Une réalité vécue par l`homme immigrant
Transcription
Une réalité vécue par l`homme immigrant
Une réalité vécue par l’homme immigrant1 Par GILLES GOYER2 Montréal 2011 1 Informations prises à partir du document : Forgues, A., Goyer, G., Nault-Cloutier, A., Racicot-Lanoue, F. (2010). LE TRAVERSIER : UN GROUPE DE SUPPORT POUR HOMMES IMMIGRANTS. Cours SES733 de l’Université de Sherbrooke, novembre 2010, 58p. 2 Étudiant à la maitrise en service social à l’Université de Sherbrooke TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION .............................................................................................................. 1 1 LA DESCRIPTION DE LA PROBLÉMATIQUE .................................................. 1 1.1 Les obstacles et les difficultés liés à l’immigration ............................................. 2 1.1.1 Le stress, la migration et le choc culturel ..................................................... 2 1.1.2 La famille pour les migrants ......................................................................... 3 1.1.3 Les obstacles socio-économiques et déclassements professionnels ............. 4 1.2 La réalité masculine : les études, le rapport de genre et le rapport Rondeau ...... 6 1.2.1 Les études qualitatives et le rapport au genre ............................................... 6 1.2.2 Le rapport Rondeau (2004) ......................................................................... 11 1.3 L’ampleur du phénomène................................................................................... 11 1.3.1 Le suicide .................................................................................................... 12 1.3.2 Le chômage ................................................................................................. 12 1.3.3 La dépression et l’alcoolisme...................................................................... 13 2 LE CADRE THÉORIQUE .................................................................................... 13 2.1 L’approche interculturelle .................................................................................. 13 2.2 L’approche écosystémique ................................................................................. 15 2.3 L’intervention spécifique aux hommes .............................................................. 17 2.4 Les indicateurs de risque et facteurs de protection ............................................ 19 2.4.1 Les indicateurs de risque ............................................................................. 19 2.4.2 3 Les facteurs de protection ........................................................................... 21 CONCLUSION ...................................................................................................... 22 Bibliographie............................................................................................................. 23 Bibliographie............................................................................................................. 24 Bibliographie............................................................................................................. 25 Bibliographie............................................................................................................. 26 Bibliographie............................................................................................................. 27 INTRODUCTION Le vécu de l’homme migrant, plus spécifiquement sur leur vécu d’homme au sein d’une famille en transformation. Bien que relativement peu documentés dans la littérature scientifique, plusieurs auteurs, dont Hernandez (2007) et Brodeur (2004), ont relevé le fait que les hommes immigrants peuvent souffrir d’une détresse psychosociale parfois très marquée en raison des multiples défis rencontrés au cours de leur trajectoire migratoire. C’est donc dans le but d’améliorer le bien-être de ces hommes que cet article sensibilise sur un vécu que certains hommes immigrants peuvent vivre et permettra, nous le souhaitons, d’acquérir des habiletés et des connaissances qui, se répercuteront éventuellement à ces hommes pour leurs permettent de mieux s’adapter à leur société d’accueil. 1 LA DESCRIPTION DE LA PROBLÉMATIQUE Bédard définit ainsi la détresse sociale : « Nous entendons par détresse sociale, cette pauvreté chronique et globale qui, à force d’humilier, d’isoler et de gruger sur la dignité humaine, engendre une forme de désespoir qui amène la personne à contribuer […] au cercle vicieux de l’exclusion sociale » (Bédard, 2002, p. 158). Il ajoute qu’il y a détresse sociale lorsque la pauvreté est économique, culturelle (peu d’habiletés sociales) et sociale (insularisation) et que cette situation provoque dans le temps un effondrement de l’estime de soi. Le terme détresse psychosociale en contexte d’immigration affecte l’individu dans toutes les sphères de sa vie, incluant la sphère familiale (Belony, 2007; Bérubé, 2004; Craan, 2002). Ce concept nous semble ainsi plus apte à traduire les conséquences des difficultés vécues par les hommes immigrants. Afin de circonscrire au mieux les facteurs contribuant à cette détresse psychosociale et ses conséquences, nous ferons un résumé des obstacles et des limites liés à l’immigration, de l’impact de la migration sur la famille ainsi que des conséquences sur le plan socioéconomique et professionnel. Un portrait de l’immigration à Sherbrooke est élaboré avec un bref aperçu de la politique de régionalisation de l’immigration. 1.1 Les obstacles et les difficultés liés à l’immigration Tous les immigrants arrivant au pays sont forcément appelés à s’adapter à leur nouvelle société d’accueil et doivent faire face à de multiples pressions d’ordre économique, culturel, social, etc. Cette réalité est toutefois vécue différemment par chaque immigrant et il a été démontré que l’immigration génère des stratégies d’acculturation distinctes selon les membres de la famille (Vatz-Laaroussi, 1993, dans Hernandez, 2007). C’est de cette intégration en lien avec certaines difficultés psychosociales dont il sera question dans la présente section. 1.1.1 Le stress, la migration et le choc culturel L’expérience migratoire déstabilise les individus puisqu’elle implique à la fois des ruptures et des changements. De fait, émigrer implique plusieurs pertes d’ordre culturel, relationnel, professionnel ou identitaire. Quitter son pays d’origine, c’est donc briser une vie organisée avec des codes culturels spécifiques qui faisait sens pour la personne. L’immigrant doit passer par le processus douloureux menant à l’acceptation de la perte d’un style de vie et à la reconstruction d’un autre. Des comportements de retrait, de malaise et de confusion pourront découler de ces nombreuses pertes auxquelles le nouvel arrivant est confronté (Bibeau, 1992; Roy, 2005). Également, la perte de repères et de moyens d’expression réduit les capacités de communication ce qui affecte la valorisation individuelle et identitaire (Legault & Rachédi, 2008). Pour favoriser le mieux-être dans ce processus perturbant, les capacités personnelles de l’immigré, mais aussi les capacités de la société d’accueil peuvent influencer le déroulement de l’adaptation (Roy, 2005). C’est pourquoi la société d’accueil doit mettre en place des dispositifs pour aider les immigrants à trouver leur place dans cette nouvelle vie. Le nouvel arrivant doit reconstruire sa vie dans une société qui est différente de la sienne. Le choc, en plus de l’adaptation sociale et culturelle en milieu d’accueil, représente des dimensions complexes du phénomène de la migration. Le choc culturel se définit « comme une réponse psychologique habituelle à une culture non familière se caractérisant par une désorientation et une angoisse face à ce qui est étranger » (Vasquez, 2 1985, p.53) Cohen-Émérique (1984) présente ce phénomène comme une « réaction de dépaysement, plus encore, de frustration ou de rejet, de révolte ou d’anxiété ou d’étonnement positif face à ce qui est étranger ou étrange ». Le choc culturel peut perdurer pendant plusieurs années. Vasquez (1985) décrit le phénomène du choc culturel selon trois étapes. La première est caractérisée par les deuils à réaliser en lien avec le passé, avec les désillusions entre le pays rêvé et la situation réelle. L’immigrant se sent anonyme, dévalorisé et désorienté. Le repli sur soi et devant la communauté d’origine est une réaction fréquente. La seconde étape concerne les confrontations des codes de vie, des normes et des valeurs. Celle-ci est vécue comme une période de tiraillements éveillés par les changements sur le plan des habitudes quotidiennes, familiales et de travail, bref par des univers différents. Enfin, dans la troisième étape, l’ajustement s’opère et le migrant se sent mieux adapté dans son milieu d’accueil, car il a maintenant développé diverses stratégies pour s’accommoder aux changements. 