Tenir compte de la question Définir le texte
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Tenir compte de la question Définir le texte
PRÉPARATION Tenir compte de la question Récapitulez les valeurs et les idées dominantes des philosophes des Lumières et cherchez si vous en retrouvez trace dans ce texte. Le mouvement des Lumières L’homme des Lumières Définir le texte Commencez par composer la « définition » du texte. ©HATIER Poème en vers réguliers (genre) qui fait l’éloge (type de texte : argumentatif) de son temps et de la civilisation (thèmes), qui définit une conception (type de texte : argumentatif) du bonheur (thème), en contraste avec le passé, lyrique, épique mais aussi amusé, enthousiaste (registres), l’objectif étant de défendre la civilisation et le progrès (buts de l’auteur). Trouver les axes • Utilisez les éléments de cette « définition » et les pistes que vous ouvre la question pour trouver des axes ou des idées directrices. • Dans chaque axe, introduisez au moins un mot de la question. m Premier axe : le « blâme » • Demandez-vous de qui ou de quoi Voltaire fait le blâme. • Analysez comment il présente le mythe du paradis (v. 1-4 et 30-33) : positivement ? négativement ? Sur quel ton ? Quelle attitude prend-il face à ce mythe ? Contre qui prend-il position ? • Incluez le mot « blâme » dans votre « titre » d’axe pour être sûr de répondre à la question. m Second axe : un éloge • Analysez la conception du bonheur que Voltaire propose. À quoi s’oppose-t-elle ? Quel tableau dresse-t-il du « siècle de fer » ? • Surlignez ce qui, dans le texte, concourt à l’éloge du confort et du luxe. Montrez que Voltaire a ici une conception matérialiste du bonheur. • Analysez les divers tons de cet éloge, les marques de son enthousiasme. Étudiez l’écriture poétique. • Incluez le mot « éloge » dans votre « titre » d’axe pour être sûr de répondre à la question. PRÉSENTATION (PLAN DÉTAILLÉ) Introduction • Problème du luxe et de la civilisation au cœur des préoccupations du e XVIII siècle, lié aux progrès de l’économie et du commerce. Montesquieu, Diderot et Rousseau s’y sont intéressés. • Ici Voltaire poète revendique son amour du « luxe » et de « l’abondance », de façon un peu provocatrice, et définit sa conception du bonheur. • Derrière le mélange des tons et sous la forme d’un badinage un peu agressif, des problèmes importants (morale, politique), un réel désir de persuader. • Une « démonstration » par l’opposition : démythification de l’utopie d’un monde passé idéal et plaidoyer pour un bonheur sur la Terre… ©HATIER I. Le blâme du bonheur simple d’autrefois, sur un ton badin et irrévérencieux 1. La démystification d’un mythe ou dénonciation d’un lieu commun Sous un tableau apparemment idyllique, Voltaire désacralise le mythe trompeur de la simplicité vertueuse originelle, celui de « l’âge d’or ». La formule « Regrettera qui veut… », lancée en tête du poème, annihile d’emblée les attraits de ce temps et suggère l’existence d’une meilleure attitude. 2. Le grief : la simplicité primitive est une pure ignorance • Voltaire s’oppose à la conception d’inspiration rousseauiste de l’homme heureux dans l’état de « nature » (« dans son enfance »). Il s’érige contre les partisans du bonheur par la frugalité, par l’austérité. Il s’oppose à une vision pessimiste de l’histoire du monde. • À l’objection selon laquelle le luxe serait source de corruption morale, celle-ci s’opposant à la vertu des premiers hommes, il répond que ceux-ci manifestaient une vertu involontaire, en l’absence de tout problème économique (« ils n’avaient rien »). 3. Le ton de la provocation : impertinence et libertinage Un ton moqueur et irrévérencieux, désinvolte. Ironie de « bon vieux temps ». Commisération souriante dans « nos bons aïeux ». Simplification caricaturale. II. Le credo d’un mondain et d’un « honnête homme » Ce tableau de l’âge d’or sert de repoussoir à la conception du bonheur que propose Voltaire, celle du « mondain ». 1. Une position apparemment paradoxale et tranchée pour mieux persuader • Rappeler le sens du mot « mondain » ; le mettre en relation avec l’expression « honnête homme » (v. 12) : homme de la société polie, cultivé, mais aussi homme qui ne « triche » pas avec ses goûts, n’affecte pas de fausse austérité. • Attention : Voltaire sait très bien que la civilisation ne suffit pas à faire le bonheur, il sait que le bonheur est dans la modération, la juste mesure. Pas d’épicurisme jouisseur, comme le laisserait croire le vers « J’aime le luxe, et même la mollesse ». Mais il adopte ici à dessein une position paradoxale pour mieux persuader. 2. L’éloge des « plaisirs » de la civilisation : un nouveau paradis terrestre Égalité de base : bonheur = civilisation. Une conception antireligieuse et matérialiste du bonheur. Éloge du luxe créateur de besoins nouveaux et utile à la société (créer des besoins engendre le progrès général). ©HATIER 3. La promotion du commerce, facteur de paix et d’union : Voltaire économiste • Promotion liée au contexte économique de l’époque. Le commerce unit les peuples (« a réuni »). L’homme est au centre de cette activité trépidante ; il domestique le monde, les océans, les « airs » et la terre, non pas pour conquérir mais pour « échanger ». • L’impression d’abondance et d’activité est rendue par le style : rythme des vers 10 à 21 ; accumulations en cascades (v. 10-11 ; v. 25) ; fréquentes exclamations ; mots à la rime : « travaux » / « nouveaux » ; « onde / air / monde » ; « hémisphère / vaisseaux / échange ». 