De la recherche aux traitements des maladies rares

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De la recherche aux traitements des maladies rares
De la recherche aux traitements
des maladies rares :
risques et bénéfices
Avec la participation de :
SOMMAIRE
Maladies rares :
Où en est la recherche ? ………………………………….
p. 2
Nouveaux outils face
aux maladies neurologiques rares ……………………..
p. 4
Nouveaux traitements
des maladies rares du sang………………………………. p. 5
Témoignages…………………………………………………
Les réponses à vos questions ……………………………
Pour en savoir plus ………………………………………...
Glossaire……………………………………………………..
p. 8
p. 9
p.15
p.15
> Pr Ségolène Aymé,
Directeur de recherche Inserm SC 11, Paris,
responsable du serveur Orphanet.
> Dr Alexandra Durr,
Neurologue et généticienne, Inserm U 289,
Physiopathologie des maladies du système nerveux.
> Pr Eliane Gluckman,
Service hématologie - greffe de moelle osseuse de
l’Hôpital Saint Louis (AP-HP), Paris.
> Ces propos ont été recueillis à l’occasion d’un débat organisé par la Fondation Recherche Médicale
1
dans le cadre de ses Journées , le 23 septembre 2003, à la Sorbonne, Paris. Ce débat était animé par
Laurent Romejko, journaliste de France 2.
> Ce dossier est également disponible sur le site web de la Fondation Recherche Médicale
www.frm.org
> Les termes avec astérisque (*) sont définis ou explicités dans le glossaire ou dans la rubrique Pour
en savoir plus en page 15.
> Dossier publié le 15 novembre 2003.
1
Du 9 au 23 septembre 2003, la Fondation Recherche Médicale organisait 7
débats grand public dans 6 villes de France (Paris, Rennes, Bordeaux, ClermontFerrand, Nice, Grenoble). Le public a pu y rencontrer médecins et chercheurs,
leur poser des questions et dialoguer avec eux.
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1
Maladies rares :
où en est la recherche ?
Par le Dr Ségolène Aymé,
Directeur de recherche Inserm SC 11, Paris,
responsable du serveur Orphanet.
La recherche sur les maladies rares est très
spécifique. Il y en a des milliers et 3600 d'entre
elles sont recensées sur www.orpha.net , notre
serveur d'information, mais ce chiffre est un peu
artificiel, car cela dépend de la façon dont on les
définit*. On pourrait aussi bien dire qu'il y en a 10
ou 12 000 ou simplement 2 ou 3 000.
On découvre entre 2 et 5 maladies rares par
semaine (description de nouveaux syndromes
dans la littérature médicale). En fait, ces
maladies ne sont pas nouvelles, mais on s'y
intéresse enfin ! Un intérêt se porte donc
maintenant vers les malades dont on ne
comprenait pas autrefois les symptômes, qu'on
laissait à l'écart, à qui l’on ne donnait aucune
réponse et qui pouvaient passer leur vie entière
sans savoir ce qu'ils avaient. Ce n'est plus
complètement le cas, heureusement.
Ces maladies rares sont en grande majorité - à
80 % - d'origine génétique. Les autres maladies
rares ont souvent un gène ou plusieurs gènes de
susceptibilité*, mais ne sont pas entièrement
déterminées par la génétique. Deux tiers sont
des maladies pédiatriques - touchant les jeunes
enfants - et durent toute la vie.
La recherche sur les maladies qui ne surviennent
qu'à l'âge adulte, après 40, 50 ou 60 ans est très
spécifique et s'est organisée récemment.
Pendant 15 ans, j'étais, avec quelques collègues
dans le monde, une des rares à s'intéresser à
ces maladies. Les gens disaient : "Ce sont les
chercheurs qui s'intéressent aux timbres-poste",
c’est-à-dire aux raretés dont une petite
caractéristique en fait la valeur. En fait, nous
étions confrontés aux problèmes gravissimes de
certains malades et ne supportions pas de ne
pas avoir de diagnostics, de tests de laboratoire,
de méthodes d'exploration ou de réponses
thérapeutiques. La mobilisation a été
progressive, tout en restant confidentielle
pendant longtemps. Des bases de données
partagées ont été constituées, car c'était la seule
façon de recenser toutes les maladies rares. Ce
savoir partagé permettait d'échanger entre
personnes qui étaient au Japon, aux États-Unis,
au Canada, en Angleterre. En faisant des
rapprochements, on a pu identifier certaines de
ces maladies.
Cette organisation de la recherche a duré
jusqu'aux années 1990, date à laquelle tout a
changé d’échelle. Le programme génome a
véritablement « révélé » les maladies rares. En
effet, quand les chercheurs ont commencé à
décrypter le génome, il leur fallait identifier les
gènes et pour cela étudier des familles dans
lesquelles un gène se transmettait entre
générations. Tout le monde y a trouvé son
compte : les chercheurs qui étudiaient des
maladies génétiques très rares se transmettant
dans les familles et les malades à qui l'on
s'intéressait enfin et dont on allait peut-être
trouver le gène à l'origine de la maladie. Les
maladies rares sont donc arrivées sur le devant
de la scène dans les années 1990.
Grâce à l'étude des maladies rares, on a déjà pu
identifier 1 200 gènes de maladies. Ces
découvertes peuvent aller très vite : il suffit
d'avoir une famille avec le gène qui se transmet
et l’on peut trouver le gène correspondant en
quelques semaines ou en quelques jours. Les
maladies rares constituent donc des outils
fantastiques pour la recherche en génétique.
Ces 1 200 maladies génétiques dont on a trouvé
le gène n'ont pas forcément de test diagnostic
pour autant. Seules 300 maladies disposent d’un
test en biologie moléculaire qui permet de faire
un diagnostic, de savoir si les apparentés sont
transmetteurs, etc. Quand on a identifié le gène
et qu'on peut proposer un test diagnostic, on
peut également proposer un diagnostic prénatal.
Si la maladie revêt un caractère sévère et/ou
handicapant et que les gens le souhaitent, on
peut procéder au dépistage de personnes à
risque dans les familles. Mais cela ne suffit pas :
l'étape suivante est la prise en charge,
l'amélioration des conditions de vie et de la
qualité de vie et, si possible, le traitement.
Cette étape est en cours, car, en cherchant à
mieux comprendre la cause de ces maladies, on
accumule les connaissances sur les gènes
responsables non seulement des maladies rares
mais aussi d’autres maladies plus
« communes ». En effet, les maladies rares ont
toujours un processus, un gène ou une protéine
codée par ce gène qui ne fonctionne pas. Ce
sont, à ce titre, des “ modèles ” de maladies. Les
maladies complexes, les maladies communes
ont souvent de multiples causes, de multiples
facteurs de risque. Il est donc très difficile de
« disséquer » l'effet de chaque événement, mais
on peut comprendre ce mécanisme avec une
maladie où un seul élément ne fonctionne pas.
Les chercheurs ont donc pris conscience de cet
aspect « maladie modèle », et de l’impact
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d’applications déclinables sur un grand nombre
de maladies. Et les industriels ont compris qu'il
n'était pas inutile de s'intéresser au traitement de
ces maladies, car ils allaient généralement
pouvoir développer des médicaments qui
auraient d'autres applications. L'intérêt des
industriels est venu des efforts des chercheurs
fondamentaux et des médecins qui travaillaient
sur ces maladies, mais aussi de la médiatisation
des maladies rares avec le programme génome
et, en France, par le Téléthon qui a
formidablement contribué à les populariser. La
prise de conscience de l'importance de ces
maladies a eu des effets politiques. En effet, la
politique de soutien à la recherche a changé ces
dernières années, ainsi que la politique de prise
en compte des personnes atteintes de maladies
rares. Plusieurs événements clefs ont aussi
changé le paysage de notre travail : l'adoption
par la commission européenne d'un règlement
donnant des avantages aux industriels s'ils
développent des médicaments pour les maladies
rares. Ces incitations sont telles qu'en presque 3
ans, 200 molécules sont en passe d'arriver sur le
marché, ce qui est fantastique lorsqu'on connaît
leur temps de développement. On a beaucoup
d'espoir que cette montée en puissance des
médicaments dits “ orphelins ” continue dans les
années qui viennent. L'industrie a donc compris
son intérêt grâce à ces incitations.
