Notes sur un pontifical de Clement VI et sur un missel, dit de
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Notes sur un pontifical de Clement VI et sur un missel, dit de
Dans les premiers jours du mois de mars 1884, la riche collection de livres de feu M. Buhet, ancien notaire a Saint-Etienne, était vendue aux enchères publiques. Parmi les manuscrits précieux et les ouvrages rares qui composaient le catalogue de cette importante bibliothèque, un article attira d'une façon toute particulière notre. attention. Il était annoncé en ces termes: PONTIFICALE SEU COEREMÔNIALE. In-fol., rel. en bois, recouv. de vél. III. MANUSCRIT DU COMMENCEMENT DU XIV° SIÈCLE, orné de 5 grandes lettres historiées, formant autant de miniatures très fines, dans le style byzantin, sur fond d'or, et d'un beau caractère archaïque. On y trouve encore beaucoup d'autres lettres tourneuses, mais simplement on couleurs, sans or, avec arabesques. Les derniers feuillets, contenant la messe des Morts pour les évêques, sont d'une autre main. Suivant une tradition, ce pontifical aurait fait partie de la chapelle du pape Clément VI, qui, né dans le Limousin, se nommait Roger de Rosiers, fut moine à l'abbaye de la ChaiseDieu, en Auvergne, puis archevêque à Rouen. Ce fut lui qui négocia avec la reine Jeanne de Naples, comtesse de Provence, la ced'Avignon ssion d' et du comtat Venaissin. JI mourut en 1352 et fut enterré dans l'église de la Chaise-Dieu. Suivant un acte Document O II II I Il tl III 11111111 D D -6— joint â ce volume, ce manuscrit provient de la famille de ce pape, dont une branche était fixée à Aulhat, en Auvergne. Au verso du dernier feuillet, on lit la mention de la vente de ce manuscrit, en 1352, faite par les exécuteurs testamentaires de Jean Bosquet, à Guili. Cardin, diacre, moyennant 3 sous d'or, payés comptant (pretio triura solidorum auri sol utorum dietis execuionibus. (1). Les renseignements qui nous avaient été fournis sur l'origine de ce manuscrit, par un érudit bibliophile, M. A. Vernière, avocat à Brioude, ne laissaient aucun doute dans notre esprit: il s'agissait bien d'un manuscrit composé pour le pape limousin Clément VI et ayant fait partie de sa chapelle. Pierre Roger, né au château de Maumont, près d'Egletons, archevêque de Rouen, cardinal du titre de SS. Nérée et Achillée, élu pape le. 7 mai 1342, prit le nom de Clément VI en montant sur le trône de saint Pierre, qu'il occupa pendant dix ans et sept mois. Son influence sur les destinées du Limousin fut considérable. Il fit sortir de cette obscure province toute une pléiade de cardinaux, d'archevêques et d'évêques, attira à sa cour des représentants des plus grandes familles de son pays natal, laissa la tiare à son compatriote Innocent VI qu'il avait élevé aux plus hautes dignités ecclésiastiques, et prépara l'avènement au saint siège de son neveu Grégoire XI, en le faisant cardinal à dix-sept ans. On lui a reproché d'avoir comblé ses compatriotes de faveurs. Ce blâme ne saurait trouver d'écho dans le Limousin qui lui doit une bonne part de l'éclat incomparable dont il a brillé au moyen âge. Clément VI est une de nos gloires les plus marquantes. • Il ne nous reste de lui que des bulles et quelques (1) Catalogue de la vente des livres, manuscrits et autographes composant Id bibliothèque de feu M. D.,., ancien notaire, dressé par Brun, libraire à Lyon. 1884, in-80. de sermons, réunis par Baluze et confragments de servés à la Bibliothèque nationale. A défaut de ses oeuvres, dont les lambeaux n'existent qu'à l'état de copies, il nous avait semblé que le seul manuscrit peut-être échappé à sa bibliothèque, le Pontifical écrit pour lui et qui a servi à son usage, ne devait pas passer en des mains étrangères; nous avions pensé que cet ouvrage, précieux par son ancienneté, intéressant parles enluminures et les lettres ornées qui le décorent, avait sa place toute marquée dans la bibliothèque communale de