour plus de terrain.
La simulation permet une véritable implication individuelle «vérifiable» ainsi qu’une amélioration
significative de la performance individuelle et collective des professionnels confrontés à une situation
de prise en charge.
L'enjeu majeur est de garantir une formation optimale des professionnels pour l'acquisition et le
maintien de leurs compétences, afin d’améliorer la qualité et la sécurité des soins dans l'intérêt des
patients.
De nos jours, l'enseignement de la Médecine de Catastrophe est indispensable au vu de l'actualité,
cependant très peu de professionnels de santé sont formés à cette médecine de masse.
Aussi la simulation virtuelle au sein des centres de simulation pourrait être une nouvelle forme
d'enseignement intéressante à la Médecine de Catastrophe ; en effet ceux-ci pourraient former un plus
grand nombre de personnels par rapport aux exercices grandeur réelle qui sont actuellement
pratiqués et qui demandent un énorme travail en termes d'organisation et de logistique.
II MEDECINE DE CATASTROPHE
1. Création et évolution du concept de Médecine de Catastrophe
C’est une médecine de masse (grand nombre de victimes), une médecine globale (prise en charge de
tous les aspects sanitaires), d’urgence et de terrain avec ses impératifs extra médicaux et ses aspects
circonstanciels et logistiques. Elle se définit toujours par l'inadéquation entre les besoins d’aide { un
collectif de victimes et la disponibilité (et l’efficience) d’un collectif de secours et de soins. Ses grands
principes reposent sur les notions de rassemblement de victimes, de leur catégorisation en fonction du
degré d’urgence et d’une évacuation programmée vers des hôpitaux éloignés du site après régulation
médicale.
La réflexion sur l’urgence collective débute { partir des années 70. Elle ressort des catastrophes
naturelles, socio-économiques, technologiques, des accidents exceptionnels de trains, d’avions,
explosions et d’incendie de Paris et des grandes villes qui permettent un début d'anticipation avec
passage de l’individuel au collectif, du quotidien { l’exceptionnel ; la médecine du quotidien est
inopérante en urgence collective, elle doit être adaptée aux situations d’exception.
Les premiers attentats urbains, les secours d’aéroport, les rassemblements de foule serviront les essais
opérationnels avec les nombreux blessés sur site et l’afflux massif de victimes { l’hôpital.
Afin de pouvoir répondre à un problème dans les départements parisiens sans déclencher le plan
ORSEC, plan de structure légitimé le 5/02/1952 destiné à recenser les moyens de secours disponibles
dans une zone administrative donnée et d'en permettre la mobilisation et l'engagement lorsque les
moyens locaux de secours publics d’une commune se trouvent dépassés, les Sapeurs-Pompiers de
Paris ont créé un plan { victimes. Il s’agit d’un plan d’action en phase avec la réalité, organisé en degré
en fonction du nombre de victimes, qui a pris le nom de « Plan Rouge » en 1974. Ce dernier a été
adapté et transformé en fonction de la réalité de terrain ainsi sa restructuration a permis d’organiser la
direction des secours, leur coordination, la logistique sanitaire et non sanitaire et les stratégies de
soins primaires. Il est mis en œuvre lors des accidents catastrophiques à effets limités et comprend
plusieurs phases intriquées (déclenchement, ramassage, tri et catégorisation et évacuation).
Le triage est la stratégie à catégoriser les victimes lors d'une inadéquation entre besoins et moyens de
traitement disponibles immédiatement tel qu'en Médecine de Catastrophe ; il détermine le degré
d’urgence de l’indication opératoire.
La notion de premier tri apparaît dès le 19ème siècle pour répondre à une logique économique avec
abandon des urgences vitales trop difficiles à réparer.
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Lors du conflit mondial 1914-1918 la distinction apparaît entre tri dégrossisseur, tri technique
spécialisé puis tri de vérification dans les zones étapes ; à ce moment là le triage est essentiellement
chirurgical ; ce n'est que plus tard que des gestes élémentaires de réanimation seront effectués avec la
participation des réanimateurs.
En Médecine de Catastrophe, le triage s’impose dès lors qu’il y a un grand nombre de blessés pour
«faire aussi bien que possible, pour le plus de personnes, au moment opportun, dans un endroit
approprié» (Bowers).
Ainsi le triage s'organise en plusieurs catégories :
– Urgences Absolues (UA).
– Urgences Relatives (UR).
– Urgences Dépassées.
– Urgences Potentielles.
– Urgences Fonctionnelles.
La Fiche Médicale de l'Avant (FMA) permet d'optimiser le triage ; il s'agit d'une trace écrite sous forme
d’un document fixé au patient, qui a évolué { partir des modèles adoptés par l’Aviation Civile, le Service
de Santé des Armées et la Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris.
Le retour d’expérience de ces catastrophes et notamment des attentats parisiens, où les hôpitaux ont
été en première ligne pour accueillir les victimes civiles, a abouti à la circulaire du 24 décembre 1987
concernant la mission permanente des hôpitaux en ce qui concerne le «PLAN BLANC».
Cette circulaire a été actualisée en 2002 pour prendre en compte les risques particuliers de type
nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC).
Trentenaire, la Médecine de Catastrophe, qui est une culture autant qu’une spécialité médicale, est née
française avant de se répandre dans le monde. Cependant elle a des progrès à accomplir dans
beaucoup de domaines. Il conviendrait d’en renforcer la pérennité, garante du maintien de son
dynamisme et de ses progrès. Elle doit prendre une place légitime dans l’éventail de la recherche et
l’enseignement médical afin de mieux servir encore les populations victimes des catastrophes { venir.
2. Enseignement de la Médecine de Catastrophe
L'enseignement est essentiel pour faire progresser le concept de la médecine en situation de
catastrophe.
La France a été la pionnière à l'enseignement de la Médecine de Catastrophe alors que le reste du
monde en a seulement pris conscience depuis le 11 septembre 2001.
En Europe son enseignement est inclus dans les premiers cycles des études médicales comme en
Suède ou les Pays-Bas, ou bien elle est intégrée dans l'enseignement de la Médecine d'Urgence ou
sinon en formation post-doctorale. Aux États-Unis elle n'est que partiellement incluse dans
l'enseignement de la Médecine d'Urgence.
Le premier Diplôme d'Université (DU) fut créé en 1981 par l'Université Paris XII et l'enseignement
pratiqué est le résultat d'une convention entre l'Université et le Service de Santé des Armées
(notamment la Brigade de Sapeurs Pompiers de Paris).
D'autres universités créèrent dans les deux années qui suivirent également un enseignement de
Médecine de Catastrophe comme Nancy, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, puis plus tard Amiens,
Lille, Paris.
En 1986, le Ministère de l’Éducation Nationale reconnaît au niveau national le diplôme de Médecine de
Catastrophe et s'intitule ainsi la «Capacité en Médecine de Catastrophe» ; ainsi ces 8 universités sont
habilitées à délivrer ce diplôme.
En France, comme dans de plus en plus de pays, les personnels de santé, de secours et de gestion des
urgences collectives notamment :
- les médecins et professions médicales, spécialistes de l'urgence et de l'anesthésie réanimation,
chirurgiens, pédiatres, psychiatres, toxicologues, etc...
- les professions paramédicales : infirmiers, cadres de santé, psychologues, logisticiens...
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- les pharmaciens, vétérinaires...
- toute profession ou activité de secours : secours associatifs, sapeurs-pompiers, policiers,
responsables administratifs ou de collectivités, peuvent se former à la Médecine de Catastrophe.
Longtemps réservé aux seuls médecins, l'accès à cette formation a été ouvert aux autres professionnels
de santé. Des étrangers se sont inscrits et des enseignements ont ensuite été organisés en Belgique, au
Brésil, en Côte d'ivoire, au Portugal, en Roumanie, en Tunisie, sur le modèle Français.
