La famille royale à Épernay : la fuite à Varennes

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La famille royale à Épernay : la fuite à Varennes
Ville d'Epernay – Archives municipales
La famille royale à Épernay : la fuite à Varennes
Fuite à Varennes
La fuite de la famille royale des Tuileries et de la capitale commence à s'organiser le 20 juin 1791, à
partir de 22h30. À 2h30, à la demande du Roi, le Comte Axel de Fersen les quitte au premier relais, à
Bondy. Erreur stratégique : il se sépare d'un soldat qui aurait pu prendre les décisions urgentes et
stratégiques le long du chemin.
180 dragons (soldats) cantonnent à Clermont-en-Argonne et 40 hussards à Sainte-Ménéhould. Ils
doivent rejoindre le lendemain Somme-Vesle, premier relais après Châlons-sur-Marne et y attendre
la famille royale.
Le 22 juin, à 7h30, Paris est déjà au courant du départ du Roi. Après une discussion houleuse à
l'Assemblée, il est décidé de dire que le Roi a été enlevé. Malgré le manifeste qu'il a laissé pour
expliquer sa fuite, les députés ont encore besoin de lui pour assurer le nouveau pouvoir.
La famille royale, rassurée que le voyage se passe bien, ne se presse pas. Elle est reconnue plusieurs
fois, notamment à Châlons, mais pas dénoncée. Elle a trois heures de retard et les troupes qui les
attendaient partent car la population commence à se demander ce qu'ils font là.
Mais la famille royale est stoppée à Varennes et le Roi ne prend pas la décision de s'enfuir avec les
hussards ou de prendre la ville. La population la défend. On presse le Roi de partir, lorsque l'ordre
d'arrestation arrive de Paris. De village en village, la foule suit la voiture de peur que l'armée des
contre-révolutionnaires détruise leurs villages. Plus on se rapproche de la Capitale, plus la foule est
hostile. À Chouilly, le Roi se fait cracher au visage et la robe de la Reine est déchirée. L'angoisse est à
son comble.
Pendant ce temps, à Epernay
A Épernay, se prépare la Fête-Dieu, qui doit se tenir le 23 juin et le premier échelon des élections des
Conseils de Districts et du Département, qui doit se tenir le 24. Ces élections sont finalement
repoussées au 27 juin en raison des événements.
Le Conseil de Ville d’Épernay est prévenu assez rapidement du départ du Roi, puisqu'il se réunit, dès
21h, le 21 juin. En effet, comme il est rapporté dans le registre, des aides de camp de La Fayette
(gardien de la famille royale aux Tuileries) sont passés et ont demandé au maître des Postes auprès
de qui ils ont changé de chevaux, de faire passer le message.
Le Roi a quitté Paris, ce qui est qualifié de "fatale nouvelle". Il faut passer le message dans tout l'Est
de la France, car on se doute que c'est la destination que le Roi a choisie.
Les aides de camp demandent également que toutes les voitures de voyageurs soient contrôlées et
toutes celles contenant des bien précieux arrêtées.
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Les Conseils de la Ville et du District réunis décident que deux conseillers municipaux seront de garde
durant la nuit. Ils ordonnent au brigadier de la Maréchaussée de tenir ses cavaliers prêts à intervenir
à la moindre alerte.
Le lendemain, le 22 juin, ils apprennent par une lettre du Département que le Roi a été arrêté. Il est
demandé des secours à Clermont-en-Argonne. Deux détachements de citoyens sont déjà partis.
Les Conseils de la Ville et du District se demandent quelle route le Roi va emprunter pour son retour.
Va-t-il passer par Épernay ?
Toutes les communes du District décident d'envoyer un détachement de la Garde nationale pour
protéger son retour. "A cet effet, tous les citoyens qui peuvent entreprendre ce voyage ont été invités
à venir se faire inscrire".
Le 23 juin, une nouvelle lettre du Département annonce "que le Roi et la famille royale doivent venir
coucher à Épernay".