Tulle, en attendant l'organisation d'un musée où l'on pourrait lui faire les honneurs d'une vitrine. Aussi nous soinmes-nous empressé de signaler à M. le Maire de Tuile la mise en vente du manuscrit de Clément VI, en lui exposant les raisons qui devaient, selon nous, déterminer la ville à en faire l'acquisition. Le conseil municipal, consulté, sur la communication de notre lettre, passa à l'ordre du jour. La vente a eu lieu, et le Pontifical a été adjugé à M. Ogier, artiste peintre à Saint-Etienne, pour la somme de cent dix francs. Une annotation écrite sur le volume, et des notes sur feuilles volantes qui l'accompagnent nous permettent d'en suivre, pour ainsi dire, la transmission depuis Clément VI jusqu'à nous. Au verso du dernier feuillet on lit les lignes suivantes : Iste liber fait emptas ab execator. defv1ncti dni Johis Bosqueti per dam G. Gardini cliacnam Averti. ptio trim solidor. auri solu?tor. eis. cxccator.p. ernden dnam diacnum acta j. vcstiario ecclesie Averti festo exait. sancte crucis anno M ccc lii (1). (j) En rétablissant les lettres supprimées par abréviation, on doit lire :Iste liber fait emptus ab executoribus defancti domtni Jo/zails Bosquetiper domiaum Guillelinum cardinalent diaconuni Avenioni prctio triant sotidorant auri sotutoruns eisdcm execatortbus per euntde,n dominant diaconuni actant in vestiario coclesiwAcentonensis (este osait ationis sanctœ crucis anno M ccc Iii. -8—. - L'acquéreur n'est autre que Guillaume de laJugi e, neveu de Clément VI. Des quatre cardinaux du prénom de Guillaume qui vivaient en 1352, il était, en effet, le seul cardinal diacre; les trois autres, Guillaume Curte, Guillaume Daure et Guillaume d'Aigrefeuille étaient cardinaux prêtres. Il avait été chargé par son oncle d'acheter ce Pontifical, ou il l'avait acquis de ses propres deniers pour lui en faire présent. Ce qui n'est pas douteux, c'est que ce voTurne avait été composé pour l'usage du souverain pontife, car on verra plus loin que les messes qu'il contient sont précisément celles que les papes avaient coutume de dire depuis un temps immémôrial. Quant à Jean Bosquet, dont0 les exécuteurs testamentaires ont vendu le Pontifical au- cardinal Guillaume de la Jugie, on peut supposer qu'il était le calligraphe, le miniaturiste auquel l'ouvrage avait été commandé. Clément VI mouiut trois mois après l'acquisition de ce manuscrit, le 6 décembre 1352, et fut enseveli • à la Chaïse-Diéu, en Auvergne. Une branche de la famille Roger s'était établie dans cette province; elle hérita de la chapelle du Pape qui comprenait, avec de riches ornements et des vases précieux, le missel dont nous nous occupons. Les Roger-Beaufort-Canillac ont transmis à la maison de Montboissier, dans laquelle ils se sont éteints, tout ce qu'ils avaient recueilli de Clément VI. Une descendante de Montboissier, M'° de Besse de la Richardie (1), fit cadeau du Pontifical au savant (1) Nous pouvons, avec tes indications du Nobiliaire de Nadaud et les renseignements complémentaires quo M. Antoine Vernière a bien voulu nous fourpir, établir la descendance des loger-Beaufort depuis te père de Clément VI jusqu'à Mn10 de Bosse, et suivre ainsi le Pontifical dans toules les mains où il a passé, depuis le décès du premier pape limousin jusqu'à son propriétaire actuel. Pierre Roger, seigneur de Rosiers (vers 1300), eut trois enfants. L'ainé, Guillaume loger 1, épousa Guillemette de la Monstre, d'où -9- abbé Croizet, qui a consigné cette transmission, avec la description du manuscrit, dans une intéressante note que nous reproduisons « Nesehers, 1847. Ce Missel manuscrit présente un véritable intérêt historique, religieux et paléographique. 