Bni Mathar : priorité à la formation des jeunes
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Bni Mathar : priorité à la formation des jeunes
Bni Mathar : priorité à la formation des jeunes Selon le recensement communal de 2008, Bni Mathar compte près de 7 000 habitants dont 36% ont moins de 18 ans. Ce recensement a été réalisé dans le cadre du processus d’élaboration du PCD, et en particulier de la monographie communale, mené avec l’appui du Programme de coopération Maroc-UNICEF. Ce processus lui a permis de se doter de décideurs communaux engagés et formés dans le domaine du développement humain et des droits des enfants et des femmes. Il a suscité la mise en place d’une équipe technique opérationnelle et rompue à l’utilisation du système d’information communale (SIC). Cette équipe est composée de trois fonctionnaires communaux, d’un représentant de l’association d’équipement et de développement du douar Oulad Kaddour et d’une femme membre de la coopérative artisanale Noor. Bni Mathar, Commune amie des enfants et des jeunes Créée en 1992, la commune rurale de Bni Mathar (province de Jerada) se trouve sur les hauts plateaux de l’Oriental, à 80 kilomètres au sud de la capitale régionale Oujda. Elle se compose de 11 douars et s’étend sur 171 000 hectares, entourant la commune urbaine de Aïn Bni Mathar. La quasitotalité de la superficie est constituée de terres collectives. Les principales ressources de la commune sont l’élevage extensif d’ovins, le plus souvent de race Bni Guil, puis les cultures maraîchères et fourragères pratiquées en bour. La commune dispose de ressources en eaux considérables puisqu’elle se situe au-dessus d’une très grande nappe phréatique (40 km de diamètre). Cependant, l’agriculture irriguée reste peu pratiquée. Approuvé en octobre 2009, le PCD 2010-2015 de Bni Mathar réserve une place importante à l’amélioration de la situation des enfants et des jeunes. Certaines avancées ont déjà été réalisées dont : ❑ L’allocation de subventions pour l’achat de fournitures scolaires en faveur des enfants démunis, le fonctionnement de Dar Talib et de Dar Al Oumouma ; ❑ La distribution de 200 vélos aux enfants et jeunes éloignés de leur collège/lycée, situés à Aïn Bni Mathar ; ❑ La mise à niveau de l’école Oulad Kaddour en coopération avec la délégation du MEN : création d’une classe intégrée de préscolaire, construction de latrines séparées pour les filles et aménagement de la cour ❑ La construction d’un terrain omnisport en coopération avec la Promotion nationale ; ❑ La construction d’un mur de clôture autour du foyer féminin avec garderie d’enfants du Douar Oulad Kaddour. Il reste toutefois beaucoup à faire pour donner aux enfants et aux jeunes les meilleures chances de participer à la modernisation du tissu social et économique de la région. Pour aller plus loin et plus vite, la CR de Bni Mathar a signé la Charte d’engagement pour l’obtention du titre Commune amie des enfants et des jeunes en novembre 2009. Encouragée par un président de commune jeune et dynamique, appuyée par le programme de coopération Maroc-UNICEF et la Province de Jerada, l’équipe technique communale s’est mobilisée pour : ❑ Réaliser un diagnostic sur la situation des enfants et des jeunes selon les normes internationales ; ❑ Élaborer le plan d’action visant à adapter la gouvernance locale à la construction des neuf piliers de la CAEJ ; ❑ Encadrer le processus visant la formation du Conseil communal des enfants et des jeunes, dont les membres ont été élus pour six ans le 24 décembre 2010 ; ❑ Appuyer un projet de formation des jeunes prometteur pour l’avenir du secteur de l’élevage. L’équipe envisage aussi la création d’une Commission Enfants et Jeunes impliquant toutes les parties prenantes ainsi que la création d’une association locale d’appui au projet CAEJ. Un projet phare : former une nouvelle génération d’éleveurs A Bni Mathar, la priorité des priorités est de valoriser le potentiel et les ressources humaines locales, à commencer par les enfants d’éleveurs. D’où la mise en œuvre de projets de formation par apprentissage, adaptés aux capacités et au profil de ces filles et garçons du terroir. Grâce à une initiative de la CR de Bni Mathar, du Centre de qualification agricole de Bouchtat (Oujda) et de la Chambre d’agriculture de la région de l’Oriental, plusieurs dizaines de jeunes, filles et garçons, ont ainsi été formés aux techniques modernes de l’élevage des ovins. