Les différentes constructions de l`image de l`enfant dans une ONG

Transcription

Les différentes constructions de l`image de l`enfant dans une ONG
Université de Fribourg
L’enfant travailleur – Déconstruction du concept
Département des Sciences de la société
SE 2006
Les différentes constructions de l’image de
l’enfant dans une ONG : le cas de l’UNESCO
Travail de séminaire
Effectué sous la direction de l’assistante diplômée France Manghardt
Présenté par :
Bonvin Florie
Gendre-Borruat Stéphanie
Handschin Philippe
[email protected] [email protected] [email protected]
(pp.23-32)
(pp.3-12)
(pp.13-22)
Table des matières
Pages
Introduction
3
1. Présentation de l’organisation
4
1.1
Histoire
4
1.2
Etats membres
5
1.3
Fonctionnement
6
1.4
Financement
7
1.5 Cinq fonctions
7
1.6 Objectifs du millénaire
9
1.7
Présentation subjective du site
9
1.8
Image de l’enfant
10
1.8.1
10
Image de l’enfant véhiculée par le site
1.8.2 Image de l’enfant véhiculée par les chartes et les conventions
2. Image de l’enfance communiquée au grand public : analyse de brochures
2.1 Analyse de la brochure « Chemins d’espoir »
11
12
12
2.1.1 Illustrations et graphisme
12
2.1.2
Vers une typologie de l’enfance
15
2.1.3
Utilisation de cas exemplaires
17
2.1.4
Causes mentionnées pour expliquer la situation de l’enfant
17
2.1.5
Critiques
18
2.2 Analyse du document : « Sources UNESCO : Quelles portes de sortie ? »
19
2.3
20
Analyse de la brochure « Street Children »
3. Réflexion critique sur l’image de l’enfance transmise par l’UNESCO
22
3.1 Approche constructiviste de l’enfant comme acteur social
22
3.2 Volontés de l’organisation cachées derrière ses propos
23
3.3 Risque lié à la catégorisation des enfants travailleurs
24
3.4 Influence du contexte sur le concept d’enfance
26
3.5 Valeur de survie du travail
27
3.6 Problématique d’une intervention basée sur la protection
29
Conclusion
30
Bibliographie
33
Annexes
34
2
Introduction
Dans nos sociétés occidentales, la conception de l’enfant a particulièrement évolué depuis les
années 1860 (Praz, 2005). Elle est passée d’une image d’un enfant fonctionnel à celle d’un
enfant acteur de sa trajectoire revendiquant une place privilégiée d’un moment de vie qui
compte sur ses valeurs propres. Cette évolution se trouve être le résultat de la conjoncture de
nombreux facteurs, tels que l’Histoire, la psychanalyse, la société industrielle et la montée de
l’individualisme (James et Proud, 1990). Dès lors, cet enfant prend une place qui mérite d’être
reconnue par l’intermédiaire de textes officiels comme par exemple celui de la Convention
des Droits de l’Enfant (1989) et la constitution d’organismes soucieux de mettre en œuvre les
moyens nécessaires à l’amélioration de sa condition. Cependant, notre vision occidentale
ethnocentrique peut exercer une large influence dans la mise en place des mesures proposées
par les organisations et par conséquent jouer en leur défaveur et entraver leur réussite.
L’image de l’enfant véhiculée par les messages des organismes est révélateur de leurs
positionnements et de leur compétences à se décentrer. Motivées par les besoins de fonds,
elles mènent leurs actions en raison d’un idéal occidental et omettent de répondre à leur
propre credo : venir en aide aux enfants démunis.
Le présent travail s’inscrit dans une approche constructiviste de la connaissance, puisqu’il
tente de dégager une réalité de l’organisation l’UNESCO et s’attache à envisager les concepts
de l’enfance et du travail sous cet angle. Dans le paradigme constructiviste, les explications ne
découlent pas de la psyché individuelle ou de la structure, d’après Burr (1995), mais des
processus sociaux ou interactions sociales construisant du sens. En effet, les propos tenus sont
une construction de la pensée qui organise les informations relevées, dans le but de leurs
attribuer du sens et de dégager une cohérence. En d’autres termes, les connaissances ne
relèvent pas l’essence ou la dimension naturelle des objets sociaux, mais essaie de les
appréhender par la pensée en les adaptant, les organisant et les évaluant socialement, dans le
but de donner du sens à la réalité. Dans cette optique, nous comprenons la nécessité d’adopter
une position critique concernant les connaissances prises pour acquises, du fait qu’elles
s’inscrivent dans une spécificité historique et culturelle. C’est pourquoi les propos des ONG
doivent être recontextualisés, car ils reflètent une vision occidentale ethnocentrique qui ne
correspond pas à la réalité d’autres contextes. En outre, considérant que connaissance et
action sociale vont de paire, il apparaît nécessaire, selon Burr, dans une vision
constructivisme, de différencier les contextes, afin de pouvoir agir.
3
La responsabilité du chercheur étant de suffisamment prendre conscience de son propre
ancrage culturel afin de pouvoir proposer une action constructive, le présent travail a pour but
que nous exercions notre compétence de décentration en adoptant un regard critique sur une
organisation à choix, en s’appuyant sur nos connaissances et outils de réflexion.
L’organisation que nous avons choisie est l’UNESCO, l’Organisation des Nations Unies pour
l’Éducation, la Science et la Culture Cet exercice s’inscrit dans le cours-séminaire intitulé
« L’enfant travailleur : déconstruction d’un concept ».. Il s’organise en trois parties : la
première présente l’UNESCO, de sa conception à son fonctionnement, en s’arrêtant sur les
fondements éthiques de sa politique d’action. La seconde a pour mission d’exposer l’image de
l’enfant que véhicule les textes soutenus par l’UNESCO, dans la communication de
l’organisation avec le « grand public ». Une troisième partie offre une critique et une analyse
de celle-ci. Une conclusion mettra terme à notre travail en soutenant notre position.
1.
Présentation de l’organisation
L’UNESCO est une agence spécialisée de L’ONU1. Dès lors, elle respecte la même ligne
éthique, les mêmes chartes, et tend vers les mêmes objectifs. Cependant, bien qu’elle dépende
de l’ONU en ce sens qu’elle doit lui faire part de ses activités et de ses choix, elle garde une
certaine indépendance dans sa gestion. C’est par l’intermédiaire du Conseil économique et
social2 de l’ONU qu’elle garde le lien avec celle-ci. Cette organisation est donc d’une
importance internationale. Son siège se trouve à Paris.
1.1 Histoire
Née le 16 novembre 1945, cette organisation est le fruit de la seconde guerre mondiale. Son
berceau est celui des traumatismes liés à l’horreur nazie et à la crainte de voir se reproduire
une telle atrocité. Différents pays, dès 1942, alors que la guerre n’est pas encore terminée,
s’appliquent à réfléchir sur la manière dont pourraient se reconstruire les systèmes éducatifs
au plus vite après la guerre. Cette réflexion prend vite une étendue internationale qui doit
œuvrer dans la reconnaissance de l’égalité de tous les peuples, la revendication d’une seule et
unique race, et le devoir de construire le monde dans une perspective de solidarité universelle.
1
Voir organigramme de l’ONU : annexe 1
Le Conseil économique et social a pour tâche de coordonner les activités économiques et sociales du système
de l’ONU. Il s’occupe de gérer et mettre en lien la coopération internationale en matière de développement.
2
4
Dans ce contexte, les Nations Unies (ONU) se constituent dès le 25 juin 1945. Cinq mois plus
tard, l’UNESCO est créée par l’approbation de sa constitution et l’apposition des signatures
des premiers États membres. Son principe constitutionnel se base sur l’idée que « les guerres
prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être
élevées les défenses de la paix. »3 En d’autres termes, l’UNESCO se propose de participer à la
construction d’un monde dans lequel règne la paix, une paix qui ne peut s’émanciper qu’à la
condition d’être désirée par l’homme. Pour inciter chaque homme et chaque peuple à
construire la paix, sont pris comme support l’éducation, la science, la culture et la
communication. La paix implique une démarche volontaire, qui dépasse le seul fait de
l’absence de conflits. En effet, elle entend nécessiter des infrastructures financières et
fonctionnelles afin d’améliorer les conditions des populations et de leur venir en aide en cas
de traumatismes. Il s’agit en réalité de tendre vers l’établissement d’une culture universelle de
la paix dont les exigences premières sont le respect de la différence et le dialogue. Le but de
l’UNESCO est donc de servir de lien communicationnel pour pouvoir « contribuer au maintien
de la paix et de la sécurité en resserrant, par l’éducation, la science et la culture, la
collaboration entre les nations, afin d’assurer le respect universel de la justice, de la loi, des
droits de l’Homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe,
de langue ou de religion, que la Charte de Nations Unies reconnaît à tous les peuples. »4 Les
notions que défend l’UNESCO sont au nombre de trois. La première consiste à promouvoir la
diversité; la seconde s’attachent à promouvoir les forces vives ; et la troisième fertiliser.
1.2 États membres
A l’origine, les vingt-six signataires5 étaient : les États-Unis d'Amérique, le Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques, la
Chine, l'Australie, la Belgique, le Canada, le Salvador, le Guatemala, le Honduras, le
Luxemburg, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Pologne, la Yougoslavie, le Costa Rica,
Cuba, la Tchécoslovaquie, la République Dominicaine, la Grèce, Haïti, l'Inde, les Pays-Bas, le
Nicaragua, Panama, et l'Union Sud-Africaine. Par la suite, les pays suivants adhéraient à la
déclaration : le Mexique, la Colombie, l'Irak, l'Iran, le Libéria, le Paraguay, le Chili,
l'Uruguay, l'Egypte, la Syrie, la France, les Philippines, le Brésil, la Bolivie, l'Ethiopie,
l'Equateur, le Pérou, le Venezuela, la Turquie, l'Arabie Saoudite, et le Liban.
