Victor Hugo par la caricature

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Victor Hugo par la caricature
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Victor Hugo par la caricature
Par Gérard Pouchain, agrégé de l’Université, chercheur associé à l’université de Rouen, Viceprésident de la Société des Amis de Victor Hugo
On ne dira jamais assez l’importance de la presse française au XIXe siècle, et plus
particulièrement des journaux satiriques.
Dès la période révolutionnaire, des périodiques ont publié, de temps en temps, des
caricatures, mais c’est avec les premières années du XIXe siècle que naît véritablement la
presse illustrée satirique : la caricature fait son entrée dans l’univers des journaux. En dépit
de dame Anastasie – la censure – qui ne cesse d’utiliser ses grands ciseaux pour faire
disparaître articles et dessins, voire publications qui dérangent le pouvoir (ainsi, entre
août 1848 et juillet 1849, 335 numéros sont poursuivis pour leurs caricatures ; entre 1854
et 1866, 676 illustrations jugées irrévérencieuses sont interdites), les journaux de caricatures
se multiplient tout au long du XIXe siècle : plus d’une centaine de titres qui connaissent des
fortunes diverses, d’un seul numéro à plusieurs milliers, l’un des plus célèbres étant La Lune
créé en 1865 et tiré à 40 000 exemplaires.
Cette presse illustrée satirique est très prisée du public populaire, mais elle intéresse aussi
les gens de lettres : ainsi, Balzac va collaborer au journal de Philipon – l’auteur de la célèbre
caricature de Louis-Philippe transformé en poire – et rédiger le prospectus de lancement du
journal : « En France comme en Angleterre, écrit-il, la caricature est devenue un pouvoir
[…]. Depuis 1789, la caricature a été un besoin pour notre pays. Elle y est énormément
populaire, et si, jusqu’à présent, elle ne s’est pas rendue périodique, comme la pensée ou
comme la plaisanterie, c’est que le prix de la gravure interdisait cette spéculation.
Aujourd’hui, les procédés de la lithographie ont permis de rendre presque vulgaire cette
jouissance exquise que les Parisiens seuls pouvaient renouveler tous les jours dans les rues,
ou çà et là sur les boulevards. » Quant à Baudelaire, qui, en 1846, a légendé une soixantaine
de caricatures pour Le Salon caricatural, il écrit dans son essai, De l’essence du rire et
généralement du comique dans les arts plastiques (1855), qu’« il est clair qu’un ouvrage sur
la caricature […] est une histoire des faits, une immense galerie anecdotique », et il ajoute
que de telles publications « ont droit sans doute à l’attention de l’historien, de l’archéologue
et même du philosophe ; elles doivent prendre leur rang dans les archives nationales, dans
les registres biographiques de la pensée humaine. »
On comprend mieux l’essor des journaux de caricatures au XIXe siècle quand on pense au
nombre de régimes qui l’ont parcouru, depuis l’Empire jusqu’à la Troisième République, en
passant par les règnes de Louis XVIII, Charles X, Louis-Philippe, la Deuxième République et
le Second Empire, sans oublier des moments aussi importants que le coup d’État de
Louis Bonaparte ou la Commune et les très nombreuses guerres, ni les grands courants
littéraires, tels le romantisme ou le naturalisme, ni les hommes politiques (Thiers,
Gambetta, Mac-Mahon, Jules Grévy…), les artistes (Mademoiselle George, FrédérickLemaître, Sarah-Bernardt, Liszt, Wagner…) et les écrivains (Chateaubriand, Vigny, Balzac,
Dumas, Flaubert, Zola…).
Les dessinateurs (Daumier, Grandville, Nadar, Doré, Gill, Cham, Faustin, Le Petit, GilbertMartin, Pilotell, Bertall, Roubaud, Philipon, etc.) ont donc devant eux un immense champ
d’action, une très ample « comédie humaine » toujours renouvelée.
Victor Hugo, homme politique profondément engagé dans les luttes de son temps, écrivain
prolifique et à nombreux succès, véritable « géant des lettres françaises », ne pouvait être
oublié par les caricaturistes. Si l’on ajoute aux charges qui le représentent, celles qui
accompagnent la publication de ses œuvres, de leurs parodies, et les reprises de ses drames,
on doit approcher, voire dépasser, le millier.
Une telle production d’images permet, certes à travers des jeux de prismes, de « raconter »
Hugo, sa vie littéraire et sa vie politique, mais jamais sa vie privée. Il n’existe, par exemple,
aucune caricature qui dévoile ses liaisons amoureuses. Sa relation avec Juliette Drouet, qui
commence en février 1833 et qui est pourtant contemporaine de la première charge dont il
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est l’objet (27 juillet 1833), est ignorée des caricaturistes, alors que certaines publications
n’hésitent pas à révéler l’intérêt que porte l’auteur de Lucrèce Borgia à mademoiselle Juliette
qui interprète dans sa pièce le rôle de la princesse Negroni.
De même, de nombreux journaux vont s’emparer du flagrant délit d’adultère constaté le
5 juillet 1845 : celui qui a été nommé pair de France quelques mois plus tôt, vient d’être
surpris en compagnie de Léonie Biard dans une chambre meublée du passage Saint-Roch.
Ainsi, dès le lendemain, La Patrie dénonce ce « scandale déplorable » et apporte des
précisions : « un de nos écrivains les plus célèbres » ; « en conversation criminelle » ; son
titre politique « rend sa personne inviolable », etc. Les deux seules caricatures qui paraissent
la même année 1845 dans L’Illustration du 15 novembre, ignorent l’affaire : Grandville y
présente (« Thé artistique assaisonné de grands hommes ») le salon de Delphine de Girardin,
entourée notamment de Hugo, grosse tête et corps très cambré, Dumas, Balzac, Liszt, et il
revient sur l’échec des Burgraves (1843) avec « Un Génie et les Durs à cuire » où Hugo,
grosse tête surmontée de flammes et ailes d’ange, signe sa « tragédie en un monologue » au
pied de quatre personnages fort imposants, dont l’empereur Barberousse.
Ce n’est qu’un an après la mort de Victor Hugo qu’un journal illustré évoquera le flagrant
délit d’adultère : dans son numéro du 20 juin 1886 Le Pilori, journal bonapartiste et
royaliste, rappellera « l’aventure du passage Saint-Roch » et représentera un homme au large
front et à la tête démesurée qui se dirige vers une femme l’attendant sous un porche
surmonté de l’inscription : « Passage Saint-Roch ».
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L’interdiction de la caricature politique par la loi sur la liberté et la presse du 29 août 1835,
n’est sans doute pas étrangère à la multiplication des charges de Victor Hugo au lendemain
des succès d’Hernani (1830) et de Notre-Dame de Paris (1831), d’autant que, chef de file
incontesté des romantiques, il dérange, agace, exaspère ceux que Théophile Gautier appelle
les « grisâtres », par opposition aux « flamboyants ».
Par la suite, son entrée en politique (il est élu à la Constituante en 1848, puis, l’année
suivante, à l’Assemblée législative) va faire le bonheur des Bertall, Daumier et autres
Quillenbois. La période 1848-1851 est, de loin, la plus féconde en portaits-charges : près
d’une centaine est conservée à la Maison de Victor Hugo, place des Vosges, contre une
quarantaine pour les années antérieures.
Pendant son long exil (1852-1870), il n’est pas oublié des caricaturistes : d’abord présent aux
côtés d’autres « binettes contemporaines » (Alexandre Dumas, Honoré de Balzac, Eugène
Sue, George Sand, etc.), au sein de groupes ou dans des cortèges, il occupe ensuite, seul, la
une des journaux satiriques illustrés lors de la publication de ses œuvres nées ou achevées
dans le « look-out » de Hauteville House, La Légende des siècles (1re série, 1859), Les
Misérables (1862), Les Travailleurs de la mer (1866), L’Homme qui rit (1869), et de la
reprise d’Hernani au Théâtre-Français (1867).
Celui qui avait, en 1859, refusé l’amnistie – « Je partagerai jusqu’au bout l’exil de la liberté.
Quand la liberté rentrera, je rentrerai » – retrouve le sol français le 5 septembre 1870, à la
chute de l’Empire : désormais, les caricatures, notamment celles d’André Gill, vont
accompagner, avec quelques vicissitudes (démission de son mandat de député, attitude à
l’égard des Communards, échec aux élections partielles de janvier 1872, notamment), le
patriarche, le père de la République, qui s’achemine, de son vivant, vers l’« apothéose ».
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1833-1847
Les premières caricatures de Victor Hugo [1], parues dans les années 1830, ainsi que les
légendes et les articles qui les accompagnent, dénoncent avant tout un écrivain
« révolutionnaire du goût », une sorte de « fou contemporain », imbu de lui-même. Il est
donc souvent représenté avec des tenues excentriques ou élégantes, dans une posture
énergique, en tête de cortège ou occupant une position éminente. Mais c’est surtout son front
[2] qui est la cible des caricaturistes et qui est agrandi démesurément pour railler le
« surhomme ».
*** 1
« Hugoth - Galerie des fous contemporains », par md [Martin Distelli], La Charge, journal
satyrique, deuxième année, n° 4, 27 janvier 1833.
N/B : 30x41
Les quelques poils au menton du jeune auteur de Notre-Dame de Paris raillent l’écrivain
barbare, ce « hugoth », pétrifié en médaillon gothique. On lit dans l’article qui accompagne la
caricature et qui justifie la place de l’écrivain dans cette « Galerie des fous contemporains »
qu’il inaugure : « […] Voici d’abord M. Hugoth, le grand révolutionnaire du goût, le grand
ressusciteur de la seule, vraie et bonne littérature ; celui qui a enfoncé Racine, comme chacun
sait, et qui a poussé sa badine à travers du corps de Voltaire.
M. Hugoth n’est pas seulement un homme ordinaire ; surtout il a du front. Ses admirateurs,
qui admirent tout en lui, ont compté six pouces de la racine du nez à la racine des cheveux
[…].
Ces étonnans [sic], ces admirables vers [3] sont dus au talent admiratif de M. Petrus Borel.
Ils ne doivent pas nous surprendre.
Un Goth trouve toujours un plus goth qui l’admire.
Après tout, M. Hugoth, à qui nous avons donné pour collerette romantique un gothique
portail, « dentelle de pierre » qu’il aime tant, est un homme de talent, un homme
d’imagination, surtout ; mais il s’est voulu faire homme de génie, et c’est en cela qu’il a failli.
En vain, à l’aide de ce front dont nous faisions l’éloge, et secondé de tous les moyens de
charlatanisme et de la camaraderie, il a prétendu “mettre le pied sur la gorge du siècle”. Le
siècle se moque de lui et de ses productions moyen-âge. Il pouvait être, avec de l’étude, un
brave et estimable littérateur, auteur d’ouvrages élevés, réguliers, de bon goût ; mais on en a
déjà tant vu de ce genre depuis l’époque de Louis XIV ! Il a bien mieux aimé être un auteur
comme on n’en a vu jamais. C’est pour cela que nous lui avons assigné une place honorable
parmi nos fous contemporains. »
*** 2
« Hugo », par Dantan, lithographie de Lepeudry, Le Charivari, quatrième année, n° 278,
5 octobre 1835.
N/B : 22x27
Le 21 octobre 1833, La Charge a consacré un article à « la caricature graphique et la
caricature sculptée » pour rendre hommage à Jean-Pierre Dantan (1800-1869) « qui n’a pas
craint de célébrer à sa manière les célébrités déjà tympanisées de notre époque louangeuse »,
et qui vient d’inventer la « caricature plastique », la « charge modelée » avec des statuettescharges. Un certain nombre d’entre elles, dont celle de Victor Hugo, « excellentes
plaisanteries personnifiées [4] », vont être lithographiées et publiées, en 1833, dans un
recueil intitulé le Dantanorama.
La caricature de Victor Hugo qui paraît dans Le Charivari du 5 octobre 1835, est donc déjà
connue du public. L’intérêt que porte, dans cette charge, le sculpteur à la phrénologie est
évident. On serait tenté de reproduire le commentaire de l’Almanach comique (1848) :
« Presque toute la charge de Dantan a porté sur le front célèbre qui, pour n’être pas en réalité
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de taille à causer d’aussi grandes dégradations dans les appartements, n’en est pas moins très
vaste, et doit offrir un beau sujet d’examen à la phrénologie. »
Si l’on compare la caricature de Hugo à sa charge en terre cuite, on remarque que Dantan a
accentué l’importance du front en jouant sur l’angle facial, donné plus de volume aux cheveux
– suggèreraient-ils, comme on l’a parfois vu, la crinière du lion ? – allongé et arqué
davantage le nez dont il a modifié aussi l’extrémité, comme en écho à ce que rapporte Juste
Olivier [5] : « Son nez est un peu renflé vers le bout, ce qui lui donne quelque chose de peu
agréable. » À noter également, en partie cachée par le col, une coupelle qui évoque le poison
versé dans certains drames.