Le Diplôme Universitaire de Médecine de Catastrophe a pour but d'apporter des connaissances
théoriques et pratiques nécessaires aux professionnels de santé qui souhaitent être initiés à la
Médecine de Catastrophe, ainsi qu'{ tout ce qui concerne l’Oxyologie collective : médecins ne
remplissant pas les conditions réglementaires d'inscription à la Capacité de Médecine de Catastrophe,
pharmaciens, infirmiers, chirurgiens dentistes, vétérinaires, fonctionnaires (sapeurs-pompiers,
Protection Civile), permanenciers...
Le programme de la Capacité de Médecine de Catastrophe associe un enseignement théorique de 80
heures environ à un exercice qui développe les aspects tactiques, stratégiques et logistiques.
Le diplôme de Médecine de Catastrophe comporte trois thèmes essentiels : des notions générales de
catastrophes, la stratégie et la logistique des secours des différents services institutionnels concernés
et enfin les pathologies spécifiques rencontrées et les techniques de soins de masse. Une partie de
l’enseignement repose sur les retours d’expériences de grandes catastrophes civiles, naturelles ou
technologiques.
Les objectifs de cet enseignement sont d’assurer la formation du personnel du corps sanitaire pour
faire face à une situation d'urgence collective entraînant des victimes et dégâts en nombre, réalisée par
des accidents, des catastrophes naturelles, industrielles/technologiques ou conflictuelles.
La finalité de l'enseignement théorique est de donner aux étudiants les connaissances nécessaires
pour faire face à l'afflux massif de victimes quand survient une catastrophe.
L'objectif principal de l'exercice est de tester régulièrement les procédures et mesures prévues dans les
plans gouvernementaux, selon la directive interministérielle du 15 novembre 2004 relative à la
politique nationale de défense et de sécurité. Pour l’institution, il s’agit avant tout d’évaluer des
processus et/ou de réajuster des stratégies, mais il serait réducteur de le limiter à une fonction unique
de test puisqu’il joue un rôle important dans l’acquisition de compétences.
Ainsi la finalité de l’exercice pratique permet l'évaluation des compétences acquises puisqu'il permet à
l’étudiant de mettre en pratique en confiance son rôle de soignant et de gestionnaire en situation réelle
de crise.
L’enseignement est donc validé par un examen écrit et un exercice pratique commun simulant une
catastrophe du type plan de secours à de nombreuses victimes.
Ainsi on peut constater que la Capacité de Médecine de Catastrophe utilise depuis sa création la
simulation pour la validation de la certification de ces étudiants.
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III LA SIMULATION
1. La simulation en dehors de la santé
Les industries { risques (aéronautique, nucléaire), que l’on considère aujourd’hui comme activités
ultra sûres, sont des références en matière de simulation en dehors de la santé.
Ces activités techniques complexes et à hauts risques résultent de processus interdépendants réalisés
par des individus ou des équipes entraînés dont les niveaux de responsabilités et d'interventions sont
variables. Bien que l'entraînement à des tâches spécifiques garantisse l'acquisition de compétences et
d'une performance intra individuelle, il ne permet pas de résoudre les problèmes d'erreurs de
communication ou de gestion des ressources matérielles et humaines au sein d'une équipe. Afin de
répondre de manière spécifique à cette question, l'industrie aéronautique a développé des outils
conceptuels et d'enseignement particulièrement performants, regroupés sous le terme de CRM (Crisis
Ressource Management), dont l'implémentation dans les programmes d'entraînement des pilotes a
permis d'améliorer la sécurité des vols commerciaux.
Deux motivations les ont donc conduites à mettre en place la formation par la simulation : la première,
la conviction profonde que la simulation est un facteur de sécurisation des pratiques, la deuxième,
l'enjeu économique. En effet, une économie réalisée par la formation en simulation versus la formation
en situation réelle est démontrée dans certains secteurs d'activité ; il est moins coûteux d’entraîner des
pilotes sur des matériels à terre que de faire voler un avion de ligne à vide ; quant à l'industrie
nucléaire française, une diminution de 20% de la fréquence des arrêts automatiques des réacteurs a pu
être constatée.
Cette formation par la simulation a d'abord été utilisée en formation initiale ou continue avec des
moyens technologiques (simulateurs, mannequins, etc.), puis elle s'est intéressée aux comportements
des professionnels ainsi qu'à la validation de leurs compétences. Les facteurs humains, liés aux
activités en équipes, sont entrés progressivement dans le champ de la simulation, car il a été démontré
qu’ils sont un des éléments prépondérants de la sécurité dans ces secteurs d'activité.
Ainsi pour ces institutions l'amélioration du savoir-faire grâce à la simulation est indiscutable de
même que l'analyse et la modification des comportements, tout particulièrement en situation de crise ;
pour elles, un investissement en ressources humaines permettant de dédier du temps à l'entraînement
des personnels est nécessaire, une obligation de revalidation périodique des compétences pour
continuer d'exercer est indispensable, et dans certains domaines d'activité une évaluation du bénéfice
en matière de performance est possible.
La simulation en santé s'est beaucoup inspirée de cette expérience de ces industries à risques.
2. La simulation en santé
a) Définition
La simulation en santé correspond « { l’utilisation d’un matériel (comme un mannequin ou un
simulateur procédural), de la réalité virtuelle ou d’un patient standardisé, pour reproduire des
situations ou des environnements de soins, pour enseigner des procédures diagnostiques et
thérapeutiques et permettre de répéter des processus, des situations cliniques ou des prises de
décision par un professionnel de santé ou une équipe de professionnels. » (Chambre des représentants
USA, 111th congres 02-2009).
b) Historique
La Médecine a effectué au cours des dix dernières années une prise de conscience sur la nécessité
d'améliorer la qualité des soins. «To err is human», rapport de l'Institut de Médecine américain en
1999 a estimé entre 44000 et 98000 le nombre de décès résultants d'erreurs médicales avec un coût
annuel entre 17 et 29 millions de dollars ; le taux d'erreur le plus important étant retrouvé dans les
services de réanimation, d'urgences et de bloc opératoire avec comme causes principales d'erreurs
mortelles, les déficits ou erreurs de communication.
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De même, les Enquêtes Nationales des Effets Indésirables en Santé (ENEIS) en France en 2004 et 2009
a permis de montrer que sur une population de 71 cas de nouveaux-nés avec événements indésirables
graves (61 décès et 10 déficits fonctionnels majeurs), plus de 70% ont été victimes de défaut de
communication liés { l’organisation des soins mais aussi { l'incapacité { travailler en équipe ou {
transmettre des informations de façons exhaustives ; les autres causes retrouvées sont des problèmes
de manque de compétences (47%) ou de manque d’entraînement (40%).
Ainsi ces deux enquêtes ont permis de mettre en évidence l'importance et les enjeux de ce problème
de qualité et de sécurité des soins, la «non-qualité» des soins générant un nombre élevé d’événements
indésirables graves et de décès.
L'analyse des causes des événements indésirables graves démontre que les décès observés sont
essentiellement liés à des facteurs individuels (expérience et compétence essentiellement), ainsi qu'à
des facteurs structurels (mauvaise utilisation des ressources humaines et matérielles, manque de
supervision et défaut de communication orale ou écrite). Ces causes peuvent et doivent être prévenues.
Pour ce faire, l'utilisation des techniques de simulation dès la formation initiale est un moyen
performant et moderne de répondre à ces différentes problématiques en permettant d'améliorer
conjointement les connaissances personnelles, les compétences individuelles ou d'équipes, techniques
et non techniques, et les comportements, dans des conditions de sécurités optimales pour les patients.
La simulation permet donc à tous les niveaux d'enseignement la formation d'équipes dans des
conditions très proches du réel, dans des situations pédagogiquement parfaites et sans contraintes visà-vis des patients. Elle est par ailleurs un outil d'évaluation formative et de DPC extrêmement
intéressant. Tous ces avantages sont par ailleurs confirmés par le développement en France et par les
nombreuses publications de la Haute Autorité de Santé.