3
Acte constitutif de l’UNESCO
http://portal.unesco.org/fr/ev.php-URL_ID=3328&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201html
5
Voir liste des pays membres : http://www.un.org/french/aboutun/annees.htm
4
5
Actuellement, l’UNESCO compte 190 pays membres et ses ramifications s’étendent dans le
monde entier. Ce dernier est découpé en cinq parties principales : l’Afrique, les États Arabes,
l’Asie et le Pacifique, l’Europe, l’Amérique du Sud et l’Amérique latine, et les Caraïbes.
Les États membres peuvent ne pas être membres de l’ONU et ceux de l’ONU membres de
l’UNESCO. Ils peuvent quitter l’organisation en cas de désaccord et revenir ensuite proposer
leur candidature. Cependant, l’UNESCO se réserve le droit de refuser les candidatures ou
d’exclure un pays membre si elle estime qu’il ne remplit pas ou plus les conditions requises.
Ce sont les contextes historiques, tels que la Guerre froide, ainsi que l’évolution des politiques
menées, qui influencent en majeure partie l’adhésion ou non des États membres.
1.3 Fonctionnement
L’UNESCO tient un rôle majeur d’institution internationale. Elle s’organise autour de quatre
organes. Le premier est la Conférence générale, dans laquelle chaque État membre est
présent et compte pour une voix, qui représente l’organe principal au niveau décisionnel. À
raison d’une rencontre tous les deux ans, elle définit les conduites et les directions de l’entier
du travail de l’organisation. Par votation, le budget et le programme à venir y sont approuvés.
Son Directeur est élu pour une durée de quatre ans. Le second, le Conseil exécutif est formé
de 58 membres. Les pays qui le constituent sont élus dans un souci de prétendre à la
représentation du plus de profils possibles de la diversité culturelle. Il a pour fonction de
préparer la Conférence Générale et de vérifier que les décisions de cette dernière soient
appliquées et respectées. Le Conseil exécutif se réunit deux fois par année. Quant au troisième
organe, le Secrétariat, il se compose du Directeur général et de l’ensemble du personnel, soit
environ 2145 personnes6. Le Directeur général accomplit un devoir de gestionnaire exécutif et
assume de mettre en place des propositions qui intègrent les décisions de la Conférence
Générale, dont il a la charge de préparer les réunions. Des Commissions nationales, en tant
que quatrième organe, ont pour but d’assurer le lien entre l’organisation et les sociétés civiles.
C’est par ce biais que l’UNESCO peut collaborer avec environ 350 ONG. L’UNESCO est le
seul système de l’ONU à bénéficier de cette forme de structure.
6
Selon le recensement du personnel d’avril 2003
6
1.4 Financement
Les fonds essentiels de l’UNESCO sont fournis par les États membres. En effet, une
participation de chaque pays est décidée en raison de sa puissance économique. Cette somme
(610 millions de dollars américains pour l’année 2004/2005) fait partie des fonds du budget
ordinaire. Néanmoins, les États membres peuvent soumettre des fonds supplémentaires que
l’organisation se charge d’insuffler dans les différents programmes qu’elle soutient. Cette
partie se présente comme fonds extra-budgétaires (360 millions en 2002). Une ressource
relativement importante est celle de particuliers. En effet, quiconque peut contribuer dans la
mesure de son choix et de ses possibilités à faire un don et ainsi participer à augmenter les
fonds dont l’organisation va pouvoir profiter.
1.5 Cinq fonctions
L’UNESCO développe ses domaines de compétences pour venir en aide aux plus démunis et
aux plus vulnérables. Dans le domaine de l’éducation, l’organisation se soucie de l’éducation
pour tous et place en priorité la problématique de l’égalité entre les sexes pour l’accès à la
scolarisation. Elle incite de nouvelles pratiques pédagogiques qui répondent aux droits de
l’homme et au développement durable. Elle soutient de nombreuses campagnes en faveur de
l’alphabétisation. Dans le domaine des sciences, elle encourage le développement durable et
collabore à de nombreux programmes qui ont pour mission de préserver les ressources de la
Terre, dont l’eau est une priorité. Dans le domaine de la culture, elle travaille pour le respect
et la reconnaissance d’un patrimoine mondial dans l’idée que certains lieux sont de valeur
universelle. Ce patrimoine commun à tous les hommes permet de renforcer le concept de
culture commune, d’égalité entre tous au-delà de la diversité. Il peut être considéré comme
lien entre tous les hommes et le symbole de la richesse de l’apport de chacun et de chaque
société à l’humanité entière. Dans chacun de ses domaines, elle assume cinq fonctions
principales :
1) L’UNESCO se propose d’être un laboratoire d’idées, en ce sens que pour pouvoir agir de
manière constructive, il est nécessaires de définir et de comprendre les logiques des
difficultés et des mutations des sociétés. Cette approche analytique permet de mettre en
place des stratégies appropriées et efficaces au moyen de l’éducation, de la science et de la
culture dans le respect de l’éthique souhaitée dans le but de conditionner chaque individu
à œuvrer en faveur de la paix.
7
2) L’UNESCO s’applique à la tâche majeure de collecter, transmettre, informer les
connaissances et les pratiques qu’elle détient ainsi que de favoriser la mise en place des
projets novateurs à la lumière de ses connaissances. C’est pourquoi, l’UNESCO se
présente comme un centre d’échange d’information qui offre un système de réseaux
importants pouvant permettre la mise en commun de toutes les informations.
3) L’UNESCO collabore avec les États membres et leur sert de guide et de conseiller dans
l’élaboration de règles et de lois communes ou la révision de textes déjà ratifiés qui
peuvent être formalisés afin d’être reconnus dans un instrument juridique international.
Elle propose des forums, espaces privilégiés dans lesquels ces décisions institutionnelles
peuvent être discutées, et leurs conformités évaluées au niveau éthique, normatif et
intellectuel. Elle est alors un organisme normatif qui travaille dans l’élaboration de
normes communes aux valeurs universelles. Par ailleurs, le Conseil exécutif de l’UNESCO
est un organe habilité à recevoir des plaintes en cas de violation des droits humains.7
4) L’UNESCO accompagne les pays membres qui le désirent dans l'accomplissement de leurs
projets. Elle les évalue, cherche des financements, fait profiter de ses connaissances et de
ses expériences. C’est donc une assistance technique qu’elle met en place comme
organisme de développement des capacités dans les États membres.
5) L’UNESCO, dans sa qualité d’organisme international, multidisciplinaire et spécialisé,
veille à ce que les programmes et les projets des différents États membres respectent les
objectifs, les principes et les priorités et correspondent à la ligne éthique choisie afin
d’assurer une intervention efficace. Elle assume un rôle de catalyseur pour la coopération
internationale pour le développement. Pour ce faire, elle diffuse les connaissances et les
questionnements sur lesquels elle se penche par la voix de rapports mondiaux et de
périodiques qu’elle fait circuler.
7
Les droits de l’homme sont aujourd’hui appelés également droits de l’humain suite à une remarque de la
conseillère fédérale suisse, Micheline Calmy-Rey.
8
1.6 Objectifs du Millénaire
Pour les années à venir, l’UNESCO s’est fixé des buts suivants8 :
1) Réduire de moitié la population vivant dans l’extrême pauvreté d’ici à 2015
2) Assurer l’éducation primaire dans tous les pays d’ici à 2015
3) Eliminer les disparités entre les sexes dans l’éducation primaire et secondaire d’ici à 2005
4) Aider à les pays à mettre sur pied des stratégies nationales pour un développement durable
d’ici à 2005 afin d’inverser d’ici à 2015 la tendance actuelle à la déperdition des
ressources environnementales
1.7 Présentation subjective du site
Le site de l’UNESCO est relativement facile à trouver : il suffit de taper sur Google « UNESCO
organisation générale ». De nombreux programmes ou organismes liés à l’organisation
apparaissent. Cette multitude de propositions démontre l’ampleur de l’organisation. Il faut
parfois s’essayer à plusieurs fois avant de trouver le site général. Néanmoins, l’accès demeure
facile. Il peut également être possible de s’y connecter par l’intermédiaire du site de l’ONU.
En effet, dans la page principale de ce dernier, un lien direct avec celui de l’UNESCO est
proposé.
La page d’accueil du site de l’UNESCO est fort bien aménagée et permet ainsi une navigation
aisée. La difficulté à ne pas se perdre vient du fait de l’importance du site qui n’a de mesure
que celle de l’organisation elle-même ! La présentation générale par sa qualité et son
efficacité laisse présager une organisation sérieuse. Le même symbole apparaît en haut de
chaque page, permettant ainsi l’assurance d’une identité visuelle. Ce symbole est celui d’un
delta de couleur bleu qui rappelle le rôle de l’UNESCO, à savoir celui de dialogue et de pont
entre les sociétés et les peuples pour promouvoir et construire la paix dans le monde au
travers de valeurs universelles. Cette icône soutient l’idée de réunification, de création et
d’ouverture. En d’autres termes, elle souffle le message du respect de la diversité, de
l’encouragement à l’innovation et la reconnaissance de besoins fondamentaux universels dans
un esprit de solidarité universelle. Par ailleurs, le teint choisi est assez doux et évoque celui de
l’eau, emblème de purification et ressources essentielles. Le logo du delta est suivi de
différentes représentations suivant les thèmes des pages.
8
http://portal.unesco.org/fr/ev.php-URL_ID=3328&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html
9
En ce qui concerne celui qui nous intéresse le plus, à savoir celui de l’éducation, cinq photos
d’enfants de personnes de tout âge et de toute origine dont le regard donne signe d’une
attention particulière rejoignent le logo du delta. Cette série d’images ni bouleversante, ni
rassurante anime l’idée que ces personnes concentrées se trouvent en position d’écoute et
d’attitude studieuse, telle qu’elle est souhaitée en situation scolaire. Elle soutient donc le sujet
de la page, celui de la promotion de l’éducation. Par ailleurs, elle véhicule implicitement
l’idée du possible accomplissement d’un monde de paix pour tous les hommes de toutes les
nations au moyen du développement par l’éducation pour tous.
