QATAR – France Le Qatar n`a pas d`arrière

Transcription

QATAR – France Le Qatar n`a pas d`arrière
L’argent du Qatar n’a
pas d’odeur
L’actualité diplomatique du 1er novembre
2012
Le Qatar s'intéresse depuis fin 2011 aux banlieues
françaises, auxquelles il voulait dédier à l'origine un
fonds de 50 millions d'euros. Le Qatar s’intéresse au
PSG, à LVMH, Vivendi ou encore Total. Le Qatar
voudrait financer les islamistes du Nord-Mali,
comme il a déjà financé les islamistes tunisiens ou
libyens. Le Qatar plante aussi un couteau dans le
dos du Fatah, puisqu’il va aider financièrement le
Hamas. Le Qatar affiche donc ses ambitions
régionales et internationales.
Qatar par ci, Qatar par-là et quelques naïfs qui
croient ici ou là que l’Emir du Qatar n’a pas
d'arrière-pensée politique…
Une revue de presse proposée par Marc Knobel
1er novembre
QATAR –
France
Le Qatar n'a
pas d'arrièrepensée
politique
quand
il
investit
en
France (Sic)
L'Expansion.com avec AFP - publié le 15/10/2012
Le Premier ministre du Qatar, le cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani, assure que son pays "n'a pas de
grande ambition politique" et quand il investit en France, "c'est sans dessein politique".
DOHA - Le Premier ministre du Qatar, cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani, a affirmé lundi
que son pays n'avait aucune arrière-pensée politique en réalisant des investissements en
France.
REUTERS/Mohammed Dabbous
Le Premier ministre du Qatar, cheikh Hamad ben Jassem Al-Thani, a affirmé lundi que son
pays n'avait aucune arrière-pensée politique en réalisant des investissements en France. "Le
Qatar n'a pas de grande ambition politique (...) et quand il investit en France, c'est sans
dessein politique", a affirmé cheikh Hamad interrogé lors d'une conférence de presse à Doha
avec son homologue libanais Najib Miqati. "Nous ne cherchons qu'à investir et nous ne
faisons rien sans coordination avec la partie française", a encore assuré le responsable du
Qatar, disant que son pays avait mis en place pour cela un "fonds d'investissement public".
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L'ambassadeur du Qatar à Paris, Mohamed Jaham Al-Kuwari, a estimé qu'il serait
"dommage" que des "calculs partisans" sapent les perspectives d'échanges entre la
France et le Qatar, dans une tribune mercredi au quotidien Le Monde. "Il serait
dommage que des calculs partisans privent ces nations d'une telle occasion d'échanges
dont les perspectives s'annoncent aussi fructueuses dans l'avenir pour les deux pays", a
écrit l'ambassadeur revenant sur la polémique déclenchée en France par les projets
d'investissements de son pays.
Le président François Hollande a indiqué jeudi qu'un fonds d'investissement franco-qatari sera
"créé auprès de la Caisse des dépôts" pour investir dans les banlieues et le reste du territoire
français. "Le Qatar veut investir dans nos banlieues, sur nos territoires ? Très bien, acceptons
cette offre, cette proposition, mais nous le ferons ensemble", a déclaré François Hollande lors
d'un entretien accordé à RFI/TV5Monde et France24 depuis l'Elysée. "Ce n'est pas un pays
qui va choisir le talent, l'entreprise, qu'il veut soutenir", a insisté le chef de l'Etat rappelant que
le Qatar avait fait part de son intention d'investir en France avant son élection.
Le Qatar s'intéresse depuis fin 2011 aux banlieues françaises, auxquelles il voulait dédier à
l'origine un fonds de 50 millions d'euros. Le gouvernement français a donné son feu vert et
souhaite que de l'argent privé et public s'ajoute au financement qatari. Des membres de
l'opposition UMP ont demandé une commission d'enquête parlementaire sur les
investissements du Qatar en France, où ce pays est propriétaire du club de football
professionnel de la capitale, le Paris-Saint-Germain.
http://lexpansion.lexpress.fr/economie/le-qatar-n-a-pas-d-arriere-pensee-politique-quand-ilinvestit-en-france_348046.html
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Ad bin Khalifa Al-Thani, à l'Elysée le 22 août 2012. KENZO TRIBOUILLARD / AFP
POLEMIQUE - Les investissements
qataris inquiètent…
dans l'Hexagone...
Ce ne sont pas les 35°C qui ont dû pousser Nicolas Sarkozy, début octobre, à venir faire un
jogging sur la corniche de Doha. Durant son quinquennat, le Qatar a su avancer ses pions
en France. Mais le poids que ce micro-Etat du Golfe a acquis, aussi bien sur le plan
économique que diplomatique, divise cette même classe politique. Dernier soubresaut en
date: un fonds de 50 millions d'euros pour les projets de banlieue retoqué par le
gouvernement en un plus consensuel fonds franco-qatari pour les PME.
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Interrogations multiples
Ce week-end, Christan Estrosi, le maire de Nice, n'a pas hésité à dire publiquement qu'il
préférait que le grand stade de Nice soit sponsorisé par les Allemands d'Allianz Rivierra
plutôt que par Emirates, la compagnie basée à Dubaï, autre pétromonarchie du Golfe. De fait,
de l'extrême droite à l'extrême gauche, la méfiance est de mise face à ces émirats. Quand
Marine Le Pen dénonce «un cheval de Troie de l'islamisme», Jean-Luc Mélenchon parle
d'«une colonisation par l'argent».
«Officiellement, le Qatar est un ami. Il est donc normal d'avoir des relations avec lui. Mais le
double jeu en politique, ça existe», affirme le député (UMP) Lionnel Luca, qui réclame une
commission d'enquête parlementaire. «Une commission permettrait de poser des questions,
telles que: “Est-ce que l'argent dégagé en France sert à financer des gens qui agissent contre
les intérêts français?”» Des informations de presse font état, sans preuve, du financement par
le Qatar des groupes djihadistes au Mali ou en Tunisie. Même François Hollande a évoqué la
question.
Au PS, Julien Dray est l'un des rares à souscrire à une telle commission. «Ce n'est pas
inamical. Je veux juste comprendre pourquoi ils investissent autant. Je ne suis pas de ceux qui
disent que l'argent n'a pas d'odeur.» «Faisons attention à ne pas faire fuir les investisseurs
étrangers qui sont facteurs d'emploi et de croissance», met en garde Nadine Morano (UMP),
qui a assisté au Prix Qatar de l'Arc de Triomphe. A la question de la proximité de la
monarchie wahhabite avec les groupes djihadistes, elle répond: «La France aussi vend des
armes!»
http://www.20minutes.fr/societe/1026772-pourquoi-qatar-divise-france#xtor=RSS145
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Fonds d’investissement qatarien.