La lithographie reproduit fidèlement ce qui figure sur la base droite de la statuette et qui
raille l’écrivain romantique : un rébus jouant sur son nom (hache – U – g – os) et une tête de
mort [6].
*** 3
« M. Victor Hugo, la plus forte tête romantique », par Benjamin Roubaud ou Honoré
Daumier [7], Galerie littéraire n° 3, Le Charivari, n° 286, 12 octobre 1836.
N/B : 33,5x44
S’inspirant du tableau de Châtillon (1808-1881), Victor Hugo et son fils Victor, réalisé en
1836, l’artiste valorise le front de l’écrivain qui a publié l’année précédente Les Chants du
crépuscule : assis dans une cathèdre, il tient dans sa main gauche quelques feuilles où
apparaît le mot « poème ».
Au loin se profilent les tours de Notre-Dame qui renvoient au roman paru en 1831 et
mentionné dans le texte qui commente la caricature : « Cette charge dantanesque représente
M. Victor Hugo, l’auteur de Notre-Dame de Paris et des Orientales […] Heureusement l’école
romantique peut aussi bien se passer des services de M. Victor Hugo que la patrie des
services uniformes de M. Alexandre Dumas (de Cocagne). »
*** 4
« Les romantiques chassés du temple », par de Barray, La Caricature provisoire, n° 8,
23 décembre 1838.
N/B : 35x30
La caricature, qui est souvent en étroite relation avec l’actualité, n’oublie pas le dramaturge.
Ainsi, la charge de de Barray illustre l’ouverture du « Second Théâtre-Français », le Théâtre
de la Renaissance, destiné à accueillir « le drame, la comédie et l’opéra-comique » : on y voit
Hugo quittant précipitamment le Théâtre-Français, et emportant « poignards », « blague »,
« poison », et son dernier drame, Ruy Blas, dont la première représentation a lieu le
8 novembre 1838 au Théâtre de la Renaissance. Dumas qui tient, au côté de Victor Hugo, un
étendard (« adultère ! inceste ! assassinat ! sang ! mort ! damnation ! »), y donnera, deux
mois plus tard, un drame, Bathilde. Quant à Frédérick Lemaître, une paire de bottes sous un
bras, et une épée de Tolède à la main, c’est lui qui crée le rôle de Ruy Blas.
La caricature, dont le titre renvoie à un épisode des Évangiles, « Les vendeurs chassés du
Temple de Jérusalem », est expliquée en ces termes : « M. de Barray, qui estime beaucoup le
talent de Mlle Rachel, nous la montre cependant sous des traits peu flattés : c’est qu’elle est ici
la personnification de la tragédie renouvelée des Grecs, que l’artiste n’aime guère, et d’une
administration théâtrale qu’il n’aime pas. Les romantiques, chassés du temple Védel [8], se
réfugient dans celui de la Renais-cendre, et font fort bien. »
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5
*** 5
« Les Saltimbanques », par Honoré Daumier, La Caricature, n° 26, 28 avril 1839.
N/B : 32,5x50
Bobèche et Galimafré, les célèbres paradistes qui jouent au Théâtre des Pygmées et au
Théâtre des Délaissements Comiques, boulevard du Temple, présentent de « grandes
célébrités de la France littéraire, musicale et artistique [qui] ont tou[te]s 36 pieds au-dessous
du niveau de la mer » : de gauche à droite, Jules Janin (critique au Journal des Débats qui, le
premier, a proposé au bas de la première page un feuilleton dramatique.), Casimir Delavigne
(poète et dramaturge, il a notamment écrit Les Vêpres siciliennes et Marino Faliero.), Victor
Hugo, Hector Berlioz (son opéra en deux actes, Benvenuto Cellini, a été créé le 3 septembre
1838.) et Paul Delaroche (élève de Jean-Antoine Gros, il a peint Le Supplice de Jane Grey,
Cromwell regardant le cadavre de Charles Ier, Les Enfants d’Édouard.). Pour Daumier, ces
« grandes célébrités » ne sont que des personnages de foire, des « saltimbanques ».
*** 6
« Grande course au clocher académique », par Grandville, La Caricature, revue morale,
judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique, n° 61, première année, deuxième
série, 29 décembre 1839.
C : 60x42,7
Au centre d’un groupe de postulants à l’Académie française (notamment, de gauche à droite,
Alfred de Vigny, Alexandre Dumas, Honoré de Balzac, Gérard de Nerval), Victor Hugo,
« pape littéraire coiffé de Notre-Dame de Paris » et monté sur des « piédestaux-bots », attend
son heure : après quatre échecs (18 février et 29 décembre 1836, 19 décembre 1939, 20 février
1840), il sera élu le 7 janvier 1841.
Quelques jours avant la parution de cette caricature, La Mode proposait à ses lecteurs une
lithographie anonyme représentant Victor Hugo, également accompagné de Dumas et de
Balzac, les bras chargés d’ouvrages, qui se voit refuser l’entrée de l’« hôpital académique,
asile littéraire pour les vieillards » par une vieille femme, allégorie décrépite de l’Académie
française, dont les propos sont rapportés dans la légende : « Vous êtes jeunes et forts et vous
demandez les Invalides ! Vous voulez donc voler le pain des pauvres vieillards ?… Allez
travailler grands Feignans [sic] !!… »
*** 7
« Panthéon charivarique », par Benjamin Roubaud, Le Charivari, onzième année, n° 336,
22 décembre 1841.
N/B : 33,5x44
La charge de Benjamin Roubaud, dit Benjamin, reprend les principales caractéristiques des
caricatures de Victor Hugo pour cette période qui précède son entrée en politique : une
grosse tête, digne d’un « homme in-folio [9] », et un vaste front d’autant plus visible qu’il
semble éclairé et qu’il contraste avec un environnement sombre. Entre Notre-Dame de Paris
et un sabbat de sorcières, le surhomme semble indifférent à ses thuriféraires lilliputiens et à
ses admirateurs qui viennent pourtant baiser ou étreindre ses chaussures. La position
éminente qu’il occupe, il la doit à ses œuvres sur lesquelles il est assis, ainsi qu’au ThéâtreFrançais et à l’Académie française sur lesquels il pose les pieds. La Colonne Vendôme renvoie
à « A la Colonne de la place Vendôme » (Odes et Ballades), le Théâtre de la Porte-SaintMartin à Lucrèce Borgia et à Marie Tudor, les scènes de meurtres et de pénitents aux drames
romantiques.
On peut se demander si Benjamin a voulu représenter un écrivain, plume à la main, qui
médite, ou un homme dont le regard est concentré sur son coffre de « rentes ».
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Dans ses Prédictions extraordinaires du grand Abracadabra découvert dans les Odes et
Ballades par Victor Hugo (1842), G.M. Dairnvoeu dessine, dans un même décor parisien, un
Victor Hugo qui s’inspire de celui de Benjamin, mais il le représente assis sur la coupole de
l’Institut de France.
*** 8
« Le grand chemin de la postérité », 3e série, « Les hommes de lettres, les auteurs
dramatiques, les romanciers, les acteurs », par Benjamin Roubaud, Le Charivari, 1842,
caricature partiellement reprise dans Le Soleil de dimanche, 23 février 1902.
N/B : 36x42
La caricature originale de Benjamin Roubaud montre de nombreux personnages qui
accompagnent Victor Hugo, « roi des Hugolâtres, armé de sa bonne lame de Tolède et
portant la bannière du romantisme », chevauchant Pégase : outre ceux que l’on voit ici
(Théophile Gautier, qui arborait le célèbre gilet rouge lors de la première représentation
d’Hernani, et qui a fait paraître son premier article dans La Presse ; Bernard-Adolphe
Granier de Cassagnac, collaborateur au Journal des Débats ; Francis Wey, ami de Nodier,
critique d’art, auteur de romans, de nouvelles et de récits de voyages ; Paul Foucher,
romancier et dramaturge, beau-frère de Victor Hugo), le caricaturiste a représenté d’autres
écrivains, notamment Lamartine, Balzac, Dumas, Eugène Sue, Vigny.
L’inscription qui apparaît sur la bannière – « Le laid c’est le beau » – parodie la préface de
Cromwell : « Le laid y [la création] existe à côté du beau, le difforme près du gracieux, le
grotesque au revers du sublime, le mal avec le bien, l’ombre avec la lumière. »
Le crâne, le poison et le poignard renvoient, une nouvelle fois, au drame romantique.
1848-1851
Les années 1848-1851 qui voient Victor Hugo élu député, d’abord sympathisant avec Louis
Bonaparte, puis opposant déterminé à celui qu’il appellera « Napoléon-le-petit », sont des
plus riches quant aux portraits-charges de l’écrivain dont on souligne le « changement de
front ». La création du journal L’Evénement par ses « fils », Paul Meurice et Auguste
Vacquerie, lui vaut de nombreuses caricatures qui dénoncent son inféodation au futur prince
président, et les journaux satiriques illustrés se gaussent de son cheminement vers la
« Montagne ». Ses grands discours sur la misère, sur la liberté de l’enseignement et de la
presse, sur le suffrage universel, sont l’occasion de moquer son verbe. Dorénavant, il est
représenté avec un mirliton à la main ou à la bouche : ce qu’il dit, c’est du vent ! À son front
apparaissent des emblèmes maçonniques : en dépit de ses interventions au congrès de la
Paix, Hugo est un dangereux révolutionnaire dont la société devrait se méfier…
*** 9
« Le Triomphe pour rire », par Bertall et Raimbaud, gravé par Pothey, Le Journal pour rire,
2 décembre 1848.
N/B : 46x34,6
Le soutien que Victor Hugo apporte à Louis-Napoléon Bonaparte pour les élections du
10 décembre 1848, n’échappe évidemment pas aux caricaturistes : Bertall et Rimbaud
imaginent un grand char à bancs qui se dirige vers l’« Hôtel de la Présidence » et dans lequel
ont notamment pris place Louis-Napoléon Bonaparte, juché sur les épaules d’un géant, son
oncle, et Hugo – est-ce une sorte de nimbe qui est au-dessus de sa tête ? – qui harangue la
foule et qui brandit un placard : « LUI / LUIT / NUIT / FUIT ».
L’oriflamme située en avant du char rappelle les deux tentatives de coup d’État de LouisNapoléon Bonaparte à Strasbourg (1836) et à Boulogne-sur-Mer (1840). Le coup d’État du
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2 décembre 1851 à Paris lui vaudra le sobriquet de « Bou [Boulogne] stra [Strasbourg] pa
[Paris] ».
À noter l’aigle impérial qui se dirige vers le coq républicain posé sur le drapeau tricolore, et le
chapeau impérial que porte le futur président de la République [10] qui cache un sceptre
dans ses basques.
*** 10
« Actualités – n° 171 », par Honoré Daumier, Le Charivari, dix-septième année, n° 346,
11 décembre 1848.
N/B : 32x41
Le lendemain de l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte paraît cette charge de Daumier : à la
différence d’Émile de Girardin, dont le journal, La Presse, a soutenu la candidature de LouisNapoléon Bonaparte, Victor Hugo semble éprouver quelque difficulté à soulever le nouveau
président de la République juché sur un bouclier et portant le chapeau impérial.
Les caricaturistes associent souvent les deux amis, Victor Hugo et Émile de Girardin. Ainsi,
Quillenbois, dans l’Almanach du 1er janvier 1849, en fait des « Gémeaux » : le jeune Émile
maintient le biberon « Socialisme » de Victor [11] qui porte au milieu du front les symboles
maçonniques [12] de l’équerre et du fil à plomb, et qui a en bandoulière un mirliton, emblème
dérisoire du poète assimilé à un souffleur de vent.
