Images des enfants et des jeunes véhiculées dans les

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Images des enfants et des jeunes véhiculées dans les
Images des enfants et des jeunes
véhiculées dans les médias
audiovisuels (télévision, publicité,
Internet)
Analyse CODE
Avril 2012
Qu’entend-on derrière le terme « média » ? Il peut se définir comme un « procédé
permettant la distribution, la diffusion ou la communication d’œuvres, de documents ou de
messages sonores ou audiovisuels (presse, cinéma, affiche, radiodiffusion, télédiffusion,
vidéographie, télédistribution, télématique, télécommunication) »1. Nous comprenons donc
ici le terme « média » au sens large, en tant que moyen de transmission (cela touche donc à
la fois la publicité, Internet,…).
Evaluer l’impact du rôle des médias sur la formation et les transformations des images
véhiculées à propos de l’enfant2 (ce que l’on appelle les représentations collectives de
l’enfant) représente un travail conséquent3. En effet, il faut tout d’abord dégager les images
construites par les médias. Il faut ensuite s’atteler à définir les contours des représentations
collectives. Enfin, il faut comparer les deux, tout en tenant compte des différentes variables
(en dehors des médias) qui peuvent interférées dans la mise en place et dans l’évolution des
images véhiculées4.
Les images véhiculées par certains médias ont plus d’impact en raison de leur plus grande
« fréquentation ». Dès lors, une des questions qui se pose est notamment celle de savoir si
les médias qui évoquent le plus les jeunes sont forcément ceux fréquentés par eux ? Ou
encore quels médias les jeunes utilisent le plus ? « Sans surprise, Internet et la télévision
emportent les suffrages : six jeunes sur dix les utilisent ‘souvent’, et les autres disent les
utiliser parfois. La concurrence est donc rude pour les autres médias. A peine plus de trois
jeunes sur dix s’informeraient en lisant ‘souvent’ des journaux ou des magazines ; six sur dix
les lisant ‘parfois’ et un sur dix n’en lisant jamais. La radio est quant à elle en queue de
peloton : deux jeunes sur dix l’écoutent souvent pour s’informer, un peu moins de la moitié
1
www.larousse.fr
Pour rappel, un enfant est toute personne de 0 à 18 ans.
3
L’idée est d’analyser la façon dont les médias se représentent les enfants et non d’étudier les enfants et les
médias eux-mêmes.
4
M. VANOOST, Rôle des médias sur les représentations collectives et spécifiquement sur la perception de la
jeunesse. L’exemple de la RTBF et de RTL, Etude réalisée dans le cadre du colloque « L’image des jeunes dans
les médias » organisé par le Parlement de la Communauté française, 23 février 2011, p. 3. Voyez aussi
l’Observatoire du récit médiatique, www.cclouvain.be/orm
2
1
d’entre eux le font ‘parfois’ et un tiers d’entre eux déclarent ne jamais s’informer en
écoutant la radio »5.
Dans le cadre d’une réflexion sur les droits de l’enfant et les médias6 entamée par une
analyse sur les réseaux sociaux, la Coordination des ONG pour les droits de l’enfant (CODE) a
tenu à consacrer une analyse sur les images de l’enfant et des jeunes dans les médias7.
Nous y analyserons la question des images véhiculées de manière générale. Nous
aborderons ensuite la question plus précisément par le biais des journaux télévisés,
d’Internet et de la publicité.
1. Quelle(s) représentation(s) ?
Avant d’analyser les représentations des enfants et des jeunes dans les médias, la question
se pose de savoir ce qu’il faut entendre derrière le terme « représentation » ?
Les représentations sociales sont des phénomènes complexes, toujours activés et agissant
dans la vie sociale. Elles sont composées d'éléments divers qui ont longtemps été étudiés de
façon isolée : attitudes, opinions, croyances, valeurs, idéologies, etc.8
Denise Jodelet propose une seconde définition des représentations sociales : «la
représentation sociale est une forme de connaissance socialement élaborée et partagée,
ayant une visée pratique et concourant à la construction d'une réalité commune à un
ensemble social ». Cette forme de connaissance, parce qu'elle se distingue de la
connaissance scientifique, est parfois appelée « savoir de sens commun » ou « savoir naïf »9.