Feu vert du gouvernement français
Le Premier ministre qatarien Hamad Bin Jassim Al-Thani lors de sa visite à Paris,
le 7 juin 2012.
REUTERS/PhilippeWojazer
Par Daniel Vallot
Après le football et l'immobilier, le Qatar va investir dans les banlieues françaises.
L'information a été confirmée ce lundi 24 septembre 2012 : le gouvernement français a
décidé de donner son accord à un projet de fonds d'investissement à destination des
entrepreneurs issus des quartiers en difficulté.
50 millions d’euros, c’est la somme qui devrait être mise sur la table pour abonder ce
fonds d’investissement. L’information n’est pas nouvelle : c’est en effet à la fin de
l’année 2011 que le Qatar avait fait part de son intention de miser sur les entrepreneurs
de banlieues, suite à la sollicitation d’un collectif d’élus locaux réunis au sein de l’Aneld,
l’Association nationale des élus locaux pour la diversité.
Mais la nouveauté réside dans la réponse positive apportée ce lundi par les autorités
françaises, après de longs mois de tergiversation. Un feu vert assorti, il est vrai, de
plusieurs conditions : le fonds devra être également abondé par des investisseurs français,
qu’ils soient publics et privés, et sera élargi aux territoires ruraux en difficulté.
« Pour nous c’est une bonne nouvelle, explique Faten Hidri, conseillère régionale d'Ile-de
France (PR) et membre de l'Aneld. On a vraiment porté l’idée de défendre ces
entrepreneurs des quartiers populaires, qui n’ont pas accès facilement à des financements.
Cela a suscité beaucoup d’espoir, puisque l’on a reçu des centaines de dossiers, des gens
qui ont mis de l’argent sur la table pour monter des business plan sérieux. C’est de
l’investissement, ce n’est pas de la charité, contrairement à ce que certains peuvent dire.
»
Un fonds polémique
La naissance de ce fonds d’investissement, inédit en France, n’est pas allée sans susciter
son lot de critiques. Certains élus se sont inquiétés d’un désengagement de l’Etat de
territoires dont le développement serait désormais confié à une puissance étrangère. Mais
la critique la plus virulente est venue de Marine Le Pen, la présidente du Front national
dénonçant en pleine campagne présidentielle un fonds « communautaire ». Accusation
rejetée en bloc par les élus de l’Aneld. « Ce fonds se base uniquement sur des critères
territoriaux, et en aucune manière sur des critères confessionnaux ou communautaires »,
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affirme ainsi Faten Hidri. « On est des élus républicains et il n’est pas du tout question de
faire des différences entre citoyens français. Comme je le dis souvent, un Romain
habitant à La Courneuve sera plus aidé qu’un Mohammed qui habite dans le XVIe
arrondissement de Paris. »
Restent plusieurs zones d’ombre : le montant des sommes qui seront apportées côté
français, et le calendrier prévu pour la mise en œuvre effective du fonds. Les élus de
l’Aneld, se faisant l’écho des entrepreneurs de banlieue, se disent impatients.
Côté qatarien, aucun commentaire... Mais avec cette initiative, l’émirat confirme son
intérêt grandissant pour la France. Au-delà des investissements prestigieux dans le sport
(avec le PSG) ou l’hôtellerie (Royal Monceau, Carlton), le Qatar a également pris pied
dans un nombre impressionnant d’entreprises françaises au cours des dernières années, de
Lagardère à Suez, en passant par LVMH, Vivendi ou encore Total.
http://www.rfi.fr/moyen-orient/20120924-fonds-investissement-qatarien-feu-vert-gouvernementfrancais-banlieues
Investissements du Qatar en France :
combien ?
Un député demande une commission
d'enquête
Après la confirmation de la France, lundi, que le Qatar allait investir dans les "territoires
déshérités" français, beaucoup de chiffres circulent. Entre 75 millions et un milliard
d'euros. Le député des Alpes-Maritimes Lionnel Luca demande une commission
parlementaire.
Le député Lionnel Luca demande une commission d'enquête
Après plus d'une année de tergiversations, le gouvernement a finalement donné son feu
vert à la création d'un fonds d'investissement. Il sera abondé par l'Etat et le privé français,
a expliqué une porte-parole du ministère de Redressement productif, "ce sera un fonds
franco-qatari, comme il y a un fonds franco-chinois ou franco-émirati. Cette mixité irait
au-delà de la présence des deux Etats, l'idée étant que l'apport français soit porté
également par des fonds privés".
Combien ?
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L'objectif de l'Etat était de doubler la mise de départ de 50 millions d'euros pour
arriver à 100 millions d'euros. Ces chiffres ne sont pas officiels et depuis l'annonce,
beaucoup d'autres circulent. Certains médias ont évoqué mardi un milliard d'euros. La
ministre chargée de l'économie numérique et des PME, Fleur Pellerin, n'a pas démenti ce
chiffre mais ne l'a pas confirmé non plus.
Le député centriste Jean-Christophe Lagarde, le président du groupe d'amitié
France-Qatar à l'Assemblée Nationale, ne croit pas du tout que l'investissement soit
si important, pour lui ce serait plutôt "300 millions d'euros, la moitié provenant de
la Caisse des dépôts et consignations et l'autre moitié de l'Etat qatari".
Le ministère du Redressement productif ne confirme aucun de ces chiffres.
Une commission d'enquête
Après l'annonce de ce fonds d'investissement en direction notamment des banlieues, le
député des Alpes-Maritimes Lionnel Luca a demandé la constitution d'une commission
d'enquête sur l'action du Qatar en France. Il doute de la nature de l'intérêt de l'Emirat
pour la France. Un Etat qui "pratique un islam intégriste, qu'il encourage partout dans le
monde". Lionnel Luca s'inquiète : "Un certain nombre de choses se disent, se racontent,
des peurs se manifestent, et il me paraît tout à fait utile que la représentation nationale
puisse connaître les tenants et les aboutissements à propos de ces investissements".
Lionnel Luca, le député qui demande une commission d'enquête sur le fonds
d'investissement du Qatar
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Qu'est-ce que le Fonds d'investissement qatari ?
Le fonds souverain du Qatar a été créé en 2005 pour diversifier l'économie de l'Emirat et
préparer l'après-pétrole. Il détient 100 milliards de dollars d'actifs destinés à des
investissements sur le long terme. En France, il détient des parts dans Lagardère,
Vivendi, Vinci, Véolia, Total et LVMH.
Il a récemment financé à Londres 80% de la plus haute tour d'Europe. Les investisseurs
planchent actuellement sur le rachat de 49% de la branche or d'un milliard brésilien.
http://www.franceinfo.fr/economie/investissements-du-qatar-en-france-combien-un-deputedemande-une-commissio-749903-2012-09-26
Le Qatar est-il en train d'acheter la
France et sa diplomatie à grands coups
d'investissements ?