11 Guillaume H. qui suit, Pierre Roger qui devint le pape Clément VI, Hugues qui tut fait cardinal, Guillemette qui épousa Jacques de la Jugie et Bertrande qui se maria avec Nicolas de Bosse. Guihaume Rager 11 comte de Beaufort, acheta tous les biens , avait en Auvergne (1343). Il se qu'Humbert, dauphin Viennois de maria trois fois. De son union avec Marie de Chambon, naquit, entre autres enfants, Pierre Roger qui devint le pape Grégoire XI. De sonmariage avec Guérine de Caoillac, provint Marquis de Beaufort qui suit. Il n'est pas utile derappeler son troisième mariage. Marquis de Beaufort s'unit à Catherine dauphine d'Auvergne (1366 ou 1369). Sept enfants sortirent de cette union. il nous suffit de mentionner ici le second, Louis de Beaufort. Louis épousa en premières noces Jeanne de Norri et en eut douze enfants, parmi lesquels Jacques et Isabeau. Il dent pas d'enfant de Jeanne de Montboissier, sa seconde femme. Jacques de Beaufort-Canillac se maria avec Jacqueline de Créqui (1425); leur union fut stérile. Sa soeur Isabeau avait épousé Jean de Montboissier; de cette union naquit Jacques de Montboissier qui prit pour femme Françoise de Chabannes. Etant sans postérité, Jacques de Beaufort-Canillac transmit son nom et ses biens à son neveu Jacques de Montboissier, fils d'lsabeau (1511). Du mariage de Jacques de Monthoissier avec Françoise de Chabannes provint Marc de Beaufort-Montboissier qui s'unit le 3décembre 1537 à Catherine de la -Queille, dame âe Châteauneuf du Urne, d'où Jean de Beaufort-Monthoissier marié le 14 février 1565 à Gilberte de Chabannes; ils eurent pour fils Jean-Timoléon de Beaufort-Montboissier, marié en 1596 à Casparde Mitte de Miolans. De cette union naquit Jacques-Timoléon de Beaufort-Monthoissier, marié à Catherine de Martel de Tréfort. Leur fille Marie de Montboissier épousa en 1670, Jean-Jacques d'Aubusson, seigneur de Savignac, d'où Louise d'Aubusson, qui épousa en 1712, Maximilien de Bosredon. Cette union donna le jour à Gabriel-Annct de Bosredon dernier sénéchal d'Auvergne, marié en 1742 à Marie J'Apchicr. Ifs eurent de leur mariage: Maximilien de Bosredon, qui épousa en 1768 Antoinette-Louise Nicole de Bouillé. De cette union naquit Anne-Marie-Ernilie de B osredon, mariée le 15 août 1787 à Eustorge-Claude-Louis de Bosse de la Richardie morte au cbâteaù d'Aulhat, près Issoire, le 6janvier 1352. C'est elle qui fit cadeau du Pontifical de Clément VI à l'abb Croizet, - 10 - paraît être du XIVC siècle. Cc qui prouve que ce manuscrit est, en effet, de cette époque, c'est qu'il a fait partie de la chapelle du pape Clément VI, dont le tombeau - est encore à la Chaise-Dieu (Haute-Loire). » A Sugères, canton de Saint-Denis (Puy-deDôme), Mme de Besse, née de Bosredon, avait un château (1) sur la porte duquel se trouvaient encore les armoiries de la famille Roger ou Rosier, originaire du Limousin, de laquelle sortaient les papes Clément VI et son neveu Grégoire XI. J'ai vu moi-même à Sugères, une très riche chapelle dontles ornements étaient d'un très grand prix, le calice en or, à coupe évasée, les chasubles eft forme de chappes; le tout avec les écussons du pape, même les gants en soie, avec l'écusson en or. Tous ces objets réunis auraient chargé une voiture. Malheureusement tout, cela a été vendu à vil prix. J'ai vu aussi à Sugères, les portraits des deux papes d'assez grandes dimensions. A mon instigation, Mme de Besse fit porter ces deux portraits au château d'Aulhat, canton d'Yssoire, où elle habitait, ainsi qu'une magnifique croix en or. qui avait au moins 45 centimètres de long, dans laquelle était une autre croix en argent remplie de reliques précieuses. J'ai vu un assez gros fragment de la vraie croix. Mme de Besse me• fit don d'un morceâu de ce bois et de quelques autres reliques, ainsi que du présent Missel. » Mme de Besse m'assura que la chapelle avait 'toujours été conservée dans la branche aînée de la famille des papes; que cette branche avait contracté alliance avec les Montboissier, les Canillac, les Lw Tour d'Auvergne, et presque toutes les familles (1) Lorsque ic château de MonWoissier (commune de Brôusse, canton de £unlhat) tomba en ruines, les Montboisier habitèrent