1.1.2 La famille pour les migrants Selon Jacob et al. (1994), lors de l’établissement dans le pays d’accueil la personne immigrante se sert d’un projet familial ou individuel comme tremplin afin de s’intégrer de façon relativement harmonieuse à celle-ci. Généralement, le projet familial a pour objectif d’améliorer la condition financière de l’ensemble de la famille. De fait, le projet familial est fondé sur une entente plus ou moins explicite des membres de la famille dans le but qu’ils favorisent une meilleure situation socio-économique de cette dernière (Jacob et al. 1994). La famille est importante dans plusieurs cultures dont sont issus une grande part des immigrants. À ce sujet, Jacob et al. (1994) estiment que la vie familiale est au centre des préoccupations de chacun de ses membres où chacun se sent responsable du bien-être social, émotionnel, moral et économique de la famille. Le témoignage d’un réfugié cambodgien témoigne de cela : « Je suis d’abord responsable de mes enfants et je soutiens leur intégration ici » (Jacob & al. 1994, p.225). Une autre preuve témoignant de l’importance de la famille est illustrée par le fait que même lorsque le migrant quitte seul son pays d’origine, plusieurs conçoivent leur projet d’intégration au travers d’un projet familial. Ainsi, l’un de leurs principaux objectifs est d’être en couple et de fonder 3 ultérieurement une famille. En somme, la famille permet de faire le pont entre le pays d’origine et la terre d’accueil et permet une reconstruction de l’identité. Une autre raison pour laquelle l’intégration familiale est importante pour le migrant est qu’elle constitue un réseau social de base. Or la socialisation est essentielle au bien-être de la personne. La famille multiplie les occasions de socialisation. L’isolement est lié à un haut taux de dépression. La famille constitue donc un facteur de protection. Le processus migratoire fait en sorte que la famille passe souvent d’une grande famille à une famille nucléaire (Legault & Rachédi, 2008). Cette fragilisation du réseau social crée un choc pour l’ensemble des membres de la famille et induit nombre de stress et de frictions à l’intérieur de celle-ci. Également, le processus migratoire amène une remise en question des rôles de tout membre de la famille. De fait, en tant que système ouvert en relation constante avec son environnement social, la famille immigrante est en contact avec les valeurs dominantes de la société occidentale, soit par exemple, le matérialisme ainsi que la désintégration de la cellule familiale traditionnelle. Ainsi, au contact de la société d’accueil chacun des membres de la famille doit donc redéfinir son identité, sa place dans la société, mais aussi au sein de cette microsociété qu’est la famille. Cette redéfinition amène parfois des luttes de pouvoirs au sein de la famille, et ce, plus particulièrement dans le couple. À cet égard, Legault et Rachédi (2008) estiment que l’homme peut perdre de son autorité alors que la femme constate, en référence aux contacts avec les mœurs occidentales, qu’il est possible pour elle de s’émanciper et de redéfinir son identité en suivant différents codes de la société d’accueil. 1.1.3 Les obstacles socio-économiques et déclassements professionnels Les facteurs motivant les individus à émigrer sont souvent reliés à des conditions d’insécurité sociale, économique et politique présentes dans leur pays d’origine. Une fois au Québec, les immigrants doivent passer à travers des étapes fonctionnelles, comme par exemple obtenir un logement, afin de s’installer et trouver cette sécurité économique et sociale désirée. Or, la perte de réseaux sociaux et des acquis professionnels et économiques viennent fragiliser les personnes dans leur nouveau milieu de vie. Ces événements affectent la qualité de vie des immigrants en plus de leur faire vivre de 4 l’insécurité et de nombreuses frustrations. De plus, la reconstruction de ces réseaux n’est pas aisée et nécessite souvent plus de temps que prévu. Au Québec, les acquis professionnels des immigrants de la catégorie économique sont rarement reconnus, ces circonstances sont un obstacle économique majeur ralentissant l’intégration des immigrants (Blais, 2005). Ce phénomène de non-reconnaissance des acquis se nomme la déqualification ou le déclassement professionnel. Les immigrants professionnels ont souvent un niveau élevé d’éducation et de nombreuses expériences sur le marché du travail avant d’immigrer. Or, la non-reconnaissance de leur diplôme, de leur expérience de travail ou de leur statut professionnel entraîne des difficultés majeures dans leur désir d’obtenir un emploi à la hauteur de leur attente. Ce déclassement entraîne une diminution considérable de leur revenu et les obligent, soit à occuper un emploi qui ne répond pas à leurs qualifications, soit à retourner aux études (Legault & Rachédi, 2008; Normand & Tremblay, 2005). Selon Meyer (2005), de nombreuses études permettent d’avancer que les nouveaux immigrants ont un niveau faible de revenu et que leurs formations ainsi que leurs expériences sont peu utilisées. Dans le même ordre d’idées, une étude sur le déclassement professionnel de Colombiens note que toutes les personnes approchées avaient subi une perte de qualification (Blais, 2005). De fait, ces immigrants n’ont pu obtenir un emploi à la hauteur de leur expérience et de leur statut professionnel. Dans la littérature, les facteurs identifiés expliquant ce phénomène sont : le manque d’expérience canadienne, les contraintes systémiques ou la non-reconnaissance des professions réglementées, le manque d’information sur le marché du travail, la discrimination directe ou indirecte et le réseau de soutien limité (Blais 2005; Normand & Tremblay, 2005; Viger, 2006). Notons que des facteurs propres à la réalité en région (mobilité restreinte et taux de chômage élevé) peuvent augmenter les difficultés d’insertion sur le marché du travail. Cette absence de reconnaissance génère un sentiment d’impuissance chez les immigrants qui peuvent suite à ces déceptions, devenir critiques et amers (Blais 2005; Legault & Rachédi, 2008; Viger, 2006). Le témoignage de Vladimir illustre bien cela : « Moi, je ne peux m’adapter au manque de travail. Ici, le gouvernement nous aide, mais il manque ce 5 travail-là… Je veux comme chaque être humain, travailler cinq jours par semaine et revenir passer le samedi et le dimanche avec ma famille » (Jacob & col, 1994, p.225). Ainsi, au plan économique, les immigrants font face à certaines difficultés. Alors que le revenu moyen pour les citoyens de Sherbrooke s’élève à $30 451, il n’est que de $18 655 pour les nouveaux arrivants et de $23 896 pour les immigrants au pays depuis 10 ans ou moins. Le revenu moyen des immigrants, toutes catégories confondues, serait de $27 654 (Ville de Sherbrooke, 2009, cité par Lenoir-Achdjian, 2010). Toujours à Sherbrooke, le taux de chômage est supérieur chez la population immigrante avec un taux de 14.4% (13.7% pour les immigrants au Québec), comparativement au taux de 8.2% pour la population sherbrookoise en général (8.5% pour la population du Québec) et les emplois occupés par les immigrants sont qualifiés de bas niveau (Ville de Sherbrooke, 2009, cité par Lenoir-Achdjian, 2010; MICC, 2010). 