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Hémorragies digestives graves
Serious lower gastrointestinal bleeding
● L. Choné*
P O I N T S
F O R T S
P O I N T S
F O R T S
■ L’enquête étiologique des hémorragies digestives, centrée
par l’endoscopie, doit débuter très précocement, dès l’obtention d’une stabilité hémodynamique.
■ Le pronostic des hémorragies digestives est essentiellement
lié au terrain, à l’âge et aux tares associées.
■ Chez les malades présentant un ulcère à haut risque de
récidive, un traitement endoscopique doit être réalisé. Les
différentes méthodes d’hémostase endoscopique ont une efficacité globalement comparable.
■ Les traitements médicamenteux n’ont pas radicalement
modifié le pronostic des hémorragies ulcéreuses.
■ Les hémorragies par rupture de varices œsophagiennes
relèvent d’un traitement endoscopique associé à un traitement
vasoactif par voie intraveineuse, à instaurer le plus rapidement possible.
■ Les hémorragies digestives basses posent surtout des problèmes de diagnostic étiologique en raison de la difficulté et
du manque de rentabilité des explorations complémentaires.
La diverticulose et les angiodysplasies en sont les principales
étiologies.
■ Plus de 75 % des hémorragies digestives basses vont s’arrêter spontanément, mais le taux de récidive est élevé.
es hémorragies digestives aiguës restent l’une des grandes
urgences en hépato-gastroentérologie. Les étiologies
des hémorragies digestives les plus graves sont toujours
essentiellement représentées par la maladie ulcéreuse gastroduodénale et l’hypertension portale. Leur prise en charge est multidisciplinaire et fait appel aux compétences des réanimateurs, des gastroentérologues, des radiologues et des chirurgiens. Les traitements
endoscopiques et médicamenteux les plus récents ont permis
d’améliorer la prise en charge immédiate et de diminuer le risque
de récidive.
L
* Service d’hépato-gastroentérologie, CHU Nancy-Brabois, Vandœuvre-lès-Nancy.
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Dès l’admission d’un patient présentant une hémorragie digestive,
la mise en œuvre des mesures de réanimation, si elles s’avèrent
nécessaires, est un postulat incontournable. En effet, d’une part,
les critères de gravité initiaux sont d’ordre hémodynamique et,
d’autre part, l’enquête étiologique “invasive”, qui consiste le plus
souvent en la réalisation d’une endoscopie, ne pourra être effectuée dans de bonnes conditions que lorsque l’état hémodynamique
du malade sera stabilisé.
ÉVALUATION DE LA GRAVITÉ DE L’HÉMORRAGIE
ET DU PRONOSTIC
Il s’agit de la première étape de la prise en charge, qui doit être
concomitante à la mise en œuvre des mesures de réanimation.
L’anamnèse ne permet qu’une appréciation grossière de la perte
sanguine, et les signes cliniques objectifs d’hypovolémie (hypotension orthostatique, tachycardie, signes de choc, etc.) sont plus
fiables. Chez le malade non cirrhotique, le meilleur critère permettant d’évaluer l’importance de l’hémorragie est le volume de concentrés globulaires transfusés pendant les 24 premières heures pour
maintenir un état hémodynamique correct.
Les facteurs pronostiques des hémorragies digestives hautes ont
été les mieux étudiés. Une étude portant sur 335 admissions pour
hémorragie digestive haute a permis d’isoler, avant l’endoscopie,
cinq facteurs indépendants de mauvais pronostic : un taux d’hématocrite initial < 30 %, une pression systolique initiale < 100 mmHg,
la présence de sang rouge dans la sonde gastrique, la notion de
cirrhose ou la présence d’une ascite et enfin une hématémèse de sang
rouge (1). Mais la plupart des études font intervenir des critères
endoscopiques (classification de Forrest, voir infra). Le pronostic
des malades admis pour hémorragies digestives, surtout lorsqu’il
s’agit d’hémorragies hautes, dépend donc de données à la fois cliniques et endoscopiques. C’est pourquoi la tendance actuelle est
de proposer des scores faisant intervenir ces deux types de variables.
Ainsi, le score de Baylor (tableau I), associant des données objectives recueillies avant et après l’endoscopie, permet de distinguer
les patients à haut risque de récidives (31 % si score préendoscopique > 5 et score postendoscopique > 10) des patients à très faible
risque (0 % si score préendoscopique ≤ 5 et score postendoscopique ≤ 10 ; p < 0,05) (2). De même, Rockall et al. ont proposé
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
Tableau I. Score de Baylor (2).
Score
Âge (ans)
Nombre de pathologies (a)
Sévérité des pathologies
Site de l’hémorragie
Stigmates de saignement
0
< 30
0
---
---
---
1
30-49
1 ou 2
---
---
Caillot
2
50-59
---
---
---
---
3
60-69
---
---
---
Vaisseau visible
4
---
3 ou 4
Chronique (b)
Face postérieure du bulbe
---
5
≥ 70
≥5
Aiguë (c)
---
Hémorragie active
Score préendoscopique (d) =
Score endoscopique (e) =
Score postendoscopique (somme des deux scores précédents) =
(a) : somme des diagnostics, quelle que soit la sévérité de la pathologie.
