Hommage appuyé aux soldats français tués

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Hommage appuyé aux soldats français tués
Mercredi 20 Juillet 2011
Hommage appuyé aux soldats français tués
A rmée . Justifiant la présence militai re en A fghanistan, le Président a honoré les sept hommes morts au
combat.
«Vous n'êtes pas morts pour rien.» Sous une pluie battante, Nicolas Sarkozy a présidé hier, aux Invalides, un
hommage national aux sept soldats français tombés en Afghanistan au cours des derniers jours. Chacun d'entre eux a
été élevé au rang de chevalier de la Légion d'honneur à titre posthume. L'air grave, le chef de l'Etat a assuré qu'ils
s'étaient battus pour une «grande cause» : «Vous avez combattu dans une guerre juste engagée contre une tyrannie
qui emprisonnait tout un peuple, qui opprimait les femmes, qui maintenait les enfants dans l' ignorance et qui avait
transformé tout un pays en base arrière du terrorisme et de l'obscurantisme.»
F inalité. Nicolas Sarkozy a ainsi voulu répondre à tous ceux qui, au lendemain de l' attentat-suicide ayant coûté la
vie à cinq soldats français le 13 juillet, avaient exprimé leurs doutes sur la finalité de l'engagement militaire français
en Afghanistan. Mais ce discours à l' imparfait résonne étrangement au regard de la montée en puissance des talibans
et du risque d'une reprise de la guerre civile après le retrait des troupes étrangères. «Il est norm al que la nation
rende hommage à nos militaires morts en Afghanistan, mais l'émotion n' interdit pas de se poser des questions, dit
Paul Quilès. Certes, ils ne sont pas morts pour rien. Mais pour quoi sont-ils morts ?»
L'ancien ministre (PS) de la Défense, qui redoute de nouvelles victimes dans les rangs de l'armée française à brève
échéance, appelle à un «retrait rapide» du bourbier afghan. Côté français, celui-ci doit s'échelonner jusqu'en 2014.
Hier, avant la cérémonie, l'actuel ministre de la Défense, Gérard Longuet, a dénoncé «un manque de responsabilité»
de la part des socialistes qui réclament une accélération du calendrier. «Nous somm es solidaires d'une coalition sinon
la France aurait une parole incertaine, ce qui ne serait pas à la hauteur de son statut de m embre permanent du
Conseil de sécurité des Nations Unies» , a-t-il insisté.
A llusion.Aux Invalides, devant les familles des victimes et de nombreux ministres, Sarkozy n'a pas fait d'allusion à
cette question. En revanche, il a répondu indirectement aux propos d'Eva Joly, qui avait suscité la polémique en
évoquant la suppression du défilé militaire du 14 juillet. Le chef de l'Etat a rendu un hommage appuyé à l'armée qui
«n'est pas seulement un instrument parmi d' autres d'une politique» mais «l'expression la plus achevée de la
continuité de la nation française dans l'histoire».
T H O M AS H O F N U N G
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Mercredi 20 Juillet 2011
L'émouvant hommage aux soldats français
Nicolas Sar kozy, devant les cercueils des sept militaires morts en A fghanistan, a évoqué « une guer re juste ».
Capitaine Thomas Gauvin, adjudant-chef Emmanuel Técher, adjudant-chef Jean-Marc Guéniat, adjudant-chef Laurent Marsol,
sergent Sébastien Vermeille, brigadier-chef Clément Kovac, second-maître Benjamin Bourdet. À chacun de ces sept militaires
tués la semaine dernière en Afghanistan, après soixante-trois autres soldats tombés depuis le début de l'engagement de la France
en 2001, le chef de l'État a remis hier matin la croix de la Légion d'honneur. Sous une pluie froide et battante, ininterrompue,
Nicolas Sarkozy a épinglé la décoration sur les sept cercueils recouverts du drapeau français qui avaient été déposés au centre de
la cour d'honneur des Invalides, après l'hommage religieux rendu dans la cathédrale Saint-Louis.