Ordre est donné que la Garde nationale du District, ainsi que celles de Château-Thierry et du District
de Reims, de Braine, Sézanne et Soissons affluent vers Épernay (soit 10 000 hommes).
Une autre lettre annonce que "des ennemis du Bien Public" se sont emparés de Varennes, qui est "à
feu et à sang" et menacent déjà Sainte-Menehould. "Cette nouvelle, toute alarmante qu'elle est, ne
ralentit en rien le zèle des corps administratifs". Ils demandent de nouveaux secours et font sonner le
tocsin. "Et la Garde nationale, ne consultant que sa bravoure et son patriotisme, vole à la rencontre
du Roi pour protéger sa marche".
En raison du danger, les Conseils de la Ville et du District décident qu'il est préférable que le Roi ne
reste pas dormir à Épernay. Ordre est donné de contenir les ennemis avant Épernay.
Mais en fait, c'est une rumeur. Les troupes qui attendaient la famille royale ne vont pas tirer une
seule cartouche. La colère qui fait rage à ce moment-là est uniquement le fait du peuple et tournée
vers la famille royale.
Les registres conservés laissent supposer que l'administration sparnacienne n'est pas encore au
courant, car ces événements ne sont pas mentionnés dans le registre. L'heure passée à Épernay est
résumée en quelques phrases et l'hostilité envers la famille royale n'y est pas mentionnée.
Un bref passage dans la cité sparnacienne
Le Roi arrive aux portes d’Épernay le 23 juin, vers 18h. Les Conseils l'accueillent. La famille royale
dîne à l'Hôtel de Rohan et y reste une heure. Le dîner est tendu.
Le peuple réclame à grands cris de la voir. La famille royale est donc obligée de monter au premier
pour le saluer.
"Vers 7h du soir, le Roi monta dans sa voiture et partit d’Épernay entouré d'un peuple immense armé
et au milieu des cris redoublés de vive la Nation".
Le témoignage de Madame Royale (fille de Louis XVI et de Marie Antoinette) est différent : la cour
était remplie de "gens furieux et armés […] qui disaient hautement qu'ils voulaient nous tuer".
Les procureurs syndics du District et du Département accompagnent la famille royale. C'est un
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moyen d'assurer leur protection en attendant la rencontre avec les trois députés de l'Assemblée
missionnés, qui se fera à Boursault. La famille royale part dormir à Dormans. La foule est encore
bruyante et menaçante. Épernay assure le ravitaillement des Gardes nationaux et de la population.
Le 24 juin, les bruits alarmants semblent s'être dissipés. Le voyage du Roi se poursuit avec
tranquillité.
Un courrier annonce que les personnes qui ont enlevé le Roi seront châtiées.
Des armes et des troupes continuent d'arriver à Épernay. La Garde nationale est maintenue en
alerte. Ordre est donné de fabriquer des cartouches avec la poudre qui est arrivée. Les deux corps
administratifs décident de ne pas se séparer avant que la tranquillité ne soit revenue.
Le Roi est de retour à Paris le 25 juin, sous les huées du peuple parisien. C'est sans doute à ce
moment-là que les corps administratifs se séparent.
Documents
Texte : registre des délibérations du Conseil de Ville et du Conseil général permanent du District
(1790-1791), 1 D 1, Archives municipales d’Épernay.
Home page : Lithographie, Louis Seize, Roi des Français, dédiée à Monsgr. le Dauphin, collection
Théogène Lefèvre, 893.01.493 et lithographie, Marie-Antoinette, Archiduchesse d’Autriche, Reine des
Français, dédiée à Madame Fille du Roi, Peint par L-E Vigée-Lebrun, peintre du Roi, dessinée et
gravée par C. Macret 1789, datée de 1790, collection Théogène Lefèvre, 893.01.440, Musée
d’archéologie et du vin de Champagne.
Bibliographie
Évelyne LEVER, Marie-Antoinette, Fayard, 1991
Abbé P. Gilet, curé de Notre-Dame, Cahier sparnacien n°4, « Louis XVI et sa famille à Épernay au
retour de Varennes, 23 juin 1791 – essai de reportage rétrospectif », 1968