(b) : antécédent de pathologie chronique (insuffisance respiratoire chronique, insuffisance cardiaque de stade III/IV, insuffisance rénale chronique nécessitant une dialyse).
(c) : pathologie aiguë sévère concomitante (ex.: infarctus du myocarde, septicémie, nécessité d’une intubation).
(d) : somme des scores pour l’âge, le nombre et la sévérité des pathologies associées.
(e) : somme des scores pour le site et les stigmates d’hémorragie.
Tableau II. Score de Rockall (3).
Score
0
1
2
3
Âge (ans)
< 60
60-79
≥ 80
---
Pouls
TA systolique
< 100
≥ 100
≥ 100
≥ 100
Comorbidité
---
---
Ins. coronarienne
Ins. cardiaque
Ins. rénale
Ins. hépatique
Métastases
Mallory-Weiss
Ulcère de type III
Absence de lésion
Tout autre diagnostic
Cancer du tractus
digestif supérieur
---
Aucun
IIc
---
Présence de sang
IIa
IIb
Ia
Ib
Diagnostic
Signe d’hémorragie récente
un score (tableau II) faisant intervenir l’âge, la présence de signes
de choc, de facteurs de comorbidité, de stigmates cliniques ou endoscopiques d’hémorragie récente et le diagnostic endoscopique (3).
L’application rétrospective de ce score à 2 531 malades issus de
registres nationaux anglais a permis de sélectionner un groupe de
malades à faible risque (score ≤ 2) représentant environ 30 % des
admissions. Dans ce groupe, les récidives étaient rares (4,3 % IC95 = 3,0-6,0) et les décès exceptionnels (0,1 % - IC95 = 0,0060,75) (4).
L’évaluation du pronostic est utile pour déterminer les modalités
de prise en charge, et en particulier pour distinguer les malades pouvant relever d’une prise en charge ambulatoire (environ 20 à 30 %)
de ceux pour lesquels l’hospitalisation s’impose (5).
DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE
ET CONDUITE THÉRAPEUTIQUE
La première étape du diagnostic étiologique consiste à localiser
la lésion par rapport à l’angle de Treitz. En pratique clinique, la
situation la plus simple est l’hématémèse, qui signe toujours une
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
< 100
lésion haute. Une rectorragie peu abondante et isolée est le plus
souvent d’origine basse. En revanche, un méléna ou une rectorragie abondante peuvent provenir d’une lésion située à un étage
quelconque du tube digestif.
HÉMORRAGIES DIGESTIVES HAUTES (HDH)
Les HDH représentent 80 % à 90 % de l’ensemble des hémorragies
digestives. Si la plupart d’entre elles s’arrêteront spontanément,
une récidive hémorragique peut survenir dans 12 % à 30 % des
cas pour les ulcères duodénaux, dans 25 % à 48 % des cas pour les
ulcères gastriques et dans 56 % à 70 % des cas pour les ruptures
de varices œsophagiennes.
L’interrogatoire et l’examen clinique vont rechercher des signes
d’orientation : antécédents de maladie ulcéreuse, de chirurgie abdominale, digestive ou aortique, notion d’éthylisme chronique, existence d’épigastralgies, de pyrosis, de vomissements ayant précédé
la survenue de l’hémorragie ou encore d’épisodes hémorragiques
antérieurs. L’interrogatoire définira surtout les prises médicamenteuses : AINS, aspirine, anticoagulant. L’examen clinique recher157
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chera des signes en faveur d’une cirrhose, d’une hypertension portale ainsi que des cicatrices de chirurgie abdominale. On ne pourra
cependant pas porter de diagnostic sur ces seuls éléments, puisque
environ 30 % des hémorragies digestives survenant dans un contexte
de cirrhose avérée sont dues à une maladie ulcéreuse.
L’endoscopie est donc une étape essentielle du diagnostic et souvent du traitement des hémorragies digestives hautes. Elle permet
le diagnostic dans 85 % à 96 % des cas. Dans l’idéal, la réalisation de l’endoscopie doit avoir lieu dans les 12 heures suivant
l’hémorragie index, ce qui permet de diagnostiquer une hémorragie active dans plus de 40 % des cas (6), alors que si elle est effectuée dans les 12 heures suivantes, son efficacité diminue de 30 %.
Ces recommandations anciennes restent assez théoriques pour de
nombreux centres qui ne disposent pas d’une équipe endoscopique
mobilisable à tout moment ; de plus, elles doivent certainement
être reconsidérées à l’heure où la place des traitements médicamenteux dans la prise en charge des hémorragies digestives hautes se
précise. C’est pourquoi de nombreuses équipes tentent de développer des algorithmes permettant de réduire le nombre des endoscopies réalisées en dehors des heures ouvrables (7). En cas de troubles
de la conscience, une intubation préalable peut être nécessaire du
fait du risque d’inhalation. La performance de l’endoscopie dépend
de la vacuité gastrique, et l’utilisation avant le geste de drogues
accélérant la vidange gastrique comme l’érythromycine à la dose
de 250 mg en i.v. lente (ou 3 mg/kg sur 30 minutes) est actuellement
préférée au lavage par sonde nasogastrique, car elle permet de réduire
significativement la durée de l’endoscopie et le nombre d’échecs
diagnostiques (8).