« Vous n'êtes pas morts pour rien », leur a déclaré le président de la République devant leurs familles et leurs camarades
réunis, devant les unités auxquelles appartenaient ces jeunes militaires âgés de 22 à 38 ans : le 17régiment du génie parachutiste
de Montauban, le 1régiment de chasseurs parachutistes de Pamiers, le 1 régiment de chasseurs de Thierville-sur-Meuse, le
commando Jaubert de Lorient et le Sirpa. « Vous vous êtes sacrifiés pour une grande cause. Vous avez défendu les plus belles
valeurs de notre pays », a souligné Nicolas Sarkozy. « Vous êtes morts pour la grande cause des peuples libres qui ont payé
leur liberté avec le sang de leurs soldats, (...) dans une guerre juste engagée contre une tyrannie qui emprisonnait tout un
peuple. »
Cinq d'entre eux ont été victimes, le 13 juillet, d'un attentat suicide dans la vallée de Tagab en Kapissa (nord-est de Kaboul), le
plus grave revers infligé à la France en Afghanistan depuis la mort de dix soldats dans une embuscade tendue par les talibans, à
Uzbin, en août 2008. Lors d'un déplacement éclair le 12 juillet en Afghanistan, sur la base de Tora, Nicolas Sarkozy avait
annoncé que les unités combattantes françaises auraient toutes quitté ce territoire en 2014. Et promis le départ d'un quart des
4 000 hommes actuellement déployés d'ici à la fin 2012. Aucune des polémiques en cours n'a trouvé place hier lors de cet
hommage national, ni celle sur le calendrier du retrait, ni celle sur le sens du défilé militaire du 14 Juillet, lancée par la candidate
des écologistes à la présidentielle, Eva Joly. La quasi-totalité du gouvernement a assisté à la cérémonie ainsi que les présidents
des deux Assemblées, Bernard Accoyer et Gérard Larcher, mais aussi François Bayrou, président du MoDem, et les socialistes
Harlem Désir, François Hollande et Bertrand Delanoë, maire de Paris. La Première secrétaire du PS, Martine Aubry, a déposé
une gerbe au monument aux morts de Nîmes, où elle se trouvait en déplacement.
« Noblesse de soldat »
« Notre admiration pour leur courage se transforme en fierté d'appartenir à ce peuple, à ce grand corps aux mille visages,
dont les membres sont capables de donner leur vie pour ceux qu'ils ai ment », a souligné l'évêque aux armées au cours de son
homélie dans la cathédrale. Lors de cet office catholique - six des sept militaires tombés étaient baptisés et l'épouse du septième
avait donné son accord - M Luc Ravel, les épaules couvertes d'une grande chape bleue, a su maintenir l'équilibre entre la douleur
des familles et la mise en valeur de l'engagement militaire. « Nous avons raison d'être fiers quand notre équipe nationale
triomphe sur les stades , a-t-il dit. Mais nos joueurs n'y risquent que leur réputation. Ici, nos soldats jettent leur vie devant nous.
C 'est là leur noblesse de soldat, c'est là notre grandeur de Français. »
Chef des armées, Nicolas Sarkozy était entouré de l'amiral Édouard Guillaud, chef d'état-major des armées, du général de corps
d'armée Bruno Darcy, gouverneur militaire de Paris, et du chef d'état-major particulier du président de la République, le général
Benoît Puga. Les cercueils des sept militaires ont été rendus hier à leurs familles, qui peuvent désormais célébrer leurs
funérailles.
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Mercredi 20 Juillet 2011
Mgr L uc Ravel a vanté « l'esprit patriotique »
L'évêque aux armées présidait la cérémonie religieuse aux Invalides.