Le partenariat entre recherche publique et
recherche industrielle s'installe progressivement.
Il est souvent difficile pour le public de
comprendre comment cela fonctionne et si les
intérêts ne sont pas divergents. Mais ce n'est
pas le cas : la recherche publique est faite pour
comprendre les bases fondamentales, l'origine
des maladies, les grands mécanismes pour
qu'ensuite les industriels puissent intervenir. Ce
n'est pas cynique : les industriels ont besoin de
cette recherche fondamentale et produisent de la
richesse en développant de nouveaux procédés
de diagnostic, de nouvelles machines, de
nouveaux médicaments etc. Mais une partie
incontournable ne sera jamais faite par le
secteur marchand, car il y a un investissement
de fonds qu’il faut que tout le monde fasse.
Quatre gouvernements successifs ont déjà
entrepris cet effort en France pour aider et
coordonner la recherche dans le domaine des
maladies rares.
Le grand enjeu de la recherche sur les maladies
rares est de convaincre les chercheurs de
collaborer alors qu’ils sont, pour certains, plutôt
« individualistes » et souhaitent avoir des succès
personnels, puisque c'est sur ces succès qu'on
les juge. Pourtant, si seuls 50 malades ont une
maladie et sont dans 4 pays européens, tous les
médecins qui ont connaissance de ces malades
doivent collecter l'information et la partager. Tous
les laboratoires doivent aussi partager les
données, qu'ils sachent faire de l'imagerie de la
cellule, de la biologie moléculaire, de l'imagerie
cérébrale ou de l'épidémiologie*. Les pouvoirs
publics ont compris qu'il fallait des incitations et
ont lancé des appels d'offres permettant d'avoir
des crédits de recherche à condition de travailler
avec les autres, de faire des réseaux et de
partager les données. Cela a été fait en France
et au niveau européen, en Espagne, en
Allemagne. Il y a donc, en ce moment, une
dynamique de partage des connaissances, de
collaboration, et une course pour trouver des
solutions pour les malades.
C'est un procédé très différent de la philosophie
habituelle de la recherche. En effet, les
chercheurs ne sont pas très bien payés, même
s'ils trouvent. Nous travaillons dans des
conditions difficiles et nous travaillons beaucoup.
Ce qui nous motive, c'est de trouver, d'être
reconnu, d'être remercié par la société, même si
c'est rare. On cherche donc à avoir cette
reconnaissance individuelle de notre
contribution. C'est pourtant une mauvaise
approche : la recherche doit se faire par
collaboration. Les physiciens l’ont compris, il y a
très longtemps : il y a d'énormes laboratoires et
réseaux de collaboration et chacun contribue un
peu au succès de l'ensemble. En biologie et en
médecine, on est encore beaucoup trop
individualiste. Ce sont seulement les prémices
de la construction d'un effort collectif.
Il y a donc une communauté d'intérêts entre les
chercheurs, les industriels et, surtout, les
associations de malades : le programme
génome s'est entièrement appuyé sur l'effort des
associations. Elles ont convaincu les familles de
donner du sang pour la cartographie du génome.
Il faut relever l'exemplarité de l’AFM*, qui a
compris extrêmement tôt que les familles
devaient se mobiliser pour aider les chercheurs
et contribuer massivement à l'effort de
recherche. Les associations sont des
partenaires. Évidemment, il peut être stressant
d'avoir un partenariat étroit avec les associations
de malades, car les échelles de temps de la
recherche et de l'espérance des gens ne sont
pas superposables. Il y a parfois trop d'attente de
la part des associations par rapport à ce que
peuvent faire les chercheurs. Mais, ce
partenariat est formidable et, si nous n'avons pas
beaucoup de reconnaissance en général, nous
avons au moins celles des associations dont
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nous sommes proches et c'est une grande part
de notre plaisir à travailler.
Nouveaux outils face aux
maladies neurologiques rares,
Dr Alexandra Durr,
Neurologue et généticienne, Inserm U 289,
Physiopathologie des maladies du système nerveux.
Les maladies neurologiques sont extrêmement
diverses et comptent parmi elles certaines
maladies rares. Les maladies génétiques
touchent le système nerveux pour la moitié
d'entre elles. Par conséquent, les maladies rares
sont très souvent neurologiques.
Parmi des formes très fréquentes de maladies
neurologiques, comme les maladies de
Parkinson et d'Alzheimer, on a découvert des
formes rares, cliniquement identiques mais
déterminées par un seul gène. Par exemple,
10 % des maladies de Parkinson sont
héréditaires et dues à une anomalie portée par
un gène. On pensait auparavant que la maladie
de Parkinson était une seule maladie, mais due
à des causes très diverses. Ce n'est pas tout à
fait vrai : on devrait dire que c'est un « syndrome
parkinsonien », englobant la maladie de
Parkinson dont on ne connaît pas bien les
causes et un sous-groupe de maladies avec une
maladie due à tel gène, une maladie due à tel
autre… La découverte de ces formes a été
extrêmement importante pour comprendre le
mécanisme même de la maladie. Étudier ces
maladies est donc important mais difficile : ce
sont des maladies rares, il faut connaître les
familles, travailler en réseaux, etc.
> Les particularités des maladies
neurologiques
Ces maladies se révèlent souvent à l'âge adulte
et il est donc difficile d’en faire une étude
génétique correcte : quand la maladie se révèle
à l'âge de 60 ans, les parents du patient ne sont
souvent plus là et les enfants ne sont pas
forcément atteints, car ces maladies ne se
transmettent pas toujours d'une génération à
l'autre. Il faut donc avoir d'autres techniques et
d'autres approches génétiques pour les étudier.
Il faut souvent prélever des échantillons
biologiques, contacter et caractériser
cliniquement beaucoup de patients.. un travail de
longue haleine.
Ce sont souvent des maladies neurodégénératives, qui touchent très sélectivement
une certaine population de cellules nerveuses, et
s'aggravent progressivement. Difficulté
supplémentaire, pour une même maladie, les
symptômes varient au fil du temps. Le problème
est différent de celui des maladies avec des
phénotypes*, donc des présentations cliniques
très particulières, où il faut rencontrer des gens
très éloignés, trouver des familles différentes.
Dans la maladie de Parkinson, par exemple, il y
a de signes cliniques bien identifiés, pourtant, il y
a énormément de gènes en cause et de
nombreuses formes différentes. Les patients
acceptent bien la maladie de Parkinson, car ils la
connaissent à peu près. Mais les représentants
des associations concernant des maladies peu
connues, comme les ataraxies cérébelleuses,
acceptent mal qu'on ne puisse pas leur dire
exactement quel gène pose problème. En fait,
nous avons juste un « nom de groupe » : il y a
plusieurs maladies différentes dans la maladie
de Parkinson, qui sont toutes appelées de ce
nom.
Autre particularité des maladies neurologiques :
il n'y a pas tellement de traitements curatifs, ce
qui justifie d’accélérer la recherche. Les
chercheurs imaginent que des « circuits » sont
interrompus dans le cerveau et cherchent à les
reconstituer. Penser qu’il suffit d'une simple
greffe de cellules en mettant des cellules
nerveuses là où elles manquent est trop
simpliste et théorique. Il faut considérer ce
fonctionnement en réseau dans le cerveau.
Même si de nombreux progrès ont été faits, par
des stimulations intra-cérébrales pour la maladie
de Parkinson, beaucoup de choses restent à
imaginer et à faire en matière de traitement.
J'ai un jour appelé une personne qui avait une
paraparésie spastique*. Je lui ai dit : "Monsieur,
j’avais fait un prélèvement sur vous, il y a dix ans
et je sais maintenant quel est le gène de votre
maladie". Il m’a répondu : "C'est formidable, et
alors ?". Ça ne changeait rien, en effet, le
traitement était le même. Pourtant, identifier des
gènes responsables constituent la première
étape vers un traitement.
