L`EXPOSITION AU RISQUE DE CHANGE ET LES DÉTERMINANTS
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L`EXPOSITION AU RISQUE DE CHANGE ET LES DÉTERMINANTS
L’EXPOSITION AU RISQUE DE CHANGE ET LES DÉTERMINANTS DE LA COUVERTURE : LE CAS FRANÇAIS. SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH Résumé. Cet article examine si la valeur d’une entreprise exportatrice française est affectée par les fluctuations contemporaines et retardées du taux de change. En se basant sur un échantillon de 100 entreprises exportatrices françaises, l’étude trouve que 22% des entreprises connaissent une exposition économique significative aux fluctuations de change du mois précédent et ce pour la période allant de janvier 1996 à décembre 1998. L’étude examine aussi si l’exposition au risque de change est expliquée par le niveau des opérations à l’international ainsi que par des variables que la théorie considère comme significatives dans la justification de l’activité de couverture. 1. Introduction Le risque de change économique est le risque que les fluctuations du taux de change affectent, d’une façon défavorable, les cash flows futurs de long terme et par conséquent la valeur de l’entreprise. Il est mesuré si on se réfère à Adler et Dumas (1984), Jorion (1990) par la variance de la valeur réelle de l’entreprise suite aux fluctuations non anticipées des cours des devises. “La valeur de l’entreprise est sa valeur de marché ou économique égale à la somme des flux de liquidités nets actualisés à l’infini. La perte ou le gain de change mesuré de façon économique est la différence entre les valeurs actuelles nettes, exprimées dans la monnaie de référence, calculées avant et après les fluctuations non anticipées des taux de change.”1 L’hypothèse que les taux de change affectent la valeur de la société et par conséquent le cours de son action est retenue par les économistes, les Salma MEFTEH, CEREG, Université Paris-Dauphine, Paris, France Fax n◦ : 01 44 05 40 23, e-mail : [email protected] Mondher Bellalah, Professeur à l’université de Paris Dauphine et de Cergy-Pontoise. 1 Fontaine P., Gestion financière internationale, ed Dalloz 1 2 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH analystes financiers et les managers de l’entreprise. Les études menées sur la relation entre les variations du taux de change et les cours boursiers aboutissent cependant à des résultats controversés. Certaines trouvent que les fluctuations des taux de change n’ont pas un impact significatif sur les rendements des investissements tandis que d’autres études détectent une relation significative. Ce manque de conclusions empiriques claires nécessite encore plus de recherche. La présente étude traite le cas des entreprises exportatrices françaises. En effet, le cas européen sollicite une attention particulière surtout après le passage à l’euro. Si le risque de change a disparu dans la zone euro depuis l’avènement de l’euro, il persiste vis à vis des autres zones géographiques du globe et présente de multiples facettes. Il est donc intéressant d’étudier l’exposition au risque de change avant et après le passage à L’euro. (Toutefois, nous intéressons au cas particulier du marché français et non pas à toute l’union européenne. Ce choix est justifié par le fait que dans le deuxième partie de l’article, nous intéressons aux déterminants de la couverture du risque de change). Nous conduisons aussi une analyse transversale des déterminants de l’exposition au risque de change. Nous relions le coefficient de l’exposition estimé aux caractéristiques de l’entreprise même (le niveau des opérations à l’international) ainsi qu’aux variables que la théorie considère comme significatives dans la justification de l’activité de couverture. En effet, Smith et Stulz (1985), Mayers et Smith (1987) et Smith (1996) montrent que les entreprises non financières gèrent leurs risques dans le but de résoudre le problème d’agence de la dette, de réduire les coûts de la détresse financière et de coordonner les décisions d’investissement et de financement. Les résultats montrent que les entreprises disposant de faible liquidité et les entreprises fortement endettées sont moins exposées aux fluctuations de change. Le reste de cet article s’organise comme suit. La section 2 s’intéresse à la relation entre les fluctuations du taux de change et les rendements des actions des entreprises exportatrices françaises. La description des données et les résultats empiriques sont contenus dans la même section. La section 3 explore les déterminants de l’exposition. Enfin, la section 4 conclue l’article. 3 2. L’exposition au risque de change des entreprises exportatrices françaises Les recherches concernant l’exposition économique d’une entreprise au risque de change reconnaissent l’impact des variations de taux de change sur les flux monétaires des entreprises ainsi que sur les taux d’actualisation de ces flux monétaires. Puisque les modèles de détermination de la valeur d’une entreprise sont basés principalement sur ces deux variables, la valeur des entreprises définie par la valeur marchande de leurs titres sur les marchés boursiers devrait être affectée par les fluctuations de taux de change. La relation entre les fluctuations du taux de change et les rentabilités des actions a fait l’objet de plusieurs études empiriques. Toutefois, les résultats sont divergents. Jorion (1990) teste un modèle pour 287 multinationales américaines sur la période de 1971 à 1987. Il trouve une différence transversale significative dans l’exposition au risque de change des entreprises. Toutefois, la mesure de l’exposition employée (la sensibilité du rendement de l’action à la variation du taux de change) n’est pas statistiquement différente de zéro d’une façon significative. Seulement 15 parmi 287 entreprises ont une variance de rendement corrélée d’une façon significative au taux de change sur la période d’étude. Bodnar et Gentry (1993) testent l’hypothèse de la variation de l’exposition au risque de change en travers les industries pour trois pays différents : Canada, le Japon et les Etats Unis. Premièrement, ils rapportent que 30 % des industries dans les pays étudiés ont une exposition significative aux mouvements du taux de change. Deuxièmement, en utilisant des variables itératives, ils testent si l’exposition au taux de change diffère selon le type de l’activité : importation ou exportation. Leurs résultats confirment les conclusions théoriques stipulant qu’une dépréciation (appréciation) de la monnaie nationale affecte négativement (positivement) les industries importatrices (exportatrices). Ceci prouve l’importance de la prise en compte des caractéristiques spécifiques à l’entreprise lors de la mesure de l’exposition au risque de change. Leurs résultats suggèrent aussi que l’impact des mouvements du 4 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH taux de change sur les rendements de l’industrie est plus important au Canada et au Japon qu’aux Etats Unis ; ce qui confirme le fait que les taux de change ont un effet plus important sur les économies ouvertes et les plus orientées sur l’international. Bodnar et Bartov (1994) affirment que pour déterminer une relation significative entre la valeur de l’entreprise et l’évolution du taux de change, il faut s’intéresser à un échantillon d’entreprises ayant le même signe d’exposition (c’est à dire toutes les entreprises étudiées bénéficient soit de la dépréciation, soit de l’appréciation de leur monnaie nationale).2 Cependant, ils ne trouvent pas une corrélation significative entre le rendement de l’action et les mouvements du dollar de la même période. Ils testent aussi l’hypothèse portant sur l’idée que le marché prend du temps pour incorporer toutes les implications du taux de change dans les prix des actions. Les résultats suggèrent qu’il y a un effet retard significatif. En d’autres termes, les fluctuations du taux de change ont un impact significatif sur le rendement anormal des actions des périodes futures. Donnelly et Sheehy (1996) se basent sur un échantillon des plus grands exportateurs canadiens (qui ont un taux d’exportation d’au moins 40%) pour étudier l’hypothèse en question. Leur analyse a détecté une relation contemporaine négative entre le taux de change et la valeur des entreprises exportatrices. L’effet retard est toutefois non significatif. Chow, Lee et Solt (1997) testent un modèle pour 213 multinationales américaines. Ils constatent que les différences transversales dans l’exposition au risque de change sont corrélées d’une façon statistique significative à la taille de la firme. Mais, contrairement à Jorion (1990), ils trouvent une relation non significative entre le niveau d’exposition au risque de change et le taux 2 Bodnar et Bartov (1994) choisissent les entreprises ayant des gains ou des pertes à l’étranger significatifs (plus de 5% du bénéfice avant impôt provient des opérations à l’étranger) sur une période de 3 à 5 ans antérieurs à l’année 1987. Puis et pour avoir un échantillon homogène en terme du signe de l’exposition, ils imposent qu’au moins 75% des ajustements au taux de change reportés soient négativement corrélés au variation de la valeur du dollar. 