Le Qatar accumule les investissements en France. Foot, immobilier, banlieues... Avec son
poids financier, le pays semble se donner les moyens de mettre sous pression la
diplomatie française, qui n'ose pas froisser son "généreux ami"...
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Atlantico : Petite monarchie pétrolière et gazière du golfe Persique, le Qatar a choisi d'investir
massivement en France et en Europe, dans le sport (avec le rachat du PSG), dans l'immobilier,
les banlieues (lire notre article : Arnaud Montebourg renonce à son hold-up sur les 50 millions
d'euros promis par le Qatar aux banlieues et double la mise)... Où va-t-il s’arrêter ?
Karim Sader : La succession des crises financière de 2008 et économique de 2009-2010 ayant
plongé les économies occidentales dans la récession aura été une aubaine pour le Qatar. A
contre-courant de la grande tendance internationale, le riche émirat gazier affichait une
croissance économique insolente, dopée avant tout par sa production de GNL (gaz naturel
liquéfié) dont Doha est devenu le premier producteur mondial l’an dernier.
Bénéficiant d’une conjoncture interne extrêmement favorable, avec l’absence de toute
contestation politique et sociale, qui, au contraire de l’Arabie ne contraint pas le régime à
acheter la paix sociale à grand renfort de pétrodollars, la dynastie des Al-Thani avait dès lors
les mains libres pour investir son surplus de richesses à l’étranger. En ces temps de crise, les
investissements qataris, très bien accueillis par des économies occidentales en crise, ont
permis à l’Emirat de réaliser d’importantes plus-values en profitant de la période de récession
pour racheter des capitaux à des prix très attractifs.
Si on y regarde de plus près, ces investissements n'ont aucun effet durables. Ne sont-ils pas
avant tout un moyen d'asseoir la diplomatie qatarie ?
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Effectivement, j’aurais tendance à penser que les investissements tous azimuts du Qatar à
l’étranger s’apparentent davantage à des achats compulsifs qu’à une réelle stratégie de long
terme, qui pourrait par exemple servir à assurer la diversification économique du pays, qui
demeure largement dépendant du secteur des hydrocarbures.
En réalité, derrière cette politique de placements massifs se cache une véritable angoisse
existentielle ! J’entends par là que le Qatar cherche par-dessus tout à compenser sa
vulnérabilité géopolitique et militaire, ainsi que sa faiblesse démographique. Pour cela, le
minuscule émirat, coincé entre les deux mastodontes régionaux que sont l’Arabie et l’Iran, a
besoin d’exister à l’étranger en semant ses investissements dans des domaines divers et variés.
N’oublions pas que si le Qatar est assis sur les troisièmes réserves mondiales de gaz, sa
position géographique le met à l'avant-poste d’une confrontation entre l’Iran cherchant à se
doter du feu nucléaire et des Etats-Unis dont les plus importantes bases militaires – hors
frontières américaines – se trouvent justement en territoire qatari.
Par conséquent, en étant l’otage des tensions régionales et dépourvues d’un « hard power » le
Qatar a fini par développer une sorte de « complexe » qui le pousse à cultiver son
rayonnement à l’international, par le biais de son soft power dont la finance, le sport et AlJazeera sont les principaux piliers.
Peut-on dire que l’implication du Qatar dans le financement des banlieues s’inscrit dans cette
même dynamique ?
L’implication du Qatar dans le financement des projets de jeunes entrepreneurs des banlieues
suscitent de vives passions, car il ne s’agit pas d’un investissement anodin. Je dirais tout
d’abord qu’il est symptomatique du phénomène de mondialisation, à travers lequel un Etat
géographiquement éloigné parvient à tisser des liens avec une communauté en contournant le
sacro-saint modèle de l’Etat-Nation qui est clairement en faillite dans nos démocraties
occidentales. C’est du moins ce que laissait présager la première mouture du projet, qui a vu
une association d’élus issus de la diversité venir frapper directement à la porte du Qatar. Ce
dernier a certainement sauté sur l’occasion pour accroître sa visibilité internationale – ce qui
constitue une véritable obsession pour les dirigeants de ce minuscule émirat qui cherche en
permanence à soigner son image de marque.
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J’ajoute par ailleurs que cet investissement suscite d’autant plus de controverses qu'il
intervient clairement dans l'une des fonctions régaliennes de l’Etat, à savoir la politique
d’intégration socio-économique des banlieues. Il semble toutefois que les responsables
français tentent à présent d’y ajouter une participation de l’Etat ainsi que d’étendre la stratégie
de financement à « d’autres départements défavorisés », sans doute pour contrecarrer les
accusations de communautariste lié à un projet dont les détracteurs considèrent qu’il vise des
zones majoritairement peuplées de citoyens issus de l’immigration arabo-musulmane.Nicolas
Sarkozy et François Hollande ont-il fait preuve d'une approche diplomatique différente à
l'égard de l'émirat ?
La réappropriation du projet franco-qatari pour le financement des banlieues, initié sous
Sarkozy, par la nouvelle équipe socialiste au pouvoir semble attester d’une forme de
continuité dans le partenariat économique entre les deux Etats. Je serais toutefois plus prudent
concernant la nature de l’alliance diplomatique, notamment sur les questions relatives au
Moyen-Orient. Le changement de locataire à l’Elysée a forcement un impact dans la nature
des relations entre les dirigeants. Pour rappel, le couple Sarkozy-Bruni entretenait des
rapports amicaux avec l’Emir et son épouse « préférée », la cheikha Mozah. Ainsi l’émir
Hamad était devenu dès 2007 le joker diplomatique de la politique arabe de Sarkozy.
Or, ces relations de proximité ont parfois porté préjudice à la France, dans la mesure où ils ont
irrité le puissant royaume saoudien qui ne supporte pas que le Qatar lui fasse de l’ombre, tout
comme d’autres pétromonarchies du Golfe en rivalité avec Doha, tel que les Emirats-ArabesUnis. Certaines entreprises françaises en auraient fait les frais, se retrouvant mis en échec sur
de nombreux contrats, qu’il s’agisse de la vente de rafales à Abou Dhabi ou bien du TGV à
l’Arabie…
Je pense que le nouveau pouvoir socialiste a tendance à rééquilibrer ses rapports avec Doha au
profit des autres puissances sunnites – à l’instar de la politique qui fût menée du temps de
Jacques Chirac – et ce, tout en maintenant d’excellentes relations bilatérales avec l’Emirat.
Notons toutefois que le cercle des amitiés franco-qataries comporte également de nombreuses
personnalités du Parti Socialiste ; de Manuel Valls à Ségolène Royal, en passant par Arnaud
Montebourg, tous se sont rendu à Doha dans le cadre d’évènements divers…
Vraisemblablement, le Qatar est très actif dans la crise syrienne : financements douteux,
bataille médiatique... Comment peut-on expliquer le silence français sur ce point ?
