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Rapport
SYNTHESE
Par lettre de mission en date du 12 février 2014, le directeur général de la Caisse des dépôts
et consignations (CDC) a demandé aux soussignés de porter une évaluation, d’une part, sur
l’opération de cession par Icade de son patrimoine de logements locatifs à un consortium
d’organismes HLM conduit par la SNI, et, d’autre part, d’apprécier le modèle de
développement du groupe SNI au regard de sa contribution aux missions d’intérêt général de
la CDC.
La SNI est la filiale immobilière d’intérêt général de la Caisse des dépôts et consignations.
Premier bailleur social de France avec près de 300 000 logements gérés, dont une majorité de
logements sociaux et plus d’un million de locataires, cette société a connu un développement
rapide ces dix dernières années grâce à son rattachement à la Caisse des dépôts et
consignations.
Le groupe SNI est constitué de deux grands ensembles qui coexistent mais ne sont pas
consolidables entre eux :
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Le pôle SNI (consolidé dans le groupe CDC) comprend la SNI et ses filiales privées. Il
représente 30% du parc total du groupe, il est dédié au logement intermédiaire locatif ;
il est réservé essentiellement au personnel du secteur public ;
Le pôle logement social, par l’intermédiaire des ESH, représente 70 % du parc total.
Ce pôle n’est pas consolidé dans les comptes de la SNI et de la CDC ; il suit les règles
propres aux logements HLM.
1. La cession du pôle logement d’Icade au consortium mené par la SNI
En 2005, suite au rachat de la totalité de la SNI, la CDC décide de réorganiser son pôle
immobilier autour des activités d’intérêt général d’une part, et des activités concurrentielles,
d’autre part. La SNI prend la tête du premier pôle, Icade conservant le pôle dit concurrentiel.
Dans le cadre de cette réorganisation, la CDC transfère en provenance d’Icade, toutes les
activités immobilières jugées non « cotables ». Est ainsi transférée la participation d’Icade
(44,35%) dans la SCIC Habitat qui possède à travers ses ESH 132 461 logements sociaux. En
revanche, Icade conserve 40 000 logements quasi-sociaux sur l’Ile-de-France, porteurs de
plus-values latentes. L’année suivante, Icade est introduit en bourse.
Fin 2008, Icade, qui détient encore 35 000 logements, décide de se défaire de l’ensemble de
ce pôle logement. La SNI forme un consortium, début mars 2009, avec 26 opérateurs pour le
racheter et, le 6 octobre 2009, ce consortium rachète 24 407 logements pour un montant de
1 636,6 M€.
Les missionnaires ont procédé à l’analyse de cette cession et tenté de répondre aux reproches
les plus souvent exprimés qui se concentrent essentiellement sur deux questions : celle du
conflit d’intérêt des acteurs et celle du prix de la cession. Le risque de conflit d’intérêt a été
rapidement perçu par la direction de la CDC qui s’est abstenue à juste titre de toute
intervention, Icade étant une société cotée. Par ailleurs, la SNI n’a méconnu, ni son intérêt, ni
celui de ses mandants lors de cette opération. S’agissant du prix d’acquisition négocié par la
SNI et le consortium, il paraît justifié et raisonnable. Le travail de la SNI en tant chef de file du
consortium a permis à ses membres d’obtenir une décote significative sur la transaction au
regard des estimations données par les experts indépendants.
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Toutefois, si la régularité de cette transaction n’est pas mise en doute, les fondements qui
sous-tendent cette opération appellent plusieurs critiques :
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elle a donné l’impression à de nombreux acteurs du logement social que la CDC avait
agi selon une vision purement financière ;
le consortium aura acheté plus de 24 000 logements pour un montant supérieur à
1,6 Mds€ sans construire le moindre logement nouveau. En revanche, les bailleurs
sociaux ont grevé leur capacité d’investir pour produire de nouveaux logements ;
le transfert incomplet des logements sociaux d’Icade à la SNI en 2005 lorsqu’a été fait le
partage des activités concurrentielles et non concurrentielles semble avoir suivi plutôt
une logique financière. Ce choix de stratégie ne semble pas avoir eu d’autres
justifications que faire ressortir les plus-values latentes sur des logements à caractère
social ; ce qui a amélioré le résultat de la CDC et profité aux actionnaires minoritaires
au détriment de tout impératif d’intérêt général.