5 d’exportation. Ils concluent que les entreprises réussissent dans la couverture des variations du taux de change de court terme. He et Ng (1998) examinent l’exposition des multinationales japonaises au risque de change. En se basant sur les résultats de Amihud (1993) et de Bartov et Bodnar (1994) qui trouvent que les changements retardés et non contemporains sur le dollar peut expliquer cherchent à savoir si la valeur des multinationales japonaises est affectée par les changements de taux de change et si les changements de taux de change retardés ont un certain pouvoir explicatif sur les rendements courants des actions. Ils utilisent un échantillon comprenant 171 multinationales japonaises entre janvier 1979 et décembre 1993. Leurs résultats indiquent qu’approximativement 25% des entreprises étudiées connaissent économiquement une exposition significative au taux de change. Contrairement aux résultats des études américaines, les résultats de He et Ng (1998) ne montrent pas que les taux de change retardés ont un pouvoir explicatif. Il est à noter que lors de l’étude des effets des mouvements du taux de change sur les prix des actions, la recherche est souvent confrontée à un problème. Il est possible que l’entreprise a déjà adopté une stratégie de couverture. En effet, les entreprises peuvent théoriquement couvrir leur exposition au taux de change entraı̂nant ainsi une corrélation nulle entre le prix des actions et le taux de change. Ce problème est mentionné dans la majorité des études empiriques mais il est difficile à traiter vu que seulement peu d’entreprises révèlent leur position de couverture. Mahar et Huffman (2001) testent l’hypothèse portant sur la relation entre les rendements mensuels anormaux des actions et les fluctuations mensuelles de l’indice du taux de change en rapport avec l’utilisation des dérivés de taux de change. Ils montrent que l’effet retard est surtout observé chez les entreprises qui utilisent peu de dérivés et que l’exposition au taux de change diminue avec l’utilisation des instruments dérivés. D’après le résumé, qui vient d’être avancé, des études précédentes portant sur l’exposition au risque de change, il s’avère donc que les résultats sont 6 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH divergents. Nous essayons de traiter, dans ce qui suit, le cas des entreprises exportatrices françaises. 2.1. Les fluctuations du taux de change et les rendements des actions. En nous basant sur un échantillon d’entreprises exportatrices françaises, nous testons l’hypothèse suivante : Hypothèse : il existe une relation significative entre les rendements mensuels des actions des entreprises exportatrices et les fluctuations mensuelles de l’indice du taux de change. Nous commençons par présenter la méthode adoptée pour mesurer l’exposition au taux de change et puis nous décrivons l’échantillon d’étude et les variables de mesure. 2.1.1. La mesure de l’exposition au risque de change. La mesure de l’exposition au taux de change est une voie de recherche qui attire l’attention des financiers. La littérature a présenté trois méthodes. a. Un modèle à deux facteurs Il s’agit d’une version à deux facteurs du modèle de l’APT (Asset Pricing Theory) de Ross (1976). Ce modèle implique une relation linéaire entre les revenus espérés (en excès par rapport au taux sans risque) et la sensibilité au risque de marché et aux fluctuations du taux de change. E(R̃i ) = δ0 + δ1 βim + δ2 βis avec R̃it = R̃it∗ − R̃f∗ t . Dans ce modèle, la composante du taux de change est orthogonale au marché conformément aux hypothèses originales de l’APT. Cette orthogonalité est essentielle pour éviter le fait que le taux de change soit significatif dans l’explication des rentabilités parce qu’il est simplement corrélé aux mouvements du marché. Dans le contexte de ce modèle à deux facteurs, l’indice du marché peut être interprété comme une transformation des facteurs originaux qui ne sont pas connus. Comme l’expliquent Sweeney et Warga (1986) dans le contexte de leur modèle à deux facteurs portant sur le risque de taux d’intérêt, cette spécification est correcte si l’effet des facteurs omis est proche de zéro. Si δs est zéro, le modèle se réduit au modèle de Black. Le modèle peut s’interpréter comme un test du CAPM sous l’hypothèse que le facteur risque de change est non diversifiable. b. Un modèle pluri-factoriel (APT) 7 L’inconvénient du premier modèle est que la sensibilité aux fluctuations du taux de change peut être interprétée en termes de facteurs omis, comme le risque d’inflation qui peut être représenté par le taux de change. Ce modèle prend en compte les facteurs qui peuvent expliquer les rentabilités. Jorion (1991) utilise une formulation comportant six facteurs identiques à ceux de Chen, Roll et Ross (1986)3 et le taux de change comme facteur additionnel. Jorion (1991) teste les deux modèles précédents (le modèle à deux facteurs et le modèle pluri-factoriel) . Ses résultats empiriques montrent que le premier est mieux spécifié que le deuxième. c. Une régression La troisième méthode consiste à mesurer l’exposition au risque de change par des méthodes statistiques en utilisant une régression. Cette méthode est la plus utilisée dans la littérature portant sur l’exposition au taux de change des entreprises. Dumas (1978), Adler et Dumas (1980), Hodder (1982) définissent l’exposition économique au taux de change par le coefficient de la régression reliant la valeur de l’entreprise aux mouvements du taux de change. La définition standard de l’exposition au taux de change est donc une mesure de corrélation entre la valeur de l’actif réel et la fluctuation du taux de change réel. Adler et Dumas (1984) notent que le concept de l’exposition est arbitraire dans le sens où les prix des actions et les taux de change sont déterminés simultanément. La décomposition de la valeur de l’entreprise en composantes orthogonales n’implique pas une relation causale entre les taux de change et les prix des actions. Il s’agit simplement d’une décomposition statistique (comme plusieurs autres utilisées pour étudier la relation entre la valeur d’un actif et le taux d’inflation, les taux d’intérêt...). Cette relation non causale reflète le fait que les valeurs des actifs et les taux de change sont déterminés simultanément par des facteurs sous-jacent dans l’économie. Malgré cette simultanéité possible, l’hypothèse de l’équilibre partiel, stipulant que le taux de change est exogène à l’entreprise, est justifiée pour une société unique. En 3les six facteurs sont : la rentabilité de l’indice du marché, le taux de croissance de la production industrielle, les séries de changement du taux d’inflation, l’inflation inattendue, les primes de risque et la structure par termes du taux d’intérêt. 