C'est ce qu'on fait après le diagnostic qui
importe. Pour les maladies neurologiques
particulièrement, on est en 2003 dans cette
situation charnière où l’on peut faire un
diagnostic génétique, mais rien ne suit car il n'y a
pas de traitement. Ce n'est pas qu'on ne veuille
pas suivre, mais c'est encore trop tôt : on est un
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peu en avance du point de vue du diagnostic,
mais très en retard par rapport à la thérapie.
Le domaine de la neurologie a essayé
d'encadrer les tests génétiques, car on ne peut
pas faire une prise de sang à quelqu'un et lui dire
simplement qu'il développera une maladie grave
dix ans plus tard. Avec la maladie de
Huntington*, l'encadrement a été fait rapidement
dès 1989 et est devenu crucial en 1993 avec la
création du premier centre en France, à Paris,
pour la prise en charge de ces diagnostics. Il faut
savoir ce qu'on doit faire des résultats des
examens.
> Les avancées
La plus importante des avancées récente est
certainement la découverte que nos neurones
peuvent se régénérer seuls, même à l'âge
adulte. Cette découverte, faite il y a quelques
années casse une idée reçue qui était de dire
que les cellules du cerveau ne se régénèrent pas
du tout. D’où l’idée de se servir de ces cellules
pour les thérapies cellulaires. Cela a déjà été
fait, tout comme pour les cellules sanguines.
La deuxième avancée est le transfert
technologique du diagnostic vers la clinique.
C'est maintenant fait pour certaines maladies
neurologiques, comme la maladie de CreutzfeldtJakob, mais c'est souvent encore un peu délicat :
il y a encore beaucoup de travail à faire auprès
des médecins pour qu'ils connaissent toutes les
maladies correctement et puissent donner aux
patients des informations correctes lorsqu’un
diagnostic est posé.
On a également découvert des mécanismes
communs à certaines maladies. Même si les
maladies sont plus ou moins rares, si tout le
monde travaille sur le même mécanisme même
sur des maladies différentes, lorsqu'on trouve
quelque chose pour une maladie, s'il s'agit de la
même cause technique moléculaire, ce sera bon
pour toutes les autres maladies qui sont dues à
ce même mécanisme.
Ainsi, on a découvert qu'il y avait, dans un gène,
un motif qui se répétait inutilement - induisant un
état pathologique - et que 13 maladies
neurologiques étaient dues à cette répétition.
C'est très étrange : quelque chose se fait dans
des gènes différents, sur des chromosomes
différents et pour des maladies très différentes et
cela ne concerne que des maladies
neurologiques. De nombreuses équipes de
chercheurs se sont mises ensemble sur ces
thèmes-là.
> Les défis de l'avenir
Un très bon exemple est celui de la vaccination
dans le cas la maladie d'Alzheimer. Même si
celle-ci n’est pas une maladie rare, c’est un très
bon exemple de discussion. L’idée est à la base
tout simplement géniale !
Dans la maladie d'Alzheimer, des plaques d'une
substance complètement amorphe, l'amyloïde,
se posent dans le cerveau et, quand il y en a
trop, on devient malade. Le fait d'imaginer de
vacciner contre cette substance, avant qu'elle ne
se dépose dans le cerveau, était une excellente
idée. Malheureusement, les essais ont été trop
rapides et ont provoqué le décès prématuré de
quelques personnes. Ces essais ont bien
évidemment été arrêtés. Mais on peut espérer
que ce concept sera un jour mis en application
efficacement et sans risque.
Autre perspective prometteuse : la thérapie
génique. C'est une technique un peu compliquée
à appliquer au le cerveau, système clos et très
protégé par rapport à la circulation sanguine.
Mais, des recherches visent à concevoir des
vecteurs qui ne vont que dans le cerveau. Dès
que cette première étape aura été franchie, alors
la thérapie génique aura fait un grand pas.
Enfin, il y a des actions quotidiennes à faire pour
les malades qui ont des maladies neurologiques,
comme installer des consultations spécialisées
pour chaque type de maladie, effectuer un suivi,
proposer des solutions pour la vie de tous les
jours, et enfin, informer et sensibiliser.
Nouveaux traitements des
maladies rares du sang
Professeur Eliane Gluckman,
Service hématologie greffe de moelle osseuse de
l’Hôpital Saint Louis (AP-HP), Paris.
La maladie de Fanconi* est un très bon exemple
pour aborder les maladies rares du sang. Le
professeur Fanconi était un pédiatre suisse qui
travaillait à Zurich et il a été le premier à décrire
cette maladie dans les années 1920. C'est une
maladie héréditaire, transmise par les deux
parents. Elle est donc autosomale récessive*.
Les deux parents ne savent pas qu'ils ont la
mutation, puisque lorsqu'un seul gène est atteint,
cette maladie est totalement asymptomatique.
C'est donc le hasard malheureux qui fait que les
enfants sont malades, lorsque deux parents ont
cette mutation et lorsqu'ils héritent du gène
anormal des parents.
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La maladie de Fanconi est une maladie qui
associe plusieurs malformations que l'on peut
voir parfois dès la naissance : anomalies au
niveau des mains, retard de croissance, taches
sur la peau… D’autres manifestations plus
handicapantes surviennent à l’âge de 4 ou 5 ans.
On s'aperçoit alors que l'enfant devient pâle, il a
des bleus. Sa moelle osseuse s’arrête
progressivement de fonctionner et ne produit
plus de globules rouges, de globules blancs et
de plaquettes.
Comme dans toutes les maladies rares, il faut
connaître le diagnostic pour pouvoir le faire
immédiatement. Toutefois, compte tenu de la
petite taille de l’enfant et de ses malformations –
et quand on en a l’habitude -, il est assez aisé de
diagnostiquer cette maladie dès l'entrée de
l'enfant en consultation. Toutefois, ce sont des
examens plus spécialisés qui vont montrer que
la marque de cette maladie est une fragilité de
certains chromosomes. Ce sont des
chromosomes qui cassent facilement et font que
la cellule se divise mal. Petit à petit il y a un arrêt
et une destruction prématurée des cellules à
division rapide, c'est-à-dire essentiellement
celles de la moelle osseuse.
Cette maladie, quand elle n’est pas prise en
charge, aboutit au décès de l'enfant. En
moyenne, le diagnostic se fait vers l'âge de 5
ans, et le décès intervient vers l'âge de 14 ou 15
ans. Si ces patients ne meurent pas de
l'épuisement de leur moelle osseuse, c'est une
maladie qui entraîne une fréquence accrue de
leucémies ou de cancers, en raison de la fragilité
des chromosomes. C'est donc une maladie
grave, relativement rare et il n'y a aucun moyen
aujourd'hui de dépister facilement les porteurs de
la mutation. Donc, c'est en général à partir d'un
premier enfant atteint que l'on va suspecter le
diagnostic chez les enfants suivants et essayer
de prévenir la maladie.
> Les recherches
Lorsque l'on s'intéresse à une maladie rare, on
est souvent bien seul. Nous avons a été seuls
pendant très longtemps, car nous étions un petit
groupe de chercheurs qui nous intéressions
particulièrement à cette maladie. Ce n'est qu'au
moment de la carte du génome* que les
découvertes ont commencé à arriver et qu'un
certain nombre de gènes ont été identifiés dans
cette maladie. Actuellement, plus de 8 gènes
sont connus et clonés. La semaine dernière, il y
a eu un article traitant de l'identification d'un 9e
gène.
Les recherches se sont orientées, entre autre,
vers l'étude des mutations : il était important de
savoir ce que faisaient ces gènes mutés. On ne
savait pas et l’on ne sait toujours pas très bien
quelle est le mécanisme qui est atteint dans
cette maladie et pourquoi une mutation d'un
gène entraîne des conséquences aussi graves
pour les enfants. On commence à avancer un
peu et c'est une voie tout à fait nouvelle qui est
en train d’être explorée.