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Il est incontestable que le Qatar a tiré le plus grand bénéfice de cette dynamique des «
printemps arabes » en sponsorisant les mouvements de contestation de Tunis au Caire, en
passant par Benghazi et Damas. Mais très vite, les orientations pro-islamistes de l’Emirat, qui
a soutenu et financé les campagnes électorales des Frères Musulmans et de leurs ramifications
régionales, ont suscité les interrogations de ses partenaires occidentaux, l’Europe en
particulier.
Dans le cas de la France, du moins sous le mandat de Sarkozy, je ne pense pas qu'on puisse
parler de « silence ». Pour mémoire, certains comportements du Qatar en Libye (ingérence
dans les affaires intérieures et soutiens aux mouvements jihadistes radicaux) avaient suscité la
fureur de Sarkozy, lequel n’avait pas hésité à rappeler l’émir à l’ordre. Par ailleurs de plus en
plus de voix critiques se font entendre quant à l’agenda panislamique du Qatar à travers le
monde, y compris dans l’Hexagone.
Quoiqu’il en soit, sur le dossier syrien, Français et Qataris sont en parfaite concordance,
œuvrant à la chute du régime de Bachar al-Assad. Pour ce faire, Paris ne saurait se passer du
rôle actif de Doha qui sert (comme il a servi en Libye) d’intermédiaire direct dans le soutien
apporté à l’insurrection. Des divergences dans l’agenda de la transition post-Assad pourraient
toutefois émerger entre français et qataris : si Paris entend favoriser la formation d’un
gouvernement transitoire qui puisse garantir la survie de toutes les minorités (alaouites,
chrétiens, druzes, kurdes,…), il est fort à parier que les orientations pro-sunnites de Doha
conduisent l’Emirat à appuyer un nouveau pouvoir qui soi dominé par la majorité sunnite,
type Frères Musulmans…
http://www.atlantico.fr/decryptage/qatar-est-en-train-acheter-france-et-diplomatie-grandscoups-investissements-karim-sader-459486.html?page=0,0
Pourquoi
millions
le
Qatar
dépense
des
pour les banlieues françaises ?
Le Qatar va aider les banlieues françaises à se développer en contribuant à un fonds
approuvé par le nouveau gouvernement socialiste. Les raisons d'un tel
investissement.
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Emmanuel Bringuier
L'émir du Qatar en compagnie de François Hollande, le 22 août 2012, à l'Elysée.
(AFP)1 / 1
Mais où s’arrêtera le Qatar ? Le minuscule émirat, à peine plus grand qu’un
département français, multiplie les investissements à travers le monde, via son fonds
souverain le Qatar Investment Authority. Tirant sa richesse principalement du gaz,
dont il est le troisième producteur mondial, le Qatari est ainsi devenu l’habitant le
plus riche de la planète, devant le Luxembourgeois ou le Suisse. Et cet argent,
l’émirat compte bien l’utiliser.
Ce lundi, le quotidien Libération révèle que le ministre du Redressement productif,
Arnaud Montebourg, aurait approuvé la création d’un fonds d’au moins 100
millions d’euros en faveur des projets d’entrepreneur des quartiers, financé en
grande partie par le Qatar. Evoqué sous le quinquennat Sarkozy puis finalement
mis en attente pour cause de campagne présidentielle, le projet est donc validé par le
gouvernement Hollande. L'Etat et le privé français y participeront.
Le PSG en vitrine médiatique
Cela fait plusieurs années que le Qatar a pris pied dans l'économie française, en
investissant dans les plus grandes entreprises hexagonales, telles que Vinci ou
Lagardère. Une bonne nouvelle pour certains experts, qui affirment que cela
démontre l’intérêt des investisseurs étrangers pour les entreprises françaises.
En rachetant le PSG, l’émirat s’est également offert une vitrine médiatique
composée de stars internationales, achetées à coups de millions d'euros.
Devenir leader du monde musulman
Avec ce plan pour les banlieues, le Qatar franchit une nouvelle étape dans ces
investissements. Mais quel intérêt pour l’émirat ?
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" Le Qatar connait actuellement une croissance à deux chiffres. Et de cette
croissance économique, le pays espère bien en retirer des dividendes politiques ",
analyse Samir Amghar chercheur à l’EHESS.
Le Qatar et son riche voisin, l’Arabie Saoudite, se livrerait une sorte de guerre
froide pour devenir un pôle d’attractivité dans le monde arabe et musulman en
général.
" Le PSG, le fonds pour les banlieues, tout cela fait partie d’un plan visant à faire
du Qatar un leader du monde musulman. Cela renvoie une image très positive du
pays." Tous les Parisiens connaissent désormais le Qatar qui leur a permis d’acheter
Zlatan Ibrahimovic, alors que l’Arabie Saoudite reste un pays relativement obscur.
Même chose, pour les jeunes entrepreneurs qui auront réussi grâce au fonds Qatar.
Mais les Occidentaux s’inquiètent aussi des prises de positions plus directes du
Qatar au niveau géopolitique. Le Canard enchaîné avait révélé en juin que l'émirat
finançait les groupes islamistes qui sèment le chaos au Nord du Mali. Le pays aurait
aussi joué le rôle de bailleurs de fond pour le printemps arabe.
" En aidant les rebelles tunisiens, le Qatar sait qu’il pourra en retirer des bénéfices
économiques. C’est un investissement astucieux sur le long terme", conclut Samir
Amghar.
http://www.bfmtv.com/international/qatar-depense-millions-banlieues-francaises-342606.html
Qatar - Armement - France
Michel Cabirol | 30/10/2012
Défense : 20 milliards d'euros sous le
soleil du Qatar... pour la France ?
Les industriels français se pressent à Doha. Et pour cause, la France a 20 milliards
d'euros de campagnes commerciales en cours actuellement. Du Rafale à l'hélicoptère de
transport NH90, du véhicule blindé hautement protégé Aravis à la corvette Gowind, le
Qatar est l'eldorado des industriels de l'armement français... A suivre.
Le Qatar est actuellement l'une des destinations les plus courues de la planète pour tous
les industriels de l'armement du monde entier. Et les groupes français, qui se pressent à
Doha, ne sont pas en reste. Loin de là. "La France a environ 20 milliards d'euros de
campagnes en cours au Qatar", explique un bon connaisseur des ventes d'armements dans
la région. Les besoins des Qataris sont très importants : des avions de combat aux
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différents modèles de navires de guerre, en passant par des hélicoptères, des blindés de
toute sorte et des missiles anti-aériens (Air défence). Bien sûr, à l'arrivée, Paris ne
gagnera pas tout. Aussi la France mise donc plus particulièrement sur quelques dossiers
prioritaires, qui figurent au-dessus de la pile. D'autant que les Américains, qui disposent
d'une importante base militaire à l'ouest de Doha, Al Udeid Air Base, n'ont pas l'intention
de rester l'arme au pied.