D É F E NSEÉVÊQUE aux armées, M Luc Ravel avait la mission délicate, hier, de présider la célébration religieuse d'hommage aux sept
militaires tués. Il n'a pas hésité dans ses propos. « Alors que certains s'interrogent sur l 'opportunité d'aller mourir pour les Afghans ou
d'autres peuples , a-t-il argumenté, nous répondons inlassablement : c'est pour la France que nous mourons. Ici ou au bout du monde : ce
n'est pas la première fois dans l 'histoire que nos soldats meurent pour la France ailleurs qu'en France. »
Sa devise d'évêque, choisie le jour de son ordination épiscopale, le 29 novembre 2009, est assez inhabituelle : « Est-est » . En traduction du
latin, cela signifie « oui-oui ». Une parole du Christ tirée de l'Évangile de saint Mathieu : « Que ton oui soit oui. » L'engagement de M Luc
Ravel dans sa mission d'évêque aux armées est à l'image de ce « oui ». Fils de général, petit-fils d'officiers du côté paternel et maternel, ce
chanoine de Saint-Augustin a les racines plongées dans le grand bain de l'armée française. Passé lui-même par l'École polytechnique promotion X77 -, M Ravel a effectué son service militaire au 1RCP de Pau, aujourd'hui situé à Pamiers et d'où sont issus deux des militaires
tués la semaine dernière.
Service national
Évêque aux armées ? « Ce fut une surprise stratégique », précise-t-il avec humour, en référence à quelque manoeuvre de stratégie militaire.
Depuis 2009, il s'est rendu deux fois en Afghanistan et autant au Liban. Cet évêque de 54 ans aime le mot juste. Et parle avec clarté. Il
regrette la disparition de l'esprit patriotique. « Cet esprit patriotique , précise-t-il, qui n'a rien à voir avec le nationalisme exacerbé, doit
avoir un lieu pour se forger. » Et dans ce domaine, juge-t-il, « le service national obligatoire n'a pas été remplacé ». « La page est
tournée, le débat est clos, mais j 'entends des hommes politiques et des responsables militaires le regretter », note-t-il, rêvant de voir l'État
consacrer les moyens nécessaires pour forger, chez les jeunes, « le senti ment d'appartenance à une communauté nationale ». « Un homme
apatride a du mal à exister », note l'évêque, qui voudrait aussi voir mieux soutenues les familles, « premier lieu de formation civique ».
Sophie de Ravinel
« Vous avez défendu les plus belles valeu rs de notre pays... »
LE PRÉSIDENT de la République, dans son discours devant les cercueils des sept soldats morts en Afghanistan, a notamment déclaré :
« Vous vouliez servir votre pays. (...) Vous avez fait vôtres les vertus militaires de discipline, de fidélité, de courage et d'honneur. (...) Vous
êtes tombés dans une guerre où des assassins fanatiques et sans honneur cherchent à asservir par la terreur des hommes, des femmes et des
enfants désarmés que vous aviez mission de protéger contre cette violence aveugle et meurtrière. (...)
La perte d'un être cher est irréparable et rien ne peut sécher les larmes d'un père, d'une mère, d'une épouse, d'un fils, d'une fille. Mais vos
pères, vos mères, vos épouses, vos enfants peuvent être fiers de vous comme vous pouvez être fiers de leur courage et de leur dignité. (...)
Vous n'êtes pas morts pour rien (...) Vous avez défendu les plus belles valeurs de notre pays. Vous avez combattu dans une guerre juste
engagée contre une tyrannie qui emprisonnait tout un peuple. (...)
Soldats qui êtes morts pour la France (...), vous êtes le visage meurtri de la France, le visage dans lequel la France reconnaît ses plus belles
valeurs humaines. (...) Nul ne vous a volé votre destin. (...) Soldats, vous avez vécu et vous êtes morts en hommes libres. »
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Mercredi 20 Juillet 2011
Aux Invalides, l’hommage de la France aux soldats tués
A F G H A N IST A N.Nicolas Sa r kozy, entouré par la classe politique unanime, a rendu aux Invalides un
hommage ému aux sept militai res tués la semaine dernière en A fghanistan.
