Alopécie-texte 2009 TSA - Association des Techniciens en Santé

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Alopécie-texte 2009 TSA - Association des Techniciens en Santé
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Survol des désordres causant de l’alopécie (perte de poils)
Manon Paradis, DMV, MScV, Dipl ACVD,
Département de sciences cliniques, Faculté de médecine vétérinaire,
Université de Montréal, St-Hyacinthe, Québec, Canada.
1- INTRODUCTION
Une alopécie est une perte de poil, localisée ou généralisée, temporaire ou permanente. La perte de poil
résulte soit d'un traumatisme physique des poils (bris par léchage, grattage, épilation), d'un dommage ou
destruction des follicules pileux ou d'une interruption du cycle folliculaire.
L’alopécie est un motif fréquent de consultation chez les animaux de compagnie. Les causes d'alopécie
sont nombreuses, particulièrement chez le chien. Elles peuvent être soit congénitales (présente à la
naissance) ou acquises. Les alopécies acquises peuvent être d’origine infectieuse, inflammatoire ou autoinduite, ou survenir suite à des dysplasies folliculaires ou des dysendocrinies. Pour certaines de ces
entités, le diagnostic clinique pose peu de problèmes, tandis que pour d’autres, le diagnostic final peut
être difficile à trouver. Ceci est particulièrement vrai pour les dysplasies folliculaires, car plusieurs de ces
entités sont mal définies et la littérature est souvent ambiguë à leur sujet.
Par ailleurs, il arrive assez souvent qu’un chien soit présenté pour une chute abondante de poils. Dans
bien des cas, il s’agira d’une mue importante mais non pathologique et le rôle du vétérinaire sera de le
confirmer. Si effectivement il n’y a aucun processus pathologique, il devra rassurer le propriétaire et le
conseiller sur la façon de minimiser les inconvénients reliés à la chute abondante de poils (brossage
fréquents, tonte, aspirateur, etc.).
Selon la façon d'aborder les cas d'alopécie, différentes classifications peuvent être envisagées. Elles sont
cependant d'un intérêt très relatif mais permettent au clinicien d'établir des points de repère. Exemples :
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En fonction de la topographie et du mode d’apparition :
o localisée vs généralisée
o spontanée vs auto-infligée
En fonction du processus pathologique responsable des lésions alopéciques:
o alopécie inflammatoire vs non inflammatoire
En fonction du moment d'apparition:
o alopécie congénitale vs acquise
o installation rapide vs très lente et graduelle
En fonction de l'étiologie:
o alopécies traumatiques
o inflammatoires
o endocriniennes
o dysplasies folliculaires
o héréditaire
La classification illustrée dans l’algorithme suivant (utilisant le chien comme modèle) sera utilisée ici,
puisqu’elle permet d’inclure la quasi totalité des maladies alopéciantes. Toutefois, la classification de
plusieurs types d’alopécie symétrique est difficile et discutable, puisqu’il existe un chevauchement
important entre les catégories. Par exemple, une entité comme l’alopécie récidivante des flancs canine
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(ARFC) et l’alopécie-X peuvent être abordées sous les rubriques suivantes : alopécie acquise, désordre
héréditaire, dysendocrinies ou dysplasie folliculaire….
Quoi qu’il en soit, les alopécies sont des affections, dans certains cas sans conséquence grave (seulement
inesthétiques) et dans d’autres cas, le reflet d’une maladie débilitante grave. Une bonne connaissance des
pathologies alopéciantes est indispensable pour réaliser le tri de ce qui peut ou non être traité.
2- APPROCHE DIAGNOSTIQUE
Afin d'élucider le problème posé par les cas d'alopécie, il convient d'être aussi systématique que possible.
On doit d’abord procéder à une anamnèse complète et un examen physique afin de déceler la présence
d’anomalie dans d’autres organes. Par exemple, la présence concomitante de polyurie-polydipsie, un
abdomen penduleux, une gynécomastie ou une cryptorchidie peuvent grandement influencer les
procédures diagnostiques qui seront choisies.
Si l’animal présente un degré significatif de prurit, celui-ci devrait être investigué en premier. Si le prurit
est minimal ou absent, alors on doit déterminer si l’alopécie est focale, multifocale, ou symétrique et
diffuse.