La simulation médicale permet de réaliser un entraînement en temps réel où l'étudiant mobilise luimême les connaissances acquises en cours théoriques dans le but d'améliorer ses compétences
techniques (gestes) et non techniques (raisonnement diagnostique, comportement en équipe,
utilisation des ressources, etc). L'objectif est de pouvoir créer un environnement psychologiquement
sûr permettant de discuter de façon constructive des erreurs sans conséquences négatives. Elle peut
également être utilisée pour évaluer les compétences et les performances d'un individu ou d'une
équipe chez des individus non expérimentés et sans risque pour les patients.
c) État des lieux dans et hors nos frontières
En Amérique du Nord, la simulation est utilisée de manière routinière dans l'enseignement initial des
professions médicales et paramédicales et également pour la certification ou la re-certification des
professionnels de santé.
En Europe, on constate un développement plus récent qu'en Amérique du Nord. Cependant la
simulation est un outil pédagogique bien implanté, mais avec de fortes inégalités ; une part importante
des investissements revient à un financement privé et à la Communauté Européenne. L'activité de
formation professionnelle continue occupe une place prépondérante et l'activité de recherche en
simulation est croissante.
En France, la simulation est encore émergente, mais se diffuse sur l'ensemble du territoire national.
Elle concerne un grand nombre de professions de santé, mais certaines disciplines telles que
l'anesthésie-réanimation, la médecine d'urgence, la néonatalogie, l'obstétrique ainsi que tout ce qui
concerne les soins infirmiers semblent les plus récurrentes.
Cependant cette activité est marquée par des difficultés de financement, des ressources humaines
allouées faibles, des équipements insuffisants et un manque d’harmonisation des pratiques, ainsi
qu'une recherche peu structurée contrairement au reste de l'Europe. A l’exception de rares
établissements, les locaux dédiés sont modestes (moins de trois salles), les matériels et équipements
sont peu nombreux et encore assez peu diversifiés; par exemple, les simulateurs chirurgicaux sont
rares et la simulation ayant recours à des environnements virtuels, est quasi inexistante.
Par ailleurs, les centres souffrent d’un manque de règles ou de bonnes pratiques.
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d) HAS et DPC
La HAS entend promouvoir le développement de la simulation en santé ; ainsi en 2012 a t-elle proposé
aux équipes un guide de bonnes pratiques en matière de simulation en santé afin de permettre sa
structuration.
Elle veut également utiliser la simulation comme méthode de DPC qui s'inscrit dans le cœur de mission
de la HAS à savoir renforcer la sécurité du patient et la gestion des risques.
En effet, la simulation couvre bien l'ensemble du champ DPC et permet ainsi de former à des
procédures, à des gestes ou à la prise en charge de situations, d'acquérir et réactualiser des
connaissances et des compétences techniques et non techniques (travail en équipe, communication
entre professionnels, etc.) et par conséquent l'évaluation des pratiques professionnelles et des
synergies d'équipes, d'analyser ses pratiques professionnelles en faisant porter un nouveau regard sur
soi-même lors du débriefing, d'aborder les situations dites « { risque pour le patient » et d’améliorer la
capacité à y faire face en participant à des scénarios qui peuvent être répétés et enfin de reconstituer
des événements indésirables, de les comprendre lors du débriefing et de mettre en œuvre des actions
d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins.
Ainsi peut-on imaginer, qu'à moyen terme, des plate-formes de simulation se développent, ayant
vocation à devenir un centre de référence de formation des professionnels de santé de plusieurs
hôpitaux, et pourraient valider par exemple des programmes d’évaluation des compétences qui
rendraient obligatoire une revalidation périodique des compétences tout au long de la carrière
professionnelle (à l'instar des pilotes de lignes), le bilan des « savoir-faire » des nouveaux
professionnels recrutés dans un établissement, la remise à niveau des praticiens évoluant vers une
nouvelle branche de la discipline (ex. : anesthésie adulte vers anesthésie pédiatrique), le transfert de
compétences d'activités médicales vers des activités paramédicales, et enfin la validation de nouvelles
compétences acquises tout au long du cursus ou la sélection des internes, comme cela se pratique dans
certains centres étrangers (Royaume-Uni).
3. Les différentes techniques de simulation
Les techniques de simulation choisies doivent être pertinentes et systématiquement adaptées aux
objectifs pédagogiques et aux approches choisies. Leur utilisation est justifiée, notamment par une
recherche bibliographique et/ou un retour d’expérience, s’ils sont possibles.
Dans son guide de bonnes pratiques la HAS répertorie les différentes techniques de simulation.
L’expérimentation animale permet un apprentissage de gestes chirurgicaux simples (sutures) et
complexes (coeliochirurgie chez le cochon par ex).
L’utilisation de cadavre permet un apprentissage de gestes techniques en chirurgie mais aussi en
anesthésie-réanimation et médecine d'urgence (abord voies aériennes, voies veineuses centrales,
anesthésies locorégionales, procédures chirurgicales, etc.).
Le « patient standardisé » est un patient « volontaire » ou un acteur qui est sollicité sur la base d'un
scénario préétabli et d'une description détaillée de son « rôle ». Il s'agit le plus souvent de
consultations simulées. Ce type de technique s'adresse à des étudiants en médecine ou paramédicaux,
des professionnels de santé seniors.
Ces méthodes servent à développer les compétences en matière de communication avec le patient
lorsqu'il existe un enjeu fort (annonce de mauvaise nouvelle par exemple) ou lorsqu'il convient de
donner une information complexe à un patient (information bénéfice/risque).
Le jeu de rôles est une technique pédagogique d'apprentissage des habiletés relationnelles. Il s'agit de
simuler une situation vraisemblable et en partie imprévisible dans un environnement fictif spécifique.
Les personnes y jouent un rôle fictif plus ou moins déterminé, en improvisant le dialogue. Le jeu de
rôles permet une mise en situation effective et nécessite une implication personnelle de chaque
participant. Il prend appui sur le vécu personnel et professionnel de chacun. Il peut permettre
d’analyser les comportements des acteurs et de donner un retour d’information sur son propre
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comportement.
Les simulateurs patients sont des mannequins grandeur nature (adulte, enfant, nourrisson) très
réalistes. Plus ou moins sophistiqués, ils peuvent être pilotés par ordinateur et ont la possibilité de
respirer, parler, et répondre à des stimuli lors d'interventions (mannequins haute fidélité). Les
mannequins obéissent à un scénario préétabli ; le formateur peut faire varier leurs constantes vitales
et leur état clinique. Contextualisées dans une salle d'opération ou de réanimation, les situations
cliniques vécues le plus souvent en équipe sont extrêmement proches de la réalité ; cette technique est
qualifiée de haute fidélité.
Les simulateurs procéduraux permettent un apprentissage par la répétition de gestes dans une
procédure, le plus souvent technique, et cela sans risque pour le patient. Ce type de simulateur couvre
un large éventail de procédures : tête d'intubation, arbre bronchique pour endoscopie, bras pour
perfusion, gestes chirurgicaux usuels tels que les différents types de sutures et les anastomoses
digestives et vasculaires (appareils dits basse-fidélité). Les simulateurs chirurgicaux, dans leur forme
la plus simple, sont constitués par exemple d’une boîte cachant la vision directe (pelvic trainer),
intégrant ou non une caméra, et permettant de réaliser des exercices variés (préhension, suture,
dissection aux ciseaux..) courants en laparoscopie. Certains simulateurs sont plus sophistiqués et
permettent de reproduire des situations interventionnelles de haute technicité comme par exemple
des simulateurs de coronarographie, d’interventions complètes en cœliochirurgie, d'endoscopie
digestive, d’angiographie, etc. Ils utilisent des logiciels très performants.
La simulation hybride est l’association de plusieurs techniques de simulation. Par exemple, la
combinaison d'un patient standardisé et d'une partie de mannequin (bassin d'accouchement pour
l’apprentissage de gestes obstétricaux, « peau simulée » pour perfusion ou sutures, etc.) contextualisée
dans un environnement adéquat apporte du réalisme aux scénarios en ajoutant les réactions du
patient ; dans ce cas, cette technique est qualifiée de haute fidélité.
La réalité virtuelle est un domaine scientifique et technique exploitant l’informatique et des interfaces
comportementales en vue de simuler dans un monde virtuel le comportement d’entités 3D, qui sont en
interaction en temps réel entre elles et avec un ou des utilisateurs en immersion pseudo naturelle par
l’intermédiaire de canaux sensori-moteurs.