Une brochure explicitant en bref l’histoire, le fonctionnement et les buts offre un bon aperçu
de l’organisation. Ses couleurs vives confirment le sentiment d’un organisme très dynamique.
Par ailleurs, elles suscitent l’impression d’une organisation imposante, efficace et faisant foi
d’une certaine autorité dans les domaines auxquels elle prétend contribuer. Cet effet
correspond à l’image d’un organisme international, sérieux, conséquent et digne de confiance.
1.8
Image de l’enfant
1.8.1
Image de l’enfant véhiculée par le site
Dans l’ensemble, le site présente des photos d’enfants souriants et attendrissants en situation
de travail dans les champs ou à l’école. Le portrait véhiculé désire convaincre le visiteur que
les enfants s’épanouissent dans l’apprentissage scolaire, ou celui d’un métier lié à la nature.
En d’autres termes, l’image d’un enfant épanouit par l’accès aux savoirs scolaires, mais aussi
par la connaissance de la terre, suggère le message écologique du développement durable.
Notons que le site ne propose pas de lien thématique avec le travail. La raison de cette
absence tient au fait que l’UNESCO n’a pas pour domaine de compétences la problématique
du travail, qui répond aux compétences de l’OIT. L’UNESCO mène ses objectifs en misant sur
l’éducation, la science et la culture. Par contre, rappelons qu’elle collabore avec l’OIT, dont
elle reconnaît les conventions.
10
1.8.2
Image de l’enfant véhiculée par les chartes et les conventions
Comme précité dans notre introduction, l’image de l’enfant est soumise à une profonde
évolution. L’idée d’une Convention de Droits de l’Enfant est inspirée du travail et des
discours tenus au début du siècle par le tchèque Janusz Korczak9. Cette mutation a influencé
de manière avérée la rédaction des textes s’attachant ses droits. Ils se sont vus non seulement
devoir répondre à une nécessité des contextes actuels, mais aussi s’adapter à cette nouvelle
conception de l’enfant. De plus, de par le fait de réfléchir sur l’identité de l’enfant et ses droits
et d’en proposer des écritures officielles, leur rédaction et leur acceptation a certainement
assis cette nouvelle perception de l’enfant et de l’enfance.
L’UNESCO partage les mêmes chartes et conventions que celles reconnues par l’ONU, à
savoir, entre autres :
- Charte des Nations Unies
- Déclaration universelle des Droits de l’Homme (10 janvier 1948)
- Pacte international relatif aux droits économiques, sociale et culturels (1966)
- Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966)
- Protocole se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1976)
- Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et
politiques (visant à abolir la peine de mort) (1989)
- Convention internationale des Droits de l’Enfant (1989)
- Convention sur les pires forme de travail des enfants (1999)
De ces textes, il ressort que l’enfant a des droits dès sa naissance tant au niveau familial en
recevant un nom, qu’au niveau de son identité citoyenne en obtenant une nationalité. Cette
première constatation inscrit l’enfant dans une construction identitaire individuelle, par le
simple fait de la reconnaissance de sa personne, ainsi que sociale, puisqu’il est lié à une
nation. Cependant, la famille reste la référence principale en ce sens qu’elle seule peut
déterminer les lignes de l’éducation accordée. Juridiquement, dès l’âge de 18 ans, tout
individu est alors considéré comme un adulte. La Convention internationale des Droits de
l’Enfant de 1989, qui réactualise celle de 1959, dégage l’image d’un enfant acteur, à qui il
faut laisser la parole. Par conséquent, pour répondre au mieux à ses besoins et mener des
stratégies d’action intelligentes et efficaces, il est indispensable de se baser sur leurs discours.
9
Janusc Korczak (1878-1942) est pédiatre. Il est intervenu en faveur des droits des enfants. Il construisit des
orphelinats dans le souci de leur offrir une vie décente.
11
2. Image de l’enfance communiquée au grand public : analyse de brochures
Nous allons à présent nous interroger sur l’image de l’enfance utilisée dans la documentation
destinée à la communication au grand public et à la collecte de fonds. A travers une série de
quelques brochures collectées sur le site de l’UNESCO, nous essaierons notamment de voir
dans quelle mesure une typologie des enfants est proposée, et à quelle logique de construction
celle-ci obéit. Une part importante de notre travail sera consacrée à l’analyse de l’illustration
et du graphisme des brochures. Nous essaierons principalement de voir quelles informations
ce matériel nous apporte-t-il sur l’image de l’enfance, et quelles stratégies de présentation
sont employées (e.g. sensibiliser le public, apporter des informations).
L’image générale de l’enfance que l’on peut détacher des textes analysés est tout d’abord
celle de vulnérabilité. Les enfants ont des rêves, ils aspirent tous à des besoins fondamentaux
tels que le jeu ou l’école. On peut penser que le fait de suivre une scolarité est vu comme une
nécessité et un désir inscrits dans l’essence même de l’enfant. En effet, le texte, et surtout les
illustrations, jouent principalement sur une opposition binaire entre travail, exploitation, d’une
part, et éducation de l’autre, chacun des termes étant associés respectivement à des enfants à
l’air triste, au regard vide et malheureux dans le premier cas, et des enfants curieux,
concentrés dans leur activité d’écolier dans le second. Ils sont dépeints comme des victimes
directes et indirectes des adultes et de la société, qui les utilisent à leurs fins ou leurs font
subir les conséquences de guerres et de conflits. La déculpabilisation des enfants est une
dimension présente toute au long de ces textes : ils sont décrits comme des sujets passifs,
subissant des conditions extérieures sur lesquelles ils n’ont aucune prise. La parole leur est
rarement donnée, et si tel est le cas, c’est pour apporter un éclairage plus personnel, un
témoignage quant aux souffrances qu’ils subissent, ou aux bénéfices retirés d’un programme.
2.1
Analyse de la brochure « Chemins d’espoir »
2.1.1 Illustrations et graphisme
Le titre de cette brochure comporte un sous-titre : « programme de l’UNESCO pour
l’éducation des enfants en détresse », ainsi qu’un second sous-titre « Dix ans, 1992-2002 ».
Dans le quart gauche inférieur de la page, on trouve le logo de l’UNESCO. Le lettrage est
blanc, à l’exception du mot « espoir » en rouge. Trois mots dans le premier sous-titre sont
imprimés en gras : éducation, enfants, détresse.
12
L’ensemble du texte est superposé à une illustration qui occupe l’intégralité de la page, une
photographie de deux enfants sur laquelle nous reviendrons plus loin. L’ensemble du texte se
trouve sur la moitié gauche de la page, et est, par conséquent, en opposition avec les deux
sujets de l’illustration. Il est pourtant une exception, à savoir une courte phrase, « quand je
serai grand, je voudrais être un enfant… », placée à droite de la tête du petit garçon.
La couverture représente un petit garçon et une petite fille. Tous deux sont dans une pièce
souterraine en pierre, qui semble très étroite. Une ouverture par le haut dispense un rayon de
lumière naturelle que les enfants regardent fixement, comme si quelque chose de particulier se
passait. L’image joue sur les clairs-obscurs, les enfants sont plongés dans l’obscurité, et seule
la lumière extérieure les éclaire. Le petit garçon, habillé d’une veste claire épaisse et d’un
bandeau dans les cheveux, pose ses mains sur une pierre. La fille, dont on ne voit quasiment
que le visage, a les cheveux emmêlés, qui semblent ne pas avoir été peigné depuis longtemps.
Cette page de couverture mise donc sur une logique simple : un texte épuré et une photo qui
dérange le lecteur par le caractère inadéquat de la situation. D’autre part, comme nous l’avons
dit plus haut, les contrastes entre lumière et obscurité constituent l’essence dramatique de la
photo : les enfants, abandonnés, sont condamnés à l’obscurité et prisonniers, ils ne peuvent
sortir voir le monde extérieur qu’ils semblent pourtant convoiter. La courte phrase « quand je
serai grand, je voudrai être un enfant… » montre des enfants privés d’enfance, une étape
essentiel du parcours de l’individu puisqu’en disant cela, le petit garçon montre qu’il ne peut
envisager l’étape suivante, la vie adulte, comme le font les autres enfants occidentaux. Privé
de ce stade essentiel au développement de l’individu, le sujet ne peut imaginer sa vie d’adulte,
comme l’indiquerait, dans une suite logique, le métier que l’enfant projette d’exercer une fois
adulte. Cette situation pourrait cependant être inversée, comme l’indique le mot « espoir »,
seul élément de l’ensemble d’une autre couleur que le blanc ou le noir, qui montre que des
actions, même si elles sont loin d’être achevées comme l’indique le mot « chemin », sont
entreprises par l’UNESCO. Les trois mots en gras « éducation », « enfants » et « détresse »
donnent quant à eux un complément d’information quant à la thématique de la brochure.
Le premier texte de la brochure comporte trois couleurs uniquement : fond anthracite avec
texte principal en blanc et une accroche en blanc : « Le monde a-t-il abandonné ses
enfants ? » (deux derniers mots en rouge). Il s’ouvre sur un chiffre : 500 millions d’enfants
dans le monde soufrent et meurent dans des conditions de dénuement et de détresse extrême.
13
Ce chiffre risque d’augmenter dans l’indifférence générale. Puis, on trouve une utilisation
directe de cas rencontrés par Mme Ohoven, ambassadrice de l’UNESCO qui signe la préface
de cette brochure.