Le 17 juillet 1851, dans son Discours sur la révision de la constitution, Victor Hugo
confirmera sa rupture avec le président de la République : « Quoi ! Après Auguste,
Augustule ! Quoi ! Parce que nous avons eu Napoléon le Grand, il faut que nous ayons
Napoléon le Petit ! »
*** 11
« Actualités – n° 180 », lithographie originale d’Honoré Daumier destinée à un numéro du
Charivari de décembre 1848.
C : 49,7x40
Au lendemain de l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte, certains journaux satiriques
illustrés alimentent et entretiennent la rumeur : Hugo est fort mécontent de ne pas s’être vu
confier un portefeuille ministériel. Ainsi, Nadar (La Revue comique, 23 décembre 1848)
dessine, devant une affiche qui présente le « Nouveau ministère », « quelques nez [qui]
commencent à s’allonger », dont celui de Hugo.
Dans ces « Actualités », Daumier montre un Victor Hugo à la mine renfrognée, qui passe
devant le banc des ministres qui lui font des pieds de nez.
En fait, le jour même de l’élection présidentielle, Victor Hugo écrit à l’un de ses amis, Paul
Lacroix : « Ne voyez pas en moi un ministre, je veux rester l’ami indépendant des lettres et
des lettrés. Je veux l’influence et non le pouvoir, l’influence honnête, probe, éclairée et rien de
plus, rien pour moi surtout. Et toute mon ambition, quand à vous tous vous aurez sauvé la
civilisation et le pays, ce sera de retourner à ma charrue, c’est-à-dire à ma plume. »
Dans l’un de ses Carnets, Victor Hugo relate la cérémonie du 20 décembre qui proclame
Louis-Napoléon Bonaparte président de la République : il sort « seul, et évité comme un
homme qui a manqué ou dédaigné l’occasion d’être ministre », et il ajoute : « Je suis, je veux
être et rester l’homme de la vérité, l’homme du peuple, l’homme de ma conscience. Je ne
brigue pas le pouvoir, je ne cherche pas les applaudissements. Je n’ai ni l’ambition d’être
ministre, ni l’ambition d’être tribun. »
Quelques années plus tard, il dénoncera avec force « la calomnie en circulation » : jamais il
n’a envisagé d’être ministre.
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8
*** 12
« Actualités grotesques », par Quillenbois, Clichy, Imprimerie Paul Dupont, s. d.
N/B : 28x35
Quillenbois a très souvent caricaturé Victor Hugo dans les années 1848-1851, le représentant
avec des emblèmes maçonniques et le bonnet phrygien.
En 1871, quand Victor Hugo témoignera en faveur des Communards, le dessinateur
reprendra l’une de ses anciennes charges pour condamner cette sympathie. L’écrivain, entré
en politique, y est dessiné à califourchon sur un mirliton : pour Quillenbois, les idées de
Victor Hugo, c’est du vent !
Les « Actualités grotesques » reproduisent d’un côté la « profession de foi de Victor Hugo
sous la République de 1848 », et de l’autre l’ancienne charge, enrichie d’une évocation de
Paris, qui connaît en mai 1871 des incendies allumés par les Communards. Quillenbois ajoute
une légende d’une grande violence : « VICTOR HUGO n’a ni moralité politique, ni science
politique, ni idées politiques ; il ânonne trois ou quatre phrases sur l’abolition de la peine de
mort, sur la haine des prêtres et sur la grande âme du peuple ; voilà tout son bagage oratoire.
Il a admis la légitimité de la Commune et offert sa demeure aux survivants de la lutte ; il n’a
de tendresse que pour les assassins, et que de l’indifférence pour les assassinés. »
*** 13
« Déménagement de l’Assemblée constituante », par Nadard [sic], gravé par Pothey, Le
Journal pour rire, deuxième année, n° 69, 26 mai 1849.
N/B : 48x52
Le jour même de la dernière séance de l’Assemblée constituante, Victor Hugo apparaît au
milieu des députés, points d’exclamation moqueurs au front, en crieur favorable au journal
L’Événement.
La légende se gausse d’« Olympio, espèce de Dieu indien, d’après Vacquerie [13], qui, lassé de
contempler en adoration son précieux nombril, s’est fait crieur du soir ; on devrait bien lui
retirer sa permission. »
Le « Déménagement », conduit par Armand Marrast, député-maire de Paris, est ainsi
commenté : « Les Déménageux [14] ont fait leurs petits paquets. Ils ont jeté un dernier
regard au verre d’eau sucrée de la tribune, aux bons fauteuils verts, aux belles dames qui
pourraient être dans les tribunes publiques, – et les voilà qui partent, quelques-uns avec un
gros soupir ; car, si tous sont rappelés, beaucoup ne seront pas réélus. »
Réélu député le 13 mai, Victor Hugo va désormais siéger à l’Assemblée législative.
*** 14
« Croisade contre le socialisme », par Bertall, gravé par Dumont, Le Journal pour rire, 2 juin
1849.
N/B : 50,2x67
À cette date, Victor Hugo ne vote pas encore avec la gauche ; il sympathise avec le Parti de
l’Ordre qui détient la majorité.
Derrière le général Changarnier, Léon Faucher et Odilon Barrot, on le voit, « Seigneur de
L’Événement et autres lieux », « Génie civil », surmonté d’un nimbe, chevauchant « Pet
Gaz », partant en croisade, avec des membres du Comité de la rue de Poitiers, contre les
« socialistes » Leroux et Proudhon, aidés par Croquemitaine et Barbe-Bleue.
La légende précise : « La terreur était à son comble : les propriétaires tremblaient dans leur
immeuble, les rentiers frissonnaient dans leurs coupons, et les agents de change, grands
prêtres du vrai Dieu, osaient à peine murmurer ce cantique d’amour qu’ils viennent chaque
jour adresser à la divinité dans le temple pompeux qu’on appelle la Bourse. Un pareil état ne
pouvait durer, et le besoin d’une croisade se faisait généralement sentir […]. Marchons contre
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ces mécréants qui veulent fouiller nos poches ! Marchons, levons-nous, Dieu le veut ! – Dieu
le veut ! Répéta la foule, et les bataillons se formèrent à l’instant. »
*** 15
« Les représentants représentés – Assemblée législative. 13. », par Honoré Daumier, Le
Charivari, dix-huitième année, n° 201, 20 juillet 1849.
N/B : 32x42,2
Sans doute le succès de Victor Hugo aux élections législatives de mai 1849 – il est élu dixième
à Paris avec 117 069 voix – est-il dû, pour le caricaturiste, à ses publications qui lui ont servi
de piédestal. L’attitude de l’écrivain, « le plus sombre de tous les grands hommes graves », dit
la légende, bras croisés, les sourcils froncés, traduit sa détermination : il ira jusqu’au bout de
son engagement.
Quelques jours avant la parution de cette caricature, Victor Hugo a prononcé un Discours sur
la misère, considéré comme « l’acte décisif de sa vie politique », et dénoncé une manœuvre
de certains députés qui auraient voulu enterrer le projet de M. de Melun, « une commission
de trente membres pour préparer et examiner les lois relatives à la prévoyance et à
l’assistance publique. »
Souvent interrompu, à droite, par des murmures et des dénégations, il n’a cessé d’affirmer la
nécessité de « détruire la misère » avant de conclure : « Vous avez fait des lois contre
l’anarchie, faites maintenant des lois contre la misère ! »
*** 16
« Heureuse influence du Congrès de la paix », par Bertall, gravé par Riault, Le Journal pour
rire, 1er septembre 1849.
N/B : 28x34,5
Hugo quitte d’autant moins la une des journaux satiriques illustrés qu’il est élu président du
congrès international de la paix qui se tient à Paris du 21 au 24 août 1849. Dès le 12 août, il
est dessiné par Fabritzius (La Silhouette), près de deux hommes qui en sont venus aux mains,
se protégeant d’un agresseur inconnu, alors que la légende précise : « Première séance du
Congrès des Amis de la Paix. »
La charge de Bertall introduit une variante quant au traitement habituel de la tête du poète :
une dizaine de pavillons nationaux, ainsi que le « drapeau de la paix universelle », sont
plantés dans son crâne. Hugo s’approche de deux soldats, autrichien et russe [15], qui
malmènent un homme à terre : « Je suis le Congrès de la Paix !!! – Eh bien alors, fichez-nous
la… Vous ne voyez donc pas que nous sommes occupés… à pacifier la Hongrie ? »
Quillenbois met également en doute l’utilité d’un tel congrès en dessinant dans Le
Caricaturiste du 2 septembre « le citoyen Victor Hugo jouant au Congrès de la Paix » et
occupé à faire des « bulles de savon » à l’intérieur desquelles on peut lire « paix », « inter »,
« homines », alors qu’un homme dans l’assistance essaie d’étrangler son voisin.
Dans « La rentrée des vacances » (Le Caricaturiste, 30 septembre 1849), le même
Quillenbois continue d’enfoncer le clou, et qualifie « Totor Hugo » de « moutard d’une
grande turbulence lorsqu’il s’agit de la paix » : il est représenté avec des baïonnettes sur
l’épaule car « il vient de désarmer un poste de gardes nationaux. »
Quant à Daumier, il ne consacre pas moins de quatre charges [16] au congrès de la paix
(« Souvenirs du Congrès de la Paix », Le Charivari, du 6 au 10 septembre 1849), en
soulignant son inanité et en raillant Hugo qui, « dans un discours en trois points démontre le
néant de la gloire militaire et […] prouve par l’exemple que la couronne de lauriers peut être
avantageusement remplacée par la couronne de roses ! Ce qui lui procure l’avantage de faire
un nouvel effet de front. »
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10
*** 17
« Distribution solennelle des prix du Journal pour rire », par Nadar, gravé par Dumont, Le
Journal pour rire, 1er septembre 1849.
N/B : 48x41
Victor Hugo (vers la gauche, au premier rang, tête baissée) ne veut pas voir cette
« distribution solennelle » dans un hémicycle où le dais symbolise désormais la « Royauté
Française », où, écrit Nadar dans la longue légende qui commente la caricature, l’allégorie de
la France, « l’air soucieux et maladif », le « sourcil froncé », s’appuie « sur une béquille ».
Derrière la France, il a représenté les « trois sœurs » : la Liberté porte « des fers aux pieds et
aux mains », l’Égalité est « plus petite que les deux autres », la Fraternité ne cesse pendant la
cérémonie de « quereller, injurier et même un peu battre ses deux sœurs ».
Victor Hugo obtient « un accessit » avec la mention : « Vacqueriana [17], ou le Manuel des
journalistes aquilins. »
Sans doute Nadar veut-il dénoncer aussi l’ambiance nauséabonde de la Chambre en
dessinant, à droite, une vespasienne sur laquelle on peut lire : « Propreté nationale - Berger Edilis Pariensis - 1849. » À cette date, Jean-Jacques Berger, préfet de la Seine (20 décembre
1848 - 22 juin 1853), continue la mise en place dans les rues de Paris de vespasiennes
commencée par l’un de ses prédécesseurs, Claude-Philibert de Rambuteau. Nadar le
représente à gauche de la caricature avec son accessit : « Une fabrique de moutons de
Panurge. »
*** 18
« Encore une loi d’amour et de conciliation », par Nadar, gravé par Dumont, Le Journal pour
rire, 26 janvier 1850.
N/B : 28,3x34,1
Le 15 janvier, dans son Discours sur la liberté de l’enseignement, Victor Hugo a réclamé
« l’instruction gratuite et obligatoire », et souhaité « cette antique et salutaire séparation de
l’Église et de l’État. » Désormais, il s’associe aux votes de la gauche.
On le voit ici, fustigé devant de jeunes élèves par le comte de Montalembert qui porte l’habit
des frères des écoles chrétiennes.
M. de Montalembert avait réfuté en termes vifs et en l’absence de Victor Hugo le discours que
ce dernier avait prononcé le 19 octobre 1849 sur L’Expédition de Rome. Le lendemain, Victor
Hugo était invité par le président de l’Assemblée à lui répondre : « Il fut un temps, que M. de
Montalembert me permette de le lui dire avec un profond regret pour lui-même, il fut un
temps où il employait mieux son beau talent. Il défendait la Pologne comme je défends
l’Italie. J’étais avec lui alors ; il est contre moi aujourd’hui : c’est qu’il a passé du côté de ceux
qui oppriment, et que, moi, je reste du côté de ceux qui sont opprimés. »
*** 19
« Un changement de front » par Quillenbois [18], Le Caricaturiste, revue drôlatique du
dimanche, troisième année, n° 35, 27 janvier 1850
Dans son Discours sur la Liberté de l’enseignement où est évoqué, pour la première fois, « le
droit de l’enfant », Victor Hugo dénonce la tentative du parti catholique d’établir le monopole
de l’instruction publique en faveur du clergé, et il s’en prend aux Jésuites : « Vous êtes les
parasites de l’Église, vous êtes la maladie de l’Église. Ignace [19] est l’ennemi de Jésus. » et à
l’Inquisition : « Lisez l’histoire ! L’inquisition qui a brûlé sur le bûcher ou étouffé dans les
cachots cinq millions d’hommes ! ».