8 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH effet, si l’entreprise représente une petite part de l’activité totale de l’économie internationale, il apparaı̂t que le taux de change dépend largement de facteurs autres que les actions d’une entreprise unique. Adler et Dumas (1984) considèrent que l’exposition économique au risque de change peut donc être mesurée en utilisant une régression simple dont la variable expliquée est la valeur de la société et la variable explicative est la variation du taux de change. Mais puisque la valeur de la société devrait être reflétée dans le prix de ses actions, la régression peut être estimée en utilisant le prix de l’action de la société comme variable dépendante. Si nous supposons que les variations des prix des actions et du taux de change sont approximativement non anticipées, l’exposition peut donc être obtenue à travers cette équation : Rit = βi0 + βix Rxt + υit t = 1...T (1) Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rxt est le taux de rendement de l’indice du taux de change, mesuré comme le prix de la devise étrangère en monnaie propre du pays de l’action en étude. Une spécification alternative de (1) qui prend explicitement en compte les fluctuations du marché est : Rit = βi0 + βim Rmt + βix Rxt + it t = 1...T (2) Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. Comme dans le modèle du marché, où le coefficient du portefeuille du marché (l’équivalent du βim ) mesure le risque de l’action de l’entreprise dû aux mouvements de l’indice du marché, βix mesure l’exposition aux fluctuations du taux de change. Il décrit la sensibilité propre du rendement de l’action aux changements non anticipés des taux de change. Plus précisément, βix mesure l’exposition au taux de change indépendamment de l’exposition du tout le marché. Une appréciation de la monnaie nationale rend les biens exportés plus chers en terme de devise étrangère, et ceci peut entraı̂ner une baisse de la demande étrangère du bien ou des revenus des ventes à l’étranger. Par conséquent, une appréciation de la monnaie nationale nuit aux entreprises exportatrices. Au contraire, les entreprises importatrices tirent bénéfice de la dépréciation de 9 la devise étrangère vu que les biens importés seront moins chers en terme de monnaie nationale. De ce fait, le coefficient βix serait négatif pour les entreprises importatrices et positif pour les entreprises exportatrices. Mais il reste ambigu pour les entreprises qui importent et exportent en même temps. Dans ce cas, la sensibilité de la valeur de l’action aux fluctuations du taux de change dépend de l’élasticité de la demande de l’entreprise des biens importés relativement à l’élasticité de la demande des marchés étrangers des produits de cette même entreprise (les exportations). Dans cette étude, nous nous recourons à cette troisième méthode. C’est à dire notre mesure de l’exposition au risque de change se base sur l’estimation de la régression (2). 2.1.2. La sélection de l’échantillon et les variables explicatives de la régression. Notre but est de tester l’hypothèse portant sur la relation entre la rentabilité des actions et les fluctuations du taux de change pour le cas des entreprises exportatrices françaises. Nous essayerons donc d’étudier la régression (2) sur deux périodes différentes, avant et après le passage à l’euro, c’est à dire le 1 er janvier 1999 (date de démarrage des opérations de change en Euro). Nous estimons la régression (2) sur la période de janvier 1996 à décembre 1998 et puis sur la période de janvier 1999 à décembre 2001. Nous engageons ensuite une comparaison des résultats pour conclure sur l’effet de l’adoption de l’Euro sur l’exposition au risque de change des entreprises exportatrices françaises. Nous commençons par décrire la sélection de l’échantillon des entreprises exportatrices. En nous intéressant à ce type d’entreprises, nous pouvons examiner les sources des différences transversales dans l’exposition au risque de change. Nous discutons ensuite les variables explicatives utilisées pour estimer le modèle (2). 2.1.3. L’échantillon de l’étude. La sélection des entreprises françaises se base sur l’information concernant leurs activités à l’étranger, mesurées par le ratio d’exportation. Ce ratio représente le montant des exportations de l’entreprise rapporté au chiffre d’affaires total hors taxe. Jorion (1990), He et Ng (1998) s’intéressent aux entreprises disposant d’au moins 10% de leur chiffre d’affaires à l’exportation (ceci est dû au fait qu’aux États Unis, les sociétés sont 10 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH obligées de présenter une analyse géographique de leurs opérations à l’étranger dans le cas où elles présentent 10% des opérations totales).4 Dans le but de comparer nos résultats aux études qui ont marqué le plus la littérature sur le sujet, nous adoptons le même critère d’échantillonnage pour les entreprises françaises cotées sur le marché boursier français (premier marché et second marché). À l’encontre de Jorion (1990) et de plusieurs autres études, nous nous intéressons aux groupes et non pas aux entreprises individuelles (nous travaillons donc sur les comptes consolidés et non pas sur les comptes sociaux) parce que le cours sur le marché boursier est celui de l’action du groupe et non pas de l’entreprise individuelle. Comme Allayannis et Ofek (2001), nous choisissons l’échantillon en nous basant sur les rapports des entreprises d’une année et par la suite nous étudions l’hypothèse sur une période de trois ans environnant l’année du choix de l’échantillon. Une fois la relation caractérisée, nous étudions les déterminants de cette exposition toujours sur la même année. Nous procédons donc comme suit : – l’étude de la relation entre le taux de change et la rentabilité des entreprises sur la période de janvier 1996 à décembre 1998. – l’étude du même échantillon sur la deuxième période de janvier 1999 à décembre 2001 et la comparaison des résultats avec les premières pour conclure sur l’effet de l’euro sur le type de relation entre la rentabilité et le taux de change. Les données utilisées dans cette étude sont extraites de la base de données DIANE (DIsque pour l’Analyse Economique). La sélection de l’échantillon s’est opérée selon les critères suivants : – être coté sur le premier ou le second marché de la bourse de Paris au 01/01/1996 (parce que notre première analyse concerne la période s’étalant de janvier 1996 à décembre 1998) – avoir un taux d’exportation minimum de 10% sur l’année du milieu de la période d’étude. Autrement dit, nous choisissons les entreprises ayant un ratio d’exportation minimum de 10% au cours de l’année 1997. 4Financial Accounting Standard n◦ 14, Décembre 1976 11 Les taux de rendements mensuels sont calculés à partir des cours mensuels fournies par Datastream. Analyse descriptive de l’échantillon : 272 entreprises satisfont les trois critères de recherche de l’échantillon. Nous avons éliminé les sociétés holdings5 et aussi les sociétés dont l’objet est la prise de participation, la gestion des valeurs mobilières et l’administration des entreprises (codes NAF 652E et 741J). Ce type d’entreprises peut bénéficier d’une diversification naturelle des risques financiers. L’échantillon se réduit donc à 100 entreprises. (56/100) entreprises ont un taux d’exportation supérieur à 50% (17/100) entreprises ont un taux d’exportation inférieur à 20%. Tableau 2. La distribution des taux d’exportation pour l’échantillon. minimum q1 median q3 maximum moyenne Le taux d’exportation en 1997 10.08% 23.43% 54.2% 73.495% 99.86% 51.04% Le taux d’exportation en 2000 0 0 34.06% 62.65% 90.83% 35.21% Le dernier tableau prouve que le taux d’exportation a diminué en passant de l’année 1997 à 2000. En examinant le niveau des exportations en 2000, il s’avère que (30/100) ont un taux d’exportation égal à 0%. Ces mêmes entreprises ont un taux d’exportation moyen en 1997 égal à 55.78%. Ceci confirme le fait que la notion de l’exportation est disparue dans la zone euro. Des entreprises qui sont fortement exportatrices avant 1999 ne le sont plus maintenant si leur exportation se concentrait totalement sur le marché européen. 