Voyage au centre d`une chorale - Le Choeur de Saint

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Voyage au centre d`une chorale - Le Choeur de Saint
Voyage au centre d'une chorale
Nous nous sommes posés de grandes questions existentielles : "Qu'est-ce qui fait courir tous ces
inconditionnels du chant collectif ? Qui sont-ils tous ces marathoniens de la vocalise qui s'égosillent
des heures durant dans les salles de répétition ? D'où sortent-ils ? Que (ou qui) viennent-ils chercher ?
Et qui sont ces chefs de chœur survoltés, ces présidents d'associations surbookés, ces secrétaires
bénévoles, ces hommes et femmes enthousiastes et débordés ? Bref, ceux qui font vivre les chorales ?
Et comment ça marche ? "
C'est pour tenter de répondre à ces questions que nous avons créé cette rubrique : "Voyage au centre
de la chorale !"
Le groupe
La chorale est une petite collectivité qui rassemble toutes sortes de
personnes. En voici quelques exemples :
Celui qui sait tout : Susceptible, il se vexe si on le surprend en flagrant délit
d'erreur (avec par exemple une ligne d'avance) et dans tous les cas, il rejette
la faute sur les autres. Car l’orgueilleux n'a jamais tort. En tout domaine, il
est infaillible. Sûr de lui, il n'écrit jamais rien sur sa partition. Il mémorise.
C'est un perpétuel auto-satisfait. En toute circonstance, il a la réponse
imparable. A tel point qu'il agace et qu'on ne lui demande jamais rien.
Le distrait : il est rarement à la bonne page. D'ailleurs, son classeur est un
fouillis indescriptible : les chants sont rangés dans n'importe quel ordre, on y trouve aussi bien la liste des
commissions. Incapable de soutenir son attention, il rêve, il oublie les départs et doit rattraper les autres en cours de
route. Il a aussi beaucoup de mal à gérer ses rendez-vous et arrive souvent en retard à la répétition. De même au
concert. Quand il chante, il a tendance à déformer. C'est son goût pour l'ornement et pour la variation. Durant les
déplacements, il perd toujours quelque chose, il oublie son classeur dans le car ou ses lunettes dans sa chambre
d'hôtel. Il n'est pas méchant, mais c'est une source d'angoisse pour le chef.
Le braillard : Il chante plus fort que tout le monde dès lors qu'il croit savoir sa partie. Au sein de la meute, cet
inconditionnel du bel canto, dépourvu du moindre sens musical, n'a qu'un seul credo : fortissimo. C'est un redoutable
concurrent pour le marteau piqueur. Le braillard est moins grave qu'une épidémie, mais fait beaucoup plus de bruit.
Le sensible : Un moindre pianissimo l'émeut, il aime la musique et souvent elle le bouleverse. Il a souvent la larme à
l’œil. Il a beaucoup de goût pour l'art et il aime aussi les gens. C'est un compagnon agréable et souvent un ami, mais
aussi un écorché vif. Au premier problème relationnel, il en perd le sommeil, il fond de cinq kilos, le monde s'écroule
autour de lui. Mais il souffre en silence. Il est discret et la musique finit par le consoler de tous ses maux.
Le râleur : Dire qu'il est constamment de mauvaise humeur relève du pléonasme. Il n'est jamais content. Il n'aime pas
la promiscuité, il n'aime pas le programme, surtout si c'est en étranger, il trouve que l'on apprend trop vite ou trop
lentement, il trouve le calendrier trop chargé ou trop maigre, sa pizza est trop crue ou trop cuite, il déteste les voyages
car il est malade, il n'aime pas sa voix non plus, et de toute façon, la tenue de concert est ridicule et il ne supporte pas
la façon de travailler du chef. Celui là qui n'aime rien, trouve toujours à redire et se demande ce qu'il fait là. Les autres
se posent la même question .....
Le sans-gêne : il a l'air de souffrir quand c'est un autre qui chante. C'est pour ça que, comme Gilbert Bécaud, il se
bouche toujours une oreille. Bruyant, il parle haut, interpelle le chef .... Chaque chorale a son sans-gêne, et elle doit
faire avec ....