Le portrait-charge [20] de Quillenbois est des plus significatifs : Hugo, très grosse tête,
emblèmes maçonniques au front, bras croisés, air décidé, gravit une pente escarpée au
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sommet de laquelle on peut voir un bonnet phrygien. La légende précise : « Un grand Poète
d’État, poursuivi par la peur des Jésuites et de l’Inquisition, se sauve sur la Montagne. »
Dans une autre charge (Le Caricaturiste, 16 juin 1850), Quillenbois va dessiner « un repas
sur la Montagne » qui peut se passer de légende : Hugo (trois plumes sur la tête, bonnet
phrygien, symboles maçonniques toujours au front) tourne la broche qui permet de rôtir « la
Société », en compagnie d’autres « Peaux-rouges d’Europe » armés de couteaux !
1852-1870
Bien que résidant « là-bas dans l’île », Victor Hugo n’est pas oublié des caricaturistes : non
sans courage, certains ne cachent pas leur sympathie pour l’exilé de Jersey, puis de
Guernesey, qui a publié Châtiments. Mais dame Anastasie – la censure – veille, et il disparaît
de la scène caricaturale jusqu’en 1859, date de la publication de La Légende des siècles
(première série), quelques mois après le décret d’amnistie. Les charges qui accompagnent Les
Misérables, et, plus encore, Les Travailleurs de la mer, en 1866, participent pour beaucoup à
l’image qu’il se forge en exil, celle d’un « homme-océan », déterminé et opiniâtre. Les
caricaturistes accordent désormais à sa tête une importance exceptionnelle par rapport au
reste du corps ou à l’environnement. La barbe qu’il porte depuis quelques années ajoute à la
sagesse, à la force tranquille de l’écrivain qui entre vivant dans la légende.
*** 20
« Une salade dans un crâne », par Bertall, La Semaine des familles, n° 9, 29 novembre 1862.
N/B : 26x35
Le titre de la caricature parodie le titre d’un chapitre des Misérables, « Une tempête sous un
crâne » (Première partie, livre septième, chapitre III). Le texte de Félix-Henri qui
accompagne la caricature, raconte que Victor Hugo est visité pendant son sommeil par
Méphistophélès et Astaroth.
« […] En cet instant même Méphistophélès commençait sa salade diabolique. Armé de ses
deux tronçons de fourches, dont il se servait en guise de couvert de buis, il tournait et
retournait, d’une main infatigable, dans le crâne du poète les idées, les sentiments, les
images, les métaphores, les caractères qui s’y trouvaient en fusion, de manière à produire
dans son cerveau la macédoine la plus étrange, le plus épouvantable gâchis.
Le forçat coiffé du bonnet du bagne et traînant son boulet se trouvait nez à nez avec l’évêque
coiffé de sa calotte et tenant des chandeliers d’argent qu’il lui offrait ; un pain de quatre livres
flottait dans l’air et venait se mettre sous la dent… sous une dent nouvellement arrachée ! un
Cupidon classique voltigeant au-dessus d’un cœur percé d’une flèche mythologique
couronnait le forçat, dont il célébrait l’apothéose drolatique, tandis qu’un sergent de ville à
l’air rogue et au tricorne menaçant, un Javert quelconque, cherchait à l’appréhender au
collet ; un hanneton sorti des Mystères de Paris de M. Sue venait incessamment heurter en
bourdonnant les parois endolories du crâne du poète, tandis que la mouche du coche de la
Fontaine prenait son vol à côté d’une bouteille de vin de Champagne dont le bouchon sautait,
symbole d’une joyeuse orgie.
— Si nous y mettions encore le cygne du Luxembourg ? disait Astaroth.
— Mettons-y le cygne du Luxembourg.
— Et la bataille de Waterloo, sans oublier le gros mot de Cambronne ?
— Va pour Waterloo et pour le gros mot.
— Et un dithyrambe contre les couvents ?
— Va pour le dithyrambe.
— Et une dissertation sur les égouts de Paris ?
— Mettons les égouts.
— Et un gamin de Paris en guise de piment ?
— Va pour le gamin de Paris.
Méphistophélès ne cessait de tourner et de retourner sa salade […]. »
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12
L’article se termine sur le post-scriptum suivant : « Cette légende a été racontée à ma plume
par l’ingénieux et spirituel crayon de Bertall. Plus habile qu’elle, il a résumé pour les lecteurs
de La Semaine des familles le livre des Misérables qu’elle n’aurait pas osé leur raconter. C’est
pourquoi je ne fais que contresigner, ne varietur, son poème traduit en vile prose par son
dévoué collaborateur. »
*** 21
« Victor Hugo », par G. Déloyoti, Le Hanneton, illustré, satirique et littéraire, sixième année,
n° 17, 6 juin 1867.
C : 37x56
Le regard de Victor Hugo, exilé dans l’île de Guernesey depuis le 31 octobre 1855, traduit sa
détermination. Le romancier, avec sa plume, est à la fois Gilliatt, héros des Travailleurs de la
mer, qui a combattu la pieuvre et sauvé La Durande (petit bateau, dans le coin inférieur
droit), et Apollon, avec sa lyre, qui vient de terrasser le Python.
La page 2 du Hanneton propose aux lecteurs un long article d’Amédée Blondeau qui veut
exprimer à « la plus haute et la plus parfaite expression du dix-neuvième siècle » toute son
admiration, tant pour son œuvre littéraire que pour ses engagements. Les derniers
paragraphes saluent « ce rocher perdu dans les flots de la Manche » où Hugo, disent ses
ennemis, « pose ». « Eh bien, soit, c’est de la pose ! réplique Blondeau, mais cette pose qui
commande à Victor Hugo le sacrifice de sa patrie, de sa famille, de ses amis, de la gloire dans
Paris ; cette pose qui fait saigner son cœur, moi, je la trouve sublime. »
*** 22
« Victor Hugo », par Montbard, Le Masque, semaine théâtrale illustrée, première année,
n° 15, 20 juin [1867].
C : 40x56
Le Masque propose sur fond de soleil rougeoyant un étonnant Victor Hugo – Gilliatt,
puissant et déterminé, armé d’un seul levier qui va lui permettre de libérer La Durande des
« deux hauts piliers » des Roches Douvres.
L’article que signe Mario Proth, écrivain et journaliste, ne tarit pas d’éloges sur « Victor
Hugo, l’une des plus éclatantes expressions de la volonté individuelle ».
Pour le remercier d’avoir écrit un article favorable aux Misérables, Victor Hugo l’avait invité à
passer quelques jours dans sa maison d’exil, Hauteville House, à Guernesey : « Je sens aussi
que vous m’aimez […]. J’ai une faiblesse, je dirais presque j’ai une grandeur, j’aime qu’on
m’aime. C’est donc plus qu’un remerciement que je vous envoie, c’est un attendrissement
[...] »
Parmi les nombreuses caricatures qui évoquent Les Travailleurs de la mer, citons celle de
Morland qui paraît le 29 octobre 1866 dans Le Journal amusant, et qui représente, non loin
de La Durande, un gigantesque poulpe avec Gilliatt sur sa tête, Déruchette sur l’un des
tentacules, et Victor Hugo assis à l’entrée de sa bouche, occupé à écrire. La légende ironise à
propos du succès du roman : « Hugo, c’est à toi que je m’adresse. Ce que tu as fait est grand,
noble, généreux. Il eût été triste de mourir sans avoir connu les services qu’une pieuvre peut
rendre à un génie en lui rapportant quelques centaines de mille francs […] »
*** 23
« Victor Hugo » par Étienne Carjat, Le Drôlatique, revue humoristique illustrée, n° 12,
29 juin 1867.
C : 39x55
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C’est un Victor Hugo très élégant, qui croise les bras comme sur certaines photographies
prises à Hauteville House, que propose Étienne Carjat, caricaturiste et photographe. La mer
et le rocher symbolisent l’île de Guernesey. Le texte d’Alfred de Caston qui prolonge la
caricature, est des plus favorables à Victor Hugo : « Revenez parmi nous qui vous aimons.
Quelles que soient les pensées de votre cœur, le sol de votre patrie est assez fort pour
supporter le poids des pas d’un grand poète. »
La Maison de Victor Hugo conserve de nombreuses lettres de Carjat à l’écrivain, dont sont
extraites ces lignes :
- « […] Vous savez que je suis homme à interpréter votre grande figure d’une façon
respectueuse et – passez-moi le mot – intelligente. » ;
- « […] C’est cette autorisation que je sollicite de votre bienveillance amicale. Vous me
connaissez assez pour être certain que je n’abuserai pas de la permission pour faire
une charge désobligeante. Au contraire, j’ai à cœur de vous prouver que si j’exagère un
peu les traits de l’homme, je sais respecter le caractère du poète et du gr. citoyen […] »
*** 24
« Romantisme », par Charles Montbard, Gulliver, journal hebdomadaire illustré, artistique
et comique, première année, n° 4, 19 mars 1868.
C : 39x51,5
Le succès d’Hernani, à sa reprise à la Comédie-Française (20 juin 1867), n’est sans doute pas
étranger à cette charge de Montbard. Le 18 janvier 1868 a lieu la soixante-douzième
représentation du drame, et, quelques jours plus tard, François-Victor Hugo écrit à son père :
« A Paris, le public a la modestie de ne pas juger Hernani ; il sait qu’il n’a qu’à contempler et
à admirer le chef-d’œuvre. Il le contemple et il l’admire. Dimanche, le Théâtre-Français a fait
une recette énorme, dont sont fort contrariés les gens du gouvernement. Quel que désir qu’on
en ait, il est impossible de supprimer purement et simplement une pièce qui fait, à la 72e
représentation, plus de 6 000 francs de recettes. »
Hugo qui est représenté dans un décor médiéval (château fort, tourelles et clochers) comme
le porte-drapeau du romantisme, écrivait dans la préface de son drame : « Jeunes gens, ayons
bon courage ! Si rude qu’on nous veuille faire le présent, l’avenir sera beau. Le romantisme,
tant de fois mal défini, n’est à tout prendre, et c’est là sa définition réelle si l’on ne l’envisage
que sous son côté militant, que le libéralisme en littérature. Cette vérité est déjà comprise à
peu près de tous les bons esprits, et le nombre en est grand ; et bientôt, car l’œuvre est déjà
bien avancée, le libéralisme littéraire ne sera pas moins populaire que le libéralisme
politique. La liberté dans l’art, la liberté dans la société, voilà le double but auquel doivent
tendre d’un même pas tous les esprits conséquents et logiques ; voilà la double bannière qui
rallie, à bien peu d’intelligences près (lesquelles s’éclaireront), toute la jeunesse si forte et si
patiente aujourd’hui. »
*** 25
« Victor Hugo », par Victor Collodion, Le Gaulois, quatrième année, deuxième série, n° 38,
10 janvier 1869.
C : 38x54
Collodion a recours au procédé de la très grosse tête pour cette caricature qui s’inspire d’une
illustration des Voyages de Gulliver : Hugo est maintenu au sol par des filins tendus par de
petits personnages – les Lilliputiens – qui ressemblent tous à Napoléon III. L’exilé, dont la
tête est auréolée de rayons, tient à la main un livre où l’on peut deviner les mots « Liberté » et
« Lumière » qui renvoient au dernier vers de « Stella » (Les Châtiments) :
« C’est l’ange Liberté, c’est le géant Lumière ! »
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14
L’article de la deuxième page du Gaulois, signé « La Rédaction », ne cache pas une vive
sympathie avec l’exilé : « En ce temps de défaillances sans nombre, de trahisons, de
concessions et de défaites, il est un homme qui est demeuré inébranlable dans sa foi,
invinciblement fidèle à la parole donnée, et qui, après avoir ébloui le monde par l’éclat de son
génie, l’étonne et le réconforte par l’exemple de ses vertus civiques […]. Admirable poète,
grand citoyen, permets que quelques jeunes et obscurs combattants de la pensée te
saluent ! »
Dix ans plus tôt, le 18 août 1859, Victor Hugo avait refusé l’amnistie de Napoléon III :
« Fidèle à l’engagement que j’ai pris vis-à-vis de ma conscience, je partagerai jusqu’au bout
l’exil de la liberté. Quand la liberté rentrera, je rentrerai. »
*** 26
« Là-bas dans l’île », par Gill, La Lune rousse, deuxième année, n° 94, 22 septembre 1878.