Une famille habillée de noir se serre sous un parapluie trop petit. Une jeune fille pleure
doucement quand les sept cercueils enveloppés dans le drapeau tricolore quittent la cour
des Invalides, portés par des soldats trempés. « La Sonnerie aux morts » retentit, suivie
de « la Marseillaise ». Dans l’espace réservé aux politiques, droite et gauche se côtoient en silence. François Fillon, Alain Juppé, Jean-François Copé pour le gouvernement et
l’UMP. François Hollande, Bertrand Delanoë, Harlem Désir pour le PS. Jean-Marie Le
Pen est là lui aussi, coiffé d’un béret militaire. C’est sous une pluie battante que s’est déroulé, hier matin, l’hommage national aux militaires français morts en Afghanistan la semaine dernière.
Cinq d’entre eux ont péri lors d’un attentat suicide dans la vallée de Tagab, dans la
province de Kapisa, alors qu’ils surveillaient la tenue d’une « choura » locale (conseil de notables). Un sous-officier a été victime « d’un tir accidentel », un autre a été tué lors d’un accrochage avec des insurgés talibans. Avant d’entrer dans la cathédrale des Invalides pour assister à l’office religieux, le ministre de l’Industrie, Eric Besson, prend le temps d’envoyer un message sur son compte Twitter : « Dans quelques minutes, hommage à nos soldats tombés en Afghanistan. Cercueils et portraits. Vision poignante. Respect. »
Les invalides (paris viie), hier. Nicolas Sarkozy a fait chevaliers de la Légion d’honneur à titre posthume les sept militai res tués en A fghanistan avant que leu rs cercueils ne quittent la cour pavée.A la fin de la messe,
Nicolas Sarkozy reste de longues minutes les mains jointes devant les cercueils alors que l’église se vide. Puis il prononce un bref discours, sous un abri en tissu blanc, dans la cour ruisselante : « Vous n’êtes pas morts pour rien.
Car vous vous êtes sacrifiés pour une grande cause. Vous avez combattu dans une guerre juste engagée contre une
tyrannie qui emprisonnait tout un peuple, qui opprimait les femmes, qui maintenait les enfants dans l’ignorance et qui avait transformé tout un pays en base arrière du terrorisme et de l’obscurantisme. » Certains parents de soldats se sont ouvertement demandé, ces derniers jours, si la présence française dans le pays était
encore nécessaire après la capture de Ben Laden. Le 12 juillet, en visite éclair en Afghanistan, Nicolas Sarkozy avait
lui-même annoncé un calendrier de retrait des troupes qui doit s’achever en 2014. Il a promis, depuis, d’améliorer la sécurité des soldats sur place. Peut-être en les cantonnant davantage dans les casernes et sur les bases opérationnelles
comme le font les Américains. Il attend un rapport du patron de l’armée de terre, le général Elrick Irastorza, avant de prendre des décisions.
Hier, sans entrer dans la polémique lancée par Eva Joly au sujet du défilé militaire du 14 Juillet, le chef de l’Etat a quand même voulu rendre un hommage appuyé à l’armée, « expression de la détermination constamment renouvelée de la France à l’idée qu’elle se fait d’elle-même, de sa vocation dans le monde et d’une certaine idée de l’homme ».
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Mercredi 20 Juillet 2011
Politique
L'hommage aux morts d'un conflit aux motifs troubles
Une cérémonie nationale a eu lieu hier aux I nvalides, devant la dépouille des sept soldats tués la semaine dernière en
A fghanistan, en présence du chef de l'état. L a pertinence de l'engagement français est de plus en plus cont estée à gauche.
Un hommage solennel a été rendu, hier, aux Invalides, aux sept soldats français tués la semaine dernière en Afghanistan. Une
cérémonie certes retransmise en direct par la télévision publique, mais où le peuple n'avait pas été particulièrement convié.