L'arythmique : .... une race très répandue, surtout parmi ceux qui sont convaincus de posséder un sens inné du swing.
Car en réalité, peu de gens possèdent un bon sens du rythme. Qu'arrive une syncope, que survienne un contretemps, et
aïe ! c'est la catastrophe. Bien sûr, notre arythmique veut bien faire et pour commencer, il s'escrime à ne pas prendre
de retard. Pour cela, il anticipe sur la battue du chef. C'est alors qu'immanquablement il presse, il bouscule... Surtout si
le passage est facile. car c'est dans les endroits faciles que, sûr de lui et content de faire voir qu'il connait sa partie,
l'arythmique donne toute sa dimension. Il obtient ainsi aisément une mesure d'avance sur les autres...Dans le cas
inverse (qui rétablit l'équilibre), conscient de son handicap, l'arythmique s'efforce de ne pas presser. Il se retient, il
prend son temps. ET il le prend si bien qu'une fois de plus, il se retrouve décalé. Ce qui a cependant l'énorme avantage
de le faire terminer au même moment que les autres. C'est entre le début et la fin qu'il nage ... Ainsi, qu'il soit en
avance ou en retard, l'arythmique n'est jamais au bon endroit. Dans le meilleur des cas, le pas cadencé remplace la
pulsation.
Le touriste : On le voit de temps à autre débarquer dans la salle de répétition. On ne sait pas trop s'il fait vraiment
partie de l'équipe ou s'il accompagne quelqu'un au vestiaire. Généralement, il se contente d'écouter les autres et de
suivre sa partition, puisque, ayant raté la plupart des répétitions, il ignore quasiment tout du répertoire. Celui là aime
bien, cependant, donner son sentiment (à défaut d'un avis pertinent) sur le travail accompli et sur l'avancement de ses
collègues. Mais en tous cas soyez sûrs d'une chose : cet authentique figurant sera présent le jour du concert (pour faire
du play back) et c'est lui qui s'inclinera le plus bas pour saluer.
Le donneur de conseil : A force de l'écouter, on finit par faire les mêmes erreurs que lui. C'est lui qui, généralement,
offre généreusement son temps en faisant perdre le leur aux autres.
Le bavard : il a mis au point toute une technique lui permettant de chanter et de parler en même temps. Il épuise ses
voisins, sauf s'il trouve, dans son pupitre, un jumeau à sa mesure. Auquel cas, les deux se chargeront du bruit de fond.
Qu'il s'agisse de questions purement musicales ou de tout autre sujet, le moulin à paroles ne la ferme jamais.
Le Concert
Comment se déroule un concert ?
Le jour tant attendu du concert est arrivé. C'est la validation des efforts
accomplis, la juste récompense d'une année de labeur. C'est
l'aboutissement, la raison d'exister de la chorale (il justifie les
subventions) en même temps que l'occasion de montrer à tous ce dont
on est capable.
Car on va pouvoir prouver aux incrédules que l'on n'est pas si ignare
qu'il y parait, qu'on à su ingurgiter des pages entières de musique sans
se tromper et justifier, au passage, auprès de son conjoint, ses longues
absences répétées. Aussi au moment d'entrer sur scène, chacun
ressentira-t-il au fond de lui comme un mélange assez équilibré de
fierté et d'angoisse.
Le chef, toujours inquiet, a convoqué ses choristes deux heures avant
le lever du rideau, sachant pertinemment que la majorité d'entre eux
sera en retard. Mais peu à peu les effectifs se gonflent. Puis c'est le
moment d'entrer sur scène. En bon ordre, les choristes s'avancent alors.
C'est une file indienne un peu en accordéon, car il y en a toujours qui dorment debout ou qui ratent une marche.
Aussitôt les applaudissements se déchainent. On n'attend que le chef. Le voici en queue de peloton. Il s'avance d'un
pas assuré, lance un regard de convenance vers la salle puis tourne le dos à la salle et se plante devant ses chanteurs.
Tout le monde est prêt, concentré. Courageusement, le chef se jette à l'eau et d'un geste vigoureux donne le départ. Et
soudain, il est surpris d'entendre les premières phrases avec une justesse qu'il n'avait jusqu'alors obtenue qu'en rêve.