On doit, de plus, observer la présence d’inflammation et/ou de lésions primaires comme des papules,
pustules, etc. Si prurit, inflammation ou lésions primaires sont présents, des raclages cutanés, cytologies,
et cultures fongiques devraient être faits initialement, afin de confirmer ou d’infirmer une dermatite à
levure, une démodécie, une dermatophytie, ou une folliculite bactérienne. Les trois dernières entités
peuvent être prurigineuses ou non prurigineuses. Les poils peuvent être endommagés suite au léchage,
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frottage, grattage. Ils peuvent également être plus facilement délogés du fait de l’infection et de
l’inflammation du follicule pileux (ces trois entités causant une «folliculite »).
Si le prurit, l’inflammation et les lésions primaires sont absents, la procédure diagnostique suivante sera
influencée par l’âge à l’apparition du problème, la race, le statut sexuel, la présence de symptômes non
dermatologiques, la couleur du pelage, etc.
Les alopécies non inflammatoires sont généralement non prurigineuses et possèdent diverses étiologies.
Quoiqu’un grand nombre soient dues à des dysendocrinies (hypothyroïdie, HAC, hyperoestrogénisme),
plusieurs ne le sont pas, et ce, malgré l’aspect évocateur de l’alopécie. Ce module s’attardera davantage
sur les alopécies symétriques/diffuses non prurigineuses (ou non-inflammatoires).
A) SIGNALEMENT ET ANAMNÈSE
• À quel âge a débuté le problème ?
• Comment cela a évolué?
• Présence de prurit ?
• Traitements antérieurs et réponse ?
• Autres problèmes et antécédents médicaux ?
• Diète ?
• Etc.
Dans certain cas, le diagnostic définitif ou au moins une liste restreinte d’hypothèses
diagnostiques peut être établi strictement grâce à l’information obtenue suite au signalement et à
l'anamnèse:
1- Âge. L’âge auquel l’alopécie a débuté peut s’avérer une information très importante.
• l’alopécie congénitale est présente à la naissance
• la démodécie est généralement présente avant l’âge de un an
• l’hypothyroïdie se développe généralement après l’âge de 3 ans
• l’HAC se développe chez le chien d’âge moyen à âgé
• plusieurs entités ont toutefois un âge d’apparition très variable
2- Historique d'apparition des lésions et évolution. Il faut tenir compte de la vitesse de
développement et de la progression de l’alopécie, s’il y a résolution spontanée ou non, et de la
présence de récidive. De plus, il faut s’informer de la présence d’un événement physiologique
et/ou pathologique, ou d’un traitement :
• l’alopécie peut survenir quelques semaines après un stress physiologique comme une
gestation ou une lactation, ou suite à un événement pathologique comme une maladie
systémique grave, un choc ou une chirurgie (défluxion télogène).
• l’alopécie peut survenir quelques jours après l’administration d’un agent cytotoxique
comme le méthotrexate et la cyclophosphamide, ou de substances toxiques comme le
sélénium, le thallium et l’arsenic (défluxion anagène), mais ceci est très rare.
• l’absence de repousse des poils après la tonte est évocatrice de l’hypothyroïdie, l’HAC, ou
de l’alopécie-X.
• la rémission spontanée est évocatrice de l’ARFC, la défluxion télogène, la défluxion
anagène ou de l’alopécie post-tonte (arrêt folliculaire) non reliée aux dysendocrinies. La
rémission spontanée d’une alopécie inflammatoire et/ou auto-infligée est évocatrice d’une
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allergie saisonnière, d’une allergie de contact, d’une démodécie localisée ou d’une
dermatophytie.
3- Prurit (alopécie auto-induite). La présence de prurit et son intensité, le fait qu’il soit résistant
ou non à une dose antiprurigineuse de glucocorticoïde, influencera grandement la liste des
hypothèses diagnostiques. Si l’animal présente un degré significatif de prurit, celui-ci devrait être
exploré en premier.
4- Race. Certaines races sont prédisposées à certaines maladies alopéciantes ; toutefois ceci ne
constitue au mieux qu’une orientation diagnostique.
• adénite sébacée : Caniche standard (royal), Akita
• hypothyroïdie : golden retriever, Doberman
5- Couleur du pelage. Ceci peut fournir de l’information très utile pour le diagnostic.
