François Bayrou : « Uni, le centre gouvernera »
Transcription
François Bayrou : « Uni, le centre gouvernera »
4 France Ouest-France Vendredi 23 septembre 2016 François Bayrou : « Uni, le centre gouvernera » Le président du MoDem réunit ses troupes à Guidel (Morbihan) jusqu’à dimanche. Le maire de Pau, soutien d’Alain Juppé, juge « nécessaire » une recomposition politique, mais pas à n’importe quel prix. Quel sera votre message central, dimanche, à Guidel ? Donner les clés pour la reconstruction du pays et de la vie politique. Nous serions tous des Gaulois… La présidentielle va-t-elle se jouer sur l’identité ? L’obsession identitaire, dans laquelle on entraîne le pays, empêche de se poser des questions sur sa vie, sa santé, sa démocratie et sur les grands choix dont aucun ne dépend de la question de l’identité. Le chômeur ne se lève pas en se demandant si ses ancêtres sont gaulois ! La situation du chômage, l’échec éducatif, la situation de l’entreprise, l’organisation de notre sécurité sociale, ça ne dépend pas de l’identité. Comment relancer le pays ? Tous les candidats de la primaire nous préparent à l’idée d’une explosion des déficits… De manière stupéfiante ! Que la droite française, dans la situation où nous sommes, en vienne à promettre une gestion « robinets ouverts » montre à quel degré d’irresponsabilité on est arrivé. Un jour, on va devoir écraser le pays sous les impôts pour rembourser la dette. On est déjà à 100 % d’endettement. Un certain nombre de candidats disent qu’ils vont baisser la dépense publique de 100 milliards et laisser filer les déficits de 100 milliards. C’est inquiétant. Pour la première fois de ma vie, je ressens que la dislocation de l’Europe devient possible. L’écart qui est en train de se créer, entre la France et l’Allemagne en particulier, rend l’explosion européenne crédible. On a l’impression d’une vie politique qui a perdu la boule. Et tout cela pour plaire aux plus déraisonnables de son camp ! Or c’est une faute historique que d’avoir fait le soi-disant « parti unique de la droite et du centre » : ainsi, la droite n’a pas pu jouer son rôle et le Front national a prospéré ; et le centre n’a pas pu jouer son rôle, notamment dans l’Ouest, et le Parti socialiste s’est installé. La France a besoin d’un vrai centre. Le jour où il sera uni et indépendant, il gouvernera la France. La primaire en est une explication ? Sans aucun doute oui. Elle enferme le débat à l’intérieur d’un camp et donne aux plus agressifs un double avantage : ils pèsent plus dans leur camp que dans l’électorat, et c’est eux qui imposent les thèmes du débat. Le général de Gaulle a créé la Ve République pour que le Président échappe aux partis. Et, aujourd’hui, le risque est qu’on plonge dedans ! Son unité, c’est la condition pour diriger la France ? Oui. Les deux partis, PS et LR, qui ont le monopole du pouvoir, ont fait la preuve de leur échec. La situation va exiger des recompositions. Et ce message de changement devra être défendu, soit en étant allié et soutien de quelqu’un qui partage ce besoin de rassemblement – Alain Juppé – soit directement devant les Français à la présidentielle. Face à l’émiettement politique, les centres ne sont-ils pas devant une opportunité inédite ? Pour moi, il n’y a pas des centres, il y a un seul centre ! Les appareils sont concurrents, il y a des rivalités, mais le centre est en fait le courant le plus homogène de la vie politique française. Ce centre a été mis sous le boisseau parce qu’un certain nombre de ses responsables ont été séduits par l’idée d’un parti unique et parce que la loi électorale l’a constamment privé de la représentation qui devait être la sienne. On vous soupçonne de guetter l’éventuel échec de Juppé pour, vous, être candidat… Je ne mange pas de ce pain-là ! Il y a plein de gens qui jouent du billard à trois bandes, ce n’est pas mon cas. Quand je dis que je soutiens Alain Juppé, je le soutiens. Parce qu’il est le mieux placé de ceux qui veulent à la fois le rassemblement et la réforme. Et parce qu’il est personnellement fiable. Il a une intelligence, une expérience et le sens de l’honneur : autant de raisons pour moi d’avoir confiance en lui. Gauche Centre Droite Jean-Christophe Lagarde Président de l'UDI* Jean-Michel Baylet