Les médias10 diffusent différentes images ou représentations de l’enfant. L’on peut retrouver
une approche paternaliste (sorte de bienveillance autoritaire), protectionniste,
émancipatrice (libératrice) ou encore libérale (l’enfant est l’égal de l’adulte).
Ces dernières années, les ONG observent une détérioration de l’image des jeunes véhiculée
par les médias11. L’exemple le plus frappant à ce sujet reste celui de la délinquance
juvénile12. Ce qui n’est pas sans conséquence.
5
Média Animation ASBL, Les jeunes, leur diversité et les médias, http://www.media-animation.be/Les-jeunesleur-diversite-et-les.html
6
Voyez l’analyse de la CODE, Internet et les jeunes. Le cas particulier de Facebook disponible sur
www.lacode.be
7
En raison des disparités de fréquentation des médias, nous noterons l’importance d’approcher la question des
représentations par différents médias.
8
Voyez à ce sujet, W. DOISE, A. PALMONARI (sld.), L’étude des représentations sociales, Lausanne, Delachaux et
Niestlé, 1986.
9
D. JODELET, Les représentations sociales, Paris, PUF, 1993.
10
Entendu au sens large, comme moyen de transmission d’informations.
2
Les psychologues sociaux13 montrent que, bien souvent, les gens, et donc les médias entre
autres, exagèrent voire inventent la fréquence des relations qui existent entre deux
événements ; par exemple, le fait que tous les feux de la circulation soient rouges lorsque
l’on est pressé14 ou encore, l’appartenance à tel groupe ethnique ou à telle catégorie d’âge
et le fait de commettre un comportement délictueux.
Cette tendance, qui est considérée comme une théorie naïve somme toute bien humaine,
est appelée « corrélation illusoire ».
Les théories naïves ont notamment pour conséquence que non seulement nous avons tous,
sans nous en rendre compte, une tendance naturelle à l’explication, mais surtout, nous
sommes généralement enclins à préférer les explications qui confirment nos croyances… Ce
qui, là aussi, n’est pas sans inconvénient. Ce phénomène participe en effet au renforcement
et à l’entretien de nos stéréotypes15, ces images toutes faites dans lesquelles nous
enfermons les groupes et leurs membres : « C’est parce que c’est une femme qu’elle conduit
mal », etc.
Ces théories fausses se construisent et se propagent à partir du milieu dans lequel nous
évoluons. Ainsi, les médias notamment participent activement à la création de ces théories
naïves. Celles-ci sont autant de vérités soi-disant observables qui, en retour, permettent de
justifier nos comportements et nos attitudes : « Comme les jeunes sont de plus en plus
violents, il faut nous en protéger. Nous n’avons d’autres choix que l’enfermement ».
Bien que naïves, ces théories sont tellement enracinées dans notre culture et nos esprits
qu’elles revêtent un statut quasi scientifique aux yeux de Monsieur et Madame Tout-lemonde. Elles leur font dire « Il n’y a pas de fumée sans feu » ou encore, dans une certaine
mesure, « On peut faire dire ce que l’on veut aux chiffres » (sous-entendant : « Ne nous
cachez pas la vérité, que l’on connaît trop bien… »).
En particulier, « les médias peuvent se révéler particulièrement dangereux dans la création
et le renforcement des stéréotypes. L’impression actuelle et généralisée que violence et
11
L’INCC (Institut National de Criminalistique et de Criminologie) met en avant que les statistiques ne
confirment pas ce point de vue (CODE, Rapport alternatif des ONG sur l’application de la Convention
internationale relative aux droits de l’enfant par la Belgique, Bruxelles, 2010, disponible sur www.lacode.be).
