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Musique Soufie - Turquie / Sufi Music - Turkey
Kudsi Erguner
Ney
La flûte sacrée
des derviches Tourneurs
The sacred flute of
the Whirling Dervishes
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“Ecoute le ney qui raconte une histoire,
il se lamente de la séparation.”
C’est ainsi que le grand poète soufi «Mevlana Djelal-eddine Roumi» (13ème siècle) invitait ses fidèles à écouter la flûte en roseau, le «Ney», dans son œuvre intitulée
«Mesnevi»
Pour Roumi le ney évoquait l’histoire de l’homme, loin de son origine oubliée,
plein de la nostalgie d’un état intérieur dégagé des exigences de la nature humaine et de la
confusion de ce monde.
Cette image poétique et mystique est à l’origine de l’estime dont jouit cet instrument,
toujours écouté religieusement, bien au-delà de sa dimension musicale.
Le soufisme, la voie mystique de l’Islam, fut la principale source d’inspiration
artistique dans le monde musulman, particulièrement en musique et en poésie. Parmi les
différentes confréries soufies, celle des disciples de Djelal-eddine Roumi, (plus connus
en Europe sous le nom de «Derviches Tourneurs»), a donné une place privilégiée aux
différentes formes d’expression artistique dans le cadre même de son enseignement. Le ney
étant devenu l’instrument principal des cérémonies des Derviches Tourneurs, l’histoire de
cette confrérie est très liée à celle de la musique en Turquie, à une époque où musique sacrée
et profane étaient étroitement mêlées. La plupart des grands compositeurs de la période
ottomane ont, de ce fait, été formés au sein de cette confrérie.
Le ney
«Ney» signifie «roseau» en Persan. L’instrument était utilisé de différentes manières à
travers le monde arabe, persan et turc.
Actuellement il existe deux techniques de jeu :
- Iranienne : elle s’est développée à partir du XVIII ème Siècle. Le musicien place
l’embouchure de la flûte entre les dents de devant de la mâchoire supérieure, puis
canalise l’air avec sa langue pour obtenir le son.
- Turque et arabe : Le musicien appose l’extrémité de la flûte sur le côté de sa bouche,
et souffle sur la paroi opposée de l’instrument.
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Différentes tailles de roseaux sont utilisées dans la musique turque.
-Bolaheng ney :
1040 mm
-Dawud ney :
910 mm
-Sah ney :
858 mm
-Mansour ney :
806 mm
-Kiz ney :
702 mm
-Yilkiz ney :
650 mm
-Mustahzen ney :
598 mm
-Supurde ney :
572 mm
La tradition musicale des soufis de Turquie marque une préférence pour les sons
graves, ce qui amène à utiliser les neys de grande tailles.
Le ney utilisé par Kudsi Erguner dans cet enregistrement est le «Mansour ney».
Musique savante et musique soufie
Comme les autres expressions artistiques, la musique savante ottomane s’est
développée au sein des élites lettrées de l’Empire Ottoman.
Les grands personnages de cet empire, et jusqu’à de nombreux Sultans et Vizirs,
étaient également disciples des confréries soufies, particulièrement de la confrérie mevlevie.
Il n’y avait donc pas de distinction rigoureuse entre musique «religieuse» et «profane» : les
poèmes chantés, les instruments utilisés, et certaines formes de composition se retrouvaient
aussi bien à la cour du Sultan que dans les réunions des Soufis.
Cette musique savante se caractérise par l’utilisation des modes, appelés «makam».
Ce terme désigne littéralement un «lieu», un «endroit».
Les degrés sur lesquels s’articule l’itinéraire mélodique s’appellent aussi makams.
Un makam est constitué d’une échelle de notes ayant entre elles des rapports
déterminés, et d’un itinéraire mélodique qui respecte une certaine hiérarchie entre
ces degrés.
Le système des makams n’utilise pas la gamme tempérée, mais des gammes
comportant des intervalles différents selon le makam interprété.
Ce système des makams permet aux musiciens d’exprimer leur créativité en explorant
les innombrables façons de passer de l’un à l’autre, comme d’imaginer des transpositions et
des combinaisons entre eux.