1.2 La réalité masculine : les études, le rapport de genre et le rapport Rondeau 1.2.1 Les études qualitatives et le rapport au genre Pour commencer, les recherches portant sur l’impact de l’immigration offrent rarement un portrait du vécu particulier des hommes. Ainsi, lorsque la question de genre est introduite en ce qui concerne, notamment, les relations familiales ou la réorganisation de la famille, ce sont les points de vue de l’épouse, de la mère ou des enfants qui sont pris en compte dans la perspective de leur émancipation individuelle (selon Hernandez, qui cite Labelle et al. 1987, Juteau, 1992, Legault, 1993). Par conséquent, ces études ont l’avantage de nous renseigner sur la modification partielle des rôles et du partage des tâches au sein des ménages immigrants, ce qui aide à mieux comprendre les difficultés et les tensions qui peuvent y survenir. Ainsi, pour le futur il serait pertinent de faire des recherches approfondies sur le point de vue des hommes ou des pères immigrants, car il est surprenant de constater la rareté du point de vue des hommes dans ces analyses. 6 Les quelques indices de l’expérience intime du père ou du mari immigrant dans certaines recherches se retrouvent dans les transformations des dynamiques familiales en général (Bérubé, 2004). Ainsi, la problématique d’intégration familiale amène des dynamiques conflictuelles au sein du système familial qui se manifeste par des problèmes de discipline avec les enfants, de conflits de valeurs dans le couple et par des situations de crises familiales. Pour d’autres familles, le réajustement des règles et des rôles dans la famille devient une épreuve croissante au fur et à mesure que s’accumulent les exigences de la nouvelle société. Cette épreuve peut s’accompagner de toutes sortes d’affects négatifs tels que l’angoisse, le stress, l’insécurité, l’humiliation, la colère, de la dépression et un sentiment de rejet pour certains membres de la famille, en autre les hommes (Legault, 2000). De plus, la question de transformation des rôles dans la famille est un aspect sensible au processus d’adaptation, car les règles et les rôles familiaux correspondent souvent au noyau rigide de la culture, surtout pour les immigrants issus de sociétés basées davantage sur le collectif et sur l’interdépendance des relations que sur l’individualisme et l’autonomie de chacun. Un isolement social, pour certaines familles, s’installe et se manifeste par un renforcement de l’intimité et par des liens de dépendance. Cet isolement fait apparaître davantage les contradictions en ce qui concerne les valeurs et rend la famille plus vulnérable aux tensions qui peuvent surgir (Barudy et al. 1992). Il en ressort une perturbation de l’équilibre, de l’harmonie et des relations existantes à l’intérieur du système familial. De plus, la transformation des rôles peut donner lieu à des conflits ouverts entre les conjoints et entre les générations, au point de provoquer, parfois, de la violence conjugale, familiale (Barudy et al. 1992) ou une rupture. Plusieurs études établissent un lien direct entre le bouleversement des rôles et des statuts selon le genre et le « taux particulièrement élevé de divorces chez les familles immigrantes au cours des premières années d’établissement » (Hernandez qui cite Lanthier et Ross, 1995, p.32). Partout dans le monde, les constructions culturelles élaborées à partir des différences biologiques entre les sexes semblent suivre un pattern similaire : « les hommes ont tendance à être socialisés vers des rôles liés à l’affirmation de soi ou l’on valorise la performance et la dominance. Tandis que les femmes ont 7 tendance à être socialisées vers des rôles liés à la conformité où l’on valorise plutôt la passivité et la soumission » (Hernandez qui cite Berry et al. 2002, p.52). Par conséquent, cette perte de statut social risque de développer chez l’homme immigrant une des nombreuses problématiques sociales tels la toxicomanie, le suicide, l’itinérance, l’alcoolisme, la violence, conjugale, les abus physiques, les déviances sexuelles ou encore les problèmes de jeux compulsifs. Non seulement ces diverses problématiques sont très présentes chez les hommes en général, mais ils y sont significativement plus nombreux que chez les femmes (Rondeau, 2004). La remise en question de l’autorité paternelle, sur l’ensemble des membres de la famille, peut affecter l’homme de manière fort négative. Par exemple, il peut ressentir de la rage, du désespoir et être tenté de se replier sur lui-même (Legault et Rachédi, 2008). Cette réaction est particulièrement fréquente si ce dernier est porteur de valeur patriarcale où l’homme se doit d’être fort et pourvoir aux besoins de la famille. En plus d’une remise en question de son autorité, l’immigration oblige l’homme à redéfinir son identité en tant que père. Cela représente tout un défi, car il doit concilier à la fois les rôles et les valeurs inhérents à sa culture tout en incorporant ceux de la société d’accueil. Une étude québécoise conduite par Battaglini et al. (dans Gervais & al. 2009) illustre bien le réajustement des rôles vécus par les hommes immigrants. Selon celle-ci, les femmes de ces hommes considèrent que le processus migratoire oblige les hommes immigrants non seulement à se redéfinir en tant qu’homme, mais également en tant que père. Elles estiment que ces derniers sont, une fois établis en terre d’accueil, plus près de leurs enfants. Cela rejoint la constatation de Legault et Rachédi (2008) selon laquelle suite à l’immigration, la famille immigrante est coupée de sa famille élargie. Fait important à noter, le processus migratoire n’est pas vécu de manière homogène par tous les immigrants et que chaque migrant vit son intégration d’une manière unique et particulière. Cette constatation s’adresse bien évidemment également aux pères de famille immigrante et qu’il faut donc garder à l’esprit que cela : « dépend de la place accordée aux pères au sein de sa famille et du pays d’accueil » (Gervais & col, 2009 p.27). 8 De plus, Hernandez (2007) souligne que les nombreux obstacles limitant l’accès à l’emploi peuvent entrainer chez les hommes immigrants en un sentiment d’échec par rapport à leurs responsabilités de pourvoyeur et de protecteur. Ainsi, la difficulté d’accès à l’emploi, qui est un élément très important, selon les constructions culturelles, pour l’affirmation et la valorisation, peut faire naître chez l’homme immigrant le sentiment de ne pouvoir faire vivre convenablement les membres de sa famille, de faillir à ses responsabilités liées aux rôles de pourvoyeur et de protecteur. Par conséquent, de ne plus « être un homme ». Ainsi, il peut arriver pour l’homme, dont les aspirations les plus grandes sont d’assurer le bien-être de la famille et de profiter des mêmes possibilités que les Canadiens de souches (Hernendez qui cite Bibeau et al. 1992), que cette situation peut affecter profondément son identité, son estime de soi, sa qualité de père (Bérubé, 2004), sa relation de couple au point de provoquer des conflits et une rupture (Jacob, 1998) voir un déséquilibre mental (Hernandez qui cite Beiser et al. 2003; Austin et Este, 1999). Ainsi, l’homme immigrant subit la perte d’un statut social qui est porteur d’une identité dans son milieu d’origine et pour son entourage. Plusieurs auteurs (Bibeau et al. 