Ce type de simulation permet d’appréhender des situations complexes, ou d’étudier des concepts
illustrés de manière plus concrète par des modèles informatiques. Ces applications sont interactives et
permettent par exemple de modéliser l’extension d’une épidémie de grippe dans une population, de
comprendre comment un équipement peut être utilisé, de s’entraîner { prendre des décisions cliniques
pour un patient virtuel en fonction de l’ajustement de différentes variables, mais uniquement par
l'intermédiaire de l'écran de l'ordinateur. La réalité augmentée désigne les systèmes informatiques qui
rendent possible la superposition d'un modèle virtuel 3D ou 2D à la perception qu'un individu a
naturellement de la réalité et cela en temps réel. Elle désigne les différentes méthodes qui permettent
d'incruster de façon réaliste des objets virtuels dans une séquence d'images. Elle s'applique aussi bien
à la perception visuelle (superposition d'image virtuelle aux images réelles) qu'aux perceptions
proprioceptives comme les perceptions tactiles ou auditives.
Un exemple en cardiologie interventionnelle et rythmologie : un centre européen (Saint-Jude Medical –
Bruxelles) est équipé de 6 simulateurs de réalité virtuelle en rythmologie. Il est destiné à la formation
d'hyper spécialistes.
Les objectifs de cette formation sont multiples : implantation de sondes de simulation dans différentes
positions et différentes circonstances ; manipulation des instruments dans le cadre des ablations de
flutter ; analyse des ECG ; localisation et ponctions trans-septales ; mesure de FFR (Fractional Flow
Reserve : ratio entre la pression coronaire distale à la lésion et la Pao mesurée en hyperhémie
maximale).
Les avantages de ces simulateurs sont nombreux et reconnus : sans risque pour le patient, pas
d'exposition aux rayons X, temps de formation illimité, efficacité pour se familiariser aux différents
aspects d'une procédure.
L’environnement 3D se rapproche par son réalisme des environnements de jeux vidéo les plus
performants, même si le coût de création des environnements réalistes virtuels est très élevé. Ces
techniques ne présentent pas en théorie de limite dans la diversité des situations qu’il est possible de
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créer et permettent une immersion totale dans la situation mise en scène. Les jeux sérieux (de l’anglais
serious games) sont des applications développées à partir des technologies avancées du jeu vidéo,
faisant appel aux mêmes approches de design et savoir-faire que le jeu classique (3D temps réel,
simulation d'objets, d'individus, d'environnements…) mais qui dépassent la seule dimension du
divertissement. Ils combinent une intention sérieuse, de type pédagogique, informative,
communicationnelle, ou d’entraînement avec des ressorts ludiques. Ils sont en quelque sorte une
déclinaison utile du jeu vidéo au service des professionnels.
Ce type de simulation est très utile pour l’apprentissage { distance et se prête bien au e-learning.
IV LA SIMULATION EN MEDECINE DE CATASTROPHE
1. Exercice avec simulation en grandeur réelle
En France, les universités qui enseignent la Capacité de Médecine de Catastrophe valident leurs
étudiants par un examen écrit et par un exercice pratique qui simule une vraie catastrophe (urgence
collective) en temps réel.
Il existe différents exercices. Un des exercices les plus simples est l’exercice sur papier (« exercice cadre
»), qui est plus un type de cas clinique et qui s’adresse { un petit nombre de participants,
principalement des décideurs. D’autre types d’exercices sont plus ciblés sur un processus (moyens et
temps d’alerte, mobilisation de moyens spécifiques comme les tenues NRBC...), sur une disponibilité de
ressources (rappel des personnels sans déplacement, disponibilité de lits...), sur un service (accueil de
victimes sous forme de « fiches-patients »...), sur une organisation (mise en place de cellule de crise par
exemple...).
Un des exercices les plus intéressants reste l’exercice avec simulation « en grandeur réelle » ; il
reproduit en grandeur réelle avec les acteurs habituels des secours et de soins une situation d’urgence
collective impliquant la présence physique de faux blessés (avec des plastrons explicatifs de leur état) :
un accident de bus avec de nombreuses victimes, un mouvement de foule dans un stade de football, un
attentat avec un agent chimique, un crash d’avion pendant un meeting aéronautique, un accident de
train, une fuite d’un élément radioactif dans une centrale nucléaire… impliquant la présence physique
de faux blessés (avec des plastrons explicatifs de leur état).
Cependant sa réalisation représente un énorme travail de préparation.
Il est important de connaître quels sont les risques potentiels { proximité de l’établissement de soins,
au niveau départemental et régional, et quels sont les plans préfectoraux spécialisés existants. Les
risques peuvent être naturels, concerner des réalisations humaines, industrielles, liées au trafic ou à
l’habitat. On peut également envisager des risques plus sociologiques, liés { des rassemblements de
foule et jusqu’au terrorisme. Il est intéressant de s’appuyer sur des expériences antérieures, tirées de
catastrophes réelles ou d’exercices préliminaires.
Ainsi les objectifs s’appuient sur les réalités de terrain autour du lieu d’exercice ; ceux-ci sont
déterminés { l'avance. L’objectif de l’exercice peut aussi obéir { une «commande», pour tester un
processus, une organisation spécifique. Il convient de ne pas oublier que des objectifs trop ambitieux
peuvent induire des situations d’échecs, d’évitement, une démotivation et une possible remise en cause
de l’autorité.
La rédaction du scénario découle obligatoirement des objectifs visés. Le scénario doit bien
évidemment être crédible, réaliste, sa rédaction est rigoureuse, chaque événement est minuté.
Une préparation minutieuse est nécessaire entre les différents services de secours (sapeurs-pompiers,
associations de secourisme, ambulanciers privés), de soins (hôpitaux publics, cliniques privées, SAMU,
ARS) et de sécurité civile (Préfecture, Police, Gendarmerie). La préfecture coordonne l’organisation.
Les militaires, les services municipaux, de l’équipement, des transports publics sont sollicités en
fonction du thème spécifique de l’exercice.
De nombreuses réunions préalables sont nécessaires. La cellule animation qui dépend de la préfecture
est responsable de la préparation et du bon déroulement de l’exercice. Elle est composée d’un groupe
restreint des principaux cadres des services (Préfecture, Police, Sapeurs-pompiers et SAMU). Tous les
problèmes logistiques sont abordés : moyens humains, horaires, sécurité, transport, éclairage, mise en
œuvre des moyens de transmissions inter services, repas, boissons, salle de réunion pour les briefings,
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Mémoire DU Formateur { l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur
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abris en cas d’intempérie… Des conventions d’exercices sont arrêtées. Elles permettent de raccourcir la
durée de l’exercice, de s’affranchir de problèmes logistiques trop coûteux ou insurmontables.
Des réunions internes pour chaque service font suites { celles de la cellule d’animation pour expliquer
au personnel les objectifs { atteindre et leur rôle { jouer. Notamment une réunion d’information
préalable est nécessaire pour présenter les objectifs de l’exercice et pour expliquer les rôles { jouer, la
pathologie définie et les signes cliniques à simuler aux fausses victimes appelées «plastrons», qui sont
le plus souvent des étudiants issus des instituts de formation de soins infirmiers, des sapeurspompiers volontaires ou des titulaires du service des Urgences-SAMU-SMUR.
Cet exercice présente un double intérêt : l’entraînement des services concernés par un plan de secours
préfectoral et l’évaluation des étudiants pour la validation d’un diplôme universitaire. Il serait difficile
et coûteux de concevoir un dispositif aussi lourd essentiellement pour les étudiants du diplôme.
L’évaluation des étudiants mis en situation s’effectue par le contrôle par les médecins et cadres
titulaires du service aux différents postes de la chaîne médicale des secours et d'une observation par
les enseignants.
Avant de commencer l'exercice, une réunion d’information dévoile le thème, et les objectifs { atteindre
sont développés. L’attribution du poste de chaque étudiant est définie { l’avance par les formateurs en
adéquation si possible avec la fonction et l’exercice professionnel de l’étudiant.