C’est ainsi qu’on a pu voir que certains gènes
étaient déficients dans l’anémie de Fanconi,
qu’ils avaient quelque chose à voir avec la
stabilité de la cellule et qu'il y avait des relations
avec certaines mutations observées au cours
des cancers du sein ou de certains cancers de
l'ovaire. Donc, ces gènes, dans cette maladie
rare, permettent de mieux connaître les
mécanismes d’apparition d’une leucémie et de
cancers. C'est pourquoi il faut faire de la
recherche sur ces maladies. De ce fait,
beaucoup de chercheurs commencent à
s'intéresser à cette maladie, car c'est une clef
pour comprendre d’autres maladies.
On a maintenant des méthodes de diagnostic
assez précises, ce qui a débouché sur la
possibilité du diagnostic prénatal. Aujourd'hui,
avec l'étude des mutations, on peut espérer faire
un diagnostic extrêmement précoce, dès le
début de la grossesse, et éviter ainsi aux
femmes le traumatisme d'un avortement tardif.
On a beaucoup parlé d’un cas dans la presse :
les parents d'un enfant atteint d'une maladie de
Fanconi ont demandé à ce qu'il y ait une
sélection d'embryons, non seulement sur la
possibilité d'éliminer la mutation, mais aussi sur
des caractéristiques génétiques qui en feraient
un donneur de moelle ou de sang de cordon
possible pour un traitement ultérieur. Un cas qui
amène à une réflexion éthique.
Une autre voie de recherche est celle des
donneurs pour faire des greffes de moelle. Les
enfants atteints de la maladie de Fanconi ont des
moelles qui ne fonctionnent pas correctement et
il est donc tout à fait légitime de penser qu'on
peut leur faire des greffes. C'est un traitement
qui marche très bien lorsque ces patients ont des
frères ou des sœurs identiques du point de vue
des systèmes de compatibilité cellulaire. Dans ce
cas, comme il y a une grande proximité
génétique entre le donneur et le receveur, les
résultats des greffes sont vraiment excellents.
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Malheureusement, il n'y a pas toujours un frère
ou une sœur identique « à disposition », et les
recherches se sont orientées dans deux
directions : la première, c'est la constitution de
registres de donneurs de moelle non apparentés.
Il y a actuellement 8 millions de donneurs dans
le monde, parmi lesquels on recherche le
donneur identique, c'est-à-dire celui qui serait
équivalent au frère ou à la sœur. Mais chacun a
des « typages » et des groupes différents, nous
sommes tous différents et la probabilité de
trouver un donneur n'est pas de 100 %, elle est
de l'ordre de 30 %.
La deuxième voie de recherche a été de
chercher d'autres cellules que les cellules de
moelle, et a abouti à la constitution de banques
de sang de cordon ombilical. Le sang de cordon
ombilical est plus intéressant que les cellules de
moelle adultes parce que les cellules d'un
nouveau-né à la naissance n'ont pas la même
fonction immunologique que des cellules adultes.
Elles sont naïves et, donc les réactions
immunologiques entre donneurs et receveurs
sont très atténuées, lorsqu'on utilise ce type de
donneurs. Ceci permet de faire des greffes qui
ne seraient pas identiques pour le système de
compatibilité tissulaire. D'ailleurs, la première
greffe de sang de cordon au monde a été faite
chez un patient atteint de la maladie de Fanconi
dont on savait que la sœur n'était pas atteinte
par la maladie grâce aux tests faits pendant la
grossesse. On savait qu'elle était identique, ce
qui a permis de prélever le sang de cordon, de le
congeler puis de l’injecter. Cette greffe a été
faite, il y a maintenant plus de 12 ans, avec un
enfant qui est totalement guéri de cette maladie.
C'est donc une approche très prometteuse et qui
permet d'avancer.
Bien sûr, on ne s'arrête pas là et c'est une
maladie candidate à la thérapie génique. La
thérapie génique est une option possible, bien
que les progrès soient très lents et comportent
pour le moment des risques associés.
Néanmoins, la recherche continue et l'on travaille
actuellement sur des vecteurs* différents pour
faire entrer les gènes dans les cellules ; vecteurs
qui permettraient d’éviter ce type de
complications. Les différents essais de thérapie
génique ont beaucoup fait progresser la science,
car ils ont permis de mettre en évidence des
effets secondaires qui n'étaient pas attendus,
même après les expériences chez l'animal.
Parfois, ce n’est qu’une fois le passage à
l’homme effectué qu’on se rend compte d’un
effet d'une nouvelle thérapeutique.
Ces recherches et ces observations permettent
d’améliorer constamment les techniques de
thérapie génique. Des recherches sont
actuellement en cours, non pas directement sur
la maladie de Fanconi, mais sur d'autres
maladies héréditaires de la moelle osseuse.
Dans la maladie de Fanconi, la difficulté réside
dans le fait que les cellules sont tellement
malades qu’elles sont très rares. Il est donc très
difficile d'introduire un gène dans des cellules
déjà très fragiles et en quantité insuffisante. Pour
arriver à soigner cette maladie par thérapie
génique, il faudra encore attendre un peu et faire
des progrès dans la façon d'administrer le gène.
Mais cela reste probablement possible dans les
années à venir.
Nous avons donc pu faire plusieurs choses dans
cette maladie rare.
On a fait avancer le domaine de la génétique et
l’on a commencé à comprendre le mécanisme
des cancers et des leucémies, ce qui est quand
même important. On a un traitement, qui existait
même avant que l'on ait découvert les gènes,
puisque les greffes dans cette maladie se font
déjà depuis une trentaine d'années. On a pu
diversifier les sources de cellules qui seraient
utilisables. On a pu maîtriser les lois de la
compatibilité en prouvant que l'on peut faire des
greffes qui ne sont pas strictement identiques.
On a un peu compris le mécanisme qui fait que
ces cellules sont fragiles, et l’on a une possibilité
de le corriger.
Il est important, pour le professionnel de santé
comme pour le chercheur d'avoir un contact avec
un grand nombre de patients et d'être spécialisé
pour une maladie. Il faut avoir beaucoup de
malades pour connaître, décrire et expliquer une
maladie : il faut suivre les patients, même si l'on
ne sait pas quoi faire ; c'est important que le
contact avec les médecins ne soit jamais rompu.
Ce n'est pas parce que l'on ne sait pas un jour,
qu'on ne saura pas le lendemain. La médecine
va parfois très vite et la recherche permet de
faire avancer les choses.
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Témoignages
Sandrine Gelly - « Je suis atteinte du syndrome
de Marfan* : c'est une maladie qui touche le
cœur, le squelette et les yeux. La recherche est
difficile car cette maladie touche plusieurs
choses. Pour l'instant, elle n'est pas encore
assez avancée en France alors qu’elle est
importante pour nos enfants, car c'est une
maladie qui se transmet. Il faut un diagnostic
précoce pour prévenir la maladie. J'en ai
bénéficié, mon fils aussi, mais aujourd'hui, en
France et dans le monde, de nombreux malades
meurent du syndrome de Marfan.
Notre association essaie surtout de mobiliser les
médecins, les services d'urgence et de
réanimation pour qu'ils fassent les gestes qu'il
faut. Le quotidien est difficile, car c'est une
maladie qui ne se voit pas : comment faire
comprendre aux gens qui ne sont pas malades
qu'on a une vie différente ? On est impatient que
les chercheurs trouvent. Nous savons qu’ils
travaillent beaucoup et qu’il y a parfois beaucoup
de gènes à trouver. Il y en a 2 ou 3 en cause
dans le syndrome de Marfan et, de plus, il y a
des mutations différentes d'une personne à
l'autre. Donc, je sais que c'est très difficile pour
notre maladie et aussi pour les autres
maladies. »
Christian Ballouard - « Ségolène Aymé
exprime bien la difficulté de faire se rejoindre des
échelles de temps complètement opposées avec
d’une part les attentes des patients (et famille de
patients) et les délais pour voir des recherches
se concrétiser. Il y a toujours urgence pour les
familles de savoir de quoi il s'agit, parce qu'il y a
derrière une attente et une incertitude difficiles à
vivre. Je suis le papa de Pierre qui a huit ans et
demi aujourd'hui. Dès les premiers mois, nous
avons été alertés par son comportement. Il
semblait ne pas bien voir, nous avons consulté
un ophtalmologiste qui a constaté un petit trouble
de la vue et lui a prescrit des lunettes. Il n'y avait
toujours pas d'amélioration au bout d'un mois.