1992; Legault, 2000; cités par Hernandez, 2007; Bertot et Jacob, 1991) notent que les sentiments d’angoisse, de stress, d’humiliation, de dépression ou encore de rejet qui accompagnent souvent le réajustement graduel des règles et des rôles chez les familles immigrantes peuvent être particulièrement marqués chez les hommes. D’autre part, la redéfinition des rôles au sein de la famille, peut être vécue plus difficilement par les hommes pour qui l’adaptation aux modèles de la société d’accueil implique davantage de pertes (perte de son autorité, perte de son rôle de pourvoyeur unique, etc.) alors que les femmes immigrantes peuvent y trouver plusieurs gains (émancipation, accès au marché du travail, etc.) (Legault et Rachédi, 2008). Cela s’avère particulièrement le cas chez les hommes issus de sociétés dites patriarcales où la différenciation des rôles et le partage des tâches sont souvent prescrits selon le genre. Pour illustrer certaines de ces notions en lien avec ces répercussions, prenons l’exemple de la trajectoire migratoire des familles haïtiennes illustrée par Belony (2007) dans son mémoire intitulé : la prise en charge des enfants de l’immigration haïtienne par la Direction de la protection de la jeunesse : une analyse comparative. Tout d’abord, la 9 structure familiale haïtienne est patriarcale et c’est en général le père qui est le pourvoyeur et qui détient l’autorité tandis que la mère s’occupe de l’éducation des enfants et des soins domestiques (Belony, 2007, p.24). Également, l’obéissance et le respect, plus particulièrement le respect de l’autorité parentale, sont des valeurs importantes pour cette communauté (Craan, 2002). Subséquemment, les parents haïtiens ont des pratiques éducatives différentes de celles prônées au Québec comme la sévérité ou la punition corporelle pour éduquer les enfants. Puisque ces pratiques sont hors normes aux yeux de la société d’accueil, elles peuvent amener les parents à vivre des conséquences en lien avec la justice. Les pères sont beaucoup plus souvent la cible de ces répercussions puisque ce sont eux qui exercent la majeure partie de l’autorité. En outre, il a été observé une surreprésentation à Montréal de famille venant de cette communauté par rapport au nombre total de signalements (Belony, 2007). De plus, selon Duval (1991), les séparations de couple en lien avec le phénomène migratoire sont fréquentes (Duval, 1991, p. 23). Ces séparations sont vécues très difficilement par les hommes, car les droits des conjointes au Québec ne sont pas les mêmes qu’en Haïti. Effectivement, plusieurs femmes quittent leurs conjoints une fois leur intégration réussie au sein de la société d’accueil (emploi bien rémunéré, retour aux études, acquissions d’un cercle social) puisqu’elles ne sont plus satisfaites de leur lien matrimonial (Craan, 2002). Dans un ordre d’idée similaire, Belony (2007) précise même que « certaines femmes sont victimes de violence conjugale, car la modification des rôles, des statuts et des perceptions de l’homme et de la femme vers une vision plus égalitaire n’est pas sans entrainer des conflits » (Belony, 2007, p. 26). À cela s’ajoute le fait que dans notre pays la famille n’est pas du domaine privé donc que l’état peut s’ingérer s’il y a motif par la loi. Il peut ainsi poser des actions concrètes sur la cellule familiale (des actions en lien avec la violence conjugale, le placement des enfants, etc.) alors que ce n’est pas nécessairement le cas dans le pays de naissance de ces individus. En somme, une compréhension de la famille d’accueil est ainsi essentielle pour éviter des répercussions d’ordre légal. Il est important de préciser que le manque de ressources pour les hommes toutes nationalités confondues est une problématique que nous retrouvons pratiquement dans 10 toutes les régions au Québec. Le rapport Rondeau (2004) met d’ailleurs en lumière cette aberrance. 1.2.2 Le rapport Rondeau (2004) Le rapport Rondeau fait énormément d’observations en ce qui a trait aux services offerts aux hommes. Tout d’abord, il remarque que les préjugés sont tenaces et les difficultés vécues par les hommes sont souvent mésestimées ou ignorées (Rondeau, 2004, p.3). Ainsi, s’ouvrir aux réalités des hommes demande d’examiner l’évolution récente de notre société. Cela demande aussi de prendre conscience de l’effet déterminant de la socialisation chez les hommes et des comportements qu’elle entraine chez ceux-ci de même que chez les dispensateurs de services (Rondeau, 2004, p.2). Ainsi, ce rapport estime qu’une partie de la problématique est associée aux institutions québécoises tandis que Lacharité et al. (2009) considère qu’une partie des difficultés est associée au manque de documentation sur les problématiques vécues par les hommes immigrants (Lacharité et al. 2009). Certains auteurs iront dans le même sens en affirmant qu’il y a une féminisation des services, de pair avec une individualisation des problèmes qui se répercute par une individualisation des services (Hernandez, 2007).D’autres encore parleront d’une méconnaissance concernant le rôle des intervenants de la part des immigrants à la suite de leur arrivée et qui entraine une « méfiance réciproque entre ces hommes (et leur famille) et les services sociaux (Clément et Côté, 2004). En somme, ces différents éléments feront en sorte que les hommes n’iront pas consulter et que s’ils y vont, les services ne leur seront pas nécessairement adaptés. 1.3 L’ampleur du phénomène La présente section portera sur l’ampleur des problèmes constatés relativement à la situation des immigrants et, lorsque possible, plus spécifiquement des hommes immigrants. Comme nous allons le voir, peu de statistiques portent sur les problématiques spécifiques aux hommes immigrants. Au Canada, l’essentiel des données sur les personnes immigrantes provient des recensements, le dernier ayant eu lieu en 2006. Les données recueillies lors de ces recensements portent sur le niveau de scolarité, l’âge ou bien sur des données liées à l’emploi. Les données quant à la criminalisation, la violence conjugale, les taux de divorces et les signalements à la direction de la protection de la 11 jeunesse (DPJ) sont introuvables. Cela s’explique, selon Troy Pouliot spécialiste des données statistiques à l’Université de Sherbrooke, par le fait que l’origine ethnique de la personne n’est pas recensée dans ces situations, car cela serait considéré comme étant du profilage racial. Malgré cela, nous avons tout de même réussi à obtenir certaines données quant à des problématiques vécues par les hommes immigrants; soit le suicide, le chômage ainsi que l’alcoolisme et la dépression. 1.3.1 Le suicide Selon la Base canadienne de données sur l'état civil (dans Caron Malenfant, 2004) au Canada, entre 1995 et 1997, le nombre annuel moyen de suicides a été de 3863. De ce nombre, 809 ont été commis par des femmes et 3054 par des hommes, ce qui correspond respectivement à des taux bruts de suicide de 5,5 et 21,0 pour 100 000 habitants. Concernant les immigrants, parmi tous les suicides commis entre ces mêmes années, 537 ont été commis par les immigrants et 3328 par la population native. Cela correspond respectivement par des taux bruts de suicide de 9,9 et de 13,9 pour 100 000 habitants (idem). Ces données semblent indiquer que les immigrants sont moins susceptibles de se suicider que les individus issus de la population native. Autre donnée intéressante, de 1995 à 1997, le taux de suicide a été trois fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes immigrantes alors qu’il était quatre fois plus élevé dans le cas des personnes issues de la population native (idem). Ainsi, l’écart entre les taux de suicide des hommes et des femmes est plus faible chez les personnes immigrantes que chez les personnes nées au Canada. 