Introduction Présentation Situation relationnelle

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Introduction Présentation Situation relationnelle
Situation relationnelle du M5 par Anne R, FI de l’IFAS du CFSM de Malestroit 2013-2014
Introduction Je suis actuellement élève aide‐soignante au centre de formation Saint Michel de Malestroit au sein de la promotion 2013/2014 en vue d’obtenir mon DEAS (Diplôme d’Etat d’Aide‐Soignante). Dans le cadre du module 5 « relation communication » dont la compétence est d’établir une communication adaptée à la personne et à son entourage, j’ai choisi de vous exposer une situation que j’ai vécue lors de mon premier stage. Dans un premier temps, je vous présenterais le service dans lequel s’est déroulée la situation ainsi que le patient. Ensuite je ferais une description de la situation et enfin son analyse détaillée. Présentation a‐ Du service Il s’agit d’un service de médecine polyvalente situé à la clinique des augustines de Malestroit au 3ème étage. Ce service prend en charge les patients gériatriques1 et/ou polypathologiques 2 en admission directe de préférence ou après passage aux urgences. Ce service comprend 16 lits dont 7 en chambres seules. Les patients sont pris en charge par une équipe pluri‐
professionnelle. b‐ De la personne soignée La personne que je prenais en soin s’appelle Monsieur B, je nomme uniquement la première lettre de son nom afin de préserver son anonymat donc ainsi le secret professionnel3. Il est âgé de 85 ans (né le 24/05/1928), il entré en médecine polyvalente le 26/09/13 pour diarrhée4 et vomissements noirâtres5. Cette personne vit à son domicile à Bohal avec son épouse anglaise, il a exercé son activité professionnelle en Angleterre en tant que maître d’hôtel. A son domicile une aide‐ménagère intervient 6 heures/semaine ainsi qu’une infirmière le matin et le soir pour les soins d’hygiène ainsi que pour le lever et le coucher. Monsieur B mesure 1m68 et pèse 64.9kg, il est de corpulence normale. Monsieur B est dépendant pour les actes de la vie quotidienne, il ne mange pas seul, il a une texture mixée mais n’a pas de régime. Il est incontinent urinaire et fécale, il a besoin d’une aide complète pour la toilette, pour l’habillage et le déshabillage. Il a une bonne audition, une confusion spatio‐temporelle, des difficultés pour la vision, une expression difficile et a peu de communication verbale notamment dû à la barrière de la langue. Situation relationnelle Premier jour de mon premier stage en tant qu’élève aide‐soignante, ma référente me demande de l’accompagner pour la toilette de Monsieur B, il bénéficie d’une toilette complète au lit. Je m’approche de celui‐ci afin de me présenter car c’est notre premier contact voyant qu’il ne réagit pas je répète en lui tenant la main et il me fixe en m’écoutant. Ma référente prend le temps de m’expliquer tous les gestes techniques qu’elle a appris, elle a suivi sa formation au sein de l’institut Saint Michel de Malestroit. De temps en temps je croise le regard de monsieur B qui 1 me paraît perdu par cet amas d’informations. En sortant de la chambre celle‐ci me conseille de prendre en charge6 Monsieur B « afin de m’entraîner sur la pratique d’une toilette complète au lit », ce qui va me permettre de pratiquer les gestes appris à l’IFAS. Je m’occupe donc de Monsieur B durant les deux premières semaines de mon stage, ma principale difficulté sera d’effectuer le recueil de données7 en effet, le patient a d’importante difficultés pour communiquer et souffre de troubles cognitifs8, étant uniquement du matin je n’ai pas l’occasion de rencontrer sa famille. Deux semaines plus tard ses diarrhées ainsi que ses vomissements noirâtres étant résolu le patient est sortant. Dernière semaine de stage en prenant mon service le matin je m’aperçois que Monsieur B est revenu dans le service, en effet son épouse qui s’occupe de lui au domicile s’est fracturé le pied la veille. Le couple a donc dû se faire hospitalisé ensemble. Frustrée de ne pas avoir rencontré la famille de monsieur B lors de sa première hospitalisation je décide de m’occuper du couple et donc de compléter mon recueil de donnée. Je commence par m’occuper de Madame B qui a besoin d’une aide à la toilette, pendant cette aide je commence à questionner celle‐ci. Je n’aurais pas eu le temps de poser beaucoup de question cette dame va se livrer à moi naturellement, je ressens un grand besoin de parler chez cette dame. A la fin de la toilette je prends donc le temps de m’asseoir auprès d’elle, et de l’écouter tout simplement, j’adopte une écoute authentique9. Cette femme va me confier sa crainte de perdre son mari ce qui va provoquer des larmes, elle m’explique l’homme qu’il était, ce qu’il représente pour elle. Elle me confie que cet entretien lui a fait beaucoup de bien, cela lui a permis de verbaliser son mal‐être (sentiment de profond malaise physique ou mental) mais ce qu’elle ne sait pas c’est qu’il m’a fait beaucoup de bien à moi aussi, pourtant un sentiment de culpabilité apparaît vis‐à‐vis de son époux. Je poursuis donc ma matinée en m’occupant de son époux et suite à cet entretien ma prise en charge est complètement différente. En entrant dans la chambre les paroles prononcées par son épouse font écho dans ma tête. Je prends complètement conscience du sens du « prendre soin »10, et je décide de réajuster ma pratique de la toilette. En entrant dans la chambre de monsieur B, je laisse mon chariot dans un coin et je m’approche de monsieur B, je me mets à sa hauteur, je lui prends la main et son visage va se tourner vers moi je lui explique que je viens l’aider pour sa toilette et j’attends qu’il me réponde, un petit gémissement sort de sa bouche. Durant