Le travail demandée aux étudiants est la prise en charge des nombreuses victimes selon les rudiments
de la médecine de catastrophe : examiner les blessés, catégoriser les victimes en fonction de leur degré
de gravité, remplir correctement la fiche médicale de l’avant, stabiliser les fonctions vitales, évacuer en
priorité les victimes les plus graves, transmettre les informations à la régulation du SAMU. Certains
étudiants vont diriger l’ensemble du personnel médical et paramédical, organiser la gestion du poste
médical avancé.
Le déroulement découle directement de la phase de préparation, mais également de l’expérience des
équipes impliquées, d’où l’intérêt d’exercices préalables notamment pour les décideurs. Il peut être
nécessaire de faire un réajustement en cours d’exercice, soit { but d’autoévaluation immédiate des
décisions par rapport aux actions entreprises soit pour dédramatiser, diminuer la pression de
l’exercice.
L’exercice se termine par un débriefing de l’ensemble du groupe des étudiants. Étape par étape, du
chantier au PMA jusqu’{ l’évacuation, les participants expriment individuellement leur impressions.
Les réactions sont riches, constructives parfois animées. Un responsable du diplôme anime la séance et
guide les étudiants. Les formateurs et les observateurs relèvent les faits marquants et les erreurs de
tactique ou de technique. A la fin du débriefing, un responsable de l’enseignement clôture la séance par
une synthèse.
Outre le fait que le bilan d'exercice permet de repérer ce qui fonctionne bien, il permet d’identifier les
dysfonctionnements. Les échanges « à chaud » permettent de noter les premières impressions, mais
sont insuffisants. Ils jouent également un rôle de convivialité et de reconnaissance. Les retours
d’expérience formels, { distance de l’exercice, doivent favoriser l’expression de chacun tout en évitant
les jugements de valeur. Ils permettent d’identifier et de renforcer les points positifs, et de pointer les
points négatifs. Sans faire une liste point par point des dysfonctionnements, une critique plus globale
permettra de faire émerger des réponses réalistes. L’analyse doit systématiquement porter sur le
schéma de l’alerte, les circuits d’information, les conséquences des décisions, la logistique, le
fonctionnement de la cellule de crise. Un réajustement pour les exercices suivants peut être tiré des
remarques et des propositions, avec dans un second temps une rétro-information sur les conséquences
de ce bilan.
Le préfet du département rassemble { distance de l’exercice les responsables des services qui
présentent la synthèse de chaque rapport.
Des invités participent en tant que témoin { l’exercice. La presse écrite ou télévisée est conviée pour
informer la population. Il est habituel d’avoir la visite des autorités comme le maire de la commune, le
préfet de région. Les autorités de tutelles, comme le ministre de la santé peuvent se déplacer lors
d’exercices exceptionnels.
Principales limites d’un exercice : l'exercice est souvent bien accueilli car la plupart des étudiants n'ont
jamais vécu de catastrophe naturelle ou d'exercice du type afflux massif ou gestion de crise et il permet
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de mettre en pratique les apports théoriques de l'enseignement. Cependant, un seul exercice ne
permet pas d’être opérationnel sur le terrain, d'autant plus que le nombre de postes attribués aux
étudiants est souvent insuffisant ; il serait idéal que chaque étudiant visualise de l'intérieur la chaîne
de secours mais la gestion du temps et des étudiants est difficile, et certains ne passent qu’{ une seule
fonction.
Dans certains exercices les étudiants du diplôme font office de plastrons, les étudiants vivent
l’intégralité de la chaîne de décontamination chimique et de la chaîne médicale des secours. Cette
immersion totale garde un intérêt de découverte incontestable. Elle est considérée peu pédagogique
car l’étudiant est passif et elle est mal vécue pour certains en tant que victime. Pour d’autres au
contraire elle permet de vivre et de comprendre l’intégralité du dispositif.
Aussi pour palier { un nombre élevé d’étudiants, il est possible de scinder le groupe en deux.
Un premier groupe joue les plastrons, l’autre les acteurs de la chaîne des secours. A la moitié du temps
les deux groupes permutent. Cette méthode est souvent adoptée dans les formations spécialisées aux
risques N.R.B.C ; elle nécessite par contre un formateur dédié { la gestion du groupe. L’arrêt de
l'exercice { la moitié du temps peut perturber le déroulement de l’exercice et cela est difficilement
concevable dans un exercice de grande ampleur avec des étudiants dispersés sur le site.
Souvent le nombre des étudiants est trop important par rapport aux formateurs qui encadrent
l’exercice ; ceux-ci ont parfois une impression d’isolement au milieu de cet exercice.
Le personnel médical et paramédical titulaire du service participe { l’exercice avec les étudiants du
diplôme pour leur évaluation et ne doit pas être l’inverse ; en effet une situation d’afflux massif est peu
fréquente dans l’exercice normal et le personnel moins expérimenté peut se placer alors aussi en
situation d’apprenant. Les enseignants ou formateurs qui circulent sur l’ensemble de la chaîne
médicale jugent l’évolution de l’étudiant au milieu de la chaîne des secours ; ils posent des questions,
peuvent recadrer une erreur de procédure, demandent une justification de l’action ; cependant
l’évaluation de l’étudiant doit être positive et pédagogique. Cet exercice ne doit pas brusquer l’étudiant
découvrant une situation nouvelle au cours d’une évaluation qui valide un diplôme.
Le choix des postes clefs de la chaîne médicale des secours (D.S.M., médecin et infirmier chef P.MA.,
médecin du chantier, médecin évacuation, médecin trieur { l’entrée du P.M.A.) attribués { un nombre
restreint d’étudiants est difficile et source de frustrations. Il faut veiller { ce que les participants
désignés à ces fonctions aient une réelle utilité dans leur futur exercice professionnel et qu'ils évoluent
si possible à deux postes distincts.
Dans tous les cas, il convient d’évaluer correctement les différences entre réel et simulé qui
conditionnent totalement le déroulement d’un tel événement.
Les plastrons représentent un problème conceptuel pour l’étudiant ; en effet les signes cliniques
alarmants de la fiche ne correspondent pas avec l’attitude calme et placide du plastron ; cela est
perturbant pour l’étudiant qui doit agir avec empathie. Sans la présence de fiche descriptive, les fiches
présentées seules ne servent qu’{ faire nombre pour se rapprocher du rythme réel d’un tel poste de
travail. Il est préférable de faire jouer le plastron qui mime les signes de détresse devant l’étudiant. Des
fiches évolutives peuvent être envisagées, ainsi les signes cliniques peuvent évoluer dans le temps
simulant un blessé qui s’aggrave ; c’est une difficulté supplémentaire pour le plastron qui doit bien
connaître son rôle et pour le formateur qui doit prendre plus de temps à former le groupe des
plastrons. L’étudiant doit alors tout au long de la chaîne médicale réévaluer le patient et modifier la
rédaction de la fiche médicale.
Le triage en situation d’exercice est en fait un poste difficile { rapprocher de la réalité et il impose
souvent { l’équipe d’animation d’être présente pour faire évoluer la situation dans le but de mettre en
difficulté l’acteur de ce poste comme dans une situation réelle. Un panachage de plastrons imitant des
cas cliniques, de plastrons se présentant avec des fiches ou de fiches seules présentées par l’animation
pour faire nombre, semble peut être la bonne solution pour crédibiliser le triage lors de nos exercices.
Dans tous les cas, la découverte brutale de la situation par les équipes rend les contraintes assez
voisines entre exercice et situation réelle avec cependant une absence de risque pour les intervenants
qui modifie les comportements.
De manière générale, la charge émotionnelle en exercice est totalement différente par l’absence de
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lésions réelles, de pression exercée par les entourages des victimes, de responsabilité face à une erreur.
L’exercice peut être perturbé par un cas mal simulé, une fiche mal détaillée ou peu crédible, une
ambiance ludique qui déconcentre les différents acteurs, médecins infirmiers et ambulanciers.