C : 71x57
La caricature de Gill a été réalisée pendant le dernier séjour de Victor Hugo à Guernesey, en
1878. Elle symbolise la force tranquille de Hugo-lion, indifférent aux attaques dont il est
l’objet, et qui voisine avec le soleil.
Le titre de la charge renvoie à un vers de Banville :
« Mais le père est là-bas, dans l’île. »
(Ballade de Victor Hugo, père de tous les rimeurs)
et la légende à un vers de La Légende des siècles (Première série, V, « Les chevaliers
errants », I, « Le petit roi de Galice », VIII, « Pacheco, Froïla, Rostabat ») :
« Combien de poux faut-il pour manger un lion ? »
Quelques jours avant la parution de la charge de Gill, Victor Hugo répondait au président de
la Ligue internationale de la paix et de la liberté : « Je suis retenu ici, mais vous savez
combien je m’associe du fond du cœur à la grande œuvre de Liberté et de Paix. »
1870-1875
La première édition française des Châtiments, en octobre 1870, donne lieu à de
nombreux portraits-charges de celui qui a attendu la chute du Second Empire
pour rentrer en France : on le représente réglant ses comptes avec l’exempereur. Il en ira de même, quelques années plus tard, à l’occasion de la
publication d’Histoire d’un crime, où Victor Hugo devient « le justicier ».
Entre-temps, certains caricaturistes soulignent les difficultés du député« dompteur » à se faire entendre de l’Assemblée-« ménagerie » dominée par la
droite, dénoncent son attitude à l’égard des Communards, et ironisent lors de
son échec aux élections partielles de 1872. En revanche, d’autres saluent son
entrée au Sénat (janvier 1876) et applaudissent le « grand citoyen » qui ne
cesse de se battre en faveur de l’amnistie. Mais la reprise de ses drames et la
publication de Quatrevingt-Treize [21] font quasiment l’unanimité : il est de
plus en plus souvent dessiné la tête ceinte de lauriers ou nimbée, un soleil ou
une étoile au front. Il est en marche vers la « panthéonisation ».
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15
*** 27
« Victor Hugo », par Faustin, en vente chez Duclaux, 21 place du Château-d’Eau, lith.
Lemaine et fils, rue de Cléry, dépôt chez Madre, 20 rue du Croissant, novembre 1870.
N/B : 36x42,7
La charge de Faustin est d’une grande force : Victor Hugo, tête plus grande que le corps, Les
Châtiments sous le bras, écrit avec sa plume de « justicier » le mot « Veritas », tout en posant
les pieds sur la chaîne de fer de l’ex-empereur.
Un quatrain extrait des Châtiments (Livre premier, « La société est sauvée », II, « Toulon »)
évoque l’énorme boulet du prisonnier :
« Va, bandit [22] ! Ce boulet que, dans des temps stoïques,
Le grand soldat, sur qui ton opprobre s’assied,
Mettait dans les canons de ses mains héroïques,
Tu le traîneras à ton pied ! »
*** 28
« Les représentants en représentation », par Pilotell, chez Deforest & César, rue Neuve des
Petits-Champs, 64, Imprimerie Talons, Marché Saint-Honoré, 19, [1871].
C : 26x34
Le 3 octobre, Victor Hugo note dans son Carnet : « Nadar est venu ce soir me demander mes
lettres pour un ballon qu’il va faire partir après-demain. Il emportera mes publications. »
On peut suivre les péripéties du ballon dans le Carnet :
« 5 octobre : Le ballon de Nadar appelé le Barbès, qui emporte mes lettres, etc., est parti ce
matin ; mais, faute de vent, a dû redescendre. Il partira demain. On dit qu’il emportera Jules
Favre et Gambetta. »
« 7 octobre : Ce matin, en errant sur le boulevard de Clichy, j’ai aperçu, au bout d’une rue
entrant à Montmartre, un ballon. J’y suis allé. Une certaine foule entourait un grand espace
carré, muré par des falaises à pic de Montmartre. Dans cet espace se gonflaient trois ballons
[…]. On chuchotait dans la foule : “Gambetta va partir” ! Le départ a eu lieu, les ballons sont
montés. »
« 17 octobre : Demain, on lance, place de la Concorde, un ballon-poste qui s’appelle le Victor
Hugo. J’envoie par ce ballon une lettre à Londres. »
« 20 octobre : Les journaux annoncent que le ballon Victor Hugo est allé tomber en Belgique.
C’est le premier ballon-poste qui a franchi la frontière. »
Le 5 juillet 1879, Victor Hugo, accompagné de la fidèle Juliette Drouet, montera dans un
ballon captif à trois cents mètres au-dessus de la cour des Tuileries.
*** 29
« Le Musée-Homme ou le Jardin des Bêtes », par Faustin, Saillant, Éditeur, rue du Croissant,
5 à 10, Lith. Barousse à Paris, [1871].
C : 29x39
Paris étant assiégé par les Prussiens, Victor Hugo siège avec les députés à Bordeaux. Le
13 mars 1871, il note dans son Carnet : « Sept heures du soir, Charles est mort […]. M. Porte
[23] m’a dit que Charles, ayant pris un fiacre pour venir chez Lanta [24], avait donné l’ordre
au cocher d’aller d’abord au Café de Bordeaux. Arrivé au Café de Bordeaux, le cocher en
ouvrant la portière avait trouvé Charles mort. Charles avait été frappé d’apoplexie
foudroyante. Quelque vaisseau s’était rompu. Il était baigné de sang. Ce sang lui sortait par le
nez et par la bouche. Un médecin appelé a constaté la mort. »
Charles est enterré cinq jours plus tard, au cimetière du Père-Lachaise, à Paris, alors que
commence l’insurrection de la Commune.
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16
Le dessin de Faustin est plus une allégorie qu’une caricature. Le cèdre du Liban, planté par
Jussieu au Jardin des Plantes en 1734, illustre le drame du poète qui pleure la mort de son
fils.
Les trois vers qui servent de légende, sont extraits des Châtiments (Livre V, « L’autorité est
sacrée », XIII, « L’Expiation ») :
« Et lui, chêne [25] vivant, par la hache insulté,
Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,
Il regardait tomber autour de lui ses branches. »
*** 30
« Fleurs, fruits & légumes du jour – L’églantine », par Alfred Le Petit, au bureau de L’Éclipse,
16, rue du Croissant, Paris, Imprimerie Coulbœuf, Paris, 22 mars 1871.
C : 26x36,7
La caricature paraît le jour où Victor Hugo arrive à Bruxelles pour régler la succession de son
fils Charles : « 22 mars : Nous descendons, moitié Hôtel de la Poste, moitié place des
Barricades. »
À Paris, dans les théâtres, l’on continue de faire des lectures des Châtiments.
Sous le crayon d’Alfred Le Petit, Victor Hugo, pâle soleil au front, devient églantine. Un éclair
sur lequel est écrit Les Châtiments, part du buisson et atteint Napoléon III [26] dont la
couronne est à terre. Les griffes d’un monstre à tête de mort vont s’en emparer.
Un quatrain dédié à « M. Vor Hugo » accompagne la caricature :
« Ce vieil et robuste églantier,
Toujours fleuri de nobles roses,
N’eut des épines sans quartier
Que pour les méprisables choses. »
*** 31
« Un cri !… », par E. Rosembeau, Le Grelot, première année, numéro 4, 30 avril 1871.
N/B : 38x44
Le 19 avril 1871, le journal Le Rappel [27] a publié un poème de Victor Hugo intitulé « Un
cri », qui dénonce les violences commises par les Communards et les Versaillais, et qui sera
inséré dans le recueil L’Année terrible (« Avril », IV).
Quatre vers qui en sont extraits, servent de légende à la caricature :
« Arrêtez ! C’est le deuil qui sort de vos succès.
Chaque coup de canon de Français à Français
Jette, – car l’attentat à sa source remonte, –
Devant lui le trépas, derrière lui la honte. »
Jouant sur les mots « cri » et « cric », Rosambeau représente Hugo entre Thiers, qui a été
nommé chef du pouvoir exécutif le 17 février, et qui porte une épée démesurée, et l’allégorie
de la Commune qui tient une sorte de batte sur laquelle on lit : « La République ou la Mort »,
qui reprend la devise révolutionnaire sous la Terreur, « la Liberté ou la Mort ».
Sous la caricature, une phrase semble en écho avec le premier vers du poème de Victor Hugo
– « Quand finira ceci ? » – : « Les gens sages demandent que cette affreuse guerre civile
finisse. L’on voudrait voir, chargés de poudre somnifère, les chassepots dormir et les canons
cesser de ronfler. »
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17
*** 32
« Victor Hugo, avant la lettre – Une salade sous un crâne », par Bertall, Le Grelot, première
année, numéro 9, 11 juin 1871.
C : 38,5x54,5
Le 27 mai 1871, L’Indépendance belge publie une lettre de Victor Hugo dans laquelle il offre
aux proscrits de la Commune asile dans sa maison de la place des Barricades, à Bruxelles.
À peine la lettre est-elle publiée que les charges se multiplient : la caricature retrouve de son
mordant et de sa causticité.
Bertall s’inspire de son propre dessin du 29 novembre 1862 (voir la caricature n° 20). Un
diable accompagne la main de Victor Hugo en train d’écrire sa lettre, tandis qu’un autre
remue dans son cerveau des insectes, dont une araignée [28], un chat noir, le drapeau rouge
de la Commune. À noter le décor qui évoque Paris mis à feu et à sang.
Les propos de Bertall sont très vifs : le cerveau « qui renferme le génie du grand poète de
notre temps » est « troublé » ; il est « en proie à je ne sais quelle fièvre, à je ne sais quel
enivrement […]. »
Le 30 juin, le gouvernement belge expulse Hugo dont la maison a été attaquée, dans la nuit
du 27 au 28 mai, par des voyous réactionnaires : il va partir pour le Luxembourg.
*** 33
« L’éclipse du 7 janvier », par F. Rey, L’Éclipse, cinquième année, n° 168, 14 janvier 1872.
C : 39x54,5
La prise de position de Victor Hugo en faveur des Communards explique sans doute son
échec aux élections partielles de Paris, le 7 janvier 1872 : bien que soleil rayonnant, lors d’une
élection partielle, il est battu (95 900 voix contre 122 435) par le président du conseil général,
Vautrain, transformé en chandelle, qui lui fait un pied de nez.
Il note dans son Carnet à la date du 13 janvier : « 4e répétition de Ruy Blas. J’y [théâtre de
l’Odéon] suis allé. Sur le trajet, je voyais les passants attroupés devant les kiosques regardant
une estampe publiée par L’Éclipse qui représente le soleil auquel une chandelle fait le pied de
nez. Le soleil est Victor Hugo, la chandelle est Vautrain. »
Le 8 janvier, Juliette Drouet envoie à son « grand bien-aimé » une lettre de réconfort : « Loin
de t’adresser des condoléances sur ta non-élection, je t’envoie au contraire toutes mes tendres
félicitations d’avoir échappé à cette lourde tâche […]. Il te sera plus facile de rallier autour de
toi une gauche plus accessible à ta politique de dévouement, d’abnégation et de courage,
dehors que dedans. »
Le 21 janvier, dans Le Grelot, Alfred Le Petit va reprendre le titre du roman publié trois ans
plus tôt, L’Homme qui rit, et dessiner sur une balançoire Victor Hugo, tout surpris de son
échec – il a un gigantesque point d’interrogation au front – et Vautrain qui laisse éclater sa
joie.
Le 30 janvier 1876, Victor Hugo sera élu sénateur de la Seine.
*** 34
« Victor Hugo », par V. Morland, Le Sifflet, deuxième année, n° 90, 5 octobre 1873.
C : 38x55,7
La charge de Morland représentant Victor Hugo avec l’Etna sur le corps peut surprendre. Elle
illustre quelques vers de La Libération du Territoire (Actes et paroles III, « Depuis l’exil »
XVI, et Toute la lyre, « La Corde d’airain », XI) publiés en plaquette le 16 septembre :
« Non, je ne suis pas libre. Ô tremblements de terre !