12
Voyez à ce sujet l’analyse CODE L’enfermement des mineurs délinquants : état des lieux, juin 2011, disponible
sur le site de la CODE : www.lacode.be
13
Sur le thème des représentations sociales, voyez notamment S. Ciccotti, 150 petites expériences de
psychologie (pour mieux comprendre nos semblables), Paris, Dunod, 2004, S. Fiske, Psychologie sociale,
Bruxelles, De Boeck, 2008 et C. Bonardi et N. Roussiau, Les représentations sociales, Dunod, les topos, 1999.
14
Ce principe se retrouve en partie dans la « Loi de Murphy » qui énonce que si quelque chose peut aller de
travers, le phénomène se produira.
15
Plus exactement, les stéréotypes sont des croyances partagées concernant les caractéristiques personnelles
d’un groupe de personnes (voyez notamment S. Fiske, op. cit.). C’est la réputation dont les groupes font partie.
3
criminalité juvéniles sont à la hausse, ou même hors de contrôle, en est un bon exemple. (…)
Les stéréotypes négatifs n’affectent pas seulement la vision que les adultes ont de la
jeunesse, mais la manière dont les jeunes se perçoivent eux-mêmes. La conviction que le
reste du monde ne vous comprend pas et ne vous respecte pas n’encourage pas l’estime de
soi »16.
2. La présence des jeunes dans les médias traditionnels : le cas des
journaux télévisés belges francophones
Marie Vanoost, de l’Observatoire du récit médiatique (UCL), a réalisé une étude sur le Rôle
des médias sur les représentations collectives et spécifiquement sur la perception de la
jeunesse. L’exemple de la RTBF et de RTL17. Plus précisément, cette chercheuse a effectué
une observation durant le mois de novembre 201018 des journaux télévisés de ces deux
chaînes. Ils sont, en effet, les rendez-vous de l’information les plus suivis du public et donc
les plus susceptibles d’influencer les représentations collectives. Pour diverses raisons
méthodologiques, la catégorie d’âge a été celle des 12-25 ans19.
Reprenons maintenant quelques principaux résultats de cette étude.
En ce qui concerne les journaux télévisés que les jeunes regardent de manière générale,
ceux de RTL arrivent en tête et sont cités pour un peu plus d’un jeune sur deux. Cependant,
ceux de la RTBF les talonnent de très près. « Un peu moins de la moitié des jeunes qui citent
l’une de ces deux chaînes, excluent l’autre. En tout, les JT belges sont visionnés par les trois
quarts des jeunes interrogés20, sans que l’on puisse établir une différence notable entre ceux
qui pratiquent une langue étrangère et les autres. (…) L’audience des jeunes de Belgique
francophone envers les chaînes françaises est importante. Les jeunes semblent conscients
du fait qu’ils ne constituent pas forcément le public cible principal de ces émissions »21.
16
Réseau Educations-médias, www.education-medias.ca
M. VANOOST, op. cit.
18
Selon l’auteure, la durée d’un mois semble suffisante pour dégager des tendances d’un mois qui ne présente
pas d’actualité particulière impliquant des jeunes. Notons cependant que le 20 novembre est une date qui
touche directement les enfants puisqu’il s’agit du jour dédié aux droits de l’enfant vu l’anniversaire de la
Convention relative aux droits de l’enfant ce 20 novembre.
19
L’auteure précise au préalable qu’il est impossible de certifier avec exactitude l’âge des personnes qui
apparaissent ou sont cités dans les journaux télévisés. Il a donc fallu trouver des indices pour trouver ces jeunes
(12 à 25 ans dans cette étude). Cette étude ne se base que sur des personnes dont on a pu s’assurer de leur
âge grâce au fait que : leur âge est mentionné, les personnes qui jouissent d’une certaine célébrité dont la date
de naissance est connue, les jeunes identifiés comme élèves dans l’enseignement secondaire ou étudiants dans
l’enseignement supérieur (à l’exception des assistants en médecine et des doctorants dont l’âge dépasse
souvent les limites de la catégorie analysée), les personnes qui sont qualifiées de mineures quand l’image ou le
commentaire implique qu’ils ont plus de 12 ans et enfin les jeunes dont le physique montre que sans doute
possible, ils ont plus de 12 ans et moins de 25 ans.