Nous sommes alors allés voir un neuro-pédiatre.
Pierre avait 4 ou 5 mois à cette époque et nous
avons vu, au fur et à mesure de son
développement qu'il avait un retard
psychomoteur important, qu'il n'arrivait pas à
faire beaucoup de gestes, à acquérir la parole.
La prise en charge était adaptée, mais nous
restions sans diagnostic. En dehors de cette
impatience vis-à-vis de la recherche, nous avons
bénéficié du grand boum associatif qui a permis
de mettre en place des programmes et de
découvrir une maladie encore inconnue, il n'y a
pas si longtemps. Nous avons le diagnostic
depuis un an et demi, mais on ne pouvait guère
le faire plus tôt car la maladie n'était pas connue.
Avec ce diagnostic de déficit en
adénylosuccinase, j'ai pu monter une
association, "Vaincre l'adénylosuccinase par
l'information- VASI*", de façon à rassembler les
familles et offrir un lieu-ressource pour les
renseigner après rassemblement de
l'information. Nous espérons aussi réduire ce
temps d' “errance diagnostique” au minimum,
faire connaître cette maladie peu connue des
praticiens, pour laquelle il faut orienter vers des
spécialistes ».
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Les réponses à vos questions
« Comment avoir des renseignements et des
contacts avec les chercheurs lorsqu'on est
atteint d'une maladie orpheline ? »
> Dr Ségolène Aymé - C’est aujourd’hui possible
grâce à orphanet*, un serveur d'information qui a
sept ans d'existence sur Internet
(www.orpha.net). Il été fondé par le Ministère de
la santé et par l'Inserm*. Il répertorie environ 3
600 maladies rares.
En interrogeant ce serveur par le nom de la
maladie, on en a une description, les adresses
de consultations spécialisées et de laboratoires
de diagnostic, ainsi que les intitulés des
programmes de recherches en cours sur la
maladie en France et en Europe. Actuellement,
en France, il y a 1250 projets de recherches en
cours, qui couvrent 750 maladies. Il y a donc des
recherches sur un grand nombre de ces
maladies. C'est évidemment désolant pour les
maladies qui ne sont pas prises en compte
actuellement, mais des recherches peuvent être
en cours dans d'autres pays du monde.
Il faut, bien sûr, nous signaler les noms des
maladies qui seraient manquantes sur ce site,
pour que l'on puisse rechercher les informations
et aussi les répertorier.
« Je suis atteinte d'une pathologie répertoriée
sur Orphanet l'année dernière, alors qu'elle
est connue depuis beaucoup plus longtemps.
Elle n'est probablement pas si rare que ça,
mais elle est ignorée des médecins : hormis
un cercle très restreint de spécialistes, le
dialogue avec le corps médical est quasiment
impossible ; c'est une maladie quasiment
inexistante. Le médecin que je suis allée voir
la première fois m'a dit que ce que j'avais
n'arrivait pas aux femmes. Je ne suis
pourtant pas transsexuelle ! Lorsque j'ai lu la
notice du médicament, le laboratoire avait
marqué au chapitre grossesse et allaitement :
"sans objet puisque ce médicament n'est pas
utilisable par les femmes". Je signale tout de
même que ce médicament est efficace et me
soulage… C'est donc une maladie qui
n'existe ni pour les médecins ni pour les
laboratoires. Que fait-on lorsqu'il n'y a pas de
descriptif de la maladie ou de projet en cours
sur Orphanet ? Comment vous solliciter pour
avoir un peu plus d'informations sur ce site,
car c'est la seule porte ouverte, actuellement,
pour les malades ? »
> Dr Ségolène Aymé - Nous avons une
procédure pour ajouter et renseigner une
maladie. Il faut nous soumettre le cas en nous
envoyant un message. On le met ensuite sur la
liste des maladies à créer, et l’on cherche le
meilleur expert en Europe pour écrire un texte
sur la maladie concernée. Je signale que,
lorsqu'il n'a pas d'informations sur Orphanet qui
donne une information générale, vous pouvez
téléphoner à « maladies rares info services »
(n°azur – prix d’un appel local) pour avoir une
réponse aux questions individuelles : 08 10 63
19 20. Nous sommes une équipe de 12
personnes et il y a des milliers de maladies : il
est donc très difficile de tout mener de front et il y
a forcément des manques.
« Je souffre de fibromyalgie depuis deux ans.
C'est extrêmement douloureux et rien ne
calme les crises. Je voudrais savoir si c'est
une maladie rare. »
> Dr Ségolène Aymé - Depuis quelques années,
j'ai beaucoup lu sur cette maladie et beaucoup
de personnes sont venues témoigner à Orphanet
de leur parcours douloureux. Il me semble que
c'est médicalement bien défini, même s'il y a
peut-être plusieurs maladies. Malheureusement,
toutes les maladies qui s'expriment par la
douleur et des gênes fonctionnelles peuvent faire
l'objet d'un déni quand un médecin n'est pas très
attentif à son malade. Énormément de gens sont
donc catalogués comme psychopathes,
dépressifs, etc., alors qu'ils étaient réellement en
pleine santé et sont tombés malades.
Je suis persuadée que c'est une vraie maladie.
J'ai pensé qu'il fallait mettre de l'information sur
Orphanet pour aider les médecins à la prendre
en compte, mais j'ai les plus grandes difficultés à
trouver des experts qui acceptent de signer un
article de synthèse sur cette maladie, parce qu'ils
ont peur de se ridiculiser auprès de leurs
confrères. C'est incroyable, mais la perception
de cette maladie dans le milieu médical est
fausse, comme c’est le cas chaque fois qu'une
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maladie n'a pas une définition biologique. Tant
qu'on n'aura pas compris quel est le défaut
biologique derrière cette maladie, il y aura des
gens pour en nier la réalité.
Vous souffrez donc du manque de recherche et
de reconnaissance sur cette maladie. Pourtant,
je suis d'accord avec vous, c'est une vraie
maladie. Elle n'est certainement pas rare au
sens d'une personne atteinte sur 2 000 au
maximum, mais je la considère comme une
maladie orpheline, au sens où personne ne s'en
occupe. Nous essayons à Orphanet de mettre en
forme toute l'information disponible pour que les
gens isolés comme vous puissent trouver des
centres ressources, des médecins compétents.
J'en connais 4 ou 5 en France, mais ils n'ont pas
encore accepté que je mette des informations
sur leur consultation en ligne sur www.orpha.net,
surtout par peur d'être débordés par la demande.
« Au sujet de l'information dont disposent
les médecins, j'ai été atteint par la maladie de
Horton, qui déclenche une artérite* sévère
temporale et peut aboutir à une cécité à peu
près totale. Pour détecter cette maladie, j'ai
passé deux mois en examens et en tests
(bronchoscopie, laryngoscopie, scanner,
IRM, prises de sang multiples). Cette maladie
de Horton semble rare, mais j'ai découvert
après coup que beaucoup de médecins la
connaissaient. J'en ai été stupéfait et déçu,
car en plus, j'ai subi pendant ces différentes
semaines d'examens et d'investigations,
différents traitements qui n'étaient pas du
tout indiqués. Je voudrais connaître votre
point de vue, car il semble y a un problème
de procédure par rapport aux patients,
non ? »
Vous n'avez pas eu de chance, car c'est une
maladie enseignée en médecine et très connue :
l'examen à faire est relativement simple, une
biopsie de l'artère temporale, qui permet de faire
le diagnostic. Je pense que les médecins qui ne
la connaissaient pas étaient un peu ignorants ou
avaient besoin de recyclage.