1.3.2 Le chômage Selon les données de l’enquête sur la population active (MICC, 2008), en 2008, le taux de chômage des immigrants était de 11,1 % alors qu’il était de 7,2 % pour la population totale et 6,6 % pour la population native. Dans la même année, la population immigrée d’arrivée très récente, c'est-à-dire de cinq ans et moins, affiche un taux de chômage plus élevé que le reste de la population immigrée soit respectivement de 22,4 % contre 11,8 % (idem). En 2009, le Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC) a estimé que parmi les 37 500 emplois perdus au Québec, 7 300 étaient occupés par des immigrants. Cela représente 19,5 % des emplois perdus, alors que leur poids dans la 12 population âgée de 15 ans et plus est de 13,2 %. Autre fait intéressant, le taux de chômage de l’homme immigrant était de 10,9 % alors que celui de la femme immigrante est de 11,3 %. À la lumière de ces résultats, il apparait que les hommes immigrants sont plus susceptibles d’être au chômage que les gens issus de la population native et de connaître nombre de problématiques liées à cet état. 1.3.3 La dépression et l’alcoolisme Selon Ali (2002), peu de chercheurs se sont intéressés à la question de la santé mentale des immigrants canadiens, et ce, même s’ils constituent plus de 16 % de la population totale. Selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 20002001, 8,3 % des personnes nées au Canada avaient vécu au moins une période dépressive majeure au cours des 12 mois avant d’être interviewés. Alors que chez les personnes immigrantes, ce taux était significativement moindre soit de 6,2 %. Autre élément intéressant, selon cette enquête, 2,1 % des Canadiens ont déclaré des symptômes liés à l’alcoolisme au cours des 12 mois précédents l’interview. Alors que ce taux était de seulement 0,5 % pour les personnes immigrantes. En somme, les personnes immigrantes présentent des taux de dépendance à l’alcool et de dépression significativement inférieurs à ceux des personnes issues de la population native. Cependant, comme nous venons de le voir (section rapport Rondeau) les immigrants présentent certaines réticences à consulter le système de santé et des services sociaux québécois. Ceci met donc en doute, selon nous, certaines de ces données statistiques en lien avec l’ampleur réelle de ce phénomène. Effectivement, les organismes communautaires, les personnes interviewées et les études qualitatives parlent de ces phénomènes comme n’étant pas rares. Malheureusement, l’enquête ne fait pas de distinction de genre ce qui nous empêche de nous avancer sur les différences entre les hommes et les femmes quant à ces problématiques. 2 LE CADRE THÉORIQUE 2.1 L’approche interculturelle Relativement à la croissance soutenue de l’immigration dans les pays occidentaux depuis les dernières décennies, de nouvelles approches d’intervention ont été développées afin 13 de répondre aux besoins spécifiques de cette clientèle émergente. Ces approches ont également été conçues pour soutenir les intervenants qui se retrouvent souvent confrontés dans leur travail à des situations complexes en raison de la multitude de systèmes de valeurs, de croyances et de comportements lorsqu’ils interviennent en contexte interculturel. L’approche interculturelle apparaît ainsi tout indiquée afin de bien orienter les interventions auprès des hommes immigrants en tenant compte de leur trajectoire particulière et du processus d’acculturation qu’ils vivent dans leur nouvelle société d’accueil. Roy, Legault et Rachédi (2008) proposent une définition générale de l’approche interculturelle qui est conçue comme une méthode de communication et une façon d’analyser les situations problématiques menant à une intervention adaptée à nos sociétés où plusieurs cultures se côtoient. Comme pour tout type de relation d’aide, ses principes de base sont le respect de la personne, de sa vision du monde, de ses besoins et de son système de valeurs et de croyances. Dans un contexte interculturel, l’emphase est toutefois mise sur la pleine reconnaissance de la différence et sur l’exploration de l’identité culturelle sous toutes ses formes, soit ethnique, nationale, régionale, religieuse et sociale (Cohen-Émérique, 1993). «Dans son application, l’approche interculturelle est une approche d’exploration et de négociation où chaque culture en présence doit être examinée pour être appréciée dans sa légitimité et ses différences et pour orienter le changement dans une perspective d’aide à l’adaptation» (Chiasson-Lavoie et al. 1992, dans Legault, 2000, p. 141). On voit ainsi l’apport appréciable de cette approche lorsqu’il s’agit d’examiner de plus près les relations hommes/femmes ou les rapports parents/enfants au sein de la famille immigrante ou encore la transformation de la dynamique des rôles familiaux liée à l’adaptation à la culture de la société d’accueil. Dans une perspective d’exploration du vécu de l’immigrant, Roy (Legault et Rachédi, 2008) a élaboré une grille d’évaluation interculturelle afin que l’intervenant puisse avoir accès à l’univers culturel et à l’histoire personnelle de l’individu ou de la famille en consultation. Parmi les facteurs significatifs de cette grille, notons la trajectoire migratoire incluant le projet migratoire et les conditions de la migration, le mode de vie dans le pays d’origine, les réseaux d’appartenance, les systèmes de croyances et de 14 valeurs, les attentes relatives à la société d’accueil, les changements survenus dans les conditions de vie en référence à la migration telles que la différence de statut socioprofessionnel, la précarité économique et le statut relativement à l’immigration, etc. Cette grille couvre ainsi les dimensions économiques, sociales, culturelles, politiques et familiales essentielles afin de mieux cerner la réalité des immigrants et d’identifier la phase où ils se situent dans leur processus d’adaptation. Bien que cette grille ne soit pas utilisée en tant qu’outil d’évaluation dans notre programme, elle permet toutefois à l’intervenant de porter son attention sur ces divers aspects du vécu des immigrants qui surgiront très probablement dans les rencontres. Pour les tenants de l’approche interculturelle, il s’avère tout aussi important de prendre en considération la culture de l’intervenant et non uniquement la culture du migrant puisque la relation d’aide est pratiquée dans le contexte d’une rencontre entre deux individus, chacun étant porteur d’une culture qu’il a intériorisée subjectivement (Cohen-Émérique, 1993). L’intervenant se doit d’abord de faire une démarche de décentration, c’est-à-dire de prendre une distance par rapport à lui-même afin de mieux cerner ses cadres de référence issus des valeurs et des croyances de sa culture. Cette décentration lui permettra d’accéder à une certaine neutralité culturelle par rapport à ses propres référents et de reconnaître que sa lecture peut être biaisée par ses présupposés et ses stéréotypes (CohenÉmérique, 1993). La deuxième démarche proposée par cette approche est la découverte du cadre de référence de l’immigrant afin de parvenir à le connaître du dedans. Cette démarche se fait par une écoute empreinte de respect, d’ouverture et d’une attitude de non-jugement. La dernière étape consiste en une médiation ou négociation culturelle qui survient au moment de la phase de résolution des problèmes et qui consiste en la recherche d’un compromis acceptable par les deux parties en présence (Cohen-Émérique, 1993). 