L’hémorragie ulcéreuse
Elle constitue la principale cause d’hémorragies digestives hautes
(30 % à 40 % des cas). Malgré l’utilisation larga manu des traitements médicamenteux et le développement des techniques d’hémostase endoscopique, le pronostic de ces hémorragies, qui est essentiellement lié au terrain, à l’âge et aux tares associées, reste inchangé,
avec une mortalité de 6 à 10 %.
– Endoscopie diagnostique et thérapeutique : l’endoscopie permet le diagnostic en visualisant une ulcération ainsi que des signes
d’hémorragie plus ou moins active définis selon la classification
de Forrest modifiée (9) :
I : saignement actif
Ia : saignement en jet
Ib : saignement en nappe
II : saignement récent
IIa : vaisseau visible
IIb : caillot adhérent
IIc : tache pigmentée
III : absence de stigmate d’hémorragie
Cette classification a un intérêt pronostique, puisqu’elle est corrélée au risque de récidive : 80 % à 100 % de récidive pour les hémorragies classées Ia, 40 % à 50 % pour les hémorragies IIa et de
l’ordre de 5 % pour les ulcères classés III. Bien qu’elle ait pu être
remise en question du fait d’une absence de concordance absolue
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interobservateurs (10), de la variabilité des aspects dans le temps
et sous l’effet des traitements endoscopiques (11), et de la nécessité pour certains d’y associer des critères cliniques comme dans
le score de Baylor (2), elle reste essentielle dans la stratégie décisionnelle face à un malade donné. En effet, les ulcères présentant
une hémorragie active (type I) et les ulcères qui sont le siège d’un
vaisseau visible (type IIa) nécessitent la réalisation d’un geste
d’hémostase endoscopique, puisque deux méta-analyses ont démontré l’impact d’un tel traitement sur la mortalité, le taux de récidive
et le recours à la chirurgie (12, 13). L’intérêt du traitement endoscopique pour les ulcères recouverts d’un caillot adhérent est resté
pendant longtemps source de controverses, mais une étude récente
a pu montrer une réduction significative du risque de récidive après
ablation du caillot et traitement endoscopique de la lésion sousjacente (14). En revanche, pour les lésions à moindre risque de récidive, l’hémostase endoscopique ne semble pas se justifier (9).
Différentes méthodes d’hémostase endoscopique peuvent être utilisées. Le traitement par injection est une des techniques les plus
souvent employées. Divers produits peuvent être utilisés. L’adrénaline, diluée au 1/10 000 ou au 1/20 000, associe un effet tampon
à un effet vasoconstricteur local. Malgré un pouvoir hémostatique
immédiat, son efficacité est généralement de courte durée et, de
ce fait, certains préfèrent l’utiliser comme adjuvant afin de faciliter la mise en œuvre d’autres méthodes plutôt qu’en monothérapie.
L’utilisation de grandes quantités d’adrénaline (> 10 ml) ne comporte pas d’inconvénient majeur et est associée à une réduction plus
importante du risque de récidive (15). Les agents sclérosants (alcool
absolu, polidocanol, colle biologique, sérum salé hypertonique)
provoquent un œdème et une fibrose locale et pourraient avoir un
effet plus durable, au prix cependant de risques importants de
complications locales (nécrose tissulaire étendue).
Diverses méthodes de coagulation peuvent également être utilisées.
La photocoagulation laser est la première méthode à avoir démontré son efficacité. Plus récemment, le laser argon a également été
proposé. La thermocoagulation par heater probe est très utilisée aux
États-Unis mais peu diffusée en France. Le risque de perforation
en est le principal inconvénient. L’électrocoagulation bipolaire
(BICAP) entraîne une brûlure superficielle et contrôlée avec un
risque de perforation plus faible. Son efficacité en termes d’arrêt
de l’hémorragie initiale, de réduction du risque de récidive et de
réduction du recours à la chirurgie a été démontrée.
Les méthodes mécaniques disponibles associent les clips et la ligature. La pose de clips endoscopiques s’est révélée plus efficace que
les injections in situ (16). Les ligatures élastiques couramment utilisées dans le traitement des varices hémorragiques ont également
été utilisées en cas d’hémorragies digestives d’autres origines pour
réaliser une compression mécanique.