> Dr Alexandra Durr - L'errance diagnostique
n'est pas propre aux maladies rares, elle est
juste multipliée. Les connaissances évoluent jour
après jour et, si l'on veut être tenu au courant de
toutes les nouveautés en médecine, il faudrait
deux médecins, un qui étudie et un qui voit les
malades. C'est très difficile d'être tenu au
courant de tout.
> Christian Ballouard - L’errance diagnostique,
c'est l'errance d'un diagnostic à un autre, en
attendant quelque chose qui soit fiable et ne soit
pas contredit par des examens plus approfondis.
C'est une méconnaissance au sens où l’on est
dans l'incertitude, mais aussi une errance, parce
qu'on passe d'un diagnostic à un autre.
> Dr Ségolène Aymé - Pour les maladies les plus
rares, il n'est pas scandaleux qu'on passe 1, 2
ou 3 ans avant de trouver. J'ai des souvenirs
d'avoir posé un diagnostic au bout de 10 ou 15
ans en revoyant la famille tous les ans. Un jour,
le savoir s'est constitué, on a fait des
rapprochements, et j'ai pu dire : "Cette fois-ci je
pense que je sais ce que vous avez." Ça paraît
scandaleux aux yeux de certains, mais
quelquefois, les malades ont un tableau clinique
tellement unique qu'il est extrêmement difficile
d'en trouver l'origine.
« Mon épouse souffre de lombalgie
paralysante depuis douze mois. Elle a
également depuis quelques mois des
problèmes de miction. Au scanner et à l'IRM*,
on lui a trouvé des kystes de Tarlov. J'aurais
voulu savoir si c'est une maladie rare et si
elle est génétique. En France, à qui faut-il
s'adresser pour éventuellement trouver des
soulagem ents, car c'est une réelle douleur
permanente ? »
Je ne sais pas si les kystes de Tarlov (ou kystes
arachnoïdiens) expliquent les douleurs qu'elle a :
cela peut être une association fortuite de
quelque chose qui est vu à l'IRM mais n'explique
rien. Il faudrait voir s'il y a un lien de cause à
effet avec le neurologue ou le neurochirurgien
qui la suit.
Mais vous pointez du doigt quelque chose
d'important : on fait des examens, vous avez les
comptes-rendus, on ne vous explique pas ce
qu'il y a dessus et l’on ne sait pas si c'est en
rapport ou non. Je crois qu'il y a un devoir
d'information après l'examen, pour expliquer si
cela a un rapport ou pas. Je ne peux pas vous le
dire, mais il faut voir cela avec le tableau
clinique, l'histoire du patient, l'IRM, etc.
Il faut prendre son temps pour expliquer, ce qui
explique aussi que les consultations à l'hôpital et
les délais sont plus longs. Il faut que les patients
et le public comprennent qu'on ne peut pas aller
voir un spécialiste comme on va voir son
médecin traitant, que beaucoup de choses ne
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sont pas expliquées car il n'y a pas assez de
temps, même s'il faudrait le prendre. Je vous
encourage à retourner voir le médecin pour
demander des explications.
« Qu'en est -il des maladies auto-immunes et
en particulier du lupus ? »
Les maladies auto-immunes représentent un
groupe important de maladies rares. Elles sont
très sévères et souvent mal diagnostiquées
pendant longtemps, parce que les symptômes
sont moins caractéristiques qu’un déficit qui
s'exprime dès la naissance, où il y a un vrai
retard psychomoteur et où l'on est sûr qu'il y a
quelque chose. Il y a donc beaucoup d'errance
diagnostique dans les maladies auto-immunes,
beaucoup de gens mal pris en charge et
beaucoup de souffrance attachée à cela. Ce sont
des maladies généralement moins rares que
certaines maladies génétiques et elles font
quand même l’objet d’un mouvement de
recherche significatif en médecine interne, avec
beaucoup d’équipes impliquées. L'immunologie
est une spécialité très compliquée de la
médecine et aussi de la recherche.
> Pr Eliane Gluckman - Le lupus fait partie du
grand groupe des maladies auto-immunes. Ce
n'est pas une maladie rare et il y a beaucoup de
personnes atteintes. C'est une perturbation du
système immunitaire qui fait que les cellules du
patient sont détruites. Il y a quelques cas
héréditaires, assez rares, mais le plus souvent
ce sont des maladies acquises. Il y a beaucoup
de recherches et des traitements connus.
« Je suis atteint de sclérose en plaques
(SEP)* et du syndrome SAPHO* et cela pose
problème pour mon traitement »
Vous n'avez pas de chance d'avoir à la fois deux
maladies. La sclérose en plaques n'est pas une
maladie rare : une personne sur 1 000 en est
atteinte. Le syndrome SAPHO, en revanche, est
un syndrome très rare et il se peut effectivement
qu'il y ait des difficultés à traiter, notamment par
les corticoïdes. Mais il faudrait poser la question
à des spécialistes de la sclérose en plaques.
« Je suis atteint de la maladie de MelkerssonRosenthal* depuis 1996 et je voudrais savoir
où en est la recherche ou quels sont les
traitements ? Cette maladie me touche
moralement : les gens se moquent de moi. »
> Dr Ségolène Aymé - Il faut appeler le numéro
« maladies rares – info services »* où l'on pourra
dialoguer un peu plus longuement et discuter
avec vous, il est fait pour cela : ce n'est pas
seulement un numéro où s'informer, c'est aussi
un numéro d'écoute pour que vous puissiez
parler de vos problèmes et qu'on puisse vous
aider à affronter la difficulté liée à votre maladie.
Ce que vous vivez se produit avec toutes les
maladies apparentes, qui choquent les gens non
avertis. Les choses vont un peu mieux au fil des
années, il y a un peu plus d'acceptation de la
différence, mais c'est encore insuffisant, et il y a
encore beaucoup de gens assez bêtes pour rire
du malheur physique des autres.
« J'ai une amie frappée de sclérodermie.
J'aimerais savoir quelle est l'évolution de
cette maladie et où en est la recherche
concernant cette maladie rare ? »
La sclérodermie est une maladie dont on connaît
mal l'origine, qui n'est pas héréditaire et qui
aboutit progressivement au rétrécissement de la
peau qui devient comme du carton. Les patients
sont enfermés dans une sorte de « gangue » qui
atteint également le cœur et le tube digestif.
C'est une maladie à évolution lente mais souvent
inéluctable. Il y a beaucoup de recherche
actuellement car on pense à une origine autoimmune, notamment des essais de traitements
immunosuppresseurs*, pour moduler le système
immunitaire, et même des essais de greffes de
moelle autologue*, qui permettent de remettre le
système immunitaire à zéro et d'avoir de bonnes
améliorations de cette maladie. C'est une
maladie très sérieuse, mais pour laquelle on peut
obtenir au moins des améliorations prolongées.
« Quelles sont les causes et les traitements
de la sclérose latérale amyotrophique
(SLA) ? »
C'est une maladie terrifiante qui paralyse tout,
sauf le cerveau, c'est-à-dire qu'on peut toujours
penser et ressentir, mais les muscles ne suivent
plus et l'on est complètement paralysé. Ce qui a
fait que la recherche démarre véritablement dans
cette maladie, c'est qu'on a découvert que, pour
10 % des personnes atteintes, il s'agissait de
formes familiales qui présentaient en plus une
mutation dans une enzyme particulière. Les
recherches sont donc parties de là. Il y a eu des
essais de traitement qui n'ont pas répondu aux
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espoirs de guérir la maladie, mais qui, peut-être,
ont prolongé un peu la vie.
« Qu'est-ce que la drépanocytose ? »
Ce n'est pas une maladie rare, mais j’y faisais
allusion à propos des essais de thérapie génique
qui vont bientôt commencer. Cette maladie est
liée à une anomalie de l'hémoglobine qui fait que
les globules, au lieu d'avoir une belle forme
ronde, prennent une forme en faucille. Ces
globules se détruisent et bouchent les vaisseaux.