2.1.4. Les facteurs économiques de l’exposition : les variables explicatives de la régression. Dans cette étude, nous utilisons deux facteurs économiques pour expliquer la rentabilité des actions : (1) les facteurs associés au risque du marché (le rendement du portefeuille du marché) et (2) le facteur risque de change. Lors du choix de l’indice du marché, on est souvent confronté à la difficulté de trouver un indice de marché purement domestique. Dans la majorité des 5 Une société holding est par définition, une société qui détient un nombre important de participations dans d’autres sociétés dans le but d’exercer un contrôle politique sur ces sociétés. Une société holding ne dispose donc pas d’une activité commerciale ou industrielle proprement dite. 12 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH études passées, le risque de marché est représenté par un indice de marché formé d’actions national ; les poids de pondération est la capitalisation du marché.Toutefois, cet indice peut être largement déterminé par des entreprises impliquées dans les activités l’étranger (multinationales, exportatrices, importatrices...) et dans la majorité des cas, ce sont les multinationales qui ont la capitalisation la plus importante. Tout ceci rend difficile de séparer l’influence des facteurs purement domestiques des facteurs internationaux. Pour contourner ce problème, Diermeier et Solnik (2000), dans le but de présenter un modèle d’évaluation globale des titres (en prenant en compte les facteurs internationaux, les facteurs domestiques et les facteurs de l’évolution des taux de change), ont essayé de créer un indice domestique différent de l’indice national. Ils ont construit un portefeuille d’entreprises dont les activités sont principalement domestiques. Toutefois, Adler et Dumas (1984) ont montré que mêmes les entreprises purement domestiques sont exposées aux fluctuations du taux de change. Donc, le facteur de taux de change dépasse les facteurs géographiques pour toucher à toute l’économie. Pour ces raisons, le portefeuille du marché sera présenté dans notre cas par l’indice CAC 40 de la bourse de Paris. Tel choix est justifié par le fait que le CAC est formé par les 40 plus grandes sociétés sur le marché financier français. Il est donc capable de reproduire les mouvements sur ce marché. Les valeurs mensuelles de cet indice sont fournies par Datastream permettant ainsi de calculer les rentabilités mensuelles correspondantes. Le risque de change est représenté par le rendement d’un indice de taux de change (trade-weighted exchange rate index). Comme Jorion (1990, 1991), Bodnar et Gentry (1993), Bartov et Bodnar (1994) et He et Ng (1998), nous utilisons un indice de change pour représenter le risque de taux de change. Il s’agit d’une mesure de la valeur d’une devise (ici le franc ou l’euro) contre un panier d’autres devises relativement à une date de base. C’est le taux de change moyen pondéré du franc vis à vis les monnaies des principaux pays avec lesquels la France a des relations commerciales. Les pondérations retenues étant celles utilisées pour le modèle de taux de change du fonds monétaire international. Nous utilisons deux indices de taux de change. Le premier est valable pour la première période. Il représente le prix en franc d’une unité de devise étrangère. Le second, valable pour la deuxième période, 13 représente le prix en Euro d’une unité de devise étrangère. Les valeurs de ces indices sont fournies par Datastream ; ce qui nous permet de calculer les rentabilités correspondantes. 2.2. Les résultats de la régression 2. La régression (2) est estimée en utilisant les rentabilités des actions de l’échantillon formé par des entreprises cotées sur le marché boursier français et dont le taux d’exportation minimum est de 10% minimum sur l’année 1997. Nous commençons tout d’abord par estimer la régression (2) sur la période de janvier 1996 à décembre 2001 puis sur chacun des deux sous périodes : de janvier 1996 à décembre 1998 et de janvier 1999 à décembre 2001. Les estimations sont faites à l’aide de la méthode des moindres carrées ordinaires en utilisant Matlab. Les résultats de l’estimation de la régression (2) peuvent être récapitulés dans le tableau 4.6 Tableau4. Distribution des coefficients d’exposition au risque de change b βix pour les 100 entreprises sur les différentes périodes. Le tableau reporte les quartiles des βbix , résultats du modèle suivant : Rit = βi0 +βim Rmt + βix Rxt +it avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rxt est le taux de rendement de l’indice du taux de change. Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. mois : année Min ∗ 01 :1996-12 :2001 −5, 3008 ∗ 01 :1996-12 :1998 −6, 5482 01 :1999-12 :2001 -3,3223 q1 median q3 Max -1,23445 -0,1058 1,14885 13,2337 0.136703 ∗ -0.09254 ∗ 0,152716 -2.18017 -0.05755 -0,46172 0,06745 1.5647 moyenne 5, 5721 0,648225 6, 2523 * significatif au niveau de 5%. Le tableau 4 présente la distribution transversale des βbix des 100 entreprises, comme définis dans la régression (2) pour toute la période (’full period’) et pour les deux sous périodes. Il reporte les quartiles et la moyenne des valeurs de βbix . 2.2.1. L’estimation de la régression (2) pour la deuxième période. Pour la deuxième période de janvier 1998 à décembre 2001, nous avons testé la régression(2) en utilisant en premier lieu l’indice du franc comme variable approximative du risque de change et puis l’indice de l’euro. Les résultats des 6 Nous avons effectué les tests d’autocorrélation des erreurs en utilisant le test de Durbin et Weston. Les résultats montrent que les résidus ne sont pas autocorrélés. 14 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH deux estimations sont différents. Ils montrent que le nombre des coefficients significatifs est moins important lorsque nous utilisons l’indice du franc. Il faut juste noter que les actions exposées significativement aux fluctuations de l’indice du franc sont aussi exposées significativement aux mouvements de l’indice de l’euro. Nous pouvons donc conclure qu’il y a plus d’entreprises exposées aux mouvements de l’indice de l’euro que de l’indice du franc. Après la date du démarrage des opérations du change en euro, les entreprises sont plus exposées aux fluctuations de l’euro et leurs transactions sont plutôt libellées en cette monnaie. Tableau 5. Le nombre des βbix significatifs sur la période 1999-2001. Le tableau reporte le nombre de βbix significatifs au niveau de 10% estimés par la régression suivante : Rit = βi0 + βim Rmt + βix Rxt + it avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. Dans un premier temps, Rxt est représenté par l’indice du franc. Puis, il est présenté par l’indice de l’euro. L’indice de change Nombre βbix significatif indice du franc 9 indice de l’euro 14 2.2.2. Interprétation des résultats des estimations. Les résultats de l’estimation de la régression (2) nécessitent une certaine interprétation en ce qui concerne le signe de l’exposition, les caractéristiques des entreprises exposées significativement au risque de change et enfin le pourcentage des entreprises ayant des coefficients d’exposition significatifs. a. Le signe de l’exposition Comme nous l’avons déjà avancé dans la section précédente, les entreprises exportatrices bénéficient théoriquement de la dépréciation de sa monnaie propre et donc de l’appréciation de l’indice du taux de change. Cependant si nous nous intéressons aux coefficients significatifs dans les deux périodes, nous remarquons que le nombre des bêtas négatifs est supérieur à celui des bêtas positifs. Bien que le taux d’exportation est considérable (supérieur à 50% en moyenne), certaines entreprises ont un coefficient d’exposition négatif. Ces entreprises subissent donc un effet inverse lors de l’appréciation de l’indice du taux de change (indice du franc et indice de l’euro). Ceci peut s’expliquer par le fait que les entreprises importent aussi de l’étranger. Ça 15 peut être aussi le cas où l’entreprise exporte en sa monnaie propre mais importe en devise ou que l’entreprise détient des filiales à l’étranger faisant en sorte que l’appréciation de l’indice de change bénéficie à l’entreprise. Du fait qu’une décomposition fine des différentes opérations de l’entreprise à l’étranger n’est pas disponible, nous sommes incapables de décrire minutieusement et exactement le type de l’exposition au risque de change. b. Comparaison des résultats Les résultats de l’estimation de la régression (2) nous permettent de représenter le tableau 6 portant sur le nombre des bêtas significatifs. Tableau 6. Le nombre des βbix significatifs sur les deux périodes : 01 :1996-12 :1998 et 01 :1999-12 :2001. Le tableau reporte le nombre de βbix significatifs au niveau de 5% et 10% estimés par la régression suivante : Rit = βi0 + βim Rmt + βix Rxt + it avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rxt est la rentabilité de l’indice de change. Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. mois : année indice du change n. βbix sign. 5% n. βbix sign. 10% n. total moyenne R2 01 :1996-12 :1998 indice du franc 5 8 8% 21,51% 01 :1999-12 :2001 indice de l’euro 7 14 14% 14% Le tableau 6 montre que le nombre des βix significatifs, c’est à dire le nombre d’entreprises exposées significativement au risque de change augmente en passant de la première période à la deuxième période. Ceci peut révéler le fait que l’exposition s’est amplifiée suite au passage à l’euro. Les entreprises exposées au risque de change dans la deuxième période ont un taux d’exportation élevé. Ceci montre que pour ces entreprises, les exportations vont aux pays autres que ceux de la zone euro puisque la vente dans cette zone n’est plus considérée comme exportation. c. Le nombre des βix significatifs Mis à part l’impact de l’euro sur l’exposition au risque de change, il est clair que les pourcentages des coefficients significatifs ne sont pas importants. Tableau 7. Le nombre des βbix significatifs. Le tableau reporte le nombre de βbix significatifs au niveau de 5% et 10% estimés par la régression suivante : Rit = βi0 + βim Rmt + βix Rxt + it avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rxt est la rentabilité de l’indice de change. Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. 16 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH mois : année indice du change n. βbix sign. 5% n. βbix sign. 10% total 01 :1996-12 :2001 indice du franc 3 8 8% 01 :1996-12 :1998 indice du franc 5 8 8% 01 :1999-12 :2001 indice de l’euro 7 14 14% Ces résultats sont similaires à ceux reportés dans les études antérieures. Jorion (1990) trouve que seulement 15 parmi 278 (5.39%) entreprises ayant un taux d’exportation minimum de 10% sur la période de janvier 1971 à décembre 1987 ont des coefficients d’exposition significatifs. En utilisant des données relatives aux 32 plus larges exportateurs américains sur la période 1979 au 1988, Amihud (1994) ne trouve pas une relation significative entre les fluctuations du taux de change et les rentabilités des actions. Bartov et Bodnar (1994) montrent qu’il n’y a pas de corrélation entre les rendements anormaux de 208 entreprises ayant des affaires à l’étranger et les fluctuations du dollar sur la période 1978 à 1990. He et Ng (1998) trouvent qu’environ 25% d’un échantillon de 171 entreprises japonaises ayant un ratio d’exportation minimum de 10% sur la période 1979 à 1993 sont exposées positivement et significativement aux fluctuations du Yen. D’autres études ont, cependant analysé l’exposition au taux de change des branches industrielles. Bodnar et Gentry (1993) trouvent que seulement peu d’industries au Canada, Japan et aux États Unis ont une exposition exposition significative au taux de change durant la période de 1979 à 1988. En particulier, 9 sur 39 industries américaines et 5 sur 20 industries japonaises sont significativement exposées au taux de change. Allayannis (1995) indique qu’une exposition significative au taux de change est masquée au niveau industriel. Cette illustration montre que nos résultats sont comparables à ceux des études antérieures conduites sur d’autres marchés. Le fait que peu d’entreprises exportatrices disposent d’une exposition significative au taux de change n’implique pas que les entreprises exportatrices sont insensibles au risque de change. Gendreau (1994) trouve qu’il est inconcevable que cette relation entre le taux de change et les rentabilités des actions détectée dans les études empiriques implique que les variations du change n’ont pas d’effet sur les rendements des actions des entreprises exportatrices. La question qui mérite d’être posée est : quelles sont les causes qui font que le coefficient d’exposition au risque de change n’est (statistiquement) 17 significatif que pour un faible pourcentage d’entreprises exportatrices malgré le lien logique entre la rentabilité de ce type d’entreprises et les mouvements du taux de change ? 2.3. Des spécifications alternatives. La robustesse des résultats trouvés par l’estimation de la régression (2) sera examinée à travers d’autres spécifications de l’étude. Nous commençons par étudier l’effet du choix d’un autre portefeuille de marché pour représenter le risque du marché. Nous examinons ensuite l’effet retard proposé par Bartov et Bodnar (1994). 2.3.1. Le choix du portefeuille du marché. L’explication des rendements des actions par les fluctuations du taux de change et le risque du marché pose le problème du choix du portefeuille du marché. Dans cette sous section, nous cherchons à tester la robustesse des résultats en utilisant un autre indice du marché : le SBF 120. L’estimation de la régression (2), en utilisant ce deuxième indice, donne des résultats similaires à ceux obtenus lorsque nous avons représenté le portefeuille du marché par le CAC 40. Le tableau 8 présente la distribution des coefficients d’exposition au risque de change. Tableau 8. Distribution des coefficients d’exposition au risque de change βbix des entreprises exportatrices françaises quand l’indice du marché est le SBF 120. Le tableau reporte les quartiles des βbix , résultats de l’estimation du modèle suivant : Rit = βi0 + βim Rmt + βix Rxt + it ; avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société, Rxt est le taux de rendement de l’indice du taux de change, Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché, it est un terme d’erreur. mois : année Min ∗ 01 :1996-12 :2001 −5, 2101 ∗ 01 :1996-12 :1998 −6, 5357 01 :1999-12 :2001 -3,1674 q1 median q3 Max -1,1231 -0,0621 1,13875 13,2174 -1.7528 0.15705 -0,459 0,099 1.6657 moyenne 0.146 ∗ 0.0838 ∗ 0.1555 5, 7196 0.609075 6, 2544 Il est donc clair que la distribution des coefficients sur les trois périodes est pratiquement identique à celle trouvée lorsque l’indice du cac 40 a été utilisé (Tableau 4). Ceci est valable même si nous comparons les deux séries de bétas (calculés respectivement en utilisant CAC40 et SBF 120). Nos résultats de base sont donc insensibles au choix du portefeuille de marché. 18 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH 2.3.2. L’effet retard des fluctuations du taux de change. Il peut s’écouler un certain temps avant que les investisseurs ne prennent pleinement conscience des effets d’une évolution des taux de change sur la valeur de marché d’une entreprise. Il peut donc exister un décalage temporel entre la survenance d’une fluctuation des changes et ses effets sur la valeur de marché d’une entreprise. Bartov et Bodnar (1994) suggèrent que les investisseurs apprennent graduellement l’impact total des changements du taux de change sur la valeur de la société au fur et à mesure qu’une nouvelle information arrive. L’effet des fluctuations des taux de change ne se répercute pas toujours immédiatement sur la valeur de marché de l’entreprise. Bartov et Bodnar (1994) proposent ainsi la prise en compte des changements retardés des taux de change en plus des effets contemporains lors de l’étude de la relation entre la rentabilité des actions et la variation du taux de change. Nous testons alors cette hypothèse en estimant l’extension suivante du modèle (2) : Rit = βi0 + βim Rmt + βix1 Rxt + 3 X βix(−j) Rx(t−j) + µit i = 1...N (3) j=1 où trois retards des changements mensuels du taux de change est ajouté. Rxt−j est le taux de rendement de l’indice du taux de change j mois passés. La régression (3) est estimée pour le même échantillon sur les deux périodes de l’étude. Le tableau qui suit présente le nombre des coefficients d’exposition significatifs en considérant les différents retards. Tableau 9. Le nombre des βbix significatifs. Le tableau reporte le nombre de βbix significatifs au niveau de 10% estimés par la régression P3 suivante : Rit = βi0 + βim Rmt + βix1 Rxt + j=1 βix(−j) Rx(t−j) + µit avec Rit est le taux de rendement de l’action de la i ème société. Rxt est la rentabilité de l’indice de change. Rmt