ENCART CARNET VOYAGE

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ENCART CARNET VOYAGE
La suite du voyage de « Safari »
Après ce long silence, je vous envoie le compte rendu de la suite de notre voyage en Patagonie. Nous voici sur le canal de
Beagle, cette fois-ci dans le bon sens, Est-Ouest. Nous avons eu un peu de mal à quitter Puerto Williams car le vent trop fort
nous en a interdit la sortie. Comme pour nous y habituer, car le vent sera pour l'ensemble du voyage face à nous. 35 nœuds
c'est beaucoup surtout que les rafales venant des montagnes sont vraiment fortes. Navigation à la voile vite remplacée par le
moteur car un vent à « décorner les bœufs » nous cueille rapidement sous une pluie aveuglante, le radar est de mise pour
avancer !!!
19 février déjà !
Le temps est franchement gris. Au pied de la cordillère Darwin nous sommes entourés de glaciers venant mourir dans la
mer. Le voyage continue, direction Ouest, dans un dédale d’îles, un labyrinthe qui doit nous conduire dans le Magellan, voie
directe pour le pacifique …. mais nous en sommes encore loin !!
24 février
Nous avons quitté la Terre de Feu et faisons escale à caleta Silva ; pas de balade car la côte est abrupte et difficilement
pénétrable et la pluie ne nous y encourage pas. Le paysage est bien différent : montagnes de granit, maigres arbustes plus
proche des bonsaïs que des hêtres, très peu d'animaux exceptés des dauphins et des phoques, peu d'oiseaux et aucun animal
à terre. Nous posons notre casier de pêche le soir mais sans résultat probant. Nous rêvons de crabes!
En attendant des jours meilleurs je me penche sur les problèmes techniques du bord : le désalinisateur est enfin maitrisé et
nous produisons de nouveau de l'électricité. Le vent a mis à rude épreuve nos voiles. Un bateau pour ce type de croisière
souffre et demande beaucoup de soin. L'équipage, réduit à 3 depuis Ushuaia, doit aussi
s'entretenir avec attention car la vie sociale n'est plus à l'extérieur, plus de rencontres
permettant d'ouvrir les soupapes, nous devons bien nous respecter et nous écouter.
Après trois jours d'escale forcée direction le canal Barbara qui nous permettra de
déboucher sur le canal Magellan, long de 95 miles ! Ce dernier nous accueille avec 35
nœuds de vent et une mauvaise mer, il est orienté face au Pacifique donc vent d’Ouest.
Escale au lendemain de cette grande étape qui fut marquée par la difficulté du mouillage :
fort vent, ancre qui chasse et nombreuses tentatives …
Après ce déluge une éclaircie jusqu'à Teokita, bel endroit bien protégé avec une entrée
grande comme un chas d’aiguille.
1er Mars
L’alternateur rend l’âme ! Date d’arrivée compromise, je n'imaginais pas un tel dédale de canaux et un temps aussi ingrat, le
plaisir n’est pas au rendez vous ! Je pense à ces découvreurs comme Magellan qui sont passés par ici sans savoir où ils allaient
vraiment et dans des conditions de sécurité et de confort improbables … Je pense aussi à Slocum restant en solitaire un mois
dans la caleta Angusto en attendant une éclaircie.
Tempête de plusieurs jours : impossible de partir de la caleta Moonlight Shadow, dur ! dur !
6 Mars
Enfin repartis, vent d’ouest, mouillage dans la caleta Wanderer. Départ tôt ce matin pour profiter d'un temps calme,
navigation entre les glaces dérivantes, belle vision, direction le Nord, mais avant, une petite halte : des envies de poissons ou
de crabes à assouvir !
Départ pour Puerto Eden. La fatigue se fait sentir à force de s’amarrer dans des endroits difficiles et avec des conditions
climatiques compliquée.