Rafale et NH90 en tête de gondole
En tête de gondole, il y a évidemment le Rafale de Dassault Aviation, l'obsession
française. Mais aussi l'hélicoptère de transport de troupes, le NH90 fabriqué par
Eurocopter et l'italien AgustaWestland, qui a été préféré par Paris à l'hélicoptère de
combat Tigre (Eurocopter) pour des raisons tactiques. La France estime que le NH90 a
plus de chance de s'imposer que le Tigre. S'agissant de l'avion de combat tricolore, le
Rafale sort d'une campagne extrêmement positive par temps chaud (50 degrés) au Qatar...
sans coup de chaleur à l'inverse des concurrents américains, les appareils de Boeing, les
F-15 et les F-18. Les Qataris, qui ont un besoin estimé entre 24 et 36 appareils, doivent
encore évaluer le Typhoon Eurofighter et le F-16 Block 50/52.
Selon certaines sources, Doha, dont les Mirage 2000-5 ont participé aux côtés des avions
de combat de l'armée de l'air française à l'opération Harmattan en Libye, pourrait choisir
un appareil d'ici à la fin de l'année en vue de rentrer en négociations exclusives. D'autres
sources contactées par "latribune.fr" estiment que ce calendrier est trop ambitieux. "Les
Qataris n'ont pas besoin de remplacer leur Mirage 2000-5 tout de suite", précise-t-on.
Quoiqu'il en soit, la France tiendrait la corde pour ce contrat : "l'émir a donné sa parole à
la France de remplacer les Mirage 2000-5 quand ce sera le moment par des Rafale",
rappelle-t-on à Paris. A condition aussi de trouver un point de chute au 12 Mirage 2000-5
de l'armée de l'air qatarie à l'image du contrat signé en 1994. Dassault Aviation avait à
l'époque réussi à recaser les Mirage F1 de Doha en Espagne pour vendre les Mirage
2000-5, qui cette fois-ci pourraient trouver preneur en Tunisie, en Egypte...
Le Tigre ?
Privilégié par Paris, le NH90 pourraient être commandés par les Qataris qui ont un besoin
de 10 à 20 appareils en version transport terrestre (TTH) et naval (NFH). "C'est ouvert",
confirme-t-on chez Eurocopter. Là aussi, les vols d'essai de l'hélicoptère auraient
impressionné Doha, qui traine encore une douzaine de vieux Sea King d'AgustaWestland.
Les Américains proposent quant à eux le Seahawk de Sikorsky. "Les NH90 sont des
appareils modernes par rapport au Seahawk", rappelle-t-on chez le constructeur européen.
Les Qataris sont aussi intéressés par une douzaine de Tigre. Eurocopter, qui a également
le Mexique et la Malaisie dans ses campagnes dédiées à son hélicoptère de combat, y
croit tandis que les autorités françaises estiment que les Qataris privilégieront l'Apache
de Boeing. Surtout si Doha choisit le Rafale.
Nexter veut également une part du gâteau. Le groupe public propose peu ou prou
l'ensemble de sa gamme : le véhicule blindé hautement protégé, l'Aravis ; le canon
autotracté Caesar ; le véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) et enfin des chars
Leclerc d'occasion. Le tout pour équiper une brigade qatarie. Le Leclerc serait déjà hors
course face au char allemand, le Leopard de Krauss-Maffei Wegmann. Thales espère
quant à lui fournir de C4I ainsi que des radios pour une brigade numérisée et de
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l'électronique à 6.000 véhicules. Le groupe d'électronique évalue l'ensemble de ses
campagnes au Qatar à 1 milliard d'euros sur une période de cinq et dix ans.
Les systèmes de défense anti-aériens pour MBDA
Contrairement à l'Arabie saoudite, chasse gardée de Thales, le missilier MBDA dispose
au Qatar de bonnes chances d'équiper les forces armées dans le domaine de la défense
anti-aérienne. Le groupe européen propose le VL-Mica ainsi que le système SAMP/T
équipé de missiles antimissiles Aster Block 1 pour la défense anti-aérienne. A plus long
terme, MBDA et le groupe naval DCNS proposeront des frégates équipées de systèmes
anti-missiles Aster 30. Enfin, le Qatar pourrait choisir rapidement à l'issue d'un appel
d'offre un constructeur pour équiper la marine qatarie de quatre corvettes. DCNS est sur
les rangs et propose son système de combat, le Setis.
20 milliards d'euros sous le soleil du Qatar... C'est une manne dont les industriels auront
bien besoin pour compenser la baisse sévère du budget de la défense français qui
s'annonce. A condition de mouiller le maillot pour obtenir des contrats. Pour autant, la
nouvelle majorité souhaite rééquilibrer les relations de la France dans la région en
renouant des liens étroits avec l'Arabie saoudite, où les Français sont depuis quelques
années mis sur la touche pour les mégacontrats. "Il ne faut pas lâcher la proie pour
l'ombre", analyse un bon connaisseur des affaires de défense. Eldorado ou mirage, la
frontière est ténue en matière de ventes d'armes.
http://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautiquedefense/20121025trib000727162/defense-20-milliards-d-euros-sous-le-soleil-du-qatarpour-la-france-.html
Qatar – islamistes
L'émir du Qatar brise l'isolement
diplomatique du Hamas
Le Monde.fr | 24.10.2012
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La visite est historique et a été saluée comme telle dans la bande de Gaza.
"Aujourd'hui, vous êtes un hôte d'importance, vous annoncez officiellement la levée
du blocus politique et économique imposé à la bande de Gaza", s'est félicité mardi
23 octobre le chef du gouvernement du Hamas, Ismaël Haniyeh, en accueillant
l'émir du Qatar et sa délégation à Khan Younès. Le cheikh Hamad Ben Khalifa AlThani est le premier homme d'Etat d'un tel rang à effectuer une visite dans le
territoire palestinien depuis l'accession au pouvoir des islamistes du Hamas en 2007.
Faisant la démonstration de l'influence croissante de son pays au Proche-Orient du
fait du nouveau jeu régional qui se dessine après les printemps arabes, l'émir a mis
fin à cinq ans d'isolement diplomatique du mouvement de la résistance islamique, au
risque d'amplifier la division palestinienne. Comme il l'ambitionne, le Qatar
pourrait bien inspirer d'autres chefs d'Etat sur la ligne politique à adopter dans la
région. "Cette visite pourrait servir à lever l'interdit qui semblait être respecté par
tous de ne pas visiter la bande de Gaza. Cela va notamment faire réfléchir les Turcs,
qui avaient envisagé une visite puis renoncer", estime Jean-François Legrain,
politologue à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman.