C'est une maladie héréditaire que l'on voit
essentiellement chez des sujets d'origine
africaine et qui est liée à une mutation du gène
de l'hémoglobine. Ce n'est pas une maladie
mortelle, mais elle est extrêmement débilitante,
puisqu'elle entraîne chez l'enfant des douleurs
importantes au moment où les vaisseaux sont
bouchés et peuvent donner des accidents
vasculaires cérébraux (AVC) et d'autres
anomalies. On traite très bien ces maladies avec
la greffe de moelle et avec la greffe de sang de
cordon qui donnent de très bons résultats.
« Où en sont les recherches sur la
dégénérescence maculaire (DMLA), sur le
plan scientifique et sur le plan industriel ?
S'agit-il d'une maladie héréditaire ? Comment
peut-on la prévenir ? »
> Dr Ségolène Aymé – La DMLA une maladie
ophtalmologique relativement fréquente, qui
survient à partir de 40, 50 ans quelquefois,
heureusement, plus souvent vers 70 ans. La
plupart des cas sont sporadiques et donc non
héréditaires, mais, récemment, il vient d'être
trouvé un gène pour les formes familiales. Pour
toutes ces maladies, il y a quelques formes
héréditaires qui vont permettre de trouver les
mécanismes et les causes. C'est une découverte
qui date de quelques semaines, et je pense que
cela fera re-décoller la recherche sur cette
maladie, mais, pour l'instant, il n'y a pas ou peu
de traitements. Malheureusement, on est encore
dans une phase très préliminaire de la
recherche.
« On m’a diagnostiqué en 2000, une maladie
de Hodgkin*. J’ai été traité en chimiothérapie
et radiothérapie. A mi-parcours du traitement,
j’ai même fait une hémiplégie. La maladie a
l'air stabilisée, mais, depuis deux ans
maintenant, je fais une sclérodermie*, que je
soulage comme je peux avec de la cortisone.
Le cuir qui était sur la poitrine s'est assoupli,
la bouche par contre, avec des bains de
cortisone de quatre ou cinq jours, je retrouve
un peu le goût mais… Si vous avez besoin de
« cobayes », je suis à votre disposition. »
Nous n’avons pas besoin de cobayes. Nous
avons effectivement un protocole pour traiter les
sclérodermies, mais vous n'avez pas eu de
chance. Je ne connais pas de relation entre la
maladie de Hodgkin et la sclérodermie. La
première maladie est une maladie qu'on soigne
maintenant très bien. Quant à la sclérodermie,
les traitements immunosuppresseurs ou les
greffes sont actuellement réservés à des patients
qui sont en phase très avancée de la maladie, et
je n'ai pas l'impression que ce soit votre cas. On
a des malades comme vous qui évoluent
extrêmement lentement ou même pas du tout et
qui peuvent, pendant des années, avoir une vie
tout à fait supportable.
« J'ai perdu une petite fille à huit ans, d'une
maladie génétique rare, l'amyotrophie spinale
infantile I. Je voudrais savoir où vous en êtes
avec cette maladie. Peut-on enfin déceler la
maladie sur les femmes enceintes, sur le
fœtus ? On n'a rien décelé chez moi, cette
petite fille est née en bonne santé, et puis à 4
mois et demi on m'annonce le diagnostic, je
n'ai rien compris et je ne comprends toujours
rien. »
Les choses se sont améliorées, mais on ne peut
toujours pas faire cette recherche chez une
femme enceinte qui n'a pas déjà eu un enfant
atteint de cette maladie. Le test existe, mais c'est
une maladie trop rare. Si personne ne l'a dans
votre famille, personne ne suspecte que votre
enfant sera atteint, donc on ne fait pas le test.
Par contre, pour un deuxième enfant, on pourrait
maintenant faire un test génétique.
> Dr Ségolène Aymé - Selon la définition
officielle, une maladie rare touche moins d'une
personne sur 2000 dans la population, c'est-àdire moins de 30.000 personnes en France. Ce
seuil a été défini pour les médicaments
orphelins, c’est le seuil à partir duquel un marché
n'est pas rentable pour un industriel, et aussi à
partir duquel une maladie n'est pas enseignée à
la faculté de médecine. Ce sont donc des
maladies dont les médecins n'ont jamais entendu
parler et on ne peut pas leur reprocher de ne pas
savoir. Nous travaillons à ce qu'ils aient,
présente à l'esprit, l'idée qu'il y a des maladies
rares et pensent à adresser les malades vers
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des lieux plus spécialisés, lorsqu'ils ne trouvent
pas.
« Les unions consanguines ont-elles une
responsabilité directe ou indirecte sur les
maladies rares ? »
psychologique, le maniement d'un toxique ou un
événement indépendant est très difficile. Nous
sommes tous entourés de la même pollution,
mais pas tous malades. Il y a donc une certaine
inégalité qui fait qu'on ne peut pas mesurer et
qu’on ne peut pas aller bien loin dans ces
mécanismes-là.
Les unions consanguines favorisent la survenue
des maladies génétiques récessives. Il n’y a pas
plus de mutations défavorables dans les familles
consanguines, mais il y a plus de chance que le
conjoint ait la même mutation que soi. Nous
sommes tous porteurs de trois à cinq mutations
très défavorables. Il ne faut pas rencontrer une
personne porteuse d'une mutation identique, or
les unions consanguines augmentent la
probabilité de rencontrer quelqu'un qui aurait la
même mutation et donc d'avoir des enfants qui
ont des problèmes.
> Dr Alexandra Durr - On sait aujourd'hui que
des maladies qui ne sont dues qu'à une seule
anomalie génétique, ne se déclenchent pas de la
même manière. Une maladie très classique
commencera à 2 ans ou à 70 ans avec la même
anomalie génétique. Pourquoi ? On ne le sait
pas.
« Vous avez parlé de rémission dans le cas
de certaines pathologies, que vous appelez
un hasard. Avez-vous essayé de voir s'il n'y
avait pas eu un changement dans le mode de
vie au quotidien de ces personnes, dans
l'alimentation, les activités ? Préconisez-vous
des thérapies ou des méthodes particulières
pour stimuler le système immunitaire des
personnes atteintes de pathologie ? A propos
de la maladie d'Alzheimer, avez-vous pensé à
faire une recherche d'antécédents
d'événements dramatiques dans la vie des
patients présentant cette pathologie ? »
Cela dépend de l'état de la science, on peut aller
très vite quand on a une bonne piste. Mais, en
règle générale, il faut quand même compter
10 ans.
Une maladie héréditaire est un événement très
rare, qui met en cause non seulement la maladie
elle-même, mais aussi le patrimoine génétique :
pourquoi moi, pourquoi pas les autres… ? Très
souvent, les gens pensent qu'un élément qui
aurait pu perturber la vie familiale, ou un
accident, pourrait être responsable. On cherche
un coupable.
Qu'il y ait des facteurs exogènes, c'est-à-dire
extérieurs, qui vont déclencher une maladie, je
crois que c'est vrai. On peut avoir une anomalie
génétique et la maladie peut se développer plus
tard, à l'occasion d'un traumatisme. C'est
possible. Il peut aussi y avoir des problèmes
d'alimentation ou de toxiques qui font que la
maladie se développe. On connaît bien cela pour
le cancer : on pense qu'on a une sensibilité
génétique, mais qu'il faut un deuxième ou un
troisième facteur pour déclencher la maladie. Le
problème, c'est que c'est très difficile à mesurer
et il faut pouvoir le faire pour faire une relation de
cause à effet. Mesurer une perturbation
On ne peut faire le diagnostic certain de la
maladie de corps de Lewy qu'après le décès. Il
est donc très important que le don du cerveau
soit fait pour pouvoir renseigner la famille.
Aujourd'hui, on ne pense pas que ce soit une
maladie héréditaire car il n'y a pas de formes
familiales.
Le problème est que la présentation clinique
donne un certain diagnostic clinique qui n'est pas
renforcé par un élément plus concret, comme
une anomalie qu'on peut détecter dans le sang
ou par une analyse génétique. Je ne suis pas
sûre que cela soit une maladie complètement
individualisable.
