L`arbitrage dans les procédure de droit de la

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L`arbitrage dans les procédure de droit de la
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Atelier de la Concurrence
Document de base
L’arbitrage dans les procédures de droit de la concurrence:
Rôle et utilité
Contenu
L‘avantage des tribunaux privés
Les accords contractuels (clauses d’arbitrage) ou dispositions ad hoc
Les tribunaux arbitraux décidés par actes d’autorité
Les tribunaux arbitraux dans les cas prévus par la loi
Cas de figure typiques en droit des cartels
Auteurs
Michael Müller, Reto Schneider
L’arbitrage dans les procédures de droit de la concurrence:
Rôle et utilité
Aux USA, à côté des autorités de la concurrence constituées, comme la „FTC“ et le „US
DOJ“ (Public Enforcement), le droit de la concurrence est avant tout mis en œuvre par des
tribunaux civils (Private Enforcement). En effet, en 1985, la Cour suprême des Etats-Unis
a reconnu l’arbitrabilité des litiges cartellaires (décision Mitsubishi Motors Corp. vs Soler
Chrysler-Plymouth). Au sein de l’UE et en Suisse, la mise en œuvre judiciaire du droit de la
concurrence, donc également les jugements par devant les tribunaux arbitraux, constitue un
marché de niche. Il y a cependant de bonnes raisons pour changer et pour aller plus souvent
vers des tribunaux arbitraux afin de régler des litiges de droit de la concurrence. Dans ce
domaine, trois champs d’action sont envisageables pour faire intervenir un tribunal arbitral
cartellaire: (i) inscription dans une convention d’arbitrage ou un accord ad hoc d’arbitrage;
(ii) sur ordre de l’autorité, et (iii) selon des prescriptions réglementaires.
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Situation de départ
meure assurée en présence d‘un état de fait à
caractère international :
En Suisse, les affaires dans le domaine du droit
des cartels sont principalement traitées dans le
cadre des procédures administratives conduites
par la COMCO.
• Selon l’art. 194 LDIP, la force exécutoire des
jugements avec un contexte international
est assurée par la CNY (Convention pour la
reconnaissance et l‘exécution des sentences arbitrales étrangères du 10.06.1958).
• Le droit suisse des cartels ne connaît aucune procédure officielle d’arbitrage et les cas
portés devant des tribunaux civils sont très
rares.
Plusieurs raisons plaident pour l’arbitrage cartellaire, même au sein d’un contexte international.
Une interdiction des accords arbitraux n’est prévue ni dans la Loi sur les cartels, ni dans la LDIP
pour les cas internationaux, ni dans le CPC par
les cas nationaux.
• Les tribunaux arbitraux peuvent être choisis par les parties pour leurs compétences
spécialisées. Ceci peut être relevant lorsque
l’on sait à l’avance que des questions complexes de droit des cartels vont entrer en ligne de compte.
• L‘arbitrage peut avoir pour objet toute prétention qui relève de la libre disposition des
parties (art. 354 CPC).
• L’arbitrage offre aux parties une plus grande
flexibilité (en termes de procédure ou d’autonomie privée.
• En règle général, il s‘agit de litiges en droit
des cartels selon l’art. 12 ss LCart concernant des prétentions pécuniaires sur lesquelles les parties peuvent s’entendre librement.
• La durée de la procédure est plus courte
en comparaison des procédures ordinaires.
Dans la plupart des procédures d’arbitrage,
les coûts sont plus faibles par rapport à une
procédure ordinaire.
• Par contre, les amendes pécuniaires de la
COMCO infligées réglementairement selon
l’art. 49a LCart ne peuvent pas être tranchées par des arbitres.
• Le plus grand atout des tribunaux arbitraux
est la confidentialité. Les négociations et les
La force exécutoire des jugements arbitraux de1
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jugements ne sont pas publics et accessibles uniquement pour les parties adverses.
Ainsi, un éventuel dommage réputationnel
et de grosses pertes peuvent être évités.
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Les tribunaux arbitraux à travers des dispositions officielles
Les autorités de la concurrence peuvent ordonnées de recourir aux tribunaux arbitraux.
• Au préalable, l’autorité de la concurrence
peut instaurer un tribunal arbitral dans une
procédure de „settlement“ dans le cadre
d’une procédure selon l’art. 5/7 LCart. Ce
tribunal arbitral aura donc la tâche de régler
les litiges cartellaires au moyen d’un accord
amiable (pour illustration : est-ce qu’une
hausse des prix est inéquitable selon l’art. 7
LCart ?).
Tribunal arbitral des cartels à la suite de conventions
Dans les conventions internationales, l’arbitrage
institutionnel est souvent choisi. Dans ce cas,
la procédure est accompagnée administrativement par des institutions d’arbitrage. Parmi
celles-ci, on peut citer entre autres:
• Chambres suisses de commerce;
• International Chamber of Commerce (ICC) à
Paris;
• Ensuite, l’autorité de la concurrence peut instaurer un organe arbitral afin de régler les
litiges émanant d’un processus de fusion, en
ce qui concerne les conditions structurelles
et comportementales (pour illustration : estce que la cession d’une partie de l’entreprise
à un concurrent est conforme aux conditions
du marché ?).