Parti radical de gauche Jean-Marie J Bockel B La gauche moderne Jean Arthuis Alliance centriste Hervé Morin Nouveau centre Emmanuel Macron Jean-Luc Bennhamias Front démocrate Bruno Le Maire Les Républicains Alain Juppé Les Républicains Rama Yade La France qui ose François Bayrou MoDem *UDI : Union des Démocrates et indépendants Nathalie Kosciusko-Morizet Les Républicains Ouest-France - Photos : Ouest-France, AFP au Laurent Hénard P Parti radical Vous refusez d’être, dites-vous, la roue de secours de Macron ? Oui. De qui que ce soit. Même d’Alain Juppé ? Non, d’Alain Juppé, je suis un allié. Quant à Macron, c’est très simple : parmi les échecs de François Hollande, il y a d’abord sa politique économique, le chômage, les déficits. Il se trouve que M. Macron est l’inspirateur pendant deux ans, et le décideur les deux années suivantes, de cet échec de François Hollande ! L’UDI Jean-Christophe Lagarde préconise une recomposition de Juppé à Valls en passant par Macron… Une recomposition est nécessaire, mais elle n’est envisageable que sans faux-semblants et sans masques. Les grands courants politiques ont leur ADN, leurs convictions, leur histoire. C’est à partir de cela qu’ils peuvent assumer de prendre leur part de l’avenir. Voilà pourquoi il faut des institutions qui garantissent le pluralisme. Il faut que chacun soit représenté à sa juste part, en fonction du soutien des Français. Et il faut un Président rassembleur. C’est ainsi que nous pouvons changer la politique française. Le centre, pour moi, c’est cela : la revendication d’une authenticité, et pas la tentation permanente de se jeter dans les bras des voisins. Recueilli par Michel URVOY. Daniel Fouray Entretien « M. Macron est l’inspirateur pendant deux ans, et le décideur les deux années suivantes, de l’échec de François Hollande. » Entre droite et gauche, les centristes plus tiraillés que jamais On dit volontiers que la présidentielle se joue au centre, qui fait basculer la majorité dans un camp ou dans l’autre. Ce qui explique que les voix centristes sont convoitées par les candidats de tout bord. À droite, Alain Juppé compte sur leur soutien pour s’imposer dès la primaire. À gauche, Emmanuel Macron ne se lancera dans l’aventure que s’il est certain d’élargir son audience sur sa droite. Tous ont en tête de recomposer le paysage politique en partant… du centre. De quoi donner le tournis ! Pour la première fois, les centristes ont décidé de ne pas lier leur sort à celui de la droite. En mars, les militants de l’UDI n’ont pas souhaité que leur parti présente un candidat à la primaire des Républicains. Ce qui n’empêchera pas bon nombre d’entre eux de participer au scrutin. L’entrée en jeu d’Emmanuel Macron, dont la candidature est de plus en plus probable, a jeté un trouble dans la famille centriste. Jean-Chris- tophe Lagarde, président de l’UDI, reconnaît qu’il existe des « convergences » entre son parti et l’ancien ministre. « Pour la première fois, quelqu’un qui vient de la gauche est prêt à discuter avec la droite et le centre », se félicite le maire de Drancy. Attraction plutôt qu’appoint Jean Arthuis, président de l’Alliance centriste, estime lui aussi que le fondateur du mouvement En marche ! est « compatible » avec le centre. « Incontestablement, Emmanuel Macron incarne une véritable forme de renouvellement », indiquait l’eurodéputé mayennais dans un entretien à Libération, le 1er septembre. Laurent Hénard, chef du Parti radical, est sur la même ligne. « Je suis sûr qu’on peut bâtir une force politique commune », prédit le maire de Nancy. Un tel rapprochement n’est pas du goût de tout le monde. Hervé Morin, patron du Nouveau centre, reste prudent. Il reproche surtout à JeanChristophe Lagarde de pas l’avoir consulté avant de tendre la main à Emmanuel Macron. « Avec de telles déclarations, les germes de l’éclatement sont introduits », déplore le président de la région Normandie… qui pourrait choisir de rallier Bruno Le Maire, député de l’Eure. Quant à François Bayrou, il a tranché le débat en tournant le dos à l’ancien ministre de François Hollande : « Tant que je serai là, il n’y aura pas d’OPA sur le centre ! » Le patron du MoDem a choisi de s’en remettre à Alain Juppé. Et si le maire de Bordeaux échoue face à Nicolas Sarkozy