20
Afin de réaliser cette enquête, un questionnaire a été soumis à plus de 400 élèves de l’enseignement
secondaire.
21
Média Animation ASBL, op. cit.
17
4
Concernant la représentation des jeunes dans les journaux télévisés (au cœur de la présente
analyse), on remarque que la tranche des 12-25 ans « apparaît, à première vue, légèrement
sous-représentée [par rapport à la population dans son ensemble] dans les journaux
télévisés belges francophones »22 si l’on tient compte uniquement des situations dont on
peut quasiment être sûr de leur âge. Si l’on comptabilise les personnes qui ont l’air de faire
partie de la tranche 12-25 ans, cela relativise quelque peu la sous-représentation des jeunes
dans les journaux télévisés. En bref, au quotidien, les chaînes étudiées traitent
proportionnellement assez peu de la population des jeunes.
Plus précisément, les journaux télévisés font très peu intervenir les jeunes dans les matières
politique, économique et sociale. En ce qui concerne les sujets culturels, on remarque une
petite différence entre les deux chaînes; la RTBF mobilisant un peu plus les jeunes que RTL.
La plupart des sujets sportifs avec ou sur des jeunes mentionnent ou font intervenir des
jeunes sportifs belges. Pour les faits divers, on ne trouve de sujets avec ou sur des jeunes
appartenant à cette catégorie que sur RTL. La catégorie où l’on retrouve le plus de jeunes est
celle concernant les sujets de société et les affaires judiciaires et policières. Cette
importance peut s’expliquer par la grande place que ces catégories prennent dans
l’information plus largement.
De plus, il est intéressant de signaler que dans la plupart des cas, les jeunes sont directement
liés au sujet traité. Ils sont les principaux protagonistes du problème ou de la situation sans
lesquels le sujet n’existerait pas. Il est par contre peu courant de les voir apparaître comme
« simple » citoyen, dans le rôle de personnes « interchangeables », ou dans des sujets où
plusieurs individus sont impliqués, mais où le journaliste choisit de faire intervenir des
jeunes. C’est donc essentiellement l’actualité en tant que telle qui influence la présence des
jeunes dans les journaux télévisés, plus qu’une volonté de la part des chaînes télévisées23.
A ce sujet, il est intéressant de mentionner une étude de Média Animation qui aborde
notamment la question des centres d’intérêt des jeunes. « Globalement, les jeunes se
passionnent pour des sujets ‘jeunes’, essentiellement liés à l’univers du divertissement : la
musique, le sport, les nouveautés culturelles, etc. Ces thèmes et la communication avec les
amis sont les moteurs de leurs usages médiatiques. Aux côtés de la présence massive des
loisirs, les jeunes ne répugnent pas à s’intéresser à des sujets plus sérieux pour lesquels ils
s’ouvrent volontiers à l’interaction avec le monde adulte, sans doute perçu comme peuplé
d’experts potentiels (les parents et les enseignants) »24.
22
M. VANOOST, op. cit., p. 4.
Ibid., p. 6.
24
Média Animation ASBL, Les jeunes, leur diversité et les médias, décembre 2010, URL : http://www.mediaanimation.be/Les-jeunes-leur-diversite-et-les.html,
23
5
En fait, la « parole des jeunes apparaît très rarement comme se suffisant à elle-même. Elle
est le plus souvent encadrée par la parole de personnes plus âgées. Néanmoins, il existe de
grandes disparités dans le temps de parole accordé aux jeunes en fonction du type
d’actualité traité »25.
