Détention provisoire : premières précisions relatives à la

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Détention provisoire : premières précisions relatives à la
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Détention provisoire : premières précisions relatives à
la « déclaration des droits »
le 8 décembre 2014
EUROPÉEN ET INTERNATIONAL | Pénal
PÉNAL | Instruction
La remise de la « déclaration des droits » n’est pas exigée lors de la prolongation de la détention
provisoire. En tout état de cause, le défaut de remise après le prononcé du placement en détention
provisoire est sans incidence sur la régularité de cette décision.
Crim. 14 oct. 2014, FS-P+B+I, n° 14-85.555
Dans une information ouverte du chef de vols aggravés, un individu mineur est mis en examen et
placé en détention provisoire le 8 mars 2014. Le juge des libertés et de la détention prescrit la
prolongation de cette mesure par ordonnance du 30 juin 2014, dont le mis en examen interjette
appel. Devant la chambre de l’instruction, le mis en examen soulève une exception de nullité de
l’ordonnance en soutenant que le juge des libertés et de la détention aurait dû, à l’issue du débat
contradictoire, lui remettre le document prévu par l’article 803-6 du code de procédure pénale.
Cette disposition est issue de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la
directive n° 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à
l’information dans le cadre des procédures pénales, et est entrée en vigueur le 2 juin, soit en
l’espèce entre la date de la décision de placement et celle de la décision de prolongation. En vertu
de ce nouveau texte, « toute personne suspectée ou poursuivie soumise à une mesure privative de
liberté en application d’une disposition du présent code se voit remettre, lors de la notification de
cette mesure, un document énonçant, dans des termes simples et accessibles et dans une langue
qu’elle comprend, les droits […] dont elle bénéficie au cours de la procédure en application
du [code de procédure pénale] ». Sont ensuite listés onze droits dont la notification est pour la
plupart déjà prévue par la loi.
Il s’agit d’une disposition qualifiée par la circulaire de présentation de la loi de « générale et
transversale », ce qu’indique d’ailleurs sa place dans le code de procédure pénale. Elle vise à
garantir une information effective de toute personne à la fois suspectée ou poursuivie et soumise à
une mesure de contrainte. Ainsi, il est désormais remis à toute personne se trouvant dans une telle
situation un document écrit qui rappelle les principaux droits énumérés à l’article 4 de la directive
du 22 mai 2012, selon lequel « les États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes
poursuivies qui sont arrêtés ou détenus reçoivent rapidement une déclaration de droits écrite. Ils
sont mis en mesure de lire la déclaration de droits et sont autorisés à la garder en leur possession
pendant toute la durée où ils sont privés de liberté ».
En l’espèce, la chambre de l’instruction écarte l’exception de nullité de l’ordonnance de
prolongation de la détention tirée de l’absence de remise par le juge des libertés et de la détention
au mis en examen du document prévu par l’article 803-6 du code de procédure pénale à l’issue du
débat contradictoire. Elle retient que les dispositions de ce texte ont pour objet d’informer la
personne mise en examen confrontée à une situation nouvelle de privation de liberté. Or, le mis en
examen était en l’occurrence détenu depuis quatre mois lors du renouvellement de son mandat de
dépôt.
Pour rejeter le pourvoi formé à l’encontre de cette décision, la chambre criminelle relève dans un
premier temps que la chambre de l’instruction a fait une juste application de l’article 803-6, en
retenant que celui-ci ne prescrit pas la remise du document d’information lors de la prolongation de
la détention provisoire. Selon les termes de la loi, cette remise doit avoir lieu « lors de la notification
de [la] mesure ». Aussi la chambre criminelle exclut-elle l’applicabilité de ce texte à l’occasion du
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renouvellement de la mesure initiale.
Mais elle ne s’arrête pas là, et profite de ce pourvoi pour se prononcer de façon plus générale – et
pour la première fois – sur la portée du texte. La Cour de cassation ajoute, en effet, dans un obiter
dictum « qu’en tout état de cause, le défaut de remise, à la personne mise en examen, de ce
document, après le prononcé de son placement en détention provisoire, est sans incidence sur la
régularité de cette décision ». Ainsi, avant même qu’il ne s’ouvre, la chambre criminelle clôt le
débat relatif à la sanction du défaut de remise du document prévu par l’article 803-6 du code de
procédure pénale lors du placement en détention provisoire. Le fait que la personne ne soit pas
informée, notamment, du « nombre maximal d’heures ou de jours pendant lesquels elle peut être
privée de liberté avant de comparaître devant une autorité judiciaire » et de son « droit de
connaître les modalités de contestation de la légalité de l’arrestation, d’obtenir un réexamen de sa
privation de liberté ou de demander sa mise en liberté », n’est pas de nature à entacher
d’irrégularité l’ordonnance de placement en détention. La délivrance de la déclaration des droits
lors du placement en détention provisoire n’est donc pas prescrite à peine de nullité, ce qui réduit
considérablement sa portée protectrice.
Reste à savoir ce qui sera décidé par la Cour de cassation dans le cas où la violation de l’article
803-6 interviendra à l’occasion du placement en garde à vue.
Site de la Cour de cassation
par Cloé Fonteix
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