2.2 L’approche écosystémique L’intégration est un processus par lequel les immigrants, comme l’ensemble de la population, participent à la vie sociale : en s’acculturant mutuellement, les migrants acquièrent, perdent, renouvellent, élaborent, interprètent, refusent ou acceptent des éléments culturels divers. Ils prennent part de manière dynamique à la construction 15 d’ensembles identitaires négociés. L’intégration constructiviste est un processus réciproque de confrontation et de transformations socioculturelles. C’est par ces biais que les acteurs se différencient en même temps qu’ils s’identifient à une « perception unifiée de la vie sociale » (Manço, 2006). La théorie des systèmes en lien avec les réalités des familles immigrantes est appropriée comme idéologie auprès des familles. En effet, « les réalités des familles immigrantes sont d’abord considérées comme des unités fonctionnelles cherchant à s’harmoniser avec leur nouveau milieu, puis comme de systèmes organisés vivant des changements internes liés aux diverses circonstances migratoires ». (Hernandez, 2007 p.4) Afin d’agir sur la complexité des situations de vie des immigrants, les personnes doivent être considérées à l’intérieur de leur contexte familial et social. Le modèle écologique fait voir les familles immigrantes comme des systèmes à la recherche d’un nouvel équilibre qu’il est important de sauvegarder (Henandez qui cite Barudy, 1992; Vatz-Laroussi, 1993). Pour mieux accompagner ces familles dans leur processus d’adaptation, qui est une période souvent empreinte de tension, d’insécurité, de confusion et de remises en question à l’intérieur même du système, l’intervenant peut utiliser une approche systémique dont l’objectif clinique est de favoriser la transformation de l’organisation familiale, de son fonctionnement et de ses mécanismes d’autorégulation pour amener les membres qui la composent vers un meilleur équilibre. L’approche systémique veille à faire émerger les interactions entre les individus, pour ensuite s’intéresser aux perceptions que ceux-ci ont de la situation. En d’autres mots, en s’inspirant des théories sur l’organisation familiale (Minuchin), de la dynamique interpersonnelle du couple et de la famille (Jung) ou encore de la notion d’homéostasie (Canon), ces pionniers de l’approche systémiques cherchent avant tout à unir la communication et la structure familiale (Côté, 2007). Par conséquent, l’approche écosystémique permet d’intervenir globalement et conduit à un travail de reconstruction et de renforcement du lien social qui s’est effrité avec la migration, non seulement au sein des familles, mais aussi entre celle-ci et leur environnement. D’autre part, cette approche est fructueuse dans sa manière de concevoir 16 la crise familiale comme un moteur privilégié de changement harmonieux sur le système (Ausloos, 1983). Ainsi, vu sous l’angle du modèle systémique, l’enjeu d’une famille immigrante est de se trouver une modalité homéostatique particulière qui lui permet de conserver une stabilité, une cohésion sociale et culturelle relative, tout en construisant une nouvelle harmonie avec le milieu de vie du nouveau pays. Bref, « il s’agit de résoudre la tension entre le changement et la continuité à l’intérieur même du système familial, tension susceptible d’entraîner une certaine accommodation de sa structure et de ses modèles culturels ». (Barudy, 1992, cité par Hernandez, p. 26) Pour terminer, l’approche écosystémique (…) « Offre un cadre suffisamment large pour qu’on puisse prendre en compte à la fois l’ensemble des facteurs, divers et complexes, qui influent sur un problème individuel ou social et la façon dont ces facteurs interagissent et contribuent à expliquer une quelconque situation ». (Legault, Rachédi, 2000, p.122). 2.3 L’intervention spécifique aux hommes L’intervention auprès des hommes ne doit pas être perçue comme un obstacle à l’adaptation, mais, au contraire, comme des occasions de changement, une manière émergente avec laquelle travailler pour faire avancer et faciliter le processus d’adaptation qui est à la fois long, complexe et non-linéaire. La reconnaissance de leur réalité ne doit pas conduire à un relativisme culturel excessif faisant fi des enjeux de l’adaptation. Il s’agit au contraire d’amener les familles immigrantes à s’adapter à leur nouveau contexte, tout en reconnaissant et en respectant les étapes, les stratégies et les rythmes associés au processus d’adaptation. Par conséquent, au cours de la relation d’aide, l’intervenant veillera à composer avec certains paramètres culturels concernant l’homme ou, du moins, avec la manière dont lui et les autres membres de sa famille perçoivent son rôle. Notamment, avant de remettre en question l’usage de son autorité, il est important de considérer d’abord les codes qui la rendent légitime, lesquels sont partiellement intériorisés par les enfants eux-mêmes (Cohen-Emérique, 1993). 17 Par exemple, auprès des familles de certaines communautés ethnoculturelles, il est préférable de ne pas confronter directement le père afin d’éviter que le déshonneur ne retombe pas sur toute la famille. Cohen-Émérique (1997). De plus, dans certaines situations, il faudra aussi éviter la discussion trop ouverte, égalitaire et intime avec ses enfants, celle-ci correspondant à un revirement de l’ordre familial institué et à une attaque directe contre son autorité (Hernandez qui cite McGoldrick et al. (1996) p.88). Enfin, il faut être prudent avant de signaler des enfants de famille immigrantes à la Direction de la Protection de la Jeunesse pour éviter de disqualifier de manière brutale les parents. Pour terminer, rappelons que l’intervention familiale se situe toujours dans une perspective de rééquilibration des échanges, de réhabilitation d’un ordre fonctionnel, tenant compte le plus possible des valeurs et des règles de fonctionnement de chacun des microsystèmes impliqués. De plus, au sein des familles immigrantes, l’homme a encore une place importante en tant que pôle structurant les relations. Par conséquent, une approche interculturelle soucieuse du respect et de la reconnaissance des réalités de l’homme, l’époux et du père devrait s’attarder à préserver une certaine continuité dans ses rôles et responsabilités. Cette approche doit le plus possible lui faire confiance dans ses capacités d’ajustement en respectant son rythme et dans sa volonté de réussir le projet migratoire avec ses proches, au-delà du stress et des tensions qui peuvent se manifester. Bien entendu, ce chemin s’effectue dans un cadre culturel et institutionnel québécois qui proscrit toute forme de violence et qui s’appuie sur des principes de droits et de liberté individuelle. De plus, une intervention inspirée de l’approche interculturelle et écosystémique doit justement chercher à prévenir que les conflits et les crises qui apparaissent en situation migratoire ne se transforment pas en violence conjugale ou en éclatement familiale. À la fin de ce processus, il est possible de maintenir chez le père immigrant un certain pouvoir, celui de négocier de nouveaux rôles, une nouvelle organisation et de nouveaux rapports avec sa famille; un pouvoir qui devrait s’exprimer comme une force mobilisatrice et constructive, plutôt que comme une force coercitive. 