• alopécie des robes diluées
• dysplasie des follicules pileux noirs
6- Statut sexuel. Quoiqu’un nombre considérable de chiens et de chats soit stérilisé en Amérique
du Nord, il arrive, à l’occasion, qu’un animal soit présenté pour un problème d’alopécie relié à un
hyperoestrogénisme. De plus, certaines dysendocrinies (HAC, +/- hypothyroïdie) peuvent affecter
le comportement sexuel ou la fertilité chez des animaux intacts.
• tumeur fonctionnelle des cellules de Sertoli chez le chien mâle intact
• hyperoestrogénisme chez la chienne intacte (kyste ovarien ou tumeur ovarienne
fonctionnelle)
• l’absence de cycles oestraux chez la chienne peut être observée lors d’hypothyroïdie ou
d’HAC
7- Réponse aux traitements. Attention, toujours interpréter avec scepticisme et circonspection !
• les hormones thyroïdiennes (levothyroxine) peuvent stimuler la pousse de poil (quoique
généralement modeste) chez le chien euthyroïdien.
• à peu près n’importe quoi (incluant l’eau bénite) peut faire repousser le poil d’un chien
affecté d’alopécie récidivante des flancs (et plus on l’administre longtemps, plus ça risque
de faire effet!).
B) EXAMEN PHYSIQUE
• Observer à distance (amorphe, obèse, abdomen penduleux ?)
• TPR (hypothermie et bradycardie lors d’hypothyroïdie grave)
Certains symptômes non dermatologiques peuvent évoquer un désordre endocrinien :
• présence de PU/PD, polyphagie, abdomen penduleux, fonte musculaire lors d’HAC
• présence de léthargie, bradycardie et gain pondéral lors d’hypothyroïdie
• changement de comportement (libido...) gynécomastie, cryptorchidie, masse ou asymétrie
testiculaire lors de tumeur fonctionnelle des cellules de Sertoli.
C) EXAMEN DERMATOLOGIQUE
• Distribution de l’alopécie
• Autres lésions dermatologiques ?
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D) PLAN DIAGNOSTIQUE
• Une liste d’hypothèses diagnostiques hiérarchisées doit être formulée à l’aide du
signalement, de l’anamnèse et des trouvailles physiques.
• Sélectionner les procédures diagnostiques selon votre index de suspicion.
E) PROCÉDURES DIAGNOSTIQUES
• Raclages (grattages) cutanés
• Cytologies cutanées (bactéries, levures)
• Culture fongique
• Trichogramme :
o demodex ? dermatophytes ?;
o poils cassés ?
o agrégats de mélanine ?
o évaluation du stade folliculaire (ratio anagène/télogène ?)
• Biopsies cutanées
• Hématologie
• Profil biochimique (cholestérol à jeun ?, phosphatases alcalines ?)
• Urologie
• Bilans hormonaux
o T4T, TSHc ;
o Cortisol pré et post stimulation à l’ACTH ou suppression à la
dexaméthasone.
3- ALOPÉCIES CONGÉNITALES
A) HYPOTRICHOSES CONGÉNITALES
Cette anomalie se caractérise par l'absence partielle ou totale de poils dès la naissance. Cette affection
a été rapportée dans différentes races canines (Bichon frisé, caniche) et félines (Sacré de Birmanie,
Siamois). Dans certains cas, cette anomalie a fait l'objet d'une sélection afin de créer des phénotypes
nus (chien nus du Mexique, chien nu chinois, chat Sphinx, etc.).
Les follicules pileux sont généralement peu nombreux et de très petites tailles. La peau est souvent
sèche, des comédons sont fréquents. Les chiens sont souvent sensibles aux folliculites bactériennes.
4- ALOPÉCIES ACQUISES
A) ALOPÉCIES TRAUMATIQUES
1- Alopécie consécutive au prurit.
Lors de prurit, une alopécie auto-induite peut être consécutive au léchage, mordillage, grattage ou à
l’épilation. À l'examen rapproché, le poil apparaît souvent cassé à la base. Ces alopécies, focales à
étendues, sont observées lors d'hypersensibilité (dermatite atopique, allergie alimentaire, DAPP) ou
d’ectoparasitose (gale sarcoptique, otacariose).
2- Alopécie psychogénique
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Ces alopécies auto-induites peu fréquentes sont soit diffuses (chez le chat), soit focales et parfois
accompagnées d'érosion ou d'ulcère cutané (acrodermite de léchage chez le chien). Il s’agit d’un
diagnostic d’exclusion.