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La maîtrise d’un makam consiste avant tout à connaître, grâce au répertoire, la
structure mélodique des phrases musicales caractéristiques (“Seyir”), et leurs intervalles.
Le taksim
Le taksim est une improvisation dans le cadre d’un makam. Le musicien, dans le chant
ou le jeu de l’instrument, parcourt librement l’itinéraire mélodique d’un makam donné, sans
être contraint de suivre une phrase rythmique. Cette forme d’improvisation est utilisée pour
introduire une composition, ou pour créer un lien entre deux compositions. Le taksim permet
aussi d’apprécier le style, la virtuosité et la maîtrise de chaque musicien. Dans le contexte
de la musique soufie, l’interprétation comme l’écoute d’un taksim est également considérée
comme une méditation...
Les maîtres du ney
Comme dans tout enseignement initiatique, le joueur de ney reste attaché par un lien profond au maître qui l’a initié à cet art. On peut ainsi établir un «arbre généalogique» de maître à
élève. Chaque époque a eu son maître qui servait de «pôle central», le «Kutb-un nayi».
Parmi ces grands maîtres, on peut citer :
Seyh Yusuf Dede (1670), Seyh Osman Dede (1652-1730), Mehmet Dede (1798),
Seyh Mustafa Naksi Dede (1854), Kazaskeer Mustafa Izzet Effendi (1876), Yusuf
Pasa (1890), Aziz Dede (1905), Huseyn Fareddin Dede (1910), Emin Dede (1945),
Suleyman Erguner (1953), Ulvi Erguner (1974).
Aujourd’hui, Kudsi Erguner est le maître incontesté du ney turc.
Issu d’une famille de musiciens, Kudsi Erguner a rencontré de nombreux grands
musiciens de l’ancienne génération, et s’est imprégné à leur contact d’un style authentique,
reflet de siècles de culture musicale. Il est, dans le domaine de la musique savante ottomane,
le seul musicien turc de sa génération à avoir reçu, de son père, un enseignement direct
comme le veut la tradition. Participant aux réunions de plusieurs confréries soufies, il a suivi
leur enseignement spirituel, mais aussi musical. Il a également été membre de l’orchestre de
Radio Istanbul.
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En 1975, il s’installe à Paris pour étudier l’architecture et la musicologie. Il s’est
produit dans de nombreux concerts tant aux Etats Unis qu’en Europe. Par ses concerts,
il a fait découvrir la musique soufie au public occidental. Lors de ses recherches sur les
musiques de l’lnde, du Pakistan et de la Turquie, il a réalisé des enregistrements de genres
musicaux authentiques et peu connus, qui ont été publiés en Europe.
Il a également constitué, en Turquie, des ensembles capables d’ interpréter des
musiques quasiment oubliées, sur le chemin d’une modernisation précipitée. Conseiller
artistique de plusieurs grands festivals, producteur de disques sur plusieurs labels européens,
il a fortement contribué à ce que ces musiques retrouvent leur place au sein du patrimoine
culturel international, et par contrecoup, en Turquie même...
Il a travaillé avec de grands artistes européens pour des musiques de films, de
pièces de théâtre et de ballet, (
Peter Brook, Carolyn Carlson, Peter
Gabriel, Georges Aperghis, Didier
Lockwood, Michel Portal...).
En 1981, il a créé à Paris
l’association Mevlana où il enseigne la tradition soufie, et la musique
savante selon la tradition originale.
Hervé Teboul
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Listen to the ney that tells a story,
it is lamenting about the separation
This is how the great thirteenth century Sufi poet Mevlana Djelal-eddine Roumi called
the faithful to listen to the reed ney flute in his work titled Mesnevi.
For Roumi, the ney flute is evocative of the history of man, far from his forgotten
origins, full of the nostalgia of an interior state of being that was free of the demands of
human nature and the confusion of this world.
This poetic and mystical image is behind the esteem for this instrument which is always
listened to religiously, far beyond the purely musical dimension.