Consciencieux, les choristes ont le nez dans leur partition pour suivre les paroles, sinon pour lire la musique. Car
traditionnellement, ils ne regardent jamais le chef. Ce dernier fait pourtant tout ce qu'il peut pour attirer leur attention.
Sauf entre les morceaux car là, il tourne le dos aux choristes pour saluer et alors chacun se comporte à sa manière.
L'un remet de l'ordre dans ses partitions, l'autre, croyant qu'on ne l'entend pas, glisse une pertinente plaisanterie à
l'oreille de son voisin, beaucoup font un signe discret vers la salle où ils ont aperçu des amis, d'autres encore changent
de jambe, histoire de rééquilibrer leurs fameux appuis. Quelques enroués se raclent la gorge ou encore exécutent des
mouvements d'assouplissement (torsion des cervicales et extension des mandibules). Seuls, un ou deux, les yeux rivés
au plafond et la bouche entrouverte attendent placidement la suite.
De morceau en morceau, le concert avance. Certes, on a oublié les recommandations tant et tant serinées en répétition,
mais seuls le trac et l'émotion en sont la cause. Le chef se démène comme un gros ours. Se rend-il compte que ce gros
dirigeable est ingouvernable ? En toutes circonstances, il est inquiet "que vont-ils me faire maintenant ?". Et
cependant, la musique s'écoule, agréable. A l'entendre, on dirait que tout est bien réglé et que chacun sait parfaitement
sa partie.
On parvient ainsi jusqu'à l'entracte. C'est un moment particulier. On est encore tout imprégné des sons que l'on a
produits, tout fourbu des efforts que l'on a fournis, c'est un moment de détente, mais pas vraiment. L'angoisse de la
suite règne encore. Le chef tente bien quelques compliments de circonstances (à cet instant précis, il ne peut déverser
toute la fureur qui stagne en lui), il tente de rassurer : "c'était bien les altis, vous n'avez presque pas baissé ... les
basses, pas trop fort ... les sopranes, vous pouvez vous lâcher". "Et nous ?"s'inquiète un ténor. "Vous faites comme
vous pouvez" répond le chef ! Mais déjà le public a repris sa place dans la salle. Il faut y retourner. Le chef compte ses
troupes car c'est toujours ce moment que choisissent les femmes pour aller faire pipi.
Finalement la deuxième partie se déroule tant bien que mal et, enfin, le terme de la prestation arrive. Beaucoup se
relâchent déjà. Le plus dur est passé. Il ne reste plus que le grand final qu'on a répété tant de fois qu'on le connait par
cœur. Déjà le chef se détend. Un semblant de sourire se dessine sur son visage déconfit. Puis il se reprend "leur
redonner confiance, les tenir concentrés jusqu'au bout". Il donne alors la note et dans une ultime impulsion, chacun se
précipite sur l'accord libérateur. Les applaudissements fusent. On est content, chacun est satisfait de soi, d'avoir rempli
son contrat, d'avoir sur dissimuler ses hésitations par un savant art du play-back, d'avoir été applaudi. On se congratule
avec une authentique fausse modestie et surtout, on attend le verdict du chef, ses probables compliments ... il est
sûrement content lui aussi. Et en effet, le chef est content. Content d'en avoir terminé ! Mais c'était un magnifique
concert. Le public a été emballé (en France, le public aime toujours). On a déjà oublié que les ténors ont raté plusieurs
départs, que les altis ont perdu un demi-ton dans leur passage solo, que les nuances tant peaufinées en répétition ont
été sabotées, qu'on a sauté une reprise ... mais non ! c'était sublime. Et puis on n'est pas des pros, on a fait avec ses
moyens et c'était bien. Très bien pour des amateurs. Puis après une troisième mi temps libératrice, chacun rentre chez
soi, les oreilles encore pleines de cette musique et des étoiles dans les yeux.