UN SOUTIEN POLITIQUE PLUS QU'HUMANITAIRE
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Entré en
limousine au poste-frontière de Rafah, depuis l'Egypte, accompagné de son épouse
la cheikha Mozah et d'une imposante délégation, l'émir du Qatar a parcouru la
bande de Gaza flanqué pour l'occasion de drapeaux aux couleurs blanc et pourpre
de la petite pétromonarchie du Golfe. Une visite de six heures ponctuée
d'inaugurations de projets que le petit émirat du Golfe s'est engagée à financer. Le
Qatar a porté son aide de 254 à 400 millions de dollars (de 195 à 307 millions
d'euros) pour financer la reconstruction d'infrastructures routières et de logements
dans le territoire palestinien dévasté par l'opération israélienne "Plomb durci"
entre décembre 2008 et janvier 2009. Une aide salutaire au moment où les dons
internationaux à l'Autorité palestinienne, et notamment ceux du Qatar, ont chuté,
passant de 1,8 milliard de dollars en 2008 contre 700 millions cette année, selon un
rapport de la Banque mondiale.
Lire en édition abonnés : Le Qatar renoue avec Gaza
La visite est pourtant loin de servir des ambitions strictement humanitaires.
"L'urgence humanitaire existe depuis longtemps dans la bande de Gaza. Le choix du
moment traduit une volonté calculée, qui est une volonté partisane qui profite aux
deux parties, note Jean-François Legrain. Une certaine neutralité aurait voulu que
l'émir fasse un arrêt en Cisjordanie. Mais il ne l'a pas fait." Certaines sources
affirment que le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, n'aurait
pas même été invité. La visite a été dénoncée par le comité exécutif de l'Organisation
de libération de la Palestine qui, tout en saluant le soutien à la reconstruction de la
bande de Gaza, a appelé les pays arabes à "ne pas poursuivre la politique
d'établissement d'une entité séparatiste dans la bande de Gaza, qui sert
fondamentalement les desseins israéliens".
LE RENFORCEMENT DU HAMAS AU DÉTRIMENT DU FATAH
La visite est vue comme un soutien affiché au mouvement de la résistance islamique,
visant à renforcer sa légitimité au détriment de Mahmoud Abbas et du processus de
réconciliation scellé il y a huit mois entre les deux frères ennemis à Doha, la capitale
du Qatar. Ce dont l'émir Ben Khalifa a semblé vouloir se défendre lors d'un
discours à l'université islamique de Gaza. "Il est temps de tourner la page de la
division palestinienne, d'ouvrir le chapitre de la réconciliation et du consensus, sur
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la base de ce qui a été fait à Doha et au Caire grâce aux efforts sincères du président
palestinien Mahmoud Abbas et du chef du bureau politique du Hamas, Khaled
Mechaal", a-t-il dit. Sans convaincre. "Tout le monde pense que le Hamas va s'en
servir pour renforcer la division", a déclaré à la radio officielle Voix de la Palestine
le responsable du dossier de la réconciliation au sein du Fatah, mouvement de
Mahmoud Abbas, Azzam Al-Ahmad.
Lire : Hamas-Fatah : l'introuvable réconciliation palestinienne
Et de fait, estime Jean-François Legrain, "cette visite est une prise de position
politique qui montre qu'aujourd'hui le Qatar mise sur le Hamas et non plus sur le
Fatah et l'OLP". "Actuellement le Fatah n'est pas un interlocuteur crédible. Son
incapacité à se réformer n'est pas un gage pour l'avenir", poursuit le chercheur. Le
Hamas disposerait en effet d'une capacité de mobilisation forte en Cisjordanie, qui
ne trouve pas à s'exprimer du fait de l'occupation israélienne, des forces de sécurité
palestiniennes et de l'implication internationale auprès de Mahmoud Abbas et de
son premier ministre Salam Fayyad, dont la politique de libéralisme économique a
entraîné une certaine dépolitisation. Les élections municipales qui se sont tenues
dimanche 21 octobre en Cisjordanie ont confirmé cette tendance, les candidats
officiels du Fatah ayant enregistré des scores réduits face aux rebelles du
mouvement. Ces derniers ont notamment gagné à Naplouse, Jénine ou Ramallah.
A la veille du renouvellement des instances dirigeantes du Hamas, cette visite
pourrait tout autant servir à renforcer le mouvement que constituer une ingérence
dans ses affaires internes. "Khaled Mechal, le chef du bureau politique du Hamas,
ami de longue date de l'émir du Qatar où il réside désormais, ne compte pas se
représenter. La visite de l'émir du Qatar dans la bande de Gaza peut également être
vue comme un soutien à la candidature d'Ismaël Haniyeh face à celle d'Abou
Marzouk, qui réside au Caire", explique Jean-François Legrain. Alors que le Qatar
entretient des relations ambiguës avec l'Egypte, entre proximité idéologique avec les
Frères musulmans dont est issu le président Mohammed Morsi et rivalité pour la
place de puissance régionale, l'élection d'Abou Marzouk pourrait renforcer les
relations entre le Hamas et les Frères musulmans égyptiens au détriment du Qatar.
UNE NOUVELLE DONNE RÉGIONALE
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Car, si la visite de cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani marque une nouvelle étape
dans le soutien déjà ancien au Hamas, elle sert aussi et surtout les ambitions
régionales du petit émirat. "Le Qatar profite du printemps arabe, dans lequel il joue
un rôle moteur pour satisfaire son appétit de puissance. Il a misé sur les Frères
musulmans et leur mouvance pour promouvoir ses intérêts, que ce soit en Tunisie,
en Egypte, en Libye ou ailleurs", explique Jean-François Legrain. Le cheikh
Hamad, au pouvoir depuis 1995, a mis l'immense fortune qu'il tire du pétrole et du
gaz au service d'une politique volontariste de puissance. Pendant le printemps
arabe, le petit émirat a ainsi soutenu sans réserve les soulèvements contre la vieille
garde arabe, dont le régime de Bachar Al-Assad en Syrie.
Par sa visite dans la bande de Gaza, l'émir du Qatar exprime notamment sa
gratitude envers le Hamas pour avoir rompu ses relations avec le régime syrien.
Jusqu'à cette année, la direction politique en exil du Hamas était en effet installée à
Damas, considéré comme un membre-clé de l'axe de résistance à Israël avec l'Iran et
le Hezbollah. Avec le début du soulèvement syrien, le chef du bureau politique,
Khaled Mechal, est parti pour Doha. "En ligne d'horizon l'on trouve la rivalité avec
l'Iran. Le Qatar cherche à se substituer à l'Iran comme premier allié du Hamas",
ajoute Jean-François Legrain. L'Iran avait réduit son soutien au Hamas après
qu'Ismaïl Haniyeh se fut prononcé en faveur de l'opposition syrienne.