18 2.4 Les indicateurs de risque et facteurs de protection 2.4.1 Les indicateurs de risque La perception du risque est une construction sociale faisant appel aux risques connus et méconnus qui se caractérisent par l’ampleur, la gravité et la temporalité qu’ils présentent, selon des critères partagés par une communauté ou un groupe. Les règles et rôles Comme nous l’avons mentionné plus haut le réajustement des règles et des rôles devient une épreuve croissante au fur et à mesure que s’accumulent les exigences de la nouvelle société, épreuve qui peut s’accompagner de toutes sortes d’affects négatifs (angoisse, stress, insécurité, humiliation, colère, dépression, sentiment de rejet, etc.) pour certains membres de la famille, en autre les hommes (Legault, 2000). Ces exigences perturbent l’équilibre, l’harmonie et les relations existantes à l’intérieur du système. De plus, la transformation des rôles peut donner lieu à des conflits ouverts entre les conjoints, entre les générations, au point de provoquer, parfois, de la violence conjugale ou familiale (Barudy, 1992). D’ailleurs, les tensions que peuvent vivre les hommes immigrants résultent des changements liés à la transplantation dans un nouveau pays, changements susceptibles de modifier la position et l’exercice des rôles familiaux. L’isolement social De plus, si la société environnante est vécue comme complexe et inconnue, plus les membres de la famille seront dépendants les uns des autres pour la satisfaction des besoins d’intimité, de sécurité et de reconnaissance (Barudy, 1992). Le renforcement de l’intimité et des liens de dépendance, favorisée par l’isolement social, fait apparaitre davantage les contradictions et rend la famille vulnérable aux tensions qui peuvent surgir (Barudy, 1992). Les aspects culturels Les aspects culturels peuvent augmenter les indicateurs de risque dans l’adaptation des personnes immigrantes, par exemple un système de référence qui accepte ou tolère la violence, une représentation rigide des rôles, doublée de stéréotypes sur la supériorité de 19 l’homme et l’infériorité de la femme, etc. (Egger und Schär Moser, 2008). De plus, quitter des structures rurales collectives pour émigrer dans nos environnements urbains fortement individualisés requiert une très grande faculté d’adaptation. Les migrants sont confrontés à de nouvelles exigences et à un remodelage des rôles. Leur manière de vivre, leurs valeurs traditionnelles sont remises en question, notamment les rôles de l’homme et de la femme. Les croyances Les normes, les valeurs, les idéaux en plus d’une conception du monde et en particulier de la famille et des sexes partagés par la société jouent un rôle dans les indicateurs de risque. Ainsi, dans certains types de société, les familles élargies et les lieux de vie distincts selon les sexes sont fréquents, la masculinité y est souvent définie en termes de force et de domination. Souvent, la violence à l’égard des femmes et des enfants n’est pas sanctionnée, quand elle n’est pas considérée comme un signe de virilité, ce qui accentue le risque de pratiques violentes. (Godenzi, 2001). Le travail De plus, le stress relié au travail et les problèmes financiers s’avèrent des facteurs anxiogènes qui se traduisent par des sautes d’humeur, voire des conflits avec le conjoint ou la conjointe. Ce stress est en lien avec la valeur démesurée que l’un des conjoints accorde à la réussite professionnelle. De plus, le stress relié aux conditions de travail entraine souvent une fatigue et une profonde lassitude qui ne permettent pas toujours aux individus de garder leur sérénité dans leur discussion. La perception des pertes lors de l’immigration La perception des gains et des pertes influe aussi sur la réussite ou l’échec du projet d’émigration. Les pertes peuvent être de nature matérielle, comme la perte d’un travail qualifié, d’une source de revenus, d’un logement; elles peuvent aussi être d’ordre social, comme l’absence du réseau de soutien, de la famille, d’amis, de collègues, ou encore de nature affective, soit l’absence de confidents, de maîtres spirituels ou de mentors. Enfin, les pertes peuvent être d’ordre moral et avoir trait à des valeurs absentes ou peu présentes dans la société d’accueil. 20 2.4.2 Les facteurs de protection L’immigration confronte chaque famille au défi de renégocier son système de croyances, pour d’une part, pouvoir maintenir sa cohésion et son sentiment d’appartenance à son groupe d’origine et, d’autre part, s’ouvrir et dialoguer avec des groupes appartenant à la société d’accueil, afin d’établir des consensus permettant de vivre ensemble (Barudy, 1992). Reprendre les modèles existants Lors de l’immigration, le couple ou la famille a parfois tendance à reprendre le modèle relationnel qui existait avant la séparation. Le mari veut reprendre le rôle de chef de famille et essayer de s’intégrer en affrontant les difficultés de l’exil, en effectuant les démarches juridiques et sociales en plus d’essayer de trouver du travail. Ainsi, l’immigration confronte la famille à une tension entre le besoin et maintenir les anciennes structures familiales (relation interne et modèle de croyance) et les exigences d’accommodation à de nouveaux styles de vie et de culture. De plus, le couplage de la famille immigrée avec les différents systèmes qui constituent la société d’accueil (service d’immigration, école, familles, voisins, services sociaux, travail, etc.) déclenche une série de perturbation à l’intérieur de la famille. La recherche d’équilibre L’équilibration pour le maintien est une relation qui peut être salutaire et nécessaire dans un premier temps, dans la mesure où elle permet un renforcement de l’identité socioculturelle de la famille et par conséquent, une possibilité de défense face à la menace de désintégration que le nouveau milieu ambiant implique (Barudy, 1992). L’environnement Le degré de souplesse d’un système familial est très souvent lié, dans notre expérience, aux ressources alternatives dont une famille dispose pour répondre à la nouvelle situation, en adaptant ses relations internes et en créant de nouvelles connexions avec les systèmes de la société d’accueil. De plus, la loyauté assure des liens d’appartenance à des amis et 21 ressources ce qui permet d’assurer l’intégration de la famille dans un tissu social plus large. 3 CONCLUSION L’une des idées directrices qui ont inspiré ce document est une zone de tension ou de fragilité susceptibles d’affecter les hommes immigrants de manière spécifique. Ces tensions sont souvent liées à une transformation du rôle masculin traditionnel étant donné la transplantation dans un nouveau milieu de vie et le processus d’adaptation qui en découle. Ces tensions peuvent dans certains cas devenir une source de détresse psychosociale importante qui, si mal endiguée par l’environnement social direct, peut menacer le bien-être, voir l’intégrité de l’individu ou de la famille. 22 Bibliographie Ali, J. (2002). La santé mentale des immigrants au Canada. Statistique Canada, Supplément aux Rapports sur la santé, volume 13, 13 p. Autonhommie, centre de ressource sur la condition masculine Inc., 16 juillet 2010, En ligne : http://www.autonhommie.org/Nouvelles.html Belony, E. (2007). La prise en charge des enfants de l’immigration haïtienne par la direction de la protection de la jeunesse: une analyse comparative. Mémoire présenté à l’Université du Québec, institut national de la recherche scientifique, centre urbanisation, culture et société, p.23-27, et 34-52. Berteau, G. (2006). La pratique de l’intervention de groupe. Presse de l’Université du Québec, Collection : Problèmes sociaux et interventions sociales, 252 p. Barudy, J. (1992). Migration politique, migration économique : une lecture systémique du processus d’intégration des familles migrantes. Santé mentale au Québec, Vol. 17 no2, p.47-70. Bédard, J. (2002). Familles en détresse sociale : approches interdisciplinaires et communautaires. Thérapie familiale, Genève, vol. 23, pp.157-173. En ligne : http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=TF&ID_NUMPUBLIE=TF_022&ID_AR TICLE=TF_022_0157. Bertot, J. et Jacob, A. (1991). Intervenir avec les immigrants et les réfugiés. Éditions du Méridien, Montréal, 236 p. Bérubé, L. (2004). Parents d’ailleurs, enfant d’ici. Dynamique d’adaptation du rôle parental chez les immigrants. Presse de l’Université du Québec, 250 p. Bibeau, G. (1992). Le pluralisme culturel dans les services publics : recadrage anthropologique de la société post-moderne. Conférence d’ouverture, Colloque sur le pluralisme, Montréal. Brodeur, N., et al. (2010). Répondre aux préoccupations des pères immigrants en lien avec la famille : vers de nouvelles pratiques, Atelier présenté à la 4ième Su-Père Conférence, Montréal, 16 février 2010 Caron Malenfant, É. (2004). Le suicide chez les immigrants au Canada. Statistique Canada, Rapports sur la santé, vol. 15, no 2, 17 p. Chard, J., Badets, J., et Howatson, L. (2000). Les femmes immigrantes. Statistiques Canada, Femmes au Canada 2000, Rapport statistique fondé sur le sexe. Division des statistiques sociales, du logement et des familles. Ottawa, p. 201-232. 