Comme pour conjurer l'obscénité de ces morts qui n'auraient pas dû l'être ? Seules quelques dizaines de personnes munies de
drapeaux se sont rassemblées sur le pont Alexandre-III et ont salué le passage du cortège funèbre décorés à titre posthume de la
Légion d'honneur
Le président de la République a cité les noms de chacun d'eux avant de les élever au grade supérieur et de les décorer de la
Légion d'honneur à titre posthume : brigadier-chef Clément Kovac, capitaine Thomas Gauvin, adjudant-chef Laurent Marsol,
Jean-Marc Gueniat, Emmanuel Techer, adjudants-chefs, sergent Sébastien Vermeille, maître Benjamin Bourdet. Ils ont été tués
les 11, 13 et 14 juillet sur le théâtre des opérations, accidentellement, ou lors d'affrontements. Le 13, cinq d'entre eux avaient
trouvé la mort, victimes d'un attentat suicide dans la vallée de Tagab en Kapisa (nord-est de Kaboul), le plus meurtrier infligé à
la France depuis la mort de dix soldats dans une embuscade tendue par les talibans, à Uzbin, en août 2008. Les sept corps
avaient été rapatriés lundi en France. L'hommage a débuté par une cérémonie religieuse en l'église Saint-Louis des Invalides. Il
s'est poursuivi par une cérémonie militaire dans la cour d'honneur, sous une pluie battante. Aux côtés des familles, la quasitotalité des membres du gouvernement étaient présents, ainsi que les présidents des deux Assemblées, mais aussi François
Bayrou (Modem), François Hollande, Harlem Désir, Bertrand Delanoë (PS) et Nicole Borvo Cohen-Seat, présidente du groupe
PCF au Sénat. sarkozy s'est un moment transformé en candidat
« Vous n'êtes pas morts pour rien, a cru devoir souligner Nicolas Sarkozy, vous vous êtes sacrifiés pour une grande cause, vous
en connaissiez les exigences et les risques. (...) Vous êtes allés jusqu'au bout de votre engagement, vous avez défendu les plus
belles valeurs de votre pays,vous avez combattu dans une guerre juste, engagée contre une tyrannie qui emprisonnait tout un
peuple. » Le président s'est un moment transformé en candidat en faisant une allusion au débat ouvert le 14 juillet par Eva Joly,
candidate officielle d'Europe écologie-Les Verts, qui proposait de supprimer le défilé militaire : « L'armée française n'est pas
séparée du reste de la nation française, car l'armée française fait corps avec la nation française. » Un débat, qui, selon le PCF,
« fait passer au second plan les nouveaux décès de soldats, morts pour une guerre qu'on n'aurait jamais dû faire, celle
d'Afghanistan ». Et d'évoquer « les prochains drames et souffrances que peuvent connaître notre armée et les familles des
soldats engagés dans des opérations pour des motifs souvent troubles ». Si la gauche n'a pas souhaité, hier, relancer la polémique
sur la pertinence de l'engagement français en Afghanistan, désireuse de mettre entre parenthèses la controverse, au nom de la
nécessaire « unité du pays » aux côtés des familles, comme l'a expliqué le maire de Paris Bertrand Delanoë, le débat reste vif.
Au point que Nicolas Sarkozy a annoncé la semaine dernière, lors d'une visite surprise à Kaboul, un retrait progressif des soldats
français d'ici à 2014. Une initiative jugée bien trop timide par l'opposition en France. Elle est strictement calquée sur des
impératifs spécifiques aux USA : Barack Obama a décidé le retrait d'un millier d'hommes d'ici à fin 2012 et le reste du
contingent en 2013-2014.