est le taux de rendement du portefeuille du marché. it est un terme d’erreur. β̂ix β̂ix(−1) β̂ix(−2) β̂ix(−3) 01 :1996-12 :2001 10 17 6 6 01 :1996-12 :1998 11 22 19 10 01 :1999-12 :2001 13 16 8 6 Nous pouvons conclure à travers le dernier tableau que pour la période entière et les deux sous périodes, le plus grand pourcentage des bêtas significatifs est celui calculé par rapport aux rentabilités du taux de change avec un retard de 1 mois. Nous pouvons donc confirmer la proposition de Bartov 19 et Bodnar (1994). He et Ng (1998) reportent que seulement 6 parmi 171 entreprises ont des coefficients d’exposition significatifs aux mouvements de taux de change avec un mois de retard ; cependant, 25% de l’échantillon sont significativement exposées aux fluctuations contemporaines de l’indice de change. Nydhal (2000) montre aussi que l’effet retard n’est pas significatif pour le cas d’entreprises suédoises. Pour la période de janvier 1999 à décembre 2001, l’effet retard n’est plus relativement significatif à partir du deuxième mois. Les fluctuations du taux de change se répercutent donc immédiatement ou avec un retard d’un mois. Ceci peut s’expliquer par le fait que dans cette période de passage à l’euro, toutes les attentions sont concentrées sur les effets de cette nouvelle monnaie sur les valeurs des actifs financiers et les commerces à l’extérieur. Nous pouvons donc affirmer que pour le cas de notre échantillon, il y a un effet retard d’un mois. Ceci se voit pour la période entière et les deux sous périodes où le pourcentage des entreprises exposées significativement (au taux de 5% et 10%) est plus élevé si nous comptons pour l’effet retard d’un mois. 2.3.3. A quoi peut-être due la relation faible entre la rentabilité des actions et les fluctuations des taux de change. . Bien que nous avons testé le modèle en utilisant différentes spécifications, le pourcentage des entreprises ayant des coefficients d’exposition significatifs reste pas très important. Toutefois, et comme il a été avancé, ces pourcentages se situent dans la même fourchette que ceux des études précédentes. Le fait qu’un faible pourcentage d’entreprises soient exposées significativement au taux de change n’implique pas que les fluctuations de change n’ont pas d’effet sur la performance des entreprises exportatrices. Nous essayons dans ce qui suit d’avancer quelques raisons pouvant expliquer nos résultats. (1) L’analyse par des régressions suppose que l’exposition de la firme est constante et linéaire à travers la période de trois ans (et de six ans si on s’intéresse à la période entière). Cependant, ces hypothèses ne sot pas imposées par la théorie et peuvent être empiriquement non appropriées. 20 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH (2) Dans les régressions précédentes, les indices du taux de change ont été utilisés pour capturer les fluctuations de la devise. Ceci est en accord avec les études antérieures (Jorion (1990, 1991) ; Bodnar et Gentry (1993) ; Bartov et Bodnar (1994) ; He et Ng (1998) etc). Bien que l’indice du taux de change soit approprié pour la détection des mouvements effectifs des devises, il ne l’est pas forcément pour une entreprise à part. Une entreprise individuelle peut être exposée à une devise unique sans être affectée par les fluctuations de l’indice du taux de change. Il est intéressant de construire un indice du taux de change valable pour chaque entreprise à part tout en se basant sur des informations spécifiques à l’entreprise comme la diversification des exportations, les devises de facturation etc. Malheureusement, de telles informations ne sont pas disponibles pour un grand nombre d’entreprises. Ce qui empêche d’étudier la relation entre le rendement d’une action et les mouvements de change pour chaque entreprise à part. (3) L’entreprise peut avoir des activités diversifiées ou des exportations à différents pays éliminant de ce fait une grande partie du risque de change. D’après la théorie de portefeuille, la diversification diminue le risque et augmente la rentabilité. (4) L’entreprise exportatrice peut avoir aussi recours à des activités d’importation dont le type d’exposition est inverse à celui des activités d’exportation, créant de ce fait une compensation naturelle des deux types d’exposition. (5) La quatrième raison que nous considérons pertinente dans l’explication des résultats trouvés se base sur les stratégies de gestion du risque de change adoptées par les entreprises en question. En effet, les entreprises peuvent gérer leur risques financiers en adoptant des stratégies de couverture ou en ajustant leur politiques d’exploitation. Théoriquement, ces entreprises peuvent éliminer une grande partie de leur risque. Par conséquent, la corrélation entre leur valeur et les taux de change sera faible ou nulle. 21 3. Les déterminants de l’exposition au risque de change Jorion (1990) relie l’exposition au risque de taux de change au niveau des affaires à l’étranger mesuré par le ratio d’exportation. Les résultats confirment l’hypothèse que cette exposition est positivement reliée au ratio de ventes à l’étranger. D’autres études ont essayé d’expliquer l’exposition au taux de change par le niveau d’exportation et l’utilisation des dérivés de taux de change. Nydahl (1999) relie l’exposition estimée aux variables suivantes : le niveau d’exportation, le ratio des actifs libellés en devise étrangère sur le total des actifs, le ratio des salaires des employés dans les pays étrangers sur le total des salaires payés et le ratio de la valeur de la couverture (matérialisée par la valeur des dérivés de change utilisés) sur le total des actifs. Ses résultats montrent que seuls le niveau d’exportation et le niveau de la couverture ont un impact significatif (respectivement positif et négatif) sur l’exposition au risque de change. Allayannis et Ofek (2001) expliquent l’exposition au risque de change par le niveau de l’exportation et par l’utilisation des dérivés de taux de change représentée par le ratio de la valeur des dérivés sur total des actifs. Leurs résultats montrent que les deux variables ont un impact significatif sur l’exposition estimée. En ce qui concerne le cas français, les informations sur l’utilisation des dérivés et les stratégies de couverture adoptées par les entreprises ne sont importantes ni en terme quantitatif ni qualitatif. De plus, l’utilisation des dérivés n’est qu’un moyen alternatif de la gestion des risques. Une entreprise exposée au risque de change peut par exemple gérer son risque à travers l’adaptation de son activité de production. Elle peut choisir d’autres fournisseurs et d’autres marchés en fonction de l’évolution du taux de change. Pour ces deux raisons, nous allons essayer de voir si l’exposition au risque de change estimée 7 dans la section précédente peut être expliquée par des variables représentant les déterminants de la gestion des risques en général et par l’importance de l’activité à l’étranger mesurée par le ratio d’exportation. 7 Nous allons utiliser les coefficients d’exposition par rapport aux mouvements de l’indice de change de (t-1) estimés en utilisant la régression (3) pour la période de janvier 1996 à décembre 1998. 22 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH He et Ng (1998) utilisent cette même méthode pour expliquer l’exposition d’un échantillon d’entreprises japonaises sur la période de 1979 à 1993. Nous commençons par un bref rappel sur les déterminants de la gestion des risques financiers et des variables approximatives utilisées. Le choix de ces variables est fait sous la contrainte de la disponibilité des données pour le cas du marché français. 