• London Court of International Arbitration
(LCIA);
• Stockholm Chamber of Commerce (SCC);
• Deutsche Institution für Schieds-gerichtsbarkeit (DIS);
• Singapore International Arbitration Center
(SIAC).
Ces institutions d’arbitrage mettent régulièrement à disposition des règles pour les procédures d’arbitrage:
Lors de la mise en place d’un tribunal arbitral,
l’autorité de la concurrence doit respecter les
principes du droit administratif. L’autorité de la
concurrence peut aussi édicter des prescriptions concernant :
• Swiss Rules of International Arbitration
• la composition du tribunal arbitral,
• ICC Rules of International Arbitration
• le règlement à appliquer,
A côté des tribunaux arbitraux institutionnels,
les parties peuvent faire recours à un «tribunal
arbitral ad hoc»:
• la répartition des frais de procédure entre les
parties, le siège du tribunal et la langue de
procédure.
• Il existe alors une plus grande marge de
manœuvre pour désigner et fixer des règles
de procédure.
Le tribunal arbitral instauré par l’autorité de la
concurrence n’a finalement qu’un pouvoir de
décision limité. Il demeure lié au jugement en
matière de droit des cartels de l’autorité de la
concurrence en ce qui concerne les questions
spécifiques.
• Cette voie est plutôt à conseiller dans des
petites affaires et des états de fait non internationaux. Les compétences et l’expérien-ce
nécessaires manquent souvent si les procédures sont complexes et internationales.
• L’autorité de la concurrence a utilisé pour la
première fois cette possibilité en 2002. Le
Swatch Group fut contraint dans d’une dé2
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cision à régler les éventuels litiges émanant
de l’application de mesures provisionnelles
par le biais d’un tribunal arbitral.
Dans la pratique, les tribunaux arbitraux s’occupent rarement de juger des problèmes à caractère cartellaire en raison de:
• Selon les «règles de procédures arbitrales
internationales (Swiss Rules of International
Arbitration) de la Chambre de Commerce
suisse» et selon le «règlement complémentaire de 2004 pour l’application des règles
de procédures arbitrales internationales de
la Chambre de Commerce suisse pour les
procédures arbitrales nationales», un tribunal arbitral permanent à juge unique a été
instauré.
• La responsabilité parallèle des autorités administrative et civile;
• La maxime inquisitoire et la maxime d‘office
des autorités;
• Dans les relations externes aux cartels, il n’y
pas de clause arbitrale (manque de qualité
pour agir des tiers).
Dans les relations internes aux cartels, si cela
est prévu dans par une clause arbitral, un membre du cartel pourrait déposer une plainte contre
les autres membres du cartel.
• Le siège du tribunal arbitral a été placé à
Berne et la langue désignée de la procédure
fut l’allemand.
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Les possibilités et les limites de
l’arbitrage en droit des cartels
Les tribunaux arbitraux dans les cas prévus par la loi
• Ainsi, il serait possible d’imaginer des constellations où l’application d’une clause problématique du point de vue du droit des cartels
donnerait lieu à une plainte, respectivement
à l’exigence d’un dédommagement.
Le législateur peut prévoir un tribunal arbitral
pour les litiges de droit des cartels. Ceci fut à
peu près le cas dans le règlement d‘exemption
par catégorie n° 1475/95, concernant la distribution des véhicules automobiles (REC).
• Pour illustration: Les prix de vente imposés
sont interdits selon l’art. 5 al. 4 LCart mais
seraient possibles dans une clau-se de droit
applicable selon le droit US.
• Lors de divergences d’opinion concernant
l’exécution des obligations contractuelles,
chaque partie avait le droit de faire appel à
un juge arbitral ou à un expert indépendant.
Dans les types de contrats suivants, une appréciation par le biais de tribunaux arbitraux serait
envisageable:
L’utilisation de tels tribunaux arbitraux des cartels fait surtout du sens lorsque de nombreux
litiges sont prévisibles et qu’une résolution rapide des différends pouvant avoir un effet sur
la concurrence efficace est nécessaire. Les cas
suivants pourraient entraîner l’utilisa-tion d’un
tribunal arbitral:
• Les contrats de licences (avec des licences
exclusives à long terme ou des licences croisées);
• Des contrats de distribution (avec des contrats de distribution exclusive; des contrats
d’achat exclusif; des contrats de distribution
sélectifs avec une protection territoriale);
• Fixation d’objectifs de vente;
• Litiges relatifs à des obligations de livrer;
• Des contrats de franchise (avec des obligations d’achat; des recommandations de prix
de ven-te);
• Litiges sur la justification de la résiliation de
contrats.
• Des contrats d’achat d’entrepri-se;
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alisées des tribunaux publics.