Une photo, pleine page, suit le texte. Elle représente un jeune garçon assis par terre, dans la
rue, le dos au mur. Sa tête est à demi enfoncée dans le col de son pull et penche de côté. Il
porte un pantalon trop grand pour lui, renfoncé dans ses chaussettes. A sa droite se trouve un
autre enfant dont la tête est également invisible, ce qui suggère à nouveau que ces enfants,
seuls et sans la présence d’adultes à leurs côtés, sont abandonnés et anonymes.
On parle ensuite des causes de ces situations :
- enfants victimes de la guerre et des catastrophes naturelles
- enfants vivant dans la rue
- enfants travailleurs
- enfants handicapés
Puis une seconde photo : une petite fille écrit une addition sur un tableau noir, éclairée par un
rayon de soleil. Le tableau est fixé sur un mur de briques qui pourrait être un décor de rue.
La photo constitue un prélude au second texte, consacré aux actions de l’UNESCO. Fond
blanc et lettrage noir, titre « les actes plus forts que les mots » (actes en rouge). Le texte
commence par : « L’éducation des enfants en détresse a un prix et il est évident que l’ampleur
du défi requiert d’immenses moyens humains, matériels et financiers. Malheureusement,
l’évolution de l’aide internationale au développement, ces dix dernières années, démontre que
seules quelques-unes des nations les plus riches ont accepté de relever ce défi. ». Puis, on
présente le centre de l’action de l’UNESCO : Au cours de ses dix premières années
d’existence, le Programme de l’UNESCO pour l’éducation des enfants en détresse a reçu des
dons privés pour environ 24 millions de dollars (E.-U.). Ces fonds ont été intégralement
investis dans le soutien financier direct de 200 projets, dans toutes les régions du globe.
Une troisième photo clôt la partie introductive et représente au premier plan deux petits
garçons asiatiques, accroupis à même le sol, un cahier sur leurs genoux. Ils n’ont pas de
chaussures, et leurs habits sont sales. La scène se passe en plein air. Un des sujets est penché
sur un texte posé face à lui, la bouche entrouverte, et le second le regarde, comme s’il
s’apprêtait à lui donner une quelconque réponse, ou à attendre au contraire des explications.
14
Ils semblent tous deux appliqués et concentrés à fond dans leur activité. Ils se trouvent dans la
pénombre mais le texte qu’ils étudient est lui, baigné par la lumière du soleil. Au second plan,
deux autres enfants sont eux aussi dans la même situation, accroupis sur un cahier, un texte
posé à même le sol face à eux.
Une quatrième photo montre un petit garçon africain, nu, derrière des poutres qui évoque la
porte d’une cellule de prison. Son regard est brillant et paraît triste. Il semble qu’il regarde
directement le lecteur. Des lumières vives brillent derrière lui.
La brochure utilise donc différentes techniques pour sensibiliser le lecteur. La principale est
l’utilisation des contrastes. En effet, on peut distinguer deux types de photos : celles qui
illustrent des situations inacceptables pour les enfants, ou montrant leur souffrance, et celles
illustrant les bénéfices des programmes d’intervention. Au niveau du texte, les mots
susceptibles d’attirer l’attention du lecteur sont imprimés dans une couleur distincte du corps
du texte et voyante. La principale opposition qui ressort de ce document a lieu entre éducation
et absence d’éducation (e.g. servitude, exploitation, ignorance).
2.1.2 Vers une typologie de l’enfance
La brochure distingue entre les enfants :
-
victimes de la guerre et des catastrophes naturelles
-
vivant dans la rue
-
travailleurs
-
handicapés
Cette typologie se base donc sur la situation des enfants vue comme problématique. Les
projets de l’UNESCO décrits dans la brochure se basent également sur cette typologie.
Chaque catégorie est présentée successivement selon la structure suivante : tout d’abord, un
texte descriptif sur la catégorie d’enfants présentée : situation, problèmes, enjeux, etc. Puis,
une brève description des projets mis en place par l’UNESCO. Le texte est illustré par des
photos d’enfants illustrant la problématique avancée. Par exemple, la photo d’un jeune garçon
en treillis militaire, tenant un fusil, ou un autre en séance de rééducation après amputation
d’une jambe et pose d’une prothèse. Les photos ne sont pas accompagnées de légendes. On
peut penser qu’outre leur fonction d’illustration, elles visent à choquer et sensibiliser le lecteur.
15
Dans le cadre de ce travail, nous ne nous pencherons que sur les catégories des enfants
victimes de la rue et travailleurs.
Les enfants de la rue sont dépeints dans des conditions de vie intolérables. Ils sont décrits
comme ayant perdu toutes attaches familiales, et ceux qui en ont encore subissent un cadre de
vie marqué par l’alcoolisme de leur parents, des violences physiques et sexuelles, etc. « Peuton vraiment être surpris que des enfants issus de tels milieux choisissent la liberté et
l’excitation de la vie dans la rue, plutôt que la torture physique ou émotionnelle que leurs
parents leur imposent ? » (p.24). Le texte met en exergue l’absence de scolarité des enfants et
par conséquent, leur vulnérabilité face aux proxénètes et dealers. L’éducation est leur seule
porte de sortie, mais beaucoup d’entre eux ont une mauvaise expérience de l’école,
principalement parce qu’ils ont été méprisés ou expulsé par les maîtres en raison de leur
pauvreté. Il faut alors mettre l’accent sur un soutien psychologique en complément, tel le sport.
Le chapitre sur les enfants travailleurs commence en soulignant que « le problème du travail
des enfants est probablement aujourd’hui l’obstacle le plus important dans la lutte menée pour
donner à chaque enfant un avenir grâce à l’éducation. Selon les statistiques mondiales, un
enfant sur cinq dans la tranche des 5 à 14 ans, participe effectivement, d’une manière ou
d’une autre, à l’activité économique. » (p.31). Les problèmes majeurs mentionnés sont :
•
L’énergie consacrée par les enfants à leur activité les empêche de suivre une scolarité ;
•
« Le travail des enfants est sélectif socialement : il est lié à la pauvreté, à la taille de la
famille, et au manque d’accès à l’éducation » ;
•
L’esclavage moderne : les enfants sont capturés dans des zones géographiques difficiles et
utilisés pour le proxénétisme, le trafic de drogues, etc.
Mais le texte précise que tous les enfants qui travaillent ne sont pas victimes de l’exploitation
ou de l’esclavage, et met en garde contre les jugements moraux « eurocentrés ». Par exemple,
« dans les familles nombreuses des paysans, les enfants ont toujours aidé leurs parents […].
Au sens traditionnel, le travail constitue un vecteur-clé de la socialisation et de l’éducation : il
démontre que l’enfant fait réellement partie intégrante de la famille et de la communauté. Et,
dans les situations de pauvreté endémique, le travail des enfants relève de la survie
économique de la famille grâce à leurs maigres revenus. » (p.33). Il est donc trop facile de
penser tous les enfants travailleurs comme des victimes, mais il l’est également de relever
« que l’éducation est obligatoire et que, par conséquent, tous les enfants travailleurs devraient
simplement être envoyés à l’école » (p.34).
16
2.1.3 Utilisation de cas exemplaires
Les cas exemplaires sont présentés sous trois formes. Premièrement, par de brèves vignettes,
d’une phrase généralement, qui présentent une situation typique comme : « le petit garçon qui
ramasse les ordures sur la Smokey Mountain, immense montagne d’ordures fumantes aux
environs de Manille » ou « la jeune adolescente qui travaille dans un bar du quartier chaud ».
Des passages plus dense présentés sur des pages sur fond noir ou anthracite présentent des
cas plus étoffés, ou des descriptions de pratiques d’exploitation, comme le cas des enfants
employés dans l’industrie du tissage, ou de situations sociales et familiales particulières.
La brochure présente également des témoignages d’enfants, comme celui d’un petit garçon
qui, après avoir perdu sa mère, est envoyé dans une famille qui l’emploie très durement
comme domestique. Suite aux mauvais traitements que lui imposait celle-ci, il s’enfuit dans
une ville ou il travaille de nuit comme de jour dans un garage. « Aujourd’hui, j’ai 15 ans, et je
souffre depuis 8 ans. Je ne sais absolument pas comment rentrer dans mon village, car j’ai
même oublié son nom. Je ne sais même pas si mon père est toujours en vie. J’étais le seul fils
de ma mère lorsqu’elle est morte » (p.32).
Enfin, les cas exemplaires sont présentés par le biais de photos, qui représentent le plus
souvent 1/8ème de page et émaillent ponctuellement le texte. Par exemple, des enfants en train
de snifer de la colle, ou une jeune fille travaillant dans une chaîne de montage.
2.1.4 Causes mentionnées pour expliquer la situation de l’enfant
-
guerres, conflits : l’enfant perd sa famille, est placé dans un camp de réfugiés, souffre de
traumatismes, est mutilé. « Beaucoup ne revoient jamais leur famille ou grandissent dans
des camps de réfugiés sans nationalité ni nom. Privés des éléments essentiels à leur bon
développement, ils n’ont souvent que des repas précaires et rares, des soins de santé
irréguliers et une scolarité en dents de scie – lorsque ces services sociaux existent ! »
(p.17). Ils subissent les plus graves traumatismes, qu’ils soient engagés dans les combats,
ou témoins de viols et de violences. Nombreuses sont les études qui ont montré que la
guerre, son spectacle de violences et de destruction, engendre des dommages
psychologiques dévastateurs, souvent matérialisés chez les enfants par la rébellion, la peur
et la dépression. Ils doivent non seulement faire face à la transition de l’état de guerre à
l’état de paix, mais également au passage du statut d’enfant à celui d’adulte. » (p.17-18).
17
-
absence de scolarisation
-
catastrophes naturelles : les actions portent principalement sur la reconstruction de
systèmes et d’établissements scolaires dévastés.