2. L’appréciation de la stratégie de la SNI
L’image et le positionnement du groupe SNI, devenu en quelques années un acteur majeur de
l’immobilier public, sont indissociables de ceux de son actionnaire, dont une des missions
fondamentales est de financer le logement social. Il semble aux missionnaires qu’il convient
de réaffirmer, avec force, le caractère central de cette activité pour la SNI, et de mieux
identifier sa stratégie dans ce domaine.
La SNI se décrit comme un opérateur global de l’immobilier, adossant 16 ESH à une foncière
intermédiaire qui sécurise leur potentiel financier grâce à la récurrence de ses résultats. Alors
que les filiales HLM sont enserrées dans un statut réglementé limitant leur objet social et la
rémunération des capitaux investis, leur actionnaire de référence en tant que SEM nationale
dispose d’un statut particulièrement souple qui supporte peu de contraintes réglementaires.
La logique d’entreprise sur laquelle la SNI s’est engagée n’est pas sans risque. Certes, son
professionnalisme est reconnu dans les domaines immobilier, financier, et de la gestion
locative. Cela lui a permis de répondre aux attentes des pouvoirs publics, voire de les
devancer comme le montre le rachat de logements en Vefa ou la mise en place du programme
Argos. Au-delà de la priorité donnée à la construction neuve et à la réhabilitation, la SNI a
accordé une place importante au locatif intermédiaire qui offre à un public large des loyers
décotés par rapport au marché, ce qui en fait un produit attractif par définition.
La SNI apporte une ressource financière non négligeable à la CDC et jouit en contrepartie
d’une large autonomie opérationnelle. Mais, comme les autres organismes de logement social,
la SNI n’est pas à l’abri de risques à caractère systémique : la dégradation de la situation
économique pourrait générer une élévation du taux d’impayés. Par ailleurs, la recherche
d’économies budgétaires peut peser sur le budget des aides à la personne, et les pouvoirs
publics peuvent, comme dans le passé, être tentés d’intervenir sur l’évolution des loyers. Or,
le groupe est endetté.
Pour desserrer cette contrainte financière et financer un développement ambitieux, la SNI
maintient son résultat par la cession d’actifs. La CDC avait en 2008 fixé un plafond de 40% de
résultat issu des plus-values de cession. Ce ratio est devenu désormais de 60%. La véritable
originalité du modèle SNI est d’avoir promu à grande échelle les cessions à d’autres bailleurs,
la vente aux particuliers ne représentant que le quart des cessions, à l’inverse de ce qui est
généralement pratiqué dans le secteur. Cette stratégie appliquée à grande échelle n’est pas
sans inconvénient, d’une part les cessions sont loin de se limiter aux seules zones détendues,
d’autre part, ces opérations se traduisent pour les acquéreurs par un accroissement de leur
endettement afin de refinancer le parc existant.
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Or cette originalité de la SNI se couple avec un contrôle complexe de la CDC sur la stratégie de
sa filiale et des sociétés d’HLM. En effet, la notion d’opérateur immobilier global défendue par
la SNI traduit une vision extensive du rôle d’un bailleur social vers celui d’un simple
entrepreneur. Certains redoutent, alors, que la SNI, directement et à travers les sociétés
d’HLM qu’elle contrôle, donne la primauté à la recherche de la rentabilité et à une montée en
gamme des produits au détriment de sa mission sociale.
Il s’avère nécessaire d’offrir toutes les garanties à l’égard de tels risques et du même coup de
prévenir toute forme de procès d’intention. Il appartient à la SNI et à son actionnaire de
rechercher les meilleures modalités pour atteindre ce but et la mission se borne à émettre
quelques pistes de travail :
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il est nécessaire d’être très prudent quant à l’ouverture du capital de la SNI. Le
précédent regrettable de la cession du patrimoine social de fait d’Icade, après
ouverture du capital, justifie que la CDC conserve intégralement ses parts dans la SNI,
en adaptant le développement de la société en fonction de ses moyens propres ;
il faut garantir la pérennité de la vocation sociale du groupe en le dotant de
mécanismes de gouvernance permettant de mieux identifier le secteur social et le
secteur concurrentiel. Il appartient à l’actionnaire d’en fixer les modalités en l’absence
de contrainte juridique particulière. Mais le suivi de l’activité devrait permettre de
s’assurer que le caractère d’intérêt général demeure prédominant ;
dans le même esprit, dans le cadre d’une éventuelle prise de contrôle d’Adoma par la
SNI, il conviendrait de garantir que la valorisation de la société et de son patrimoine
soit intégralement réinvestie dans le secteur social et très social selon les règles
analogues à celles retenues pour les SA d’HLM.
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