L’efficacité de ces différentes techniques est globalement comparable. Si les injections restent pour beaucoup la méthode de choix,
tout au moins en première intention, en raison de leur facilité d’utilisation mais aussi de leur faible coût, leur association avec une
seconde méthode hémostatique (combinaison d’injections et
d’une méthode thermique ou, plus souvent, mécanique par clips)
réduit non seulement le taux de récidive mais aussi le recours à
la chirurgie et la mortalité (17). L’expérience et les habitudes de
l’opérateur restent cependant les principaux critères dans le choix
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
de la technique et jouent un rôle important dans l’obtention de
l’hémostase.
Parmi les malades traités endoscopiquement, 10 % à 30 % vont présenter une récidive hémorragique. La réalisation préventive d’une
seconde endoscopie réduit le risque de récidive de 6 %, mais sans
influencer le taux de recours chirurgical ni la mortalité (18). En
cas de récidive, une seconde hémostase endoscopique peut être
obtenue dans environ 70 % des cas. La présence de signes de choc
et l’existence d’un volumineux ulcère de plus de 2 cm sont considérés comme des facteurs prédictifs d’échec de ce second traitement
endoscopique (19).
– Traitement chirurgical : en cas de saignement actif non contrôlé
par le traitement endoscopique, une sanction chirurgicale s’impose.
Chez les malades à très haut risque opératoire, l’embolisation est
une alternative thérapeutique dont les résultats sont équivalents à
ceux de la chirurgie et dont les complications ont été largement
réduites ces dernières années grâce à l’amélioration des techniques
de radiologie interventionnelle (minicoils, etc.) (20).
– Traitements médicamenteux : les traitements médicamenteux
jouent un rôle essentiellement adjuvant dans la prise en charge initiale des ulcères hémorragiques. En effet, la plupart des hémorragies ulcéreuses vont s’arrêter spontanément. Le but du traitement
médical sera donc, à court terme, de limiter les récidives et, à long
terme, de cicatriser l’ulcère. Afin de limiter les récidives, l’objectif initial est d’obtenir la stabilité du caillot. En effet, lorsque le pH
est inférieur à 5,4, l’agrégation plaquettaire et la coagulation sont
abolies, alors que, si le pH est maintenu constamment au-dessus
de 6, le pepsinogène est inactivé de façon irréversible, permettant
la mise en place des différentes phases de la coagulation.
L’oméprazole per os, par rapport au placebo, permet de diminuer
le nombre des transfusions, le taux de récidive, de recours à la
chirurgie et la durée d’hospitalisation (21). En raison de la régénération régulière des pompes à protons et de la demi-vie courte
des IPP (50 à 60 minutes), l’administration en perfusion continue
des IPP pourrait être un schéma plus adapté aux HDH. Ainsi,
en 2000, Lau et al. mettaient en évidence une diminution significative des récidives hémorragiques chez les patients présentant un
ulcère à haut risque de récidive traités par IPP à fortes doses par
voie intraveineuse (80 mg suivis de 8 mg/h pendant 72 heures) après
obtention de l’hémostase par voie endoscopique (22). D’autres
études ont été réalisées depuis, apportant des résultats généralement
concordants vis-à-vis de l’efficacité de ce type de protocole sur la
récidive et le recours à la chirurgie, mais avec des divergences quant
à son impact sur la mortalité. Ainsi, dans une méta-analyse récente
incluant 2 915 patients, les IPP, quelle que soit leur voie d’administration, ont permis de réduire les récidives et le recours à la chirurgie, mais sans effet sur la mortalité par rapport au placebo ou aux
anti-H2 (23) ; la restriction de l’analyse aux études ayant utilisé
de fortes doses d’IPP par voie intraveineuse ne modifiait pas ces
résultats. En revanche, dans une autre méta-analyse, les IPP à fortes
doses par voie intraveineuse réduisaient significativement la récidive, le recours à la chirurgie, mais aussi la mortalité (24). Ces
divergences peuvent éventuellement trouver une explication dans
une analyse comparative qui a montré que l’efficacité des IPP est
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
plus importante sur la récidive, sur le recours à la chirurgie et sur
la mortalité dans les études réalisées en Asie que dans celles
conduites en Europe ou aux États-Unis, probablement en raison
de caractéristiques génétiques modifiant la pharmacodynamique
des IPP dans cette population (25).
Le traitement par IPP n’est pas une alternative au traitement endoscopique, puisque comparé, dans une étude asiatique, à l’association avec un traitement endoscopique, le traitement par de fortes
doses d’IPP par voie intraveineuse utilisé seul augmente les récidives et la durée d’hospitalisation (26).
La recherche et l’éradication de Helicobacter pylori est justifiée
en cas d’ulcère hémorragique afin de diminuer les récidives qui
surviendraient chez un tiers des malades infectés et non traités dans
les 1 à 2 ans suivant l’épisode initial. Il existe peu de données
concernant l’influence de l’infection à Helicobacter pylori sur la
récidive à la phase aiguë de l’ulcère hémorragique.
Parmi les autres causes d’hémorragies digestives hautes non
liées à l’hypertension portale, on retient essentiellement : les
gastrites liées ou non au stress, le syndrome de Mallory-Weiss,
l’œsophagite peptique, les ulcérations sur hernie hiatale, l’ulcération simplex de Dieulafoy et les ectasies vasculaires antrales.