-
travail, exploitation, esclavage : l’énergie consacrée au travail ne permet pas
l’investissement dans la scolarité. Dans les situations les plus graves, les enfants y sont
maintenus à l’écart par leurs proxénètes ou ceux qui les emploient dans le trafic de
drogues.
-
drogues : la consommation de drogues rend la misère de leur existence supportable, et les
actes délinquants sont commis grâce à l’euphorie passagère ressentie lors de la prise de
substance. « Ils ne mangent pas à leur faim, alors, pour soulager leurs crampes d’estomac,
ils reniflent des vapeurs de colle - la drogue bon marché si scandaleusement disponible
partout dans le monde. Dans un brusque vertige, la vie dans la rue leur paraît plus
supportable et ils trouvent l’énergie alliée à un manque d’inhibition pour voler un
portefeuille ou arracher un sac à main. Ils sont arrêtés. Ils sont battus. Ils dérangent. Et
fréquemment, ils sont tués. » (p.26)
-
absence de structure familial, ou structure familial déficitaire : les enfants « choisissent
la liberté et l’excitation de la vie dans la rue, plutôt que la torture physique ou
émotionnelle que leurs parents leur imposent » (p.23).
2.1.5 Critiques
On peut donc affirmer sans trop craindre que le véritable acteur de cette brochure est bien
l’UNESCO, et non les enfants. Dans la mesure où le document semble destiné à sensibiliser le
public, cette vue très institutionnelle du phénomène des « enfants en détresse » souffre bien
entendu un certain nombre de critiques, mais elle comporte selon nous certains avantages
également. En effet, il faut s’interroger sur les motivations qui poussent un individu à remplir
un bulletin de versement en faveur de tel programme, ou de parrainer un enfant. Parmi cellesci, la dimension émotionnelle et affective est certainement un des aspects les plus
déterminants d’un tel comportement. En contrepartie, l’information dispensée par la brochure
pêche sans doute par son manque d’objectivité, dans le sens ou elle donne une vue
uniformisante et déterministe des enfants. En effet, ceux-ci étant dépeints exclusivement
comme des victimes de l’égoïsme et de la cupidité des hommes, l’UNESCO en oublie de leur
donner un visage plus humain et plus individuel. S’agirait-il d’un « mal » nécessaire ?…
18
2.2 Analyse du document : « Sources UNESCO : Quelles portes de sortie ? »
Cette brochure reprend dans sa couverture la même illustration que « Chemins d’espoir ». Sa
ligne graphique est d’ailleurs assez semblable. Le lettrage comporte trois couleurs uniques, le
rouge, le noir et le gris sur fond blanc. Chaque page se compose au minimum d’un titre, d’une
accroche, et d’un texte explicatif qui s’accompagne dans presque tous les cas d’une photo
illustrant une situation en rapport avec le sujet traité.
La brochure s’ouvre sur des extraits de la déclaration de Federico Mayor10 sur « Le droit de
l’être humain à la paix », qui rappelle l’importance de la prévention et de l’éducation, « clé de
l’indispensable changement d’orientation d’un monde où l’écart qui nous sépare les uns des
autres, en termes de richesses matérielles et de savoir, ne cesse de se creuser au lieu de se
combler » (p.3). Au milieu du document figure une double page au titre univoque :
« Assassinés… », présentant une série de portraits au format photo passeport d’enfants,
d’adolescents et de jeunes adultes de favelas de Sao Paulo, victimes de balles perdues lors de
fusillades, ou assassinés par les mafias de la drogue et des policiers (pp.12-13). En bas de
chaque photo figure le prénom du sujet, ainsi que sa date de naissance et celle de sa mort.
Le thème de la bande ressort fréquemment. Ainsi, Ricardo, 14 ans passe ses journées à traîner
dans les rues du Cap dans lesquelles il fait la manche auprès des touristes et en fin de journée,
« se réchauffe au contact d’une dizaine de garçons, la bande avec qui il traîne, pour se
défendre et par amitié » (p.9).
Malgré une description généralement très négative du milieu familial (voir point 2.2), le projet
de la fondation Juconi au Mexique « cherche à remplir une condition sine qua non : restaurer
l’unité familiale » (p.10). La démarche comprend le repérage par des éducateurs des enfants
travaillant dans la rue pour les intégrer dans des programmes visant principalement à réduire
le temps passé dans la rue, ainsi qu’à (ré-)apprendre à communiquer, prendre soin de soi, etc.
Toutes les démarches se font avec l’implication des parents. Quant aux enfants vivants dans la
rue, l’intervention « se fonde sur un contact et un suivi individuel et vise à les réintégrer dans
leur famille, elle aussi traitée. » (p.10). On notera donc un contraste entre la présentation
généralement très négative qui est faite de la famille dans les brochures analysées, qui nous
pousserait plutôt à croire qu’elle constitue un élément mauvais, volontiers suppressible du
milieu de l’enfant, et l’importance de celle-ci dans certains programmes.
10
Directeur général de l’UNESCO de 1987 à 1999 et président depuis 2000 de la Fondation pour une culture de
la paix, à Madrid. Voir Mayor, Federico : Le Droit de l'être humain à la paix, Déclaration, janvier 1997.
19
Des discours présents dans ce document ressort donc une victimisation importante des enfants
de la rue à travers divers qualificatifs tels que « négligés, battus, chassés de chez eux,
emprisonnés abusivement » (p.7). En outre, ceux-ci sont regroupés de façon homogène et
leurs carrières sont peu différenciées, dans la mesure où ceux-ci sont considérés comme des
victimes, et non des acteurs. On peut citer le passage suivant : « Les carrières des enfants de la
rue, de Bogota à Kinshasa, en passant par Manille ou Los Angeles, sont ainsi très similaires.
Petits, ils sont utilisés par les plus grands pour des tâches exposées […] Ensuite, il faut qu’ils
deviennent des caïds pour échapper à la police […] (p.8).
En conclusion, la brochure utilise de manière globale les mêmes ressorts dramatiques que
« Chemins d’espoir » : emploi massif de contrastes, titres accrocheurs (« mon enfant contre de
l’argent », « de l’enfermement à l’éveil », etc.), victimisation et déculpabilisation des enfants
et exposition des principaux résultats de programmes, tout en favorisant la pensée
dichotomique alimentée principalement par le couple éducation/rue.
2.3 Analyse de la brochure « Street Children »
Nous n’entrerons pas ici dans l’analyse détaillée de l’aspect esthétique de la brochure, dans la
mesure ou celui-ci se présente tel que décrit précédemment, à quelques exceptions près. Nous
présenterons plutôt les principaux points qui ressortent au sujet de la présentation des
principaux programmes de l’UNESCO, thème de ce document.
La brochure s’ouvre sur trois extraits de la Déclaration Universelle des Droits Humains
(1948), la Déclaration Universelle des Droits de l’Enfant (1959), et la Déclaration Mondiale
de l’Education pour Tous (1990), auxquels sont opposés une série de faits et statistiques tels
que « Environ cent millions d’enfants se battent pour leur survie dans la pauvreté et la
détresse » (p.4). On pourrait exprimer cette page d’introduction sous la forme de
l’opposition : chaque enfant a droit à une éducation, mais tous les enfants ne peuvent y
accéder, le reste de la brochure apportant ainsi des éléments de solution à ce constat au travers
des programmes décrits. En effet, « l’éducation est la seule façon d’aider ces enfants à briser
le cercle infernal de la pauvreté, de la lutte pour survivre dans la rue ou des emplois
asservissants et de l’ignorance » (p.5).
20
Les principales lignes d’action du programme sont (p.7) :
• sensibiliser le public aux droits des enfants en détresse et à leurs besoins éducatifs
spécifiques ;
• la collaboration technique avec les professionnels oeuvrant dans ce champs
(éducateurs, psychologues, etc.) ;
• développer les partenariats et mobiliser des sources de moyens financiers des
domaines publiques et privés ;
• faire que les promesses d’action des gouvernements se transforment en actions
concrètes.
La brochure décrit également les principales étapes du développement d’un projet pilote qui
s’inscrivent dans le cadre d’action proposé par l’UNESCO, ainsi que des exemples de projets
dans différents pays membres de l’UNESCO. La brochure insiste entre autre sur la nécessité
d’identifier les besoins locaux prioritaires des enfants et des jeunes de la zone concernée, ainsi
que l’analyse des moyens financiers et humains à disposition.
A partir des exemples proposés dans la brochure, nous avons pu identifier les principaux
éléments suivants : La construction ou la rénovation de centres d’accueil, la formation des
intervenants, l’acquisition et la création de matériel, accroître le nombre d’enfants inscrits
dans les programmes, etc.
La brochure se termine par un encadré dont nous relèverons les deux principales assertions,
figurant d’ailleurs en caractères gras : « Reprend la dignité qui t’as été volée11 », et « Lève-toi
et reviens à l’humanité12 » (p.26). Ces citations reprennent certaines des principales
caractéristiques de l’image de l’enfance telle que nous l’avons décrite ci-dessus, comme le
statut de victimes des enfants, manipulés et utilisés par des adultes peu scrupuleux. Nous
regrettons de ne pas y avoir trouvé de plus amples informations quant à la vision de l’enfance
mobilisée par l’UNESCO dans l’élaboration des projets.
11
12
« Take back the dignity that was stolen from you ».
« Get up and come back to humanity ».
21
3.
Réflexion critique sur l’image de l’enfance transmise par l’UNESCO
3.1 Approche constructiviste de l’enfant comme acteur social
Explicitée précédemment, la Convention internationale des Droits de l’Enfant (1989),
reconnue par l’UNESCO, dégage l’image de l’enfant en tant qu’acteur social, auquel il est
essentiel de donner la parole pour répondre à ses besoins en développant des actions efficaces.