Et c'est en cela que la visite du Qatar "bénéficie d'une certaine 'compréhension'
internationale, du moins des Etats-Unis et de l'Union européenne en dépit des
sanctions prises contre le Hamas, tous deux misant sur les Etats du Golfe pour
contrecarrer la puissance iranienne", poursuit le chercheur. Alors que l'Arabie
saoudite est empêtrée dans des questions de succession à répétition, le Qatar est
l'allié de substitution du fait de ses capacités économiques, de sa stabilité politique et
de sa volonté de puissance qui l'a toujours amené à ménager toutes les alliances dans
un parfait jeu d'équilibriste.
http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2012/10/24/l-emir-du-qatar-brise-lisolement-diplomatique-du-hamas_1780041_3218.html
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En s'invitant à Gaza,
le Qatar s’impose dans la diplomatie
régionale !
L'émir du Qatar a effectué la première visite d’un chef d’État étranger dans l’enclave
palestinienne depuis l'arrivée au pouvoir du Hamas en 2007. Une initiative qui pose l'émirat
en acteur incontournable de la scène diplomatique régionale.
Sarah LEDUC (texte)
L’émir du Qatar, le cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, est arrivé mardi 23 octobre en fin de
matinée dans la bande de Gaza pour une visite de quelques heures. Il est le premier chef
d’État étranger à se rendre dans l’enclave palestinienne depuis la prise de pouvoir par le
Hamas en 2007 et le blocus israélo-égyptien qui s’en est suivi.
Entré à Gaza par l’Égypte, qui participait à la sécurisation de la visite, l’émir est arrivé à la
tête d’une grande délégation - dont son épouse cheikha Moza et son Premier ministre et chef
de la diplomatie, Hamad ben Djassim, faisait partie - accueillie par le chef du gouvernement
gazaoui, Ismaïl Haniyeh.
LES PRÉCISIONS DE NOTRE CORRESPONDANT GALLAGHER FENWICK
Par FRANCE 24
"Le Qatar réalise un repositionnement de sa diplomatie régionale et s’assure en même temps
un coup médiatique en jouant au-dessus de sa catégorie", explique à FRANCE 24 Antoine
Basbous, directeur de l’Observatoire des pays arabes et auteur de "Le tsunami arabe" (Fayard,
2011).
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Une visite exceptionnelle
Pour cet invité de marque, le Hamas a vu les choses en grand : hymnes nationaux, drapeaux
qataris et palestiniens déployés dans Gaza, tapis rouge et comité d’accueil rassemblant les
hauts responsables du parti islamiste, dont un dirigeant en exil du mouvement, Saleh Arouri,
venu pour l'occasion.
Cette visite est suffisamment exceptionnelle pour justifier les moyens. Tout d’abord, l’émir
n’est pas venu les mains vides mais avec 400 millions de dollars (307 millions d'euros) à
investir. Remplissant une promesse faite en 2008, Hamad ben Khalifa al-Thani financera un
projet de reconstruction d'infrastructures routières et de logements dans le territoire
palestinien, dévasté en 2008 durant l’opération israélienne "Plomb durci". Ces fonds serviront
également à porter un projet de 3000 logements qui porteront son nom, près de Khan Younès
et un projet immobilier de 25 millions de dollars (19 millions d'euros) pour les prisonniers
libérés par Israël en échange du soldat Gilad Shalit en 2011. Il a également fait un don de 30
millions de litres de carburant pour la seule centrale électrique du territoire.
Mais sa venue constitue aussi et surtout une symbole fort. L’émir est le premier chef d'État à
répondre à une invitation du Hamas, boycotté par la communauté internationale pour son
refus de reconnaître Israël et de renoncer à la lutte armée. Une démarche que la seule
philanthropie ne peut expliquer.
"Le Qatar surfe sur la crête de la vague"
Petit pays de 11 000 m2 et de 250 000 habitants, le Qatar, qui est déjà un acteur précieux et sollicité,
abat une nouvelle carte pour accroître son influence dans la région. "Le Qatar s’éloigne de l’image de
cette puissance qui tourne le dos aux causes arabes si ce n’est pour porter la haine en Syrie. Il y a un
mois, il décrochait le Hamas du giron syro-iranien, il continue aujourd’hui dans cette logique",
poursuit le chercheur. Le Qatar cherche, en effet, à pousser le Hamas à prendre ses distances avec
l’Iran, l’un de ses principaux appuis dont le programme nucléaire laisse planer la menace d’un conflit
armé avec l’État hébreu.
En bon termes avec les puissances occidentales, avec Israël, mais également avec l’Égypte ou l’Iran,
le Qatar - qui dispose d’une véritable machine de guerre financière et médiatique avec sa chaîne AlJazira - n’hésite pas à jouer sur tous les tableaux et à s’imposer comme un interlocuteur
incontournable, au-dessus des conflits.
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"Ce n’est pas une puissance qui joue la diplomatie de l’exclusion mais qui trouve son avantage dans
le brassage multiple de réseaux, de contacts, de contextes. Le Qatar parle avec la terre entière pour
défendre ses propres intérêts", poursuit Antoine Basbous. "Le Qatar surfe sur la crête de la vague".
Une visite qui renforce le clivage Fatah-Hamas ?
Cette visite, qui favorise plutôt le Hamas que le Fatah, n’en est pas moins qualifiée de "bizarre" par
Israël et critiquée à mots couverts par le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui
a insisté sur la nécessité de "préserver l'unité des Territoires palestiniens et de mettre fin à la
division", selon l'agence officielle palestinienne Wafa. Mais c’est justement là que le bât blesse.
"En se rendant à Gaza, l’émir prend position pour le Hamas et dramatise le rapport entre le Hamas et
le Fatah à un moment où l’Autorité palestinienne est en crise. Il grève ainsi toute possibilité de
réconciliation et renforce les tendances sécessionnistes", s’inquiète Jean-Paul Chagnollaud,
professeur et directeur de l’Institut de recherches et d’études sur la Méditerranée et le MoyenOrient (Iremmo).
Mais là encore, le Qatar tire son épingle du jeu. "En investissant sa force de frappe dans la
reconstruction de Gaza, le Qatar renforce donc non seulement ses liens avec le Hamas, mais aussi
avec les Frères musulmans égyptiens et, également, avec Israël, qui fait son jeu des tensions interpalestiniennes", poursuit Jean-Paul Chagnollaud.
Il est en revanche moins sûr que les territoires palestiniens en sortent gagnants. Alors que Mahmoud
Abbas s’apprête à renouveler auprès de l’ONU sa demande d’autonomie des territoires palestiniens,
l’initiative qatarie risque de fragiliser encore un peu la perspective de la création d’un État
palestinien.
http://www.france24.com/fr/20121023-visite-gaza-emir-qatar-s-impose-diplomatieregionale-hamas-fatah-territoirespalestiniens?ns_campaign=editorial&ns_source=RSS_public&ns_mchannel=RSS&ns_fee=0&
ns_linkname=20121023_visite_gaza_emir_qatar_s_impose
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Le Qatar est-il en train d'aider les
islamistes au Nord-Mali comme il l'a
fait en Libye ou en Syrie ?