Sufism is the mystical branch of Islam and was the main source of artistic inspiration in the Muslim world, more particularly in music and poetry. Among the different Sufi
brotherhoods, it was the disciples of Djelal-eddine Roumu, better known as the Whirling
Dervishes in the western world, who reserved a special place in their teachings for the
various forms of artistic expression. The ney flute is the main instrument used in Whirling
Dervish ceremonies, closely linking the history of this brotherhood to that of music in Turkey
at a time when sacred and profane music were intertwined. Most of the great composers of
the Ottoman period were trained in this brotherhood.
The ney flute
Ney means reed in Persian. The instrument was played in different ways throughout the
Arab, Persian and Turkish worlds.
Today there are two playing techniques :
- The Iranian style was developed starting in the eighteenth century. The musician
places the opening of the flute between his front teeth and directs the air with his
tongue to obtain the sound.
- In the Turkish and Arabian technique, the musician places the end of the flute on the
side of his mouth and blows across the hole.
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There are different sized neys that are played in Turkish music:
Bolaheng ney 1040 mm
Dawud ney
910 mm
Sah ney
858 mm
Mansour ney 806 mm
Kiz ney
702 mm
Yilkiz ney
650 mm
Mustahen ney
598 mm
Supurde ney
572 mm
The Sufi musicians of Turkey show a preference for deep notes, and hence we see a
greater number of larger flutes.
Kudsi Erguner plays a Mansour ney in this recording.
Classical music and Sufi music
Like for the other arts, classical Ottoman music was developed by the elite of the
Ottoman Empire.
The main personalities of the Empire, as well as many sultans and vizirs were disciples
of the Sufi brotherhood, and in particular of the Mevlevi sect. Hence, there was no clear
distinction between religious and profane music: the poems that were sung, the instruments
that were played and certain forms of composition, were found in the Sultan’s court as well
as in Sufi gatherings.
This classical music is based on a modal system called maqam, literally meaning
“location” or “place”.
The maqam is made up of a scale of notes that have a specific relationship between
themselves.
The melody follows a specific hierarchy of scales.
The maqam system does not have equally tempered scales but has scales using different
intervals depending on which maqam is being played.
The maqam system makes it possible for musicians to express their creativity while
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exploring the innumerable ways of passing from one to another, as well as leaving them to
imagine the transpositions and combinations between them.
In order to master the maqam, the musician must above all master the melodic
structure of the characteristic musical phrases called seyir and their intervals.
This is acquired through learning the repertory.
The taksim
The taksim is an improvisation within the maqam. The musician freely follows the
itinerary of the specific maqam without having to follow a specific rhythm. This form
of improvisation is used to introduce a composition or to create a bridge between two
compositions. The taksim is also used to show off the style and technique of each musician.
In Sufi music, both to play and to listen to a taksim is a form of meditation...
The masters of ney
As in all initiation type learning, the ney player has very deep ties with the master
who initiates him. A “family tree” can be drawn from master to student. Each period has its
master who acted as a central pivot, the “Kutb-un nayi”.
Among these masters are Seyh Yusuf Dede (1670), Seyh Osman Dede (1652-1730),
Mehmet Dede (1798), Seyh Mustafa Naksi Dede (1854), Kazaskeer Mustafa Izzet
effendi (1876), Yusuf Pasa (1890), Aziz Dede (1905), Huseyn Fareddin Dede (1910),
Emin Dede (1945), Suleyman Erguner (1953), Ulvi Erguner (1974). Today, Kudsi
Erguner is the uncontested master of the Turkish ney.
Kudsi Erguner is from a family of musicians and has met a number of the great
musicians from older generations. He was instilled with their authentic style, reflecting
centuries of musical culture. He is the only Turkish musician of his generation to have been
trained directly by his father, as is dictated by oral tradition. He also took part in a number of
Sufi brotherhood gatherings and not only followed their spiritual teachings but learned their
musical traditions as well. He played for a time with the Radio Istanbul orchestra.
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In 1975, he moved to
Paris to study architecture and
musicology. He has given a number
of concerts in the United States and
in Europe, introducing Sufi music to
the western public. While researching
in India, Pakistan and Turkey he
recorded a number of authentic musical styles which were little known and
subsequently published in Europe.
