HISTOIRE - THEME 3

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HISTOIRE - THEME 3
DS 1 – correction.
Après la Seconde Guerre mondiale, la France est présentée comme unanimement résistante. Pourtant, seule une
minorité a participé réellement à l’action de la Résistance et il faut attendre la fin du XX e siècle pour que l’image d’une
France totalement résistante soit remise en cause.
Comment la perception et donc la mémoire de la Résistance a-t-elle évolué depuis la Libération ?
Pour évoquer ce sujet nous disposons de deux documents, un extrait d’un manuel scolaire de 1959 destiné à des
écoliers et un extrait d’un discours de Jacques Chirac, alors président de la République. Il s’agit donc d’expressions
« officielles » des mémoires de la Seconde Guerre mondiale, mais séparées par près de cinquante ans, qui nous permettent
de voir que l’image de la Résistance évolue ainsi que le rôle des alliés et du gouvernement français de l’époque.
Les deux documents présentent une image héroïque de la Résistance, car les Français « voulaient rester un pays
libre ». Cependant, l’organisation de la Résistance est présentée différemment.
Ainsi, le manuel scolaire présente la lutte des « patriotes » comme unique, dressant donc un portrait résistancialiste de
la France en guerre. Il témoigne d’une vision de la Résistance issue des premières années de l’après-guerre où, dans un
contexte de reconstruction politique et économique, il faut assurer l’unité de la France. La Résistance intérieure est mise
en avant (« des milliers de jeunes gens se réfugièrent dans le « maquis » où ils continuèrent la lutte »). Le contexte de
rédaction de ce manuel peut expliquer son orientation. En effet, la guerre est alors achevée depuis 15 ans, mais le pays est
plongé dans la tourmente de la guerre d’Algérie et il faut assurer l’unité du pays après le retour de De Gaulle au pouvoir.
En revanche, le document 2 présente la Résistance comme née de la volonté d’un homme « seul, pour assumer la
France ». Le discours de Jacques Chirac est clairement hagiographique. Cette orientation du discours provient, à la fois,
des liens politiques entre De Gaulle et Jacques Chirac ainsi que du contexte de rédaction du discours, à savoir
l’inauguration du mémorial Charles de Gaulle de Colombey-les-Deux-Eglises, en 2006. Loin d’être unanimement
regroupée derrière de Gaulle, la France des années noires paraît dans le discours de Jacques Chirac profondément divisée
entre « ceux qui font leur devoir, et ceux qui ne le font pas ». Cependant, c’est De Gaulle qui « charge Jean Moulin
d’unifier la Résistance ». Ce sont les « Français libres » rassemblés autour de De Gaulle qui « se couvrent de gloire à Bir
Hakeim ».
Les deux documents se rejoignent dans une vision résistancialiste de la France mais diffèrent quant au rôle de De
Gaulle dans la Résistance. Observe-t-on une différence dans la mémoire du rôle des Alliés.
Les deux documents présentent un rôle différent des Alliés dans la mémoire officielle.
Dans le document 1, le rôle donné aux Alliés est montré comme nécessaire à la libération du territoire. Ainsi, « les
armées alliées débarquèrent en Normandie, et, en août 1944, elles marchèrent sur Paris ». Cependant, il est aussi précisé
dans ce manuel scolaire que la libération de Paris est le fait de la Résistance intérieure et des chars du général Leclerc
(« les Parisiens avaient attaqué les troupes allemandes qui occupaient Paris. Et voici les chars du général Leclerc qui
arrivent dans la capitale »).
Dans le document 2, les Alliés britanniques et américains sont cités : de Gaulle « regarde dans les yeux Churchill » et
tient « tête à Roosevelt ». Les Soviétiques ne sont pas cités, malgré la part prise par l’URSS dans la libération de
l’Europe, car elle n’était pas une « démocratie », et parce qu’après la Seconde Guerre mondiale, elle s’est opposée à ses
anciens alliés lors de la Guerre froide. De plus, dans ce discours, Jacques Chirac évoque les oppositions entre De Gaulle
et les Américains (« Roosevelt, qui lui préfère le général Giraud »).
Les deux documents reconnaissent le rôle des Alliés dans la libération de la France mais diffèrent quant au soutien
réellement apportés par ceux-ci. La présentation du régime de Vichy est-elle la même dans les deux textes ?
Les deux documents témoignent d’une évolution plus large des mémoires de la guerre.
Le régime de Vichy est totalement absent du manuel scolaire, de même que la particularité du sort des Juifs de France.
Il présente l’image d’un peuple uni dans la souffrance, « fusillé ou massacré ». Là encore, le manuel insiste sur l’unité de
la France. Jusqu’aux années 1980, la mémoire de la collaboration et du génocide est largement tue afin d’éviter de
réveiller de mauvais souvenirs.
Au contraire, le discours de Jacques Chirac met en avant la servilité et la trahison des élites de Vichy, s’inscrivant ainsi
dans la reconnaissance officielle des crimes de ce régime qu’il a lui-même effectuée en 1995. Jacques Chirac évoque le
gouvernement de Vichy qui « livre les Juifs à leurs bourreaux ».
La mémoire de la Résistance a connu de profondes modifications depuis la Libération. D’abord fondée sur le
résistancialisme, c’est-à-dire sur l’image d’une France unie dans la lutte contre l’ennemi, elle se fragmente au fil du
temps, s’individualise. La disparition de nombreux acteurs, le travail des historiens, mais aussi l’évolution des relations
internationales, sont à l’origine de ces évolutions.
La guerre d’Algérie, qui a profondément touché les Français, est-elle aussi à l’origine de mémoires diverses ?
Pour la Géographie : cf. le croquis du cours.
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