Soulignons également que l’analyse de Marie Vanoost démontre que les journaux télévisés
présentent souvent les jeunes de façon stéréotypée. L’image des jeunes est alors liée à celle
de la criminalité, de l’alcool, de l’échec scolaire ou encore des conduites dangereuses. Mais
l’analyse montre aussi qu’il faut être prudent et tenter de dépasser les apparences. « Ainsi,
s’il est vrai que le stéréotype le plus présent dans les journaux télévisés est celui qui associe
jeunesse et violence, les jeunes y sont aussi largement présentés comme victimes, et non
pas uniquement auteurs, de violences. (…) Par ailleurs, il faut également souligner le fait que
les journaux télévisés présentent aussi les jeunes sous des angles qui semblent beaucoup
plus éloignés des stéréotypes habituels : les jeunes peuvent également être des citoyens
engagés, motivés et actifs dans le monde du travail, croyants cherchant à concilier leur foi
avec la société actuelle, etc. »26.
Finalement, différentes interrogations restent en suspens : Quel peut être l’impact de ces
sujets sur les téléspectateurs ? « Dépend-il d’abord du nombre de sujets consacrés à un
problème ou plutôt de la force des propos tenus dans les sujets, même si ceux-ci sont peu
nombreux ? »27,…
3. L’image des enfants dans la publicité
Différents auteurs se sont posés la question de savoir si l’évolution des représentations des
enfants dans les publicités témoignait plus largement d’une évolution de l’image de l’enfant
dans la société. Catherine Makereel, journaliste au Soir, souligne que « l’enfant est
omniprésent dans la pub, pas seulement comme support marketing mais aussi comme cible.
(…) Il est toujours plus prescripteur »28 et pose la question de l’évolution du modèle familial
ou de la dérive de la publicité.
Elle met en avant le fait que le rôle joué par les enfants dans les publicités s’est modifié au
cours du temps. « ‘Au début, l’utilisation des enfants était très primaire, du style un gamin
disant ‘regardez comme c’est bon’. Aujourd’hui le spectateur connaît les coulisses de la
fabrication de la pub. Il connaît nos stratégies. Il se méfie d’autant plus qu’il est capable de
décrypter très vite nos intentions. Les publicitaires sont donc obligés de créer de nouvelles
25
M. VANOOST, op. cit., p. 6.
Ibid., p. 23.
27
Ibidem.
28
C. MAKEREEL, L’enfant tout-puissant de la pub, Le Soir, 12 juillet 2011, URL : www.lesoir.be
26
6
formes, plus surprenantes’. Et ce qui marche fort depuis quelque temps, c’est de mettre en
scène des enfants tout-puissants, plus adultes que leurs parents »29.
En outre, la cible semble avoir changé. Auparavant, l’enfant semblait plutôt correspondre à
une image à laquelle on recourait afin de faire vendre un produit à la ménagère.
Aujourd’hui, il ne serait plus seulement ça, « il est aussi un client potentiel, ou en tout cas un
prescripteur d’achat non négligeable. En Belgique, les enfants sont à l’initiative d’un achat
alimentaire sur deux mais aussi d’une grosse partie des achats électroménagers, de télécoms
ou même de voitures »30.
On peut donc conclure que la publicité et l’image qu’elle renvoie est directement liée à son
public cible. Un responsable de la communication d’une grande entreprise ayant réalisé une
série de publicités qui inversait le rôle enfant-parent confirme ce constat : « On s’est d’abord
posé la question de notre cible prioritaire. Il s’est avéré que la famille et plus
particulièrement la famille avec enfants ou jeune ados est pour nous une cible intéressante
parce consommatrice de télécoms et avec un fort potentiel en termes de pénétration de
produits »31.
Soulignons enfin les risques que peuvent causer de telles publicités. En effet, « l’utilisation
d’images d’enfants ou d’adolescents est devenue un sujet particulièrement inquiétant ces
dernières années. Il a été sous-entendu que de telles images peuvent être utilisées de façon
inappropriée, ou pour atteindre les enfants et adolescents photographiés. Ce problème s’est
davantage compliqué avec l’avancement de la technologie internet et des images et des
informations plus faciles à obtenir et à diffuser »32.