Les 4 Voix
Dans tout chœur, il y a quatre registre vocaux : soprano, alto, ténor et basse. Eux-mêmes sont parfois divisés en deux,
ce qui conduit à des plaisanteries continuelles au sujet des premières et des deuxièmes basses. Chaque registre chante
dans une tessiture différente, et chacun a sa propre personnalité. On peut se demander pourquoi le fait de chanter des
notes différentes peut modifier le comportement. Il est vrai que cette question mystérieuse n'a pas encore fait l'objet
d'études appropriées. Il reste que les quatre registres peuvent facilement être reconnus .... et voici comment :
Les Sopranos
Les sopranos sont celles qui chantent le plus haut, ce qui leur fait croire qu'elles dominent le
monde. Elles se considèrent bafouées si on ne leur permet pas de monter au moins au fa
"d'en haut" dans n'importe quel mouvement de n'importe quelle œuvre. Lorsqu'elles y
arrivent, elles tiennent les notes au moins une fois et demie la durée requise par le
compositeur et/ou le chef de chœur, puis elles se plaignent que ça tue leur voix et que le
compositeur et le chef sont des sadiques. Bien qu'elles considèrent tous les autres registres
comme inférieurs au leur, elles ont des attitudes variées à l'égard de chacun d'eux. Les altos
sont aux sopranos ce que les seconds violons sont aux premiers violons : c'est agréable
harmonieusement, mais pas vraiment nécessaire. Toute soprano pense intimement que l'on
pourrait supprimer les altos sans changer l'essence même de l’œuvre, et elles ne
comprennent pas pourquoi il y a des gens pour chanter dans cette tessiture, c'est si
ennuyeux. En ce qui concerne les ténors, on aime bien en avoir autour de soi; En plus des
possibilités de flirt, car il est bien connu que les sopranos ne flirtent jamais avec les basses, les sopranos aiment
chanter les duos avec les ténors parce que, du haut de leur stratosphère, elles aiment les voir travailler durement pour
arriver dans une tessiture qu'elles considèrent basse à moyenne. Quant aux basses, ils chantent beaucoup trop fort, et
toujours faux (comment peut-on chanter juste dans une tessiture si basse ?) et de toute façon, il doit y avoir un
problème avec ces gens qui chantent en clé de fa. Pourtant, bien qu'elles se pâment à l'écoute des ténors, elles finissent
quand même par rentrer à la maison avec les basses.
Les Altis
Elles sont le sel du monde, du moins le croient-elles. Ce sont des personnes
simples, sérieuses et toujours présentes aux répétitions. La position des altis
est unique dans le choeur : elles ne peuvent jamais se plaindre d'avoir à
chanter trop haut ou trop bas et elles n'ignorent pas que tous les autres
pupitres trouvent la partie d'alto pitoyablement facile. Mais les altis savent
qu'il n'en est rien et que, lorsque les sopranes s'égosillent sur le la, elles
doivent chanter des passages compliqués, pleins de dièses et de bémols, avec
des rythmes impossibles que personne ne remarque parce que les sopranes
chantent trop fort (ainsi que les basses comme d'habitude). Les altis se font un malin et secret plaisir à conspirer pour
faire baisser les sopranes. Elles ont une méfiance innée à l'égard des ténors, car ils chantent presque dans la même
tessiture qu'elles, mais ils croient avoir un meilleur son. Les altis aiment les basses et elles chantent volontiers en duo
avec eux. De toute façon, le chant des basses ne sonne que dans le grondement et c'est le seul moment où elles ont
vraiment une chance de se faire entendre. Un autre sujet de plainte des altis est qu'elles sont toujours trop nombreuses.
Elles ne peuvent par conséquent jamais chanter vraiment fort.