tout le soin je prends le temps de respecter les moments de silence et d’expliquer tous mes gestes en adoptant une attitude calme et douce. Vient le moment où je dois laver son dos, je demande à monsieur B de se tourner, et stupéfaite je le vois chercher la barrière et avec un peu d’aide monsieur B se tourne sur le côté. Je l’encourage fortement à continuer ainsi, et petit à petit le visage du patient se détend, les mobilisations sont beaucoup plus facile et lors du transfert lit fauteuil je n’ai qu’un rôle de guide. Une véritable relation de confiance vient de s’instaurer depuis ce moment, je le comprends par l’expression de son visage et l’insistance de son regard sur moi. Je pense me souvenir longtemps de cette situation durant ma carrière professionnelle car elle a soulevée en moi beaucoup de questionnement, et surtout une véritable évolution dans ma pratique de la toilette. Analyse de la situation  Prendre soin 2 Cette situation m’a beaucoup questionné notamment sur le concept du « prendre soin », qui selon Walter Hesbeen « Prendre soin de quelqu’un c’est porter une attention particulière et ce dans le but de contribuer à son bien‐être, à son harmonie ». 11 C’est l’intérêt porté à l’autre ! J’ai dû entendre, deviner et prévenir les besoins du patient, tout en personnalisant ses soins. Monsieur B n’est pas un objet mais un individu unique avec des besoins, une histoire, des valeurs et des croyances. J’ai perçu cela lors du premier soin en croisant le regard de monsieur B, c’est le moment où ma référente dans un souci de partage de son expérience et à ma demande, m’explique la toilette en technique que je comprends qu’il me faudra petit à petit me détacher de la technique pour favoriser la relation avec le patient.  Recueil de donnée Durant cette situation j’ai également pris conscience de l’importance du recueil de donnée. Il est important de connaître l’histoire de vie, les habitudes de vie de la personne soignée afin d’optimiser le soin donc de personnaliser la prise en charge, en respectant l’autonomie des personnes. En effet, monsieur B a vécu longtemps en Angleterre, la barrière de la langue peut‐être un obstacle à la communication. Les ressources et les difficultés de la personne doivent également être réévaluées aussi souvent que nécessaire. Cela permet également au soignant d’éviter des paroles maladroites ce qui pourrait créer un malaise dans la relation soignant/soignée. Cette relation doit être préservée, le soignant doit instaurer un climat de confiance.  Communication non verbale Lors des cours dispensés à l’IFAS nous avons vu que la communication non verbale passe par différents moyens le regard, la voix, les gestes, le toucher, la distance et l’odorat.12 Afin d’entrer en contact avec Monsieur B la première chose qui m’a semblé naturelle a été de lui prendre la main, une façon pour moi de le saluer et de lui montrer mon respect. Faire preuve de savoir‐vivre et de politesse sont des qualités que tout soignant se doit d’avoir au quotidien. En prenant sa main je me suis présenté en ayant une intonation douce, calme et rassurante. J’ai eu des gestes lents afin que le patient ne se sente pas bousculé. Cette attitude m’a permis de mettre le patient en confiance, d’être plus proche de lui et de pouvoir me faire accepter dans son espace intime nécessaire pour pratiquer une toilette et répondre aux besoins du patient. Hall est un anthropologue qui a défini 4 distances de base : 
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Espace intime (15‐50cm) Espace privé (50‐120cm) Espace social (120‐350cm) Espace public (350cm) 13 Au cours du soin d’hygiène on se situe dans l’espace intime du patient, cela implique parfois de la gêne pour le patient, et nécessite donc un grand soin du respect de la pudeur pour le soignant.  Accueillir mes émotions Ce couple m’a touché par la tendresse qui les unissait malgré les années. Ne me suis‐je pas vu à travers le regard de cette femme qui aime profondément son mari ? Malgré sa dépendance monsieur B est un être cher à son épouse. Durant cet entretien j’ai dû être capable de renoncer à tout maîtriser. Le soignant doit se laisser toucher car notre propre histoire de vie conditionne notre manière d’être14. Sans m’en apercevoir je pense avoir fait un transfert vis à vis de ce couple. Notre vie personnelle peut déborder sur notre vie professionnelle, il faut savoir garder la juste distance afin de garder son professionnalisme et ne pas se laisser déborder par nos émotions. 3 Conclusion Cette situation relationnelle m’a beaucoup questionné et a soulevé en moi une grosse remise en question. En effet en entrant en institut de formation j’avais une expérience de plusieurs années en tant que ASH faisant fonction d’aide‐soignante, je pensais que l’obtention du DEAS serait une valorisation de mon travail. Et pourtant dès les premiers cours dispensés par l’IFAS et à l’issue de mon premier stage j’ai compris que je ne serais plus la même. Etre aide‐soignante ne consiste pas seulement en l’application de gestes techniques appris à l’IFAS, ce n’est pas seulement acquérir un savoir, mais c’est être vrai, authentique, prendre en compte que l’être humain est unique, c’est développer son savoir‐être et son savoir vivre. Aujourd’hui je suis convaincu que le passage en institut de formation est indispensable à tout soignant pour une complète prise de conscience du prendre soin. L’évaluation du module 5 m’a permis d’apprécier le cheminement effectuer depuis le début de la formation et de me conforter sur le métier que j’ai choisis et la soignante que je serais à l’issue de la formation. « La personne soignée est chaque fois, un exemplaire unique du genre humain » Paul Ricoeur 4