La prise en charge de ces différentes pathologies ne diffère pas
en phase hémorragique de celle des ulcères. Les lésions de Dieulafoy ont la particularité d’entraîner des saignements abondants
pouvant mettre rapidement en jeu le pronostic vital. L’endoscopie
peut se révéler peu contributive, soit en raison de l’importance du
saignement, soit, si elle est réalisée après l’arrêt de l’hémorragie,
en ne mettant en évidence aucune lésion, ce qui contraste avec
l’importance du saignement et doit faire évoquer le diagnostic. Si
la lésion est identifiée, le traitement endoscopique, essentiellement
par méthode mécanique ou par l’association de deux méthodes
(injection suivie d’une pose de clips), peut alors être efficace. Dans
le cas contraire, un recours rapide à la chirurgie est alors nécessaire.
Les ectasies vasculaires antrales relèvent en premier lieu d’un
traitement endoscopique par coagulation par plasma argon.
Les hémorragies liées à l’hypertension portale
Elles représentent la deuxième grande cause d’hémorragie digestive haute (20 %). Elles peuvent être liées soit à la rupture de
varices œsocardiales ou fundiques, soit à une forme sévère de gastropathie hypertensive. Les deux tiers des hémorragies s’arrêtent spontanément, mais 60 % vont présenter une récidive précoce. En l’absence de traitement, la mortalité liée à l’épisode hémorragique varie
de 30 % à 50 %. Les facteurs prédictifs de la mortalité sont surtout
représentés par les facteurs reflétant la gravité de la cirrhose (score
de Child). La fonction rénale, un état de choc initial, une transfusion massive (> 5 culots globulaires) et une intubation trachéale sont
également des facteurs pronostiques indépendants. En revanche,
le décès est rarement lié à la perte sanguine initiale.
– Traitements vaso-actifs : le mécanisme de la rupture de varice
est de type explosif par augmentation de la pression intravariqueuse.
Si le gradient de pression portale est inférieur à 12 mmHg, le risque
de saignement est pratiquement nul. Les traitements vaso-actifs,
en diminuant la pression portale et la pression intravariqueuse,
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vont donc pouvoir arrêter l’hémorragie et diminuer le risque de
récidive. Le premier produit proposé a été la vasopressine. Son efficacité ne se limitant pas au territoire splanchnique, la vasopressine
peut être responsable de complications cardiaques non négligeables et a donc été abandonnée. Actuellement, la terlipressine lui
est préférée, car elle a une efficacité comparable et moins d’effets
délétères, mais elle nécessite la réalisation d’un électrocardiogramme avant le traitement. La posologie de la terlipressine est
de 1 à 2 mg en bolus intraveineux toutes les 4 heures. Elle permet
de stopper l’hémorragie dans environ 80 % des cas à 48 heures (27).
La terlipressine pourrait en outre avoir une influence favorable sur
la fonction rénale (28).
La somatostatine a une demi-vie brève qui impose une perfusion
intraveineuse continue à raison de 250 µg/h, précédée ou non d’un
bolus de 250 µg. Son efficacité s’est révélée équivalente à celle
de la terlipressine, pour des effets secondaires rares (29). Plus récemment, l’octréotide s’est révélé plus efficace que la vasopressine et
équivalent à la terlipressine (29). Il a l’avantage d’une demi-vie
supérieure à celle de la somatostatine et d’un coût inférieur. Le
schéma thérapeutique actuellement recommandé est de 25 µg/h
en perfusion intraveineuse continue, éventuellement précédée d’un
bolus de 50 µg. Parmi les autres analogues de la somatostatine, le
vapréotide, utilisé à la même dose que l’octréotide, peut contrôler
l’hémorragie et réduire la mortalité (30). Une des tendances actuelles
est de commencer le traitement médical le plus tôt possible, dès
l’hospitalisation, voire dès la prise en charge par l’équipe du SAMU,
d’un malade présentant une hémorragie digestive, supposée en rapport avec une hypertension portale. Le traitement vaso-actif est
poursuivi pendant 5 jours au maximum.
– Traitement endoscopique : l’association d’un traitement endoscopique et d’un traitement pharmacologique est plus efficace
qu’un traitement pharmacologique seul, et le traitement endoscopique donne de meilleurs résultats s’il est pratiqué en combinaison
avec un traitement pharmacologique (31). L’endoscopie est par
ailleurs indispensable, car elle permet d’affirmer l’origine du saignement (une hémorragie sur ulcère peptique est à l’origine d’environ 30 % des hémorragies digestives chez le cirrhotique). Le traitement endoscopique consistera soit en une sclérose soit en une
ligature, qui permettent d’obtenir l’hémostase dans environ 90 % des
cas (31). Les complications essentiellement à type d’infections et
d’ulcères sont moins fréquentes après ligature, mais cette technique
peut néanmoins s’avérer difficile chez des malades dont l’œsophage
contient de grandes quantités de sang. La sclérothérapie pourra se
révéler plus facile dans ces situations que la ligature, qui sera alors
réalisée dans les suites (31). En cas de persistance de l’hémorragie
ou de récidive précoce, une nouvelle endoscopie doit être réalisée.