L’évolutivité est moins bien perçue en exercice car souvent difficile { mimer. Le triage reste plus court
lors d’un exercice, que ce soit pour lire une fiche ou évaluer une situation simulée. Mais en aval, en
général, le manque de personnel lors des exercices génère un ralentissement net entre le trieur et les
zones de soins du PMA. Le trieur d’exercice ne sera pas influencé dans son travail par une situation
clinique catastrophique qui l’accaparerait bien plus en situation réelle.
Une seconde limite des exercices est que leur réalisation n’en est jamais facile, a un coût non
négligeable et implique l’adhésion de tous les intervenants au sein du département, et parfois de ceux
des départements limitrophes. Lorsque l’arrivée des secours médicalisés nécessite un délai significatif,
le regroupement, le triage et l’évacuation des patients dans une structure la plus proche possible du
sinistre paraissent toujours être une conception adaptée, mais ce concept devrait être révisé en milieu
sur-urbanisé à la lumière des expériences et des exercices de simulation. Par exemple, en 2001 la
densité de la population autour des Twin Towers était de 27 000 habitants par km2, il a donc été
impossible de réaliser un tri et une délimitation sanitaire du sinistre dans un laps de temps très court.
Lorsqu'une structure extra-hospitalière pouvant gérer un nombre important de victimes a été créée, il
n’y avait pratiquement plus de victimes { gérer alors que ce PMA avait mobilisé un nombre important
de secours médicaux.
Une autre limite du réel reste la fragilité des liens de télécommunication malgré leurs performances
théoriques et leurs redondances, également l’afflux de bénévoles non encadrés qui peut poser
problème. Les initiatives individuelles confuses de bons samaritains intervenant dans un élan de
solidarité ont été souvent observées, pouvant gêner le commandement des opérations de secours.
Enfin, si la menace terroriste nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC) en milieu
urbain a permis d’actualiser l’organisation des secours médicaux en cas d’événements exceptionnels,
aucune innovation conceptuelle n’a été proposée dans le schéma de ces plans.
En effet, quelle que soit la nature de la menace en milieu urbain, la gestion des victimes consiste
toujours en une délimitation d’une zone encerclant le lieu de la catastrophe et { constituer une seule
porte de sortie (le PMA) pour toutes les victimes incluses dans la zone. Les « nouveaux » risques NRBC
(ceux que l’on pourrait avoir { affronter bientôt), « invisibles » et générateurs de symptomatologie
latente, décalée, atypique, compliqueront encore davantage l’établissement du bilan sanitaire.
Cet exercice de mise en situation est une technique pédagogique nécessaire pour appliquer les notions
de médecine de catastrophe qu’il faut poursuivre et améliorer. La préparation est une étape
fondamentale qui nécessite du temps, les moyens logistiques sont importants et le personnel des
différents services de soins, de secours et de sécurité se rajoute à cette organisation complexe.
La satisfaction des étudiants est réelle.
Puisque la Médecine de Catastrophe constitue une spécialité médicale dynamique, elle doit pouvoir
évoluer et ne pas s’enfermer dans des schémas figés. Une démarche scientifique fondée sur les retours
d’expériences et une analyse rigoureuse des exercices de simulation devraient faire progresser cette
spécialité passionnante.
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2. La simulation virtuelle
En 2012 l'Université de Toulouse a innové une nouvelle méthode d'évaluation de ses étudiants en
Capacité de Médecine de Catastrophe à savoir une simulation dans les mondes virtuels ; le traditionnel
jeu de rôle grandeur nature avait été remplacé par une immersion dans un environnement virtuel
multiutilisateur en ligne.
a) Historique
A l’origine conçus par l’armée américaine afin de recruter des futurs soldats, les serious games se sont
ensuite élargis { d’autres secteurs. Le concept est simple : il s’agit d’un jeu vidéo dont la finalité n’est
pas strictement limitée au divertissement, mais vise une intention «sérieuse», qui peut être
pédagogique. En d’autres termes, dans le champ de la formation, un serious game est un jeu qui
permet d’apprendre en s’amusant.
Dans le domaine médical, «Pulse!» est un des premiers serious games conçus. Développé par une
société américaine, ce jeu recrée un univers hospitalier en 3 dimensions et sert d'outil de formation
ultra-perfectionné en mode «simulation» pour les infirmiers et médecins en les mettant en situation de
soigner un patient.
En France, on peut citer SIMUrgences développé par la société Interaction Healthcare ; dédié aux
cardiologues et aux urgentistes, SIMUrgences est un module en 3D temps réel qui forme les médecins à
la prise en charge des patients en situation d'urgence cardiaque.
Dans la santé, les serious games ne concernent pas uniquement la formation des médecins, ils
interviennent aussi pour le suivi, la rééducation voire le diagnostic des patients. A titre d’exemple, on
peut citer Voracy Fish, un jeu de rééducation des membres supérieurs post-AVC, ou encore Ludomedic,
qui vise à préparer et accompagner les enfants et leurs parents à une hospitalisation, jouable
directement en ligne.
Enfin les serious games santé peuvent également s’adresser au grand public, avec par exemple Staying
Alive, une simulation dédiée à la formation aux gestes qui sauvent, proposée par l'Université Paris
Descartes et Dassault Systèmes.
b) Innovation en Médecine de Catastrophe
Ainsi cette simulation s’inscrit dans le cadre de la Capacité de Médecine de Catastrophe de la Faculté
de Médecine de Toulouse, ce qui en fait la première faculté a utilisé le monde persistant comme
validation diplômante.
L'Université Paul Sabatier de Toulouse a mené un travail remarquable de ce que l'on peut faire grâce à
un monde virtuel ; un terrain d’observation privilégié pour qui s’intéresse { la pédagogie en monde
immersif. En effet le 14 juin 2012 de 9 heures { 11 heures 30 s’est déroulé un exercice bien singulier
dans les mondes virtuels, une simulation de Médecine de Catastrophe.
Travail d’apprentissage et de validation aux frontières du serious game et du jeu de rôle en ligne
massivement multijoueur (en anglais, massively multiplayer online role-playing game: MMPORG), il est
le résultat d’un travail pensé, organisé, scénarisé, élément d’un dispositif de formation plus large.
La construction du dispositif a été organisée sur le principe de l’unité spatiale ; les étudiants sont
réunis dans une salle où est rassemblée une batterie d’ordinateurs.
Le scénario d’actualité après les événements de Norvège avec Anders Behring était celui d’un tueur
solitaire qui semait la terreur dans un centre commercial en sous-sol puis sur une esplanade au milieu
des buildings et enfin dans le métro, en tirant sur de nombreux passants ; 28 victimes étaient
impliquées.
Les urgentistes avaient donc pour objectifs d’organiser les secours, d’organiser les relations entre les
diverses instances et fonctions (COS, régulation, SMUR, SAMU, préfecture, cellule de crise).
À la différence des serious games ce scénario est «modulable» il est plus orienté par les attitudes et les
prises de décisions des acteurs que par le script du modèle numérique construit en amont.
La simulation en réel suppose de mobiliser des lieux habituellement affectés à la vie quotidienne,
oblige à modifier les flux de circulation, à interdire certains passages, etc...
Dans le monde virtuel, le concepteur crée un espace 3D qui métaphorise un espace urbain.
La ville est métaphorisée, elle est constituée d'objets qui ont été développés ; ainsi on peut identifier
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des bâtiments tels que l’hôpital, le SAMU, le centre commercial, l’esplanade au milieu de buildings et le
métro, des espaces signifiants dans les bâtiments tels que salle de régulation du SAMU, bureau des
directeurs d’hôpitaux et des objets tels qu'un hélicoptère, des ambulances et voitures de police, tout en
conservant la notion de distance et d’espace.
De même la Médecine de Catastrophe ne se limite pas à un acte médical au sens stricto sensu du terme,
il y a obligation de se déplacer des centres de secours vers les lieux d’exercice.
Le monde virtuel met en capacité de déplacer les objets de façon dynamique ; ainsi il émet la
possibilité de simuler les translations des individus et des objets (les deux mixés) dans le ciel pour les
hélicoptères, sur les routes pour les ambulances (du SAMU vers l’esplanade, de l’hôpital vers le centre
commercial) et en sous-sol où se situe le métro, avec bien évidemment des rôles distribués pour le
conducteur, les passagers. On peut assister à la prise de décision de partir sur site sans une infirmière
non présente { l’instant de la décision.