J’entrevois sur ma tête un nuage, un cratère,
Et l’âpre éruption des peuples, fleuve ardent ;
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Je râle sous le poids de l’avenir grondant,
J’écoute bouillonner la lave sous-marine,
Et je me sens toujours l’Etna sur la poitrine ! »
On lit dans son Carnet : « 14 septembre : La Libération du Territoire s’imprime chez Claye.
Elle paraîtra en brochure. J’ai mis sur le titre au profit des Alsaciens-Lorrains. 50 centimes.
Toute la vente ira à la caisse de secours des Alsaciens. »
« 17 septembre : force citations de La Libération du Territoire dans les journaux. »
*** 35
« Victor Hugo », par André Gill, L’Éclipse, huitième année, n° 357, 29 août 1875.
C : 39x55
Le dessin-charge de Gill qui représente Victor Hugo sculptant les bustes de Robespierre,
Danton et Marat, aurait dû paraître peu après le 19 février 1874, date de la publication de
Quatrevingt-treize [29].
Mais la charge a été victime de la censure comme le rapporte Hugo lui-même dans son
Carnet à la date du 24 février 1874 : « M. E. Douay, du journal L’Éclipse, est venu hier et m’a
raconté que la censure venait d’interdire un dessin d’André Gill représentant Victor Hugo,
statuaire, sculptant les bustes de Robespierre, de Danton et de Marat avec une petite figure
d’enfant mêlée à ces hommes. »
L’Éclipse du 22 mars 1874 précise ses démêlés avec la censure et verse au dossier une lettre
de Hugo : « J’ai vu le beau dessin d’André Gill. Il n’est pas seulement beau, il est charmant.
L’enfant mêlé à ces figures sévères et terribles exprime gracieusement et gaiement la pensée
du livre : Quatrevingt-treize, et il est bon que, là où les passions humaines font trembler,
l’innocence fasse sourire. Victor Hugo. » L’article du journal se termine ainsi : Gill « avait fait
un grand dessin sur un grand livre. Il a oublié que son crayon était corvéable des petits
hommes qui ne servent que les petites haines. »
1876-1885
À la réserve de quelques rares journaux, notamment Le Triboulet dont la devise est « Dieu et
le roy », la presse satirique illustrée rend hommage, dans les dernières années de sa vie, à
l’écrivain et à l’homme engagé dans les luttes de son temps. Victor Hugo, glorifié, devient
véritablement le père de la République, voire un dieu de l’Olympe, quand ce n’est pas Dieu
lui-même. Progressivement, ses portraits en pied laissent place à son buste ou à sa seule tête,
puis à un soleil, à une étoile, à un nuage. En contrepartie, les articles qui accompagnent ces
dessins de plus en plus symboliques, s’étoffent et ne cessent de célébrer « l’ombre auguste »,
« le génie », « l’éclatant soleil » : c’est, comme l’écrit Gilbert-Martin, pour vivre une
« apothéose » que le peuple de Paris accourt en foule au Panthéon le 1er juin 1885.
*** 36
« Victor Hugo », d’Amand [Vaché], E. Lyon-Claesen, éditeur, Bruxelles, [1876].
C : 36x44
La caricature d’Amand Vaché n’est pas sans rappeler certaines photographies de l’écrivain,
assis dans un fauteuil, près d’une table sur laquelle sont disposés des livres, notamment celles
qui ont été prises par Nadar ou Waléry.
C’est un écrivain (grande plume d’oie à la main) élégant, prolifique – romancier (NotreDame de Paris, Les Misérables, Les Travailleurs de la mer, L’Homme qui rit), poète (volume
de Poésies, Châtiments) et dramaturge (Hernani, Marion de Lorme) – et génial (une étoile
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19
au-dessus de la tête) que représente le dessinateur. À noter qu’Amand Vaché a mis au revers
gauche de la veste de Victor Hugo la rosette d’officier de la Légion d’honneur [30].
*** 37
« L’Olympe », par Gilbert-Martin, Le Don Quichotte, troisième année, n° 109, 22 juillet 1876.
C : 74x56
Élu sénateur de la Seine au début de l’année 1876, Victor Hugo n’aura de cesse qu’il
n’obtienne l’amnistie des Communards. Le 22 septembre de la même année, il écrit au
rédacteur en chef de La Sentinelle de Nancy : « Mon vaillant et cher confrère, Vous me
demandez mon sentiment sur les prochaines élections. Les voici. Avant tout, l’amnistie.
L’amnistie est le premier et le dernier mot de la situation actuelle. Je rejette, quant à moi,
tout candidat qui n’accepte pas l’amnistie pleine et entière. L’épreuve du système des grâces
partielles est faite. Ce que nous avons prédit s’est réalisé. Donc, l’amnistie ! Je vous serre la
main. Victor Hugo. »
Cette fresque caricaturale, réalisée deux mois après son discours au Sénat [31] en faveur de
l’amnistie, le montre au milieu de l’Olympe. Un poème sert de légende :
« Puis vient Hugo-Prométhée,
Car ce rêveur de génie,
Dont la cervelle agitée
Joue un bien différent jeu,
Au foyer de l’amnistie
Vient chiper un peu de feu ! »
Une autre caricature, intitulée « Les grandes eaux de Versailles » et due à G. L. [abréviation
de Georges Lafosse] (Dimanche-Programme, 27 août 1876), fait aussi de Victor Hugo un
personnage mythologique, proche de Neptune, qui jette un regard noir au ministre de
l’Intérieur, Oscar Bardy de Fourtou, qui s’oppose à sa proposition d’amnistie.
*** 38
« Le nouveau livre de Victor Hugo », par Gill, Yves & Barret sc., Paris, Paul Genay, imprimeur
du journal La Lune rousse, [1877].
C : 38x53
Nombreuses sont les caricatures à la publication de L’Histoire d’un crime (premier tome :
1er octobre 1877 ; second : 15 mars 1878). Elles pourraient illustrer les mots de Baudelaire (De
l’essence du rire) : « Elles ont droit sans doute à l’attention de l’historien […] ; elles doivent
prendre leur rang dans les archives nationales. »
Celle de Gill, prévue pour le numéro de La Lune rousse du 7 octobre 1877, est interdite ; le
journal précise : « Notre dessin refusé avait trait au nouveau livre de Victor Hugo. Il
représentait le Maître en robe de juge, écrivant son œuvre sur un bronze où se lisait : Le
crime du deux décembre, et mesurant du regard l’aigle de l’Empire étendu à ses pieds. La
censure n’a pas voulu tolérer ce croquis dépourvu d’enthousiasme pour l’oiseau
bonapartiste. C’est pourquoi nos lecteurs devront se contenter, pour aujourd’hui, d’une
réclame à l’Eau Bazana, où la République, d’ailleurs, montre de belles dents. Amen ! La Lune
rousse. »
Néanmoins, la charge verra le jour sous forme d’un tiré à part.
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20
*** 39
« Le carnaval des journaux », par H. Demare, Le Carillon, deuxième année n° 14, 10 février
1877.
C : 68x53
Henri Demare renoue avec la tradition des « panthéons » chers aux caricaturistes, et en
particulier à Nadar : un long cortège de personnalités. À l’occasion de la mi-carême, plus
grand que les autres personnages, Victor Hugo, tambour-major de la République française,
est en tête d’un défilé de journalistes et d’écrivains. On reconnaît notamment Auguste
Vacquerie, Gambetta, Francisque Sarcey, Émile Zola, Catulle Mendès.
Le jour où paraît cette caricature, Victor Hugo écrit l’un des poèmes de La Légende des
siècles (Nouvelle série, XVIII « Le Groupe des idylles », XVIII « Voltaire »).
*** 40
« Victor Hugo », par Gill, La Lune rousse, 8 mars 1877.
C : 53x75
André Gill consacre une double page du journal pour illustrer la dernière phrase du message
(Actes et paroles III, « Depuis l’exil »), adressé par Victor Hugo, le 26 février 1877, au comité
d’organisation du Cercle des écoles qui l’a sollicité : « Mes jeunes et chers concitoyens, Je
vous approuve. Votre fondation est excellente. La fraternité dans la jeunesse, c’est une force à
la fois grande et douce. Cette force, vous l’aurez. Toute la clarté de la conscience est dans
votre généreux âge. Vous serez la coalition des cœurs droits et des vaillants esprits, contre le
despotisme et le mensonge, pour la liberté et la lumière. Vous continuerez et vous achèverez
la grande œuvre de nos pères : la délivrance humaine. Courage ! Soyez les serviteurs du droit
et les esclaves du devoir. Votre ami, Victor Hugo. »
Protecteur de l’enfant, le poète, qui a la force du lion, rayonne dans les ténèbres.
*** 41
« Le Justicier », par Alfred Le Petit, Le Pétard, deuxième année, n° 40, 24 mars 1878.
C : 36x51
Le titre de cette charge qui paraît neuf jours après la publication du second tome de
d’Histoire d’un crime, est bien choisi : c’est effectivement en « justicier » qu’apparaît Victor
Hugo qui vient de marquer au fer rouge le front de l’ex-empereur.
On pense aux vers de « L’Homme a ri » (Les Châtiments, Livre III, « La Famille est
restaurée », II) :
« […] Dans ton triomphe abject, si lugubre et si prompt,
Je t’ai saisi. J’ai mis l’écriteau sur ton front ;
Et maintenant la foule accourt et te bafoue,
Toi, tandis qu’au poteau le châtiment te cloue,
[…] Ton rire sur mon nom gaiement vient écumer ;
Mais je tiens le fer rouge et vois ta chair fumer. »
Le journal reproduit un extrait d’Histoire d’un crime, précédé d’un bandeau : « Il y a de ces
choses qui éblouissent et que l’esprit humain ne peut analyser. Comme le rayon de soleil, le
génie, cette autre étincelle divine, est impondérable, et dans les régions sidérales il existe des
limites que nous ne saurions franchir. »
*** 42
« Victor Hugo », par Gill, Les Hommes d’aujourd’hui, n° 1, [septembre 1878].
C : 27,1x35,2
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21
C’est Victor Hugo qui inaugure la longue série – 142 numéros – des Hommes d’aujourd’hui,
avec cette caricature de Gill, qui est dénuée de toute volonté satirique et qui participe à la
gloire de l’écrivain. Le poète illumine le monde entier. Gill n’a jamais caché son admiration
pour son « Maître auguste et bien vénéré ».
Le 29 mai 1867, il lui avait écrit : « Laissez-moi vous dire que je vous aime, que je vous
admire et que vous êtes mon Maître auguste et bien vénéré depuis l’âge [32] où j’ai su lire, où
j’ai pu comprendre. Je vous remercie de toute mon âme et je vous supplie, si jamais je
pouvais, moi, chétif, vous être bon à quelque chose, de disposer de moi comme d’un homme à
vous. »
*** 43
« En classe », par H. Demare, Le Carillon, troisième année, n° 45, 9 novembre 1878.
C : 52x39
Cette caricature d’Henri Demare, qui évoque la rentrée parlementaire, est publiée le jour où
Victor Hugo quitte Guernesey pour Paris : il était allé se reposer quelques mois dans l’île.
Le 10 novembre, il s’installe avec Juliette Drouet 130 avenue d’Eylau, qui va devenir, trois ans
plus tard, par décret du conseil municipal de Paris, l’avenue Victor Hugo.
Quelques jours plus tard, il écrit (Actes et paroles, III, « Depuis l’exil ») aux rédacteurs du
journal Le Petit Nord : « Servir le pauvre, aider le faible, renseigner le citoyen, affermir la
République, en un mot, agrandir la France, déjà si grande, tel sera votre but ; d’avance,
j’applaudis. Donnez au peuple tout l’appui paternel qu’il réclame et qu’il mérite ; traitez-le
doucement, car il est souffrant, et grandement, car il est souverain. »
Le caricaturiste l’a représenté, le visage grave, dominant les autres sénateurs, portant sous
chaque bras le texte d’une future intervention, peut-être son discours en faveur de l’amnistie
« pleine et entière » des Communards.
*** 44
« Amnistie ! », par Gill, La Petite Lune, n° 34, [1879].