4. L’image des jeunes par le biais d’Internet
Internet constitue un média particulièrement intéressant dans le cadre d’une analyse sur les
représentations des enfants et des jeunes dans les médias. En effet, d’une part, les jeunes
sont plus acteurs dans les nouveaux médias que dans les médias traditionnels. D’autre part,
on peut penser que cela a pour effet de présenter une vision moins clichée de la jeunesse
puisque les jeunes y participent d’eux-mêmes. Par exemple, par la création de blogs, on peut
montrer une réelle alternative constructive de la jeunesse. De plus, cela suggère une image
plus juste du jeune, plus sage et sérieuse que celle imaginée33.
29
Ibidem.
Ibidem.
31
C. MAKEREEL, Bienvenue chez Belgacom Papounet…, Le Soir, 12 juillet 2011, URL : www.lesoir.be
32
Child Rights Information Network, L’utilisation d’images d’enfants dans les médias, 10/07/2009, URL :
www.crin.org.
33
T. DE SMEDT, Présentation sur l’accès et l’éducation aux médias, Université d’été organisée par le CIDE,
l’IUKB, l’IDE et la DEI, Louvain-la-Neuve, juillet 2011.
30
7
En particulier, pour faire face à cette image négative des jeunes fréquemment véhiculée34, le
Délégué général de la Communauté française aux droits de l’enfant a créé le site « En Ligne
Directe »35. Ce site constitue une banque de données d’images, de sons et de textes
destinées aux acteurs du secteur mais également à tous les médias de la Fédération
Wallonie-Bruxelles afin qu’ils aient accès à une information plurielle et diversifiée sur
l’enfance et la jeunesse pour pouvoir construire, étayer ou illustrer leurs sujets. Ce blog se
veut donc être une référence en matière d’informations. Il vise à contrer le fait que trop
souvent les médias se nourrissent des médias. Les journalistes n’ont dès lors généralement
pas accès à une information juste, et partagent, entretiennent, reproduisent les clichés
d’autres confrères. La même logique transparaît dans les secteurs socioprofessionnels de
l’enfance et de la jeunesse qui s’enferment dans leur propre conception36.
Ce projet tente de s’inscrire dans l’ère des nouvelles technologies qui apparaissent plus
mobiles et faciles d’accès. En outre, les nouveaux modes de communication, comme les
blogs par exemple, sont énormément utilisés par les jeunes37.
Au final, par une telle démarche, l’objet poursuivi est entre autres (nous pensons aussi par
exemple à favoriser la participation des jeunes38) de « donner au grand public, non
seulement les enfants et les jeunes, mais aussi les adultes, une image plus conforme de
l’enfance et de la jeunesse »39. « L’objectif est donc de faire entendre une ‘autre’ voix dans le
débat citoyen et politique sur l’enfance et la jeunesse »40.
5. Conclusion et recommandations de la CODE
L’analyse de ces différents médias nous a permis de mettre en avant qu’ils ne montrent pas
une image homogène de l’enfant ou du jeune. Ainsi, si la télévision, par exemple, par le biais
des journaux télévisés, montre une image de l’enfant assez passive, Internet illustre celle
d’un jeune pouvant occuper une place active dans la société. En outre, soulignons qu’il faut
distinguer l’impact que les images peuvent avoir sur les jeunes eux-mêmes de l’impact sur le
34
Ils sont cependant des acteurs médiatiques trop souvent amenés à subir plutôt qu’à agir. Pensons
notamment au manque de place laissée pour une réelle participation des enfants.
35
Voyez www.enlignedirecte.be
36
L. GRAZIANI, « ‘En ligne directe’ : une autre voie dans le débat citoyen » in Journal du droit des jeunes, n°303,
mars 2011, p. 30.
37
Ibid., p. 31.
