Le coin de Roger : Pouvoir de non-achat - Journal
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Journal-essentiel > Cahiers > Le prix fort > Le coin de Roger : Pouvoir de non-achat Le coin de Roger : Pouvoir de non-achat mardi 1er janvier 2008 Pouvoir de non-achat A ceux à qui ça aurait échappé en faisant le plein ou en remplissant la cuve à mazout, plusieurs sondages parus en décembre nous ont rappelé qu’en 2008, notre pouvoir d’achat allait partir en sucette. Histoire que nous profitions bien des fêtes de fin d’année pour dépenser sans compter avant de faire ceinture. A voir le contenu des caddies dans mes supermarchés préférés, j’ai plutôt l’impression que le message « mangez votre pain blanc... » est passé cinq sur cinq. Les fauchés en sursis que nous sommes en ont bien profité et les cartes de crédit ont chauffé. On avait promis une Nintendo DS au gamin pour la Noël (sauf mauvais bulletin). On a cru qu’il allait devoir patienter jusqu’à Pâques : Playstation, DS, Wii, Xbox, plus une console à trouver dans les rayons. Rupture de stock chez les fournisseurs. Et je ne vous dis pas sur le parking d’une grande surface spécialisée dans le multimédia. Fallait voir les téléviseurs écran plasma, les lecteurs de dvd, les PC PC Parti communiste s’engouffrer dans les coffres de voiture. Et dans les magasins d’alimentation ! S’il y avait des produits blancs dans les charrettes, ils étaient bien cachés par le cageot d’huîtres. C’est alors qu’arrivé à la caisse, lieu de toutes mes inspirations, je me suis mis à réfléchir au sens du mot « pouvoir d’achat ». Bien sûr, ne rien pouvoir acheter, c’est un réel problème. Mais le vrai pouvoir, n’est-il pas celui de ne PAS devoir acheter ? J’ai alors imaginé refaire le parcours inverse avec mon caddie et remettre dans les rayons les produits dont je pourrais me passer si je changeais tout simplement mon mode de vie. Pour la viande et le poisson, j’ai qu’à devenir végétarien. Les légumes, les cultiver dans mon jardin (ça me fera de l’exercice). Les œufs, élever des poules. Le lait, avoir une chèvre qui broute la pelouse et me dispense de tondeuse. La bière ? Je n’ai qu’à boire de l’eau... Du robinet. Le vin ? De l’eau, on a dit ! Le fromage ? Voir plus haut, avec le lait de chèvre. Les yaourts ? Quand on est végétarien, on n’a plus besoin de ça pour être en bonne santé. Les frites surgelées ? Sans viande avec, autant oublier tout de suite. Le film transparent ? Les légumes du jardin, on ne les emballe pas, on les cueille, Monsieur ! Le papier essuie-tout ? Et la bonne vieille « lavette », elle pue ? Le papier « cul » ? Oui bon, ça va pour cette fois mais le moins cher, hein ? La poudre à lessiver ? On lessive à l’ancienne. Sur Google, on trouve la recette pour fabriquer du savon. Les cigarettes pour ma femme ? Je m’en passe bien. Le dentifrice ? Plus de clope, plus de bibine, plus de bidoche, l’haleine du matin, ça ira déjà beaucoup mieux. L’after-shave ? Si on arrête de se raser, ça devient sans objet. Le gel pour les cheveux ? Avec quoi tu viens, chochotte, t’as qu’à te coiffer avec une tranche d’entrelardé. Les piles ? On peut très bien amener la télécommande jusqu’à la TV pour changer le programme. Et j’aurais pu continuer à rêvasser sur cette nouvelle vie formidable si je m’étais rendu compte que j’avais oublié mes sacs à commissions dans le coffre de la voiture. La caissière : « Je vous mets un « jetable » à 2 cents, Monsieur ? ». J’ai fait « oui » de la tête, honteusement. C’est promis, la nouvelle vie, je commence après-demain... Roger