Néanmoins, cette image de l’enfant en tant qu’acteur social demeure absente des brochures
destinées au grand public. En effet, les discours dévoilent une victimisation importante des
enfants considérés comme des sujets passifs. Ces victimes directes ou indirectes, dépeintes
dans les textes, n’obtiennent la parole que pour des témoignages de souffrances liés au travail
et à l’exploitation. Certes, le texte « Chemins d’espoir » met en garde contre les jugements
eurocentrés en précisant que tous les enfants ne sont pas victimes de l’exploitation.
Néanmoins, ce passage semble le seul qui relève cet aspect, puisqu’à travers les illustrations
et les discours, ce sont ces enfants exploités que l’organisation dévoile. En résumé, l’image de
l’enfant victime se trouve en opposition à la Convention internationale des Droits de l’Enfant.
De cette image de l’enfance développée par l’organisation ressort la vision occidentale
tendant à considérer les enfants comme vulnérables et victimes. D’ailleurs, auparavant, les
enfants étaient étudiés, selon Hardman (1973), comme des “muted groups”, autrement dit des
groupes muets, à qui on ne donnait jamais la parole. Cette constatation correspond à la quasi
absence de propos d’enfants, les seuls propos étant utilisés comme illustrations des
souffrances endurées ou des bénéfices d’un programme, et non comme une appropriation de
leur vécu par les enfants. Or, selon Prout et James (1990), le concept d’enfance est un fait de
culture. C’est une construction et une reconstruction sociale, pour les enfants et par les
enfants. En effet, dans le paradigme constructiviste qui relie différentes approches, dont le
structuralisme et l’interactionnisme symbolique, l’enfance s’apparente, toujours selon les
mêmes auteurs, à une construction sociale comprenant d’autres variables de l’analyse sociale
à intégrer, telles que le genre ou encore l’ethnie. D’ailleurs, les différences entre les pays
concernant l’âge de la majorité confirment cette dimension sociale de l’enfance. Celle-ci n’est
prise en compte dans les brochures que dans le passage précisé ci-dessus concernant les
risques d’ethnocentrisme. En effet, à cet endroit, le travail est présenté comme un facteur de
socialisation de l’enfant et d’intégration à la famille et à la communauté. En résumé, il
apparaît essentiel de donner la parole aux enfants qui ne sont pas des sujets passifs comme
présentés dans les brochures, mais des acteurs sociaux dotés de stratégies et de compétences.
22
En définitif, il semble nécessaire que les organisations déconstruisent cette forme de réalité
sociale qu’est l’enfance en proposant une autre vision de celle-ci en se fondant sur une
approche compréhensive. Cette dernière apparaît essentiel pour développer une façon
d’intervenir différente prenant en compte les besoins des enfants, car l’analyse donnant des
pistes de réflexion et d’action va de paire en sociologie avec une intervention efficace.
3.2 Volontés de l’organisation cachées derrière ses propos
En se référant à Hermanny, nous pouvons appréhender les volontés de l’organisation cachées
derrière cette simplification de l’enfant victime et cette opposition entre travail, exploitation et
éducation, développée ci-dessus. En outre, les références perpétuelles à leurs programmes
entrent dans la même logique que développe Hermanny. Ce dernier estime que les
organisations se réfèrent principalement à elles-mêmes et leurs projets dans leurs publications,
dans le but de trouver des donateurs. Dès lors, une opposition claire et sans nuance soustendue par des images fortes en émotions contribue à toucher le public, indépendamment de
ses références culturelles, puisque cette simplification transmet un discours limpide. En effet,
le caractère appellatif et justificatif des textes et des photos entraînent le lecteur dans ses
émotions et non dans une réflexion, afin d’obtenir des donations et non de contribuer à
l’information concernant l’image de l’enfant travailleur. L’alternance des images apparaît
d’ailleurs une illustration forte de ce caractère que souhaite montrer l’organisation. Dans ce
sens, les couleurs utilisées, c’est-à-dire principalement le blanc et le noir, se référent au bien
et au mal, à l’éducation et au travail des enfants, et a pour but d’interpeller et de marquer le
lecteur en tentant de faire surgir des sentiments de pitié, de tristesse, le poussant à la donation.
Cependant, ce paramètre a une grande influence sur la perception du public et la
reconnaissance sociale de l’enfant qui va à l’encontre d’une volonté d’accompagner les
enfants à construire leur identité par la socialisation ou éventuellement, le travail. En effet,
une contradiction réside entre la volonté d’aider les enfants selon les principes de la
Convention des Droits de l’Enfant (1989), à travers la mise en place de projets et la
stigmatisation forte transmise par les brochures. Par conséquent, Hermanny considère comme
essentiel que les organisations disent honnêtement que leur but est de faire une sorte de
publicité pour trouver des donateurs, et non de dévoiler des paramètres réels concernant les
enfants travailleurs. Certes, l’organisation analysée précise la nécessité de dons privés pour
poursuivre ses projets, mais elle l’explicite en l’édulcorant de photos et de textes montrant les
souffrances endurées par les enfants et non leurs perceptions.
23
3.3 Risque lié à la catégorisation des enfants travailleurs
Tout processus de catégorisation, présent notamment dans la vision que donne l’organisation
des enfants travailleurs, ne constitue en rien un processus neutre. En effet, il se définit en
premier lieu, selon Bourdieu, comme un "instrument de pouvoir", car les catégories
permettent d’organiser les actions politiques et sociales de façon légitime à travers la
définition de normes. En d’autres termes, les caractéristiques attribuée aux catégories enfant
travailleur ou encore enfant de la rue, permettent de légitimer les actions et projets menés par
l’UNESCO. A la base, les catégories sont donc des constructions sociales, et c’est leur
diffusion dans la société qui donne l’illusion d’une naturalité et d’une légitimité de celles-ci.
Dès lors, sous les terminologies s’expriment différentes conceptions. Analysons la catégorie
enfant de la rue utilisée par l’UNESCO, afin d’en ressortir la logique sociale du concept et de
dégager les enjeux liés à cette catégorie.
L’utilisation de termes, tels que enfant dans la rue ou encore enfant de la rue, provient de la
typologie de l’UNICEF et s’inscrit dans des approches plutôt déterministe, culturaliste ou
structurelle, desquelles se dégage une forte normativité. Par exemple, selon Stoecklin (200506), l’appellation, enfants dans la rue, suppose une dimension physique de permanence dans
la rue faible et une dimension sociale élevée, caractérisée par des contacts avec des adultes
responsables. En opposition, la catégorie enfants de la rue révèle une dimension physique
élevée et une dimension sociale faible. En résumé, ces deux appellations n’apparaissent donc
pas neutres, ne permettent pas de faire ressortir la problématique, et risquent de faire retomber
celle-ci sur un discours normatif rendant l’enfant responsable de sa situation, d’autant plus
que la notion de responsabilité a des bases juridiques. Par conséquent, l’enfant est considéré
comme un objet, un produit de structure de pouvoir, d’une hiérarchisation sociale et d’une
culture, autrement dit, un produit de la socialisation. De ce fait, l’enfant est apparenté à une
victime ou un délinquant comme on le retrouve notamment dans les brochures de l’UNESCO.
L’explication du départ de l’enfant dans la rue est donc réduite à des causes structurelles,
telles que les contraintes matérielles ou encore la désorganisation familiale. Or cette approche
ne tient pas compte des influences que l’enfant peut exercer sur son environnement ou encore
de la médiatisation possible de la violence intrafamiliale. En effet, elle oublie de considérer
l’enfant comme un acteur, ce qui est d’ailleurs le cas dans les brochures analysées de
l’UNESCO, alors même que la Convention internationale des Droits de l’Enfant (1989) relève
l’importance de donner la parole aux enfants pour répondre à leurs besoins.
24
Au terme de ce développement, nous constatons le risque sous-jacent à l’utilisation de
catégories. Celui-ci est développé, selon une approche interactionniste, par Becker (1963) qui
expose sa théorie de l’étiquetage dans une sociologie de la déviance. Définie selon des normes
établies par les entrepreneurs moraux, l’étiquette contraint et a également des effets pratiques,
tels que la stigmatisation. De ce fait, les connotations négatives rattachées à la rue influencent
les représentations sociales. En effet, la vision de la rue, en tant qu’espace dangereux et
d’insécurité, infère ses caractéristiques à l’enfant, lui-même vu comme dangereux, selon un
principe d’étiquetage et de stigmatisation. Il semble important dès lors de porter son attention
sur les catégories utilisées, car elles contribuent à la stigmatisation et révèlent des
problématiques différentes. En résumé, toute la complexité vient du fait que l’enfant de la rue
est un sujet qui vit dans un espace social particulier. En étudiant cette complexité, on participe
à la non-stigmatisation de ceux-ci et on permet que l’enfant soit considéré comme un individu
possédant ses propres ressources, stratégies et compétences, dont il faut tenir compte dans
l’intervention, dans le but que l’enfant et ses besoins soient véritablement intégrés dans le
processus d’intervention.
Dans le but de redonner à l’enfant la reconnaissance sociale de ses compétences et stratégies,
les organisations devraient inscrire leurs discours dans une approche interactionniste. En effet,
dans ce paradigme, l’analyse est plus centrée sur l’observation empirique et éclaire davantage
des questions d’ordre structurel que finalement le paradigme déterministe. Elle développe que
l’enfant, selon la situation ou le contexte, a plus ou moins de marge de manœuvre dans la
mobilisation des ressources structurelles et culturelles disponibles. De ce fait, l’enfant devient
donc un sujet, un acteur social, déterminé en partie par le macro, mais pouvant également
développer des stratégies et une réflexivité. Ces compétences découlent de la circulation entre
différents espaces qui lui permettent de confronter différents comportements et de générer un
discours sur les normes. A terme, ce passage théorique et éthique, incluant le sens symbolique
de l’enfant et non pas seulement la catégorisation de ce dernier, à travers l’utilisation du terme
enfant en situation de rue, s’avère plus approprié pour les brochures de l’organisation traitée.