3- Alopécie par traction
Cette alopécie est rapportée chez les petites races de chien à poil long chez qui les propriétaires ont
l'habitude de placer une barrette sur le sommet du crâne. La traction excessive entraînerait des
altérations de la vascularisation au niveau des bulbes pilaires.
B) ALOPÉCIES INFECTIEUSES
1- Folliculite bactérienne à staphylocoque
L'alopécie s'accompagne généralement de lésions inflammatoires (érythème, papules, pustules) ou de
collerettes épidermiques et de croûtes. Toutefois, dans certain cas, la réaction inflammatoire peut
passer inaperçue, donnant seulement un aspect mité au pelage.
2- Démodécie
Lors de démodécie, une alopécie est à peu près invariablement présente et s'accompagne toujours de
lésions inflammatoires plus spécifiques. Il s’agit d’une cause fréquente d’alopécie focale ou
multifocale et, à l’occasion, généralisée chez le chien, surtout chez les jeunes.
3- Dermatophytie (teigne)
Les dermatophytes présentent un tropisme pilaire marqué. L'alopécie observée est consécutive au
dommage de la tige pilaire par des éléments fongiques et à la réaction inflammatoire du follicule
pileux. Il s’agit d’une cause fréquente d’alopécie focale ou multifocale et, à l’occasion, généralisée,
surtout chez les jeunes chats.
C) ALOPÉCIES INFLAMMATOIRES
(ces 4 entités sont inflammatoires histologiquement mais peu/pas cliniquement)
1- Vasculopathie post-vaccinale
La vasculopathie post-vaccinale, le plus souvent associée avec la vaccination antirabique, est
rencontrée à l’occasion chez le chien. Cliniquement, elle se présente comme une alopécie atrophique
généralement centrée sur le site d’injection ou très occasionnellement à distance.
2- Dermatomyosite
La dermatomyosite est une maladie héréditaire (autosomique dominante) rare rencontrée plus souvent
chez les jeunes (< 6 mois) Colley et Shetlands. Il s’agit d’une maladie inflammatoire des muscles et de
la peau caractérisée par une alopécie cicatricielle au niveau de la face et des membres (carpe, tarse,
doigts) et de la queue, et une atrophie des masséters. Le diagnostic repose sur la confirmation
histologique de changements cutanés et musculaires compatibles.
3- Alopécie areata (Pelade)
Chez le chien, l’alopecia areata est une affection rare caractérisée par des zones d’alopécie non
inflammatoire cliniquement. La tête est très souvent affectée. Une rémission spontanée est parfois
notée. Il s'agit d'une affection à médiation immunitaire, génétiquement programmée (du moins chez
l'homme, le rat et la souris) dans laquelle des anticorps sont dirigés contre la trichohyaline du follicule
pileux. Le diagnostic repose sur la confirmation histologique, consistant en une infiltration
lymphocytaire (en essaim d'abeille) sur la portion bulbaire des follicules pileux.
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4- Adénite sébacée
L'adénite sébacée est une affection peu fréquente caractérisée par de l’hypotrichose ainsi que par la
présence de squames et de manchons pilaires. Une prédisposition existe pour le Caniche standard
(royal), Akita, Samoyède et Vizla. Cependant cette dermatose a été observée chez de nombreuses
races. Les signes cliniques varient selon la race: alopécie annulaire chez les races à poil court ;
hypotrichose plus ou moins diffuse avec hyperkératose et présence de manchons pilaires chez le
Caniches et l’Akita. Le diagnostic est évoqué par l’aspect clinique et se confirme à l’aide par un
examen histologique de biopsies cutanées.
D) ALOPÉCIE ENDOCRINIENNE
Une dysendocrinie devrait être soupçonnée chez le chien adulte développant une alopécie bilatérale,
symétrique non prurigineuse caractérisée par l’absence de repousse après la tonte, une épilation facile,
l’hyperpigmentation cutanée, la présence de comédon, de surinfection bactérienne et/ou la présence
concomitante de signes cliniques systémiques. Lorsqu’une cause hormonale est considérée, le
clinicien devrait d’abord explorer l’hypothyroïdie, l’HAC ou une tumeur des cellules de Sertoli chez
un chien mâle intact.