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du Plan Maroc Vert du Ministère de l’Agriculture et du Programme d’urgence du Ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, qui prévoit la formation de 60 000 filles et fils d’agriculteurs d’ici 2012. Elle répond à la fois à la nécessité d’intégrer les nouvelles générations d’actifs à l’économie productive et au besoin de moderniser le secteur de l’élevage, jusqu’ici dominé par des opérateurs âgés et analphabètes qui entravent son évolution. La formation a été réalisée suite à la sélection de 40 candidats sachant lire et écrire, dont 32 ont obtenu un certificat de formation par apprentissage en octobre 2010. Elle a consisté, dans un premier temps, en deux mois de cours théoriques organisés de manière à laisser les apprenants poursuivre leurs activités quotidiennes dans le cadre familial. Cette phase a été suivie de six mois de stage pratique dans des coopératives d’élevage, avec l’appui de l’Association nationale des éleveurs d’ovins et caprins (ANOC). Une formation de qualité et après ? Ils ont des niveaux d’éducation très variables, entre la quatrième année primaire et le bac, et tous rêvent de changer leur monde. Bien qu’ils aient grandi dans des familles d’éleveurs, la formation leur a beaucoup appris : sur l’hygiène, la santé de l’animal, l’alimentation et l’engraissement, avec les techniques et selon les normes d’aujourd’hui. « C’était une formation de qualité, dit une jeune fille. Mais après ? » Les jeunes lauréats de Bni Mathar ne cachent pas leurs frustrations. « Nous avons appris un métier que nous aimons et nous voulons l’exercer », dit un jeune homme. Comme ses camarades, il rêve de créer sa coopérative d’engraissement d’ovins et de valorisation des produits : laine, lait, viande. Mais aujourd’hui, aucun de ces jeunes n’a les moyens d’acquérir 20 à 50 têtes pour se lancer. Pourtant, la partie n’est pas gagnée pour les jeunes lauréats. Avec ses partenaires locaux et régionaux, le directeur du Centre de qualification agricole d’Oujda, qui est aussi membre du CC de Bni Mathar, tente maintenant de les appuyer afin qu’ils développent une activité économique. qui a le pouvoir d’attribuer des terres collectives aux lauréats », dit-il. Cette phase d’accompagnement post-formative est « une expérience unique au niveau national », souligne-til. Elle consiste à aider les jeunes à lancer leur propre affaire, en créant des coopératives ou des associations d’éleveurs. Pour cela, il faut des crédits et de la terre. Dans un autre secteur, celui de la mise en valeur des savoir-faire traditionnels féminins, la commune souhaiterait également trouver des partenaires pour assurer la vente des produits et adapter les filières de la couture, de la broderie et du tapis à la demande contemporaine. Le problème n°1, c’est la terre, insiste le directeur du Centre d’Oujda. « Tous ces jeunes sont des sans-terre, alors on réfléchit à une solution. Elle pourrait venir de la Direction des affaires rurales du Ministère de l’Intérieur, En attendant, la commune a décidé d’encourager les échanges d’expériences et de technologies en envoyant les jeunes éleveurs visiter des exploitations rentables dans la région de Chefchaouen. A Bni Mathar, les doigts de fée ne manquent pas et ont conservé la mémoire des techniques d’antan. Un trésor en péril qu’il serait temps de valoriser. La plupart sont retournés aider leur famille. Avec un bagage et des idées nouvelles que leurs aînés ne semblent guère apprécier. « Souvent, les parents nous disent que nous ne sommes que des gosses et qu’ils n’ont pas de conseil à recevoir de nous », témoignent les jeunes. Or, ces éleveurs de demain entendent rompre avec les modèles traditionnels et le disent haut et fort. « Ce que je veux, c’est avoir mon indépendance pour aller de l’avant et moderniser le secteur », assure une lauréate. Saura-t-on l’y aider ? C’est ce défi que la commune et ses partenaires tentent aujourd’hui de relever. Contact : Khalid Alouani, Secrétaire général de la commune rurale de Bni Mathar, email : [email protected]