En effet, ce terme, se retrouvant notamment dans les travaux de Stoecklin (2000), invite à
problématiser la situation, car la pauvreté et les facteurs extérieurs à l’enfant n’expliquent pas
le passage à la rue. De ce fait, il permet de ne pas stigmatiser l’enfant, comme dans les deux
catégories précédentes, en relevant la situation, les discours sociaux sur la structure et les
interactions que les enfants ont dans la rue avec les autres acteurs sociaux.
25
3.4 Influence du contexte sur le concept d’enfance
Dans la brochure "Source de l’UNESCO : Quelles portes de sortie", nous avons précisé que les
enfants de la rue sont regroupés de façon homogène et leur carrière peu différenciée dans la
mesure où les enfants de la rue sont considérés comme des victimes, et non des acteurs. Or,
Cunnigham (1995) considère que le concept d’enfance doit être étudié dans le contexte d’une
société, puisqu’il y a des facteurs tels que l’économie, la démographie et la politique qui ont
changé la vision de l’enfance au cours de l’histoire. Par conséquent, le contexte dans lequel on
étudie le concept d’enfance a une influence sur celui-ci et donc sur les carrières également.
Toute la problématique découle du fait que la vision des organisations internationales reflète
souvent celle de l’Occident, et il apparaît dès lors nécessaire d’effectuer un détour par
l’histoire, afin d’appréhender celle-ci.
Suite à la diminution des besoins en postes de travail, de part la récession, les entreprises ont
demandé à l’école de scolariser plus longtemps une plus large couche de la population. Ce
processus se retrouve sous la notion de démocratisation quantitative des études et du savoir. A
travers ce phénomène de massification de la scolarité se dégage le principe de reconnaissance
de la citoyenneté et du droit à l’éducation pour tous. Ce processus a engendré notamment des
débats sur les inégalités sociales et les enfants pauvres qui sont à l’origine des mouvements
tels que les Nations Unies ou encore la Convention des droits des enfants (1989). Néanmoins,
avant cette massification, nombre d’enfants occidentaux travaillaient pour aider leur famille.
Relevons que l’UNESCO le mentionne très brièvement dans sa brochure "Chemin d’espoir" en
précisant d’ailleurs que le travail des enfants est parfois nécessaire à la survie économique.
Cependant, le concept de travail, décrit en majorité par l’UNESCO, est rattaché à celui de
l’exploitation à travers les photos et textes présentés. Dès lors, un lecteur, qui survole de telles
brochures chargées émotionnellement, risque fortement de faire l’impasse sur cette précision
concernant le travail, d’autant que dans les conceptions du sens commun occidental, le travail
des enfants est perçu comme négatif, puisque la place attribuée à ceux-ci est l’école, moyen
envisagé comme essentiel au développement de l’enfant surtout au niveau professionnel.
Omettant souvent ce paramètre de l’influence de l’histoire sur les perceptions de l’enfance, le
monde occidental en général et beaucoup d’ONG tendent à considérer la scolarisation comme
un moyen de civiliser les enfants, puisque la scolarisation n’apparaît plus néfaste à l’économie
de la société occidentale. En effet, c’est l’histoire économique occidentale qui a orientée au
départ les enfants vers l’école, car leur travail n’était plus nécessaire à la survie économique.
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De ce fait, dans cette nouvelle représentation occidentale de l’enfance, les enfants travailleurs
sont représentés comme étant exploités, malgré que ce phénomène était présent et envisagé
positivement il n’y a pas si longtemps en Occident, lorsqu’il contribuait encore au
développement économique. Or, dans nombre de pays du Sud principalement, le travail des
enfants apparaît encore nécessaire à la survie économique. Dès lors, nous estimons absurde de
vouloir l’abolir par prétexte qu’il ne correspond pas à nos nouvelles conceptions occidentales
de l’enfance. Néanmoins, il apparaît bien clair que le travail des enfants ne peut continuer
sans être régulé par des programmes mis en place par les ONG en concertation avec les
enfants travailleurs. Ces projets devraient d’ailleurs prendre en compte la nécessité du travail
des enfants et le combiner avec une scolarisation en répartissant les temps définis à chaque
activité sur la journée. De plus, les ONG ont également pour rôle de réguler les conditions de
travail des enfants, afin qu’ils ne soient pas exploités et qu’ils soit rémunérés correctement,
car ce paramètre est essentiel au développement de l’identité sociale de l’enfant travailleur.
En résumé, la notion de l’enfance doit être observée, selon Cunnigham (1995), en fonction du
contexte dans lequel il se situe, puisque celui-ci a une grande influence sur ce concept et sur la
définition qu’on en donne. En outre, la vision historique permet de saisir les raisons de
l’existence des conditions des enfants et les représentations sociales de celles-ci.
3.5 Valeur de survie du travail
Dans nos sociétés occidentales actuelles, les besoins économiques relèvent, selon Friedmann
et Naville (1961), davantage de catégories sociales ou psychologiques, puisqu’ils ne peuvent
plus être associés en général à un besoin économique fondamental ou à celui de survie. Or,
cette vision du besoin diffère dans les pays moins développés, dans lesquels le travail est
véritablement un élément de survie et non pas premièrement un producteur de valeur d’usage.
De ce fait, concevoir le travail des enfants comme un frein au développement en préconisant
l’élimination, voir la protection de l’enfant travailleur, tel qu’on le perçoit dans les discours de
l’organisation, prétérite la reconnaissance sociale de l’enfant au niveau de ses compétences.
En outre, cette volonté a des conséquences également sur le développement économique. En
effet, le travail d’un des enfants de la famille est parfois le seul moyen de permettre aux autres
enfants d’aller à l’école. En outre, un travail librement consenti correspondant à des aptitudes
est, selon Friedmann et Naville, un facteur d’équilibre psychologique et de structuration de la
personnalité. Néanmoins, le problème essentiel semble la rémunération, car seul un salaire
correct et proportionnel au travail effectué évite le sentiment d’exploitation et d’aliénation.
27
Par conséquent, il faut envisager, selon Invernizzi (2001), le travail en termes d’expériences
qui doivent être valorisées tout en luttant contre l’exploitation et l’aliénation. A ce sujet,
Friedmann et Naville (1961) parlent d’une nécessité d’humanisation du travail. En résumé, la
définition dominante du travail associe, selon Invernizzi, la rue avec la pauvreté, misère,
exploitation et omet la valeur des efforts, des compétences, de la coopération et les progrès
économiques et sociaux. Cet aspect pose le problème de la reconnaissance sociale de l’enfant
travailleur et de l’influence sur les politiques d’intervention. En définitif, il apparaît essentiel
de tenir compte des distinctions faites par les adultes et par les enfants du milieu pour
développer une intervention.
Dans notre perception occidentale, le vol et la mendicité apparaissent des activités marginales
connotées négativement. Or celles-ci sont tolérées selon certaines conditions, telles qu’une
grande pauvreté ou une solution provisoire, puisqu’elle nécessite notamment des compétences
et permet le plus souvent de gagner de l’argent. En outre, dans une définition négative du
travail, le tourisme modifie les règles du marché du travail en donnant, par exemple, aux
enfants les plus jeunes, et contribue à la construction de la mendicité. En outre, les touristes,
la classe supérieure et les ONG propagent une définition dominante qui a un impact sur les
échanges quotidiens et sur l’identité de l’enfant, dont les efforts sont dévalorisés. Dès lors,
l’enfant est stigmatisé, manque de reconnaissance sociale et développe une identité négative.
Précisé ci-dessus, le travail des enfants a une valeur de survie économique dans des sociétés
en développement. Néanmoins, cet aspect du travail est considéré dans les brochures comme
l’obstacle le plus important à l’éducation des enfants. Précisons que la problématique du
travail, bien qu’abordée dans les brochures, relève des compétences de l’OIT avec qui
l’UNESCO collabore. Toute la problématique relève de paramètres déjà explicités, tels que la
catégorisation ou encore l’enfant en tant qu’acteur social. En effet, lorsqu’il s’agit du travail
des enfants, il ne faut pas catégoriser leurs activités d’une manière objective en se basant sur
les normes occidentales, selon Invernizzi, mais plutôt distinguer les activités exercées par les
enfants à partir des échanges entre les acteurs, ainsi qu’à partir de leur définition du travail.
De ce fait, l’importance n’est pas la dimension de contrainte qui découle de tout travail, mais
la vision de celui-ci et la dimension de consentement. Cette définition du travail diffère
d’ailleurs selon les enfants et les groupes d’appartenance, puisqu’elle comprend plusieurs
critères, tels que l’effort, les compétences, la productivité, l’illégalité ou encore l’autonomie,
et qu’elle s’intègre dans des contextes économiques et sociaux divers.
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En définitif, l’évaluation par l’acteur de leur travail devient, selon Invernizzi (2001),
contextuelle et varie selon la position sociale, les ressources ou les aspirations de l’acteur.
Variant selon les milieux, la conception du travail des enfants peut, à terme, se définir en se
basant sur l’utilité du revenu liée aux conditions de vie ou encore l’utilité sociale des services
fournis lors notamment de crises économiques.
3.6 Problématique d’une intervention basée sur la protection
En proposant des programmes se basant sur la protection des enfants, l’UNESCO risque
fortement de définir des objectifs en décalage avec les intérêts des enfants. En effet, la
protection sous-entend que l’on considère l’être à protégé comme sans défenses ou ressources.
