Méditation de Mgr Turini lors de la procession de la Sanch 2015

Transcription

Méditation de Mgr Turini lors de la procession de la Sanch 2015
MEDITATION PROCESSION DE LA SANCH
VENDREDI SAINT 3 AVRIL 15
Au nom de tous et avec tous, je voudrais tout d’abord
exprimer à tous les membres de l’Archiconfrérie de la Sanch
notre gratitude et nos remerciements pour cette procession qui,
je le sais, représente beaucoup pour eux et pour nous tous.
Je n’hésite pas à dire que ce grand moment du Vendredi Saint
 nourrit leur foi
 et donne sens à tous leurs engagements au service de
l’Eglise, de la société, de notre monde tourmenté.
Toute cette procession est sonorisée. Je sais que vous
m’entendez, vous amis inconnus qui vous sentez proches ou
éloignés de ce grand jour où les chrétiens font mémoire de la
mort de Jésus sur la Croix.
Que nous soyons croyants ou pas, nous sommes tous touchés
par la mort à un moment où l’autre de notre vie.
Elle peut être brutale, atteindre l’un de nos proches et
provoquer en nous, abattement, sentiment d’injustice, colère
ou révolte : « Je ne comprends pas. Pourquoi lui, pourquoi
elle, pourquoi eux ? ». Le crash de l’Airbus A 320 de la
compagnie Germanwings nous en est un rappel récent.
« Où est-il ton Dieu ? » Cette interrogation, des hommes la
posaient déjà plusieurs siècles avant Jésus.
Lui-même du haut de la Croix s’écriera : « Mon Dieu, Mon
Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ? » comme pour faire sien
le cri de tous les désespérés.
La mort peut survenir après une longue agonie et là nous
sommes face à la souffrance de l’autre qui se prolonge avec
tout ce qu’elle peut avoir de terrible, et d’incompréhensible :
« Pourquoi tant souffrir sans espoir de guérir ? ». Mais que
dire ? Que faire ?
Les mots nous manquent pour réconforter, apaiser, soulager.
C’est dans ces moments là que nous apprenons à devenir
présence de tendresse et de silence.
La mort peut aussi s’abattre sur des populations entières à
cause de la folie meurtrière de quelques-uns, au Moyen Orient,
en Afrique. Permettez-moi d’avoir une pensée particulière
pour nos sœurs et frères chrétiens persécutés. Le Pape
François le rappelle sans cesse : « On ne peut pas se servir de
Dieu pour justifier la violence, la guerre, le terrorisme ».
D’autre part, la moitié de l’humanité pourrait nourrir sans
problème l’autre moitié et des millions d’enfants, de familles
continuent à mourir de faim, de soif. Cela aussi est injuste.
Ces morts là nous atteignent moins parce qu’elles
interviennent au loin. Et pourtant ce sont des vies identiques
aux nôtres qui sont détruites.
Le monde, dit-on, est devenu un gros village et nous faisons
tous partie de la famille humaine, hélas souvent déchirée. Ce
qui se passe à l’autre bout de la planète, nous l’apprenons
immédiatement ou presque grâce aux techniques modernes de
communications. Cela devrait donc nous rapprocher de celles
et ceux qui souffrent et meurent au loin. Mais parfois nous
avons ce sentiment curieux que plus on communique vite et
moins on se fait proche, ce que le Pape François appelle « la
mondialisation de l’indifférence ».
La Croix du Christ est là devant moi et devant toutes celles et
ceux qui se recueillent sur le parvis de notre Cathédrale St
Jean-Baptiste. Nous la contemplons.
Jésus est mort, de mort violente, injuste. Il ne méritait pas
cette condamnation
 faisant suite à un procès expéditif,
 où des faux-témoins se sont présentés pour l’accuser à
tort et le faire exécuter.
Oui le mensonge peut tuer. Nous le savons depuis la nuit des
temps, des innocents sont supprimés pour ne pas menacer les
intérêts des puissants. Jésus dérange…
Il se fait l’un de ces innocents.
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Il ne se défend pas,
il ne se révolte pas non plus,
il ne criera même pas à l’injustice, au scandale,
Il se laissera conduire comme l’agneau à l’abattoir,
il ira jusqu’à demander le pardon pour ses bourreaux.
Il
connaîtra
l’abandon
des
amis.
Au pied de la Croix, seuls Marie sa mère et Jean le plus
jeune de ses compagnons.
Cela peut tout autant nous révolter et nous choquer que toutes
ces morts incompréhensibles que j’évoquais en commençant.
 Pourquoi ne dit-il rien ?
 C’est un faible, un lâche ? Certains le pensent peut-être ?
 Pourquoi ne proteste-t-il pas et se laisse-t-il conduire à la
mort sans réagir ?
C’est par fidélité à sa mission et par amour de l’humanité à
laquelle il ouvrait un chemin nouveau.
Jean dans son Evangile écrira : « Ayant aimé les siens qui
étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout ».
C’est tout, ce n’est pas la peine d’en dire plus. La Croix qui se
dresse devant nous est une parole silencieuse.
Elle parle d’elle-même. Jésus n’est pas venu expliquer
pourquoi l’on vit, pourquoi l’on meurt.
Il nous a montré comment on vit jusqu’à affronter la mort.
 Son amour offert sur la Croix, ouvre une brèche dans la
nuit sans fin de toutes nos morts.
 Sa vie donnée, dressée sur la Croix devient pour nous
passage de la terre vers le ciel.
 Sa vie, sa mort nous font signe. Un signe c’est un appel :
on l’accueille ou on le refuse. C’est notre liberté.
La procession de la Sanch va poursuivre sa route dans les rues
de notre cité catalane. La Croix de Jésus va traverser nos rues.
Puisse-t-elle toucher votre cœur.
 Peut-être ne ferez-vous que la regarder puis vous
passerez votre chemin ?
 Mais peut-être, deviendra-t-elle lumière dans l’obscurité
de vos interrogations et de vos doutes et votre vie et votre
mort s’éclaireront du feu de l’Espérance, du Salut et c’est
déjà Pâques qui s’annonce. Je vous le souhaite très
sincèrement.
Mais là aussi c’est une question de choix, de liberté : une
question d’amour. Merci.

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