Le scénario qui était proposé relevait d'une construction très complexe puisqu'elle engageait 25
apprenants plus trois tuteurs observateurs et deux observateurs extérieurs. Les acteurs étaient
représentés par leur avatar et identifié par un vêtement professionnel, un nom et une fonction précise
dans ce dispositif. En fonction des rôles répartis (médecins, infirmiers, régulateurs, ambulanciers,
médecins { domicile...) l’interaction était au cœur du dispositif ; les canaux de discussion utilisés
passaient par la voix, les chats, le groupe second life de simulation de catastrophe (en mode privé et
public). La complexité du modèle était amplifiée par la dispersion géographique des acteurs et la
nécessité de gérer des conversations multiples et d’assumer des tâches diverses. Par interaction
sociale, on entend celle qui est réalisée dans le monde virtuel. Alors même que les étudiants étaient
rassemblés dans une salle de l’université (unité spatiale de réunion des individus, personnes physiques)
le réel lieu d’apprentissage était virtual Health. Le modèle désynchronise la présence physique dans le
lieu de formation (entité réelle constituée par les murs) et le lieu virtualisé numérique espace effectif
de formation.
Dans ce dispositif, vingt-huit personnes présentant des blessures ou des troubles divers étaient à
prendre en charge ; elles étaient représentées par des avatars qui pouvaient être interrogés et
examinés par simple clic il s’agissait de secourir des personnes victimes de traumatismes divers, plus
ou moins graves, voire des décès. Il fallait que les apprenants cherchent les victimes, y compris dans les
lieux les plus improbables telles que les toilettes hommes du métro (deux impliquées n’ont d'ailleurs
pas été trouvées), donnent le bon diagnostic, prennent la bonne décision, et orientent les victimes au
bon endroit. Les avatars occupent une place déterminante dans ce genre de scénario, parce qu’ils
métaphorisent la présence et les interactions entre les apprenants / joueurs et la présence des
victimes, classées selon un critère de priorité (les décédés, les Urgences Absolues, les Urgences
Relatives et les impliqués).
Les principaux écueils résident dans : la variabilité de la courbe d'apprentissage de l'environnement.
Celle-ci peut être lissée entre les étudiants de niveaux de départ différent grâce à une formation en
ligne que chacun parcourt à son rythme avant de participer à l'exercice et les aléas techniques qui
seront limités au maximum par l'utilisation d'un parc homogène d'ordinateurs récents, sur un réseau
configuré pour permettre l'accès à l'environnement en ligne.
La question du tutorat se pose toujours dans un dispositif de formation.
Les acteurs qui s’engagent dans des processus de simulation ont besoin d’intégrer la question du
tutorat (par les experts, par les enseignants, par les pairs, par les tuteurs dédiés). Il est nécessaire de
pouvoir observer le déroulement dynamique.
Dans le cas présent, il a été intégré un dispositif qui permet l’observation des simulations.
Il est très intéressant de constater que l’on peut formaliser physiquement le principe du tutorat.
Dans ces dispositifs les tuteurs sont perçus à la fois comme indispensables et comme un biais possible
dans le processus de formation ; il faut qu’ils se dissimulent pour ne pas perturber les étudiants. Il a pu
être constater que la relance par les tuteurs était efficace pendant la période de formation. Il est
entendu que le tutorat s’est exercé aussi avant la période de simulation et après lors du débriefing. La
capacité, le choix d’agir en instantané, est en soi un élément du scénario, puisqu’il impacte
obligatoirement le déroulement du travail des apprenants. Le tuteur doit par conséquent déterminer
où est la limite entre l’intervention nécessaire et celle qui serait parasite parce que trop envahissante.
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La simulation immersive se caractérise par la possibilité d’avoir des scènes de formation réparties sur
l’ensemble de la grille. Dans le cas observé, il y avait une simulation dynamique multi-sites, il est donc
nécessaire que les tuteurs soient présents comme observateurs pour qu’ils puissent procéder a
posteriori au débriefing.
L’immersion en tant qu’observateur est un exercice difficile car la spatialisation 3D rend difficile
l’exercice ; elle est d’autant plus difficile que l’on se rapproche de la vie réelle, l’action, l’interaction, les
lieux d’apprentissage sont multi-sites. C’est une grande différence avec les serious games, qui pour la
plupart sont conçus sur le principe de la représentation avec vue isométrique, ce qui facilite la
perception des actions.
L’immersion dans l’action est stressante au sens réel du terme. On est plongé dans l’action avec l’envie
de tout percevoir ce qui est impossible, tout comprendre. Ce n’est qu’en visualisant les vidéos qu'on
réalise que l'on peut réellement percevoir les interactions, la capacité des acteurs { occuper l’espace en
fonction des besoins.
Cette simulation est montée en puissance avec le temps ; la simulation a commencé dans une ambiance
détendue, presque potache avec des avatars se déplaçant de façon dispersée, jouant { s’évanouir,
s’égayant { droite { gauche… À partir du moment où l’organisateur a commencé le briefing sur le
parking de l’hôpital, les choses ont changé et au fur et { mesure des découvertes et des annonces de la
liste des victimes le travail s’est rationalisé, organisé, tendu.
Il a pu être perçu des situations qui semblent très proches du réel, des interrogations sur les
problèmes d’acheminement de l’info, sur l’attitude { adopter, sur les rapports avec la préfecture, sur la
présence supposée du tueur dans le centre commercial pour déterminer s’il est possible d’intervenir,
sur l’absence d’une infirmière au moment du départ de l’ambulance...
Comme à chaque fois en immersion, on constate une confusion du réel et du virtuel : par exemple un
avatar s’est assis sur le thorax d’une victime «Fais attention tu t’assoies sur une victime qui a un
pneumothorax» «bon , ben il est mort». La situation virtuelle qui n’engage en rien, provoque des
réactions ancrées dans le réel.
Dans cette expérience le travail de conception de Laurent Gout est un travail exceptionnel, de rigueur
dans l’élaboration (programmation des lieux), de scénarisation, de formation (existence du site ELU
plateforme moodle pour la formation médicale et numérique). La simulation était techniquement
fluide, les voix ne s’entrechoquaient pas. Le choix de réunir les étudiants dans une salle de l’université
avec un matériel homogène s’est avéré être une option intéressante.
c) Conception d'un serious game
Les dispositifs des formations immersives sont complexes ; l’entrée en réflexion pour lancer ce type de
dispositif passe par la rédaction des divers scénarios. Le client arrive avec une problématique
pédagogique, le studio de création de serious game est là pour trouver le scénario, le type de jeu, les
mécaniques, l’univers graphique. En fonction de la cible, le studio va aussi proposer de travailler soit
sur une version ordinateur, soit mobile, soit les deux.
L’enveloppe minimale pour envisager de créer un serious game tourne autour de 30 000 euros et cela
peut aller jusqu’{ 150 000 euros (voire beaucoup plus évidemment… Pulse, par exemple, dont nous
parlions plus haut, a coûté plusieurs dizaines de millions de dollars).
En termes de temps de développement, cela va de six mois à plus.
Enfin, dans la mesure où tout est numérisé, des balises installées dans le parcours des jeux permettent
de mesurer et observer les comportements des joueurs pour étudier si les objectifs pédagogiques sont
effectivement atteints.
La Médecine de Catastrophe se prête tout particulièrement à ces nouveaux modes pédagogiques qui
permettent la nécessaire représentation spatiale d’une scène de catastrophe par ses gestionnaires,
comme la mise en œuvre et l’analyse des rapports humains et de coopération sur le terrain.
Les interactions entre soignants (coopération, répartition, commandement, hiérarchie) y sont fidèles à
celles que l'on rencontre dans la réalité ou dans les exercices grandeur nature. Les débriefings sont
facilités par les enregistrements vidéos et les vues aériennes. Les problèmes de communication de
l'information qui sont essentiels lors de la gestion de crise y sont retrouvés et peuvent être analysés.