38
« L’objectif est de faciliter le droit d’expression et de parole des enfants et des jeunes. Ce dernier point
mérite en effet une attention particulière. L’écueil est bien connu, trop souvent on ne leur donne la parole,
qu’à propos seulement des questions qui les concernent directement et oublie qu’ils sont des citoyens avant
d’être des jeunes ou des enfants et donc potentiellement intéressés par tous les sujets de société. Quand on
parle du jeune, c’est souvent de manière émotionnelle et sensationnelle en abordant toujours les mêmes
thèmes comme la délinquance juvénile » (L. GRAZIANI, op. cit., p. 30).
39
L. GRAZIANI, op. cit.,p. 30.
40
Ibid., p. 30.
8
grand public. En effet, les stéréotypes véhiculés par le biais des médias peuvent avoir des
impacts négatifs différents sur ces deux groupes.
Rappelons en outre qu’en ce qui concerne la Convention relative aux droits de l’enfant, le
terme « média » ne se retrouve que dans l’article 17 de la Convention internationale relative
aux droits de l’enfant qui aborde la question de l’accès et de la diffusion de l’information.
Soulignons cependant que la Convention doit se penser de manière holistique, tous les
droits promus dans le texte doivent être pensés de manière indivisible. La question des
médias ne peut dès lors pas se penser indépendamment de celle de la participation, des
loisirs,… De plus, la Convention a été adoptée il y a maintenant plus de 20 ans. Depuis 1989,
beaucoup de choses ont évolué et surtout dans le domaine des médias et des nouvelles
technologies. Le défi de la Convention sera alors de s’adapter aux nouvelles technologies.
En guise de conclusion, rappelons également quelques-unes des nos principales
recommandations sur le sujet41 :
1. Soutenir les initiatives des écoles et du travail socio-culturel liées à l’éducation aux
médias.
2. Sensibiliser activement, non seulement les enfants, mais aussi les parents, aux
possibilités et aux risques des divers médias, en particulier les médias audiovisuels et
Internet.
3. Mieux protéger les enfants contre toute publicité qui leur est spécifiquement
adressée et contre les nouvelles techniques publicitaires. Etendre aux chaînes privées
les règles valables pour les chaînes publiques qui sont destinées à protéger les
enfants.
4. Garantir le droit à la vie privée des enfants et des jeunes qui participent à des
programmes de télévision et utilisent Internet.
5. Garantir l’accès à l’éducation aux médias à tous les enfants. Dans ce cadre, une
attention particulière doit être accordée aux enfants les plus vulnérables.
6. Encourager activement une image positive des mineurs. Valoriser une représentation
conséquente des enfants et des jeunes dans les médias et une vigilance accrue en
termes d’images et de stéréotypes négatifs des jeunes.
7. Dans le cadre de la formation des journalistes, intégrer des cours de déontologie, en
particulier dans la perspective des droits de l’enfant.
41
CODE, Rapport alternatif des ONG sur l’application de la Convention internationale relative aux droits de
l’enfant, op. cit., pp. 84-85.
9
Cette analyse a été réalisée par la Coordination des ONG pour les droits de l’enfant (CODE) et représente la
position de la majorité de ses membres.
La CODE est un réseau d’associations ayant pour objectif de veiller à la bonne application de la Convention
relative aux droits de l’enfant en Belgique. En font partie : Amnesty international, ATD Quart Monde, BADJE
(Bruxelles Accueil et Développement pour la Jeunesse et l’Enfance), le BICE (Bureau International Catholique de
l’Enfance) Belgique, le Conseil de la Jeunesse, DEI (Défense des enfants international) Belgique section
francophone, ECPAT (End Child Prostitution and Trafficking of Children for sexual purposes) Belgique, la Ligue
des droits de l’Homme, la Ligue des familles, Plan Belgique et UNICEF Belgique. La CODE a notamment pour
objet de réaliser un rapport alternatif sur l’application de la Convention qui est destiné au Comité des droits de
l’enfant des Nations Unies. De plus amples informations peuvent être obtenues via notre site www.lacode.be
Rue du Marché aux Poulets 30 à 1000 Bruxelles
www.lacode.be
Avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles
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