C : 26,3x36,4
Une nouvelle fois, André Gill exprime sa sympathie envers Victor Hugo qui a prononcé le
28 février 1879 son second discours (Actes et paroles, III, « Depuis l’exil ») au Sénat en faveur
de l’amnistie des Communards : « Quel précipice fut plus profond que le vôtre ? Quelle sortie
est plus éclatante ? Continuez cette sortie admirable. Montrez comment un peuple magnanime
sait préférer à la haine la fraternité, à la mort la vie, à la guerre la paix. Il est bon qu’après tant
de luttes et d’angoisses, une puissante nation sache prouver au monde qu’elle répond par la
grandeur de ses actes à la grandeur de ses institutions. Quel mal y aurait-il à ce qu’on pût dire :
la France a eu un moment terrible ; il y avait d’un côté la Commune, menaçant la magnifique
fondation de 93, l’unité nationale ; il y avait de l’autre côté trois monarchies et le pouvoir
clérical ; ces forces obscures se sont livré bataille… Vous êtes alors intervenus ; vous avez saisi
les deux forces et les avez brisées l’une sur l’autre, et vous en avez extrait la clémence, la vraie
clémence, – l’oubli. Et c’est ainsi que dans l’ombre et dans la nuit, la République, la
République souveraine, la République toute-puissante, a su, du choc de deux blocs de
ténèbres, faire jaillir la lumière. »
Le dessinateur a représenté le « vieux briseur de fers », qui a conservé, en dépit de son âge,
une énergie indomptable au service des libertés.
*** 45
« Victor Hugo, comte Victor-Marie », par B. Moloch, Trombinoscope par Touchatout,
juillet 1881.
C : 24,1x33
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22
À l’occasion de la publication des Quatre Vents de l’Esprit, le 31 mai 1881, Le Trombinoscope
propose à ses lecteurs une notice biographique de huit pages illustrées par Moloch.
Le procédé de la grosse tête n’est pas railleur ; au contraire, il met en évidence « le plus
profond des penseurs » dont la petite-fille, Jeanne, si présente dans L’Art d’être grand-père
publié le 14 mai 1877, serre tendrement la main qui tient la plume.
La publication des Quatre Vents de l’Esprit inspire également Sapeck (La Chronique
parisienne, 12 juin 1881) qui rend hommage au poète, à son esprit, sur lequel soufflent ou
sifflent quatre têtes ailées : « Ton front est toujours tourné vers les étoiles ! » lit-on dans un
poème en page 2 du journal.
De plus en plus souvent, c’est le visage quasi photographique du « grand-père » que toute la
France connaît, qui est représenté. Les caricatures s’effacent au profit de portraits
allégoriques qui mettent en valeur les vertus républicaines de l’écrivain. Ainsi, L’« Hommage
aux morts de la libre-pensée » de H. Demare, paru dans la prime de La Semaine anticléricale
(octobre-novembre 1881), est des plus symboliques : non seulement Hugo a une tête double
de celle des autres héros (Voltaire, Rousseau, Diderot, Michelet, etc.), mais il porte au front
une étoile d’où partent des rayons, et il reçoit de la France « les clefs du Panthéon ». Deux
strophes du poète prolongent cet « hommage » :
« Gloire à notre France éternelle !
Gloire à ceux qui sont morts pour elle ! […] »
*** 46
« Le vieux Orphée », par Gilbert-Martin, Le Don Quichotte, neuvième année, n° 418, 23 juin
1882.
C : 38,7x55,3
Dans la lettre du 26 juin 1882 adressée à son cher Victor qui a rencontré quelques jours avant
des représentants de Juifs opprimés par les Russes, Juliette laisse parler son cœur : « À
propos du massacre des Juifs où on te supplie d’élever la voix pour faire cesser ce crime de
lèse humanité, je joins mon humble voix à celles de tous ces malheureux opprimés et
persécutés aux noms des préjugés et de la barbarie les plus ignorants et les plus féroces, ceux
de la Russie. Je te dis cela très mal, mais je sens qu’il se commet là quelque chose d’injuste et
d’odieux qui mérite ton attention et ton intervention. »
Le 1er juin, Victor Hugo rédige un Appel qui paraît dans Le Rappel du 19 sous le titre Les Juifs
– La Russie : « […] Ce qui se dresse en ce moment, ce n’est plus un crime, c’est de la
monstruosité. Un peuple devient monstre. Phénomène horrible […]. Trente villes (vingt-sept
selon d’autres) sont en ce moment en proie au pillage et à l’extermination ; ce qui se passe en
Russie fait horreur ; là un crime immense se commet, ou pour mieux dire une action se fait,
car ces populations exterminantes n’ont même plus la conscience du crime ; elles ne sont plus
à cette hauteur ; leurs cultes les ont abaissées dans la bestialité ; elles ont l’épouvantable
innocence des tigres […]. »
La publication de cet Appel et celle de Torquemeda (26 mai 1882) inspirent ce « vieux
Orphée » à Gilbert-Martin qui oppose la sérénité du poète qui joue de la harpe, avec, à ses
pieds, son Appel et son drame, à la férocité des tigres [33] qui attaquent, dans les ténèbres,
hommes, femmes et enfants.
*** 47
« Auguste Vacquerie », par Alfred Le Petit, Le Frondeur, première année, n° 33, 15 octobre
1882.
C : 27,3x36,2
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23
Auguste Vacquerie, frère de Charles, le mari de Léopoldine Hugo, a été souvent raillé pour sa
fidélité et même sa « dévotion » envers le « Maître ». Une caricature de Gill, parue dans
L’Éclipse du 3 novembre 1872, le représente en thuriféraire encensant les tours de NotreDame de Paris qui dessinent un « H » majuscule, prolongé par les lettres « UGO ». Une autre
(« Le sanctuaire du Rappel », La Caricature, 12 mars 1877) le montre en compagnie de Paul
Meurice, fidèle ami de Victor Hugo, et d’autres thuriféraires, encensant un autel [34] audessus duquel rayonne la tête de Victor-Dieu le Père.
Collaborateur du Rappel qu’il a fondé en 1869 avec Paul Meurice, Henri Rochefort, Charles et
François-Victor Hugo, Auguste Vacquerie apparaît drapé dans une feuille du journal qui lui
sert de chape, portant un ostensoir dont l’hostie est remplacée par le visage de Victor Hugo.
Le nom de l’écrivain, ainsi déifié, figure sur les rayons inférieurs de l’ostensoir.
Le dernier vers du quatrain qui sert de légende, parodie une tradition prophétique de l’Islam
(« hadîth ») – « Il n’y a de Dieu que Dieu, et Mahomet est son prophète » – :
« Devant un Christ en bois, Messieurs Luc ou Bertrand
Peuvent se prosterner, pour eux c’est jour de fête ;
Hugo, voilà le Dieu, qui seul lui paraît,
Et nouveau Mahomet, Auguste est son prophète. »
*** 48
« Soleil couchant », par Alfred Le Petit, Le Grelot, treizième année, n° 622, 11 mars 1883.
C : 38,7x55,2
À l’occasion du quatre-vingt-unième anniversaire de Victor Hugo, un banquet est organisé le
27 février 1883 à l’hôtel Continental, à Paris.
Le Rappel précise que ce banquet « a eu l’éclat qu’on était en droit d’en attendre. Dès sept
heures, la foule des souscripteurs emplissait le vaste salon de l’hôtel Continental. À huit
heures on a passé dans la belle salle à manger qui est la salle des fêtes. »
Le Grelot propose, deux mois avant la mort de Juliette Drouet, une charge au titre
significatif, « Soleil couchant », où Hugo, visage émacié, est au milieu de ceux qui se sont
réunis. La scène a quelque chose de biblique : en partie au-dessus des nuages, Hugo semble
préparer son ascension et impose les mains sur ses « disciples ». La légende reproduit le
discours (Actes et paroles, III, « Depuis l’exil ») de Victor Hugo : « C’est avec une profonde
émotion que je remercie ceux qui viennent de m’adresser des paroles si cordiales, et que je
vous remercie tous, mes chers confrères. Et dans le mot confrères, il y a le mot frères. Je vous
serre la main à tous avec une fraternelle reconnaissance. »
Le Rappel conclut son article : « Une longue acclamation a remercié le grand poète de son
remerciement. Puis, on est revenu dans le salon où, jusqu’à minuit s’est prolongée la belle
fête, que tous les assistants espèrent bien renouveler encore bien des années. »
*** 49
« Mort de Victor Hugo », par Pépin, Le Grelot, quinzième année, n° 738, 31 mai 1885.
C : 40,1x54,1
La charge de Maurice Pépin est publiée le jour où le corps de Victor Hugo, mort le 22 mai
1885, est exposé sous l’Arc de Triomphe, et elle traduit la tentative, vaine, de l’archevêque de
Paris, Guibert, d’obtenir de la famille de l’écrivain des obsèques religieuses, alors que Victor
Hugo avait écrit, dans un codicille du 2 août 1883 : « Je donne cinquante mille francs aux
pauvres. Je désire être porté au cimetière par leur corbillard. Je refuse l’oraison de toutes les
églises ; je demande une prière à toutes les âmes. Je crois en Dieu. Victor Hugo. »
Sur décision de la Chambre des députés, le Panthéon est « enlevé au culte catholique » et
« rendu à sa destination première et légale ». On imagine les réactions de ceux qui, venant
d’apprendre la nouvelle, lisent un article du Grelot intitulé « Gazette de Montretout » :
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24
« Tous les journaux sont, naturellement, pleins de commentaires sur Hugo. Tous s’accordent
à reconnaître que les funérailles civiles ont été admirables et ont présenté un caractère de
grandeur bien autre que si, le concours du sieur Guibert ayant été accepté, le corbillard avait
été entouré de tonsurés déguisés en Turcs, avec des soleils et des bêtes dorées dans le dos. »
Une autre édition du même journal propose à ses lecteurs un « monologue divin » : « Ainsi,
Hugo va claquer, sans que cet imbécile d’archevêque de Paris ait réussi à lui faire avaler la
légendaire rondelle d’extrait de viande de mon fils ! Ma parole, c’est dégoûtant. Ah ! Il est
joliment composé, le personnel qui défend mes intérêts en bas. »
La caricature d’Isoré, « L’ignorance fait place au génie » (Le Salon pour rire, 1885) paraît au
même moment. Elle représente un prêtre qui fuit, emportant goupillon, bénitier, cierges,
éteignoir, statue, alors que Victor Hugo apparaît sur le parvis du Panthéon dans un nuage
d’encens, tenant la crosse de la Liberté.
*** 50
« L’Apothéose », par Gilbert-Martin, Le Don Quichotte, douzième année, n° 572, 5 juin 1885.
C : 38,7x55,7
Le 1er juin 1885, jour des obsèques nationales [35] de Victor Hugo, plusieurs centaines de
milliers de personnes sont présentes, de l’Arc de Triomphe au Panthéon, sur les ChampsÉlysées, place de la Concorde, le long des boulevards Saint-Germain et Saint-Michel, et de la
rue Soufflot.
Victor Hugo est maintenant sur le chemin de la « panthéonisation ».
Gilbert-Martin dessine sur le dôme du Panthéon la Renommée qui tient à la main un
flambeau. Son « Apothéose » peut faire penser à un gigantesque ostensoir dont Hugo
occuperait la custode.
Gilbert-Martin commente son dessin dans un long poème dont il est l’auteur :
« […] Non, ce n’est pas la nuit qui voile de son ombre
Ce front par le trépas dompté,
C’est l’éclatant soleil dont les rayons sans nombre
L’inondent d’immense clarté.
C’est l’apôtre immortel qui se métamorphose,
C’est la transfiguration,
C’est le monde accouru pour une apothéose,
C’est la splendeur du Panthéon !