Malgré son territoire limité et sa population de moins de 300 000 ressortissants, le Qatar
réussi petit à petit à prendre le leadership dans le monde arabe en soutenant les politiques
islamistes les plus extrêmes.
La dernière visite de l’émir Hamad Ibn Khalifa al-Thani dans la bande de Gaza et le soutien
affiché au Hamas constituent un véritable pavé dans la mare. Non content d’apporter son
soutien (400 millions de dollars) à ce que les Etats-Unis, l’Union Européenne et évidemment
Israël considèrent comme un mouvement terroriste, le petit Etat affaiblit au sein du monde
arabe la maigre légitimité que l’Autorité Palestinienne et le Fatah avaient péniblement
conquis au fil des ans. De ce fait, le Qatar affiche tranquillement sa stratégie : prendre le
leadership du monde arabe en soutenant systématiquement les éléments politiques les plus
extrémistes. Un « smart power » qatari en quelque sorte, qui commence à susciter des
inquiétudes.
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Rappelons bien évidemment que le système politique du Qatar est tout sauf démocratique, ce
qui assure sans conteste à la famille régnante une rapidité de décision et une marge de
manœuvre quasi illimitées. Doté d’un territoire limité d’à peine 11 000km2 et d’une
population de moins de 300 000 ressortissants, le Qatar a réussi le pari d’exister sur la scène
internationale en multipliant les acquisitions, les partenariats industriels et les investissements
dans des domaines variés bien connus : LVMH (1% du capital), Veolia (5%), Vinci (2ème
actionnaire), Total et Vivendi (2%) ou encore Lagardère (12.83%) mais aussi dans
l’immobilier. Pour ce qui est du soft power, le Qatar dispose depuis près de 10 ans d’une
chaîne de télévision, Al Jazeera, diffusée à la fois en arabe en anglais depuis Doha… et
bientôt en français, probablement depuis Dakar. Dernier coup de maître : le Qatar est devenu
membre associé de l’Organisation Internationale de la Francophonie, alors que la procédure
normale impose plusieurs années d’attente (article du Monde). Dotée d’une image plutôt
moderne et positive en Occident, la chaîne héberge pourtant l’émission hebdomadaire du
cheikh Youssef Qaradawi, interdit de séjour en France l’an dernier (article de l'Express). Al
Jazeera s’est montrée particulièrement en pointe dans la couverture des printemps arabes, en
particulier dans la crise syrienne où elle a clairement pris parti pour les insurgés.
Dans le domaine diplomatique, le Qatar s’est timidement engagé dans une stratégie qui a
d’abord consisté à exister face à l’Arabie Saoudite, son grand rival sunnite et wahhabite. Mais
c’est lors de la crise libyenne que s’est manifestée de façon spectaculaire cette diplomatie qui
a réussi à convaincre l’OTAN d’intervenir tout en fournissant une aide au sol grâce à des
contingents militaires (que certains estiment à 5000 personnels) présents bien avant la chute
de Khadafi. Sans vouloir préjuger de leurs qualités militaires, leur rôle essentiel a été
d’acheter à coup de millions de dollars les tribus réticentes et à distribuer des armes dont la
provenance en particulier française n’est un secret pour personne. Au point que le CNT et
même certains experts militaires français se sont émus d’une participation qatarienne qui dès
le début a choisi de privilégier outrageusement les éléments salafistes (article de l'Express)
qui furent certainement à l’origine du meurtre de l’ambassadeur américain à Benghazi.Mais
l’action du Qatar se porte maintenant en direction de la zone sahélienne vers les mouvements
d’inspiration islamiste tels qu’Ansar el-Din, AQMI (al-Qaïda au Maghreb Islamique) et le
Mujao (Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest) et ce au su et au vu de
tout le monde, y compris de la France dont les otages sont détenus par les mêmes. En quelque
sorte la quadrature du cercle pour les militaires français mobilisés par le dossier malien tandis
que le gouvernement accueille à bras ouvert les investissements qatariens sur son sol. Le 7
octobre dernier, le ministre des Affaires Etrangères tranchait le nœud gordien : « on a
beaucoup parlé du Qatar, c’est vrai que son action est souvent spectaculaire. Mais dès lors que
les investissements sont positifs pour la balance française, pour l’emploi, je ne vois pas
pourquoi on serait réticents ».
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La Syrie, engagée dans un conflit violent entre les forces du régime et les opposants
majoritairement soutenus, financés et armés par l’Arabie Saoudite et le Qatar sucite également
les inquiétudes de Washington qui craint que les armes acheminées avec le soutien des EtatsUnis ne tombent entre de « mauvaises mains ». Quant à la situation libanaise, on peut d’ores
et déjà s’attendre au pire. De nombreux drapeaux salafistes figuraient dans le cortège qui a
suivi les funérailles du général Wissam al Hassan et qui appelait à la chute du gouvernement
soutenu par le Hezbollah, à tel point que certains leaders chrétiens des Forces Libanaises s’en
sont émus. Preuve d’une radicalisation de toute la région, il semblerait qu’à l’instar de ce qui
se passe en Syrie, tous les moyens sont bons pour contrer la menace chiite et iranienne dans la
région.
Qu’on ne se méprenne pas : le Qatar est un magnifique exemple d’audace diplomatique et
restera un cas d’école que les analystes et les universitaires citeront à juste titre encore
longtemps comme un exemple de la construction volontariste d’une sorte de « smart power »
combinant hard et soft. En effet, le tour de force de ce micro-Etat, quasiment inexistant dans
les années 1960 (à cette époque, le Qatar comptait 60000 habitants) a été celui de devenir un
acteur majeur dans tous les domaines. Et l’on ne peut pas raisonnablement s’offusquer qu’un
Etat, aussi microscopique soit-il, tende à accroître sa puissance et suive ce qu’il croit être ses
intérêts. Mais peut-être serions-nous avisés de faire de même au risque de constater, comme
cela arrive souvent, que nos intérêts divergent.
Frédéric Pichon est diplômé d’arabe et de sciences-politiques. Docteur en
histoire contemporaine, spécialiste de la Syrie et des minorités, il est chercheur associé au
sein de l'équipe EMAM de l'Université François Rabelais (Tours).
Il est l'auteur de "Voyage chez les Chrétiens d'Orient", "Histoire et identité d'un village
chrétien en Syrie" ainsi que "Géopolitique du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord".
http://www.atlantico.fr/decryptage/qatar-est-en-train-aider-islamistes-au-nord-mali-commefait-en-libye-ou-en-syrie-frederic-pichon-526538.html?page=0,0
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