4. Le mélange des tons : un lyrisme aimable • Lyrisme et enthousiasme On relève des hyperboles provocantes ; des images (un peu clichés) : « mère des arts », « source féconde », « l’or de la terre » ; des périphrases, un vocabulaire nobles : « les peuples de l’air », « onde » ; des exclamations avec interjection (« Ô… »). • Des passages presque épiques (description des bateaux de commerce). D’autres badins. Rythme vif, légèreté du décasyllabe ; rimes faciles (« ronde / immonde ») ; style oral (v. 21, 23, 31), avec implication de soimême (« moi, je… », « j’aime… ») et du lecteur (« voyez-vous pas… »). Conclusion • Apologie de la civilisation, mais ici un peu provocatrice, qui a valu à Voltaire de sévères critiques. • À rapprocher de la XXVe Lettre philosophique, du Dictionnaire philosophique (article « Luxe »), ou de la fin de Candide. Variété des tons de Voltaire quand il s’agit d’idées qui lui sont chères. • Texte qui peut sembler très moderne, peut-être trop optimiste. Démenti apporté par les effets parfois pervers de l’« abondance », qui n’est pas forcément pacificatrice. ENTRETIEN Voici une simulation d’entretien détaillée pour vous permettre de mieux cerner l’exercice. Elle comprend plusieurs questions possibles et la réponse développée qui pourrait être apportée à la première. ©HATIER Questions L’examinateur pourrait débuter l’entretien par la question suivante : m Quels genres littéraires les écrivains du siècle des Lumières privilégient-ils et pourquoi ? • Il vous faut, pour répondre, battre le rappel des textes du XVIIIe siècle que vous avez étudiés, et les citer comme exemples des genres que vous mentionnerez (une idée sans exemple analysé n’a pas de valeur). • Vous devez aussi mettre en relation les genres avec les dominantes et les principes du mouvement des Lumières. L’entretien pourra se poursuivre dans plusieurs directions, par exemple : m Quels registres les écrivains du siècle des Lumières privilégient-ils et pourquoi ? m Quelles sont les cibles du mouvement de contestation des Lumières ? m Quelles sont les valeurs privilégiées par les philosophes au XVIIIe siècle ? m N’est-il pas réducteur d’appeler le siècle des Lumières « le siècle de la raison » ? m Qu’est-ce que notre époque vous semble devoir aux Lumières ? m Quelles qualités et quels défauts les philosophes du XVIIIe siècle trouveraientils à notre monde moderne ? Réponse développée à la première question Le philosophe veut toucher et convaincre le public le plus large possible, et non plus seulement les lettrés. Pour retenir l’attention sans ennuyer, il recourt à des genres variés, qu’il combine parfois entre eux. Ainsi naissent de nouveaux genres mêlés, plus séduisants, plus percutants, plus proches du peuple. 1. Des genres percutants et rigoureux • Les pamphlets, écrits courts, percutants et polémiques, permettent au philosophe d’attaquer publiquement ses « cibles », personnalités, institutions, usages établis. • Les dictionnaires se multiplient : le philosophe veut faire le tour et la somme des idées, connaissances pratiques et théoriques de l’homme en les soumettant à l’ordre rigoureux de l’ordre alphabétique. Ainsi, Diderot et les philosophes comme Rousseau, d’Alembert, Condorcet, Voltaire veulent faire de L’Encyclopédie (28 volumes, plus de 60 000 articles) une gigantesque entreprise de vulgarisation, le « monument de l’esprit humain » (Voltaire). ©HATIER Le Dictionnaire philosophique portatif de Voltaire (1764), d’un format plus réduit, présente des articles variés dans leur thème et dans leur ton, polémiques et caustiques. • L’esprit rationnel des philosophes trouve dans les essais, traités et discours des genres appropriés à l’examen méthodique et aux démonstrations rigoureuses et didactiques. 2. Le genre épistolaire • Le genre épistolaire connaît une grande vogue au XVIIIe siècle, parce qu’il permet de prolonger à distance les discussions ardentes, fréquentes dans les salons et les cafés : les philosophes multiplient les lettres personnelles (Voltaire et Diderot). Certaines d’entre elles, destinées à être publiées et largement diffusées, ressemblent à des essais (voir p. 415) et ont un grand retentissement dans le monde intellectuel (Lettre à d’Alembert sur les spectacles : Rousseau, 1758) ; Les lettres philosophiques de Voltaire (1726). • Le roman épistolaire, en multipliant les correspondants et donc les points de vue, agrémente la réflexion philosophique d’une intrigue romanesque (ex. : Montesquieu, Lettres persanes, 1721 ; Rousseau, La Nouvelle Héloïse, 1760). 3. Le goût du dialogue • Le XVIIIe siècle se passionne pour le théâtre. Marivaux et Beaumarchais portent à la scène la satire du monde politique et social dans la comédie de mœurs. Les « opprimés » – domestiques, esclaves, femmes… – prennent la parole publiquement et les dialogues servent à des débats plus philosophiques, voire contestataires. • Les philosophes insèrent aussi des dialogues fictifs dans les ouvrages théoriques ; ces dialogues servent d’instrument de vulgarisation philosophique et scientifique (ex. : les Dialogues des morts ou les Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle, certains articles du Dictionnaire philosophique portatif de Voltaire). 4. Les apologues Les apologues font aussi partie de la stratégie argumentative des philosophes. Ils prennent la forme des contes philosophiques, dans lesquels les auteurs mettent l’imagination et la fantaisie au service de la contestation, et de la fable. ©HATIER