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Tombés pour la F rance
Soixante-dix soldats français sont morts en A fghanistan depuis 2001. Un hommage national a été rendu à sept
d'entre eux ma rdi 19 juillet, aux Invalides, en présence de Nicolas Sar kozy. L a médiatisation de l'événement
tranche avec la relative indifférence du grand public dans laquelle se déroulent habituellement les cérémonies
officielles et religieuses
Le regard tourné vers la patriotique
Amérique, de nombreux militaires
français forment un rêve, celui que
leurs morts soient aussi bien
accueillis que là-bas à leur retour au
pays.
Beaucoup évoquent ces cortèges, le
long de la route entre Ottawa et
Montréal au Canada, où se sont
massées des foules pour un dernier
hommage. Mais la France n'est pas
le Canada, et encore moins les
Etats-Unis, où fleurissent aisément
les drapeaux aux fenêtres.
Cela n'empêche pas les villes,
autour des régiments concernés, de
célébrer
la
mémoire
des
combattants. Pour chaque soldat
français tombé en Afghanistan - 70
depuis le début de l'intervention
occidentale fin 2001, dont 18 depuis
le début de l'année 2011 -, un
hommage national est rendu, à
l'instar de celui qui s'est tenu mardi
19 juillet aux Invalides pour sept
jeunes hommes tués récemment,
entre le lundi 11 et le jeudi 14
juillet. Puis ils sont rendus à leurs
familles.
Pour la troisième fois, des
associations tentent de mobiliser les
coeurs, à défaut des foules.
L'Association
nationale
des
combattants
des
opérations
extérieures (Anopex) a ainsi
demandé " à tous ceux qui veulent
s' associer à la mémoire du sacrifice
de nos héros " d'être présents à
Paris, avec un drapeau français en
main " si possible " , entre la porte
Maillot et les Invalides, pour
assister au passage des cercueils ce
19 juillet.
plutôt " une indifférence affectueuse
" de la part des Français. Dans
certaines garnisons, la ferveur est
là, dans d'autres moins. " Le pire,
dit-il, serait de généraliser. "
Nathalie G uibert
Les deux premières fois, le message
est passé inaperçu. Une dizaine de
personnes se sont tenues sur le pont
Alexandre-III le 29 juin, pour
l'hommage au caporal-chef du 1er
régiment de chasseurs parachutistes
de Pamiers, Cyrille Hugodot.
Par pudeur, manque d'organisation
entre
elles
ou
défaut
de
coordination avec les autorités, les
associations ne parviennent pas à
toucher le grand public. Pour
certains officiers, la conclusion est
tirée : les Français n'ont aucune
considération pour des soldats dont
c'est " bien le métier de se faire tuer
".
Mais selon le général Elrick
Irastorza, chef d'état-major de
l'armée de terre, les militaires vivent
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Le mamouth
19 juillet
L'hommage
Le cortège funèbre sur le Pont Alexandre III. Comme lors du précédent, les pompiers de Paris -caserne Colombieront tenu à honorer les morts, au garde-à-vous, devant leurs véhicules, gyrophares en action. Dans la grosse centaine
de personnes présentes, journalistes compris, figuraient également des soldats du 1er RI qui contribuent à la mission
Vigipirate. (crédit Jean-Marc Tanguy).
Le chef des armées s'apprête à décorer les sept morts à titre posthume. Tous ont aussi été élevés au grade supérieur.
(crédit : Jean-Marc Tanguy)
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Les porte-drapeaux des trois régiments et de la base de Lorient devant les sept dépouilles. La cérémonie s'est conclue
par le thème musical du film Dien Bien Phu -concerto de l'Adieu de Georges Delerue-, joué par un violon solo.
(crédit : Jean-Marc Tanguy).
Deux commandos marine portent les galons et le portrait de "Ben", leur frère d'arme de l'équipe n°1.
Des commandos du 1er RPIMa, ainsi que des représentants de l'état-major du COS étaient présents pour montrer leur
solidarité avec les commandos marine. (crédit : Jean-Marc Tanguy).