Les Ténors
Les Ténors sont des "enfants gâtés". Avec cela, on a tout dit. Pour une seule raison : il
n'y en a jamais assez et les chefs de chœurs vendraient leur âme plutôt que de laisser
partir un ténor .... aussi mauvais soit-il ! Et puis, pour quelque obscure raison, les
quelques ténors que l'on a sont toujours réellement bons - ça va de soi et c'est l'une des
causes d'ennui dans la vie. Du coup, il n'est pas étonnant que les ténors aient toujours
une grosse tête - après tout, sans eux, qui pourrait causer la pâmoison des sopranos ? La
seule chose qui puisse déstabiliser les ténors est l'accusation (venant en principe des
basses) que l'on ne peut pas être un vrai homme et chanter si haut. De leur manière
perverse habituelle, les ténors rejettent toujours ce grief, tout en se plaignant plus fort
encore que le compositeur est un vrai sadique pour les faire chanter si haut. La relation
des ténors avec le chef est à mi-chemin entre amour et haine, car le chef leur dit
toujours de chanter plus fort ... parce qu'ils sont si peu nombreux. Depuis que l'on écrit l'histoire, on n'a jamais vu un
chef demander aux ténors de chanter moins fort dans un passage forte. Les ténors se sentent menacés d'une manière ou
d'une autre par les autres pupitres : par les sopranos parce qu'elles peuvent atteindre ces notes incroyablement hautes ;
par les altis parce qu'elles n'ont aucun problème pour chanter les notes qui sont si hautes pour eux et par les basses
parce que, bien qu'ils soient incapables de chanter plus haut qu'un mi, ils chantent suffisamment fort pour noyer les
ténors. Évidemment, les ténors préféreraient mourir que d'admettre une quelconque de ces remarques. Ajoutons un fait
peu connu : les ténors bougent leurs sourcils plus que quiconque lorsqu'ils chantent.
Les Basses
Les basses chantent les notes les plus graves. Et ceci explique cela. Ce sont des gens impassibles, dignes de confiance,
plus barbus que les autres. Les basses se sentent perpétuellement mal aimés, mais ils sont eux-mêmes convaincus que
ce sont eux qui ont la partie la plus importante (un avis partagé par les musicologues, mais certes pas par les sopranos
ou les ténors) .... même s'il s'agit de la partie la plus ennuyeuse de toutes, où ils chantent toujours la même note (ou à
la quinte) sur une page entière. Ils compensent cet ennui en chantant le plus fort possible. La plupart des basses sont
des joueurs de tuba nés. Les basses sont le seul pupitre qui puisse se plaindre régulièrement d'avoir à chanter si bas, et
ils font d'horribles grimaces lorsqu'ils essaient d'atteindre des notes très basses. Les basses sont des gens charitables,
mais leur charité n'est pas grande à l'égard des ténors, qu'ils considèrent être des poseurs finis. Les basses aiment les
altis sauf lorsque c'est en duo et que les altis ont la partie belle. Quant aux sopranis, elles sont simplement dans un
univers opposé que les basses jugent incompréhensible. Ils ne peuvent pas imaginer, quand elles font des fautes, que
l'on puisse chanter si haut et si mal. Lorsqu'une basse se trompe, les trois autres voix le couvrent, il peut alors
poursuivre tranquillement son chemin en sachant que, une fois ou l'autre, d'une manière ou d'une autre, ils se
retrouvera dans la bonne tonalité.
Le chef de chœur
A tout seigneur, tout honneur : faisons connaissance avec le chef de chœur.
Qui est cet homme ou cette femme qui nous mène à la baguette et
comment fonctionne-t-il ?
Dans pas mal de cas, le chef de chœur est un musicien compétent, doté
d'une très grande capacité de persévérance. Certes, il est parfois bizarre,
mais c'est un artiste ... Qu'il soit devenu chef par vocation, par une volonté
ferme et déterminée de diriger un chœur, par un concours de circonstances
ou par le plus grand des hasards, qu'il soit chanteur sur le déclin ou jeune
prof de musique dans un collège de banlieue, qu'il soit bénévole ou
rémunéré, il est avant tout un être travailleur, un utopiste ambitieux et,
surtout une personne extrêmement patiente. Il doit savoir supporter
beaucoup de choses très agaçantes. Et il ne peut même pas se permettre
d'être rancunier ! Pour accomplir sa tâche, il doit avoir un moral très
solide. Et s'il lui arrive de se montrer arrogant ... c'est le surmenage. Car, le
plus souvent, il sait être indulgent.