Le traitement endoscopique des varices fundiques repose soit sur
la ligature soit sur l’obturation par colle chimique (cyanoacrylate),
qui permet aussi d’obtenir une hémostase dans 90 % des cas (31).
La complication la plus sévère de l’injection de colle est représentée par l’embolie systémique par migration de la colle dans les
dérivations veineuses.
– Sondes de tamponnement : les sondes de tamponnement (Blakemore ou Linton) sont actuellement réservées aux échecs des
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autres traitements, pour contrôler l’hémorragie en attendant un
traitement plus radical. En effet, bien qu’elles permettent d’obtenir l’hémostase dans 94 % des cas, elles ont été progressivement
abandonnées en raison du nombre élevé des récidives (environ 40 %)
et de leurs complications (12 %), essentiellement représentées par
les pneumopathies d’inhalation. La présence d’une encéphalopathie
augmente le risque de complications, de même que le maintien de
la sonde au-delà de 24 heures.
– Radiologie interventionnelle : le recours à la radiologie interventionnelle est indiqué chez les malades ayant eu un échec d’hémostase primaire endoscopique et pharmacologique. Ces malades
ont un pronostic désastreux, avec une mortalité supérieure à 90 %.
Le shunt intrahépatique portosystémique (TIPS) entraîne une diminution moyenne de la pression porte de 50 % et ne compromet pas
les chances de succès d’une transplantation ultérieure. Il permet
l’obtention d’une hémostase dans 95 % à 100 % des cas. Les principales complications sont l’encéphalopathie (15 % à 25 % des cas)
et la sténose, qui a pour corollaire la récidive hémorragique et qui
peut survenir dans 40 % des cas après un an (32). La mortalité
concerne surtout les patients présentant une cirrhose Child C.
– Traitements chirurgicaux : les traitements chirurgicaux consistent
soit en une chirurgie directe des varices œsophagiennes de type
transsection œsophagienne, soit en une dérivation portale. La chirurgie est, dans ces contextes d’insuffisance hépatocellulaire, grevée
d’une morbidité et d’une mortalité importantes (pouvant aller jusqu’à 90 %). La transsection œsophagienne est ainsi pratiquement
abandonnée et l’anastomose portocave chirurgicale reste éventuellement une alternative pour les malades de Child A ou B, pour
lesquels la mise en place d’un TIPS est impossible (31).
– Traitements associés : parallèlement au traitement spécifique,
l’hémorragie digestive dans un contexte d’insuffisance hépatocellulaire va nécessiter la prévention de l’encéphalopathie hépatique. Par ailleurs, de 25 % à 50 % des cirrhotiques présentent une
infection en période hémorragique, qui doit donc être systématiquement recherchée et traitée. En l’absence d’infection patente,
la mortalité des cirrhotiques par surinfection bactérienne au
décours des hémorragies digestives justifie une antibioprophylaxie
précoce. On peut proposer un traitement par fluoroquinolone,
comme la norfloxacine (800 mg par jour per os), à commencer
juste avant le geste endoscopique et à poursuivre pendant toute
la période de risque de récidive hémorragique, soit globalement
pendant 7 jours (31).
HÉMORRAGIES DIGESTIVES BASSES (HDB)
Ce chapitre rassemble l’ensemble des hémorragies dont l’origine
est située en aval de l’angle de Treitz. Elles sont 3 à 5 fois moins
fréquentes que les hémorragies digestives hautes, mais leur diagnostic étiologique est souvent plus difficile à établir. La plupart
d’entre elles s’arrêtent spontanément (80 % à 85 % des cas). Les
taux de mortalité généralement rapportés varient de 2 % à 4 %.
Les HDB surviennent plus volontiers chez les sujets âgés (âge
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
médian de 63 à 77 ans), probablement en raison de l’augmentation
de prévalence de la diverticulose colique et des angiodysplasies
coliques avec l’âge (33).
Diagnostic étiologique (figure)
Bien que relativement rarement en cause dans les HDB abondantes,
une étiologie proctologique ou rectale basse doit être recherchée
par un examen proctologique comportant une inspection de la marge
anale, un toucher rectal et une anuscopie. Cependant, l’endoscopie
est le plus souvent indispensable. En cas de méléna ou de rectorragies abondantes, en particulier en cas de choc hypovolémique, on
doit commencer par une œsogastroduodénoscopie, qui mettra en
évidence une étiologie digestive haute dans 10 à 15 % des cas. Si
aucune étiologie digestive haute n’est mise en évidence, une rectosigmoïdoscopie peut être réalisée, mais sa rentabilité est très faible
dans ce contexte (environ 10 %), et la plupart des endoscopistes
préfèrent réaliser d’emblée une coloscopie totale. Plusieurs études
ont montré que la coloscopie en urgence (dans les 12 heures) est
réalisable et efficace (34) : elle permet d’améliorer le diagnostic
et le traitement et diminue le recours à la chirurgie et la durée
d’hospitalisation. Il n’existe pas de consensus quant à la nécessité
d’une préparation colique. Cependant, une préparation correcte par
Rectorragies massives
Anamnèse, examen clinique
et réanimation
Origine digestive haute ?