Peut-être la génétique montrera-t-elle plus tard
qu'elle fait partie, dans un spectre différent, d'une
certaine maladie de Parkinson due à une
certaine mutation, mais que ce n'est pas une
maladie complètement à part. Car les corps de
Lewy* se retrouvent aussi dans la maladie de
Parkinson dans le cerveau. Quand il y en a
vraiment beaucoup, on passe au diagnostic de
« Quel est le délai moyen entre l a recherche
fondamentale, les premiers essais cliniques
et l’arrivée sur le marché d'un
médicament ? »
« Est-ce que la démence à corps de Lewy*,
apparentée à Alzheimer et avec un syndrome
parkinsonien est d'origine génétique ? Se
transmet-elle ? Quelles sont les démarches à
faire au décès du patient pour aider la
recherche ? »
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maladie à corps de Lewy. Nous ne savons pas
s'il y a une différence ou si c'est une forme de
passage très particulière, avec une susceptibilité
génique particulière. Tout ce que je peux dire,
c'est qu'on ne connaît pas de grande famille
atteinte de cette maladie, à l'exception d'une ou
deux décrites. Il faut donc être prudent.
ne peut se faire qu'au travers d'essais cliniques.
Il faut donc un protocole. L'encadrement de la
recherche sur les essais cliniques est très
contraignant : on doit développer un recrutement
de personnes à qui l'on donne le médicament. Il
faut que l’on compare cela à un traitement
standard différent et que l'on prouve qu'il y a une
efficacité.
« Je suis vice-président de l'Association
française du syndrome de Marfan et membre
d’Alliance maladies rares*. Je voudrais savoir
comment une association peut être initiatrice,
s'il y a lieu de l'être, d'essais cliniques. Par
exemple, l’amantadine est un anti-Parkinson,
un anti-viral de type 1, que l’on donne à
certaines personnes atteintes de sclérose en
plaques car cela a un effet au niveau de la
fatigue, et que l'on donne également dans le
syndrome de la fatigue chronique. Or,
beaucoup de personnes atteintes du
syndrome de Marfan sont fatiguées. Peut-on
envisager un essai clinique avec
l’amantadine, est -ce qu'il y a lieu de le faire et
comment peut-on le faire ? »
C'est donc une approche coûteuse et qui ne peut
être entreprise que par des gens qui ont la
capacité de prendre des assurances, au cas où
des problèmes surviendraient. Cela ne peut donc
être fait que par des industriels du médicament,
des entreprises pharmaceutiques, ou par des
organismes d'Etat comme les hôpitaux de Paris
ou l'Inserm.
Vous décrivez là ce que nous appelons les
indications orphelines : normalement, les
médicaments sont mis sur le marché pour traiter
des maladies bien identifiées, pour lesquelles on
a prouvé leur efficacité et vérifié leur sécurité.
Ces médicaments sont quelquefois utilisés par
les médecins pour traiter des maladies rares,
parce qu'ils ont pensé que cela pouvait avoir une
certaine efficacité, et vous avez cité des
exemples de médicaments utilisés dans
plusieurs maladies rares.
Il faudrait déjà vérifier que ces indications
orphelines sont véritablement efficaces et cela
Nous souhaitons encourager ces essais
cliniques pour des indications orphelines, car
c'est la seule façon pour les malades d'être sûrs
que ce qu'on leur donne comme médicaments a
bien les effets souhaités. Nous avons en ce
moment un partenariat avec l'industrie
pharmaceutique pour faire un recensement
complet de ces indications orphelines, pour
ensuite essayer de persuader les industriels
d’investir dans des essais cliniques sur ces
maladies. Mais je ne peux pas encore vous dire
quel succès nous aurons, car ceci a commencé,
il y a seulement un an.
Plus de 250 médicaments sont utilisés dans des
maladies rares pour lesquelles ils ne sont
normalement pas faits. C'est une piste de
recherche intéressante pour l'avenir.
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Pour en savoir plus :
> Alliance maladies rares
Collectifs d’associations de lutte contre les maladies rares
Adresse : Plateforme Maladies Rares
102 rue Didot
75014 Paris
Tél : 01 56 53 53 40
http://www.alliance-maladies-rares.org
> Orphanet, site web d’information et d’orientation sur les maladies rares
http://www.orpha.net
> Maladies rares info service
Serveur téléphonique d’information et d’orientation
0810 63 19 20 (n° azur, prix d’un appel local).
> Fondation Groupama
Fondation soutenant la lutte contre les maladies rares
http://www.fondation-groupama.com
> Information sur les recherches sur les maladies rares
(site web de la Fondation Recherche Médicale)
http://www.frm.org/informez/info_ressources_maladies_accueil.php
> VASI
Association vaincre l’adenylosuccinase par l’information
http://www.orpha.net/nestasso/VASI
Glossaire :
> AFM : association française contre le myopathies ; association à l’origine du Téléthon.
> Anémie de Fa nconi : maladie rares du sang (voir orpha.net ou 0810 63 19 20).
> Artérite : inflammation d’une artère.
> Autologue : se dit d’une greffe de cellules, d’un tissu ou d’un organe prélevés sur un individu et destinés à être
greffés sur ce même individu. L’intérêt de cette technique réside dans le fait qu’elle ne pose évidemment aucun
problème de compatibilité (donneur = receveur).
> Autosomale récessive (maladie - ) : se dit d’un maladie d’origine génétique. Elle est caractérisée par une
mutation sur un gène non sexuel (i.e. ne déterminant pas le sexe de l’individu – X ou Y) et transmise de façon
récessive : présent en deux exemplaires, ce gène induira la maladie et ses effets ; présent en un seul exemplaire,
la maladie ne sera pas exprimée.
> Epidémiologie : discipline qui étudie la dynamique des phénomènes de santé dans les populations, dans le but
de mettre en évidence les facteurs qui les déterminent, ainsi que le rôle de ces facteurs, et de mettre en oeuvre
les mesures de corrections appropriées.
> Génome : ensemble des informations génétiques présentes dans un organisme
> Glycémie : taux de glucose dans le sang.
> Hodgkin (maladie de -) : maladie rare du sang (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> Huntington (maladie de -) : maladie rare neurodégénérative (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
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> Immunosuppresseur : se dit d’un traitement qui a pour objectif de diminuer le niveau de défense
immunologique naturel du corps. Ce type de traitement est par exemple utilisé dans le cas d’une greffe afin de
limiter les risques de rejet de celle-ci.
> Inserm : Institut national de la santé et de la recherche médicale.
> IRM : imagerie par résonance magnétique ; examen utilisant cette technique.
> Lewy (maladie à corps de -) : maladie rare neurodégénérative (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> Maladie rare : maladie dont la prévalence* est inférieure à un pour 2 000 personnes.
> Marfan (syndrome de -) : maladie rare (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> Melkersson Rosenthal (syndrome de - ) : voir orpha.net ou 0810 63 19 20
> Paraparésie spastique : maladie rare (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> Phénotype : ensemble des caractéristiques physiques d’un organisme (anatomiques, physiologiques…).
> Prévalence : nombre de cas de maladies ou de personnes malades, ou de tout autre événement tel
qu'accident existant ou survenant dans une population déterminée, sans distinction entre les cas nouveaux et les
cas anciens.
> SAPHO : Synovite-Acné-Pustulose-Hyperostose-Ostéite (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> Sclérodermie : maladie rare auto-immune affectant les petits vaisseaux (voir orpha.net ou 0810 63 19 20)
> SEP : sclérose en plaques.
> Susceptibilité (gènes de - ) : se dit de gènes qui sont susceptibles de déclencher spécifiquement une maladie.
> Vecteur : dans le cadre de la thérapie génique, un vecteur constitue le moyen utilisé pour faire entrer un gène
correcteur dans la cellule défectueuse. Des virus inactivés sont ainsi utilisés comme « vecteur » pour faire
pénétrer un gène dans une cellule.
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