le château de Sugères. princières; enfin, qu'elle descendait elle-même de cette branche par les de Bosredon qui étaient entrés dans la famille de Montboissier. » J'ai encore vu à Sugères et à Aulhat un très grand nombre de manuscrits et surtout de parchemins qui intéressaient l'histoire d'Auvergne, des lettres de Charles IX, de Catherine de Médicis, de Henri II, etc. A Sugères surtout, un grand appartement en était rempli. Mais lorsque j'y suis ailé, la toiture de l'appartement venait de s'édrouler, et toutes ces richesses étaient ensevelies sous des ruines. Mme de 13esse me promit qu'elle ferait porter tous ces manuscrits k Aulhat, mais j'ai appris 'u 'elle a terminé sa longue carrière, et que ces archives sont à peuprès perdues. Quant au Missel, c'est, comme on le voit, un grand in-.40, qui était portatif, car il ne renferme qu'un petit nombre de messes, celles de la SainteVierge, du Saint-Esprit, de la Sainte-Croix et des Morts, puis, à la fin, en caractères plus menus, une pour un évêque défunt, une autre pour toutes sortes de calamités. Il se compose de quatre-vingts pages en parchemin parfaitement conservé, et où l'on voit un grand nombre de figures, de lettres majuscules et de vignettes remarquables. Les planchettes, couvertes en maroquin rouge, ont été un peu altérées par les vers. Il n'a pas de titre et les, pages ne sont pas notées. » Quatre copies dé cette note, en feuilles yolantes, sur mauvais papier, sont conservées dans le Pontifical. L'une d'elles présente une variante qu'il est bon de faire connaître. Après avoir relaté les conditions dans lesquelles le manuscrit est arrivé jusqu'à lui, l'abbé Croizet ajoute: Ces circonstances nous semblent assez prouver que ce petit monument ou manuscrit a, en effet, apparteùu au pape Clément VI. Ce qui vient encore à l'appui de cette assertion c'est que ce Missel portatif in-40 , renferme, dans les soixQnte-quinze preiïiière pages les messes de la Sainte-Vierge, du Saint-Esprit de la Sainte-Croix, des Morts, et dans les quatre dernières pages, des oraisons, des secrètes, des post-communions pour un évêque défunt, pour la paix, etc.; ce sont là précisément les messes que les papes disent ordinairement depuis nombre de siècles. En outre, le paléographe pourra facilement s'assurer que ce manuscrit est réellement du nvC siècle, en comparant la forme des lettres, les lettres conjointes initiales, les majuscules, la ponctuation, l'absence de diphtongues, les vignettes, avec celles de cette époque, dans la nouvelle diplomatique des savants bénédictins, et dans un grand nombre d'autres manuscrits et ouvrages. » Cet ouvrage est magnifiquement exécuté et digne du grand personnage auquel il appartenait. Le peintre lui-même saura en tirer parti pour les manuscrits du beau temps de l'art architectonique. On contemplera avec admiration, au commencement du canon de la messe, le Sauveur du inonde - représehté avec les plus vives couleurs et où brille avec éclat l'or, - bénissant de la main droite tenant un livre de la main gauche; le crucifère, les symbolès des quatre évangélistes, le soleil, la lune, les encadrements, tout mérite l'attention de l'artiste. En avant de ce magnifique dessin, on voit un prêtre ou ppntife, disant la messe. Le calice évasé et la chasuble enveloppant tout le corps sont entièrement semblables au calice et aux chasubles que j'ai vus à Sugères. - Cette dernière observation prouveseule que notre Missel est bien de l'époque ci-dessus signalée. » Après là mort de M. l'Abbé Croizet (1), en 1859, (1) Jean-Baptiste Croizet, nô à Cournon le 12 janvier 1787, prêtre - 13 - lé manuscrit quo lui avait donné M me de Basse fut mis en vente et acheté par M. Buhet, moyennant 300 fi'. II était une des plus belles pièces de sa remarquable collection. Son écriture, le style de ses lettres ornées, la manière de ses enluminures, la date de son acquisition par Guillauihe de la Jugie, les oraisons et les messes