[…] Et quand la Renommée, en éclairant le monde
Plane au faîte de son tombeau,
C’est lui qui resplendit, qui, dans l’ombre profonde
Devient la flamme du flambeau ! »
*
**
Certaines pages des Carnets de Victor Hugo attestent l’intérêt qu’il portait aux caricatures
dont il était l’objet et qu’il lui arrivait de collectionner. Ainsi, le 27 février 1872, il note : « Gill
a fait sur moi, à propos de Ruy Blas, un très beau dessin qui paraît demain dans L’Éclipse. Je
l’ai invité à dîner. » On lit à la date du 5 octobre 1875 : « J’ai acheté les trois numéros de
L’Éclipse où il y a les trois dessins de Gill : L’Homme qui rit (Thiers), L’Homme qui parle
(Gambetta), L’Homme qui pense (Victor Hugo). »
La Maison de Victor Hugo [36] conserve plusieurs autorisations signées de l’écrivain et
adressées aux rédacteurs de journaux satiriques quand la censure exigeait l’acceptation
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préalable de celui qui allait être caricaturé. « Monsieur, écrit-il à Pilotell le 2 mai 1867, je
vous autorise à faire de moi la caricature après le portrait. » « Mon cher ami, répond-il à
Carjat le 27 juin de la même année, je vous autorise à faire de moi ce que vous voudrez. » Un
dessin de Morland, publié dans Le Sifflet du 5 octobre 1873, est accompagné de ces lignes
signées Victor Hugo, ardent défenseur des libertés, notamment celle de la presse :
« J’autorise M. le rédacteur du Sifflet à publier des dessins, des caricatures, si bon lui semble,
me concernant. »
Lui-même s’est adonné avec talent à la caricature, dessinant des centaines de « facéties pour
les petits et pour les grands », moquant par exemple « le vertueux instituteur », un
« inquisiteur assistant à la torture d’une femme », un « chantre d’église lorgnant les
ouailles », un « séminariste qui chante pendant qu’on brûle une sorcière », « Gavroche à onze
ans », un bourreau, ou, comme Daumier, un juge.
Assurément, il a dû apprécier d’être si souvent dessiné, lui qui disait à son ami Antoine
Fontaney, au moment où paraissaient les premières charges le représentant : « Pour bâtir
votre monument, tout est bon ! Que les uns y apportent leur marbre, les autres leur moellon !
Rien n’est inutile ! »
NOTES
[1] En 1830, une lithographie anonyme, « Une vue du Père la Chaise en 1930 », montre le
tombeau de l’auteur du Dernier Jour du condamné, de Han d’Islande, des Odes et Ballades,
d’Hernani, des Orientales, de Bug-Jargal, de Cromwell, près des tombes de Vigny, SainteBeuve et Dumas.
[2] Parmi les nombreux témoignages de ses contemporains sur son front, citons ceux de
Sainte-Beuve : « De ton front grand et haut comme s’il était chauve » (A V.H.) et de
Théophile Gautier : « Ce qui frappait d’abord dans Victor Hugo, c’était le front vraiment
monumental qui couronnait comme un fronton de marbre blanc son visage d’une placidité
sérieuse […] ; il était vraiment d’une beauté et d’une ampleur surhumaines ; les plus vastes
pensées pouvaient s’y écrire ; les couronnes d’or et de laurier s’y poser comme sur un front de
dieu ou de césar. Le signe de la puissance y était » (Souvenirs romantiques).
[3] Les vers reproduits en bas de page sont, en fait, de Théophile Gautier (Poésies nouvelles
et inédites) : « Epoque tant étroite, / Où Victor Hugo seul porte la tête droite, / Et crève le
plafond de son crâne géant. »
[4] Le Courrier français, 7 janvier 1833.
[5] « Visite à Victor Hugo, le mercredi 21 juillet [1830] », in Édition chronologique de Jean
Massin, tome III, p. 1461.
[6] Le motif en creux de la base gauche de la statuette représente une faux et un sabre en
sautoir.
[7] Benjamin Roubaud, selon Aglaüs Bouvenne (Victor Hugo, ses portraits, ses charges,
1879) ; Honoré Daumier, selon Le Charivari du 13 novembre 1901.
[8] Directeur du Théâtre-Français.
[9] Le poème qui sert de légende, à l’imitation des Djinns, commence par : « Hugo !!! / Cet
homme / In-folio […] »
[10] Le 10 décembre 1848, Louis-Napoléon Bonaparte est élu président de la République avec
près de quatre millions de voix d’avance sur Cavaignac.
[11] Pour souligner son manque d’expérience en matière politique, on représente parfois
Hugo sous les traits d’un enfant, comme dans Le Journal pour rire (29 juin 1850), avec cette
légende : « Le R. P. Montalembert demande compte au jeune Hugo, âgé de trois ans [on le
voit dans une sorte de trotteur, près d’un berceau], de son opinion sur les prérogatives
constitutionnelles. »
[12] Même si Hugo s’est toujours défendu d’une quelconque appartenance à la francmaçonnerie, ces symboles, parfois accompagnés d’une cocarde tricolore et d’un bonnet
phrygien, apparaîtront encore parfois à son front après son retour d’exil.
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[13] Écrivain et journaliste, frère de Charles Vacquerie, mari de Léopoldine Hugo, Auguste
Vacquerie est l’un des plus fidèles amis de Victor Hugo.
[14] Lamartine – « L’ange déchu, qui chante sur sa guitare échevelée une petite annonce à ses
Œuvres complètes, dont il s’est fait l’éditeur, et à son Conseiller du Peuple, que le peuple ne
lit guère. » – est le cinquième personnage à partir de la gauche.
[15] Le 21 avril 1849, l’Autriche accepte l’intervention des troupes de Nicolas 1er pour l’aider à
vaincre la Hongrie.
[16] Légende de l’une d’elles : « Ayant terminé leurs travaux, et ayant, par trois journées de
discours, définitivement assuré la paix du monde, les membres du Congrès de la salle Ste
Cécile se décident à faire une promenade triomphale, mais pacifique, dans les rues de
Paris ! »
[17] Allusion à Auguste Vacquerie, l’un des rédacteurs du journal L’Événement.
[18] Pseudonyme de Charles-Marie de Sarcus.
[19] Ignace de Loyola a fondé la Compagnie de Jésus.
[20] Dans l’article qui accompagne la caricature, « Revue de la semaine », Raimond
Deslandes stigmatise Hugo « qui s’est improvisé depuis quelque temps le champion de toutes
les libertés ».
[21] Orthographe de Victor Hugo.
[22] Faustin a remplacé « maudit » par « bandit ».
[23] Propriétaire de l’appartement meublé loué par Charles Hugo, 13, rue Saint-Maur, à
Bordeaux.
[24] Le restaurant Lanta se situerait aujourd’hui 46, place Gambetta, à l’emplacement du café
Le Régent.
[25] Faustin a remplacé « chêne » par « cèdre ».
[26] Le 2 septembre 1870, après la capitulation de Sedan, il se rend à l’empereur Guillaume
Ier. Le 1er mars 1871, l’Assemblée nationale vote sa déchéance et celle de sa dynastie. Le
20 mars, il débarque à Douvres avant de s’installer à Chislehurst, dans le comté de Kent ; il va
résider à Camden Place jusqu’à sa mort, le 9 janvier 1873.
[27] « Mes vers contre la guerre civile, “Un cri”, sont dans le Rappel. » (19 avril 1871, Carnet,
Victor Hugo).
[28] On pense aux expressions populaires « avoir une araignée dans le plafond, dans le
cerveau », « avoir le cerveau dérangé ».
[29] Orthographe de Victor Hugo.
[30] Nommé chevalier de la Légion d’Honneur le 23 avril 1825 - il a 23 ans -, Victor Hugo est
promu officier le 2 juillet 1837.
[31] « 22 mai 1876 : Aujourd’hui Sénat. Amnistie. À trois heures j’ai parlé. Ils sont restés
pétrifiés et muets. » (Carnet, Victor Hugo).
[32] André Gill (Paris, 17 octobre 1840 – Charenton, 1er mai 1885).
[33] Selon la tradition mythologique, les chants d’Orphée, qui s’accompagnait d’une lyre ou
une cithare, avaient le pouvoir de calmer la férocité des tigres et des lions. Dans son Art
poétique (Chant IV), Boileau évoque ce pouvoir :
« De là sont nés ces bruits reçus dans l’univers,
Qu’aux accents dont Orphée emplit les monts de Thrace,
Les tigres amollis dépouillaient leur audace. »
[34] Sur chaque contremarche de l’autel est inscrit (de haut en bas) le titre d’une œuvre de
Victor Hugo : Notre-Dame de Paris, La Légende des siècles, Les Contemplations, Napoléonle-petit, Les Châtiments, Les Misérables, L’Année terrible, Les Travailleurs de la mer,
L’Homme qui rit, Quatrevingt-treize.
[35] Les obsèques nationales de Victor Hugo ont été votées par la Chambre des députés (415
voix contre 3) et par le Sénat (219 contre 1) le 23 mai.
[36] 6, place des Vosges, Paris, IVe.
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BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
Œuvres de Victor Hugo
Massin Jean (dir.). Œuvres complètes, Le Club français du livre, 18 tomes, 1967-1970.
(Deux tomes de dessins et lavis (1967 et 1969), où l’on trouvera de nombreuses caricatures
faites par Victor Hugo, complètent cette édition.)
Seebacher Jacques et Rosa Guy (dir.). Œuvres complètes, Robert Laffont, collection
Bouquins, 15 tomes, 1985-1990.
Ouvrages généraux
Champfleury. Histoire de la caricature moderne, Paris : Dentu, 1865.
Bouvenne Aglaüs. 1827-1879, Victor Hugo, ses portraits et ses charges, Paris : J. Baur, 1879.
Grand-Carteret John. Les Mœurs et la Caricature en France, Paris : La Librairie illustrée,
1888.
Beuve Paul et Daragon Henri. Victor Hugo par le bibelot, le populaire, l’annonce, la
chanson, Paris : Henri Daragon, 1902.
Laster Arnaud. Pleins feux sur Victor Hugo, Paris : Comédie-Française, 1981.
Georgel Pierre (dir.). La Gloire de Victor Hugo, Catalogue de l’exposition présentée au Grand
Palais du 1er octobre 1985 au 6 janvier 1986, Paris : Éditions de la Réunion des musées
nationaux, 1985.
Régnier Philippe (dir.), Rütten Raimund, Jung Ruth et Schneider Gerhard (éd.). La
Caricature entre République et censure, L’imagerie satirique en France de 1830 à 1880 : un
discours de résistance ? Lyon : Presses universitaires de Lyon, 1996, collection « Littérature
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Grossiord Sophie. Victor Hugo – « Et s’il n’en reste qu’un », Paris : Gallimard, 1998.
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Dico Solo en couleurs, Plus de 5 000 dessinateurs de presse et 600 supports en France de
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Tillier Bertrand. À la charge ! La caricature en France de 1789 à 2000, Paris : Les Éditions
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Baridon Laurent et Guédron Martial. L’art et l’histoire de la caricature, Paris : Citadelles et
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Hovasse Jean-Marc. Victor Hugo, Tome II. Pendant l’exil I (1851-1864), Paris : Librairie
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Articles
Secret Jean et Lévy Marius. « Victor Hugo et les caricaturistes », Jardin des Arts,
février 1965, n° 123, p. 58-65.
Le Men Ségolène. « Les portraits-charges de Victor Hugo », Les Nouvelles de l’estampe,
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Tillier Bertrand. « Le Victor Hugo caricaturé, ou La Mémoire des images satiriques », et
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Thiébaut Michel. « Victor Hugo et le mouvement romantique à travers la caricature et
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L’École des lettres des collèges, 2002-2003, n° 4 (publication épuisée, mais téléchargeable
sur www.ecoledeslettres.fr).
« Après la mort le 23 mai 1885 », Coup d’œil, « Spécial Victor Hugo », [s. d.], n° 49, p. 89-97.
Salles Daniel. « Victor Hugo et les caricaturistes, entre châtiment et éloge », [s. d.],
www.caricaturesetcaricature.com.
Catalogues d’expositions
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Pouchain Gérard. Victor Hugo par les caricaturistes du XIXe siècle, traduction de Cheng
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Library, Hong Kong, 31 octobre-13 novembre 2002, Alliance française de Canton, 2002.
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Pouchain Gérard. Victor Hugo raconté par les caricaturistes du XIXe siècle, préface de
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Gesualdo, 9 novembre-5 décembre 2006, Mairie et Alliance française d’Avellino, 2006.
Pouchain Gérard. Victor Hugo raconté par les caricaturistes du XIXe siècle, traduction de
Liliana Bruneau, Palozzo Trinci, 22 mai-14 juin 2008, Mairie et Alliance française de Foligno,
2008.
Pouchain Gérard. Victor Hugo par des caricaturistes, préface de Frank Wilhelm, Musée de la
caricature et du cartoon, 12 septembre-4 octobre 2009, édité par Florin Balaban (Musée de la
caricature et du cartoon) et Frank Wilhelm (Maison Victor Hugo à Vianden), Vianden, 2009.
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