3.1. Les déterminants de l’exposition et les variables approximatives. Comme il a été avancé, nous allons essayer de relier les expositions au risque de change aux variables relatives à l’importance des activités à l’étranger et aux déterminants de la gestion des risques financiers. A. Le taux d’exportation Les études existantes montrent que l’exposition au risque de change est significativement reliée au niveau des opérations à l’étranger. Jorion (1990) trouve que l’exposition est positivement au ratio d’exportation. Théoriquement, plus l’entreprise exporte, plus elle est exposée aux fluctuations du taux de change. Nous représentons l’importance des activités à l’étranger par le ratio d’exportation de l’entreprise noté par EXPR (= ventes à l’étranger/chiffre d’affaires total hors taxe). La relation entre l’exposition au risque de change et le ratio EXPR serait donc positive. B. Les variables relatives aux déterminants de la couverture Stulz (1984), Smith et Stulz (1985), Smith (1995) et Froot, Scharfstein et Stein (1993) prouvent que la gestion des risques financiers permet : de réduire les coûts de la détresse financière, de réduire les coûts de financement externe, de coordonner les décisions financières et de résoudre le problème d’agence de la dette. Nous présentons ci-dessous un bref rappel de ces déterminants et nous discutons les variables approximatives utilisées pour le test. a. Les coûts de la détresse financière Ces coûts sont principalement élevés dans les entreprises qui ont des probabilités de défaillance financière élevées ou des dettes importantes. La couverture peut réduire la probabilité de faillite de l’entreprise et par conséquent les coûts de la détresse financière. Par conséquent, les entreprises qui anticipent des primes de risque élevées sont plus motivées à couvrir leurs risques 23 pour réduire les coûts de la détresse financière et augmenter la valeur nette de la firme. Nous pouvons utiliser trois variables pour mesurer la probabilité de la détresse financière. – La première variable est le ratio dettes financières sur fonds propres (DE). DE mesure le ratio de la valeur comptable de la dette financière sur la valeur de marché des actions en fin d’année. Les entreprises dont le DE est élevé sont plus exposées au risque de détresse financière et elles ont donc une tendance à entreprendre des activités de couverture. Par conséquent, nous présumons que plus les entreprises sont endettées plus elles couvrent leur risque (de change) et donc moins importante est leur exposition au risque de change. La relation prévue entre l’exposition au risque de change et le ratio DE serait donc négative. – La deuxième variable est le ratio montant des intérêts payés sur Excèdent Brut d’Exploitation. Ce ratio sera noté par CI. Il capte le taux de couverture des intérêts de la dette par l’excédent brut d’exploitation. Plus le ratio de couverture des intérêts est faible, plus l’entreprise a une grande probabilité de couvrir ses risques (ici le risque du taux de change) et donc la relation entre ce ratio et l’exposition au risque de change serait positive. – La troisième variable est le ratio capacité de remboursement (REM), qui est égal au ratio capacité d’autofinancement sur dettes financières. Plus ce ratio est élevé, plus l’entreprise n’est pas intéressée par la couverture de ses risques financiers, et par conséquent son exposition au risque de change est élevée. La relation entre ce ratio et le coefficient d’exposition serait positive. b. Les coûts du financement externe et les options de croissance Smith et Stulz (1985) et Froot et al. (1993) ont montré que la couverture des risques financiers (le risque de change, le risque de taux d’intérêt et le risque de prix) peut réduire les fluctuations des revenus internes et donc diminuer les besoins de financement externes des projets, en particulier dans le cas de situation financière difficile. Généralement, le financement externe est plus coûteux en contexte d’information asymétrique entre les dirigeants, les actionnaires et les créanciers. Nous employons le ratio (AF = capacité 24 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH d’autofinancement/total actif) pour présenter l’autonomie financière de l’entreprise. Plus la capacité de financement est importante, moins l’entreprise couvre son risque. La relation entre ce ratio et l’exposition au risque de change serait donc positive. Dans certains cas, l’entreprise peut être amenée à sous-investir, si les coûts du financement externe sont élevés. Cela montre que les opportunités de croissance et les coûts du financement sont inter-reliés. Nous employons le ratio BM (valeur comptable sur valeur de marché de l’entreprise)8 pour capturer les options de croissance de l’entreprise et représenter ainsi le problème du sous-investissement. Si BM est faible, l’entreprise est une valeur de croissance. Elle dispose donc des opportunités de croissance. Si en même temps, elle a des difficultés pour avoir des fonds externes nécessaires à la saisie de ces opportunités, elle peut être amenée à sous investir. Elle aura donc tendance à couvrir ses risques car ça lui permet d’éviter les fluctuations non nécessaires dans les dépenses d’investissement et d’éviter donc le problème du sous-investissement. Par conséquent, l’exposition au risque de change sera faible. La relation prévue entre l’exposition et le ratio BM serait donc positive. c. Les coûts d’agence La théorie de l’agence stipule que dans le cas d’une entreprise endettée, accepter un projet à valeur actuelle nette (VAN) positive peut diminuer la richesse des actionnaires si les gains vont principalement aux créanciers en place. En conséquence, les dirigeants agissant dans l’intérêt des actionnaires seront tentés de refuser certains projets à VAN positive. La littérature sur la gestion des risques financiers a démontré que la couverture permet de diminuer les incitations à sous investir. Pour décrire les options de croissance de l’entreprise, nous pouvons utiliser le ratio bénéfice par action sur cours. Il sera noté par EP. Plus ce ratio est élevé, moins l’entreprise couvre ses risques. Le signe attendu est positif. 8 La formule utilisée pour le calcul de BM est actif /action cours 25 Nance, Smith et Smithson (1993) montrent que les entreprises peuvent résoudre le problème d’agence de la dette en maintenant un ratio de rendement de dividende faible(dividend yield : DY)9. Donc, une entreprise disposant d’un ratio (DY) faible est moins censée avoir des problèmes d’agence et dispose d’une liquidité suffisante pour financer ses projets. Par conséquent, elle sera moins motivée pour couvrir ses risques et l’exposition au risque de change sera élevée. La relation entre le coefficient d’exposition au risque de change et le DY serait négative. d. Les substituts à la couverture : la liquidité Pour mesurer les contraintes de liquidité de l’entreprise, nous pouvons utiliser le ratio de trésorerie (=fonds de roulement/ besoin en fonds de roulement). Plus ce ratio est élevé, plus l’entreprise a des liquidités pour financer ses projets d’investissements et, en conséquence moins elle a besoin de se couvrir. La relation théorique entre ce ratio et l’exposition au risque de change est positive. e. La taille de l’entreprise Il s’agit d’une variable de contrôle qui peut être une mesure indirecte du coût de financement. En général, les grandes entreprises ont plus de pouvoir de négociation et ont donc des coûts de financement plus faibles ; ce qui réduit les besoins de couverture des risques. Toutefois, les grandes entreprises ont plus de facilité pour accéder au marché de produits dérivés : personnel qualifié, logiciels, analystes financiers... La plupart des enquêtes montrent que ce sont les grandes entreprises qui couvrent les risques alors que ce sont les plus petites qui en ont le plus besoin. Nous devrions donc prévoir un signe ambigu pour cette variable. Pour contrôler l’effet taille, nous employons le Log du total des actifs. La relation entre cette variable et l’exposition estimée ne peut pas être prévue correctement pour les raisons citées. Le tableau 10 présente une récapitulation des variables utilisées pour l’explication de l’exposition estimée dans la partie précédente et du signe prévu du coefficient de ces variables. 