qui le composent, et cette circonstance enfin que ce pontifical est reté pendant cinq siècles la propriété de la famille Roger, ne laissent aucune incertitude sur son origine: il a appartenu au pape limousin Clément VI. II Nous ne pouvons faire remonter jusqu'au même personnage le magnifique Missel, conservé à la bibliothèque publique de Clermont-Ferrand et connu sous le nom de Missel de Clément VI. Cette désignation, qui l'accompagne jusque sur le catalogue, incontestablement erronée, n'a pas trompé Mgr Barbier de Montault, lorsque, au sujet des armes de notre pape, il écrivait : « Un Missel qui a appartenu à un membre de sa famille et qui possède maintenant la bibliothèque de Clermont, offre • en plusieurs endroits un écusson légèrement dissemblable : d'argent â la bande d'azur, accompagné en orle de six roses de de Saint-Sulpice, professeur de philosophie au grand sommaire de Montferrand, curéoyen de Neschers, diocèse de Clermont. googue et botaniste auteur des Recherches sur les ossements fossiles du département Ju Puy-de-Dôme et de diverses notices publiées dans les Annales de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Clcrrnont-Fcrraad, est décédé le 5 avril 1859, àgé de 73 ans. gueules pointées d'or au coeur (1). Ce missel que l'on nomme à tort de Clément VI, me paraît dater plutôt du XV0 siècle (2). C'est un in-P de 35 centimètres de hauteur sur 24 de largeur, comprenant 380 feuillets en très beau vélin, écrits sur deux colonnes. La pagination, marquée au recto seulement, est récente. La marge extérieure a été coupée aux folios XI, XII, XIV, XVII, XXIV et XXV. Les feuillets principaux sont encadrés de guirlandes de fleurs et de fruits habilement exécutées. Parfois, sans que cela se reproduise symétriquement, nous a écrit M. Vernière, dont nous ne faisons que reproduire ici les notes, une ornementation du même genre se trouve en haut et en bas d'une des colonnes de la page; mais l'artiste semble avoir agi au gré de son caprice, car elle existe sur des colonnes où est écrit l'office de saints assez obscurs alors qu'elle manque à des fêtes plus importantes. Dans le milieu de l'encadrement, au bas du premier feuillet, est peint un écusson écartelé au premier d'argent à la bande d'azur accompagné en orle de six roses de gueules, qui est Roger de Beaufort; du troisième d'azur au lecrier d'argent colleté de gueules, à la bordure billetée de sinople, qui est Canillac (3); parti de gueules à la fasce d'or, qui est Norri (4). Le propre des messes occupe les feuillets 1 à 52. Puis viennent, en, plus gros caractères, le gloria, (1) Au lieu de D'or à la bande d'a:ur, accompagné en orle de six roses de gueules. - Baluze et Justel donnent les mêmes émaux que le missel de Clermont. (2) Armorial des papes, par Mgr X. Barbier de Montault; Arras, 187, in-S-; page 16, note 1. (3) L'écu des Canillac est plus ordinairement billeté d'or ou môme componnô d'aiyjent. (.4) Justel et Nadaud attribuent aux Norri une fasce d'argent. - 15 - le credo, les préfaces avec notation musicale. Les paroles de la consécration sont en lettres d'or minuscules. Au bas de la page 53 est reproduit l'écu des Norri, de gueules à la fasce d'or. Nous voyons à la même placedu feuillet 60, un autre écusson écartelé aux premier et quatrième de RogerBeaufort et aux deuxième et troisième de Canillac. Enfin l'écu de Gueules à la fasce d'or se retrouve à la page 213. Des enluminures fort riches, placées dans le texte et dans l'intérieur des colonnes, représentent les mystères ou des scènes de la vie des principaux saints. En voici les sujets: Page 80. L'Adoration des Bergers. Page 85. Saint Jean l'évangéliste. Page 92. La Circoncision. Page 95. L'Adoration des Rois. Page 147. La Résurrection. Page 162. L'Ascension. Page 166. La Pentecôte. Page 169 Le Christ assis sur le même siège qu'un pape; le Saint-Esprit sort de la bouche du Christ et va dans celle du pape. Page 175. La Cène. Page 