dans la primaire, il ira lui-même défendre les couleurs du centre. Le maire de Pau continue de rêver à un centre pôle d’attraction plutôt que force d’appoint. Encore faudrait-il que la famille parvienne à s’entendre et parler d’une seule voix. Elle n’en prend pas le chemin… Thierry RICHARD. La France en bref Marisol Touraine annonce la fin du « trou de la Sécu » Le déficit du régime général de la Sécurité sociale sera de 400 millions d’euros en 2017, contre 3,4 milliards en 2016, déclare, dans un entretien aux Echos, la ministre de la Santé Marisol Touraine. « En 2017, le trou de la Sécu aura disparu, assure-elle. Le régime général, qui affichait 17,4 milliards de déficit en 2011, sera à 400 millions de l’équilibre. » Le champ électromagnétique de Linky « faible » Selon une nouvelle série de mesures réalisées par l’Agence nationale des fréquences (ANFR), les compteurs électriques Linky, qui suscitent la méfiance d’une partie du public, n’émettent pas de champ électromagnétique plus élevé que les anciens compteurs. Les tests ont été réalisés en laboratoire mais aussi dans des habitations de plusieurs communes. Linky émet entre 0,25 et 0,8 volt par mètre à 20 centimètres du compteur, soit entre 150 et 350 fois en dessous de la limite réglementaire de 87 v/m. Le regard de Chaunu Alain Juppé regrette « la nullité du débat politique » Le candidat à la primaire de droite et du centre a rebondi, hier, sur les propos de Nicolas Sarkozy et les « Gaulois ». « Nullité du débat politique que soulèvent certains à droite et à gauche : on débat des Gaulois ! Et si l’on parlait d’avenir », a écrit Alain Juppé sur Twitter. En déplacement à Tours pour le congrès national des sapeurs-pompiers, le candidat a taclé son adversaire : « Pour moi, faire campagne, ce n’est pas dire une incongruité chaque jour pour faire parler de soi. » Hinkley Point : le comité central d’EDF toujours contre Le comité central d’entreprise de l’électricien français a demandé, hier, en référé, devant le tribunal de grande instance de Paris, la « suspension de la mise en œuvre » du projet de construction de deux réacteurs EPR à Hinkley Point, en Angleterre, tant qu’il n’aura pas eu accès à une information « suffisante ». Décision le 27 octobre. Apprentis : un système de rémunération « obsolète » Nouvelle négociation chez Renault La secrétaire d’État à l’Apprentissage, Clotilde Valter, juge « obsolète » et « injuste » l’échelle de rémunération des apprentis. Même si une revalorisation pourrait constituer un « frein » à ce dispositif. Aujourd’hui, le salaire minimum des apprentis dé- Direction et syndicats du constructeur automobile ont entamé, hier, la négociation d’un nouvel accord d’entreprise. Après trois ans d’efforts des salariés et des milliers de suppressions de postes, l’entreprise a redressé la barre. Renault a l’ambi- pend de l’âge et de l’année d’exécution du contrat. Il va de 25 % du smic (366,65 € brut) pour un mineur dans sa première année de contrat à 78 % du smic (1 143,96 € brut) pour un apprenti de plus de 21 ans en troisième année de contrat. tion d’aboutir à un accord avant midécembre. « La direction s’est dite disposée à engager des discussions de fond sur les départs, les embauches, la précarité, l’organisation du travail, la rémunération… », a rapporté un délégué CGT. Le port du Havre a souffert du mouvement social Bientôt une nouvelle usine Bordeau-Chesnel Des dizaines d’escales de navires annulées, un à deux millions d’euros de manque à gagner… Le conflit social contre la loi Travail a fait mal au port du Havre, qui a subi quatorze journées de grèves et des blocages Luissier-Bordeau-Chesnel, basée à Champagné (Sarthe), vient de faire l’acquisition d’un terrain voisin, pour y construire sa nouvelle usine. Datant de 1970, l’actuelle « n’est plus adaptée aux perspectives d’évolution » de raffineries et de dépôts de carburant. « Depuis cinq ans, la confiance avait été retrouvée. On mesurera dans quelques mois si elle a été entamée ou pas », a estimé Hervé Martel, directeur général du Grand port. du leader français des rillettes en pot, explique Pierre Hébert, son directeur général (250 salariés). La production sur le nouveau site est prévue fin 2018. Le coût du projet n’est pas communiqué pour l’instant.