23 Bibliographie Cherrier, J.-F. (2004). Groupes de soutien pour demandeurs d’asile. Intervention. No. 120, p.64-70. Clément, M et Côté K. (2004). Description et efficacité d’un programme d’éducation parentale offert à une communauté ethnique minoritaire de Montréal. Intervention, no120, p. 54-63 Cohen-Émérique, M. (1997). La négociation-médiation, phase essentielle dans l’intégration des migrants. Homme et migrations, no 1208, juillet-août Cohen-Émérique, M. (1993). L’approche interculturelle dans le processus d’aide. Santé mentale au Québec, vol. 18, no 1, 1993, p. 71-91, En ligne : http://www.erudit.org/revue/SMQ/1993/v18/n1/032248ar.pdf Cohen-Emerique, M. (1984). Choc culturel et relations interculturelles dans la pratique des travailleurs sociaux : formation à la méthode des incidents critiques. Cahiers de sociologie économique et culturelle, 2. Côté, R. (2007). Travail avec les familles et les réseaux. Cour SES-743, 46 p. Craan, G.-M. (2002). Comprendre les valeurs traditionnelles de la famille haïtienne pour mieux travailler avec les parents. Défi Jeunesse, 8, p.19-25 Département fédéral de l’intérieur, Confédération de Suisse (2009). Feuille d’information : La violence domestique dans le contexte de migration. Bureau fédéral de l’égalité hommes femmes (BFEG), 14 p. Fortin, S. (2000). Pour en finir avec l’intégration. Département d’anthropologie et groupe de recherche ethnicité et société. Centre d’étude ethnique. Université de Montréal, 35 p. Lacharité, C., Gervais, C., de Montigny, F. Azaroual, S., Courtois, A. (2009). L’expérience paternelle entourant la naissance d’un enfant : contextes sociaux et pratiques professionnelles. Enfance, familles, générations, n°11, Faculté de droit, Université de Montréal, p.25-43. Hernandez, S. (2007). Les hommes immigrants et leur vécu familial : Impact de l’immigration et intervention. Centre de santé et de services sociaux de la Montagne, Série de publication centre de recherche et de formation, no15, 138 p. Jacob, A., Lévy, J., Bertot, J., Sauvé, S., Poblete, H. (1994). Le projet familial des réfugiés, objectifs ou stratégies. Département de travail social. Université du Québec à Montréal, p. 220-231. Jacob, A. (1998). Facteur de rupture et de continuité chez des couples québécois, salvadoriens et haïtiens. Presse de l’Université du Québec, 18 p. 24 Bibliographie Institut de la statistique du Québec (2010). Bulletin statistique régional. Édition 2009, Estrie. Québec, gouvernement du Québec en ligne : http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/bulletins/05_Estrie.pdf Le Gall, J. (1996). Et dans les familles immigrées au Québec? Recueil de réflexions sur la stabilité des couples/parents, Québec: Conseil de la famille. 197 p. Legault, G. (2000). L’intervention interculturelle. Montréal, Gaëtan Morin éditeur. 364p. Legault, G. et Rachédi, L. (2008). L’intervention interculturelle. Les Éditions de la Chenelière inc., Montréal, 305 p. Lenoir-Achdjian, A. (2010). Des immigrants «prêts à l’usage»? Illustrations concrètes de pratiques intégratives en Estrie. Montréal, Centre Métropolis du Québec, en ligne : http://canada.metropolis.net/pdfs/lenoir_achdjian_readymade_f.pdf Lindsay, J. et al. (2010). Tendance actuelle au sujet de la formation en service social des groupes, Intervention, la revue de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, no132 (2010.1) : p. 15-24 Manço, A. (2006). Processus identitaires et intégration. Approche psychosociale des jeunes issus de l’immigration. Paris, L'Harmattan, coll., Compétences interculturelles, 188p. Manço, A. (2002). Compétences interculturelles des jeunes issus de l’immigration. Perspectives théoriques et pratiques, Paris, L’Harmattan, coll., Compétences interculturelles, 182 p. Meyer, B. (2005). Lutter contre l’exclusion sociale des groupes vulnérables. Document de recherche. Canada, 26 p. Ministère de l’Immigration et des communautés culturelles (2010). Portraits régionaux 1998-2007. Caractéristiques des immigrants établis au Québec et dans les régions 2009. Montréal, gouvernement du Québec, en ligne : http://www.micc.gouv.qc.ca/publications/fr/recherches-statistiques/Presence-Quebec2009-Portraits-regionaux-1998-2007.pdf Ministère de l’Immigration et des communautés culturelles (2009). Les immigrants et le marché du travail québécois en 2008. Montréal, gouvernement du Québec, 21 p. Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (1990). Au Québec pour bâtir ensemble. Énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration, 104 p. 25 Bibliographie Normand, N., Tremblay, D.G. (2005). Conciliation emploi-famille et intégration professionnelle : le cas des femmes immigrées au Québec. Chaire de recherche du Canada sur les enjeux sociaux organisationnels de l’économie du savoir, Université du Québec à Montréal, 97 p. Piché,V. (2004). Immigration et intégration dans les pays développés : un cadre conceptuel dans G. Caselli, J.Vallin et G. Wunsch. Éditions démographie : analyse et synthèse, volume 4, population et société, Paris, Ined, pages 159-178 Piché, V. (2003). Un siècle d’immigration au Québec : de la peur à l’ouverture dans V.Piché et C.le Bourdais (éd). La démographie québécoise, enjeux du 21e siècle, les presses de l’Université de Montréal, chap.7, p. 225-263. Piché, V. Bélanger, L. (1995). Une revue des études québécoises sur les facteurs d’intégration des immigrants. Montréal. Collection Notes et documents, n°5, 52 p. Rachédi, L. (2004). Intervenir avec des familles immigrantes en région. Fribourg, Bulletin de l’Association pour la rechercher interculturelle, no40, En ligne : www.unifr.ch/ipg/ARIC/Publications/Bulletin/No40/Rachedi.pdf Rondeau, G. (2009). Réflexion sur la place des hommes et les pères dans les services sociaux et de santé. Reflets : revue d'intervention sociale et communautaire, vol. 15, n° 1, p. 20-35. Rondeau, G. (2004). Les hommes : s’ouvrir à leurs réalités et répondre à leurs besoins. Rapport du Comite de travail en matière de prévention et d’aide aux hommes, ministère de la Santé et des Services sociaux, 41 p. Roy, G.; Legault, G. et Rachédi, L. (2008). Les modèles de pratique et les idéologies d’intervention dans L’intervention interculturelle. Les Éditions de la Chenelière Inc., Montréal, 2e édition, 305 p. Roy, M. (2005). Pratique sociale interculturelle au SARIMM. Publications CLSC Côte des Neiges, 103 p. Simard, M. (1996). La politique québécoise de régionalisation de l’immigration : enjeux et paradoxes. Recherches sociographique, vol 37, no 3, p.439-469. Slovic, P. (2002): Perception of Risks posent by extreme events. Decision research and university of Oregon, 21p. Tourigny,M. et C. Bouchard. (1994). Incidence et caractéristiques des signalements d’enfants maltraités : comparaison interculturelle. Child abuse and Neglect, 18, p. 797808. 26 Bibliographie Turcotte, D, Lindsay, J. (2001). L’intervention sociale auprès des groupes. Gaëtan Morin éditeur, Chenelière éducation, 257 p. Vasquez, A. (1985). Du sentiment d’étrangeté à la situation d’étranger, l’Homme et la société.8, Éditions Anthropos, p. 77-78 Vatz-Laaroussi, M., (1993). Intervention et stratégie familiales en interculturel. Service social, vol. 42, no 1, p. 49-62 Viger, R., C. (2006). Femmes professionnelles latino-américaines à Montréal : condition d’insertion dans le milieu universitaire et au marché du travail. Les Cahiers du Gres, vol. 6, no1, p.25-43 Ville de Sherbrooke (2009). Politique d’accueil et d’intégration des personnes immigrantes. Ville de Sherbrooke, 28 p. 27