213. David coupe la tête de Goliath. Page 251; Le Christ et le pape. Même vignette qu'à la&page 169, moins le SaintEsprit. Page 268. Saint Nicolas. Page 269. La Visitation. Page 276. Saint Sébastien. • Page 282. La Présentation. • Page 290. Noël. Page 292. Enluminures marginales : animaux et fruits. Page 397. Le Crucifiement. Page 309. Saint Pierre et saint Paul. - 16 - Page 313. Sainte Marie-Madeleine. Un évêque donne la communion; la nappe est tenue par deux anges. On voit la Vierge dans les nuages. Page 315. Sainte Anne. Page 322. La Transfiguration. Page 324. Saint Laurent sur le gril. Page 327. L'Assomption. Page 334. La Nativité de la Vierge. Page 340. Saint Michel. Page 344 Le Massacre des Innocents. Page 352. Sainte Catherine. Page 356. Tous les Saints. Ces miniatures ont de 8 à 10 centimètres de hauteur sur 8 de largeur. A l'exception de la scène du martyre de saint Laurent, où le peintre a adopté des habillements contemporains, les personnages sont revêtus, suivant les .sujets, de costumes romains ou judaïques. Quelle est la date de ce précieux manuscrit? Malgré la tradition qui l'a fait inscrire au cataloguç de la bibliothèque de Clermont sous lé nom de Missel de Clément VI, il nous est impossible de le faire remonter jusqu'à lui. Il est de beaucoup postérieur au décès de ce pape (1352), postérieur aussi la mort du second pape issu de la même famille, Grégoire XI (1378). Son écriture, les encadrements des feuillets, les costumes dessinés dans la vignette représentant le martyre de saint Laurent sont incontestablement du xv 6 siècle. D'autres indications contenues dans le texte et les blasons qui l'illustrent, vont nous perifiettre de préciser sa date. Les feuillets 206 et suivants continent un calendrier, dans lequel est marquée, au 7 avril, la fête de Saint Vincent Ferrier, canonisé en 1458. - 17 - Le missel est donc postérieur à cette date. Nous lisons, en outre, au bas du mois de mars, dans le même calendrier, la rubrique suivante « 1/ide cwream nwnerum inpctrtc sinistra de nigro seriptum pro cinno de quo volueris; et in sequenti proxirnct dorninica celebratur Pctscha. Si autetn aureus numerus et littera doininicalis simal et in codent loco concurrunt, tuno proxima sequenti dorninica Pascha celebratur. Et nota quod hoc anno domini M GCCC LXII. tenebramus pro aurco numero X et pro littera dominicaui E et erat bissextus. » N'est-ce pas 1k la date du manuscrit? On ne peut guère en douter, lorsqu'on sait qu'à cette époque Louis de Roger-Beaufort, marquis de Canillac, venait d'épouser Jeanne de Norri, fille d'Etienne de Norri et de Jeanne de Passac. 11 avait reçu de son père les armes des Beaufort écartelées de celles de Canillac. II y ajout;, après son mariage, le parti de gueules à la fasce d'or des Norri. C'est ce blason, ainsi composé, qui se trouve à la première page du volume. Nous pouvons donc affirmer que le Missel de la bibliothèque de Clermont date de la seconde moitié du xve siècle. Composé pourLouis de Roger-Beaufort, marquis de Canillac, il a été transmis comme le Pontifical de Clément VI, à la famille de Montboissier. Il a passé à M. de Bosredon, sénéchal d'Auvergne, dont la mère, Louise d'Aubusson, était, comme nous l'avons dit plus haut, issue des MontboissierBeaufort-Canillac. M. de Bosredon en fit hommage à Mgr de BonaJ, dernier évêque de Clermont avant la Révolution, qui le donna à la bibliothèque du chapitre de sa cathédrale. Cette bibliothèque a été le noyau de celle que possède aujourd'hui la ville. Si nous avons combattu et détruit la légende, qui faisait remonter le Missel de Clermont jusqu'au - 18 pape Clément VI, nous avons démontré qu'il avait été composé pour une des familles les plus considérables de l'Auvergne et du Limousin, et qu'il était resté pendant près de trois siècles en sa possession. Moins ancien que le Pontifical récemment acquis par M. Ogier, il n'en offre pas moins un véritable intérêt artistique.