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A ce niveau la simulation virtuelle s’avère un outil extrêmement précieux et puissant lorsque s’impose
un enseignement de nombreux étudiants en un même lieu ou en des lieux différents. La classe devient
également virtuelle et encourage l’autonomie et la mobilité des étudiants, tout en gardant un caractère
extrêmement rigoureux.
V NOTRE PROJET
Actuellement à Melun, il n'existe qu'un projet de création d'un centre de simulation ; aucune
simulation haute-fidélité n'y est pour le moment pratiquée. Cependant ce projet devrait se concrétiser
très rapidement ; le dossier pour l'obtention d'OGDPC pour la simulation est en cours.
L'idéal pour pouvoir faire bénéficier de la simulation à l'ensemble du personnel de l’hôpital Marc
Jacquet à Melun serait de pouvoir bénéficier de plusieurs salles qui pourraient couvrir l'ensemble des
spécialités : une salle de déchoquage, un bloc opératoire, une salle de naissance, une salle de
réanimation néonatale, une salle procédurale, une salle de consultation, une salle de débriefing, des
espaces extérieurs pour organiser la simulation d’activités pré-hospitalières et enfin une salle de pause.
L’équipement informatique et audiovisuel moderne est un pré-requis indispensable. Ce matériel est
actuellement beaucoup plus accessible grâce au progrès technologique. Cependant, la maintenance
d’un tel matériel devra faire l’objet d’un contrat spécifique qui prévoit le remplacement immédiat en
cas de panne par exemple, afin de ne pas compromettre le bon fonctionnement des programmes.
Ce centre de simulation serait un service dédié à la formation : formation initiale des étudiants en
école d’infirmières et formation continue { l'ensemble des professionnels de santé de l’hôpital puis,
dans un avenir plus lointain, à l'ensemble des professionnels de santé du département.
Un centre de simulation repose sur une équipe d’enseignants motivés et dynamiques qui croient en
leur mission ; il est indispensable que la Formation Continue permette de faire bénéficier à des
personnels une formation universitaire diplômante de formateur en simulation afin que nous
puissions constituer une équipe solide.
Un plan de financement complet doit inclure l’investissement initial, le coût de la maintenance et de
l’amortissement des dispositifs, les locaux et les ressources humaines.
Étant donné les sommes mises en jeu, il est difficile, dans la situation actuelle, d’imaginer un
financement unique par l’hôpital. Très clairement un plan multipartenaires devra être finement
préparé, éventuellement avec un cabinet-conseil. Plusieurs acteurs devront être sollicités, en dehors du
classique financement hospitalier, tels ceux de l'ARS, de la région, de la commune, du mécénat, et des
industriels. Les partenariats industriels peuvent s’avérer un complément très intéressant dans
l’acquisition, le développement, la maintenance d’outils très spécifiques.
Un modèle économique est important { mettre en œuvre pour la pérennité économique. Ainsi la
formation médicale continue proposée par le futur centre peut être une source de revenus financiers,
soit directement (participants) soit indirectement (industrie finançant des formations avec son
matériel) ; toutes les pistes devront être explorées.
Dans un premier temps il nous a été proposé une mise à disposition de locaux dans les sous-sols de
l'IFSI, mais nous n'avons pas encore connaissance du nombre exact de salles ainsi que de la superficie.
Mais il est tout { fait possible d’envisager des solutions alternatives telle que la mise à disposition de
locaux par un partenaire industriel, qui en assurerait la maintenance (exemple des centres Draeger en
anesthésie-réanimation).
En ce qui concerne l'investissement de mannequins haute fidélité il nous a été proposé un partenariat
avec le SDIS 77 à la maison du feu à Gurcy-le-Chatel, qui possède déja le SIMAN 3G et le SIMBABY, et
qui pourrait nous les mettre à disposition en échange de formations mutualisées puisqu'eux ne
disposent actuellement d'aucun formateur.
Ce centre de formation est un site de 17 hectares offrant : des salles d’enseignement, un amphithéâtre,
des installations sportives (un gymnase, un stade, une piste d’athlétisme), de l’hébergement (1, 2 et 3
étoiles), un service de restauration, et un plateau technique pour les mises en situations
opérationnelles comprenant : deux simulateurs d’embrasement généralisé éclair, un bâtiment dédié
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au secours { personnes et { sa spécificité d’enseignement, ainsi qu’{ la formation de la chaîne de
commandement, 2000 m2 de surfaces bâties utilisées pour les mises en situation, 4000 m² d’aires de
manœuvres extérieures, un site homologué pour l’utilisation de sources radioactives non scellées, un
plateau risques électriques développé en partenariat avec ERDF, une cellule d’entraînement au port de
l’appareil respiratoire isolant (ARI), un espace logistique équipé de véhicules de formation.
Celui-ci pourrait permettre de faire de la simulation de Médecine de Catastrophe en grandeur réelle ;
nous pourrions ainsi organiser 3 à 4 exercices en plus de ceux imposés par la préfecture environ 3 à 4
fois par an.
Ainsi peut-être pourrions-nous envisager de pouvoir alors investir pour notre part dans la simulation
virtuelle pour la formation en Médecine de Catastrophe. Aussi serions-nous complémentaires avec le
centre de formation du SDIS.
VI CONCLUSION
Notre système de santé est confronté aux challenges que sont les besoins grandissants dans le
domaine de la formation des étudiants et des praticiens, le maintien impératif des compétences et
l'amélioration de la sécurité des patients ; c'est une responsabilité sociale des Facultés de Médecine en
collaboration avec les CHU et la formation continue.
La simulation devient un espace de formation entre la théorie et l'application chez le patient ; dans ce
cadre les différentes techniques de simulation sont et doivent être de plus en plus souvent utilisées
dans les secteurs des soins de santé. La simulation offre l'opportunité aux apprenants de répéter
plusieurs fois sans danger pour le patient, la permission de se tromper, un environnement
d'apprentissage sécurisé et un apprentissage expérientiel alliant réflexion durant l'action et après
l'action. L'objectif est d'offrir aux étudiants des stratégies d'apprentissage permettant l'acquisition,
l'intégration et la réutilisation des connaissances ; la simulation permet de créer des situations
d'apprentissage contextualisées en vue de développer ou d'évaluer des compétences.
Premier pays { s’être doté d’une formation universitaire en enseignement de la Médecine de
Catastrophe, la France a pris du retard, comme l’atteste la littérature médicale. Des améliorations
restent à faire : accélérer la filière de soins pour les victimes les plus graves, raccourcir les délais
d’intervention des colonnes de secours en accélérant les circuits de décision. Des progrès doivent être
également faits dans le domaine technique ; ils concernent la prévention, les techniques médicales et
paramédicales, la préparation des populations.
Ainsi la prise en charge de victimes multiples ne doit pas être figée ; la recherche doit être développée
pour l’intégration des techniques les plus avancées et l’évaluation des méthodes, des matériels
nouveaux.
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Mémoire DU Formateur { l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur
Vernet / Guichard
VII REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Historique du concept de médecine en situation de catastrophe SFMU 2010 Y.Groguennec, N.Chahir,
R.Noto
Rôle des exercices de médecine de catastrophe dans la formation des médecins et soignants de
l’urgence SFMU 2009 V. BOUNES, F. MENGELLE, J.L. DUCASSÉ
To err is human: builiding a safer healthcare system. Institute of Medecine. 1999
Sentinel event alert. Joint commission on accrediatation of Healthcare organizations 2004 July 21
Guide de bonnes pratiques en matière de simulation en santé HAS décembre 2012
Rapport de mission HAS: État de l’art (national et international) en matière de pratiques de simulation
dans le domaine de la santé dans le cadre du développement professionnel continu (DPC) et de la
prévention des risques associés aux soins 2012 Granry JC, Moll MC
http://www.urgences-serveur.fr/-capacite-de-medecine-de%2c476-.html
https://moiraudjp.wordpress.com/2012/06/15/urgences-immersives-et-simulation/
http://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2015/06/pages-1727-1740.pdf
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Mémoire DU Formateur { l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur
Vernet / Guichard

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