1- Hypothyroïdie
L’hypothyroïdie se caractérise par une pléthore de signes cliniques affectant la peau et plusieurs autres
organes ou systèmes due à une déficience en hormone thyroïdienne. Toutefois, aucun signe clinique
n’est pathognomonique de l'hypothyroïdie et de plus, leur apparition est généralement très graduelle et
insidieuse.
On rapporte un problème dermatologique chez environ 80 % des chiens hypothyroïdiens.
Typiquement, les changements du pelage, habituellement d’apparition insidieuse, débuteront par un
poil sec et terne, puis clairsemé, ceci étant plus apparent en zone de friction, initialement. Une
alopécie "endocrinienne" deviendra éventuellement évidente, affectant la queue, et le chanfrein, +/- le
tronc. Toutefois, dans la vaste majorité des cas, lorsque l'alopécie est flagrante, le chien aura
indubitablement développé d'autres symptômes (léthargie, obésité, etc.). Chez certains chiens,
l’hypothyroïdie se manifestera initialement par une absence de repousse du pelage après une tonte.
La pyodermite est une complication tardive de l'hypothyroïdie et résulte de l'immuno-incompétence
consécutive à la déficience hormonale. Toutefois, pour que l'hypothyroïdie soit grave et chronique au
point d'avoir une immuno-incompétence évidente, la majorité des cas présenteront plusieurs autres
signes cliniques associés à l'hypothyroïdie incluant peut être des symptômes peu fréquents comme le
myxoedème et les otites cérumineuses.
En plus des changements dermatologiques, on peut observer des signes cliniques associés au
ralentissement du métabolisme tels la léthargie, l’obésité ou gain de poids sans polyphagie (dans
environ 50 % des cas), la faiblesse et l’intolérance à l’exercice, et l’intolérance au froid et plus
rarement, une diminution de la fréquence cardiaque et de la température corporelle.
2- Hyperadrénocorticisme (HAC, Syndrome de Cushing)
L'hyperadrénocorticisme (HAC) "naturel" est un désordre résultant d’une hypersécrétion chronique de
glucocorticoïdes causée soit par une sécrétion excessive d'ACTH ("pituitary dependent HAC, "PDH")
(~ 85-90 % des cas) ou soit une tumeur surrénalienne fonctionnelle (~ 10 % des cas). L’HAC peut
également être iatrogénique, suite à l'administration excessive de glucocorticoides (exogènes).
L’HAC est plus fréquemment diagnostiqué chez les chiens âgés de races Boxer, Boston terrier, Teckel
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et Caniche. Les signes cliniques généraux sont souvent d’apparition insidieuse et consistent en
polyurie, polydipsie, polyphagie, léthargie, abdomen penduleux et flasque, hépatomégalie,
redistribution des tissus adipeux ; atrophie musculaire et faiblesse. Les changements cutanés sont
alopécie et hyperpigmentation symétrique et bilatérale, comédons, peau mince et hypotonique,
séborrhée sèche, calcinose cutanée et susceptibilité accrue aux pyodermites.
3- Hyperoestrogénisme
L’hyperoestrogénisme est peu fréquents en Amérique du Nord car la majorité des chiens et chats (et
furets) adultes sont stérilisés. On rencontre principalement des signes cliniques reliés à des excès
d’estrogènes endogènes chez des chiennes âgées intactes avec kystes ovariens ou tumeurs ovariennes
fonctionnelles (ou recevant de l'estrogène exogène) et chez des vieux chiens mâles intacts, souvent
cryptorchides, associé à un excès d’œstrogènes produit par une tumeur des cellules de Sertoli.
Les signes cliniques sont variables et peuvent consister en une alopécie et hyperpigmentation
endocrinienne qui débute dans la région périnéogénitale et progresse antérieurement, avec ou sans
séborrhée secondaire et otite cérumineuse. Chez la chienne, on peut également observer une
hypertrophie de la vulve et gynécomastie, un cycle œstral anormal (œstrus persistant ou répété,
anoestrus prolongé) et une nymphomanie. Chez le chien mâle, environ 40 % des tumeurs des cellules
de Sertoli résultent en une alopécie et en un syndrome de féminisation (prépuce penduleux, attirance
pour les autres mâles..). Une monorchidie ou un testicule scrotal néoplasique peut être noté, ainsi
qu’une diminution de la libido et de la spermatogenèse. Une toxicité médullaire par les oestrogènes est
également possible, autant chez le mâle que la femelle.