Or, en tant qu’acteur social, l’enfant en situation de rue possède des compétences et
ressources. Dans une optique de protection, les projets de l’organisation se confrontent, selon
Invernizzi, à deux types de difficultés risquant de réduire l’efficacité de l’intervention. La
première difficulté semble l’inadéquation des modalités de travail proposées avec les besoins
des enfants. Ce risque apparaît d’autant plus fort lorsque l’enfant est considéré comme une
victime et non comme un acteur social, puisqu’il demeure en majorité extérieur à la mise en
place d’une intervention. Une deuxième difficulté qui se dégage est justement le déficit de
connaissances concernant les conditions des enfants travailleurs et leurs avantages à exercer
une activité. Nous pouvons d’ailleurs à ce sujet reprendre l’exemple d’un enfant qui par
solidarité familiale, conception très présente dans les pays en développement, souhaite exercer
une activité, afin de permettre aux autres enfants de la famille de suivre une scolarité. Un
autre exemple pourrait être la valorisation des compétences que l’enfant développe à travers
son activité qui lui paraissent plus importantes dans le contexte social où il évolue. En
définitif, ces deux catégories de difficultés surgissent d’une méconnaissance des conditions de
la vie quotidienne qui résulte de l’impasse faite sur les propos des enfants. C’est pourquoi une
approche constructiviste, et surtout compréhensive et participative, afin de redonner la parole
aux enfants, semble un paramètre essentiel à tout projet d’intervention voulant véritablement
tenter de faire évoluer la situation des enfants en situation de rue ou des enfants travailleurs.
En effet, seule une telle approche permet de réaliser une intervention auprès des enfants
travailleurs qui se prétend être efficace, réalisable et premièrement accueillie favorablement
par les enfants travailleurs qui y trouvent un sens par rapport à leurs conditions de vie.
29
Conclusion
Nous avons souhaité, dans le cadre de ce travail de validation, présenter et analyser certaines
composantes de l’image de l’enfance construites et utilisées par l’organisation l’UNESCO.
Dans ce but, nous avons tenté, sur la base des connaissances acquises lors du séminaire et par
la lecture des textes proposés, de comprendre et de déconstruire celles-ci, afin de mieux
cerner ses déterminants et objectifs. A présent, nous souhaitons livrer quelques unes de nos
conclusions et critiques au sujet de l’ensemble des données prises en compte lors de ce travail
de séminaire. Bien entendu, nous sommes conscients que celui-ci ne constitue pas une analyse
exhaustive de l’image de l’enfance, telle que proposée par l’UNESCO, dans la mesure où seul
un travail nettement plus approfondi, essentiellement au niveau du volume des données
analysées, serait probablement nécessaire.
Dans un premier temps, nous souhaitons poser la question de la dimension de finalité présente
dans la construction d’un concept tel que l’enfance. En effet, nous avons vu que des
différences notables pouvaient s’observer entre l’image des enfants que nous avons dégagée
dans la première et la seconde partie de notre travail. Nous avons vu, par exemple que la
Convention internationale des Droits de l’Enfant de 1989 dégage l’image d’un enfant acteur, à
qui il est nécessaire de laisser la parole, ce qui n’est pas le cas dans l’ensemble des brochures
que nous avons présentées et analysées au deuxième chapitre. Face à ce constat, nous pensons
que les différences observées relèvent probablement d’un choix conscient de la part de
l’organisation l’UNESCO quant aux diverses utilisations de l’image de l’enfance. En effet, il
est certainement légitime de proposer au grand public des concepts et propriétés possédant
une forte connotation émotionnelle, si l’on souhaite que ce dernier soit acquis à la cause de
l’organisation et y participe par des dons matériels. Il en va différemment dès lors que cette
conception doit servir à l’action concrète et immédiate, telle que la construction et
l’application de programmes d’intervention. Nous l’avons vu, les documents destinés au
grand public semblent jouer de stratégies difficilement applicables dans l’action sociale,
puisqu’ils présentent un enfant passif sans ressources. Il peut être mis en doute, en effet, que
cette dernière puisse mener à des résultats concrets si l’on considère, par exemple, l’enfant de
manière uniforme et quasi inter-changeable, et si l’on se base sur les lectures liées au
séminaire dans lequel se travail s’intègre.
30
Nous souhaitons attirer l’attention du lecteur quant aux conséquences possibles de l’utilisation
et de la diffusion au public de l’image de l’enfance telle que nous avons tenté de la dégager
des brochures analysées. Il est indéniable que la dimension affective de révolte, d’indignation
et d’empathie face à des enfants présentés comme des victimes de l’égoïsme et de la cupidité
des adultes, est un puissant moteur de sensibilisation et d’adhésion à une cause humanitaire,
ce qui a bien entendu pour corollaire l’augmentation de la probabilité de dons financiers de la
part d’un lectorat indigné par une réalité qui n’aurait pas lieu d’être. Cependant, nous nous
demandons dans quelle mesure cette vision particulière de l’enfance ne contribue pas à la
perpétuation chez le grand public d’un catalogue de stéréotypes et d’idées préconçues quant à
la situation des enfants dits de la rue.
En reprenant les concepts développés par Berger et Luckmann (1999), nous pourrions nous
demander si, en quelque sorte, ces représentations ne permettent pas d’une certaine façon, la
perpétuation d’un stock de connaissances sociales légitimant l’action des organisations
oeuvrant dans ce domaine. Malheureusement, nous savons que celles-ci n’ont de légitime que
la réalité de leur dimension de construit. Prenons l’exemple de la catégorie employée et
utilisée dans les brochures, celle d’enfants de la rue telle qu’analysée à la page 24, où nous
soulignons que "toute la complexité vient du fait que l’enfant de la rue est un sujet qui vit
dans un espace social particulier". Une telle vision n’est-elle pas susceptible de faire croire au
lecteur que tout le problème réside au cœur d’une seule variable contextuelle et géographique,
dont la suppression apporterait la résolution ? Hormis le problème évident posé par une telle
simplification, ne peut-on penser qu’une vue plus complexe et dynamique de l’enfant, comme
acteur possédant ses propres ressources et stratégies, et par conséquent mobilisable dans le
cadre des programmes, ne serait-elle pas plus judicieuse ? En effet, un lectorat sensibilisé à
une telle vision, plus réaliste, ne serait-il pas plus apte à apprécier les possibilités de
changement et d’espoir dont les interventions sont porteuses, plutôt que de favoriser l’image
d’un enfant en proie à des forces sociales destructrices qui, on le sait, sont bien plus difficiles
à modifier que l’individu lui-même13 ? A l’inverse, l’attribution à l’enfant des causes
profondes de sa situation, ce que les psychologues sociaux ont décrit sous le terme de biais
d’attribution interne, n’est de même pas plus envisageable.
13
A ce sujet, le lecteur peut se reporter aux pages 22 et 23 de notre travail présentant les résultats des travaux
d’Hermanny.
31
En conclusion, nous pensons que les contradictions évoquées ci-dessus reflètent bien la nature
du construit social de l’image de l’enfance, et que celui-ci est susceptible d’être mobilisé en
termes de représentation sociale légitimante, de manière différente dès lors qu’il s’agit
d’élaborer un programme d’intervention ou une déclaration sur les droits des individus, ou
alors, de sensibiliser le public à sa cause et de tenter de l’y faire participer. Dans les deux cas,
l’importance d’une prise de conscience, de la part des organisations, des effets divergents des
applications, qui peuvent être faites de l’image de l’enfance, conditionne les bénéfices qu’elle
est susceptible d’apporter. En rapport à ce dernier aspect, des recherches ultérieures dans le
domaine de la réception de l’image de l’enfance, fournie au grand public, pourraient sans
doute nous apporter des résultats surprenants quant à nos préjugés par rapport à celui-ci, ainsi
qu’aux conséquences du discours que nous voulons bien lui tenir en fonction de ces derniers.
Une vision plus complexe, et peut-être plus humaine de la réalité, ne serait-elle pas plus
efficace et susceptible d’emporter plus largement son adhésion et sa contribution aux actions
d’organisations telles que l’UNESCO ?
32
Bibliographie
Becker, Howard : Outsiders: Studies in the Sociology of Deviance. New York : The Free Press
1963.
Berger, Peter & Luckmann, Thomas : La construction sociale de la réalité. Paris : Armand Colin
1999.
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Longman 1995.
Friedmann, Georges & Naville, Pierre (Ed.) : Traité de sociologie du travail. Paris : Armand
Colin 1961.
Hardman, Charlotte : Can there be an anthropology of children? In : Journal of the
Anthropological Society of Oxford : 1973, Vol. IV, no. 2, pp. 85-99.
Hermanny, Christian : Strassenkinder brauchen Spenden . Wie international operierende
Hifswerke in Deutschland über "Strassenkinder" informieren. In : Ch. Adick, Strassenkinder und
Kinderarbeit. Sozialisationsvergleichende, historische und kulturvergleichende Studien.
Frankfurt : IKO 1998, pp.141-165.
Invernizzi, Antonella : La vie quotidienne des enfants travailleurs. Stratégies de survie et
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Praz, Anne-Françoise : De l’enfant utile à l’enfant précieux. Lausanne : Antipodes 2005.
Prout, Alan & James, Allison : Constructing and reconstructing childhood. Contemporary issues
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Stoecklin, Daniel : « Regards croisés sur l’autonomie » & « Les enfants en situation de rue » &
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Id. : Séminaire de sociologie d’intervention. Département des sciences de la société de l’Université
de Fribourg, Fribourg 2005-06 (propres notes).
UNESCO : L’organisation. In : UNESCO, http://portal.unesco.org/fr/ev.phpURL_ID=3328&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html
UNESCO : Progression du nombre des états membres de l’ONU depuis 1945. In : UNESCO,
http://www.un.org/french/aboutun/annees.htm
UNESCO : Right to Education. In UNESCO, http://portal.unesco.org/education/en/ev.phpURL_ID=9019&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html
33
Annexes
1. Organigramme de l’ONU
Système des Nations
Unies
3. Document « Chemins d’espoir »
Chemin de l'espoir
4. Document « Sources UNESCO :
Quelles portes de sortie ? »
Quelles portes de
sortie ?
5. Document « Street Children »
Street children
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