Parmi les nombreuses responsabilités qui lui incombent, nous citerons en vrac : le recrutement des choristes, le choix
du répertoire (qui devra plaire tout en restant accessible : le chef devra là résister à l'enthousiasme des inconscients
autant qu'à l'inertie des pessimistes), l'élaboration d'une saison équilibrée (avec des concerts qu'il faudra par la suite
honorer), l'organisation des répétitions, la planification du travail (car il faut anticiper les délais d'apprentissage),
l'animation du groupe (il doit aussi savoir faire le boute-en-train). Tout ça, le chef sait que ça fait partie de son job,
mais encore doit-il être psychologue (c'est lui qui doit résoudre les problèmes relationnels, ménager les susceptibilités,
flatter les amours propres, rassurer les dépressifs, tempérer les sautes d'humeur, paternaliste aussi (il doit décoincer et
encourager les timides), il doit aussi faire taire les bavards.
Bref un vrai chef de chœur est tout cela à la fois : sélectionneur, entraîneur, soigneur, éducateur, psychologue,
psychiatre. Et en plus, il doit être musicien.
Alors qu'on l'aime ou qu'on ne le supporte pas, qu'il soit respectueux ou insultant, sympa ou mal embouché, qu'il
suggère la musique ou que l'on ne comprenne rien à sa battue, le chef est le chef, il est là et il a beaucoup de boulot,
alors faut pas le faire c.... Il faut lui obéir : un point c'est tout.
Pourquoi rejoindre une chorale ?
La nouvelle famille se montre accueillante : les anciens gravitent autour des
nouveaux avec de grand sourires. Ils sont gais, prévenants .... La salle de
répétition est du reste agréable. On est à l'aise, et on se marre beaucoup. La
chorale est vraiment un lieu ouvert. Là, à chaque répétition, notre nouveau
chanteur se sent chez lui. Déjà il s'est fait des tas de copains.
Mais aussi, il a découvert les premières partitions. ET là, une chose est
apparue : le chant choral est une activité exigeante. Styles variés, termes
techniques auxquels il ne comprend rien, difficultés de rythme, hauteurs de
sons inaccessibles, phrasé, nuances, précision des attaques, justesse, articulation, texte dans des langues étrangères,
constitution d'un "son homogène", exigences d'un chef maniaque, contraintes des horaires, des programmes, longueur
des œuvres (car on chante debout), stress des concerts ... Tout cela ne va pas de soi pour le novice.
L'art n'est pas si aisé qu'il l'avait d'abord imaginé. Et, tandis que le paradis vire au purgatoire, surgit pour lui cette
angoissante énigme : "comment vais-je chanter tout ça ?"
Mais, encouragé par les anciens, le nouveau venu trouve vite la réponse : s'il est reconnu que l'on peut enseigner à lire
et écrire aux enfants sans en faire des savants ou des écrivains, on concevra aisément qu'il soit possible d'exercer un
adulte au chant sans en faire un virtuose, ni même un artiste. On ne lui en demandera pas tant. Choriste il veut être,
choriste il sera.
Rassuré, notre ami s'est donc vite intégré et il ressent maintenant les vertus bénéfiques de sa nouvelle activité. Car une
chose est indéniable : qu'elle soit vieillotte ou porteuse d'un esprit moderne, la chorale est une bonne chose. Elle
devrait d'ailleurs être remboursée par la sécurité sociale.
Car, outre l'aspect artistique, il est évident que, sur le simple plan physique, le fait d'apprendre à contrôler sa
respiration, de prendre conscience de son corps et du mécanisme phonatoire, le fait de libérer et de canaliser son
énergie en hurlant sans complexe procure un autentique bien être. Parce que le chant est vibration, il a une action
bienfaisante sur tous les atomes du corps et un choriste qui arrive fatigué à la répétition, en repart immanquablement
requinqué.
En outre, tout en défoulant le corps, le fait de chanter oxygène le cerveau. C'est un excellent remède contre le stress et
l'ankylose cérébrale.
On peut donc l'affirmer : le chant choral a au moins ce double effet bénéfique : sur le plan physique il ravigote la
carcasse et sur le plan mental, il aère les neurones.
Mais en plus, et c'est là l'aspect magique de cette pratique, le chant choral ressert les liens sociaux, il permet aux
hommes de se fréquenter (aux femmes aussi), il leur apprend à se connaître, à s'aimer ... C'est un facteur d'ouverture,
un trait d'union entre les individus.
Dans ce cas, qu'attendez vous pour rejoindre une chorale ?