NON
OUI
Coloscopie
négative
Œsogastroduodénoscopie
positive
Traitement
positive
négative,
examen correct
négative,
examen incomplet
Traitement
Hémorragie
active ?
NON
Traitement
positive
Entéroscopie
OUI
Artériographie
± traitement
± chirurgie
négative
Vidéocapsule
Figure. Algorithme pour la prise en charge des hémorragies digestives
basses (d’après Farrell et al.) (33).
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 4 - vol. VIII - juillet-août 2005
3 à 6 l de PEG (au mieux jusqu’à obtention d’un effluent rectal sans
selles ni caillot) permet d’améliorer la rentabilité diagnostique
avec un taux faible de complications. La coloscopie peut apporter
le diagnostic étiologique dans 72 à 86 % des cas (34). La responsabilité d’une lésion observée en coloscopie est certaine s’il existe
un saignement actif ou des stigmates d’hémorragie récente au
niveau de cette lésion. La présence de sang dans un segment donné
du côlon n’a qu’une valeur localisatrice relative. Les derniers centimètres de l’iléon doivent être, si possible, explorés, car l’absence
de sang dans l’iléon est en faveur d’une cause colique, alors que
sa présence oriente vers une étiologie grêle ou haute.
Lorsque la coloscopie est négative, la stratégie diagnostique est
alors fonction des disponibilités locales et de l’importance de l’hémorragie : il pourra s’agir d’un scanner hélicoïdal, d’une entéroscopie, d’un examen par vidéocapsule, d’une scintigraphie aux
hématies marquées au 99 mTc ou d’une artériographie. Ces deux
derniers examens ne seront contributifs que s’ils sont réalisés en
période d’hémorragie active ; or, la plupart des hémorragies sont
intermittentes ou d’un débit insuffisant. L’artériographie a une
spécificité de 100 % mais une sensibilité de seulement 30 à 47 % ;
elle peut être associée à un geste thérapeutique : l’injection d’un
traitement vaso-actif (vasopressine ou, plus récemment, terlipressine) permet de stopper le saignement dans 91 % des cas, mais
elle est suivie d’une récidive dans 50 % des cas, ainsi que d’importants effets secondaires (33). L’embolisation utilisant des
cathéters de large calibre est associée à la survenue d’une ischémie
colique dans 13 à 33 % des cas. L’utilisation de microcathéters et
de minicoils permet de conserver une efficacité de 44 à 91 % sans
complication ischémique majeure. La scintigraphie est plus sensible que l’artériographie, mais moins spécifique ; elle est bien
tolérée, et son efficacité varie de 24 à 91 %. L’entéroscopie est
indiquée en cas de négativité de la gastroscopie et de la coloscopie,
mais son champ d’exploration se limite généralement aux 60 cm
proximaux du jéjunum. L’exploration par vidéocapsule permet
l’identification de l’origine de l’hémorragie dans 55 à 65 % des
cas (33).
Si, malgré la persistance d’un saignement abondant, ces examens
sont négatifs, une prise en charge chirurgicale est nécessaire. Dans
ces situations, la mortalité globale est de 10 %. Celle-ci augmente
avec l’âge et l’absence de localisation préopératoire du site hémorragique (33).
Diverticulose colique
Malgré des explorations bien conduites, le diagnostic des HDB
reste incertain dans 5 à 12 % des cas. Les causes rectocoliques
représentent 95 % des étiologies identifiées et sont surtout dominées par la diverticulose colique (20 à 50 % des cas) (33). Cependant, compte tenu de sa fréquence dans la population générale, la
principale difficulté est d’imputer l’hémorragie à la diverticulose.
Dans une étude récente, parmi les patients présentant une HDB,
l’origine diverticulaire de l’hémorragie a pu être prouvée dans
23 % des cas grâce à la réalisation précoce de la coloscopie (34).
Dans 29 % des cas, l’hémorragie était supposée être d’origine diverticulaire (présence de diverticules et absence d’autre étiologie identifiée). Parmi les patients présentant des signes d’hémorragie active
ou récente et qui ont bénéficié d’un traitement endoscopique par
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méthode thermique (coagulation bipolaire) éventuellement précédé d’une injection d’adrénaline, aucune récidive n’est survenue
sur un suivi de 30 mois et aucun traitement chirurgical n’a été nécessaire. Parmi les patients n’ayant pas reçu de traitement endoscopique, une hémicolectomie a été nécessaire chez 50 % de ceux présentant une hémorragie active, 25 % de ceux avec un vaisseau visible
et 29 % de ceux avec caillot adhérent (34). Les méthodes mécaniques (ligature, clips) ont également été proposées dans cette indication, mais sont moins souvent utilisées (33). Cependant, 75 % des
hémorragies diverticulaires cèdent spontanément. En l’absence de
traitement définitif, les récidives sont fréquentes (9 % à 1 an et
25 % à 4 ans) (33).