9 DY est égal au dividende payé sur prix de l’action Log (total actif) ou log (chiffres d’affaires) La taille de l’entreprise SIZE TRESO DY dividende payé/prix de l’action fonds de roulement /besoin en fonds de roulement EP EPS/cours AF capacité d’autofinancement/total actif Les substituts à la couverture Les coûts d’agence BM REM capacité d’autofinancement/dettes financières actif par action/cours CI intérêts payés/excèdent brut d’exploitation Les coûts de financement externe DE Dettes financières/Fonds propres La probabilité de la détresse financière EXP le ratio des exportations Le niveau des opérations à l’étranger ? + - + + + + + - + Tableau 10. Les différents déterminants de l’exposition au risque de change et les variables approximatives. Théorie Variable Notation signe attendu 26 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH 27 3.2. Les variables significatives dans l’explication de l’exposition au risque de change. Notre but, comme ça a été avancé, est d’isoler les principales variables dans l’explication de l’exposition au risque de change. La variable expliquée est le vecteur des βix(−1) résultats de l’estimation de la régression (3) sur la période allant de janvier 1996 à décembre 1998 et qui marquent l’exposition aux mouvements du taux de change du mois précédent (nous avons montré dans la partie précédente que pour le cas de notre échantillon, il y a un effet retard d’un mois en ce qui concerne l’effet des fluctuations du taux de change sur les rentabilités des actions). Les variables explicatives sont celles discutées dans la sous section précédente. Elles sont mesurées sur l’année 1997, année de milieu de notre période d’étude. Le tableau 11 présente les statistiques descriptives de ces variables. Tableau 11. Distribution statistique des différentes variables approximatives. min q1 median q3 max Moyenne EXP 10.08 23.432 54.2 73.495 99.86 51.044 SIZE 17.523 19.579 20.702 22.325 26.883 21.164 CI -0.756 0.0399 0.090 0.190 3.011 0.145 AF -0.131 0.058 0.0899 0.119 0.3013 0.089 DY 0 1.335 2.585 4.975 210 5.4513 REM -26.84 0.4975 1.55 3.3275 243.8 4.761 TRESO -32.216 1.024 1.207 1.893 26.173 1.455 DE 0.00011 0.123 0.340 0.815 2.140 0.55 EP 0 0.035 0.0637 0.107 0.6304 0.084 BM 0.246 1.536 2.9167 5.352 259.376 8.46 Pour décrire les déterminants du coefficient de l’exposition au risque de change des entreprises exportatrices françaises, nous utilisons un modèle économétrique (régression) dont la variable expliquée est le β̂ix(−1) et les variables explicatives sont celles décrites ci dessus. Nous allons donc estimer la régression (4) suivante : β̂ix(−1) = a0 + a1 EXPi + a2 DEi + a3 CIi + a4 REMi + a5 BMi +a6 AFi + a7 EPi + a8 DYI + a9 T RESOi + a10 SIZE + νi (4) La méthode des moindres carrées ordinaires a été utilisée pour l’estimation de la régression (4). Les résultats sont présentés dans le tableau 12. 28 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH Tableau 12. Les déterminants de l’exposition au risque de change. Le tableau reporte les estimations de la relation antre βbix et la variables approximatives des déterminants de la couverture des risques financiers, tel que le ratio dettes sur fonds propres (DE), le dividend yield (DY), intérêt payés/EBE (CI), fonds de roulement /besoin en fonds de roulement (TRESO), ratio du Capacité de remboursement (REM), EPS/prix (EP), Capacité d’auto./total actif (AF), ratio actif par action/cours (BM). Leur relation empirique est décrite comme suit : β̂ix(−1) = a0 + a1 EXPi + a2 DEi + a3 CIi + a4 REMi + a5 BMi +a6 AFi + a7 EPi + a8 DYI + a9 T RESOi + a10 SIZE + νi Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. C -5.799142 2.760758 -2.100562 0.0385 EXP -0.007861 0.010979 -0.716078 0.4758 DE 0.419121 0.541414 0.774122 0.4409 CI 0.592888 0.783464 0.756753 0.4512 REM 0.023475 0.010175 2.307200 0.0234 BM 0.022628 0.009424 2.401089 0.0184 AF -5.034311 4.369852 -1.152055 0.2524 EP 0.614449 2.856605 0.215098 0.8302 DY -0.017221 0.011383 -1.512894 0.1338 TRESO 0.024111 0.052051 0.463221 0.6443 SIZE 0.213062 0.138450 1.538917 0.1274 R-squared 0.252203 Adjusted R-squared 0.168181 D’après le tableau 11, REM et BM ont des coefficients significatifs respectivement au taux 5% et 2%. De plus, les coefficients ont les signes prévus. Les entreprises dont la capacité de remboursement des dettes financières est élevée ont des expositions au risque de change élevé. Ceci est dû au fait que si la capacité d’autofinancement est suffisamment supérieure par rapport au montant des dettes financières, le risque de détresse financière est faible et par conséquent l’entreprise n’est pas motivée pour couvrir ses risques financiers et c’est pour cette raison son exposition au risque de change sera élevée. Enfin, les entreprises dont le ratio valeur comptable sur valeur de marché (BM) est faible, disposent des opportunités de croissance. Elles vont couvrir leurs risques financiers afin de garantir la liquidité et les ressources financières pour la saisie de ses opportunités de croissance. Par conséquent, l’exposition au risque de change d’une entreprise exportatrice dont le ratio 29 valeur comptable sur valeur de marché est élevé couvrent plus leur risque et leur exposition sera faible. Nous pouvons aussi remarquer, à travers le tableau 12, que le taux d’exportation n’est pas relié significativement au coefficient d’exposition au risque de change. Ce résultat est contraire aux résultats de Jorion (1990), He et Ng (1998) et Allayannis et Ofek (2001) qui reportent une relation positive et significative entre le coefficient de l’exposition et le ratio des ventes à l’étranger. Toutefois, il est en accord avec les résultats de Chow, Lee et Solt (1997) qui, pour un échantillon de 213 multinationales américaines, ne trouvent pas une relation significative entre le coefficient d’exposition au risque de change et le taux d’exportation. La taille a un signe positive et elle est significative au taux de 13%. Le signe positive signifie que les grandes entreprises sont plus exposées au risque de change. Ce résultat peut avoir deux interprétations différentes. La première concerne le fait que les grandes entreprises s’engagent plus dans des opérations à l’étranger et sont par suite plus exposées au risque de change. Deuxièmement, les grandes entreprises ont plus de facilité d’accéder au marché financier pour négocier les taux d’intérêt pour le financement externe. De ce fait, ces entreprises ne sont pas motivées à gérer leurs risques financiers (d’après les explications théoriques des déterminants de gestion des risques). 4. Conclusion Cette étude examine s’il existe une relation entre les rendements des actions des entreprises exportatrices françaises et les fluctuations du taux de change. Pour la période allant de janvier 1996 à décembre 2001, 10% de 100 entreprises exportatrices françaises ont des expositions significatives au taux de change. Ce résultat se situe dans la même fourchette des résultats des études empiriques précédentes comme celle de Jorion (1990), Bodnar et Gentry (1993), Bartov et Bodnar (1994) et He et Ng (1998) etc. Toutefois, conformément à Bodnar et Gentry (1993), un effet retard est constaté dans l’implication des fluctuations du taux de change sur la rentabilité des actions. Sur la période de janvier 1996 à décembre 2001, 17% (sur la période de janvier 1996 à décembre 1998, 22% et sur la période de janvier 1999 à décembre 2001, 16%) des entreprises sont exposées aux fluctuations du risque de change du mois précédent. 30 SALMA MEFTEH & MONDHER BELLALAH Notre étude a montré aussi que l’exposition au risque de change est expliquée par des variables approximatives des déterminants de la gestion du risque de change. Les entreprises dont la capacité de remboursement de dettes est élevée et les entreprises dont le ratio valeur comptable sur valeur de marché (Book-to-market) est faible sont plus motivées à couvrir leur risque et par conséquent, leur exposition au risque de change sera faible. Bibliographie (1) Adler M. et Dumas B., “Exposure to currency risk : definition and measurement”, Financial management, Summer 1984, pp 41-50 (2) Allayannis G. et Weston J.P. “The use of Foreign currency Derivatives and firm value”, The Review of Financial Studies, vol 14, n◦ 1, 2001, pp 243-271 (3) Allayannis G. et Ofek E., “Exchange rate exposure, hedging and the use of foreign currency derivatives”, Journal of International Money and Finance 2001, pp 273-296 (4) Amihud Y., “Evidence on exchange rates and valuation of equity shares”, in Y. Amihud and R. Levich, Eds : Exchange Rates and Corporate Performance (Business one Irwin, Home-wood, III.) 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