Le diagnostic repose sur l’anamnèse, l’examen physique, la cytologie préputiale chez le mâle (idem
œstrus de chienne) et la réponse au traitement (castration ou l’hystéroovariectomie).
E) DYSPLASIES FOLLICULAIRES
1- Alopécie des robes diluées et dysplasie folliculaire des robes noires
Ces deux alopécies ne diffèrent probablement que par leur expression clinique. Ces affections sont
associées à un trouble génétique de la mélanisation. Cliniquement, une alopécie bilatérale, symétrique,
plus ou moins extensive (limitée aux zones diluées ou généralisée sur des robes unies) s’installe entre
4 et 18 mois. Graduellement, des troubles de la kératinisation (séborrhée sèche et comédons) peuvent
être observés. Une pyodermite secondaire complique souvent le tableau.
Le diagnostic clinique est aisé chez les races présentant une robe bicolore ou tricolore (par exemple:
atteinte exclusive des zones bleues ou des zones noires). Le trichogramme est très utile, puisqu'il
permet d'observer des agrégats de mélanine et une déformation caractéristique de la cuticule pilaire.
L’examen histopathologique révèle des agrégats de mélanine au sein des follicules pileux, en zone
périfolliculaire et de la tige pilaire. Avec le temps, les follicules pileux se dilatent au point de devenir
kystiques.
Aucun traitement n'est possible, mis à part l’usage d’antibiotique lors de surinfection bactérienne et de
mélatonine qui peut aider à stimuler la pousse de poils. Heureusement, l’incidence de l’alopécie des
robes diluées a fortement diminué grâce aux éleveurs (e.g. Doberman bleu) informés et
consciencieux.
2- Alopécie récidivante des flancs canine (ARFC)
L'ARFC est une entité d'étiologie inconnue qui se caractérise par des épisodes d'alopécie débutant
classiquement au niveau des flancs. Une repousse spontanée des poils quelques mois plus tard est
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observée. Cependant, une récidive sur une base annuelle est fréquente. L'ARFC se rencontre chez des
chiens de nombreuses races, mais les Boxers, Airedales Schnauzers et bouledogues anglais sont plus
souvent affectés.
L’alopécie est bilatérale non inflammatoire et non prurigineuse. La peau alopécique est souvent
hyperpigmentée. Dans la majorité des cas, l'alopécie apparaîtra entre novembre et mars (dans
l'hémisphère nord) et, en règle générale, la repousse des poils se produira spontanément entre 3 à 8
mois plus tard.
Le diagnostic d'ARFC est établi en fonction de l'anamnèse (le caractère saisonnier des signes
cliniques, le cas échéant), de l'aspect clinique des lésions cutanées et de l'image histopathologique
(dysplasie folliculaire en « pieds de sorcières ») des biopsies prélevées à l'apogée des signes cliniques.
La mélatonine semble efficace pour prévenir ou écourter les épisodes d’alopécie.
3- Alopécie-X
Le terme d'alopécie-X est apparu récemment pour décrire une des alopécies les plus obscures de la
dermatologie canine, qui affecte de manière préférentielle les races à pelage pelucheux: Chow chow,
Poméranien, Keeshond, Samoyède, Husky, Malamutes. Le problème débute par une perte des poils
primaires (avec rétention des poils secondaires) en zones de friction (autour du cou, à la face caudomédial des cuisses, sur la queue). Avec le temps (quelques mois à quelques années), les poils
secondaires deviennent clairsemés et la peau alopécique devient hyperpigmentée.
Le diagnostic repose sur l'anamnèse, l'aspect clinique, l'exclusion des autres hypothèses diagnostiques,
la biopsie cutanée (présence de « follicule en forme de flamme ») et la réponse au traitement.
L'approche thérapeutique est très empirique et les résultats non garantis. S’il s'agit d'un chien intact, la
stérilisation est préconisée, puisqu’il y a repousse des poils dans environ 50% des cas. Si l'animal est
déjà stérilisé lorsque l'alopécie s'installe, plusieurs modalités thérapeutiques sont préconisées, entre
autres la mélatonine et le Lysodren (O-P'DDD), mais il doit cependant être noté que cette dermatose
est purement cosmétique et que l’absence de traitement est également une option qui mérite d’être
considérée avec le propriétaire.