Les colites ischémiques
Elles surviennent principalement chez les sujets âgés dans un
contexte vasculaire. Une sanction chirugicale est rarement nécessaire et est plus souvent envisagée devant une évolution préperforative que devant un risque hémorragique.
Les colites inflammatoires sont responsables d’hémorragies sévères
dans environ 1 % des cas.
Les angiodysplasies
Elles représentent la deuxième grande cause d’HDB (12 à 35 %).
Elles peuvent être associées au rétrécissement aortique (syndrome
de Heyde), à l’insuffisance rénale et respiratoire, à la maladie de
von Willebrand et à la cirrhose, mais l’existence d’un lien significatif entre ces pathologies et les angiodysplasies reste discutée (35).
Le diagnostic est souvent difficile et l’artériographie est toujours
l’examen de référence. L’extravasation de produit de contraste n’est
visible que lorsque le débit atteint 0,5 à 3 ml/mn. La coloscopie
peut mettre en évidence des lésions non visibles en artériographie
et peut être thérapeutique essentiellement grâce aux méthodes de
coagulation (de plus en plus souvent, coagulation au plasma
argon). La récidive des épisodes hémorragiques est fréquente et peut
atteindre 50 %. Le traitement chirurgical peut se discuter pour les
hémorragies mettant en jeu le pronostic vital, mais se heurte au problème des localisations souvent multiples de ces lésions. En cas
de récidives itératives, le traitement hormonal œstroprogestatif a
été décrit comme une alternative thérapeutique possible, mais son
efficacité reste controversée (36). En cas de syndrome de Heyde,
la cure chirurgicale du rétrécissement aortique peut entraîner l’arrêt du saignement (37).
Les lésions de l’intestin grêle
Elles représentent 5 % des hémorragies digestives. Il s’agira, par
ordre de fréquence décroissante, d’angiodysplasies (70 % à 80 % des
cas), de tumeurs ou d’ulcères relevant de causes variées.
Les hémorragies après polypectomie endoscopique
Elles représentent 2 à 8 % des HDB (33). Les hémorragies précoces
sont typiquement d’origine artérielle et sont généralement contrôlables endoscopiquement par injection d’adrénaline et/ou mise en
place de clips. Les clips sont particulièrement bien adaptés aux
hémorragies dans les suites d’une mucosectomie. En cas de pédicule long, la mise en place d’un lasso peut également être envisagée.
Des hémorragies retardées sont également décrites, généralement
en rapport avec une chute d’escarre au niveau du site de polypectomie. Ces hémorragies sont généralement limitées et cèdent
spontanément dans 70 % des cas (33).
La coagulation par plasma argon est devenue le traitement de référence des rectites radiques en raison de son efficacité souvent
rapide et de sa faible morbidité.
De nombreuses autres lésions coliques peuvent être responsables
d’hémorragies digestives basses (varices coliques, colites médicamenteuses, endométriose, fistules artério-digestives, etc.), mais
sont de survenue plus anecdotique.
Les hémorragies d’origine biliopancréatique
Elles sont de diagnostic difficile, car elles sont souvent intermittentes. L’endoscopie peut visualiser du sang issu de la papille. Les
pancréatites chroniques, les cancers du pancréas, les anévrismes
de l’artère splénique, hépatique ou pancréaticoduodénale en sont
les principaux responsables, de même que les causes iatrogènes
(sphinctérotomie endoscopique, biopsie hépatique).
CONCLUSION
Les hémorragies digestives restent une urgence médicochirurgicale
engageant souvent le pronostic vital. Leur gravité est davantage
liée au terrain qu’à l’importance de l’hémorragie. La mise en œuvre
des mesures de réanimation afin d’obtenir une stabilité hémodynamique est un préalable indispensable avant d’envisager sereinement la stratégie diagnostique. En effet, les difficultés de la prise
en charge résident surtout dans le diagnostic étiologique, qui est
malaisé en raison de la surface muqueuse à explorer et de l’inaccessibilité de certaines lésions (du grêle notamment). La plupart
des lésions identifiées relèvent d’un traitement bien codifié, mais
le pronostic peut rester sombre en raison du terrain sur lequel elles
surviennent (cirrhose en particulier).
■
Mots-clés : Hémorragie digestive - Endoscopie - Hémorragie
ulcéreuse - Hypertension portale - Hémorragie digestive basse.
Keywords: Gastrointestinal bleeding - Endoscopy - Peptic ulcere bleeding - Portal hypertension - Lower gastrointestinal bleeding.
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1.
Les tumeurs rectocoliques
Elles sont le plus souvent à l’origine de saignements minimes.
Cependant, dans certaines séries d’hémorragies digestives basses
abondantes, les tumeurs coliques ont pu représenter 10 à 20 % des
étiologies.
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