He created ensembles in Turkey
to play the music that was on its
way to being abandoned with the
modernisation of that country. As
artistic consultant for several major
festivals, record producers for several
European labels, he contributed to
give a place to this music within the
international cultural heritage and as
a result in Turkey as well...
He has worked with European
artists for film scores, plays and ballets (Peter Brook, Carolyn Carlson, Peter Gabriel,
Georges Aperghis, Didier Lockwood, Michel Portal...).
In 1981, he created MEVLANA in Paris, a non-profit organisation where he teaches
the Sufi tradition and classical Sufi music.
Hervé Teboul
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Discographie
«al sur»
- Musique Classique ottomane / Gilles Andrieux & Kudsi Erguner / ALCD 104
- Musique de la cour ottomane - Enderun / Ensemble Ulvi Erguner / ALCD108
- Musique Classique ottomane Makam / Kani Karaca / Kudsi Erguner / Akagunduz Kutbay /ALCD 114
- Chants du Harem / Ensemble des femmes d’Istanbul / ALCD 127
- Flamenco & Musique soufi ottomane - L’Orient de l’Occident / Hommage à Ibn Arabi / ALCD 131
Arion
- Cérémonie des Derviches Halveti - musique soufi, Vol 1
- Derviches Tourneurs de Turquie - La cérémonie des Mevlevi - musique soufie, vol 2 1981 / ARN 64159
Auvidis
- Fasl - Musique de l’Empire Ottoman / Ensemble de K. Erguner / Auvidis Ethnic 1990 B6737
- Les Janissaires - Musique martiale de l’Empire Ottoman / ensemble de l’armée de la république Turque, direction Kudsi Erguner / Auvidis Ethnic 1990 B 6738
CMP Records
- Sharki / Nesrin Sipahi &Kudsi Erguner Ensemble / CD 3009
- Sufi Music of Turkey By Kudsi Erguner & Suleyman Erguner / CD 3005
- Gazel - Classical sufi music of the Ottoman Empire / performed by yusuf bilgin,
- Fevzi Misir, Aziz Bahriyeli & The Kudsi Erguner Ensemble / CD 3012
- Tanburi Djemil Bey - Peshrev &Semai / Performed by The Kudsi Erguner Ensemble / CD 3013
ECM
- Conte de l’incroyable amour / Anvar Brahem
EMI Italia
- Alice il sole nella pioggia
Forlane
- La danse cosmique - Niyaz Ayin / UCD 19057
JVC Japan
- The mystic flutes of Sufi - Prelude to ceremonies of the whirling Derviches /
- The Erguner Brothers / JVC World Sounds VICG 5005
- The sacred Koran / recitations by Muezzins Of Istanbul / Victor Ethnic Sound VDP-1387
K 617 / AFA
- Sud - Jean Marc Padovani
- 10 -
Kojima Records Japan
- Songs of Rabindtranath Tagore & Sarmila Roy / 3ORG-1
Maison des cultures du monde / Collection Inédit
- Turquie : Musique soufie - Ilâhî & Nefes / N. Uzel & K. Erguner / W260021
Musée d’ethnographie de Genève / Archives internationales de musiques populaires
- Turquie - L’art du tanbur ottoman / VDE CD 586
- Turquie - Cérémonie des Derviches Kadiri / VDE CD 587
Ocora Radio France
- Turquie : Musique soufie
- Ney & Kena / Conférence des roseaux
Realworld
- The Mahabharata / Original sound track «a Film by Peter Brook» / CDR W9
- Passion sources / Realworld & Peter Gabriel RWCD2
- Passion - Peter Gabriel / Realworld RWCD1
- «Us» - Peter Gabriel
Sunset Playa Sound
- Oriental Dreams / Mahmoud Tabrizi-Zadeh & Kudsi Erguner / PS 65075
- Les Derviches de Turquie / PS 65120
Unesco Collection
- Turquie : Le ney turc / Kudsi Erguner / Unesco Musiques traditionnelles d’aujourd’hui / D 8204
- Meditation on the ney / Musical sources / Phillips 6586 039
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