• Des contrats de Joint Venture;
Dans tous les cas, la coordination et l’échange
d’informations entre les autorités de concurrence et les tribunaux publics ou arbitraux doit être
améliorée.
• Des contrats de coopération.
Les décisions des tribunaux arbitraux sont sans
appel. Elles peuvent uniquement être attaquées
lors de manquements manifestes au droit de
procédure ou lorsque le contenu de la décision
totalement inacceptable. Le Tribunal fédéral n’a,
pour l’heure, cassé encore aucune décision arbitrale selon l’art. 190 al. 2 LDIP en raison d’une
violation des normes cartellaires
Sources
• Berger Bernhard/Kellerhals Franz, Internationale und interne Schiedsgerichtsbarkeit
in der Schweiz, Bern 2006.
• Les prescriptions du droit des cartels ne sont
pas considérées comme soumises au droit
de recours selon l’Ordre public.
• Blanke Gordon/Landolt Phillip (édit.), EU
and US Antitrust Arbitration, 2 volumes, Kluwer Law International, The Hague 2011.
• “Les dispositions du droit de la concurrence,
quel qu‘il soit, ne font pas partie des valeurs
essentielles et largement reconnues qui,
selon les conceptions prévalant en Suisse,
devraient constituer le fondement de tout
ordre juridique. Par conséquent, la violation
d‘une disposition de ce genre ne tombe pas
sous le coup de l‘art. 190 al. 2 let. e LDIP”
(ATF 132 III 389, cons. 3.2.).
• Blessing Marc, EG/U.S. Kartellrecht in internationalen Schiedsverfahren – 77 Aktuelle
Fragen aus der Praxis, Swiss Commercial
Law Series Vol. 13, Basel/Genf/Frankfurt
a.M. 2002.
• Boog Christopher/Buhr Axel/Gabriel Simon/
Lazopoulos Michael/Marugg Daniel/Pfisterer Stefanie/Stacher Marco/Stark-Traber
Sonja/Wehrli Daniel, Berner Kommentar zur
Schweizerischen Zivilprozessordnung Art.
353-399 ZPO und Art. 407 ZPO, Band III,
Binnenschiedsgerichtsbarkeit, Bern 2014.
6Résumé
Dans l’UE et en Suisse, on se plaint que l’application du droit des cartels se fait, en général,
que par le biais de procédures administratives
longues et coûteuses. En Suisse, seule une
poignée d’infractions au droit des cartels peuvent peut être poursuivie et, le cas échéant,
donner lieu aux poursuites qui s‘imposent.
• Borer Jürg, Zivil- und strafrechtliches
Vorgehen, in: Geiser Thomas/Krauskopf
Patrick/Münch Peter (Hrsg.), Handbücher
für die Anwaltspraxis, Band IX, Schweizerisches und europäisches Wettbewerbsrecht,
Basel/Genf/München 2005.
• Afin d’améliorer l’application privée du droit
de la concurrence (Private Enforcement),
une possibilité serait de recourir systématiquement à des tribunaux arbitraux qu’ils
soient prévus de façon institutionnelle ou légale.
• Frick Joachim, Schiedsgerichtsbarkeit, in:
Baker & McKenzie Zürich (Hrsg.), Entwicklungen im schweizerischen Wirtschaftsrecht
2013/2014, Zürich/Basel/Genf 2014.
• Landolt Phillip, Modernised EC Competition
Law in International Arbitration, Kluwer Law
International, The Hague 2006.
• Les quelques cas jugés en Suisse par des
tribunaux civils cartellaire montrent clairement que des tribunaux arbitraux pourraient
combler le manque de connaissances spéci-
• Martenet Vincent/Bovet Christian/Tercier
Pierre (édit.), Commentaire romand du droit
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de la concurrence, 2ème édition, Bâle 2012.
• Meinhardt Marcel/Ahrens Jan-Michael,
Wettbewerbsrecht und Schiedsgerichtsbarkeit in der Schweiz – Eine Würdigung
des Entscheids des Bundesgerichts vom 8.
März 2006 , SchiedsVZ 4 (2006) 182 ff.
• Sachs Kurt, Schiedsgerichtsverfahren über
Unternehmenskaufverträge – unter besonderer Berücksichtigung kartellrechtlicher
Aspekte, SchiedsVZ 2 (2004) 123 ff.
• Weber Rolf H./Volz Stephanie, Fachhandbuch Wettbewerbsrecht, Expertenwissen für
die Praxis, Zürich 2013.
• Weber-Stecher Urs, Kommentar zu Nach
Art. 12-17 KG, in: Amstutz Marc/Reinert
Mani (Hrsg.), Basler Kommentar zum
Schweizerischen Kartellgesetz, Basel 2010.
• Von Büren Roland/David Lucas, Schweizerisches Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, Band I/2, Der Rechtsschutz im
Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht, 3.
Auflage, Basel 2010.
• Zuberbühler Tobias /Oetiker Christian
(édit.), Practical Aspects of Arbitrating EC
Competition Law, Zürich/Basel/Genf 2007.
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