Des militaires de l'armée de terre portent le portrait et les galons du sergent Sébastien Vermeille. A l'issue de la
cérémonie, son camarade, l'adjudant Jean-Raphael Drahi, du Sirpa Terre a rappelé le "potentiel" et la "passion" que ce
photographe de l'armée mettait dans son travail (crédit : Jean-Marc Tanguy).
Le général Elrick Irastorza -ici à côté de Jeannette Bougrab, secrétaire d'état à la jeunesse-. Le CEMAT aura passé
trois jours en Afghanistan à soutenir ses soldats, et mesurer les meilleures voies de leur sécurité future.
Pour autant que quelque chose puisse être fait.
(crédit : Jean-Marc Tanguy)
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Ligne de Défense
20 juillet 11
Ce matin dans le Saumurois, les obsèques de l’adjudant Techer du 17 e
R GP
Aujourd'hui à 11 h, en l'église de Souzay-Champigny, dans le Saumurois, aura lieu la messe de sépulture de
l'adjudant Emmanuel Técher, 38 ans. C'est dans cette commune que résident ses parents et plusieurs membres de sa
famille.
Appartenant au 17e régiment de génie parachutiste (RGP) de Montauban, l'adjudant Técher a été tué, le mercredi 13
juillet, lors d'une attaque suicide suivie d'une embuscade dans la province de Kapisa, en Afghanistan. Avec lui, quatre
autres militaires ont trouvé la mort et quatre autres ont été grièvement blessés.
Hier, une cérémonie d'hommage nationale a eu lieu aux Invalides pour honorer la mémoire des 7 soldats récemment
tués en opérations en Afghanistan (voir mon post d'hier en cliquant ici).
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Mercredi 20 Juillet 2011
témoignage
«La mort d’un soldat mérite plus qu’une dizaine de secondes au journal
télévisé»
Il avait trente et un ans; Il se nommait Sébastien Vermeille. Il était l’un des sept soldats tombés en Afghanistan et honorés hier aux Invalides. «En contemplant son cercueil, j’étais à la fois anéanti et fier», confie l’adjudant-chef
Olivier Gilquin, son supérieur direct au sein du Sirpa-terre de Lyon, qui poursuit «Anéanti de l’avoir perdu mais fier du travail qu’il avait accompli Réconforté aussi par cet hommage rendu par la Nation, la mort d’un soldat mérite un
peu plus qu’une dizaine de secondes au journal télévisé du soir». Sébastien Vermeille était un ancien marsouin, un soldat aguerri déjà envoyé par le passé sur plusieurs théâtres
extérieurs d’opérations, notamment au Tchad et en Côte d’Ivoire.;Selon l’adjudant-chef Gilquin, il avait choisi
d’intégrer le Sirpa autant par amour de la photographie que pour son goût de se retrouver au cœur de l’action.
Son travail ne consistait-il pas, notamment, à effectuer des prises de vues en opération «Cette mission en
Afghanistan il la désirait ardemment, il s’était porté volontaire et c’est non sans fierté qu’il est parti là-bas au début
du mois de mai dernier. Après tout, c’est en Afghanistan que bat actuellement le cœur de l’armée de terre;Son retour
était programmé pour octobre», répond son supérieur.
«On ne devient pas soldat pour mourir, reprend Olivier Gilquin, mais c’est un risque que nous acceptons. Reste que la disparition de ce garçon jovial a déjà laissé un grand vide dans notre petit service. C’est la première fois que nous perdons un homme au combat et le sort s’est porté sur ce jeune homme déjà père d’un petit garçon de six ans et qui s’attendait à être père une nouvelle fois, dans quelques semaines à peine». Aussitôt après la fin de la cérémonie, le responsable national du Sirpa a réuni hier les siens pour évoquer le
remplacement de Sébastien Vermeille en Afghanistan. On sait déjà qu’un homme se portera volontaire à son tour pour achever la mission.
-R.R.
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