25 Mars
Nous voici dans la seconde partie de notre remontée vers le Nord. L'étape importante
pour nous était Puerto Eden. Ce village s'était ouvert au monde avec l’arrivée des
bateaux de tourisme. Le gouvernement a suivi l'évolution et investi dans de belles
structures. Aujourd’hui nous découvrons un village qui a été déserté, car les marchands
de voyages n'y trouvaient pas leurs comptes. De ce fait les structures ont vieilli par
manque d’entretien… Nous profitons tout de même de cette escale pour faire nos vieilli par
manque d’entretien… Nous profitons tout de même de cette escale pour faire nos vite
emplettes et partir à la rencontre de la vie locale.
Maintenant nous faisons un saut de puce dans le Pacifique, 170 miles à parcourir dans des
conditions de mer très pénibles, le vent Nord – Nord Ouest apporte une houle très dure, les
vents toujours 25 à 40 nœuds : environ 35 heures seront nécessaires pour ce voyage.
Escale le 13 mars dans la caleta Pozo Townley puis les 14 et 15 mars dans la caleta Sucupira
pour échapper à un coup de vent. Bonne navigation pour la journée du 16 mars.
Le long des canaux nous croisons de nombreux petits cargos ainsi que des pêcheurs.
Pause sur une belle plage de sable blanc, une grande anse où nous mouillons seulement une
ancre pour une balade à terre. Malheureusement la nuit sera agitée, vent instable qui nous
promène autour de notre ancre qui, au petit matin, chasse d’où un départ rapide. La pluie et le
vent nous accompagnent ce dernier ne cessant de hurler dans les mâts - cela devient pénible…
Enfin un départ sous le soleil !! 65 miles et nous touchons l'île de Chiloé (île côtière du Chili se
situant au large de Puerto Montt). Nous venons de franchir le dernier pont avant le retour.
3 avril - Chiloé
Ce nom était pour moi synonyme de frontière, ici débute notre ré-acclimatation à la
vie sociale. Notre atterrissage au Sud de l'île fut doux, plus de mouillage acrobatique,
une simple ancre, et nous voici au calme. Toujours entourés de fermes à saumons et
de parcs à moules et huitres, la vie est ici celle des pêcheurs. A terre, les fermes ont
leur charme, élevage de vaches, moutons, cochons, où l'accueil est très chaleureux.
Notre navigation se fait maintenant au calme, par beau temps pour l'instant avec des
vents variables et étonnamment calmes ; nous en avions perdu l'habitude.
À ce jour nous faisons une escale dans la capitale Castro, ville principale très vivante,
à l’architecture originale, maisons pas très hautes, peintes de toutes les couleurs et
recouvertes de tavaillons aux motifs décoratifs. Nous visitons l'intérieur de l’île en
voiture. Le paysage est vallonné, nous y découvrons une grande quantité de
plantations d’eucalyptus.
Les églises, construites dans le même esprit que celui des maisons, offrent un
intérieur fascinant, parquets et murs en bois massifs, colonnes, moulures et voûtes.
Elles dégagent une atmosphère chaleureuse et intime. Heureux d'écouter une
chorale accompagnée d’une guitare, belle sonorité sous ces voûtes de bois.
L’artisanat local est essentiellement basé sur la laine de mouton.
Nous retrouvons notre bateau pour y être accueillis par un phoque - tout le long de
notre parcours nous sommes accompagnés par de nombreux dauphins et beaucoup
d'oiseaux y compris des pélicans ainsi que des cygnes blancs à la tête noire.
Nous voici en route pour le continent… Nous laissons derrière nous une aventure hors du commun, ce fut un voyage riche
en rencontres et en paysages exceptionnels. Le continent nous attend pour 2 derniers mouillages de vacances avant le
chantier de nettoyage et le désarmement de notre bateau.
Il est temps de faire les valises pour vous retrouver. Ce sera un plaisir de vous revoir après l'isolement de 5 mois de
navigation. La démarche à terre quelque peu chaloupée … des souvenirs en vrac dans ma tête qui auront du mal à en sortir.
C'est pour cela que j'ai voulu au jour le jour partager et je vous remercie énormément de m'avoir lu, vous avez été les jalons
de mon voyage, vos petits mots m'ont tellement aidé ! L'avenir sera dans nos montagnes, sur la mer en Bretagne, sur nos
lacs.
FIN
Jean-Pierre AMY