F) DIVERS
1- Défluxion télogène:
Cette alopécie est consécutive au passage synchrone de tous les follicules pileux en phase télogène
(repos). Ce syndrome peut survenir quelques semaines après un stress physiologique, comme une
gestation ou une lactation, ou suite à un événement pathologique comme une maladie systémique
grave, un choc ou une chirurgie. La guérison survient spontanément.
2- Défluxion anagène
Celle-ci est fréquente chez l’homme lors de chimiothérapie, mais n’est observée qu’occasionnellement
chez les animaux. L’alopécie peut survenir quelques jours après l’administration d’un agent
cytotoxique comme le méthotrexate et la cyclophosphamide ou plus rarement avec des substances
toxiques comme le sélénium, le thallium et l’arsenic
3- Alopécie en patron
L'alopécie en patron est une affection acquise relativement commune mais mal définie. Différents
syndromes sont décrits selon la topographie lésionnelle. Le syndrome le plus commun « Alopécie en
patron, type ventral » consiste en une alopécie siégeant à la région postauriculaire, à la face ventrale
du cou, du thorax et de l'abdomen, à l'aspect caudo-médial des cuisses. L'alopécie débute vers l'âge de
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6 mois et progresse graduellement durant l'année suivante, mais demeure localisée à ces endroits. Ce
syndrome est observé chez les Teckels, Chihuahuas, Pinschers nains, Whippets, Greyhounds, Boston
terriers et Boxers.
Un autre syndrome, « Alopécie en patron type auriculaire » se caractérise par une alopécie bilatérale
des pavillons auriculaires avec hyperpigmentation progressive cutanée. Une incidence élevée est
observée dans les races Teckels, Chihuahuas, Boston terriers, Whippets. L'alopécie, qui débute vers
l'âge de 6 à 9 mois, s'installe progressivement, mais demeure limitée aux pavillons auriculaires.
Le diagnostic repose sur l'anamnèse, l'examen dermatologique et l'exclusion des autres hypothèses
diagnostiques. L'examen histopathologique des biopsies est caractérisé par une miniaturisation des
follicules pileux. La mélatonine serait un traitement efficace dans 50-75 % des cas.
4- Alopécies néoplasiques et paranéoplasiques
De nombreuses néoplasies peuvent entraîner une alopécie focale à l'endroit où le tissu néoplasique
envahit et étouffe les follicules pileux. Lors de lymphome épithéliotropique (Mycosis fongoïdes)
l’alopécie peut être diffuse, n’étant pas cliniquement évocatrice d’une néoplasie.
Une alopécie paranéoplasique a été rapportée chez des chats âgés. Elle est généralement associée à un
adénocarcinome pancréatique ou des canaux biliaires. L’alopécie est diffuse, progresse rapidement et
la peau adopte souvent un fini luisant. L’échographie abdominale permet la visualisation de la tumeur
pancréatique ou hépatique. Le pronostic est sombre.
5 - PARTICULARITÉS DU CHAT
La majorité des alopécies symétriques du chat sont auto-induites, conséquence directe d'un léchage
excessif. Ces alopécies appartiennent à la catégorie des dermatoses prurigineuses –jusqu’à preuve du
contraire. On doit, en premier lieu, rechercher des ectoparasites, puis investiguer pour des phénomènes
allergiques. Souvent, les propriétaires de chats alopéciques ignorent que leur animal s’épile ou se rase
lui-même ; une partie de notre travail consiste donc à les en convaincre.
Rarement l’alopécie symétrique (ou multifocale) auto-induite est la conséquence d’un problème d’ordre
psychogénique. L’alopécie psychogénique est un diagnostic d’exclusion, à moins que l’anamnèse révèle
des faits flagrants (nouveau chat dans la maison, déménagement...).
Les alopécies spontanées, sans prurit ni léchage excessif sont très rares surtout lorsque la peau est
alésionelle et elles consistent en : pelade, pseudo-pelade, défluxion anagène ou télogène, démodécie et
alopécies congénitales.
Lorsque l’alopécie non prurigineuse s’accompagne de lésions érythémato-squameuses, la dermatophytie
est le diagnostic le plus probable. D’ailleurs, la recherche de dermatophytes est quasi obligatoire chez
les chats avec un problème cutané.
2009-09-29